CA Lyon, 6e ch., 13 novembre 2025, n° 24/04593
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 24/04593 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PWOC
Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de LYON du 27 mai 2024
RG : 10/15097
[S]
[O]
[T]
S.A. SMA
S.D.C. ENSEMBLE IMMOBILIER [Adresse 10]
C/
[Z]
[R]
[A]
S.A. BUREAU VERITAS CONSTRUCTION
S.A. GAN ASSURANCES
SA GENERALI IARD
S.A. GENERALI IARD
S.A.R.L. LAURIA FRERES
S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF)
S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
S.A. SMA SA
S.A. MMA IARD SA
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
S.A.R.L. AB SERVICES ETANCHEITE
S.A.R.L. AJ-ARCHITECTES
Compagnie d'assurance AXA FRANCE IARD
S.A. AXA FRANCE IARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 13 Novembre 2025
APPELANTS :
M. [V] [S]
né le 28 Avril 1960 à
[Adresse 16]
[Localité 25]
M. [N] [O]
né le 29 Septembre 1969 à [Localité 41]
[Adresse 2]
[Localité 23]
M. [P] [T]
né le 18 Mai 1960 à [Localité 42]
[Adresse 3]
[Localité 24]
Représentés par Me Samuel BECQUET de la SELEURL SAMUEL BECQUET AVOCAT, avocat au barreau de LYON, toque : 806
S.A. SMA
[Adresse 33]
[Localité 31]
Représentée par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, toque : 1106
assistée de Me Frédéric PIRAS de la SELARL PIRAS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
Syndicat des copropriétaires de l'Ensemble Immobilier [Adresse 12] réprésenté par son Syndic en exercice, la société FONCIA [Localité 39], dont le siège est [Adresse 14]
[Adresse 11]
[Localité 21]
Représenté par Me Julie BEUGNOT de la SELARL BERGER AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 2167
INTIMES :
M. [L] [A] ès qualités d'ancien liquidateur amiable de la SCP PAUL [K] [L] [A] ARCHITECTE
C/O AJ-ARCHITECTES
[Adresse 6]
[Localité 18]
Représenté par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON, toque : 533
S.A.R.L. AJ-ARCHITECTES
[Adresse 6]
[Localité 17]
Représentée par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON, toque : 533
S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF)
[Adresse 5]
[Localité 32]
Représentée par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON, toque : 533
M. [L] [Z]
[Adresse 35]
[Localité 20]
Représenté par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON, toque : 1983
assisté de Me Nicolas BLOIS, avocat au barreau de LYON
S.A. MMA IARD ès qualités de co-assureur de M.[L] [Z]
[Adresse 4]
[Localité 27]
Représentée par Me Hélène DESCOUT de la SELARL CONSTRUCTIV'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 638
S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ès qualités de co-assureur de M.[L] [Z]
[Adresse 4]
[Localité 27]
Représentée par Me Hélène DESCOUT de la SELARL CONSTRUCTIV'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 638
M. [E] [R]
né le 15 Juillet 1961 à [Localité 43]
[Adresse 7]
[Localité 26]
Représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
assisté de Me Eric ANDRES, avocat au barreau de LYON
S.A. AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de M. [E] [R]
[Adresse 15]
[Localité 38]
représentée par Me Frédéric VACHERON, de la SELARL RIVA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
S.A.R.L. LAURIA FRERES
[Adresse 28]
[Localité 22]
Représentée par Me Guillaume BAULIEUX, avocat au barreau de LYON, toque : 719
assistée de Me Fabrice POSTA de PYRAMIDE AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE
SA GENERALI IARD ès qualités d'assureur de la société LAURIA FRERES
[Adresse 8]
[Localité 30]
Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
assistée de Me Corinne TOMAS-BEZER, avocat au barreau de MARSEILLE
S.A.R.L. AB SERVICES ETANCHEITE
[Adresse 40]
[Localité 19]
Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON, toque : 680
S.A AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de la SARL AB SERVICES ETANCHEITE
[Adresse 15]
[Localité 36]
Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON, toque : 680
S.A. GAN ASSURANCES ès qualités d'assureur de la S.A.S PJM
[Adresse 34]
[Localité 29]
Représentée par Me Sylvie BERTHIAUD de la SELARL BERTHIAUD ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 711
S.A. GENERALI IARD ès qualités d'assureur de la SAS PJM,
[Adresse 8]
[Localité 30]
Représentée par Me Edith COLOMB de la SELARL ATHOS AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 755
assistée de Me Philippe RAVAYROL, avocat au barreau de PARIS
S.A. AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de la SAS PJM,
[Adresse 15]
[Localité 38]
Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON, toque : 680
S.A. BUREAU VERITAS CONSTRUCTION
[Adresse 1]
[Localité 37]
Représentée par Me Hélène DESCOUT de la SELARL CONSTRUCTIV'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 638
assistée de Me Sandrine DRAGHI-ALONSO, avocat au barreau de PARIS
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 10 Juin 2024
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Septembre 2025
Date de mise à disposition : 13 Novembre 2025
Audience tenue par Joëlle DOAT, présidente, et Stéphanie ROBIN, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Joëlle DOAT, présidente
- Evelyne ALLAIS, conseillère
- Stéphanie ROBIN, conseillère
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Par acte notarié en date du 21 avril 2006, MM. [P] [G], [V] [S] et [N] [O] ont acquis indivisément entre eux à concurrence d'un tiers chacun un immeuble situé [Adresse 9]), anciennement à usage industriel, en vue de le rénover et de le transformer en huit appartements destinés à être donnés en location.
Suivant contrat en date du 11 octobre 2006, ils ont confié une mission complète de maîtrise d'oeuvre à la société [K] [A], architectes, aux droits de laquelle est venue la société [A].
La société Veritas a été chargée des missions de contrôle technique et de coordination de sécurité et de protection de la santé (SPS).
Des marchés de travaux ont été conclus avec diverses entreprises.
Les maîtres de l'ouvrage ont souscrit une police d'assurances dommages ouvrage auprès de la société Sagena devenue la société SMA.
La réception des travaux est intervenue le 22 juillet 2008 avec réserves et d'autres désordres ont été signalés postérieurement à la réception.
Trois des huit appartements rénovés ont été revendus.
Un syndicat des copropriétaires a été constitué.
A la demande de MM. [G], [S] et [O], le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon, par ordonnance en date du 22 septembre 2009, a désigné M. [Y] en qualité d'expert.
Par actes d'huissier en date des 10 et 17 septembre 2010, MM. [G], [S] et [O] ont fait assigner l'architecte, la société Veritas et neuf entreprises devant le tribunal de grande instance de Lyon, pour s'entendre condamner ceux-ci à les indemniser des désordres subis.
Par acte d'huissier en date du 5 octobre 2012, MM. [G], [S] et [O] ont fait intervenir à la cause la société Sagena.
D'autres parties sont intervenues ou ont été attraites au procès.
M. [X], désigné en lieu et place de M. [Y], a déposé son rapport d'expertise le 22 juillet 2022.
Le 4 novembre 2022, MM. [G], [S] et [O] ont formé un incident devant le juge de la mise en état, sollicitant notamment la condamnation in solidum de la société AJ Architectes (anciennement M. [A]) et de la société MAF à leur verser diverses sommes à titre de provision, pour un total de 704 642,38 euros.
La société AJ Architectes et la société MAF ont conclu au rejet de la demande et, subsidiairement, à la garantie des sociétés Métallerie du Forez et son assureur, l'Auxiliaire, la société AB Etanchéité Services et son assureur la société Axa France IARD, la société Veritas, la société Lauria Frères et son assureur, la société Generali IARD, M. [Z] et ses assureurs, les sociétés MMA IARD, les sociétés Gan Assurances et Générali IARD en leur qualité d'assureurs de la société PJM, M. [R] et son assureur la société Axa France IARD.
Le syndicat des copropriétaires a demandé au juge de la mise en état de condamner la société SMA à lui verser la somme provisionnelle de 1 175 219,26 euros au titre des travaux de reprise des désordres.
La société SMA s'est opposée à la demande de provision et, à titre subsidiaire, a demandé à être garantie de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre par l'architecte, [L] [A], la MAF, en sa qualité d'asureur de M. [A], M. [Z] et ses assureurs MMA et MM IARD, la société Veritas, la société AB Services Etanchéité et son assureur Axa France IARD, la société Lauria Frères et son assureur Générali, la société PJM et ses assureurs les sociétés Gan Assurances IARD et Générali, M. [R] et son assureur, la société Axa France IARD.
La société Métallerie du Forez a demandé au juge de la mise en état de condamner solidairement MM. [G], [S] et [O] à lui payer une provision (19 329,82 euros), outre intérêts au taux légal majoré de 3% par an échus depuis le 21 janvier 2009.
Par ordonnance en date du 27 mai 2024, le juge de la mise en état a, notamment :
- débouté MM. [G], [S] et [O] de leurs demandes de provisions
- débouté la société Métallerie du Forez de sa demande de provision
- condamné la société SMA en sa qualité d'assureur dommages ouvrage à verser au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 326 449,80 euros hors taxes au titre des travaux de reprise des désordres, en ce compris le coût de la maîtrise d'oeuvre, et débouté le syndicat des copropriétaires du surplus de sa demande
- rejeté l'ensemble des demandes en garantie
- rejeté les demandes de mise hors de cause
- réservé les dépens
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de l'incident
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état.
