CA Douai, ch. 2 sect. 1, 20 novembre 2025, n° 25/00001
DOUAI
Arrêt
Autre
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 20/11/2025
****
MINUTE ELECTRONIQUE :
N° RG 25/00001 - N° Portalis DBVT-V-B7J-V6J2
Jugement (N° 2024023441) rendu le 04 décembre 2024 par le tribunal de commerce de Lille metropole
APPELANTE
Société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirke Ti agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège,
ayant son siège social [Adresse 11]
[Localité 6] (Turquie)
représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Eric Delfly, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant,
INTIMÉS
Monsieur [R] [U],
de nationalité française
demeurant [Adresse 1]
[Localité 10]
défaillant, à qui la déclaration d'appel et l'avis de fixation ont été signifiées le 09 avril 2025 à étude
Les conclusions ont été signifiées le 29 août 2025 par procés verbal 659 pcp
S.A.S. Diramode, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés, en cette qualité au siège,
ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Laurent Azoulai, avocat au barreau de Paris, substitué par Me Diana Dukic, avocat au barreau de Melun, avocat plaidant
S.E.L.A.R.L. Fhbx, prise en la personne de Me [T] [W], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode, désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lille du 30 octobre 2024
ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 9]
S.E.L.A.S. Bma Administrateurs Judiciaires, prise en la personne de Me [A] [X], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode, désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lille du 30 octobre 2024
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 7]
représentées par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, substituée par Me Thomas Obajtek, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
S.A.S. Pimkinvest, prise en la personne de son président,
ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai, avocat constitué,
Me Thomas Deschryver, substitué par Me Marion Raes, avocats au barreau de Lille, avocat plaidant,
S.A.S. Promotion du Pret a Porter (Ppp), prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés, en cette qualité audit siège,
ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
Société [Localité 14] B.V. , agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège,
ayant son siège social [Adresse 12]
[Adresse 2] Pays-bas
représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, substitué par Me Gilles Podeur, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Déborah Bohée, présidente de chambre
Pauline Mimiague, conseiller
Carole Catteau, conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne Dufossé
DÉBATS à l'audience publique du 18 septembre 2025, après rapport oral de l'affaire par Carole Catteau.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT RENDU PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Déborah Bohée, présidente, et Béatrice Capliez, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 10 septembre 2025
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EXPOSE DU LITIGE
La société Diramode, détentrice de la marque Pimkie qu'elle a concédée à sa filiale la société Promotion du Prêt-à-Porter (ci-après la société PPP), exerce les fonctions de siège au niveau du groupe Pimkie. Elle était initialement détenue par la société de droit néerlandais [Localité 14] B.V.
La société Pimkinvest a été créée en 2022 et elle était détenue à hauteur de 70'% par la société Lee Cooper France, de 15'% par la société Amoniss Holding Offshore et de 15'% par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi (ci-après la société Ibisler Tekstil). Elle était présidée par M. [N] [E].
A la suite de difficultés financières persistantes, une procédure de conciliation a été initiée durant l'année 2021 par la société [Localité 14] B.V. Cette procédure s'est achevée par la signature entre la société [Localité 14] B.V., la société Diramode, la société Pimkinvest et l'ensemble de ses actionnaires ainsi que par M. [R] [U] d'un protocole de conciliation le 17 janvier 2023, judiciairement homologué le 13 février suivant, aux termes duquel l'intégralité des participations de la société [Localité 14] B.V. dans la société Diramode a été cédée à hauteur de':
- 95'% au profit de la société Pimkinvest,
- 5'% au profit de la société Amoniss Holding Offshore.
Aux termes de ce protocole de conciliation, la société [Localité 14] B.V., sous diverses modalités et conditions, s'engageait à apporter à la société Diramode une certaine somme d'argent afin de permettre la mise en oeuvre de la restructuration et de financer le plan d'affaires.
