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Décisions

CA Pau, 1re ch., 18 novembre 2025, n° 24/00637

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 24/00637

18 novembre 2025

PC/HB

Numéro 25/3134

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 18/11/2025

Dossier :

N° RG 24/00637

N° Portalis DBVV-V-B7I-IY2R

Nature affaire :

Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité

Affaire :

[Y] [S]

[F] [R]

C/

[H] [V]

[T] [B] épouse [V]

S.A.S. URETEK FRANCE

Société QBE EUROPE SA/NV

Copie exécutoire délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 18 novembre 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 16 septembre 2025, devant :

Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 804 du code de procédure civile,

Madame France-Marie DELCOURT, Conseillère,

Madame Anne BAUDIER, Conseillère,

assistés de Madame Hélène BRUNET, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTS :

Monsieur [Y] [S]

né le 20 septembre 1986 à [Localité 10]

de nationalité française

[Adresse 5]

Madame [F] [R]

née le 30 mai 1984 à [Localité 11]

de nationalité française

[Adresse 5]

Représentés par Maître Elodie MAURIAC-LAPALISSE de la SELARL MAURIAC- LAPALISSE, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMÉS :

Monsieur [H] [V]

né le 12 mars 1956 à [Localité 9]

de nationalité française

[Adresse 3]

Madame [T] [B] épouse [V]

née le 29 décembre 1956 à [Localité 7]

de nationalité française

[Adresse 3]

Représentés par Maître Olivia MARIOL de la SCP LONGIN - MARIOL, avocat au barreau de PAU, et assistés de Maître Isabelle DINGLI de la SELAS D'AVOCATS ATCM, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.S. URETEK FRANCE

immatriculée sous le n° SIREN 407 519 370, représentée par son Président Mme [J] [G]

[Adresse 2]

Société QBE EUROPE SA/NV

venant aux droits et obligations de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED à la suite du transfert de portefeuille intervenu le 1er janvier 2019, société de droit étranger immatriculée sous le n° SIREN 842 689 6156, dont le siège social se situe [Adresse 6] (BELGIQUE), et son établissement en France, [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4] (BELGIQUE)

Représentées par Maître Sophie CREPIN de la SELARL LX PAU-TOULOUSE, avocat au barreau de PAU, et assistées de Maître Emmanuelle PECHERE de AXIAL AVOCATS (AARPI), avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 15 JANVIER 2024

rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE BAYONNE

RG numéro : 21/01494

FAITS ET PROCEDURE

Selon acte authentique du 28 septembre 2017, M. [Y] [S] et Mme [F] [R] ont acquis des époux [H] [V] et [T] [B], une maison d'habitation située à [Localité 8] pour le prix de 490 000 €.

Courant février 2018, après avoir fait réaliser des travaux de pose de béton ciré dans plusieurs pièces de la maison, en remplacement du carrelage existant, les consorts [R]/[S] ont constaté l'apparition de cloques au sol puis de fissures aux murs et plafonds qu'ils ont imputées à des travaux destinés à conforter le sol sous dallage, ayant consisté en l'injection de résine expansive sous contrôle laser, réalisés en août 2014 par la SAS Uretek France.

Par actes des 16 et 30 avril 2019, les consorts [R]/[S] ont fait assigner les époux [V] et la SAS Uretek France devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bayonne aux fins d'expertise judiciaire.

Les époux [V] ont fait appeler à la cause la société QBE Insurance Europe Limited, désormais QBE Europe SA/NV, assureur de la SAS Uretek France.

Par ordonnance du 3 septembre 2019, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire, désignant M. [W] [U] pour y procéder.

Par actes du 1er septembre 2021, les consorts [R]/[S] ont fait assigner les époux [V], la SAS Uretek France et son assureur devant le tribunal judiciaire de Bayonne aux fins d'indemnisation de leurs préjudices.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 21 septembre 2021.

Par jugement du 15 janvier 2024, le tribunal judiciaire de Bayonne a :

- débouté les consorts [R]/[S] de l'ensemble de leurs demandes,

- dit n'y avoir lieu à article 700,

- débouté les parties de leurs demandes relatives aux frais irrépétibles,

- condamné les consorts [R]/[S] aux dépens d'instance, en ce compris les frais d'expertise, dont distraction au profit de la SCP ABC avocats et de Me Tourret.

Au soutien de sa décision, le tribunal a retenu :

- que tant dans le dispositif de leur assignation que dans celui de leurs conclusions, les consorts [R]/[S], s'ils sollicitent la condamnation des défendeurs au paiement de sommes, ne demandent pas, au préalable, de les déclarer responsables et sur quel fondement, soit pour faute prouvée soit sur le fondement de la responsabilité de plein droit,

- que si dans le corps de leurs conclusions, les consorts [R]/[S] évoquent différents fondements juridiques pour établir la responsabilité des défendeurs, que ce soit sur les vices cachés, le dol par réticence ou la responsabilité décennale, leurs prétentions relatives aux différents fondements de responsabilité ne sont pas récapitulées dans leur dispositif alors que le tribunal ne peut statuer, au regard de l'article 768 du code de procédure civile, que sur les prétentions énoncées au dispositif, peu important que la prétention figure dans les motifs.