MM. [G], [S] et [O] ont interjeté appel de cette ordonnance, le 3 juin 2024, à l'égard des sociétés Mutuelle des Architectes Français (MAF) et AJ Architectes, déclarant limiter leur appel aux chefs qui les ont déboutés de leurs demandes de provision, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
L'affaire a été enregistrée sous le numéro 24/04593.
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 13] a interjeté appel de l'ordonnance, le 10 juin 2024, à l'égard de la société SMA, déclarant limiter son appel aux chefs de l'ordonnance qui ont condamné la société SMA à lui payer la somme provisionnelle de 326 449,80 euros hor taxes au titre des travaux de reprise des désordres, en ce compris le coût de la maîtrise d'oeuvre, qui l'ont débouté du surplus de sa demande de provision et qui ont réservé les dépens, dit n'y avoir application de l'article 700 du code de procédure civile et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
L'affaire a été enregistrée sous le numéro 24/04775.
La société SMA a interjeté appel de l'ordonnance, le 11 juillet 2024, à l'égard de:
- M. [Z] et ses deux assureurs MMA IARD
- M. [R] et son assureur Axa France IARD
- la société Bureau Veritas Construction
- l'architecte : M.[A] , ès qualités de liquidateur amiable, la société AJ Architectes et leur assureur MAF
- la société Lauria Frères et son assureur Générali IARD
- la société AB Services Etanchéité et son assureur Axa France IARD
- les sociétés Gan Assurances, Générali IARD et Axa France IARD en qualités d'assureurs de la société PJM en liquidation judiciaire
- le syndicat des copropriétaires
déclarant limiter son appel aux chefs de l'ordonnance qui l'ont condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 326 449,80 euros hors taxes au titre des travaux de reprise des désordres, en ce compris le coût de la maîtrise d'oeuvre, rejeté l'ensemble des demandes en garantie, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et qui l'ont déboutée de ses demandes plus amples ou contraires.
L'affaire a été enregistrée sous le numéro 24/05728.
Par ordonnance en date du 26 juillet 2024, la présidente de la chambre a prononcé la jonction des affaires n° 24/04775 et 24/05728 sous le numéro 24/04775.
Par ordonnance en date du 31 mars 2025, la président de la chambre a prononcé la jonction des affaires n° 24/04593 et 24/04775, sous le numéro 24/04593.
MM. [G], [S] et [O] demandent à la cour :
- d'infirmer les chefs de l'ordonnance visés dans la déclaration d'appel
statuant à nouveau,
- de condamner in solidum la société AJ Architectes et la société MAF à leur payer à titre provisionnel les sommes suivantes :
* 515 174 euros au titre des préjudices de l'indivision tels que chiffrés par M. [F]
* 150 444 euros au titre des pertes de revenus locatifs pour la période du 1er juillet 2022 au 31 juillet 2025
* 96 000 euros au titre de la perte de surface qui résultera nécessairement des travaux de reprise
* 15 240 euros au titre des honoraires versés à M. [W]
* 2 160 euros au titre des derniers honoraires de M. [M]
* 31 200 euros au titre des frais de défense exposés au décours des opérations d'expertise
* 44 868,38 euros au titre des honoraires des experts judiciaires restés à charge
- de dire que les condamnations prononcées à leur bénéfice profiteront individuellement à chacun d'entre eux à hauteur d'un tiers chacun
subsidiairement, à défaut de recevabilité de leur action directe à l'encontre de la MAF,
- de dire que la MAF devra garantir la société AJ Architectes de toute condamnation prononcée à son encontre et de condamner en conséquence la MAF à leur verser directement les montants objet de la garantie
- en tant que de besoin, de dire que les éventuels plafonds de garantie de la MAF ne peuvent être opposés qu'aux condamnations prononcées exclusivement contre la société AJ Architectes et non à celles prononcées directement contre la MAF
- de condamner in solidum la société AJ Architectes et la société MAF à leur payer la somme de 7 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel et aux dépens de l'incident et de l'appel.
Le syndicat des copropriétaires demande à la cour :
- d'infirmer les chefs de l'ordonnance visés dans la déclaration d'appel
statuant de nouveau,
- de condamner la société SMA en sa qualité d'assureur dommages ouvrage à lui verser la somme de 1 175 219,26 euros euros hors taxes au titre des travaux de reprise des désordres et coût de la maîtrise d'oeuvre, outre indexation selon l'indice BT 01
- de débouter la société SMA de ses demandes tendant à le voir débouter de son appel principal et à le voir condamner au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- de condamner la société SMA ou 'qui mieux le devra' à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'incident.
La société SMA demande à la cour :
- de débouter le syndicat des copropriétaires de son appel principal
- d'infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté l'ensemble des demandes en garantie et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle l'a déboutée de ses demandes plus amples ou contraires
statuant à nouveau,
à titre principal, sur les recours subrogatoires :
- de condamner in solidum M. [A], ès qualités, la société AJ Architectes, la MAF, M. [Z] et ses assureurs, les MMA, la société Bureau Veritas Construction, la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD et les sociétés Gan Assurances IARD, Générali et Axa, prises en leur qualité d'assureur de PJM, à lui verser la somme de 326 449,80 euros
à titre subsidiaire sur les appels en garantie,
si la cour accordait une provision supplémentaire par rapport à celle qui a déjà été accordée par l'ordonnance dont appel,
- de condamner in solidum M. [A], ès qualités, la société AJ Architectes, la MAF, M. [Z] et ses assureurs, les MMA, la société Bureau veritas Construction, la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD, les sociétés Gan Assurances IARD, Générali et Axa, prises en leur qualité d'assureur de PJM, la société Lauria Frères et son assureur, la société Générali, M. [R] et son assureur, la société Axa France IARD à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre en principal, frais et dépens
en toute hypothèse,
- de condamner le syndicat des copropriétaires, M. [A], ès qualités, la société AJ Architectes, la MAF, M. [Z] et ses assureurs, les MMA, la société Bureau Veritas Construction, la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD, les sociétés Gan Assurances IARD, Générali et Axa, prises en leur qualité d'assureur de PJM, la société Lauria Frères et son assureur, la société Générali, M. [R] et son assureur, la société Axa France IARD à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Rose, avocat.
M. [A] ès qualités d'ancien liquidateur amiable de la SCP [K] [A] Architectes, la société AJ Architectes (qui vient aux droits de la société [L] [A]) et la MAF demandent à la cour:
- sur l'appel principal du syndicat des copropriétaires, de limiter la provision susceptible d'être allouée à la somme de 1 077 284,32 euros toutes taxes comprises
- sur l'appel principal de MM. [G], [S] et [O],
* de confirmer l'ordonnance
subsidiairement,
* de limiter la provision à la somme de 65 875 euros à répartir par tiers au profit de chacun d'entre eux
* de condamner la MAF dans la limite de son plafond de garantie de 500 000 euros, sous déduction de la franchise contractuelle opposable
- de condamner MM. [G], [S] et [O] 'chacun à payer à chacun' la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens d'appel distraits au profit de Maître Prudon
- sur l'appel principal de la société SMA,
- de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté les demandes de la SMA tendant à être garantie par eux (M. [A] et la MAF, la société AJ Architectes et la MAF)
- en cas de condamnation à leur encontre, d'infirmer l'ordonnance qui a rejeté l'ensemble des demandes de garantie, notamment les leurs ainsi que leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les a condamnés aux dépens
statuant à nouveau,
- de condamner in solidum la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD, la société Bureau Veritas Construction les sociétés Gan Assurances IARD et Générali, assureurs de la société PJM, la société Lauria Frères et son assureur, la société Générali, M. [Z] et ses assureurs MMA à les garantir des condamnations mises à leur charge, à hauteur de 80 % minimum
- de condamner MM. [G], [S] et [O], la société SMA, la société Gan Assurances et tout concluant contre eux, chacun à payer à chacun d'eux trois la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Maître Prudon, avocat.