Il contenait en outre divers engagements des parties dont':
- un transfert de 10 millions d'euros par la société Lee Cooper France et M. [R] [U] à la société Pimkinvest, laquelle s'engageait à octroyer à la société Diramode un prêt d'actionnaire du même montant bloqué jusqu'au 31 décembre 2026,
- un apport complémentaire de 5 millions d'euros par M. [R] [U], dirigeant de la société Lee Cooper France, si les pertes 2023 et 2024 étaient supérieures au plan d'affaires,
- la conclusion d'un contrat d'approvisionnement entre la société Ibisler Tekstil et la société Diramode à hauteur de 10 millions d'euros et des termes de paiement d'une durée de six mois,
- une absence de distribution de dividendes pendant la durée du plan d'affaires,
- une limitation des managements fees versés aux repreneurs et/ou à leurs affiliés.
Une fiducie-gestion a été constituée le 20 février 2023 entre la société [Localité 14] B.V., la société Diramode et le fiduciaire Equitis gestion pour matérialiser l'engagement de la société [Localité 14] B.V. d'apporter une somme de 119 millions d'euros et organiser les décaissements sur une période de deux années et demi. La SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W], a été instituée mandataire à l'exécution de l'accord. La société Ibisler Tekstil est intervenue à cette convention aux côtés des sociétés Pimkinvest, Amoniss Holding Offshore, Lee Cooper France et de M. [R] [U].
En pratique, la société [Localité 14] B.V. a apporté une somme de 154 000 000 d'euros et la différence de 35 000 000 d'euros a été conservée par la société Diramode pour financer le plan d'affaires des trois premiers mois.
Des divergences sont intervenues entre les actionnaires de la société Pimkinvest. Les membres du comité social et économique de l'UER Pimkie ont désigné le 19 septembre 2023, dans le cadre de leur droit d'alerte, le cabinet Sextant Expertise, expert-comptable, qui a déposé son rapport dans le courant du mois d'avril 2024.
Par jugements du 27 mai 2024, le tribunal de commerce de Lille Métropole a ouvert à l'égard de chacune des sociétés Diramode et PPP une procédure de sauvegarde. La SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et la SELARL BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] ont été désignées en qualité de co-administrateurs judiciaires avec mission d'assistance pour tous les actes de gestion et d'administration. La SCP BTSG prise en la personne de Maître [K] [I] et la SELAS MJ PARTNERS en la personne de [C] [O] ont été désignées quant à elles en qualité de co-mandataires judiciaires des sociétés.
Dans le contexte des divergences intervenues, la société Ibisler Tekstil a été autorisée à assigner la société Diramode ainsi que ses co-administrateurs judiciaires et ses co-mandataires judiciaires en référé à heure indiquée devant le président du tribunal de commerce de Lille-Métropole aux fins de voir désigner un administrateur provisoire.
Suivant ordonnance contradictoire du 12 septembre 2024, à laquelle il sera renvoyé pour plus ample exposé, le juge des référés a sursis à statuer sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire présentée et a ordonné une mesure d'expertise judiciaire confiée à M. [Z] [S], lequel a reçu notamment pour mission d'analyser et décrire les flux financiers, directs ou indirects, entre les sociétés Diramode, ses actionnaires, ses dirigeants, les sociétés du groupe Pimkie et/ou toute autre société ou tiers et plus généralement d'identifier tout acte anormal de gestion au sein de la société Diramode.
Parallèlement, les sociétés Diramode et PPP ont préparé la présentation de leurs plans de sauvegarde et envisagé une réorganisation actionnariale du groupe Pimkie passant par la cession de la participation que détenait la société Pimkinvest au capital de la société Diramode au profit de la société Amoniss.
Deux assemblées générales de la société Pimkinvest ont été organisées les 3 et 10 octobre 2024 pour régulariser les comptes sociaux puis autoriser la cession envisagée. Celle-ci a été agréée au cours de l'assemblée générale extraordinaire des associés du 10 octobre 2024, à laquelle n'a pas participé la société Ibisler Tekstil.
Suivant jugements du 30 octobre 2024, le tribunal de commerce a arrêté les plans de sauvegarde des sociétés Diramode et PPP. Les SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] ont été désignées en qualité de co-commissaires à l'exécution des plans de sauvegarde.
