CA Bordeaux, 1re ch. civ., 19 novembre 2025, n° 24/05535
BORDEAUX
Ordonnance
Autre
PARTIES
Demandeur :
Cadrimages (SARL)
Défendeur :
Cadrimages (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Pacteau
Avocats :
Mauriac, Cazabonne, Bertizberea
EXPOSE DE LA PROCÉDURE :
Vu l'appel interjeté le 20 décembre 2024 par M. [F] [J] et la SARL [V] [E] à l'encontre du jugement rendu le 4 juillet 2024 par le tribunal judiciaire de Bordeaux qui, dans le litige les opposant à la SARL Cadrimages, a :
- dit et jugé que les dessins « Les [Localité 6] » et « [Adresse 9] [Adresse 8] » édités par la société Cadrimages sont des contrefaçons des oeuvres originales « [Localité 6] » et « [Adresse 9] [Adresse 8] » de l'auteur [V] (M. [J]),
- condamné la société Cadrimages à payer à M. [J] la somme de 12 000 euros en réparation de l'ensemble de son préjudice,
- dit n'y a voir lieu à ordonner des investigations supplémentaires pour apprécier de ce préjudice,
- rejeté la demande de destruction, laquelle a été opérée deux mois après la délivrance de la mise en demeure,
- ordonné à la société Cadrimages de supprimer toutes références aux supports contrefaits
sur les réseaux sociaux et sites internet dans un délai de 2 mois et sous astreinte provisoire de 100 € par jour passé ce délai et durant trois mois, le tribunal se réservant de liquider l'astreinte,
- débouté les demandeurs de leur demande de publication,
- débouté la société [V] [E] de ses demandes au titre de la concurrence déloyale ou parasitaire,
- débouté Cadrimages de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la société Cadrimages à verser à la société [V] [E] la somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la société Cadrimages aux entiers dépens comprenant les frais de constat de
commissaire de justice.
Vu les conclusions d'incident déposées par M. [F] [J] et la SARL [V] [E] le19 mai 2025, demandant au conseiller de la mise en état d'ordonner la production forcée de pièces.
Vu les dernières conclusions d'incident de M. [F] [J] et la SARL [V] [E] en date du 11 septembre 2025, demandant au conseiller de la mise en état de :
- juger que les appelants sont recevables et bien fondés en leur incident,
- ordonner que dans les huit jours suivant l'ordonnance à intervenir, la société Cadrimages devra produire et communiquer sous peine d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard, un relevé, certifié par un expert comptable, du volume des ventes, en quantité et en chiffre d'affaires, de ses affiches '[Adresse 7]' et '[Adresse 11]' depuis la création de ces dernières jusqu'à ce jour,
- condamner la SARL Cadrimages aux entiers dépens de l'incident ;
Vu les dernières conclusions d'incident de la société Cadrimages en date du 14 octobre 2025, demandant au conseiller de la mise en état de :
- rejeter la demande présentée par la société [V] [E] et M. [F] [J],
- condamner la société [V] [E] et M. [F] [J] à verser chacun la somme de 1000 euros en faveur de la société Cadrimages sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- subsidiairement, si par impossible il était fait droit à la demande, accorder un délai de deux mois à la société Cadrimages pour produire les pièces sollicitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
M. [F] [J] et la SARL [V] [E] font valoir que la demande de production de pièces ici présentée concerne la demande présentée par la société [V] [E] aux fins d'indemnisation du préjudice qu'elle a subi en conséquence des actes de concurrence déloyale commis par la société Cadrimages, faits distincts de la contrefaçon au préjudice de M. [J] seul dont le préjudice a été indemnisé de manière forfaitaire ce qui a justifié le rejet de la demande de production de pièces par le premier juge.
La société Cadrimages leur oppose le fait que la demande a été présentée dans les mêmes termes au premier juge qui l'a rejetée dans son jugement, selon une disposition qui n'a pas fait l'objet d'un appel et est donc définitive.