M. [R] (lot menuiserie) et son assureur, la société Axa France IARD, demandent à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
- de condamner la société SMA à leur payer respectivement les sommes de 5 000 euros et 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
M. [Z] (économiste) demande à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
- subsidiairement, de rejeter l'appel en garantie (si une provision supplémentaire était accordée)
- infiniment subsidiairement, de condamner les autres sociétés intimées par la société SMA à le garantir et de condamner ses deux assureurs à le garantir
- de condamner la société SMA à lui payer la sommes de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, assureurs de M. [Z], demandent à la cour :
- à titre principal, de confirmer l'ordonnance
- à titre subsidiaire, de faire droit à leurs appels en garantie
- de condamner la société SMA à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Lauria Frères (lot électricité chauffage électrique) et son assureur Générali IARD demandent à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
à titre subsidiaire,
- de faire droit à l'appel en garantie de la société Generali IARD
- de condamner la société SMA à payer à la société Lauria Frères la somme de 4 000 euros et tout succombant à payer à la société Générali IARD la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés Gan Assurances et Générali IARD en qualité d'assureurs de la société PJM (en liquidation judiciaire, chargée des lots menuiseries extérieures aluminium et métallerie serrurerie) demandent à la cour :
la société Gan,
- de confirmer l'ordonnance, sauf sur les dépens et l'article 700
- à titre subsidaire, de faire droit à ses appels en garantie
- de condamner la société SMA à lui payer la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de son avocat
la société Generali IARD,
- de confirmer l'ordonnance
- subsidiairement, de faire droit à son appel en garantie
- de condamner tout succombant à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
La société AB Services et Etanchéité (lots façade et étanchéité) et son assureur la société Axa, et la société Axa en qualité d'assureur de la société PJM demandent à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
à titre subsidiaire,
- de faire droit à leurs appels en garantie
en tout état de cause,
- de condamner la société SMA à leur verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
La société Bureau Veritas Construction demande à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
- à titre subsidiaire, de faire droit à son appel en garantie
- de condamner la SMA à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'ordonnance de clôture a été reportée et rendue le jour de l'audience, le 30 septembre 2025.
SUR CE :
Sur les demandes de provision formées par MM. [G], [S] et [O] à l'encontre des sociétés AJ Architectes et MAF
MM. [G], [S] et [O] font valoir que :
- la fin de non-recevoir soulevée par la société MAF n'est pas une contestation sérieuse
- des demandes ont bien été formées par eux à l'encontre de la société MAF, prise en sa qualité d'assureur de l'architecte, avant l'expiration du délai de garantie décennale
- à titre subsidiaire, ils sont fondés à exercer l'action oblique à l'égard de la société MAF qui intervient au titre d'une clause de direction de procès
- la faute de conception de l'architecte a été désignée comme prépondérante par l'expert judiciaire, de sorte que celui-ci est tenu de prendre en charge l'ensemble des conséquences dommageables au titre de la garantie décennale et de la responsabilité contractuelle
- aucun partage de responsabilité ne leur est opposable et ils contestent l'application du plafond de garantie en ce qui concerne les préjudices qu'ils invoquent
- ils demandent la réparation des préjudices qui leur sont propres, tels que décrits et évalués dans son rapport par l'expert judiciaire, assisté du sapiteur M. [F] : reports de mise en location du fait des retards de chantier, nécessité de vendre trois appartements destinés à la location aux fins de faire face aux surcoûts et retards qui ont déstabilisé le bilan financier, difficultés rencontrées par les locataires ayant conduit à la nécessité de baisser les loyers ou au constat de l'impossibilité de remettre en location les appartements
- ils ont réévalué le montant de leur préjudice lequel avait été arrêté par l'expert au 30 juin 2022
- ils considèrent que la provision qu'ils réclament est un minimum, puisque leurs préjudices sont en réalité beaucoup plus élevés, ainsi qu'il est établi par le rapport de leur expert privé, M. [W], expert inscrit sur la liste de la cour d'appel de Lyon
- ils doivent constamment 'remettre au pot' pour régler les charges afférentes à l'opération et ainsi, ils ont été contraints d'apporter en compte courant une somme totale de 876 285,61 euros depuis 16 ans
- ils ont exposé des frais dans le cadre des opérations d'expertise et ont réglé les honoraires de l'expert judiciaire taxés à la somme de 88 868,38 euros.
M. [L] [A], pris en sa qualité d'ancien liquidateur amiable de la SCP [K] [A] Architectes ayant cessé ses fonctions, la société AJ Architectes anciennement dénommée société Atelier [L] [A] et la Mutuelle des Architectes Français (MAF) font valoir que :
- la société AJ Architectes est seule concernée par le présent litige, le contrat initialement signé avec la SCP [K] [A] ayant été transféré à la société Atelier [L] [A], actuellement dénommée AJ Architectes, assurée par la MAF
- la réception des travaux a été prononcée le 22 juillet 2008, de sorte que le délai de prescription de l'action en responsabilité contre l'architecte et son assureur expirait le 22 juillet 2018
- la MAF a été assignée au fond le 25 octobre 2013 en qualité d'assureur de M. [A] et de la société [L] [A] par la SMA et non pas par MM.[G], [S] et [O]
- MM.[G], [S] et [O] ont conclu au fond le 20 juillet 2018 contre la société [L] [A], aux droits de laquelle vient la société AJ Architectes, et contre la MAF, assureur de M. [A] (et non contre la MAF, assureur de la société AJ Architectes), de sorte que ces conclusions n'ont pas interrompu la prescription de l'action à l'égard de la MAF en tant qu'assureur de la société AJ Architectes
- en outre, la MAF n'a pas dirigé le procès puisqu'elle n'a constitué avocat que le 29 septembre 2022
- en conséquence, l'action dirigée contre la MAF est manifestement prescrite, ce qui constitue une première contestation sérieuse
- l'action oblique doit être rejetée
- les actions dirigées contre la MAF à fin de provision le 4 novembre 2022 sont prescrites à cette date; en effet, la société Atelier [L] [A], qui a été assignée le 17 septembre 2010, disposait d'un délai de deux ans pour assigner son assureur, ce qu'elle n'a pas fait; il s'agit d'une deuxième contestation sérieuse
- les demandes de provision de MM.[G], [S] et [O] recouvrent des préjudices ne relevant pas du même régime de responsabilité : pour les préjudices liés aux surcoûts et retards, il s'agit de la responsabilité pour faute prouvée, tandis que pour les vices de construction, il s'agit soit de la responsabilité contractuelle, soit de la garantie décennale, ce qui constitue une troisième contestation sérieuse
- les sommes réclamées sont contestables et contestées.
*****
L'article 771 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur jusqu'au 1er janvier 2020, énonce que, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
(...)
2. allouer une provision pour le procès
3. accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l'exécution de sa décision à la constitution d'une garantie dans les conditions prévues aux articles 517 à 522
(...)
Pour rejeter les demandes en paiement de provisions, le juge de la mise en état a notamment relevé que la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes formées par MM. [G], [S] et [O] à l'encontre de la société MAF, sur laquelle le tribunal saisi au fond devra statuer, la question de la responsabilité de la société AJ Architectes et la question de la nature et de l'étendue des préjudices invoqués constituaient une contestation sérieuse.
L'article 1792 du code civil énonce que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination, mais qu'une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
En application de l'article 1792-1, est réputé constructeur de l'ouvrage :
1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage
(...)
L'architecte est donc responsable de plein droit à l'égard du maître de l'ouvrage des dommages définis à l'article 1792 du code civil, pendant un délai de dix ans à compter de la réception des travaux (article 1792-4-1 du code civil).
Il ressort du rapport d'expertise qu'ont été constatés les désordres suivants, rendant selon l'expert l'immeuble impropre à sa destination : défauts affectant le confort thermique, l'acoustique et la ventilation. Ces désordres affectent les façades de l'immeuble et la toiture, parties communes.
Un retard de livraison de l'immeuble rénové a également été constaté. Néanmoins, un tel retard ne relève pas de la responsabilité de plein droit du constructeur.
Les demandes aux fins d'allocation de diverses provisions sont formées par MM. [G], [S] et [O] à la fois en leur qualité de maîtres de l'ouvrage puisqu'ils étaient propriétaires de la totalité de l'immeuble à rénover au moment de la signature du contrat d'architecte, immeuble qui a ensuite fait l'objet d'une division, et en leur qualité de propriétaires indivis de cinq appartements.
La provision à valoir sur la réparation de leurs préjudices demandée par MM. [G], [S] et [O] à l'architecte concerne la réparation, non pas des désordres de nature décennale dont est affecté l'immeuble (cette réparation étant demandée par le syndicat des copropriétaires à la SMA, assureur dommages-ouvrage), mais de dommages immatériels ainsi décrits :
- préjudices de l'indivision tels que chiffrés par M. [F], sapiteur expert-comptable :
* perte de revenus locatifs en raison du retard de livraison, soit un retard de neuf mois (de fin novembre 2007 à août 2008), pour les cinq appartements qui n'ont pas été revendus, soit une perte nette de 47 083 euros
* préjudice lié aux problèmes d'isolation qui ont contraint les propriétaires à accorder des baisses de loyer à leurs locataires, de 2009 à 2022 et à retirer de la location certains appartements, soit 250 973 euros (144 103 + 106 870)
* TVA sur vente d'un appartement : 28 359 euros
* règlement de copropriété : 2 181 euros
* perte de revenus locatifs suite à la vente des logements : 118 858 euros
* perte de plus-value sur l'appartement vendu : 145 000 euros
* dont à déduire les charges économisées : 78 000 euros
total : 514 454 euros
- perte de revenus locatifs pour la période du 1er juillet 2022 au 31 juillet 2025 : 150 444 euros
- perte de surface qui résultera nécessairement des travaux de reprise : 96 000 euros.
Le lien de causalité entre les préjudices immatériels ainsi décrits par l'expert ou certains d'entre eux et la responsabilité de plein droit de l'architecte, de même que l'évaluation desdits préjudices sont sérieusement contestables, le rapport d'un expert judiciaire pouvant être discuté en ce qui concerne la définition des préjudices, les méthodes de calcul, les bases de calcul.
