CA Fort-de-France, ch. civ., 18 novembre 2025, n° 23/00366
FORT-DE-FRANCE
Arrêt
Autre
ARRET N°25/
N° RG 23/00366 - N° Portalis DBWA-V-B7H-CM7H
[I] [C] [W]
C/
S.A.R.L. CENTRE D'AFFAIRES LA POINTE SIMON (CAPS)
COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 18 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la cour : jugement du tribunal mixte de commerce de Fort de France, en date du 22 mars 2023, enregistrée sous le n° 2021/2654
APPELANT :
Monsieur [I] [C] [W]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Laurie CHANTALOU-NORDE, avocat au barreau de MARTINIQUE
INTIMEE :
S.A.R.L. CENTRE D'AFFAIRES LA POINTE SIMON (CAPS) prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Catherine RODAP, avocat au barreau de MARTINIQUE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 septembre 2025, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Nathalie Ramage, présidente de chambre chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :
Présidente : Madame Nathalie RAMAGE, présidente de chambre
Assesseur : Monsieur Thierry PLUMENAIL, Conseiller
Assesseur : Madame Claire DONNIZAUX, conseillère
Greffière lors des débats : Madame Sandra DE SOUSA,
Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 18 novembre 2025.
ARRÊT : contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Exposé du litige
Selon bail commercial en date du ler novembre 2017, la SAS centre d'affaires de la Pointe Simon (CAPS) a donné à la SAS Antilles sécurité Martinique (ASM) des locaux commerciaux situés dans la ZAC Pointe Simon, au 16ème étage de la tour "Lumina" sise [Adresse 1] à [Localité 2], destinés à l'exploitation administrative et commerciale d'une activité de sécurité et gardiennage, à l'exclusion de toute autre utilisation.
M. [I] [C] [W], représentant de la SAS ASM, s'est engagé à titre de caution au titre des obligations du bail pour la durée initiale de celui-ci et son éventuel renouvellement dans la limite de vingt années et pour une somme globale limitée à 70.000 €.
Par jugement en date du 04 février 2020, le tribunal mixte de commerce de Fort de France a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS ASM.
Le 16 avril 2020, la SARL CAPS a déclaré entre les mains de la SELARL [U] [L] [S] es qualités de mandataire liquidateur de la SAS ASM sa créance à titre privilégiée au sens de l'article 2332 du code civil et de l'article L. 622-16 du code de commerce, pour un montant de 190.784,04 euros.
Par courrier daté du 19 mars 2020, le liquidateur judiciaire a résilié purement et simplement le bail commercial.
Le 04 juin 2020, les clés des locaux ont été remises par le liquidateur au bailleur.
le 12 janvier 2021, la société CAPS a mis M. [W] en demeure de payer la somme de 70.000 euros en sa qualité de caution, en vain.
Par acte du 26 mai 2021, cette société a assigné M. [W] devant le tribunal mixte de commerce de Fort de France aux fins, notamment, d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme précitée.
Par jugement contradictoire du 22 mars 2023, le tribunal a :
- constaté que la SAS ASM restait redevable à l'égard la société CAPS, hors montant du dépôt de garantie de 7.600 euros, des sommes de 25.909,68 euros, 16.700,00 euros et 30.000 euros, soit un total de 72.609,68 euros ;
- constaté que M. [I] [C] [W] s'était porté caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM pour l'exécution des obligations du bail conclu par celle-ci le ler novembre 2017, dans la limite de vingt années et pour une somme globale limitée à 70.000 euros;
En conséquence,
- condamné M. [I] [C] [W] à payer à la société CAPS les sommes suivantes :
* 70.000 euros au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision ;
* 2.000 euros au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles ;
- rejeté autre demande, plus ample ou contraire ;
- laissé les dépens à la charge de M. [W].
Par déclaration reçue le 04 septembre 2023, M. [W] a interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été orientée à la mise en état le 19 septembre 2023.
