CA Pau, 1re ch., 19 novembre 2025, n° 25/00313
PAU
Arrêt
Autre
PC/HB
Numéro 25/3166
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 19/11/2025
Dossier :
N° RG 25/00313
N° Portalis DBVV-V-B7J-JCSR
Nature affaire :
Demande en nullité d'une assemblée générale ou d'une délibération de cette assemblée
Affaire :
Syndic. de copro. RESIDENCE [Adresse 8]
C/
[I] [H]
[U] [H]
[Y] [H]
[F] [R] épouse [Y] [H]
Copie exécutoire délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 novembre 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 17 Septembre 2025, devant :
Monsieur Patrick CASTAGNÉ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame Hélène BRUNET, greffier, présente à l'appel des causes,
Monsieur Patrick CASTAGNÉ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président,
Madame France-Marie DELCOURT, Conseillère,
Madame Anne BAUDIER, Conseillère,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
Syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 8]
pris en la personne de son Syndic, Monsieur [O] [K]
[Adresse 1]
Assisté de la SELARL DUALE LIGNEY BOURDALLE, avocats au barreau de PAU, et assisté de Maître Hervé COLMET, membre de la SELARL REAU - COCOYNACQ - COLMET, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMÉS :
Monsieur [I] [B] [H]
né le 18 août 1977 à [Localité 5]
de nationalité française
[Adresse 3] / CALIFORNIE / USA
Monsieur [U] [X] [H]
né le 07 mai 1981 à [Localité 5]
de nationalité française
[Adresse 2]
Monsieur [Y] [V] [H]
né le 30 décembre 1942 à [Localité 9]
de nationalité française
[Adresse 6]
Madame [F] [V] [T] [R] épouse [H]
née le 21 juin 1945 à [Localité 7]
de nationalité française
[Adresse 6]
Représentés par Maître Dominique Jean WATTINE, avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 16 JANVIER 2025
rendue par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DE BAYONNE
RG numéro : 23/00498
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte authentique du 30 septembre 1997, les époux [Y] [H] et [F] [R] ont acquis de M. [G] [A] les lots de copropriété n° 1 à 8 au sein de la résidence [Adresse 8] située à [Localité 4].
Suivant donation-partage du 11 décembre 2020, les époux [H] ont transmis à leurs fils, [I] et [U] [H], les lots n° 1, 2 et 3.
Réunis en assemblée générale le 16 janvier 2023, les copropriétaires de la résidence [Adresse 8] ont notamment adopté une résolution n° 12-2 imposant aux propriétaires du lot n° 5 de combler et condamner l'escalier creusé dans les parties communes sous le lot n° 5 et reliant le rez-de-chaussée et le premier étage du bâtiment B, avant le 30 avril 2023.
Par acte du 10 mars 2023, les consorts [H] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 8], en annulation de plusieurs résolutions adoptées lors de ladite assemblée générale, dont la résolution n° 12-2.
Par acte du 24 avril 2024, ils ont fait appeler en la cause leur vendeur, M. [A], aux fins d'indemnisation du préjudice qui pourrait résulter pour eux des travaux de remise en état.
Par conclusions d'incident notifiées le 12 mars 2024, les consorts [H] ont sollicité du juge de la mise en état qu'il déclare irrecevable comme prescrite la demande en démolition du syndicat des copropriétaires au motif que l'escalier litigieux a été édifié il y a plus de 30 ans.
Par ordonnance du 16 janvier 2025, le juge de la mise en état a :
- déclaré prescrite l'action réelle immobilière du syndicat des copropriétaires à l'encontre des consorts [H] résultant de la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023,
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir soulevée à titre subsidiaire par M. [G] [A],
- débouté les consorts [H] de leur demande de renvoi en audience de règlement amiable,
- réservé les dépens,
- condamné le syndicat des copropriétaires à verser aux consorts [H] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les consorts [H] seront dispensés de toute participation à la dépense commune, dont la charge sera supportée par les autres copropriétaires, par application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,
- rappelé le caractère exécutoire de droit de la décision,
- renvoyé l'affaire à la mise en état.