Contestant les conditions dans lesquelles s'étaient déroulées les assemblées générales des associés de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024 et invoquant un abus de majorité, la société Ibisler Tekstil a sollicité du président du tribunal de commerce de Lille Métropole l'autorisation d'assigner à bref délai la société Diramode, la société PPP, les SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] en leurs qualités de co-commissaires à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode, ainsi que la société Pimkinvest, M. [R] [U] et la société [Localité 14] B.V.
Autorisée par une ordonnance présidentielle du 20 novembre 2024, la société Ibisler Tekstil a fait délivrer assignations aux intéressés et par jugement réputé contradictoire du 4 décembre 2024, le tribunal de commerce a :
- débouté les sociétés Diramode et Promotion du Prêt-à-Porter de leur demande en exception de nullité de l'assignation à bref délai,
- déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes,
- condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de de procédure civile,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
- condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe).
Par déclaration au greffe en date du 2 janvier 2025, la société Ibisler Tekstil a relevé appel de cette décision sauf en ce qu'elle a débouté les sociétés Diramode et Promotion du Prêt-à-Porter de leur demande en exception de nullité de l'assignation à bref délai.
Suivant avis du 7 février 2025, accueillant la demande présentée par l'appelante, le président de la chambre a fixé l'affaire à bref délai.
La déclaration d'appel et l'avis de fixation ont été notifiés':
- le 13 février 2025 aux conseils de la société Pimkinvest et des co-commissaires à l'exécution du plan,
- le 19 février 2025 aux sociétés Diramode, PPP et [Localité 14] B.V.,
- le 20 février 2025 à M. [R] [U].
Les sociétés Diramode, PPP et Pimkinvest ont formé appel incident.
Bien qu'assigné par acte remis à domicile (son épouse ayant accepté de recevoir une copie de l'acte), M. [R] [U] n'a quant à lui pas comparu devant la cour.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 septembre 2025 et l'affaire plaidée au cours de l'audience du 18 septembre 2025.
1) - Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 septembre 2025, la société Ibisler Tekstil, demande à la cour de :
- Réformer le jugement entrepris en ce que :
- il a déclaré ses demandes irrecevables,
- il l'a condamnée à payer à chacune des sociétés Diramode, SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et Monsieur [R] [U] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes
- il l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe),
- Statuant à nouveau des chefs critiqués
- déclarer recevable son action et ses demandes,
- déclarer qu'elle est bien fondée en ses demandes,
- Par conséquent :
- annuler les assemblées générales mixte du 3 octobre 2024 et extraordinaire du 10 octobre 2024 et juger nul et de nul effet les PV subséquents
- juger nul et de nul effet tous les actes commis en exécution desdites assemblées précédemment annulées.
- En toute hypothèse
- débouter toutes les parties de toutes leurs demandes,
- désigner tel administrateur provisoire ou mandataire ad hoc qu'il plaira à la cour dès lors qu'il n'a pas été un des organes de la procédure collective ouverte au profit de Diramode et de PPP (Promotion du prêt à porter), avec mission de': :
- représenter la société [Pimkinvest] dans le cadre d'une mission d'administration générale ;
- procéder à l'audit des comptes sociaux de la société [Pimkinvest] clos au 31 décembre 2023 et le cas échéant de la situation intermédiaire arrêtée à la date de sa nomination et rechercher, si les charges supportées par la société correspondent à une réalité économique, ont été exposées dans l'intérêt de la société et identifier d'une manière générale tout acte anormal de gestion ;
- introduire toute action de nature à contester les dépenses comptabilisées et obtenir la restitution de tout paiement ou de tout actif détourné en contrariété avec les intérêts de la société [Pimkinvest] ;
- juger que l'administrateur devra exercer sa mission pour une période de 6 mois laquelle pourra être reconduite si l'intérêt de la société l'exige une ou plusieurs fois, quitte à limiter le périmètre de la mission au suivi des procédures introduite à son initiative et la récupération des fonds.
Subsidiairement
- désigner tel expert, et si possible M. [S], avec mission de donner son avis :
- Sur la nature fictive ou pas du contrat de travail comptabilisé dans les livres de la société ;
- Sur l'ensemble des conventions passées entre les sociétés contrôlées ou dirigées par Messieurs [E] ou [U], et notamment la réalité des prestations facturées et leur intérêt pour la société ;
- Sur le poste « Autres achats charges externes » comptabilisé pour un montant de 1'984 060 euros, la nature de la prestation fournie, sa réalité et son intérêt pour la société.