Aux termes de ses premières conclusions du 04 décembre 2023 et dernières du 19 mars 2025, l'appelant demande de :
- dire recevable et bien fondé son appel ;
- dire et juger bien fondées l'ensemble de ses demandes ;
- débouter l'intimée de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes -infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a :
* constaté que la SAS ASM reste redevable à l'égard de la SARL CAPS, hors montant du dépôt de garantie de 7.600 €, des sommes de 25.909,68€, 16.700 € et 30.000 € soit un total de 72.609,68 €,
* constaté que M. [I] [W] s'est porté caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM pour l'exécution des obligations du bail conclu par celle -ci le 1er novembre 2017, dans la limite de vingt années et pour un montant limité à 70.000 €,
* condamné M. [W] à payer à la SARL CAPS les sommes de :
' 70.000 € au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision,
' 2.000 € au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau,
- dire et juger bien fondées les demandes de M. [W] ;
- juger qu'il n'est pas démontré l'existence d'une dette locative de la société ASM liquidée et qu'en l'absence de dette principale, le cautionnement de M. [W] ne peut être recherché ;
- juger que la liquidation judiciaire de la société ASM et le dessaisissement de celle-ci au profit du liquidateur constituent un cas de force majeure ;
- juger que la clause stipulant une indemnité de résiliation ne sera pas applicable eu égard au contexte de liquidation et compte tenu de son caractère excessif ;
- débouter en conséquence la société centre d'affaires de la Pointe Simon de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes ;
- juger que les demandes reconventionnelles de M. [W] sont bien fondées ;
- condamner la société centre d'affaires de la Pointe Simon à payer à M. [W] la somme de :
' 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;
' 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamner aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions du 13 mai 2025, l'intimée demande de :
- recevoir la société centre d'affaires de la Pointe Simon centre d'affaires de la Pointe Simon ' CAPS, en ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France en date du 22 mars 2023 en toutes ses dispositions,
Par conséquent,
- débouter M. [I] [C] [W] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [I] [C] [W] au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- juger n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir ;
- condamner M. [I] [C] [W] aux entiers dépens.
La clôture est intervenue le 15 mai 2025.
L'affaire a été évoquée à l'audience du 19 septembre 2025 et la décision a été mise en délibéré au 18 novembre 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées et au jugement déféré.
Motifs :
1/ Sur l'obligation principale :
1-1/ Sur l'arriéré de loyers :
Le tribunal a relevé que le bail commercial avait été conclu pour une durée de 10 ans prenant effet à compter du 1er novembre 2017 en contrepartie du paiement d'un loyer annuel initialement fixé à la somme de 46.500€ HT, soit mensuellement 3.875 € HT ou 4.123€ TTC, outre un dépôt de garantie de 7.600 € remis par le preneur au bailleur qui lui en avait donné quittance, selon l'article 6 du même bail; que ce dernier contenait une clause de révision annuelle du loyer, auquel s'ajoutaient des charges et taxes, automatiquement en application de la clause d'échelle mobile suivante : « Les Parties font le choix de 'xer comme indice de référence 1'indice national des Loyers Commerciaux tel qu'il est établi par l'Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) ».
Il a en conséquence retenu que le loyer mensuel actualisé s'élevait à la somme de 4.318,28 euros TTC, charges comprises.
La SAS ASM restant redevable des loyers des 3 premiers mois de l'année 2020 jusqu'à la résiliation intervenue en mars 2020 ainsi que de 3 mois d'indemnité d'occupation jusqu'à la remise des clés intervenue le 04 juin 2020, le tribunal a évalué à 25.909,68 euros (4 318,28 € x 6) le montant de l'arriéré de loyers dû.
L'appelant affirme qu'en début de procédure, comme en témoignent les mails de l'intimée, il n'était pas contesté que l'ASM s'était acquittée du paiement de tous les loyers dus pendant la période d'occupation des locaux.
Il souligne par ailleurs que l'intimée fixe le montant du loyer à 4318,28€ alors qu'elle invoque, dans ses demandes au titre de l'indemnité de résiliation, un loyer du 3 800€.
Il soutient que le débiteur principal a rempli son obligation principale de paiement du loyer ; qu'il n'existe dès lors aucune défaillance du débiteur.
L'intimée expose qu'elle a encaissé, entre le 07 janvier 2020 et le 07 avril 2020, la somme de 14.954,84 € sur 4 mois, soit un montant mensuel de 3 738,71 € au lieu de 4.318,28 € TTC ; que la société ASM était redevable des loyers des 3 premiers mois de l'année 2020 jusqu'à la résiliation intervenue en mars 2020 ainsi que de 3 mois d'indemnité d'occupation jusqu'à la remise des clés intervenue le 04 juin 2020, soit un montant de 25 909,68 € (4 318,28 € x 6).
Sur ce, c'est par des motifs que la cour adopte que le tribunal, analysant sans erreur le contrat de bail, a pu valablement fixer le montant de l'arriéré de loyers et des indemnités d'occupation dues jusqu'à la restitution des clés des locaux, à la somme de 25 909,68€.
L'existence de l'obligation étant établie, il appartient à l'appelant de démontrer qu'il a parfaitement exécuté celle-ci, ce dont il ne justifie pas.