Au soutien de sa décision, le juge de la mise en état a retenu :
- que le percement d'une dalle par un copropriétaire pour mettre en communication deux lots lui appartenant, situés à deux niveaux différents, intégrant ainsi cette dalle dans les parties privatives des lots est constitutive d'une appropriation des parties communes,
- que la résolution numéro 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023 s'analyse en une action en revendication des parties communes par le syndicat des copropriétaires, c'est-à-dire en une action réelle immobilière soumise en tant que telle à la prescription trentenaire,
- qu'il est établi que l'escalier litigieux a été construit en 1990, soit plus de trente ans avant l'adoption de la résolution n° 12-2 et avant l'introduction de l'instance,
- que le délai de prescription a commencé à courir au plus tard à la date d'achèvement des travaux courant 1990, dès lors qu'il est établi que les copropriétaires ont été invités à plusieurs reprises chez M. [A] courant 1990, à une époque où l'escalier litigieux existait déjà, de sorte que tant le syndicat des copropriétaires que ses membres à titre individuel avaient connaissance à cette date des faits leur permettant d'exercer leur droit,
- qu'en outre, M. [K] ne pouvait pas ignorer l'existence dudit escalier figurant dès 1997 sur les plans d'état des lieux et sur les plans d'architecte du projet d'extension de sa propre villa,
- que la constatation de l'acquisition de la prescription exctinctive rend inutile et sans objet l'examen de la fin de non-recevoir soulevée à titre subsidiaire par M. [A], tirée de la prescription de l'action en garantie des vices cachés menée à son encontre par les consorts [H].
Le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 8] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 5 février 2025, intimant les consorts [H], et critiquant l'ordonnance en ce qu'elle a :
- déclaré prescrite l'action réelle immobilière du syndicat des copropriétaires à l'encontre des consorts [H] résultant de la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023,
- condamné le syndicat des copropriétaires à verser aux consorts [H] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les consorts [H] seront dispensés de toute participation à la dépense commune, dont la charge sera supportée par les autres copropriétaires, par application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.
Suivant avis de fixation adressé par le greffe de la cour, l'affaire a été fixée selon les modalités prévues aux articles 906 et suivants du code de procédure civile.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 23 juin 2025, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 8] demande à la cour :
- d'infirmer et dans tous les cas réformer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré prescrite son action réelle immobilière à l'encontre des consorts [H] résultant de la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023, en ce qu'elle l'a condamné à verser aux consorts [H] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle a dit que les consorts [H] seraient dispensés de toute participation à la dépense commune dont la charge sera supportée par les autres copropriétaires par application des dispositions à l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,
- statuant à nouveau,
> de débouter les consorts [H] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions et dans tous les cas de leur incident tel que fondé sur la prescription de son action relative à la résolution n°12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023,
> de condamner les consorts [H] à lui payer une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
- de condamner les consorts [H] aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- de confirmer l'ordonnance pour le surplus.
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir, au visa de l'article 2227 du code civil :
- que son appel est recevable, dès lors qu'il pouvait valablement le limiter à la décision relative à la prescription de son action et n'avait pas à faire appel de la décision du juge de la mise en état retenant qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur la prescription de la garantie des vices cachés soulevée à titre subsidiaire par M. [A] à l'encontre des consorts [H], à qui il appartenait de former un appel provoqué s'ils voulaient attraire leur vendeur en appel,
- que seule la prescription acquisitive peut faire obstacle à son action en revendication des parties communes,
- que les consorts [H] ne possèdent pas de titre s'agissant de l'escalier, qui est resté hors du champ de la vente,
- qu'ils ne peuvent joindre à leur possession celle de leur vendeur, de sorte que la prescription n'est pas acquise, puisqu'il ne s'est pas écoulé trente ans entre leur acquisition et le PV d'assemblée générale du 16 janvier 2023,
- qu'ils ne justifient pas d'une possession de l'escalier publique et à titre de propriétaires à l'égard du syndicat des copropriétaires en tant que personne morale, qui ne saurait se confondre avec les copropriétaires le composant, alors que l'escalier se trouve à l'intérieur de leur lot,
- que le délai de prescription n'a en tout état de cause pas pu courir avant 1996 puisque le syndicat des copropriétaires n'était pas doté de son organe représentatif, et qu'il n'est pas démontré qu'il ait eu connaissance de l'existence de l'escalier ni de la date à laquelle il en aurait eu connaissance,
- que la seule révélation de l'existence de l'escalier litigieux est celle qui a été opérée par les plans du cabinet Bigourdan le 16 novembre 2022, seule date certaine à partir de laquelle le délai de prescription peut se computer,
- qu'il n'a pas contrevenu au principe de l'estoppel, l'instance d'appel ne pouvant être confondue avec l'instance devant le juge de la mise en état et les consorts [H] n'expliquant pas en quoi ses prétendues positions contraires les auraient induits en erreur ou auraient pu induire le juge en erreur,
- que son action vise à la restitution des parties communes injustement appropriées, et ne peut donc s'analyser comme une action personnelle soumise au délai de prescription de l'article 2224 du code civil.