M. [Y] [S] et Mme [F] [R] ont relevé appel par déclaration du 26 février 2024, critiquant le jugement dans l'ensemble de ses dispositions.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état du 2 juillet 2025.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de leurs dernières conclusions notifiées le 30 octobre 2024, M. [Y] [S] et Mme [F] [R] demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes et statuant à nouveau :

- à titre principal :

> de déclarer les époux [V] responsables des préjudices subis par eux, au titre de la garantie des vices cachés,

> de déclarer la société Uretek responsable des préjudices subis par eux au titre de l'article 1792 du code civil,

> de réduire le prix de vente de la maison qu'ils ont acquise par acte notarié du 28 septembre 2017 de 149 698,93 €, indexés en fonction de l'indice du coût de la construction à compter du dépôt du rapport d'expertise le 21 septembre 2021, correspondant au montant des travaux réparatoires,

> de condamner les époux [V] à leur rembourser cette somme,

> de condamner in solidum M. et Mme [V], la société Uretek et la société QBE Europe SA/NV à réparer leur entier préjudice et à leur verser la somme de 32 000 € au titre des frais de déménagement et relogement et celle de 50 000 € en réparation de leurs préjudices de jouissance et moral,

- à titre subsidiaire,

> de déclarer M. et Mme [V] responsables des préjudices subis par eux au titre des fautes commises dans le cadre de l'exécution déloyale du contrat,

> de déclarer la société Uretek responsable des préjudices subis par eux au titre des articles 1103 et suivants du code civil,

> de condamner in solidum M. et Mme [V], la société Uretek et la société QBE Europe SA/NV à réparer leur entier préjudice et à leur verser la somme de 149 698,93 € au titre des travaux réparatoires, indexée en fonction de l'indice du coût de la construction à compter du dépôt du rapport d'expertise le 21 septembre 2021, la somme de 32 000 € au titre des frais de déménagement et relogement et celle de 50 000 € en réparation de leurs préjudices de jouissance et moral,

- à titre infiniment subsidiaire,

> de déclarer M. et Mme [V] responsables des préjudices subis par eux au titre de l'article 1792 du code civil,

> de déclarer la société Uretek responsable des préjudices subis par eux au titre des articles 1103 et suivants du code civil,

> de condamner in solidum M. et Mme [V], la société Uretek et la société QBE Europe SA/NV à réparer leur entier préjudice et à leur verser la somme de 149 698,93 € au titre des travaux réparatoires indexée en fonction de l'indice du coût de la construction à compter du dépôt du rapport d'expertise le 21 septembre 2021, la somme de 32 000 € au titre des frais de déménagement et relogement et celle de 50 000 € en réparation de leurs préjudices de jouissance et moral,

- en toute hypothèse :

> de condamner in solidum M. et Mme [V], la société Uretek et la société QBE Europe SA/NV à leur verser la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire,

> de prononcer l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Au soutien de leurs demandes, ils font valoir, au visa de l'article 768 du code de procédure civile, des articles 1102 et suivants, 1130 et suivants, 1641 et suivants et 1231 et suivants, 1240 et 1792 du code civil, et de l'article L. 243-2 du code des assurances :

- que tant leur assignation au fond que leurs conclusions n° 2 du 6 décembre 2022 formulent expressément et précisément les moyens de fait et de droit fondant leurs prétentions, visent les pièces justificatives dans un bordereau annexé, et contiennent un dispositif récapitulant leurs prétentions et leurs fondements juridiques, de sorte qu'ils se sont conformés aux exigences de l'article 768 du code de procédure civile,

- que la réalité des désordres affectant leur bien et leur caractère décennal ne sont pas contestés,

- que les vendeurs ont engagé à leur égard leur responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés, dès lors qu'ils avaient connaissance du problème d'affaissement de la maison, pour avoir fait réaliser des travaux de confortement en 2014, et en ne faisant pas mentionner ces travaux, pourtant datant de moins de dix ans, dans l'acte de vente, ce qui est même constitutif d'une réticence dolosive, et justifie une réduction du prix d'achat à hauteur du montant des travaux chiffré par l'expert judiciaire, sur la base notamment du devis de la société Coren pour les travaux intérieurs et extérieurs, lequel est raisonnable au vu des prix du marché local actuel,

- qu'à titre subsidiaire, les agissements des époux [V] engagent leur responsabilité contractuelle du fait des fautes commises dans l'exécution déloyale du contrat, lesquelles sont directement à l'origine de leur préjudice puisqu'ils n'auraient pas acquis le bien s'ils avaient eu connaissance des désordres l'affectant,

- qu'à titre très subsidiaire, les époux [V] ont engagé à leur égard leur responsabilité décennale, ayant vendu le bien après avoir fait réaliser des travaux et étant à ce titre réputés constructeurs,