1-2/ Sur le paiement de l'abattement exceptionnel :
Le tribunal a observé que l'exploit introductif d'instance mentionnait expressément, d'une part que le montant du loyer convenu entre les parties était de 45.600 € HT par an, soit un montant mensuel de 3.800 € HT, ; d'autre part que la date de prise d'effet du bail était le 1er novembre 2017; que l'exploit introductif d'instance reprenait littéralement la clause du bail n°5 intitulée "Loyer" aux termes de laquelle par « dérogation au montant fixé ci-dessus, le Bailleur octroie au Preneur un abattement exceptionnel sur le loyer au titre des périodes ci-après : / - Loyer HT de novembre à décembre 2017 : 0 €, / Loyer HT de janvier à décembre 2018: 36. 500 euros soit 3. 041,6 7 euros par mois + indexation, / Loyer HT à partir de janvier 2019 : 45. 600 euros soit 3.800, 00 euros par mois + indexation » ; que la révision du loyer du bail à sa date anniversaire ainsi que son indexation automatique en fonction des variations de l'indice national des loyers commerciaux (ICL) résultait également de la clause n°5 relative au "Loyer" et dûment insérée au bail;
Il en a déduit que la simple mention de l'abattement exceptionnel dans l'assignation initiale permettait d'en évaluer, a minima et hors indexation, son montant considéré comme suit :
- 7 600e (3 800e X 2) pour les loyers HT de novembre à décembre 2017,
- 9 100e pour les loyers HT de janvier à décembre 2018 (45.600 - 36.500,04),
soit un total de 16.700 €.
Le bail, auquel se référait l'assignation, stipulant expressément que cet abattement exceptionnel avait été octroyé sous la condition résolutoire du maintien conforme et régulier du preneur dans les locaux loués pendant toute la durée initiale du bail, soit six années, et mentionnant « en cas de rupture anticipée pour quelque raison que ce soit, autre que la faute du Bailleur ou la force majeure, le montant des abattements ici octroyés deviendra, intégralement et immédiatement exigible. /Au loyer mentionné audit article, s'ajouteront les charges et taxes visées aux présentes. Les paiements auront lieu au siège du Bailleur ou en tout autre endroit qu'il plaira au Bailleur de désigner », le tribunal a jugé que la demande de la SARL CAPS aux fins de paiement du montant desdits abattements, pour une somme totale de 16.700 €, était fondée.
L'appelant fait valoir que si la société CAPS s'est prévalue en première instance de l'abattement exceptionnel sur lequel les parties s'étaient accordées et de l'exigibilité des dits abattements par suite de la rupture anticipée du bail, le montant desdits abattements n'était pas chiffré et, manifestement, la dette du débiteur principal, selon CAPS, correspondrait au montant de ces abattements ; qu'en tout état de cause, le montant sur lequel porte le cautionnement, soit 70.000€ ne saurait correspondre à celui des abattements allégués ; que surtout, le bail a été rompu par le liquidateur qui ne lui a pas demandé son avis.
Il souligne que le bailleur a conservé le dépôt de garantie de 7 600€ en l'absence de réparation locative.
L'intimée réplique que l'abattement octroyé par elle résulte clairement des stipulations contractuelles contenues au bail commercial convenu entre les parties le 1er novembre 2017 produit aux débats ; que le montant de l'abattement exceptionnel est déterminable à la lecture du bail ; que l'assignation de première instance a cité la condition résolutoire sous laquelle cet abattement exceptionnel a été stipulé au bail : « En cas de rupture anticipée pour quelque raison que ce soit, autre que la faute du Bailleur ou la force majeure, le montant des abattements ici octroyés deviendra, intégralement et immédiatement exigible ».
A défaut d'élément nouveau et au regard de ce qui précède, la cour estime que le tribunal a fait une exacte appréciation de la cause ainsi que des droits des parties et a, par de justes motifs qu'elle approuve, sur le fondement du contrat de bail qui tient lieu de loi entre les parties, retenu que la somme de 16 700 € était due à l'intimée au titre de la restitution de l'abattement exceptionnel au regard de la rupture anticipée du bail.
L'intimée ne contestant pas le paiement effectif de la somme de 7600e au titre du dépôt de garantie ni l'absence de réparations locatives, celle-ci vient en déduction des sommes dues au bailleur par la locataire.
1-3/ Sur l'indemnité de résiliation anticipée :
Le tribunal a écarté la force majeure invoquée par M. [W] pour échapper au paiement de cette indemnité en ce qu'il résultait des termes mêmes des conclusions de ce dernier et des pièces fournies y afférentes que l'ouverture de la procédure collective était la conséquence de la rupture des relations commerciales avec son client principal, notifiée par courrier recommandé du 16 mars 2019 avec effet au 1er avril suivant.
Il a en effet considéré que le contrat avec ce client ayant été conclu pour une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction avec une faculté de résiliation à tout moment à la demande de l'une des parties et par lettre recommandée avec avis de réception, outre la seule prévision d'un préavis d'un mois, l'éventualité d'une rupture de contrat ne pouvait pas ne pas être raisonnablement prise en compte par M. [W] pour appréhender la pérennité de la SAS ASM dont il était le représentant légal lors de la conclusion du bail ;qu'au surplus, la SAS ASM n'établissait pas dès la rupture du contrat de prestation de service intervenue en avril 2019, s'être rapprochée de son bailleur d'une quelconque manière aux fins de tenter à tout le moins de trouver une solution amiable à cette difficulté.
