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Décisions

CA Pau, 1re ch., 18 novembre 2025, n° 24/00321

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 24/00321

18 novembre 2025

ND/AB

Numéro 25/3132

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 18/11/2025

Dossier : N° RG 24/00321 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IX3M

Nature affaire :

Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction

Affaire :

S.A. MAAF ASSURANCES

C/

[D] [W], [B] [J] [H] [E] épouse [W], [T] [O], S.A.R.L. ATLANTICALU, S.A. SMA

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 18 Novembre 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 16 Septembre 2025, devant :

M. Patrick CASTAGNE, Président

Mme France-Marie DELCOURT, Conseillère

Mme Anne BAUDIER, Conseillère

assistées de Mme BRUNET, Greffière, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

S.A. MAAF ASSURANCES

immatriculée au RCS de [Localité 15] sous le n° 542 073 580, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, le Président du conseil d'Administration, en cette qualité domicilié au siège

[Adresse 10]

[Localité 7]

représentée par Me Richard ANCERET de la SARL ANCERET FAISANT DUPOUY, avocat au barreau de Bayonne

INTIMES :

Monsieur [D] [W]

né le 14 Octobre 1956 à [Localité 12] (92)

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 5]/FRANCE

Madame [B] [J] [H] [E] épouse [W]

née le 29 Décembre 1954 à [Localité 14] (Maroc)

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 5]/FRANCE

représentés par Me Jean William MARCEL, avocat au barreau de Pau

SELARL EKIP'

représentée par Maître [T] [O] en qualité de liquidateur de la SAS Fermetures Henri Peyrichou immatriculée au RCS de [Localité 13] sous le n° 775 637 366, ayant son siège social [Adresse 1],

désigné à ces fonctions par jugment du Tribunal de commerce de Dax du 18 décembre 2019

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me François PIAULT, avocat au barreau de Pau

assistée de Me Eric DECLETY, avocat au barreau de Bayonne

S.A. SMA

assureur de la société Fermetures Henri Peyrichou

immatriculée au RCS de [Localité 16] sous le n° 332 789 296

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 6]

représentée par Me François PIAULT, avocat au barreau de Pau

assistée de Me Marc DUPONT, avocat au barreau de Bayonne

S.A.R.L. ATLANTICALU

immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n° 398 568 162, prise en la personne de son gérant, domicilié en pareille qualité au siège

[Adresse 18]

[Localité 5]/FRANCE

représentée par Me Jon BERTIZBEREA de la SCP UHALDEBORDE-SALANNE GORGUET VERMOTE BERTIZBEREA, avocat au barreau de Bayonne

sur appel de la décision

en date du 08 JANVIER 2024

rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 9]

RG numéro : 19/00922

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [D] [W] et son épouse, Madame [B] [J] [H] [E], ont procédé à la construction d'une maison d'habitation située à [Localité 11] (64), achevée le 26 février 2009.

Selon facture du 6 janvier 2009 d'un montant de 35.313,05 euros, la fourniture et la pose des volets roulants équipant le bien ont été effectuées par la SARL Atlanticalu, assurée auprès de la SA MAAF Assurances.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 septembre 2015, les époux [W] ont demandé à la SARL Atlanticalu de remédier aux piqûres de corrosion affectant l'ensemble du matériel installé.

Par ordonnance du 14 juin 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bayonne, faisant droit à la demande des époux [W], a ordonné une expertise judiciaire des désordres affectant les volets roulants, confiée à M. [Y].

Par ordonnance du 24 janvier 2017, la mesure d'expertise a été rendue commune et opposable à la SA MAAF Assurances, et au fournisseur du matériel, la SAS Fermetures Henri Peyrichou.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 16 juin 2017.

Par actes des 2 et 16 mars 2018, les époux [W] ont fait assigner la SARL Atlanticalu et la SA MAAF Assurances devant le tribunal de grande instance de Bayonne aux fins de les voir condamner in solidum au paiement du coût des travaux réparatoires des désordres.

Par acte du 6 mai 2019, la SA MAAF Assurances a fait appeler à la cause la SAS Fermetures Henri Peyrichou.

Par jugement du 18 décembre 2019, le tribunal de commerce de Dax a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SAS Fermetures Henri Peyrichou, et a désigné la SELARL Ekip', prise en la personne de Me [T] [O], ès qualités de liquidateur judiciaire.

Par acte du 3 décembre 2020, la SA MAAF Assurances a fait appeler à la cause la SELARL Ekip' en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Fermetures Henri Peyrichou, et la SA SMA, assureur de cette dernière.

Suivant jugement réputé contradictoire du 8 janvier 2024 (RG n°19/00922), le tribunal a':

- déclaré la SARL Atlanticalu contractuellement responsable des désordres affectant les volets roulants,

- condamné solidairement la SARL Atlanticalu et la SA MAAF Assurances à payer aux époux [W] la somme de 10.625,33 euros TTC,

- rejeté toutes les autres demandes,

- condamné solidairement la SARL Atlanticalu et la SA MAAF Assurances à payer aux époux [W] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement la SARL Atlanticalu et la SA MAAF Assurances à payer à la SA SMA la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement la SARL Atlanticalu et la SA MAAF Assurances aux entiers dépens en ceux compris les frais d'expertise et les dépens engagés par la SA SMA.

Pour motiver sa décision, le tribunal a retenu':

- que le moyen soulevé par la SA MAAF Assurances tenant à l'exclusion de sa garantie pour les vices intermédiaires n'est pas développé, ne porte aucune référence à l'article du contrat la prévoyant, de sorte qu'il est écarté,

- que la responsabilité de la SARL Atlanticalu doit être recherchée sur le fondement contractuel dès lors que les désordres n'affectent pas la solidité du bien et ne le rendent pas impropre à sa destination,

- que la réalité d'un désordre esthétique affectant les volets n'est pas contestable, pas plus que sa cause n'est contestée, les points de corrosion étant la conséquence de l'environnement océanique des lieux,

- qu'il est anormal que les volets roulants présentent de nombreuses traces de corrosion cinq années seulement après leur pose, de sorte que la SARL Atlanticalu est responsable d'un manquement à son devoir de conseil sur l'opportunité de procéder à un laquage adapté du fait de l'exposition des volets qu'elle a posés,

- qu'a été fourni à l'expert judiciaire un devis de remise en état pour un coût total de 10.625,33 euros TTC, lequel apparaît suffisant à réparer le préjudice des époux [W], dès lors que les volets roulants fonctionnent et sont utilisés depuis près de quinze ans, et ne sont affectés que d'un défaut esthétique,

- que le trouble dans les conditions d'existence allégué par les époux [W] est insuffisamment justifié,

- que la SARL Atlanticalu ne saurait être garantie par le fournisseur des volets, dès lors qu'elle a facturé aux époux [W] une prestation complète de 'fourniture et pose', qu'elle ne démontre pas l'avoir informé des spécificités du chantier ou qu'il se serait rendu sur place avant la finalisation de la commande, et que la reconnaissance de responsabilité de la SAS Fermetures Henri Peyrichou est insuffisamment caractérisée.

La SA MAAF Assurances a relevé appel par déclaration du 26 janvier 2024 (RG n°24/00321), critiquant le jugement dans l'ensemble de ses dispositions.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 5 septembre 2024, la SA MAAF Assurances, assureur de la SARL Atlanticalu, appelante, entend voir la cour :

- infirmer intégralement le jugement,

Statuant à nouveau,

- juger que les époux [W] n'ont ni qualité, ni intérêt à agir,

- les débouter intégralement en conséquence de toutes leurs demandes à son encontre,

A titre subsidiaire,

- juger qu'aucune garantie souscrite auprès de la MAAF n'est applicable,

- en conséquence, la juger et la mettre hors de cause,

A titre infiniment subsidiaire,

- juger que la SARL Atlanticalu n'a commis aucune faute, ni manquement contractuel,

- rejeter par conséquent toute demande à son encontre,

En tout état de cause,

- juger que la SAS Fermetures Henri Peyrichou a manqué à son devoir d'information et de conseil,

- condamner en conséquence la SA SMA, ès-qualité d'assureur de la SAS Fermetures Henri Peyrichou à la relever indemne de toutes condamnations qui seraient prononcées à son égard,

- condamner toute partie succombante à la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir, au visa des articles 563 et suivants du code de procédure civile, 1231-1 du code civil (ancien 1147), et L.124-3 du code des Assurances :

- que les époux [W] ont perdu leur qualité de maître de l'ouvrage et donc toute qualité à agir du fait de la vente du bien litigieux le 19 juin 2020,

- que le préjudice personnel qu'ils allèguent n'est pas démontré,

- qu'elle doit être mise hors de cause dès lors que la police d'assurance souscrite par la SARL Atlanticalu ne couvre pas les dommages intermédiaires,

- qu'en présence de dommages purement esthétiques, seule la responsabilité contractuelle de la SARL Atlanticalu serait susceptible d'être engagée, mais aucune faute de sa part n'est démontrée, dès lors qu'elle était simplement chargée de la pose des volets roulants et n'était donc pas concernée par le type de laquage qu'aurait dû choisir le maître de l'ouvrage,

- que son devoir de conseil portait uniquement sur l'utilisation des volets et leur entretien, ce sur quoi l'expert judiciaire ne s'est pas prononcé,

- que le devoir de conseil relatif aux matériaux des volets incombait au fournisseur ou au concepteur du projet immobilier,

- que la SAS Fermetures Henri Peyrichou était tenue, en sa qualité d'homme de l'art, d'un devoir de conseil et d'information à l'égard du maître de l'ouvrage, même sans être liée à lui par un contrat, de sorte qu'elle devait l'alerter sur les risques qu'il prenait en choisissant une solution technique insuffisante ou des matériaux inadéquats, et informer son cocontractant la SARL Atlanticalu, alors que, en tant que professionnelle de la pose de volets, elle ne dispose pas de connaissances aussi poussées que la SAS Fermetures Henri Peyrichou sur la qualité du laquage nécessaire,

- que la SAS Fermetures Henri Peyrichou avait connaissance de la situation particulière des lieux et de sa proximité avec l'océan, et avait en tout état de cause l'obligation de se renseigner sur les besoins de son acquéreur.

* Dans leurs conclusions notifiées le 10 juillet 2024, M. [D] [W] et Mme [B] [J] [H] [E] épouse [W], intimés, demandent à la cour de :

- rejeter les appels formulés par la MAAF Assurances, la SARL Atlanticalu et la SMA SA contre le jugement,

Par voie de conséquence,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- condamner solidairement la SARL Atlanticalu et la SA MAAF Assurances à leur verser la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement la SARL Atlanticalu et la SA MAAF Assurances aux dépens, ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Au soutien de leurs demandes, ils font valoir, au visa des articles 1103 et suivants du code civil :

- que leurs demandes sont recevables, dès lors qu'ils ont subi un préjudice financier personnel, ayant engagé des frais de procédure et ayant subi un désordre esthétique pendant plusieurs années, lequel s'est traduit par une moins-value lors de la revente de leur bien, ce qui caractérise un intérêt direct et certain à agir,

- que l'acquéreur de leur bien ne disposait d'aucune action contre le constructeur et son assureur lors de la signature de l'acte en raison de la prescription,

- que les conditions d'engagement de la responsabilité contractuelle de la SARL Atlanticalu sont réunies, dès lors que le désordre est généralisé, qu'il est dû selon l'expert judiciaire à une faute de la SARL Atlanticalu qui ne les a pas conseillés sur le laquage adapté des volets roulants, que le caractère esthétique des volets était substantiel compte tenu de la qualité de leur maison, et que le désordre ne relève pas de la garantie décennale ou de parfait achèvement,

- que l'expert judiciaire a écarté qu'un défaut d'entretien puisse être à l'origine des désordres, et que ce défaut n'a jamais été démontré,

- qu'il appartenait bien à la SARL Atlanticalu de se préoccuper de l'adaptation du matériau des volets roulants, sa facture mentionnant la fourniture et la pose de ces derniers.

* Dans ses dernières conclusions notifiées le 26 juillet 2024, la SARL Atlanticalu, intimée et appelante incident, demande à la cour de :

- infirmer et réformer en toutes ses dispositions le jugement,

Statuant de nouveau,

- constater l'irrecevabilité des demandes des époux [W] pour défaut d'intérêt à agir,

- en conséquence, les débouter de toutes leurs demandes,

A titre subsidiaire,

- constater l'absence de faute démontrée de sa part,

- débouter en conséquence les époux [W] de toute demande à son encontre,

A titre infiniment subsidiaire,

- condamner la SA SMA en sa qualité d'assureur de la société Fermetures Henri Peyrichou,la SELARL Ekip' prise en sa qualité de liquidateur de la SAS Fermetures Henri Peyrichou et la SA MAAF à la relever indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

En toute hypothèse,

- condamner les parties succombantes à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir, au visa des articles 1231-1 et 1792 du code civil, et des articles 122 et 123 du code de procédure civile :

- que les époux [W] n'ont pas qualité ni intérêt à agir dès lors qu'ils ont vendu le bien prétendument affecté de désordres, transmettant ainsi leur action en justice aux acquéreurs, et qu'ils ne sont donc plus en mesure de se prévaloir d'un préjudice résultant de désordres affectant le bien,

- que les époux [W] ne peuvent se prévaloir d'un préjudice personnel qu'ils n'ont pas allégué en première instance, alors que le préjudice esthétique invoqué est minime et n'a pas empêché la vente, dont l'acte ne mentionne ni l'existence d'un désordre, ni d'une moins-value,

- que l'impossibilité pour les acquéreurs du bien d'agir à son encontre ne crée pas un préjudice personnel pour les époux [W],

- qu'à titre subsidiaire, elle n'a commis aucune faute dès lors que le désordre provient de la défectuosité du matériel vendu par la SAS Fermetures Henri Peyrichou, qui a reconnu être responsable des désordres et s'est engagée à prendre en charge les réparations, de sorte que sa responsabilité doit être engagée, sous la garantie de son assureur,

- que la garantie de son assureur la SA MAAF Assurances s'applique, cette dernière s'étant en outre engagée à prendre en charge les réparations.

* Par conclusions notifiées le 26 juillet 2024, la SELARL Ekip', ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Fermetures Henri Peyrichou, intimée et appelante incident, entend voir la cour :

- infirmer le jugement,

- la mettre purement et simplement hors de cause faute de déclaration de créance par l'une ou l'autre des parties à l'instance au passif de la procédure collective de la société Fermetures Henri Peyrichou,

- juger irrecevables toutes demandes en condamnation formulées par l'une ou l'autre des parties à son encontre ès qualités et à l'encontre de la société Fermetures Henri Peyrichou,

- débouter la SA MAAF Assurances et la société Atlanticalu de leurs appels,

- condamner la SA MAAF Assurances aux dépens de première instance et d'appel,

- condamner la SA MAAF Assurances à lui payer une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- juger irrecevable faute de qualité et d'intérêt à agir les demandes et prétentions des époux [W] et infirmer en conséquence le jugement concernant la recevabilité de leurs demandes,

- débouter la SA MAAF Assurances de son appel et de l'intégralité des demandes et prétentions formulées par elle devant la cour,

- débouter la société Atlanticalu de son appel et de ses demandes formées à son encontre ès qualités, et à l'encontre la société Fermetures Henri Peyrichou,

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la SA MAAF Assurances et de la société Atlanticalu formées à l'encontre de la société Fermetures Henri Peyrichou.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir, au visa des articles 31 et suivants du code de procédure civile et L. 622-7 du code de commerce :

- que les époux [W] ont perdu toute qualité et tout intérêt à agir suite à la vente de leur maison au cours de l'année 2020, puisque l'action en réparation des désordres affectant l'immeuble vendu a été transmise aux acquéreurs des époux [W] en l'absence de clause contraire figurant à l'acte de vente, lesquels ne sont pas partie à l'instance,

- que les préjudices personnels allégués par les époux [W] ne sont pas caractérisés,

- qu'elle doit être mise hors de cause dès lors qu'aucune partie à l'instance ne justifie avoir déclaré une quelconque créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Fermetures Henri Peyrichou, et qu'aucune demande ne tend à la fixation d'une créance à son passif,

- que toute demande de condamnation de la SAS Fermetures Henri Peyrichou est irrecevable du fait de l'interdiction de paiement des créances antérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective,

- qu'à titre subsidiaire, la responsabilité de la SAS Fermetures Henri Peyrichou ne peut être retenue, dès lors qu'elle n'était tenue à aucune obligation de conseil à l'égard des époux [W], que la SARL Atlanticalu est un professionnel qualifié pour déterminer les besoins de ses clients au regard notamment de la spécificité des lieux, et n'a pourtant formulé aucune demande spécifique à son fournisseur, qui n'a jamais reconnu sa responsabilité dans la survenance des désordres, et que les volets fournis fonctionnent correctement.

* Dans ses conclusions notifiées le 25 juin 2024, la SA SMA, assureur de la SAS Fermetures Henri Peyrichou, intimée et appelante incident, demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a statué sur les demandes des époux [W],

- déclarer les époux [W] irrecevables à agir en suite de la vente de leur bien,

- condamner les parties succombantes à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la MAAF et la société Atlanticalu de leurs demandes formulées à son encontre en sa qualité d'assureur de la société Fermetures Henri Peyrichou,

- rejeter l'ensemble des demandes formulées à l'encontre de la société Fermetures Henri Peyrichou,

A titre plus subsidiaire, et en cas de condamnation,

- déclarer sa franchise contractuelle opposable à concurrence de 3.660 euros.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :

- que les époux [W] n'ont pas qualité et intérêt à agir suite à la vente de leur bien en 2020, dont l'acte ne contient aucune mention relative aux désordres affectant les volets roulants,

- qu'à titre subsidiaire, la responsabilité de son assurée ne peut être engagée dès lors que celle-ci n'a aucun lien contractuel avec les époux [W] et n'est donc tenue à aucune obligation de conseil ou d'information à leur égard, ce que ces derniers ne lui reprochent pas,

- que la SAS Fermetures Henri Peyrichou n'était tenue à aucune obligation de conseil à l'égard de la SARL Atlanticalu qui est une entreprise de menuiserie spécialisée et donc un acheteur professionnel ayant la compétence suffisante pour apprécier les spécificités des volets roulants qu'elle achète en connaissance des besoins de ses clients au regard notamment de l'exposition de leur maison,

- que la reconnaissance de responsabilité de la SAS Fermetures Henri Peyrichou n'émane pas de cette dernière et n'a donc aucune valeur juridique pour lui être opposée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 juillet 2025.

MOTIVATION':

- Sur l'intérêt et la qualité à agir des époux [W]':

A titre liminaire, la cour relève que la question de la qualité et de l'intérêt à agir des époux [W] aurait dû se poser devant le tribunal judiciaire de Bayonne dès lors que la vente de leur maison est intervenue au mois de juin 2020, avant que la juridiction ne statue. Or, cette information n'a été portée à la connaissance de personne à cette époque-là.

En vertu de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

Sauf clause contraire, les acquéreurs successifs d'un immeuble ont qualité à agir, même pour les dommages nés antérieurement à la vente et ce nonobstant l'action en réparation intentée par le vendeur avant cette vente, contre les constructeurs sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun qui accompagne l'immeuble en tant qu'accessoire (Cass. 3e civ., 10 juillet 2013, n°12-21.910).