- que la responsabilité de la SAS Uretek France est engagée sur le fondement décennal et à défaut sur le fondement contractuel, dès lors que l'expert judiciaire a retenu un manquement aux règles de l'art dans l'exécution des travaux et des négligences (erreur de diagnostic, absence d'étude de sol, absence de réserve sur la pérennité des travaux), directement à l'origine de leur préjudice,

- que la société QBE Europe SA/NV ne saurait opposer des limites de garantie en l'absence de production de la police souscrite par la SAS Uretek,

- qu'ils seront contraints d'exposer des frais de déménagement et de relogement pendant la durée des travaux, évaluée à 20 mois par l'expert judiciaire,

- que les désordres, affectant la solidité et la stabilité de leur maison, la contrainte du déménagement et du relogement, et la réalisation des travaux de reprise, sont pour eux une source d'anxiété et générateurs d'un préjudice moral et de jouissance.

Dans leurs dernières conclusions dites 'récapitulatives n° 2' notifiées le 7 janvier 2025, M. [H] [V] et Mme [T] [B], intimés, demandent à la cour :

- à titre principal :

> de rejeter l'appel et l'ensemble des demandes formés par les consorts [R]/[S] à leur encontre,

> de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

> de condamner in solidum les consorts [R]/[S] à leur payer la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

> de les condamner in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire dont distraction au profit de Maître Olivia Mariol, avocat postulant,

- subsidiairement, si le jugement devait être infirmé,

> de rejeter l'appel et les demandes financières dirigées par les consorts [R]/[S] à leur encontre sur le terrain de la garantie des vices cachés,

> de rejeter l'appel et les demandes financières dirigées par les consorts [R]/[S] à leur encontre sur le terrain d'un prétendu défaut d'information non établi, et à tout le moins, non causal,

> de rejeter les réclamations financières formulées par les consorts [R]/[S] en ce qu'elles sont injustifiées dans leur principe et dans leur quantum,

- très subsidiairement,

> de réduire le montant des travaux de reprise découlant du devis de la société Coren de 108 229,43 € TTC,

> de rejeter la demande portant sur les frais de relogement à la somme de 7 200 € et les frais de déménagement à la somme de 6 088 €, ou à défaut, en réduire le coût,

> de rejeter la demande de dommages et intérêts des consorts [R]/[S] au titre de leur préjudice moral et de jouissance en ce qu'elle est injustifiée,

- à titre infiniment subsidiaire,

> de réduire le montant de la demande de dommages et intérêts des consorts [R]/[S] au titre de leur préjudice moral et de jouissance, à un préjudice de pur principe, et rejeter toutes autres demandes,

- en tout état de cause,

> de condamner in solidum la SAS Uretek France et la société QBE Europe SA/NV à avoir à leur verser, en cas de condamnations prononcées à leur encontre, des dommages et intérêts en réparation de ce préjudice, d'un montant égal aux sommes allouées aux consorts [R]/[S],

> subsidiairement, de condamner in solidum la SAS Uretek France et la société QBE Europe SA/NV à avoir à les relever et garantir indemnes de toutes sommes mises à leur charge,

> de déclarer irrecevables la SAS Uretek France et la SA QBE Europe SA/NV en leur demande nouvelle de condamnation in solidum d'avoir à les relever et garantir indemnes,

> subsidiairement, de rejeter le recours en garantie de la SAS Uretek France et la société QBE Europe SA/NV à leur encontre, en ce qu'il est totalement infondé,

> de condamner in solidum la SAS Uretek France et la société QBE Europe SA/NV à leur payer une somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

> de condamner in solidum la SA Uretek France et la société QBE Europe SA/NV aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire dont distraction au profit de Maître Olivia Mariol, avocat postulant.

Au soutien de leurs demandes, ils font valoir, au visa de l'article 564 du code de procédure civile, des articles 1641 et suivants, 1134 et 1240, 1102, 1792 et suivants, 1792-4-3 et 1231-1 du code civil :

- que le tribunal a reproché aux consorts [R]/[S] de ne pas avoir précisé leurs demandes dans leur dispositif en fonction des différents fondements juridiques invoqués, de sorte que leurs demandes n'étaient pas identifiables,

- que la garantie des vices cachés n'est pas mobilisable dès lors qu'il n'est pas démontré que les désordres et l'affaissement de la maison existaient au moment de la vente, ni qu'ils avaient connaissance de ces désordres et qu'ils les auraient volontairement dissimulés aux consorts [R]/[S], alors qu'ils ne sont pas professionnels de l'immobilier,

- qu'ils ont informé les consorts [R]/[S] de l'intervention de la SAS Uretek France et de la nature des travaux réalisés dès avant la signature de l'acte de vente,

- que les consorts [R]/[S] ne rapportent pas la preuve de manoeuvres qu'ils auraient pratiquées et qui auraient déterminé leur consentement, alors qu'au contraire, la réalisation de travaux par la SAS Uretek en 2014, et l'absence de nouveau désordre étaient de nature à les rassurer sur la solidité du bien et le caractère pérenne des réparations,