Il a en conséquence jugé que la rupture du contrat conclu en 2014 restait une hypothèse qui devait être considérée comme prévisible par le dirigeant de la SAS ASM à la simple lecture des stipulations contractuelles, non équivoques, et ne pouvait dès lors constituer un cas de force majeure.
Il a toutefois réduit l'indemnité de résiliation, constituant une clause pénale, à la somme de 30 000€.
L'appelant relève que l'intimée indique elle-même dans ses écritures que selon la convention de bail, le preneur ne pouvait mettre fin au bail à l'issue de la première période triennale expirant le 1er novembre 2020 et que par conséquent, le bail devait courir jusqu'au 1er novembre 2023.
Il souligne qu'il n'a mis fin à aucun bail, le bail ayant été résilié par Me [L] [S] es qualités de liquidateur, le preneur étant dessaisi.
Il en déduit d'une part, que la clause de la convention précitée ne peut être appliquée car elle ne vise que l'action du preneur et de personne d'autre ; d'autre part, que si elle avait été applicable, il conviendrait de la réduire ou de la modérer en la réduisant à néant, à titre subsidiaire.
Il se prévaut de la force majeure attachée à la décision de liquidation.
L'intimée renvoie pour sa part à la lecture de l'article 3 du bail qui interdisait au preneur de mettre fin au bail à l'issue de la première période triennale. Elle soutient que la liquidation judiciaire ne constitue pas une force majeure dès lors qu'elle trouve son origine dans la rupture du contrat liant la SAS ASM à un client et que cette rupture pouvait être envisagée lors de la conclusion du bail.
Sur ce, la cour retient que si le bail n'a pas été résilié par M. [W] en qualité de dirigeant de la société ASM, il l'a été, à la suite de sa liquidation judiciaire, par le liquidateur judiciaire, devenu le seul représentant de ladite société.
Par ailleurs, la force majeure a été valablement écartée par le tribunal dès lors que le contrat liant la société ASM à son principal client, dont il n'est pas contesté que la résiliation ait généré la liquidation de la société ASM, n'étant que d'une durée d'un an renouvelable et pouvant être résilié par celui-ci sous réserve du respect d'un délai, au demeurant fort modeste, d'un mois, ladite résiliation du contrat n'était pas imprévisible.
Or, il convient de rappeler que la force majeure ne suppose pas seulement un événement extérieur et irrésistible, mais aussi imprévisible.
La cour approuve enfin le tribunal qui a réduit à la somme de 30000€ l'indemnité de résiliation au regard des éléments de l'espèce.
Il résulte de ce qui précède que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a fixé la dette de la société ASM à l'égard de l'intimée aux sommes de 25 908,68€, 16 700€ et 30 000€, soit un total de 72 609,68€, duquel il conviendra de déduire la somme de 7 600€ au titre de la restitution du dépôt de garantie.
La validité de l'engagement de caution n'étant pas discutée, l'appelant devra en conséquence verser à l'intimée la somme de 65 009,68€ à ce titre.
2/ Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :
Le tribunal a débouté M. [W] de cette prétention au motif qu'il succombait à caractériser l'abus de droit qu'il invoquait.
L'appelant dénonce un harcèlement exercé par l'intimée qui multiplie les voies d'exécution forcée et sollicite le paiement d'une somme de 10 000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice ainsi subi.
L'intimée soutient n'avoir recherché que l'exécution de ses obligations par la caution, dont elle sollicite le rejet de la demande de dommages et intérêts.
Sur ce, le bien fondé des demandes de l'intimée conduit à écarter le caractère abusif de la présente procédure.
3/ Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné M. [W] aux dépens et à payer à la société CAPS la somme de 2 000€ au titre des frais irrépétibles.
Succombant en son recours, l'appelant supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et mis à disposition par le greffe,
Confirme le jugement du tribunal mixte de commerce de Fort de France du 22 mars 2023 sauf en ce qu'il a condamné M. [I] [C] [W] à payer à la SARL Centre d'affaire de la pointe Simon (CAPS) la somme de 70 000€ au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS Antilles sécurité Martinique avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
Statuant à nouveau,
Condamne M. [I] [C] [W] à payer à la SARL Centre d'affaire de la pointe Simon (CAPS) la somme de 65 009,68€ (soixante-cinq mille neuf euros et soixante-huit centimes) au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS Antilles sécurité Martinique avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement du 22 mars 2023;
Et y ajoutant,
Condamne M. [I] [C] [W] aux dépens d'appel.
