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CA Paris, Pôle 1 - ch. 5, 19 novembre 2025, n° 25/11539

PARIS

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CA Paris n° 25/11539

19 novembre 2025

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 5

ORDONNANCE DU 19 NOVEMBRE 2025

(n° /2025, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/11539 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLTZD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Janvier 2025 - TJ de [Localité 9] - RG n° 19/09674

Nature de la décision : Rendue par défaut

NOUS, Michel RISPE, Président de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l'assignation en référé délivrée à la requête de :

DEMANDERESSE

S.C.I. SCI LM

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Benoît FAVOT de l'AARPI NEGOTIUM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0297

à

DÉFENDEURS

Monsieur [L] [O]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Amer OUKHELIFA, avocat au barreau de PARIS, toque : G80

Monsieur [G] [J]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Non comparant ni représenté à l'audience

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 22 Octobre 2025 :

Par acte sous seing privé du 1er mars 2005, M. [O] et M. [W] ont constitué la société civile immobilière LM (la SCI LM), dont le capital social était réparti à parts égales entre chacun des deux associés.

Par acte reçu par notaire le 3 novembre 2005, cette société a acquis un pavillon situé au [Adresse 5] [Localité 8] [Adresse 10], financé par un prêt de 262 232 euros contracté auprès de la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Île-de-France, M. [O] s'étant porté caution personnelle au titre de ce prêt.

Par acte sous seing privé du 15 février 2013, M. [W] a cédé ses parts à M. [J].

Par jugement du 27 septembre 2018, la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Île-de-France a obtenu l'autorisation de vendre l'immeuble aux enchères publiques.

A la suite d'une assignation du 6 décembre 2018 et après renvoi pour compétence du tribunal judiciaire de Créteil, par jugement du 9 janvier 2025, le tribunal judiciaire de Paris a notamment :

- déclaré irrecevable la demande d'intervention volontaire de M. [J],

- condamné la SCI LM à verser à M. [O] la somme de 86 500 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

- condamné la SCI LM à verser à M. [O] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Par déclaration effectuée par voie électronique le 12 juin 2025, la SCI LM a interjeté appel de ce jugement. Cette affaire a été inscrite sous le numéro 25/10484 du répertoire général et attribuée à la chambre 4-13.

Par actes de commissaire de justice des 10 et 21 juillet 2025, la SCI LM a fait assigner M. [O] et M. [J], aux fins de comparaître à l'audience du 22 octobre 2025, devant le premier président de cette cour d'appel, pour l'entendre prononcer l'arrêt ou la suspension de l'exécution provisoire du jugement entrepris.

Par conclusions remises au greffe lors de cette audience et notifiées par voie électronique le 20 octobre 2025, M. [O] a demandé au Premier président de cette cour d'appel de :

- dire irrecevable et mal fondée la demande formée par la SCI LM,

- débouter la SCI LM de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer l'exécution provisoire du jugement du 9 janvier 2025,

- condamner la SCI LM à payer à M. [O] la somme de 3 000 euros au titre des dommages et intérêts,

- condamner la SCI LM aux dépens,

- condamner la SCI LM à payer à M. [O] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Lors de l'audience, la demande de renvoi présentée par la SCI LM ayant été refusée, cette société ainsi que M. [O], représentés par leur conseil respectif, ont fait plaider et soutenu oralement le bénéfice de leurs écritures remises au greffe.

M. [J] n'était ni comparant, ni représenté.

SUR CE

La SCI LM fait valoir qu'il existe des moyens sérieux d'annulation de la décision entreprise. Elle fait encore plaider que l'exécution de la décision entreprise portera atteinte à l'égalité entre associés et qu'elle n'est pas compatible avec l'intérêt social et la mission du liquidateur qui pourrait être désigné à la suite de l'action engagée par M. [J]. Elle ajoute que cette exécution engendrera un préjudice irréversible pour elle, alors que la somme au paiement de laquelle elle a été condamnée correspond à son seul actif, qu'elle n'a pas de ressources et que l'insolvabilité de M. [O] est probable en cas d'infirmation.

M. [O] prétend que la demande de la SCI LM est irrecevable en se fondant sur les dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile. Ensuite, il conteste le bien-fondé des prétentions adverses. En premier lieu, il fait observer que c'est une somme de 157 397,85 euros qui est placée sous séquestre auprès du bâtonnier l'ordre des avocats du barreau du Val de Marne au profit de la SCI LM, ensuite de la vente forcée. Il relève que si la SCI LM évoque son insolvabilité, c'est de façon purement hypothétique et sans produire le moindre élément à l'appui de son affirmation. Et, s'agissant d'éventuelles difficultés ou d'un déséquilibre dans la répartition de l'actif sociétal dans le cadre d'une liquidation à venir, il fait observer qu'une telle répartition ne peut en tout état de cause s'opérer qu'après avoir désintéressé les créanciers, y compris au titre du compte courant d'associé.