Le principe comme le montant du préjudice dont MM. [G], [S] et [O] demandent réparation à l'architecte devra en conséquence être déterminé par le juge du fond statuant après expertise.
C'est à juste titre que le juge de la mise en état a rejeté les demandes de provision formées par les co-indivisaires à l'égard de l'architecte.
L'action directe de la victime contre l'assureur de responsabilité, qui trouve son fondement dans le droit de la victime à réparation de son préjudice, se prescrit par le même délai que son action contre le responsable et ne peut être exercée contre l'assureur, au-delà de ce délai, que tant que celui-ci reste exposé au recours de son assuré.
La question de la prescription ne pouvant être tranchée par le juge de la mise en état statuant sous l'empire de l'article 771 ancien du code de procédure civile, tous les arguments invoqués à cet égard devront être présentés devant le tribunal judiciaire, puisqu'il existe une discussion sérieuse quant à la fin de non-recevoir ainsi soulevée.
En outre, même si l'action des co-indivisaires contre la MAF, assureur de l'architecte, était déclarée recevable, l'obligation de garantie de la compagnie d'assurances est elle-même sérieusement contestable, dans la mesure où l'obligation d'assurance du constructeur du fait de sa responsabilité décennale ne porte que sur les dommages matériels, les dommages immatériels relevant de garanties facultatives, de sorte que cette question ne peut être tranchée sans analyse du contrat d'assurances souscrit entre la société AJ Architectes et la société MAF.
Les demandes principale et subsidiaire de MM. [G], [S] et [O] tendant à voir condamner la société MAF à leur payer des provisions à valoir sur la réparation des préjudices ci-dessus invoqués doivent être rejetées. L'ordonnance du juge de la mise en état est confirmée sur ce point.
L'ordonnance doit également être confirmée, pour les mêmes motifs, en ce qu'elle a rejeté la demande tendant à l'octroi de sommes au titre des honoraires versés aux experts privés (M. [W] et M. [M]) et des frais de défense exposés au décours des opérations d'expertise. Les honoraires des experts judiciaires restés à charge seront compris dans les dépens de l'instance au fond et leur sort dépendra de la solution apportée au litige. Il n'y a pas lieu d'en ordonner d'ores et déjà le remboursement.
Sur la demande de provision du syndicat des copropriétaires à l'égard de la société SMA
Il ressort du dispositif de ses conclusions d'appel que la société SMA ne demande pas l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle l'a condamnée à payer au syndicat des copropriétaires une provision d'un montant de 326 449,80 euros.
Le syndicat des copropriétaires fait valoir que :
- l'assureur ne conteste pas le principe de sa garantie
- les désordres dans leur ensemble et leur entièreté présentent un caractère décennal, y compris les désordres acoustiques et de ventilation
- la société SMA a manqué à son obligation de pré-financement
- il a fondé sa demande de provision sur le coût d'une solution de réhabilitation et non pas de démolition-reconstruction
- la réalisation des travaux de reprise s'avère complexe
- il est fondé à solliciter une provision égale au montant total des travaux tel que retenu par l'expert judiciaire, l'évaluation de ce dernier correspondant à la reprise des désordres thermiques laquelle entraînera la reprise des désordres acoustiques liés aux panneaux polycarbonate.
*****
L'assurance de dommages obligatoire a pour objet de garantir, en-dehors de toute recherche de responsabilité, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs, au sens de l'article 1792-1 du code civil, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique, sur le fondement de l'article 1792 du code de procédure civile.
L'assurance dommages ouvrage n'est pas une assurance de responsabilité, mais une assurance de chose attachée à l'ouvrage qui se transmet de plein droit avec la propriété de l'immeuble et bénéficie au maître de l'ouvrage, ainsi qu'aux propriétaires successifs ou à ceux qui sont subrogés dans leurs droits.
La garantie dommages ouvrage ne s'applique pas aux dommages immatériels.
En l'espèce, il résulte du rapport d'expertise :
- que la construction est affectée de multiples ponts thermiques et défauts d'étanchéité
- que trois types de désordres majeurs parce que généralisés ont été identifiés : problèmes de mise en oeuvre et défauts des menuiseries extérieures, présence de panneaux polycarbonate utilisés hors des domaines d'emploi préconisés par le fabricant, la conception et la réalisation des toitures
- que l'isolation acoustique des façades n'est pas conforme à la réglementation en vigueur dès lors que celles-ci sont constituées par des panneaux de polycarbonate et qu'il n'y a pas d'autre moyen pour traiter ce problème que changer de matériau
- que l'isolation acoustique des toitures n'est pas conforme à la réglementation en vigueur
- que des chocs sur les surfaces métalliques se propagent par la structure du bâtiment
- qu'il existe des désordres de ventilation en ce que dans de nombreuses pièces, les débits ne sont pas conformes à la réglementation, les bouches d'entrée d'air ne sont pas conformes aux règles de l'art et au marché de l'entreprise et des anomalies ont été constatées dans trois logements.
Les travaux de reprise de ces désordres et la maîtrise d'oeuvre et l'assistance au maître de l'ouvrage ont été évalués par l'expert (solution 2 page 20 du rapport) aux sommes respectives de 839 349,38 euros hors taxes et de 140 000 euros hors taxes.
Les désordres tels que décrits par l'expert affectent de manière incontestable l'immeuble, dans ses éléments constitutifs (façades et toiture) et dans l'un de ses éléments d'équipement (ventilation mécanique) et le rendent impropre à sa destination.
L'obligation à indemnisation de la société SMA en sa qualité d'assureur dommages ouvrage est non sérieusement contestable à hauteur de la provision sollicitée par le syndicat des copropriétaires au titre des travaux de réfection nécessaires, à savoir pour l'essentiel le remplacement des façades intérieures et des menuiseries, l'isolation de la toiture par l'intérieur, l'isolation des toitures-terrasse par l'intérieur, l'isolation de la sous-face de la dalle du premier étage sur le parc de stationnement et le remplacement de toutes les installations de VMC autoréglables.
Il convient de porter le montant de la provision allouée par le juge de la mise en état à la somme totale de 979 349,38 euros hors taxes, soit 1 175 219,26 euros toutes taxes comprises, somme qui sera réévaluée à la date du présent arrêt en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 28 juillet 2022, date de dépôt du rapport d'expertise.
Sur les demandes de la société SMA
La société SMA fait valoir que :
- elle a payé la somme de 326 449,80 euros mise à sa charge (par le juge de la mise en état), de sorte qu'elle est bien fondée à exercer son recours subrogatoire à l'encontre des intervenants dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire pour le défaut d'isolation thermique
- si la cour venait à accorder une provision supplémentaire au syndicat des copropriétaires, elle est bien fondée à demander à être garantie de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge en principal, frais et dépens
- elle justifie avoir interrompu les délais de prescription à l'encontre de M. [A], de son assureur, la MAF, de M. [Z] et de ses assureurs, les sociétés MMA et MMA IARD.
*****
L'action en garantie ne suppose pas que l'appelant en garantie ait déjà indemnisé le demandeur initial.
Le recours subrogatoire défini par l'article L121-12 du code des assurances dispose que l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui par leur fait ont causé le dommage ayant donné lieu à la garantie de l'assureur.
En l'espèce, la société SMA a certes exécuté la condamnation provisionnelle prononcée à son encontre, mais son recours subrogatoire, comme ses recours en garantie sont sérieusement contestables.
Il est nécessaire de déterminer les responsabilités des différents intervenants à la construction, ce qui relève des pouvoirs du seul juge du fond et non du juge de la mise en état.
Il convient en conséquence de rejeter la demande de la société SMA aux fins de voir condamner in solidum les intimés visés dans ses conclusions d'appel à lui payer la somme de 326 449,80 euros et la demande subsidiaire aux fins de condamner in solidum les intimés visés dans ses conclusions d'appel à la relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.
Les autres demandes en garantie sont sans objet à ce stade de la procédure.
L'équité commande de condamner la société SMA à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, l'ordonnance étant confirmée en ce qu'elle a rejeté toutes les demandes présentées sur ce fondement.