Signé par Mme Nathalie Ramage, présidente de chambre et par Mme Sandra De Sousa, greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
N° RG 23/00366 - N° Portalis DBWA-V-B7H-CM7H
[I] [C] [W]
C/
S.A.R.L. CENTRE D'AFFAIRES LA POINTE SIMON (CAPS)
COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 18 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la cour : jugement du tribunal mixte de commerce de Fort de France, en date du 22 mars 2023, enregistrée sous le n° 2021/2654
APPELANT :
Monsieur [I] [C] [W]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Laurie CHANTALOU-NORDE, avocat au barreau de MARTINIQUE
INTIMEE :
S.A.R.L. CENTRE D'AFFAIRES LA POINTE SIMON (CAPS) prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Catherine RODAP, avocat au barreau de MARTINIQUE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 septembre 2025, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Nathalie Ramage, présidente de chambre chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :
Présidente : Madame Nathalie RAMAGE, présidente de chambre
Assesseur : Monsieur Thierry PLUMENAIL, Conseiller
Assesseur : Madame Claire DONNIZAUX, conseillère
Greffière lors des débats : Madame Sandra DE SOUSA,
Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 18 novembre 2025.
ARRÊT : contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Exposé du litige
Selon bail commercial en date du ler novembre 2017, la SAS centre d'affaires de la Pointe Simon (CAPS) a donné à la SAS Antilles sécurité Martinique (ASM) des locaux commerciaux situés dans la ZAC Pointe Simon, au 16ème étage de la tour "Lumina" sise [Adresse 1] à [Localité 2], destinés à l'exploitation administrative et commerciale d'une activité de sécurité et gardiennage, à l'exclusion de toute autre utilisation.
M. [I] [C] [W], représentant de la SAS ASM, s'est engagé à titre de caution au titre des obligations du bail pour la durée initiale de celui-ci et son éventuel renouvellement dans la limite de vingt années et pour une somme globale limitée à 70.000 €.
Par jugement en date du 04 février 2020, le tribunal mixte de commerce de Fort de France a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS ASM.
Le 16 avril 2020, la SARL CAPS a déclaré entre les mains de la SELARL [U] [L] [S] es qualités de mandataire liquidateur de la SAS ASM sa créance à titre privilégiée au sens de l'article 2332 du code civil et de l'article L. 622-16 du code de commerce, pour un montant de 190.784,04 euros.
Par courrier daté du 19 mars 2020, le liquidateur judiciaire a résilié purement et simplement le bail commercial.
Le 04 juin 2020, les clés des locaux ont été remises par le liquidateur au bailleur.
le 12 janvier 2021, la société CAPS a mis M. [W] en demeure de payer la somme de 70.000 euros en sa qualité de caution, en vain.
Par acte du 26 mai 2021, cette société a assigné M. [W] devant le tribunal mixte de commerce de Fort de France aux fins, notamment, d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme précitée.
Par jugement contradictoire du 22 mars 2023, le tribunal a :
- constaté que la SAS ASM restait redevable à l'égard la société CAPS, hors montant du dépôt de garantie de 7.600 euros, des sommes de 25.909,68 euros, 16.700,00 euros et 30.000 euros, soit un total de 72.609,68 euros ;
- constaté que M. [I] [C] [W] s'était porté caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM pour l'exécution des obligations du bail conclu par celle-ci le ler novembre 2017, dans la limite de vingt années et pour une somme globale limitée à 70.000 euros;
En conséquence,
- condamné M. [I] [C] [W] à payer à la société CAPS les sommes suivantes :
* 70.000 euros au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision ;
* 2.000 euros au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles ;
- rejeté autre demande, plus ample ou contraire ;
- laissé les dépens à la charge de M. [W].
Par déclaration reçue le 04 septembre 2023, M. [W] a interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été orientée à la mise en état le 19 septembre 2023.