- que les désordres sont consécutifs selon l'expert judiciaire à un phénomène naturel de sécheresse auquel ils sont étrangers,

- que si les désordres engagent leur responsabilité décennale ou contractuelle, ils doivent être garantis par la SAS Uretek France, spécialiste de la consolidation des sols et de la stabilisation des bâtiments, et son assureur, dès lors que ces désordres sont exclusivement imputables aux manquements de la SAS Uretek France dans la réalisation des travaux (défaut de diagnostic, travaux réparatoires inadaptés et mal réalisés, absence d'étude de sol préalable) qui tendaient pourtant à mettre fin à l'affaissement du dallage, et n'ont pas permis une réparation pérenne,

- que les travaux de la SAS Uretek France se sont à tout le moins révélés inefficaces, ce qui engage sa responsabilité contractuelle à leur égard en cas de sommes mises à leur charge, du fait des fautes qu'elle a commises,

- que le devis de la société Coren pour la reprise des embellissements est excessif par rapport aux prix du marché et prévoit des prestations sans lien avec la reprise en sous-oeuvre, de sorte qu'il doit être écarté ou à tout le moins réduit, s'agissant en particulier de la réfection complète des revêtements de sols et du dallage alors que le devis Temsol prévoit le forage de micropieux ne nécessitant pas la démolition du sol, cette société prévoyant des raccords en sol sur percements micropieux, que la réfection des sols de la véranda alors que cette pièce n'est affectée d'aucun désordre,

- qu'il y a lieu de déduire de la durée totale du relogement des consorts [R]/[S], la durée de 'prise d'assise', nécessaire à la mise en observation de l'ouvrage, entre les travaux de reprise en sous-oeuvre et de reprise des embellissements, de sorte que la durée réelle des travaux n'est que de 6 mois,

- que la demande des consorts [R]/[S] au titre des frais de déménagement est excessive et injustifiée, alors qu'ils peuvent loger dans l'extension de la propriété,

- que les consorts [R]/[S] ne justifient pas de leur préjudice moral et de jouissance, alors que l'expert judiciaire n'a pas préconisé la réalisation de travaux en urgence, de mesures conservatoires, ni n'a interdit l'habitation du bien, de sorte que leur inquiétude ne correspond pas à la réalité, alors que la véranda et l'extension de la maison ne sont pas affectés de désordres, et qu'ils n'ont en outre entrepris aucune démarche auprès de leur assureur à tout le moins au titre de l'aggravation des désordres, malgré les deux arrêtés de catastrophe naturelle pris par la commune pour cause de sécheresse,

- que la demande de la SAS Uretek France et de son assureur tendant à être garantis par eux des condamnations qui seraient prononcées à leur encontre est irrecevable comme nouvelle en cause d'appel.

Dans leurs dernières conclusions dites 'd'intimées récapitulatives n° 2 ' notifiées le 19 décembre 2024, la SAS Uretek France et la société QBE Europe SA/NV (venant aux droits de la société QBE Insurance Europe) demandent à la cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les consorts [R]/[S] de l'intégralité de leurs demandes,

- subsidiairement :

> sur les demandes de condamnation sur le fondement décennal formulées à leur encontre, de débouter les consorts [R]/[S] et [V] de leurs demandes dirigées à leur encontre sur le fondement de la garantie décennale, en l'absence d'imputabilité des désordres aux injections qui ne sont pas causales des désordres et de confirmer en conséquence le jugement ce qu'il a débouté les consorts [R]/[S] de l'intégralité de leurs demandes,

> sur les demandes de condamnation sur le fondement contractuel formulées à leur encontre, de débouter les consorts [R]/[S] et [V] de leurs demandes dirigées à leur encontre sur le fondement contractuel, en l'absence de démonstration d'un manquement de la société Uretek à ses obligations contractuelles, qui serait en lien direct et immédiat avec la cause des désordres et les préjudices invoqués et de confirmer en conséquence le jugement ce qu'il a débouté les consorts [R]/[S] de l'intégralité de leurs demandes,

> en tout état de cause, de condamner in solidum les époux [V] à les relever et garantir indemnes des condamnations prononcées à leur encontre, notamment au titre des micropieux sous fondations, ouvrages qu'ils n'ont pas demandé à la société Uretek de traiter à l'époque,

> de débouter l'ensemble des parties, et notamment les consorts [V], de l'ensemble de leurs demandes formulées à leur encontre,

- plus subsidiairement, sur le quantum,

> de débouter les consorts [R]/[S] de leurs demandes dirigées contre elles au titre des travaux de reprise sous fondations, ouvrages extérieurs au périmètre d'intervention de la société Uretek, et des postes du devis Coren qui ne correspondent pas à des travaux directement consécutifs à la reprise en sous-'uvre,

> de débouter les consorts [R]/[S] de leur demande au titre d'un préjudice moral et de jouissance qui n'est établi ni dans son principe ni dans son montant, de même qu'au titre des frais de garde meubles injustifiée, subsidiairement le réduire à de plus justes propositions,

> en tout état de cause, de débouter les consorts [R]/[S] et [V] de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société QBE Europe SA/NV au titre du préjudice moral non couvert par les garanties, de déduire des éventuelles condamnations prononcées au titre des préjudices immatériels le montant de la franchise opposable,

- de débouter les consorts [R]/[S] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et subsidiairement la réduire à de plus justes proportions,

- de condamner tout succombant à payer à la société Uretek la somme de 5 000 € au titre de ses frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Sophie Crépin.