Par conclusions notifiées le 10 avril 2025, M. [Y] [H], Mme [F] [R], M. [I] [H] et M. [U] [H], intimés, demandent à la cour de :
- déclarer irrecevable, en l'état, l'appel interjeté par le syndicat des copropriétaires de la résidence Villa [Adresse 8] à [Localité 4], pour défaut de désignation de l'ensemble des intimés (par omission volontaire de M. [G] [A]) au soutien de sa déclaration d'appel du 5 février 2025,
- à titre subsidiaire, de débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence villa [Adresse 8] de l'ensemble des conclusions d'appel, l'action en restitution des parties communes sur l'emprise de l'escalier intérieur litigieux résultant de la décision d'assemblée générale n° 12-2 du 16 janvier 2023, étant affectée par la prescription extinctive trentenaire et par suite irrecevable,
- à titre infiniment subsidiaire, de débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence villa [Adresse 8] de l'ensemble de ses conclusions d'appel, l'action en restitution des parties communes sur l'emprise de l'escalier intérieur litigieux résultant de la décision d'assemblée générale n° 12-2 du 16 janvier 2023 pouvant être vue comme une action personnelle dirigée contre eux, qui est affectée par la prescription quinquennale résultant de l'application combinée des articles 2224 du code civil et 42 al. 1er de la loi du 10 juillet 1965 et par suite irrecevable,
- en tout état de cause, de condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence Villa [Adresse 8] à [Localité 4] à leur verser, ensemble, la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'appel.
Au soutien de leurs demandes, ils font valoir :
- que la déclaration d'appel du syndicat des copropriétaires est irrégulière en ce qu'elle ne cite pas M. [A], alors qu'il avait également opposé la prescription extinctive devant le premier juge, ce qui leur porte préjudice et ne participe pas d'une bonne administration de la justice, puisqu'en cas de réformation, M. [A] serait fondé à former tierce opposition contre l'arrêt, de sorte que le litige est indivisible et que l'appel en l'état doit être déclaré irrecevable en application de l'article 553 du C.P.C.,
- à titre subsidiaire, que le syndicat des copropriétaires ne peut tenir devant la cour une position contraire à celle tenue devant le premier juge, de sorte que ses demandes sont irrecevables,
- que le syndicat des copropriétaires ne peut utilement contester que le dispositif de l'ordonnance vise les actions réelles immobilières et ne se réfère pas à une action en revendication ; qu'en effet, la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale ne s'analyse pas en une action en revendication de propriété au sens du code civil, mais en une action en démolition ou en restitution de partie commune, au sens du droit de la copropriété,
- que cette demande en démolition de l'escalier litigieux, construction édifiée sur une partie commune fut-elle réservée à la jouissance exclusive d'un copropriétaire, est une action réelle qui se prescrit par trente ans,
- qu'il n'est pas sérieusement contestable au vu des éléments versés aux débats que cet escalier intérieur a été réalisé par M. [A] en 1990, soit depuis un temps désormais prescrit,
- qu'il est a minima démontré que le syndicat des copropriétaires avait connaissance de l'escalier en novembre 1997, date à laquelle M. [P], architecte, avait dressé un état des lieux pour procéder à la réfection de la toiture terrasse appartenant à M. [K], syndic de copropriété, et faisant apparaître en détail l'escalier intérieur litigieux,
- que le syndicat des copropriétaires ne pouvait ignorer la création de l'escalier dès l'origine (1990) puisqu'elle est corrélative à la création d'une fenêtre permettant de l'éclairer, qui est parfaitement visible,
- à titre très subsidiaire, que la résolution n° 12-2 doit être considérée comme participant d'une action personnelle du syndicat des copropriétaires à leur encontre, laquelle se prescrit par cinq ans et est donc prescrite puisque le syndicat des copropriétaires a connaissance de la présence de l'escalier depuis plus de cinq ans.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 septembre 2025.