Le magistrat délégataire du Premier président de cette cour rappelle que conformément au II de l'article 55 du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, les articles 514-1 à 514-6 contenus dans la section I consacrée à "L'exécution provisoire" du Livre Ier, titre XV, chapitre IV du code de procédure civile ne s'appliquent qu'aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020.

Selon, l'article 514 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur jusqu'au 1er janvier 2020, applicable à l'espèce compte tenu de la date d'introduction de l'instance au fond devant le premier juge, "L'exécution provisoire ne peut pas être poursuivie sans avoir été ordonnée si ce n'est pour les décisions qui en bénéficient de plein droit.

Sont notamment exécutoires de droit à titre provisoire les ordonnances de référé, les décisions qui prescrivent des mesures provisoires pour le cours de l'instance, celles qui ordonnent des mesures conservatoires ainsi que les ordonnances du juge de la mise en état qui accordent une provision au créancier".

Selon l'article 515 du même code, dans sa version applicable à l'espèce, "Hors les cas où elle est de droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi.

Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation. En aucun cas, elle ne peut l'être pour les dépens".

L'article 516 du même code, dans sa version applicable à l'espèce, précise que "L'exécution provisoire ne peut être ordonnée que par la décision qu'elle est destinée à rendre exécutoire, sous réserve des dispositions des articles 525 et 526".

L'article 524 du même code, dans sa version applicable à l'espèce, prévoit que :

"Lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants :

1° Si elle est interdite par la loi ;

2° Si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.

Le même pouvoir appartient, en cas d'opposition, au juge qui a rendu la décision.

Lorsque l'exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au deuxième alinéa de l'article 521 et à l'article 522.

Le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives."

L'existence de conséquences manifestement excessives au sens de ces dispositions s'apprécie en considération des facultés de paiement du débiteur et des facultés de remboursement de la partie adverse dans l'hypothèse où la décision dont appel serait infirmée, et non par rapport aux chances de succès du recours.

Au cas d'espèce, il y a lieu de constater que le tribunal judiciaire a été saisi par le placement d'une assignation délivrée le 6 décembre 2018, en sorte que sont applicables les dispositions précédemment rappelées du code de procédure civile. Il n'est pas discuté que le jugement dont appel n'est pas exécutoire de plein droit outre qu'il convient de relever que le premier juge n'a pas ordonné l'exécution provisoire de sa décision.

Dans ces conditions, la demande de la SCI LM tendant à la suspension de l'exécution provisoire du jugement rendu le 9 janvier 2025 doit être regardée comme sans objet.

Sur la demande de dommages et intérêts

M. [O] soutient que la SCI LM a engagé la présente procédure dans le seul dessein de faire obstacle à l'exécution du jugement rendu le 9 janvier 2025, sans rapporter la preuve que l'exécution de cette décision serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives sur sa situation. Il en déduit qu'il s'agit d'une man'uvre dilatoire destinée à l'empêcher de percevoir les sommes qui lui ont été allouées par le jugement entrepris, ajoutant que ce comportement lui a causé un préjudice qui doit être réparé.

Il sera rappelé que selon l'article 32-1 du code de procédure civile "celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés".

Il est, en outre, admis qu'une juridiction des référés a le pouvoir de statuer sur le dommage causé par le comportement abusif des parties à la procédure dont elle est saisie (cf. Cass. 2ème civ. 22 novembre 2001, n° 00-16.969).

Reste que l'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas d'une faute tenant notamment à la malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équivalente, ce qui n'est pas démontré en l'espèce, pas plus qu'il n'est justifié de la réalité du préjudice invoqué.

Aussi, la demande de ce chef sera-t-elle rejetée.

Sur les demandes accessoires

En application de l'article 696 alinéa 1er du code de procédure civile, de principe, les dépens doivent être mis à la charge de la partie perdante.

En l'espèce, partie perdante, la SCI LM devra supporter les dépens de la présente instance outre les frais irrépétibles qu'elle a exposés à ce titre. En revanche, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la SCI LM sera condamnée à payer à M. [O] une indemnité de deux mille (2 000) euros.

PAR CES MOTIFS,

Déclarons sans objet la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formée par la SCI LM ;

Rejetons la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par M. [O] ;

Condamnons la SCI LM aux dépens ;

Condamnons la SCI LM à payer à M. [O] la somme de deux mille (2 000) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons toutes demandes plus amples ou contraires des parties.

ORDONNANCE rendue par M. Michel RISPE, Président de chambre, assisté de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Président

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