Les autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement:
CONFIRME l'ordonnance, sauf à porter à la somme de 979 349,38 euros hors taxes, soit
1 175 219,26 euros toutes taxes comprises, le montant de la provision au paiement de laquelle est condamnée la société SMA, somme qui sera réévaluée à la date du présent arrêt en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 28 juillet 2022, date de dépôt du rapport d'expertise
Y AJOUTANT,
REJETTE la demande de la SMA tendant à voir condamner in solidum M. [A] ès qualités de liquidateur amiable, la société AJ Architectes, la société MAF, M. [Z] et ses assureurs, les sociétés MMA et MMA IARD, la société Bureau Veritas Construction, la société AB Etanchéité et son assureur, la société Axa France IARD et les sociétés GAN Assurances IARD, Générali et Axa prises en qualité d'assureurs de la société PJM, à lui payer la somme de 326 4489,80 euros
CONDAMNE la société SMA aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés pour ceux qui les concernent par Maître Prudon et Maître Berthiaud, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
CONDAMNE la société SMA à payer au Sydicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel
REJETTE les autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
Ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de LYON du 27 mai 2024
RG : 10/15097
[S]
[O]
[T]
S.A. SMA
S.D.C. ENSEMBLE IMMOBILIER [Adresse 10]
C/
[Z]
[R]
[A]
S.A. BUREAU VERITAS CONSTRUCTION
S.A. GAN ASSURANCES
SA GENERALI IARD
S.A. GENERALI IARD
S.A.R.L. LAURIA FRERES
S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF)
S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
S.A. SMA SA
S.A. MMA IARD SA
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
S.A.R.L. AB SERVICES ETANCHEITE
S.A.R.L. AJ-ARCHITECTES
Compagnie d'assurance AXA FRANCE IARD
S.A. AXA FRANCE IARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 13 Novembre 2025
APPELANTS :
M. [V] [S]
né le 28 Avril 1960 à
[Adresse 16]
[Localité 25]
M. [N] [O]
né le 29 Septembre 1969 à [Localité 41]
[Adresse 2]
[Localité 23]
M. [P] [T]
né le 18 Mai 1960 à [Localité 42]
[Adresse 3]
[Localité 24]
Représentés par Me Samuel BECQUET de la SELEURL SAMUEL BECQUET AVOCAT, avocat au barreau de LYON, toque : 806
S.A. SMA
[Adresse 33]
[Localité 31]
Représentée par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, toque : 1106
assistée de Me Frédéric PIRAS de la SELARL PIRAS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
Syndicat des copropriétaires de l'Ensemble Immobilier [Adresse 12] réprésenté par son Syndic en exercice, la société FONCIA [Localité 39], dont le siège est [Adresse 14]
[Adresse 11]
[Localité 21]
Représenté par Me Julie BEUGNOT de la SELARL BERGER AVOCATS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 2167
INTIMES :
M. [L] [A] ès qualités d'ancien liquidateur amiable de la SCP PAUL [K] [L] [A] ARCHITECTE
C/O AJ-ARCHITECTES
[Adresse 6]
[Localité 18]
Représenté par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON, toque : 533
S.A.R.L. AJ-ARCHITECTES
[Adresse 6]
[Localité 17]
Représentée par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON, toque : 533
S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF)
[Adresse 5]
[Localité 32]
Représentée par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON, toque : 533
M. [L] [Z]
[Adresse 35]
[Localité 20]
Représenté par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON, toque : 1983
assisté de Me Nicolas BLOIS, avocat au barreau de LYON
S.A. MMA IARD ès qualités de co-assureur de M.[L] [Z]
[Adresse 4]
[Localité 27]
Représentée par Me Hélène DESCOUT de la SELARL CONSTRUCTIV'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 638
S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ès qualités de co-assureur de M.[L] [Z]
[Adresse 4]
[Localité 27]
Représentée par Me Hélène DESCOUT de la SELARL CONSTRUCTIV'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 638
M. [E] [R]
né le 15 Juillet 1961 à [Localité 43]
[Adresse 7]
[Localité 26]
Représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
assisté de Me Eric ANDRES, avocat au barreau de LYON
S.A. AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de M. [E] [R]
[Adresse 15]
[Localité 38]
représentée par Me Frédéric VACHERON, de la SELARL RIVA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
S.A.R.L. LAURIA FRERES
[Adresse 28]
[Localité 22]
Représentée par Me Guillaume BAULIEUX, avocat au barreau de LYON, toque : 719
assistée de Me Fabrice POSTA de PYRAMIDE AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE
SA GENERALI IARD ès qualités d'assureur de la société LAURIA FRERES
[Adresse 8]
[Localité 30]
Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
assistée de Me Corinne TOMAS-BEZER, avocat au barreau de MARSEILLE
S.A.R.L. AB SERVICES ETANCHEITE
[Adresse 40]
[Localité 19]
Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON, toque : 680
S.A AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de la SARL AB SERVICES ETANCHEITE
[Adresse 15]
[Localité 36]
Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON, toque : 680
S.A. GAN ASSURANCES ès qualités d'assureur de la S.A.S PJM
[Adresse 34]
[Localité 29]
Représentée par Me Sylvie BERTHIAUD de la SELARL BERTHIAUD ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 711
S.A. GENERALI IARD ès qualités d'assureur de la SAS PJM,
[Adresse 8]
[Localité 30]
Représentée par Me Edith COLOMB de la SELARL ATHOS AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 755
assistée de Me Philippe RAVAYROL, avocat au barreau de PARIS
S.A. AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de la SAS PJM,
[Adresse 15]
[Localité 38]
Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON, toque : 680
S.A. BUREAU VERITAS CONSTRUCTION
[Adresse 1]
[Localité 37]
Représentée par Me Hélène DESCOUT de la SELARL CONSTRUCTIV'AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 638
assistée de Me Sandrine DRAGHI-ALONSO, avocat au barreau de PARIS
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 10 Juin 2024
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Septembre 2025
Date de mise à disposition : 13 Novembre 2025
Audience tenue par Joëlle DOAT, présidente, et Stéphanie ROBIN, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Joëlle DOAT, présidente
- Evelyne ALLAIS, conseillère
- Stéphanie ROBIN, conseillère
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Par acte notarié en date du 21 avril 2006, MM. [P] [G], [V] [S] et [N] [O] ont acquis indivisément entre eux à concurrence d'un tiers chacun un immeuble situé [Adresse 9]), anciennement à usage industriel, en vue de le rénover et de le transformer en huit appartements destinés à être donnés en location.
Suivant contrat en date du 11 octobre 2006, ils ont confié une mission complète de maîtrise d'oeuvre à la société [K] [A], architectes, aux droits de laquelle est venue la société [A].
La société Veritas a été chargée des missions de contrôle technique et de coordination de sécurité et de protection de la santé (SPS).
Des marchés de travaux ont été conclus avec diverses entreprises.
Les maîtres de l'ouvrage ont souscrit une police d'assurances dommages ouvrage auprès de la société Sagena devenue la société SMA.
La réception des travaux est intervenue le 22 juillet 2008 avec réserves et d'autres désordres ont été signalés postérieurement à la réception.
Trois des huit appartements rénovés ont été revendus.
Un syndicat des copropriétaires a été constitué.
A la demande de MM. [G], [S] et [O], le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon, par ordonnance en date du 22 septembre 2009, a désigné M. [Y] en qualité d'expert.
Par actes d'huissier en date des 10 et 17 septembre 2010, MM. [G], [S] et [O] ont fait assigner l'architecte, la société Veritas et neuf entreprises devant le tribunal de grande instance de Lyon, pour s'entendre condamner ceux-ci à les indemniser des désordres subis.
Par acte d'huissier en date du 5 octobre 2012, MM. [G], [S] et [O] ont fait intervenir à la cause la société Sagena.
D'autres parties sont intervenues ou ont été attraites au procès.
M. [X], désigné en lieu et place de M. [Y], a déposé son rapport d'expertise le 22 juillet 2022.
Le 4 novembre 2022, MM. [G], [S] et [O] ont formé un incident devant le juge de la mise en état, sollicitant notamment la condamnation in solidum de la société AJ Architectes (anciennement M. [A]) et de la société MAF à leur verser diverses sommes à titre de provision, pour un total de 704 642,38 euros.
La société AJ Architectes et la société MAF ont conclu au rejet de la demande et, subsidiairement, à la garantie des sociétés Métallerie du Forez et son assureur, l'Auxiliaire, la société AB Etanchéité Services et son assureur la société Axa France IARD, la société Veritas, la société Lauria Frères et son assureur, la société Generali IARD, M. [Z] et ses assureurs, les sociétés MMA IARD, les sociétés Gan Assurances et Générali IARD en leur qualité d'assureurs de la société PJM, M. [R] et son assureur la société Axa France IARD.
Le syndicat des copropriétaires a demandé au juge de la mise en état de condamner la société SMA à lui verser la somme provisionnelle de 1 175 219,26 euros au titre des travaux de reprise des désordres.
La société SMA s'est opposée à la demande de provision et, à titre subsidiaire, a demandé à être garantie de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre par l'architecte, [L] [A], la MAF, en sa qualité d'asureur de M. [A], M. [Z] et ses assureurs MMA et MM IARD, la société Veritas, la société AB Services Etanchéité et son assureur Axa France IARD, la société Lauria Frères et son assureur Générali, la société PJM et ses assureurs les sociétés Gan Assurances IARD et Générali, M. [R] et son assureur, la société Axa France IARD.
La société Métallerie du Forez a demandé au juge de la mise en état de condamner solidairement MM. [G], [S] et [O] à lui payer une provision (19 329,82 euros), outre intérêts au taux légal majoré de 3% par an échus depuis le 21 janvier 2009.
Par ordonnance en date du 27 mai 2024, le juge de la mise en état a, notamment :
- débouté MM. [G], [S] et [O] de leurs demandes de provisions
- débouté la société Métallerie du Forez de sa demande de provision
- condamné la société SMA en sa qualité d'assureur dommages ouvrage à verser au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 326 449,80 euros hors taxes au titre des travaux de reprise des désordres, en ce compris le coût de la maîtrise d'oeuvre, et débouté le syndicat des copropriétaires du surplus de sa demande
- rejeté l'ensemble des demandes en garantie
- rejeté les demandes de mise hors de cause
- réservé les dépens
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de l'incident
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état.