Au soutien de leurs prétentions, elles font valoir, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, des articles 1103 et 1231 et suivants du code civil, et de l'article 112-6 du code des assurances :

- qu'elles s'en rapportent à justice sur les motifs de contestation du jugement invoqués par les appelants,

- que l'expert judiciaire n'a pas imputé l'origine et la cause des désordres à l'intervention de la SAS Uretek France, de sorte que sa responsabilité décennale ne peut être engagée,

- qu'elle n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité contractuelle, dès lors que le traitement qu'elle a préconisé visait à remédier aux fissures telles qu'elles existaient en 2014 lors de l'établissement du devis, ce qui a donné satisfaction puisque les nouveaux désordres ne sont apparus qu'en 2018, suite aux mouvements de sols causés par les phénomènes de sécheresse, qu'elle a correctement réalisé les travaux, et que l'étude de sol n'était pas imposée,

- qu'en tout état de cause, l'absence d'étude de sol n'est pas la cause des désordres, et l'erreur de diagnostic qu'elle aurait faite ne peut aboutir à sa condamnation au paiement des travaux de reprise en sous-oeuvre des fondations, qui aurait incombé à l'époque aux époux [V],

- qu'il ne peut lui être reproché un manquement à son devoir de conseil, dès lors qu'elle n'est intervenue que pour remédier à des désordres exclusivement consécutifs à un mouvement du dallage, alors qu'aucune fissure n'était significative d'un tassement des fondations,

- qu'en tout état de cause, les griefs allégués à son encontre ne sont pas causals des désordres et des préjudices invoqués par les consorts [R]/[S],

- qu'elle ne peut être condamnée au paiement du coût des travaux de reprise en sous-oeuvre des fondations, qui étaient en dehors de son périmètre d'intervention,

- que le devis de la société Coren pour la reprise des embellissements est excessif et disproportionné, certains postes étant en outre sans lien avec son intervention,

- que la durée du relogement des consorts [R]/[S] peut être limitée à la durée des travaux, soit 6 mois,

- que la somme réclamée au titre des frais de garde-meubles n'est pas justifiée,

- que les demandes des consorts [R]/[S] au titre de leurs préjudices moral et de jouissance ne sont pas justifiées dès lors que l'expert n'a pas retenu de risque d'accident ni un péril imminent, que la maison a été et est occupée normalement malgré les désordres qui sont d'ampleur limitée,

- que les limites de garantie de la police souscrite par la SAS Uretek France auprès de la société QBE Europe SA/NV sont opposables aux tiers.

MOTIFS

Sur l'action principale des consorts [R]-[S] :

Sur la contestation des motifs du rejet des demandes retenus par le tribunal :

Le tribunal a en substance fait grief aux consort [R]-[S] d'avoir, dans le dispositif de leurs conclusions, limité leurs prétentions à des demandes de condamnation à paiement de sommes, sans avoir formulé de demandes de déclaration de culpabilité en fonction des différents fondements juridiques de responsabilité par eux invoqués.

Il doit cependant être considéré que les demandes de condamnations à paiement de sommes, formées à titre principal et à titre subsidiaire dans le dispositif des dernières conclusions des consorts [R]-[S] (pièce 16 des appelants) et le visa, en en-tête de ce même dispositif, des textes sur le fondement desquels elles sont formulées, n'imposaient pas la présentation formelle de demandes de déclarations de culpabilité, les prétentions des demandeurs étant suffisamment précises, au sens de l'article 768 du C.P.C., pour qu'il puisse être statué.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté les consorts [R]-[S] de leurs demandes, par application des dispositions de l'article 768 du C.P.C.

Sur les demandes formées contre les époux [V] :

Les consorts [R]-[S] fondent leurs demandes contre les époux [V] :

- à titre principal, sur les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil,

- à titre subsidiaire, sur les dispositions des articles 1130 et suivants du code civil,

- plus subsidiairement, sur les dispositions de l'article 1792 du code civil.

S'agissant du fondement invoqué à titre principal par les consorts [R]-[S], il doit être rappelé :

- que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus (article 1641 du code civil),

- qu'il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie (article 1643 du code civil),

- que l'acheteur a le droit de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix telle qu'elle sera arbitrée par experts (article 1644 du code civil),

- que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur (article 1645 du code civil),

- que si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente,

- que l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice (article 1648 du code civil).