MOTIFS
Sur la fin de non-recevoir soulevée par les consorts [H] sur le fondement de l'article 553 du C.P.C.
L'article 906-3 du C.P.C., applicable en l'espèce, dispose :
- que le président de la chambre saisie ou le magistrat désigné par le premier président est seul compétent, jusqu'à l'ouverture des débats ou jusqu'à la date fixée pour le dépôt des dossiers des avocats, pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel ou des interventions en appel, la caducité de la déclaration d'appel, l''irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure en application de l'article 906-2 et de l'article 930-1, les incidents mettant fin à l'instance d'appel,
- que le président de la chambre saisie ou le magistrat désigné par le premier président est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées, distinctes des conclusions adressées à la cour.
La fin de non-recevoir tirée de l'article 553 du C.P.C. et tendant à voir déclarer l'appel irrecevable a été soulevée par conclusions dites 'en défense' remises et notifiées le 10 avril 2025, adressées à la cour et non au président de chambre.
Il convient dès lors, soulevant d'office le moyen tiré de l'article 906-3 du C.P.C. de surseoir à statuer, d'ordonner la réouverture des débats sur ce point et d'inviter les parties à fournir leurs explications de ce chef, selon les modalités qui seront précisées dans le dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt avant-dire-droit:
Sursoit à statuer sur le fond du litige,
Soulève d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de la fin de non-recevoir soulevée devant la cour par les consorts [H] et tendant à voir déclarer l'appel irrecevable,
Ordonne la réouverture des débats sur ce point exclusivement,
Invite les parties à fournir toutes explications sur la recevabilité ou l'irrecevabilité de la fin de non-recevoir soulevée par les consorts [H], au regard des dispositions de l'article 906-3 du C.P.C. attribuant compétence exclusive au président de la chambre saisie pour statuer sur la recevabilité de l'appel,
Renvoie l'affaire à l'audience du 18 février 2026,
Réserve les dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président, et par Madame Hélène BRUNET, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Hélène BRUNET Patrick CASTAGNÉ
Numéro 25/3166
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 19/11/2025
Dossier :
N° RG 25/00313
N° Portalis DBVV-V-B7J-JCSR
Nature affaire :
Demande en nullité d'une assemblée générale ou d'une délibération de cette assemblée
Affaire :
Syndic. de copro. RESIDENCE [Adresse 8]
C/
[I] [H]
[U] [H]
[Y] [H]
[F] [R] épouse [Y] [H]
Copie exécutoire délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 19 novembre 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
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APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 17 Septembre 2025, devant :
Monsieur Patrick CASTAGNÉ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame Hélène BRUNET, greffier, présente à l'appel des causes,
Monsieur Patrick CASTAGNÉ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président,
Madame France-Marie DELCOURT, Conseillère,
Madame Anne BAUDIER, Conseillère,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
Syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 8]
pris en la personne de son Syndic, Monsieur [O] [K]
[Adresse 1]
Assisté de la SELARL DUALE LIGNEY BOURDALLE, avocats au barreau de PAU, et assisté de Maître Hervé COLMET, membre de la SELARL REAU - COCOYNACQ - COLMET, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMÉS :
Monsieur [I] [B] [H]
né le 18 août 1977 à [Localité 5]
de nationalité française
[Adresse 3] / CALIFORNIE / USA
Monsieur [U] [X] [H]
né le 07 mai 1981 à [Localité 5]
de nationalité française
[Adresse 2]
Monsieur [Y] [V] [H]
né le 30 décembre 1942 à [Localité 9]
de nationalité française
[Adresse 6]
Madame [F] [V] [T] [R] épouse [H]
née le 21 juin 1945 à [Localité 7]
de nationalité française
[Adresse 6]
Représentés par Maître Dominique Jean WATTINE, avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 16 JANVIER 2025
rendue par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DE BAYONNE
RG numéro : 23/00498
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte authentique du 30 septembre 1997, les époux [Y] [H] et [F] [R] ont acquis de M. [G] [A] les lots de copropriété n° 1 à 8 au sein de la résidence [Adresse 8] située à [Localité 4].