MM. [G], [S] et [O] ont interjeté appel de cette ordonnance, le 3 juin 2024, à l'égard des sociétés Mutuelle des Architectes Français (MAF) et AJ Architectes, déclarant limiter leur appel aux chefs qui les ont déboutés de leurs demandes de provision, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
L'affaire a été enregistrée sous le numéro 24/04593.
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 13] a interjeté appel de l'ordonnance, le 10 juin 2024, à l'égard de la société SMA, déclarant limiter son appel aux chefs de l'ordonnance qui ont condamné la société SMA à lui payer la somme provisionnelle de 326 449,80 euros hor taxes au titre des travaux de reprise des désordres, en ce compris le coût de la maîtrise d'oeuvre, qui l'ont débouté du surplus de sa demande de provision et qui ont réservé les dépens, dit n'y avoir application de l'article 700 du code de procédure civile et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
L'affaire a été enregistrée sous le numéro 24/04775.
La société SMA a interjeté appel de l'ordonnance, le 11 juillet 2024, à l'égard de:
- M. [Z] et ses deux assureurs MMA IARD
- M. [R] et son assureur Axa France IARD
- la société Bureau Veritas Construction
- l'architecte : M.[A] , ès qualités de liquidateur amiable, la société AJ Architectes et leur assureur MAF
- la société Lauria Frères et son assureur Générali IARD
- la société AB Services Etanchéité et son assureur Axa France IARD
- les sociétés Gan Assurances, Générali IARD et Axa France IARD en qualités d'assureurs de la société PJM en liquidation judiciaire
- le syndicat des copropriétaires
déclarant limiter son appel aux chefs de l'ordonnance qui l'ont condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 326 449,80 euros hors taxes au titre des travaux de reprise des désordres, en ce compris le coût de la maîtrise d'oeuvre, rejeté l'ensemble des demandes en garantie, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et qui l'ont déboutée de ses demandes plus amples ou contraires.
L'affaire a été enregistrée sous le numéro 24/05728.
Par ordonnance en date du 26 juillet 2024, la présidente de la chambre a prononcé la jonction des affaires n° 24/04775 et 24/05728 sous le numéro 24/04775.
Par ordonnance en date du 31 mars 2025, la président de la chambre a prononcé la jonction des affaires n° 24/04593 et 24/04775, sous le numéro 24/04593.
MM. [G], [S] et [O] demandent à la cour :
- d'infirmer les chefs de l'ordonnance visés dans la déclaration d'appel
statuant à nouveau,
- de condamner in solidum la société AJ Architectes et la société MAF à leur payer à titre provisionnel les sommes suivantes :
* 515 174 euros au titre des préjudices de l'indivision tels que chiffrés par M. [F]
* 150 444 euros au titre des pertes de revenus locatifs pour la période du 1er juillet 2022 au 31 juillet 2025
* 96 000 euros au titre de la perte de surface qui résultera nécessairement des travaux de reprise
* 15 240 euros au titre des honoraires versés à M. [W]
* 2 160 euros au titre des derniers honoraires de M. [M]
* 31 200 euros au titre des frais de défense exposés au décours des opérations d'expertise
* 44 868,38 euros au titre des honoraires des experts judiciaires restés à charge
- de dire que les condamnations prononcées à leur bénéfice profiteront individuellement à chacun d'entre eux à hauteur d'un tiers chacun
subsidiairement, à défaut de recevabilité de leur action directe à l'encontre de la MAF,
- de dire que la MAF devra garantir la société AJ Architectes de toute condamnation prononcée à son encontre et de condamner en conséquence la MAF à leur verser directement les montants objet de la garantie
- en tant que de besoin, de dire que les éventuels plafonds de garantie de la MAF ne peuvent être opposés qu'aux condamnations prononcées exclusivement contre la société AJ Architectes et non à celles prononcées directement contre la MAF
- de condamner in solidum la société AJ Architectes et la société MAF à leur payer la somme de 7 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel et aux dépens de l'incident et de l'appel.
Le syndicat des copropriétaires demande à la cour :
- d'infirmer les chefs de l'ordonnance visés dans la déclaration d'appel
statuant de nouveau,
- de condamner la société SMA en sa qualité d'assureur dommages ouvrage à lui verser la somme de 1 175 219,26 euros euros hors taxes au titre des travaux de reprise des désordres et coût de la maîtrise d'oeuvre, outre indexation selon l'indice BT 01
- de débouter la société SMA de ses demandes tendant à le voir débouter de son appel principal et à le voir condamner au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- de condamner la société SMA ou 'qui mieux le devra' à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'incident.
La société SMA demande à la cour :
- de débouter le syndicat des copropriétaires de son appel principal
- d'infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté l'ensemble des demandes en garantie et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle l'a déboutée de ses demandes plus amples ou contraires
statuant à nouveau,
à titre principal, sur les recours subrogatoires :
- de condamner in solidum M. [A], ès qualités, la société AJ Architectes, la MAF, M. [Z] et ses assureurs, les MMA, la société Bureau Veritas Construction, la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD et les sociétés Gan Assurances IARD, Générali et Axa, prises en leur qualité d'assureur de PJM, à lui verser la somme de 326 449,80 euros
à titre subsidiaire sur les appels en garantie,
si la cour accordait une provision supplémentaire par rapport à celle qui a déjà été accordée par l'ordonnance dont appel,
- de condamner in solidum M. [A], ès qualités, la société AJ Architectes, la MAF, M. [Z] et ses assureurs, les MMA, la société Bureau veritas Construction, la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD, les sociétés Gan Assurances IARD, Générali et Axa, prises en leur qualité d'assureur de PJM, la société Lauria Frères et son assureur, la société Générali, M. [R] et son assureur, la société Axa France IARD à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre en principal, frais et dépens
en toute hypothèse,
- de condamner le syndicat des copropriétaires, M. [A], ès qualités, la société AJ Architectes, la MAF, M. [Z] et ses assureurs, les MMA, la société Bureau Veritas Construction, la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD, les sociétés Gan Assurances IARD, Générali et Axa, prises en leur qualité d'assureur de PJM, la société Lauria Frères et son assureur, la société Générali, M. [R] et son assureur, la société Axa France IARD à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Rose, avocat.
M. [A] ès qualités d'ancien liquidateur amiable de la SCP [K] [A] Architectes, la société AJ Architectes (qui vient aux droits de la société [L] [A]) et la MAF demandent à la cour:
- sur l'appel principal du syndicat des copropriétaires, de limiter la provision susceptible d'être allouée à la somme de 1 077 284,32 euros toutes taxes comprises
- sur l'appel principal de MM. [G], [S] et [O],
* de confirmer l'ordonnance
subsidiairement,
* de limiter la provision à la somme de 65 875 euros à répartir par tiers au profit de chacun d'entre eux
* de condamner la MAF dans la limite de son plafond de garantie de 500 000 euros, sous déduction de la franchise contractuelle opposable
- de condamner MM. [G], [S] et [O] 'chacun à payer à chacun' la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens d'appel distraits au profit de Maître Prudon
- sur l'appel principal de la société SMA,
- de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté les demandes de la SMA tendant à être garantie par eux (M. [A] et la MAF, la société AJ Architectes et la MAF)
- en cas de condamnation à leur encontre, d'infirmer l'ordonnance qui a rejeté l'ensemble des demandes de garantie, notamment les leurs ainsi que leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les a condamnés aux dépens
statuant à nouveau,
- de condamner in solidum la société AB Services Etanchéité et son assureur la société Axa France IARD, la société Bureau Veritas Construction les sociétés Gan Assurances IARD et Générali, assureurs de la société PJM, la société Lauria Frères et son assureur, la société Générali, M. [Z] et ses assureurs MMA à les garantir des condamnations mises à leur charge, à hauteur de 80 % minimum
- de condamner MM. [G], [S] et [O], la société SMA, la société Gan Assurances et tout concluant contre eux, chacun à payer à chacun d'eux trois la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Maître Prudon, avocat.