En l'espèce, l'action des consorts [R]-[S] est recevable dès lors :

- que l'existence du vice caché (instabilité du sol d'assise de la construction dont les cloques affectant le revêtement de sol en béton mis en place par les acquéreurs et les fissurations murales survenues postérieurement ne sont que la conséquence) a été découverte en février 2018 avec la constatation de la présence de tiges d'injection de résine expansive dans le sol de l'habitation,

- que l'assignation en référé-expertise a interrompu le délai de forclusion édicté par l'article 1648 du code civil, jusqu'à l'ordonnance instituant la mesure d'instruction, pendant le déroulement de laquelle le délai d'action a été suspendu jusqu'au dépôt du rapport (le 21 septembre 2021), l'assignation introductive d'instance ayant en toute hypothèse été signifiée aux époux [V] le 1er septembre 2021.

Le vice n'était pas apparent au moment de la vente pour les acheteurs, profanes en matière de construction, et il est de nature à rendre la chose vendue impropre à sa destination puisque compromettant la solidité même de l'habitation, l'expert judiciaire indiquant par des conclusions qui, de ce chef, ne font l'objet d'aucune contestation technique sérieuse (page 27) que l'origine du désordre est le phénomène de retrait-gonflement des argiles constituant le sol d'assise des fondations et du dallage et la faible portance ponctuelle des sols et que le désordre est décennal du fait du défaut de solidité probable et de l'impropriété à destination évidente (page 23), l'expert judiciaire indiquant que les travaux confortatifs réalisés par la société Uretek en 2014, à la demande des époux [V], se sont révélés inefficaces.

L'acte de vente du 28 septembre 2017 contient :

- une clause d'exonération de la garantie des vices cachés (page 10) ainsi rédigée :'L'acquéreur prend le bien dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit notamment en raison des vices apparents et des vices cachés. S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel, si le vendeur, bien que non-professionnel, a réalisé lui-même les travaux, s'il est prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur'.

- une liste des travaux réalisés sur le bien vendu par les époux [V] (page 13), ne mentionnant pas les travaux de reprise en sous-oeuvre réalisés par la société Uretek courant 2014 et ne faisant état que de la construction initiale de la maison, de l'édification du garage, de la construction de la piscine, de la construction de la clôture de travaux d'extension de la maison et de fermeture des terrasses couvertes.

La connaissance par les époux [V] de l'existence du vice constitué par la faiblesse du sol d'assise de la construction au titre de laquelle ils avaient fait exécuter des travaux de reprise en sous-oeuvre est ainsi établie de même que leur mauvaise foi, au sens de l'article 1646 du code civil, par l'omission desdits travaux dans la liste des travaux relevant de la garantie décennale réalisés sur le bien vendu.

Par ailleurs, aucun élément objectif et vérifiable n'établit que les époux [V] ont, antérieurement à la signature de l'acte authentique, informé les consorts [R]-[S] de l'existence, de la nature et de la cause des travaux réalisés courant 2014 par Uretek (ce que ces derniers contestent) étant constaté que l'expert judiciaire, spécialement interrogé sur ce point, indique (page 28 du rapport définitif) : 'nous précisons ne pas avoir consigné dans nos notes et rapports le fait que les consorts [R]-[S] auraient reconnu avoir été informés des travaux réalisés par la société Uretek en 2014 par les consorts [V]'.

En outre, la seule possession par les consorts [R]-[S] du devis, de la facture et du P.V. de réception des travaux réalisés par Uretek en 2014 est insuffisante à établir de manière certaine que ces documents leur ont été remis par les époux [V] antérieurement à la signature de l'acte authentique de vente, ce qu'ils contestent, dès lors qu'il leur était possible de les obtenir par d'autres moyens, notamment auprès d'Uretek.

Il sera dans ces conditions fait droit à l'action estimatoire des consorts [R]-[S].

La réduction de prix sollicitée par les consorts [R]-[S] en application de l'article 1644 du code civil correspond à l'évaluation expertale (opérée sur la base de l'avis d'un BET géotechnique intervenu en qualité de sapiteur et de devis d'entreprises validés par l'expert) du coût des travaux de réfection dont :

- 41 469,50 € T.T.C. au titre de la reprise en sous-oeuvre (devis Alios pour 6 000 € T.T.C. pour l'étude de projet (mission G2) obligatoire et devis Temsol de 35 469,50 € T.T.C. au titre des travaux de reprise proprement dits (forage de 17 pieux extérieurs et 15 pieux intérieurs impactant l'ensemble de la surface du bâtiment principal et de ses abords immédiats),

- 108 229,43 € T.T.C. (devis Coren) au titre des travaux de reprise des zones dégradées, fissurées et fragilisées telles que constatées lors des opérations d'expertise, tenant compte des évolutions signalées en janvier 2021, l'expert ayant rejeté le poste 'drainage' en l'absence de dispositif de drainage d'origine.