Suivant donation-partage du 11 décembre 2020, les époux [H] ont transmis à leurs fils, [I] et [U] [H], les lots n° 1, 2 et 3.
Réunis en assemblée générale le 16 janvier 2023, les copropriétaires de la résidence [Adresse 8] ont notamment adopté une résolution n° 12-2 imposant aux propriétaires du lot n° 5 de combler et condamner l'escalier creusé dans les parties communes sous le lot n° 5 et reliant le rez-de-chaussée et le premier étage du bâtiment B, avant le 30 avril 2023.
Par acte du 10 mars 2023, les consorts [H] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 8], en annulation de plusieurs résolutions adoptées lors de ladite assemblée générale, dont la résolution n° 12-2.
Par acte du 24 avril 2024, ils ont fait appeler en la cause leur vendeur, M. [A], aux fins d'indemnisation du préjudice qui pourrait résulter pour eux des travaux de remise en état.
Par conclusions d'incident notifiées le 12 mars 2024, les consorts [H] ont sollicité du juge de la mise en état qu'il déclare irrecevable comme prescrite la demande en démolition du syndicat des copropriétaires au motif que l'escalier litigieux a été édifié il y a plus de 30 ans.
Par ordonnance du 16 janvier 2025, le juge de la mise en état a :
- déclaré prescrite l'action réelle immobilière du syndicat des copropriétaires à l'encontre des consorts [H] résultant de la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023,
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir soulevée à titre subsidiaire par M. [G] [A],
- débouté les consorts [H] de leur demande de renvoi en audience de règlement amiable,
- réservé les dépens,
- condamné le syndicat des copropriétaires à verser aux consorts [H] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les consorts [H] seront dispensés de toute participation à la dépense commune, dont la charge sera supportée par les autres copropriétaires, par application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,
- rappelé le caractère exécutoire de droit de la décision,
- renvoyé l'affaire à la mise en état.
Au soutien de sa décision, le juge de la mise en état a retenu :
- que le percement d'une dalle par un copropriétaire pour mettre en communication deux lots lui appartenant, situés à deux niveaux différents, intégrant ainsi cette dalle dans les parties privatives des lots est constitutive d'une appropriation des parties communes,
- que la résolution numéro 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023 s'analyse en une action en revendication des parties communes par le syndicat des copropriétaires, c'est-à-dire en une action réelle immobilière soumise en tant que telle à la prescription trentenaire,
- qu'il est établi que l'escalier litigieux a été construit en 1990, soit plus de trente ans avant l'adoption de la résolution n° 12-2 et avant l'introduction de l'instance,
- que le délai de prescription a commencé à courir au plus tard à la date d'achèvement des travaux courant 1990, dès lors qu'il est établi que les copropriétaires ont été invités à plusieurs reprises chez M. [A] courant 1990, à une époque où l'escalier litigieux existait déjà, de sorte que tant le syndicat des copropriétaires que ses membres à titre individuel avaient connaissance à cette date des faits leur permettant d'exercer leur droit,
- qu'en outre, M. [K] ne pouvait pas ignorer l'existence dudit escalier figurant dès 1997 sur les plans d'état des lieux et sur les plans d'architecte du projet d'extension de sa propre villa,
- que la constatation de l'acquisition de la prescription exctinctive rend inutile et sans objet l'examen de la fin de non-recevoir soulevée à titre subsidiaire par M. [A], tirée de la prescription de l'action en garantie des vices cachés menée à son encontre par les consorts [H].
Le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 8] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 5 février 2025, intimant les consorts [H], et critiquant l'ordonnance en ce qu'elle a :
- déclaré prescrite l'action réelle immobilière du syndicat des copropriétaires à l'encontre des consorts [H] résultant de la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023,
- condamné le syndicat des copropriétaires à verser aux consorts [H] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les consorts [H] seront dispensés de toute participation à la dépense commune, dont la charge sera supportée par les autres copropriétaires, par application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.