Aux termes de ses premières conclusions du 04 décembre 2023 et dernières du 19 mars 2025, l'appelant demande de :
- dire recevable et bien fondé son appel ;
- dire et juger bien fondées l'ensemble de ses demandes ;
- débouter l'intimée de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes -infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a :
* constaté que la SAS ASM reste redevable à l'égard de la SARL CAPS, hors montant du dépôt de garantie de 7.600 €, des sommes de 25.909,68€, 16.700 € et 30.000 € soit un total de 72.609,68 €,
* constaté que M. [I] [W] s'est porté caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM pour l'exécution des obligations du bail conclu par celle -ci le 1er novembre 2017, dans la limite de vingt années et pour un montant limité à 70.000 €,
* condamné M. [W] à payer à la SARL CAPS les sommes de :
' 70.000 € au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS ASM, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision,
' 2.000 € au titre de l'indemnité pour frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau,
- dire et juger bien fondées les demandes de M. [W] ;
- juger qu'il n'est pas démontré l'existence d'une dette locative de la société ASM liquidée et qu'en l'absence de dette principale, le cautionnement de M. [W] ne peut être recherché ;
- juger que la liquidation judiciaire de la société ASM et le dessaisissement de celle-ci au profit du liquidateur constituent un cas de force majeure ;
- juger que la clause stipulant une indemnité de résiliation ne sera pas applicable eu égard au contexte de liquidation et compte tenu de son caractère excessif ;
- débouter en conséquence la société centre d'affaires de la Pointe Simon de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes ;
- juger que les demandes reconventionnelles de M. [W] sont bien fondées ;
- condamner la société centre d'affaires de la Pointe Simon à payer à M. [W] la somme de :
' 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;
' 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamner aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions du 13 mai 2025, l'intimée demande de :
- recevoir la société centre d'affaires de la Pointe Simon centre d'affaires de la Pointe Simon ' CAPS, en ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France en date du 22 mars 2023 en toutes ses dispositions,
Par conséquent,
- débouter M. [I] [C] [W] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [I] [C] [W] au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- juger n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir ;
- condamner M. [I] [C] [W] aux entiers dépens.
La clôture est intervenue le 15 mai 2025.
L'affaire a été évoquée à l'audience du 19 septembre 2025 et la décision a été mise en délibéré au 18 novembre 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées et au jugement déféré.
Motifs :
1/ Sur l'obligation principale :
1-1/ Sur l'arriéré de loyers :
Le tribunal a relevé que le bail commercial avait été conclu pour une durée de 10 ans prenant effet à compter du 1er novembre 2017 en contrepartie du paiement d'un loyer annuel initialement fixé à la somme de 46.500€ HT, soit mensuellement 3.875 € HT ou 4.123€ TTC, outre un dépôt de garantie de 7.600 € remis par le preneur au bailleur qui lui en avait donné quittance, selon l'article 6 du même bail; que ce dernier contenait une clause de révision annuelle du loyer, auquel s'ajoutaient des charges et taxes, automatiquement en application de la clause d'échelle mobile suivante : « Les Parties font le choix de 'xer comme indice de référence 1'indice national des Loyers Commerciaux tel qu'il est établi par l'Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) ».
Il a en conséquence retenu que le loyer mensuel actualisé s'élevait à la somme de 4.318,28 euros TTC, charges comprises.
La SAS ASM restant redevable des loyers des 3 premiers mois de l'année 2020 jusqu'à la résiliation intervenue en mars 2020 ainsi que de 3 mois d'indemnité d'occupation jusqu'à la remise des clés intervenue le 04 juin 2020, le tribunal a évalué à 25.909,68 euros (4 318,28 € x 6) le montant de l'arriéré de loyers dû.
L'appelant affirme qu'en début de procédure, comme en témoignent les mails de l'intimée, il n'était pas contesté que l'ASM s'était acquittée du paiement de tous les loyers dus pendant la période d'occupation des locaux.
Il souligne par ailleurs que l'intimée fixe le montant du loyer à 4318,28€ alors qu'elle invoque, dans ses demandes au titre de l'indemnité de résiliation, un loyer du 3 800€.
Il soutient que le débiteur principal a rempli son obligation principale de paiement du loyer ; qu'il n'existe dès lors aucune défaillance du débiteur.
L'intimée expose qu'elle a encaissé, entre le 07 janvier 2020 et le 07 avril 2020, la somme de 14.954,84 € sur 4 mois, soit un montant mensuel de 3 738,71 € au lieu de 4.318,28 € TTC ; que la société ASM était redevable des loyers des 3 premiers mois de l'année 2020 jusqu'à la résiliation intervenue en mars 2020 ainsi que de 3 mois d'indemnité d'occupation jusqu'à la remise des clés intervenue le 04 juin 2020, soit un montant de 25 909,68 € (4 318,28 € x 6).
Sur ce, c'est par des motifs que la cour adopte que le tribunal, analysant sans erreur le contrat de bail, a pu valablement fixer le montant de l'arriéré de loyers et des indemnités d'occupation dues jusqu'à la restitution des clés des locaux, à la somme de 25 909,68€.
L'existence de l'obligation étant établie, il appartient à l'appelant de démontrer qu'il a parfaitement exécuté celle-ci, ce dont il ne justifie pas.