Il doit être considéré, s'agissant de la contestation de l'évaluation expertale des travaux de reprise intérieure et extérieure soulevée par les époux [V] (et par les sociétés Uretek et QBE Europe SA/NV) :

- que si le forage des pieux peut être réalisé sans destruction des revêtements de sol en place, l'expert judiciaire a constaté (cf. page 9) des dégradations du sol au droit des tiges d'injection de résine expansive en 9 points répartis sur l'ensemble de la surface de l'habitation, ce qui justifie une réfection totale, avec dépose/repose du mobilier scellé (cuisine),

- que le devis Temsol (cf. schéma page 25 du rapport d'expertise) prévoit le forage de 7 micropieux extérieurs dans l'espace véranda,

- qu'aucun élément objectif et vérifiable du dossier n'établit le caractère prétendument excessif du devis Coren, corrigé et validé par l'expert judiciaire, par rapport aux prix du marché.

La cour condamnera en conséquence les époux [V], in solidum, à payer aux consorts [R]-[S] la somme de 149 698,93 € au titre de la restitution du prix prévue par l'article 1644 du code civil.

S'agissant de la demande indemnitaire complémentaire au titre de frais de relogement et de déménagement, l'expert judiciaire a :

- évalué la durée globale des travaux à 20 mois en précisant qu'une phase d'étude préalable (mission G2) de deux mois est nécessaire avant la reprise en sous-oeuvre (forage des micropieux) qui doit être suivie d'une période de 'prise d'assise' d'un an avant l'exécution des travaux de finition, soit une durée de chantier de 18 mois outre 2 mois de phase d'études,

- précisé que durant la période de prise d'assise, il est préférable de ne pas 'habiter les lieux' ce qui de fait nécessite un relogement et qu'une durée de relogement de 18 mois est à prévoir, sur la base d'un montant de loyer mensuel de 1 200 € pour une habitation comparable, au prix du marché local,

- estimé le coût du déménagement/réaménagement et de garde-meubles (sur la base d'un devis d'entreprise) aux sommes de 5 952 € (déménagement) et 156 € mensuels (garde-meubles),

- indiqué, en réponse au dernier du conseil des époux [V] du 13 septembre 2021, s'agissant de la durée de relogement, qu'il y a lieu de prendre en compte le caractère évolutif des dommages consécutifs actuels persistants, notamment intérieurs, avant le début de tous travaux (soit en phase études constituant un risque potentiel pour les habitants, l'incertitude sur le plan technique de la stabilité des ouvrages pendant la période de 'prise d'assise' justifiée pour une durée de 12 mois pour des raisons de sécurité, les nuisances et risques pour la santé et l'inconfort engendrés par les travaux de second oeuvre (démolition, peinture) en site occupé, de sorte qu'il convient pour des raisons de sécurité des habitants de retenir une durée de relogement de 20 mois.

La nécessité d'un relogement pour la durée du chantier, phase d'études comprise, est établie, en particulier pendant la période de prise d'assise, compte-tenu notamment de la survenance de nouveaux désordres après la première intervention réparatoire, afin de vérifier, sans risque pour les personnes, l'efficacité et la pérennité de la reprise en sous-oeuvre.

Par ailleurs, aucun élément n'établit la faisabilité pour une famille composée de deux parents et trois jeunes enfants de résider, sur une période de deux ans dans l'extension construite en 2002, à proximité immédiate du chantier de réfection, sans subir de manière excessive les inconvénients de celui-ci, étant en outre constaté que les époux [V] n'ont pas soumis cette proposition à l'appréciation de l'expert.

La valeur locative du bien proposée par l'expert judiciaire, n'est pas excessive compte-tenu de son standing tel que déterminable au regard des photographies figurant au dossier et des énonciations de l'acte de vente et l'expert judiciaire a validé le montant des devis de déménagement/garde-meuble qui lui ont été soumis et qui ne font l'objet d'aucune contestation sérieuse.

Le lien direct de causalité entre ces postes de préjudice financier, conséquences de la réalisation des travaux de confortement et le vice du bien vendu au titre duquel la garantie des époux [V] est due est établi et la cour condamnera les époux [V], in solidum, à payer aux consorts [R]-[S] la somme globale de 32 000 € conformément à leur demande.

L'existence d'un préjudice moral et d'un préjudice de jouissance est certaine, les consorts [R]-[S] ayant, à la date du prononcé de la présente décision, vécu pendant 93 mois depuis l'apparition des premiers désordres dans un immeuble que l'expert judiciaire n'a certes pas considéré inhabitable mais dont le risque d'atteinte à la stabilité ne peut être écarté compte-tenu du caractère évolutif des désordres.

Il sera alloué de ce chef aux consorts [R]-[S], sur la base d'une indemnité mensuelle de 250 €, la somme de 23 250 €.

En définitive, la cour condamnera les époux [V], in solidum, à payer aux consorts [R]-[S], sur le fondement des articles 1641 à 1645 du code civil, les sommes de :

- 149 698,93 € à titre de restitution du prix, indexée sur l'évolution de l'indice du coût de la construction BT 01 publié par l'INSEE , sur la base de l'indice en vigueur à la date du dépôt du rapport d'expertise et jusqu'au prononcé de la présente décision,

- 32 000 € au titre des frais déménagement, relogement et garde-meuble,

- 23 250 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral et de leur préjudice de jouissance.