Suivant avis de fixation adressé par le greffe de la cour, l'affaire a été fixée selon les modalités prévues aux articles 906 et suivants du code de procédure civile.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 23 juin 2025, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 8] demande à la cour :
- d'infirmer et dans tous les cas réformer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré prescrite son action réelle immobilière à l'encontre des consorts [H] résultant de la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023, en ce qu'elle l'a condamné à verser aux consorts [H] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle a dit que les consorts [H] seraient dispensés de toute participation à la dépense commune dont la charge sera supportée par les autres copropriétaires par application des dispositions à l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,
- statuant à nouveau,
> de débouter les consorts [H] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions et dans tous les cas de leur incident tel que fondé sur la prescription de son action relative à la résolution n°12-2 de l'assemblée générale du 16 janvier 2023,
> de condamner les consorts [H] à lui payer une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
- de condamner les consorts [H] aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- de confirmer l'ordonnance pour le surplus.
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir, au visa de l'article 2227 du code civil :
- que son appel est recevable, dès lors qu'il pouvait valablement le limiter à la décision relative à la prescription de son action et n'avait pas à faire appel de la décision du juge de la mise en état retenant qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur la prescription de la garantie des vices cachés soulevée à titre subsidiaire par M. [A] à l'encontre des consorts [H], à qui il appartenait de former un appel provoqué s'ils voulaient attraire leur vendeur en appel,
- que seule la prescription acquisitive peut faire obstacle à son action en revendication des parties communes,
- que les consorts [H] ne possèdent pas de titre s'agissant de l'escalier, qui est resté hors du champ de la vente,
- qu'ils ne peuvent joindre à leur possession celle de leur vendeur, de sorte que la prescription n'est pas acquise, puisqu'il ne s'est pas écoulé trente ans entre leur acquisition et le PV d'assemblée générale du 16 janvier 2023,
- qu'ils ne justifient pas d'une possession de l'escalier publique et à titre de propriétaires à l'égard du syndicat des copropriétaires en tant que personne morale, qui ne saurait se confondre avec les copropriétaires le composant, alors que l'escalier se trouve à l'intérieur de leur lot,
- que le délai de prescription n'a en tout état de cause pas pu courir avant 1996 puisque le syndicat des copropriétaires n'était pas doté de son organe représentatif, et qu'il n'est pas démontré qu'il ait eu connaissance de l'existence de l'escalier ni de la date à laquelle il en aurait eu connaissance,
- que la seule révélation de l'existence de l'escalier litigieux est celle qui a été opérée par les plans du cabinet Bigourdan le 16 novembre 2022, seule date certaine à partir de laquelle le délai de prescription peut se computer,
- qu'il n'a pas contrevenu au principe de l'estoppel, l'instance d'appel ne pouvant être confondue avec l'instance devant le juge de la mise en état et les consorts [H] n'expliquant pas en quoi ses prétendues positions contraires les auraient induits en erreur ou auraient pu induire le juge en erreur,
- que son action vise à la restitution des parties communes injustement appropriées, et ne peut donc s'analyser comme une action personnelle soumise au délai de prescription de l'article 2224 du code civil.
Par conclusions notifiées le 10 avril 2025, M. [Y] [H], Mme [F] [R], M. [I] [H] et M. [U] [H], intimés, demandent à la cour de :
- déclarer irrecevable, en l'état, l'appel interjeté par le syndicat des copropriétaires de la résidence Villa [Adresse 8] à [Localité 4], pour défaut de désignation de l'ensemble des intimés (par omission volontaire de M. [G] [A]) au soutien de sa déclaration d'appel du 5 février 2025,
- à titre subsidiaire, de débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence villa [Adresse 8] de l'ensemble des conclusions d'appel, l'action en restitution des parties communes sur l'emprise de l'escalier intérieur litigieux résultant de la décision d'assemblée générale n° 12-2 du 16 janvier 2023, étant affectée par la prescription extinctive trentenaire et par suite irrecevable,
- à titre infiniment subsidiaire, de débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence villa [Adresse 8] de l'ensemble de ses conclusions d'appel, l'action en restitution des parties communes sur l'emprise de l'escalier intérieur litigieux résultant de la décision d'assemblée générale n° 12-2 du 16 janvier 2023 pouvant être vue comme une action personnelle dirigée contre eux, qui est affectée par la prescription quinquennale résultant de l'application combinée des articles 2224 du code civil et 42 al. 1er de la loi du 10 juillet 1965 et par suite irrecevable,
- en tout état de cause, de condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence Villa [Adresse 8] à [Localité 4] à leur verser, ensemble, la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'appel.