1-2/ Sur le paiement de l'abattement exceptionnel :
Le tribunal a observé que l'exploit introductif d'instance mentionnait expressément, d'une part que le montant du loyer convenu entre les parties était de 45.600 € HT par an, soit un montant mensuel de 3.800 € HT, ; d'autre part que la date de prise d'effet du bail était le 1er novembre 2017; que l'exploit introductif d'instance reprenait littéralement la clause du bail n°5 intitulée "Loyer" aux termes de laquelle par « dérogation au montant fixé ci-dessus, le Bailleur octroie au Preneur un abattement exceptionnel sur le loyer au titre des périodes ci-après : / - Loyer HT de novembre à décembre 2017 : 0 €, / Loyer HT de janvier à décembre 2018: 36. 500 euros soit 3. 041,6 7 euros par mois + indexation, / Loyer HT à partir de janvier 2019 : 45. 600 euros soit 3.800, 00 euros par mois + indexation » ; que la révision du loyer du bail à sa date anniversaire ainsi que son indexation automatique en fonction des variations de l'indice national des loyers commerciaux (ICL) résultait également de la clause n°5 relative au "Loyer" et dûment insérée au bail;
Il en a déduit que la simple mention de l'abattement exceptionnel dans l'assignation initiale permettait d'en évaluer, a minima et hors indexation, son montant considéré comme suit :
- 7 600e (3 800e X 2) pour les loyers HT de novembre à décembre 2017,
- 9 100e pour les loyers HT de janvier à décembre 2018 (45.600 - 36.500,04),
soit un total de 16.700 €.
Le bail, auquel se référait l'assignation, stipulant expressément que cet abattement exceptionnel avait été octroyé sous la condition résolutoire du maintien conforme et régulier du preneur dans les locaux loués pendant toute la durée initiale du bail, soit six années, et mentionnant « en cas de rupture anticipée pour quelque raison que ce soit, autre que la faute du Bailleur ou la force majeure, le montant des abattements ici octroyés deviendra, intégralement et immédiatement exigible. /Au loyer mentionné audit article, s'ajouteront les charges et taxes visées aux présentes. Les paiements auront lieu au siège du Bailleur ou en tout autre endroit qu'il plaira au Bailleur de désigner », le tribunal a jugé que la demande de la SARL CAPS aux fins de paiement du montant desdits abattements, pour une somme totale de 16.700 €, était fondée.
L'appelant fait valoir que si la société CAPS s'est prévalue en première instance de l'abattement exceptionnel sur lequel les parties s'étaient accordées et de l'exigibilité des dits abattements par suite de la rupture anticipée du bail, le montant desdits abattements n'était pas chiffré et, manifestement, la dette du débiteur principal, selon CAPS, correspondrait au montant de ces abattements ; qu'en tout état de cause, le montant sur lequel porte le cautionnement, soit 70.000€ ne saurait correspondre à celui des abattements allégués ; que surtout, le bail a été rompu par le liquidateur qui ne lui a pas demandé son avis.
Il souligne que le bailleur a conservé le dépôt de garantie de 7 600€ en l'absence de réparation locative.
L'intimée réplique que l'abattement octroyé par elle résulte clairement des stipulations contractuelles contenues au bail commercial convenu entre les parties le 1er novembre 2017 produit aux débats ; que le montant de l'abattement exceptionnel est déterminable à la lecture du bail ; que l'assignation de première instance a cité la condition résolutoire sous laquelle cet abattement exceptionnel a été stipulé au bail : « En cas de rupture anticipée pour quelque raison que ce soit, autre que la faute du Bailleur ou la force majeure, le montant des abattements ici octroyés deviendra, intégralement et immédiatement exigible ».
A défaut d'élément nouveau et au regard de ce qui précède, la cour estime que le tribunal a fait une exacte appréciation de la cause ainsi que des droits des parties et a, par de justes motifs qu'elle approuve, sur le fondement du contrat de bail qui tient lieu de loi entre les parties, retenu que la somme de 16 700 € était due à l'intimée au titre de la restitution de l'abattement exceptionnel au regard de la rupture anticipée du bail.
L'intimée ne contestant pas le paiement effectif de la somme de 7600e au titre du dépôt de garantie ni l'absence de réparations locatives, celle-ci vient en déduction des sommes dues au bailleur par la locataire.
1-3/ Sur l'indemnité de résiliation anticipée :
Le tribunal a écarté la force majeure invoquée par M. [W] pour échapper au paiement de cette indemnité en ce qu'il résultait des termes mêmes des conclusions de ce dernier et des pièces fournies y afférentes que l'ouverture de la procédure collective était la conséquence de la rupture des relations commerciales avec son client principal, notifiée par courrier recommandé du 16 mars 2019 avec effet au 1er avril suivant.
Il a en effet considéré que le contrat avec ce client ayant été conclu pour une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction avec une faculté de résiliation à tout moment à la demande de l'une des parties et par lettre recommandée avec avis de réception, outre la seule prévision d'un préavis d'un mois, l'éventualité d'une rupture de contrat ne pouvait pas ne pas être raisonnablement prise en compte par M. [W] pour appréhender la pérennité de la SAS ASM dont il était le représentant légal lors de la conclusion du bail ;qu'au surplus, la SAS ASM n'établissait pas dès la rupture du contrat de prestation de service intervenue en avril 2019, s'être rapprochée de son bailleur d'une quelconque manière aux fins de tenter à tout le moins de trouver une solution amiable à cette difficulté.