Sur les demandes formées contre la S.A.S. Uretek France

et la société QBE Europe SA/NV

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté les consorts [R]-[S] de leurs demandes contre la S.A.S. Uretek France et la société QBE Europe SA/NV, quel que soit le fondement juridique invoqué, dès lors :

- que l'expert judiciaire dont l'avis sur ce point n'est pas contesté, a conclu :

> que les désordres observés sur la construction sont liés à des mouvements de sols différentiels consécutifs à des phénomènes de retrait/gonflement des argiles constituant le sol d'assise des fondations et du dallage en période de sécheresse climatique et réhydratation et probablement à la faible portance localement des sols, aggravés par la présence de végétation, l'absence ou l'insuffisance du dispositif de drainage des sols superficiels à proximité des façades et le faible ancrage des fondations,

> que les travaux d'injection réalisés par Uretek en 2014 n'ont pas permis de remédier aux désordres observés sur la construction mais n'en constituent ni l'origine ni la cause,

- que la responsabilité de la société Uretek ne peut être engagée au titre de désordres qui ne sont pas la conséquence de son intervention mais sont imputables à un défaut préexistant (en l'espèce un vice du sol d'assise) que son intervention, inefficace, n'a pu éradiquer mais n'a pas aggravés,

- que le seul préjudice en lien de causalité avec une éventuelle faute de la société Uretek dans la conception et/ou l'exécution de son intervention réside dans le coût des travaux par elle inutilement facturés dont les consorts [R]-[S] n'ont pas qualité pour demander remboursement (qu'ils ne demandent d'ailleurs pas),

- que la garantie de la société QBE Europe SA/NV n'est donc pas mobilisable.

Sur l'appel en garantie des époux [V]

contre la S.A.S. Uretek France et la société QBE Europe SA/NV :

Pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés dans le cadre de la demande des consorts [R]-[S] liés à l'absence de lien de causalité, d'une part, entre les travaux exécutés par Uretek et les éventuelles fautes qu'elle aurait pu commettre dans le cadre de la conception et/ou l'exécution desdits travaux et, d'autre part, les désordres objets du présent litige, les époux [V] seront déboutés de leur appel en garantie contre la S.A.S. Uretek et la société QBE Europe SA/NV, la réparation du seul préjudice éventuellement indemnisable en lien avec un manquement d'Uretek à ses obligations contractuelles (soit le coût de son intervention) n'étant pas demandée par les époux [V].

Il n'y a pas lieu à statuer sur la recevabilité, contestée par les époux [V], de l'appel en garantie formé par les sociétés Uretek et QBE Europe SA/NV, ni sur cet appel en garantie lui-même.

Sur les demandes accessoires :

La cour infirmera le jugement déféré en ce qu'il a condamné les consorts [R]-[S] aux dépens de première instance et, statuant à nouveau, condamnera les époux [V], in solidum aux dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Ajoutant au jugement, la cour condamnera les époux [V], in solidum, aux dépens d'appel.

L'équité commande, infirmant le jugement entrepris et y ajoutant, de condamner les époux [V], in solidum, en application de l'article 700 du C.P.C., à payer :

- aux consorts [R]-[S] la somme globale de 7 000 € au titre des frais irrépétibles par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel,

- à la S.A.S. Uretek France et à la société QBE Europe SA/NV, ensemble, la somme globale de 5 000 € au titre des frais irrépétibles par elles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi et en dernier ressort :

Vu le jugement du tribunal judiciaire de Bayonne du 15 janvier 2024,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les consorts [R]-[S] de l'ensemble de leurs demandes, au visa de l'article 768 du C.P.C., dit 'n'y avoir lieu à article 700' et condamné les consorts [R]-[S] aux dépens d'instance,

Statuant à nouveau :

Condamne les époux [C] [V] et [T] [B], in solidum, à payer Mme [F] [R] et M. [Y] [S] les sommes de :

- 149 698,93 € à titre de restitution du prix, indexée sur l'évolution de l'indice du coût de la construction BT 01 publié par l'INSEE , sur la base de l'indice en vigueur à la date du dépôt du rapport d'expertise et jusqu'au prononcé de la présente décision,

- 32 000 € au titre des frais déménagement, relogement et garde-meuble,

- 23 250 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral et de leur préjudice de jouissance,

Déboute les consorts [R]-[S] de leurs demandes contre la S.A.S. Uretek France et la société QBE Europe SA/NV,

Déboute les époux [V] de leurs demandes contre la S.A.S. Uretek France et la société QBE Europe SA/NV,

Condamne les époux [V], in solidum, aux entiers dépens tant de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, que d'appel,

Condamne les époux [V], in solidum, en application de l'article 700 du C.P.C., à payer :

- aux consorts [R]-[S], la somme globale de 7 000 € au titre des frais irrépétibes par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel,

- à la S.A.S. Uretek France et à la société QBE Europe SA/NV, ensemble, la somme globale de 5 000 € au titre des frais irrépétibles par elles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président, et par Madame Hélène BRUNET, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Hélène BRUNET Patrick CASTAGNÉ

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