Au soutien de leurs demandes, ils font valoir :
- que la déclaration d'appel du syndicat des copropriétaires est irrégulière en ce qu'elle ne cite pas M. [A], alors qu'il avait également opposé la prescription extinctive devant le premier juge, ce qui leur porte préjudice et ne participe pas d'une bonne administration de la justice, puisqu'en cas de réformation, M. [A] serait fondé à former tierce opposition contre l'arrêt, de sorte que le litige est indivisible et que l'appel en l'état doit être déclaré irrecevable en application de l'article 553 du C.P.C.,
- à titre subsidiaire, que le syndicat des copropriétaires ne peut tenir devant la cour une position contraire à celle tenue devant le premier juge, de sorte que ses demandes sont irrecevables,
- que le syndicat des copropriétaires ne peut utilement contester que le dispositif de l'ordonnance vise les actions réelles immobilières et ne se réfère pas à une action en revendication ; qu'en effet, la résolution n° 12-2 de l'assemblée générale ne s'analyse pas en une action en revendication de propriété au sens du code civil, mais en une action en démolition ou en restitution de partie commune, au sens du droit de la copropriété,
- que cette demande en démolition de l'escalier litigieux, construction édifiée sur une partie commune fut-elle réservée à la jouissance exclusive d'un copropriétaire, est une action réelle qui se prescrit par trente ans,
- qu'il n'est pas sérieusement contestable au vu des éléments versés aux débats que cet escalier intérieur a été réalisé par M. [A] en 1990, soit depuis un temps désormais prescrit,
- qu'il est a minima démontré que le syndicat des copropriétaires avait connaissance de l'escalier en novembre 1997, date à laquelle M. [P], architecte, avait dressé un état des lieux pour procéder à la réfection de la toiture terrasse appartenant à M. [K], syndic de copropriété, et faisant apparaître en détail l'escalier intérieur litigieux,
- que le syndicat des copropriétaires ne pouvait ignorer la création de l'escalier dès l'origine (1990) puisqu'elle est corrélative à la création d'une fenêtre permettant de l'éclairer, qui est parfaitement visible,
- à titre très subsidiaire, que la résolution n° 12-2 doit être considérée comme participant d'une action personnelle du syndicat des copropriétaires à leur encontre, laquelle se prescrit par cinq ans et est donc prescrite puisque le syndicat des copropriétaires a connaissance de la présence de l'escalier depuis plus de cinq ans.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 septembre 2025.
MOTIFS
Sur la fin de non-recevoir soulevée par les consorts [H] sur le fondement de l'article 553 du C.P.C.
L'article 906-3 du C.P.C., applicable en l'espèce, dispose :
- que le président de la chambre saisie ou le magistrat désigné par le premier président est seul compétent, jusqu'à l'ouverture des débats ou jusqu'à la date fixée pour le dépôt des dossiers des avocats, pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel ou des interventions en appel, la caducité de la déclaration d'appel, l''irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure en application de l'article 906-2 et de l'article 930-1, les incidents mettant fin à l'instance d'appel,
- que le président de la chambre saisie ou le magistrat désigné par le premier président est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées, distinctes des conclusions adressées à la cour.
La fin de non-recevoir tirée de l'article 553 du C.P.C. et tendant à voir déclarer l'appel irrecevable a été soulevée par conclusions dites 'en défense' remises et notifiées le 10 avril 2025, adressées à la cour et non au président de chambre.
Il convient dès lors, soulevant d'office le moyen tiré de l'article 906-3 du C.P.C. de surseoir à statuer, d'ordonner la réouverture des débats sur ce point et d'inviter les parties à fournir leurs explications de ce chef, selon les modalités qui seront précisées dans le dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt avant-dire-droit:
Sursoit à statuer sur le fond du litige,
Soulève d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de la fin de non-recevoir soulevée devant la cour par les consorts [H] et tendant à voir déclarer l'appel irrecevable,
Ordonne la réouverture des débats sur ce point exclusivement,
Invite les parties à fournir toutes explications sur la recevabilité ou l'irrecevabilité de la fin de non-recevoir soulevée par les consorts [H], au regard des dispositions de l'article 906-3 du C.P.C. attribuant compétence exclusive au président de la chambre saisie pour statuer sur la recevabilité de l'appel,
Renvoie l'affaire à l'audience du 18 février 2026,
Réserve les dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président, et par Madame Hélène BRUNET, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Hélène BRUNET Patrick CASTAGNÉ