M. [R] (lot menuiserie) et son assureur, la société Axa France IARD, demandent à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
- de condamner la société SMA à leur payer respectivement les sommes de 5 000 euros et 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
M. [Z] (économiste) demande à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
- subsidiairement, de rejeter l'appel en garantie (si une provision supplémentaire était accordée)
- infiniment subsidiairement, de condamner les autres sociétés intimées par la société SMA à le garantir et de condamner ses deux assureurs à le garantir
- de condamner la société SMA à lui payer la sommes de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, assureurs de M. [Z], demandent à la cour :
- à titre principal, de confirmer l'ordonnance
- à titre subsidiaire, de faire droit à leurs appels en garantie
- de condamner la société SMA à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Lauria Frères (lot électricité chauffage électrique) et son assureur Générali IARD demandent à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
à titre subsidiaire,
- de faire droit à l'appel en garantie de la société Generali IARD
- de condamner la société SMA à payer à la société Lauria Frères la somme de 4 000 euros et tout succombant à payer à la société Générali IARD la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés Gan Assurances et Générali IARD en qualité d'assureurs de la société PJM (en liquidation judiciaire, chargée des lots menuiseries extérieures aluminium et métallerie serrurerie) demandent à la cour :
la société Gan,
- de confirmer l'ordonnance, sauf sur les dépens et l'article 700
- à titre subsidaire, de faire droit à ses appels en garantie
- de condamner la société SMA à lui payer la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de son avocat
la société Generali IARD,
- de confirmer l'ordonnance
- subsidiairement, de faire droit à son appel en garantie
- de condamner tout succombant à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
La société AB Services et Etanchéité (lots façade et étanchéité) et son assureur la société Axa, et la société Axa en qualité d'assureur de la société PJM demandent à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
à titre subsidiaire,
- de faire droit à leurs appels en garantie
en tout état de cause,
- de condamner la société SMA à leur verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
La société Bureau Veritas Construction demande à la cour :
- de confirmer l'ordonnance
- à titre subsidiaire, de faire droit à son appel en garantie
- de condamner la SMA à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'ordonnance de clôture a été reportée et rendue le jour de l'audience, le 30 septembre 2025.
SUR CE :
Sur les demandes de provision formées par MM. [G], [S] et [O] à l'encontre des sociétés AJ Architectes et MAF
MM. [G], [S] et [O] font valoir que :
- la fin de non-recevoir soulevée par la société MAF n'est pas une contestation sérieuse
- des demandes ont bien été formées par eux à l'encontre de la société MAF, prise en sa qualité d'assureur de l'architecte, avant l'expiration du délai de garantie décennale
- à titre subsidiaire, ils sont fondés à exercer l'action oblique à l'égard de la société MAF qui intervient au titre d'une clause de direction de procès
- la faute de conception de l'architecte a été désignée comme prépondérante par l'expert judiciaire, de sorte que celui-ci est tenu de prendre en charge l'ensemble des conséquences dommageables au titre de la garantie décennale et de la responsabilité contractuelle
- aucun partage de responsabilité ne leur est opposable et ils contestent l'application du plafond de garantie en ce qui concerne les préjudices qu'ils invoquent
- ils demandent la réparation des préjudices qui leur sont propres, tels que décrits et évalués dans son rapport par l'expert judiciaire, assisté du sapiteur M. [F] : reports de mise en location du fait des retards de chantier, nécessité de vendre trois appartements destinés à la location aux fins de faire face aux surcoûts et retards qui ont déstabilisé le bilan financier, difficultés rencontrées par les locataires ayant conduit à la nécessité de baisser les loyers ou au constat de l'impossibilité de remettre en location les appartements
- ils ont réévalué le montant de leur préjudice lequel avait été arrêté par l'expert au 30 juin 2022
- ils considèrent que la provision qu'ils réclament est un minimum, puisque leurs préjudices sont en réalité beaucoup plus élevés, ainsi qu'il est établi par le rapport de leur expert privé, M. [W], expert inscrit sur la liste de la cour d'appel de Lyon
- ils doivent constamment 'remettre au pot' pour régler les charges afférentes à l'opération et ainsi, ils ont été contraints d'apporter en compte courant une somme totale de 876 285,61 euros depuis 16 ans
- ils ont exposé des frais dans le cadre des opérations d'expertise et ont réglé les honoraires de l'expert judiciaire taxés à la somme de 88 868,38 euros.
M. [L] [A], pris en sa qualité d'ancien liquidateur amiable de la SCP [K] [A] Architectes ayant cessé ses fonctions, la société AJ Architectes anciennement dénommée société Atelier [L] [A] et la Mutuelle des Architectes Français (MAF) font valoir que :
- la société AJ Architectes est seule concernée par le présent litige, le contrat initialement signé avec la SCP [K] [A] ayant été transféré à la société Atelier [L] [A], actuellement dénommée AJ Architectes, assurée par la MAF
- la réception des travaux a été prononcée le 22 juillet 2008, de sorte que le délai de prescription de l'action en responsabilité contre l'architecte et son assureur expirait le 22 juillet 2018
- la MAF a été assignée au fond le 25 octobre 2013 en qualité d'assureur de M. [A] et de la société [L] [A] par la SMA et non pas par MM.[G], [S] et [O]
- MM.[G], [S] et [O] ont conclu au fond le 20 juillet 2018 contre la société [L] [A], aux droits de laquelle vient la société AJ Architectes, et contre la MAF, assureur de M. [A] (et non contre la MAF, assureur de la société AJ Architectes), de sorte que ces conclusions n'ont pas interrompu la prescription de l'action à l'égard de la MAF en tant qu'assureur de la société AJ Architectes
- en outre, la MAF n'a pas dirigé le procès puisqu'elle n'a constitué avocat que le 29 septembre 2022
- en conséquence, l'action dirigée contre la MAF est manifestement prescrite, ce qui constitue une première contestation sérieuse
- l'action oblique doit être rejetée
- les actions dirigées contre la MAF à fin de provision le 4 novembre 2022 sont prescrites à cette date; en effet, la société Atelier [L] [A], qui a été assignée le 17 septembre 2010, disposait d'un délai de deux ans pour assigner son assureur, ce qu'elle n'a pas fait; il s'agit d'une deuxième contestation sérieuse
- les demandes de provision de MM.[G], [S] et [O] recouvrent des préjudices ne relevant pas du même régime de responsabilité : pour les préjudices liés aux surcoûts et retards, il s'agit de la responsabilité pour faute prouvée, tandis que pour les vices de construction, il s'agit soit de la responsabilité contractuelle, soit de la garantie décennale, ce qui constitue une troisième contestation sérieuse
- les sommes réclamées sont contestables et contestées.
*****
L'article 771 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur jusqu'au 1er janvier 2020, énonce que, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
(...)
2. allouer une provision pour le procès
3. accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l'exécution de sa décision à la constitution d'une garantie dans les conditions prévues aux articles 517 à 522
(...)
Pour rejeter les demandes en paiement de provisions, le juge de la mise en état a notamment relevé que la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes formées par MM. [G], [S] et [O] à l'encontre de la société MAF, sur laquelle le tribunal saisi au fond devra statuer, la question de la responsabilité de la société AJ Architectes et la question de la nature et de l'étendue des préjudices invoqués constituaient une contestation sérieuse.
L'article 1792 du code civil énonce que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination, mais qu'une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
En application de l'article 1792-1, est réputé constructeur de l'ouvrage :
1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage
(...)
L'architecte est donc responsable de plein droit à l'égard du maître de l'ouvrage des dommages définis à l'article 1792 du code civil, pendant un délai de dix ans à compter de la réception des travaux (article 1792-4-1 du code civil).
Il ressort du rapport d'expertise qu'ont été constatés les désordres suivants, rendant selon l'expert l'immeuble impropre à sa destination : défauts affectant le confort thermique, l'acoustique et la ventilation. Ces désordres affectent les façades de l'immeuble et la toiture, parties communes.
Un retard de livraison de l'immeuble rénové a également été constaté. Néanmoins, un tel retard ne relève pas de la responsabilité de plein droit du constructeur.
Les demandes aux fins d'allocation de diverses provisions sont formées par MM. [G], [S] et [O] à la fois en leur qualité de maîtres de l'ouvrage puisqu'ils étaient propriétaires de la totalité de l'immeuble à rénover au moment de la signature du contrat d'architecte, immeuble qui a ensuite fait l'objet d'une division, et en leur qualité de propriétaires indivis de cinq appartements.
La provision à valoir sur la réparation de leurs préjudices demandée par MM. [G], [S] et [O] à l'architecte concerne la réparation, non pas des désordres de nature décennale dont est affecté l'immeuble (cette réparation étant demandée par le syndicat des copropriétaires à la SMA, assureur dommages-ouvrage), mais de dommages immatériels ainsi décrits :
- préjudices de l'indivision tels que chiffrés par M. [F], sapiteur expert-comptable :
* perte de revenus locatifs en raison du retard de livraison, soit un retard de neuf mois (de fin novembre 2007 à août 2008), pour les cinq appartements qui n'ont pas été revendus, soit une perte nette de 47 083 euros
* préjudice lié aux problèmes d'isolation qui ont contraint les propriétaires à accorder des baisses de loyer à leurs locataires, de 2009 à 2022 et à retirer de la location certains appartements, soit 250 973 euros (144 103 + 106 870)
* TVA sur vente d'un appartement : 28 359 euros
* règlement de copropriété : 2 181 euros
* perte de revenus locatifs suite à la vente des logements : 118 858 euros
* perte de plus-value sur l'appartement vendu : 145 000 euros
* dont à déduire les charges économisées : 78 000 euros
total : 514 454 euros
- perte de revenus locatifs pour la période du 1er juillet 2022 au 31 juillet 2025 : 150 444 euros
- perte de surface qui résultera nécessairement des travaux de reprise : 96 000 euros.
Le lien de causalité entre les préjudices immatériels ainsi décrits par l'expert ou certains d'entre eux et la responsabilité de plein droit de l'architecte, de même que l'évaluation desdits préjudices sont sérieusement contestables, le rapport d'un expert judiciaire pouvant être discuté en ce qui concerne la définition des préjudices, les méthodes de calcul, les bases de calcul.