Il a en conséquence jugé que la rupture du contrat conclu en 2014 restait une hypothèse qui devait être considérée comme prévisible par le dirigeant de la SAS ASM à la simple lecture des stipulations contractuelles, non équivoques, et ne pouvait dès lors constituer un cas de force majeure.
Il a toutefois réduit l'indemnité de résiliation, constituant une clause pénale, à la somme de 30 000€.
L'appelant relève que l'intimée indique elle-même dans ses écritures que selon la convention de bail, le preneur ne pouvait mettre fin au bail à l'issue de la première période triennale expirant le 1er novembre 2020 et que par conséquent, le bail devait courir jusqu'au 1er novembre 2023.
Il souligne qu'il n'a mis fin à aucun bail, le bail ayant été résilié par Me [L] [S] es qualités de liquidateur, le preneur étant dessaisi.
Il en déduit d'une part, que la clause de la convention précitée ne peut être appliquée car elle ne vise que l'action du preneur et de personne d'autre ; d'autre part, que si elle avait été applicable, il conviendrait de la réduire ou de la modérer en la réduisant à néant, à titre subsidiaire.
Il se prévaut de la force majeure attachée à la décision de liquidation.
L'intimée renvoie pour sa part à la lecture de l'article 3 du bail qui interdisait au preneur de mettre fin au bail à l'issue de la première période triennale. Elle soutient que la liquidation judiciaire ne constitue pas une force majeure dès lors qu'elle trouve son origine dans la rupture du contrat liant la SAS ASM à un client et que cette rupture pouvait être envisagée lors de la conclusion du bail.
Sur ce, la cour retient que si le bail n'a pas été résilié par M. [W] en qualité de dirigeant de la société ASM, il l'a été, à la suite de sa liquidation judiciaire, par le liquidateur judiciaire, devenu le seul représentant de ladite société.
Par ailleurs, la force majeure a été valablement écartée par le tribunal dès lors que le contrat liant la société ASM à son principal client, dont il n'est pas contesté que la résiliation ait généré la liquidation de la société ASM, n'étant que d'une durée d'un an renouvelable et pouvant être résilié par celui-ci sous réserve du respect d'un délai, au demeurant fort modeste, d'un mois, ladite résiliation du contrat n'était pas imprévisible.
Or, il convient de rappeler que la force majeure ne suppose pas seulement un événement extérieur et irrésistible, mais aussi imprévisible.
La cour approuve enfin le tribunal qui a réduit à la somme de 30000€ l'indemnité de résiliation au regard des éléments de l'espèce.
Il résulte de ce qui précède que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a fixé la dette de la société ASM à l'égard de l'intimée aux sommes de 25 908,68€, 16 700€ et 30 000€, soit un total de 72 609,68€, duquel il conviendra de déduire la somme de 7 600€ au titre de la restitution du dépôt de garantie.
La validité de l'engagement de caution n'étant pas discutée, l'appelant devra en conséquence verser à l'intimée la somme de 65 009,68€ à ce titre.
2/ Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :
Le tribunal a débouté M. [W] de cette prétention au motif qu'il succombait à caractériser l'abus de droit qu'il invoquait.
L'appelant dénonce un harcèlement exercé par l'intimée qui multiplie les voies d'exécution forcée et sollicite le paiement d'une somme de 10 000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice ainsi subi.
L'intimée soutient n'avoir recherché que l'exécution de ses obligations par la caution, dont elle sollicite le rejet de la demande de dommages et intérêts.
Sur ce, le bien fondé des demandes de l'intimée conduit à écarter le caractère abusif de la présente procédure.
3/ Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné M. [W] aux dépens et à payer à la société CAPS la somme de 2 000€ au titre des frais irrépétibles.
Succombant en son recours, l'appelant supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et mis à disposition par le greffe,
Confirme le jugement du tribunal mixte de commerce de Fort de France du 22 mars 2023 sauf en ce qu'il a condamné M. [I] [C] [W] à payer à la SARL Centre d'affaire de la pointe Simon (CAPS) la somme de 70 000€ au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS Antilles sécurité Martinique avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
Statuant à nouveau,
Condamne M. [I] [C] [W] à payer à la SARL Centre d'affaire de la pointe Simon (CAPS) la somme de 65 009,68€ (soixante-cinq mille neuf euros et soixante-huit centimes) au titre de son engagement de caution personnelle solidaire et indivisible de la SAS Antilles sécurité Martinique avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement du 22 mars 2023;
Et y ajoutant,
Condamne M. [I] [C] [W] aux dépens d'appel.
Signé par Mme Nathalie Ramage, présidente de chambre et par Mme Sandra De Sousa, greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,