Sur ce,
Selon l'article 913-1 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état peut enjoindre aux avocats des parties de mettre leurs conclusions en conformité avec les dispositions des articles 954 et 961. Il peut les inviter à répondre aux moyens sur lesquels ils n'auraient pas conclu et à fournir les explications de fait et de droit nécessaires à la solution du litige.
Il exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, à l'obtention et à la production des pièces.
Il peut se faire communiquer l'original des pièces versées aux débats ou en demander la remise en copie.
Il peut faire aux avocats des parties toutes communications utiles et, au besoin, leur adresser des injonctions.
En l'espèce, se pose la question de savoir si la demande de production de pièce présentée par les appelants a été rejetée ou non par le tribunal judiciaire par une décision aujourd'hui définitive pour ne pas avoir fait l'objet de l'appel actuellement pendant devant la présente cour.
Le tribunal judiciaire a plus spécialement, à la suite de la condamnation de la société Cadrimages à payer à M. [J] la somme de 12 000 euros en réparation de l'ensemble de son préjudice, 'dit n'y avoir lieu à ordonner des investigations supplémentaires pour apprécier de ce préjudice'. Il a, ce faisant, répondu à la demande formulée comme suit dans les écritures des appelants :
'sur la contrefaçon :
- dire et juger que les dessins « Les [Localité 6] » et « [Adresse 9] [Adresse 8] » édités par la société Cadrimages sont des contrefaçons des oeuvres originales « [Localité 6] » et « [Localité 10] [Adresse 8] » de l'auteur [V] ;
En conséquence :
- avant dire droit : ordonner à la société Cadrimages, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de 8 jours à compter du prononcé de l'injonction de communiquer un relevé, certifié par un expert-comptable, du volume des ventes, en quantité et en chiffre d'affaires, de ses affiches « Les [Localité 6] » et « [Localité 10] [Adresse 8] » depuis la création de ces dernières ;'
La demande de production de pièces concernait alors expressément la contrefaçon dont se disait victime M. [J].
Par le présent incident, la société [V] [E] et M. [J] demandent au conseiller de la mise en état d'ordonner que, dans les huit jours suivant l'ordonnance à intervenir, la société Cadrimages devra produire et communiquer sous peine d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard, un relevé, certifié par un expert comptable, du volume des ventes, en quantité et en chiffre d'affaires, de ses affiches 'Les [Localité 6]' et '[Adresse 11]' depuis la création de ces dernières jusqu'à ce jour. Cette prétention intervient dans le cadre de leur appel limité à deux chefs du dispositif du jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 4 juillet 2024, à savoir en ce qu'il a :
- débouté les demandeurs de leur demande de publication,
- débouté la société [V] [E] de ses demandes au titre de la concurrence déloyale ou parasitaire.
La demande de production de pièces concerne donc la demande de la société [V] [E] et non pas, comme en première instance, celle de M. [J] qui avait un fondement différent.
Si une concurrence déloyale ou un parasitisme était reconnu au préjudice de la société [V] [E], l'appréciation de son préjudice supposera de connaître le volume de produits litigieux vendus par la société Cadrimages et le chiffre d'affaires généré par leur vente.
La demande de communication de pièce est donc fondée et sera ordonnée, avec un délai de deux mois laissé à la société Cadrimages pour s'y conformer et sous astreinte de 100 euros par jours de retard passé ce délai.
Les dépens de l'incident seront laissés à la charge de la société Cadrimages qui sera en revanche déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Ordonne à la société Cadrimages de produire et communiquer à la société [V] [E] dans le délai de deux mois à compter de la présente ordonnance et sous peine d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard, un relevé, certifié par un expert comptable, du volume des ventes, en quantité et en chiffre d'affaires, de ses affiches 'Les [Localité 6]' et '[Adresse 11]' depuis la création de ces dernières jusqu'à ce jour ;
Condamne la société Cadrimages aux dépens de l'incident ;
Déboute la société Cadrimages de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
La présente ordonnance a été signée par Tatiana PACTEAU, Conseiller, en remplacement de Laurence MICHEL, Présidente chargée de la mise en état, légitimement empêchée, et par Vincent BRUGERE, Greffier.