Le principe comme le montant du préjudice dont MM. [G], [S] et [O] demandent réparation à l'architecte devra en conséquence être déterminé par le juge du fond statuant après expertise.
C'est à juste titre que le juge de la mise en état a rejeté les demandes de provision formées par les co-indivisaires à l'égard de l'architecte.
L'action directe de la victime contre l'assureur de responsabilité, qui trouve son fondement dans le droit de la victime à réparation de son préjudice, se prescrit par le même délai que son action contre le responsable et ne peut être exercée contre l'assureur, au-delà de ce délai, que tant que celui-ci reste exposé au recours de son assuré.
La question de la prescription ne pouvant être tranchée par le juge de la mise en état statuant sous l'empire de l'article 771 ancien du code de procédure civile, tous les arguments invoqués à cet égard devront être présentés devant le tribunal judiciaire, puisqu'il existe une discussion sérieuse quant à la fin de non-recevoir ainsi soulevée.
En outre, même si l'action des co-indivisaires contre la MAF, assureur de l'architecte, était déclarée recevable, l'obligation de garantie de la compagnie d'assurances est elle-même sérieusement contestable, dans la mesure où l'obligation d'assurance du constructeur du fait de sa responsabilité décennale ne porte que sur les dommages matériels, les dommages immatériels relevant de garanties facultatives, de sorte que cette question ne peut être tranchée sans analyse du contrat d'assurances souscrit entre la société AJ Architectes et la société MAF.
Les demandes principale et subsidiaire de MM. [G], [S] et [O] tendant à voir condamner la société MAF à leur payer des provisions à valoir sur la réparation des préjudices ci-dessus invoqués doivent être rejetées. L'ordonnance du juge de la mise en état est confirmée sur ce point.
L'ordonnance doit également être confirmée, pour les mêmes motifs, en ce qu'elle a rejeté la demande tendant à l'octroi de sommes au titre des honoraires versés aux experts privés (M. [W] et M. [M]) et des frais de défense exposés au décours des opérations d'expertise. Les honoraires des experts judiciaires restés à charge seront compris dans les dépens de l'instance au fond et leur sort dépendra de la solution apportée au litige. Il n'y a pas lieu d'en ordonner d'ores et déjà le remboursement.
Sur la demande de provision du syndicat des copropriétaires à l'égard de la société SMA
Il ressort du dispositif de ses conclusions d'appel que la société SMA ne demande pas l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle l'a condamnée à payer au syndicat des copropriétaires une provision d'un montant de 326 449,80 euros.
Le syndicat des copropriétaires fait valoir que :
- l'assureur ne conteste pas le principe de sa garantie
- les désordres dans leur ensemble et leur entièreté présentent un caractère décennal, y compris les désordres acoustiques et de ventilation
- la société SMA a manqué à son obligation de pré-financement
- il a fondé sa demande de provision sur le coût d'une solution de réhabilitation et non pas de démolition-reconstruction
- la réalisation des travaux de reprise s'avère complexe
- il est fondé à solliciter une provision égale au montant total des travaux tel que retenu par l'expert judiciaire, l'évaluation de ce dernier correspondant à la reprise des désordres thermiques laquelle entraînera la reprise des désordres acoustiques liés aux panneaux polycarbonate.
*****
L'assurance de dommages obligatoire a pour objet de garantir, en-dehors de toute recherche de responsabilité, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs, au sens de l'article 1792-1 du code civil, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique, sur le fondement de l'article 1792 du code de procédure civile.
L'assurance dommages ouvrage n'est pas une assurance de responsabilité, mais une assurance de chose attachée à l'ouvrage qui se transmet de plein droit avec la propriété de l'immeuble et bénéficie au maître de l'ouvrage, ainsi qu'aux propriétaires successifs ou à ceux qui sont subrogés dans leurs droits.
La garantie dommages ouvrage ne s'applique pas aux dommages immatériels.
En l'espèce, il résulte du rapport d'expertise :
- que la construction est affectée de multiples ponts thermiques et défauts d'étanchéité
- que trois types de désordres majeurs parce que généralisés ont été identifiés : problèmes de mise en oeuvre et défauts des menuiseries extérieures, présence de panneaux polycarbonate utilisés hors des domaines d'emploi préconisés par le fabricant, la conception et la réalisation des toitures
- que l'isolation acoustique des façades n'est pas conforme à la réglementation en vigueur dès lors que celles-ci sont constituées par des panneaux de polycarbonate et qu'il n'y a pas d'autre moyen pour traiter ce problème que changer de matériau
- que l'isolation acoustique des toitures n'est pas conforme à la réglementation en vigueur
- que des chocs sur les surfaces métalliques se propagent par la structure du bâtiment
- qu'il existe des désordres de ventilation en ce que dans de nombreuses pièces, les débits ne sont pas conformes à la réglementation, les bouches d'entrée d'air ne sont pas conformes aux règles de l'art et au marché de l'entreprise et des anomalies ont été constatées dans trois logements.
Les travaux de reprise de ces désordres et la maîtrise d'oeuvre et l'assistance au maître de l'ouvrage ont été évalués par l'expert (solution 2 page 20 du rapport) aux sommes respectives de 839 349,38 euros hors taxes et de 140 000 euros hors taxes.
Les désordres tels que décrits par l'expert affectent de manière incontestable l'immeuble, dans ses éléments constitutifs (façades et toiture) et dans l'un de ses éléments d'équipement (ventilation mécanique) et le rendent impropre à sa destination.
L'obligation à indemnisation de la société SMA en sa qualité d'assureur dommages ouvrage est non sérieusement contestable à hauteur de la provision sollicitée par le syndicat des copropriétaires au titre des travaux de réfection nécessaires, à savoir pour l'essentiel le remplacement des façades intérieures et des menuiseries, l'isolation de la toiture par l'intérieur, l'isolation des toitures-terrasse par l'intérieur, l'isolation de la sous-face de la dalle du premier étage sur le parc de stationnement et le remplacement de toutes les installations de VMC autoréglables.
Il convient de porter le montant de la provision allouée par le juge de la mise en état à la somme totale de 979 349,38 euros hors taxes, soit 1 175 219,26 euros toutes taxes comprises, somme qui sera réévaluée à la date du présent arrêt en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 28 juillet 2022, date de dépôt du rapport d'expertise.
Sur les demandes de la société SMA
La société SMA fait valoir que :
- elle a payé la somme de 326 449,80 euros mise à sa charge (par le juge de la mise en état), de sorte qu'elle est bien fondée à exercer son recours subrogatoire à l'encontre des intervenants dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire pour le défaut d'isolation thermique
- si la cour venait à accorder une provision supplémentaire au syndicat des copropriétaires, elle est bien fondée à demander à être garantie de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge en principal, frais et dépens
- elle justifie avoir interrompu les délais de prescription à l'encontre de M. [A], de son assureur, la MAF, de M. [Z] et de ses assureurs, les sociétés MMA et MMA IARD.
*****
L'action en garantie ne suppose pas que l'appelant en garantie ait déjà indemnisé le demandeur initial.
Le recours subrogatoire défini par l'article L121-12 du code des assurances dispose que l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui par leur fait ont causé le dommage ayant donné lieu à la garantie de l'assureur.
En l'espèce, la société SMA a certes exécuté la condamnation provisionnelle prononcée à son encontre, mais son recours subrogatoire, comme ses recours en garantie sont sérieusement contestables.
Il est nécessaire de déterminer les responsabilités des différents intervenants à la construction, ce qui relève des pouvoirs du seul juge du fond et non du juge de la mise en état.
Il convient en conséquence de rejeter la demande de la société SMA aux fins de voir condamner in solidum les intimés visés dans ses conclusions d'appel à lui payer la somme de 326 449,80 euros et la demande subsidiaire aux fins de condamner in solidum les intimés visés dans ses conclusions d'appel à la relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.
Les autres demandes en garantie sont sans objet à ce stade de la procédure.
L'équité commande de condamner la société SMA à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, l'ordonnance étant confirmée en ce qu'elle a rejeté toutes les demandes présentées sur ce fondement.
Les autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement:
CONFIRME l'ordonnance, sauf à porter à la somme de 979 349,38 euros hors taxes, soit
1 175 219,26 euros toutes taxes comprises, le montant de la provision au paiement de laquelle est condamnée la société SMA, somme qui sera réévaluée à la date du présent arrêt en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 28 juillet 2022, date de dépôt du rapport d'expertise
Y AJOUTANT,
REJETTE la demande de la SMA tendant à voir condamner in solidum M. [A] ès qualités de liquidateur amiable, la société AJ Architectes, la société MAF, M. [Z] et ses assureurs, les sociétés MMA et MMA IARD, la société Bureau Veritas Construction, la société AB Etanchéité et son assureur, la société Axa France IARD et les sociétés GAN Assurances IARD, Générali et Axa prises en qualité d'assureurs de la société PJM, à lui payer la somme de 326 4489,80 euros
CONDAMNE la société SMA aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés pour ceux qui les concernent par Maître Prudon et Maître Berthiaud, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
CONDAMNE la société SMA à payer au Sydicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel
REJETTE les autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE