Cass. com., 26 novembre 2025, n° 24-19.035
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Edifices de France SARL
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
Mme Lefeuvre
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 6 juin 2024), le capital de la société à responsabilité limitée Edifices de France est détenu par MM. [G] et [I].
2. Par un jugement du 12 février 2014, la société Edifices de France a été mise en redressement judiciaire. Un plan de redressement d'une durée de dix ans a été arrêté par un jugement du 18 novembre 2015, la société [X] et associés étant nommée en qualité de commissaire à son exécution.
3. Invoquant un manque d'information sur l'activité de la société Edifices de France, M. [G] l'a assignée en référé, ainsi que la société [X] et associés et la société Financière Roland [I] Finarco (Finarco), laquelle avait conclu des contrats de prestation de service avec la société Edifices de France et bénéficié de virements de sa part, aux fins de voir désigner, sur le fondement de l'article L. 223-37 du code de commerce, un expert chargé d'examiner des comptes sociaux et documents comptables afin de déterminer les conditions de certains virements, les conditions ayant conduit à l'absence de convocation de l'assemblée générale pour statuer sur les comptes clos le 31 mars 2021, et les documents sociaux afin de déterminer les conditions de conclusion des contrats de prestation de service avec la société Finarco.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. Les sociétés Edifices de France, [X] et associés, ès qualités, et Finarco font grief à l'arrêt de déclarer recevable et bien-fondée la demande d'expertise de gestion formée par M. [G], alors « que si aucune disposition n'interdit aux associés d'une société mise en redressement ou liquidation judiciaires de critiquer une décision de gestion antérieure à la période suspecte et de demander une expertise de gestion, une telle demande est irrecevable s'agissant d'opérations postérieures à l'ouverture du redressement judiciaire et à l'adoption d'un plan de continuation, le commissaire à l'exécution du plan étant seul chargé de contrôler les opérations en cause ; qu'en déclarant recevable la demande de M. [G] au motif que le jugement qui adoptait le plan rétablissait le débiteur dans ses pouvoirs de gestion et la maîtrise de ses biens même si l'exécution du plan se faisait sous le contrôle du commissaire à l'exécution du plan, la cour d'appel a violé l'article L. 223-37 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
6. Après avoir énoncé, à bon droit, que le jugement arrêtant un plan rétablit le débiteur dans ses pouvoirs de gestion et dans la maîtrise de ses biens, dont il bénéficiait avant l'ouverture de la procédure collective, sauf restriction particulière en application de l'article L. 626-14 du code de commerce, et relevé que la demande d'expertise portait sur des actes réalisés postérieurement à l'ouverture de la procédure au cours de la période 2017-2021 par les organes de gestion de la société Edifices de France, la cour d'appel en a exactement déduit que cette demande était recevable.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
8. Les sociétés Edifices de France, [X] et associés, ès qualités, et Finarco font le même grief à l'arrêt, alors « que dans tous les cas d'urgence seulement, la juridiction des référés peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; qu'en déclarant recevable la demande de M. [G] au motif que la demande fondée sur l'article L. 223-37 du code de commerce n'était pas soumise à la condition d'urgence, la cour d'appel, statuant sur appel d'une ordonnance de référé, a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 872 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
9. Selon l'article R. 223-30, alinéa 1er, du code de commerce, l'expert chargé de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations prévues au premier alinéa de l'article L. 223-37 est désigné par le président du tribunal de commerce statuant en référé.
10. L'urgence n'est pas une condition requise pour que soit ordonnée une expertise de gestion sur le fondement de ces textes.
11. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Edifices de France et Financière Roland [I] Finarco aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé publiquement le vingt-six novembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.