Au cas présent, il n'est pas contesté que les époux [W] ont vendu à la SNC [Adresse 17] leur maison située à [Localité 11] suivant un acte authentique du 19 juin 2020 qui ne comporte aucune clause prévoyant qu'ils conservent le bénéfice de l'action qu'ils ont engagée avant la vente à l'encontre de la SARL Atlanticalu.

Toutefois, l'ancien propriétaire conserve un intérêt à agir malgré la vente s'il justifie d'un préjudice personnel lui conférant un intérêt direct et certain à agir après la vente de la maison (Cass. 3e civ., 4 mars 2014, n°13-12.468).

En l'occurrence, les époux [W] invoquent un préjudice personnel qui serait de deux ordres, d'une part un intérêt matériel dans la mesure où ils ont engagé d'importants frais pour la procédure de référé (frais d'expertise judiciaire et frais de commissaire de justice) et d'autre part un préjudice esthétique subi pendant de nombreuses années et qui aurait occasionné une moins-value de la maison.

Or, les frais d'expertise judiciaire et de commissaire de justice sont directement liés de la procédure engagée par eux à l'encontre de la SARL Atlanticalu - aux fins d'obtenir réparation des désordres ' qu'ils ne peuvent cependant mener à son terme puisqu'ils ont perdu leur qualité et intérêt à agir.

Les époux [W] doivent être déclarés irrecevables en leurs demandes formulées à l'encontre de la SARL Atlanticalu et de son assureur la SA MAAF Assurances au titre du préjudice matériel (indemnité réparatoire).

La décision entreprise sera donc infirmée en toutes ses dispositions.

- Sur la demande nouvelle des époux [W] au titre du préjudice esthétique

Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article suivant prévoit que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

En vertu de l'article 566 du même code, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Comme le souligne à juste titre la SARL Atlanticalu, les époux [W] présentent pour la première fois devant la cour d'appel une demande de dommages et intérêts pour le préjudice esthétique qu'ils auraient subi pendant plusieurs années et qui aurait occasionné une moins-value de leur maison.

Or, cette demande, qui ne tend certes pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, est bien leur conséquence. En effet, l'atteinte à l'aspect visuel extérieur des volets est la conséquence directe du dommage matériel invoqué par les demandeurs.

Cependant, les époux [W] se contentent d'affirmer qu'ils ont subi une dépréciation de leur bien immobilier sans même tenter de le démontrer. Ils ne versent aux débats aucun élément à ce titre. Par ailleurs, ils échouent à rapporter la preuve qui leur incombe de l'existence d'un trouble réel lié aux quelques traces de corrosion visibles sur les photographies prises lors de l'expertise judiciaire.

Les époux [W] seront donc déboutés de la présente demande.

Il sera ajouté à la décision entreprise.

- Sur les frais du procès':

La décision entreprise sera infirmée en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Les époux [W], qui succombent, seront solidairement condamnés aux dépens de première instance incluant les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'à ceux d'appel. Ils seront également déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles.

Conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il convient en principe de mettre à la charge de la partie qui succombe une somme au titre des frais de procédure engagés et non compris dans les dépens. Il peut toutefois en être autrement pour des raisons d'équité.

En l'espèce, il est équitable de laisser à la charge de la SA MAAF Assurances, de la SELARL Ekip' ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Fermetures Henri Peyrichou d'autre part et de la SA SMA la totalité de leurs frais de procédure non compris dans les dépens. Leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera donc rejetée.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare Monsieur [D] [W] et Madame [B] [J] [H] [E] épouse [W] irrecevables en leurs demandes formulées en première instance,

En conséquence,

Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute Monsieur [D] [W] etMadame [B] [J] [H] [E] épouse [W] de leur demande tendant à l'indemnisation de leur préjudice esthétique';

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement Monsieur [D] [W] et Madame [B] [J] [H] [E] épouse [W] aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par M. Patrick CASTAGNE, Président, et par Mme Hélène BRUNET, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, Le Président,

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