- Dire que l'expertise sera réalisée aux frais avancés de Pimkinvest avec la possibilité pour elle-même de se substituer à la carence de Pimkinvest et d'en obtenir le remboursement auprès de celle-ci.
- condamner Monsieur [R] [U] et la société Pimkinvest à lui payer une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner les mêmes en tous les frais et dépens de la procédure.
La société Ibisler Tekstil fait valoir que son action est recevable dès lors que la recevabilité d'une action en nullité d'une délibération sociale pour abus de majorité n'est pas selon elle, en l'absence de demande indemnitaire dirigée contre les associés majoritaires, subordonnée à la mise en cause de ces derniers, ainsi qu'il a été affirmé par un arrêt de la Cour de cassation du 9 juillet 2025 (Com. 9 juillet 2025 ' 23-23.484),
Sur le fond, elle expose que les assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024 doivent être annulées en ce qu'elles ont été prises en fraude de ses droits d'actionnaire et qu'il existe un abus de majorité destiné notamment à protéger M. [N] [E], président de la société, directeur général de la société Diramode et président de la société Amoniss Holding Off Shore, d'une action en responsabilité à raison de détournements qu'il aurait réalisés.
Elle critique tout d'abord les conditions dans lesquelles les convocations pour ses assemblées générales lui ont été adressées par lettres recommandées non doublées d'un courriel, dans un contexte où l'acheminement postal était problématique ce qui démontrerait une volonté délibérée de ne pas lui permettre d'être présente, alors qu'elle a reçu un courriel pour l'assemblée générale ayant abouti à la dissolution de la société Pimkinvest. Elle affirme que si elle avait été informée dans des délais raisonnables, elle aurait pu agir pour obtenir un report de l'assemblée, la désignation de tel mandataire, ainsi que faire constater son désaccord et son opposition aux résolutions proposées.
Elle réfute toute application de la théorie du vote dit utile laquelle explique-t-elle, dans sa forme négative (absence d'un associé qui a le droit de participer à une assemblée) n'aurait été consacrée par aucune jurisprudence. Elle argue qu'elle a été privée de ses droits fondamentaux liés à son droit de propriété et que son intervention aurait permis de protéger, au-delà des intérêts de l'associé minoritaire, les intérêts de la société.
Elle invoque par ailleurs un abus de majorité ayant conduit au transfert du seul actif de la société Pimkinvest au profit de l'un de ses associés et ce en méconnaissance du protocole de conciliation qui constituerait un pacte extra-statutaire dès lors que la société Pimkinvest y intervient comme partie cosignataire.
Cette violation doit selon la société'Ibisler Tekstil être sanctionnée de la même manière que la violation des statuts, à savoir par la nullité. Elle affirme que si le protocole est caduc, elle est néanmoins en droit de revendiquer sa violation entre sa signature et l'ouverture de la procédure de sauvegarde, toute somme perçue au-delà ou en dehors du protocole jusqu'à sa caducité constituant des griefs opposables.
Elle soutient aussi que la seconde assemblée générale s'inscrit dans le détournement d'une décision de justice et notamment de l'ordonnance de référé désignant M. [S] afin qu'il donne son avis sur les détournements d'actifs au sein de la société Diramode.
A l'appui de sa demande de désignation d'un administrateur provisoire, elle invoque l'existence d'un péril imminent lié à une mésentente lourde entre les associés dans une société privée de tout actif au bénéfice d'un seul d'entre eux, dans laquelle a été mise en place une organisation parallèle en dehors de la démocratie sociale alors que les comptes de la société Pimkinvest étaient révélateurs d'un état de cessation des paiements.
Subsidiairement, à l'appui de sa demande de désignation d'un expert judiciaire, la société Ibisler Tekstil invoque la fin de la procédure de sauvegarde et des griefs pouvant se reproduire en l'absence de tout contrôle dans la société compte tenu de son éviction. Elle estime la fraude aux droits de la société Pimkinvest manifeste au regard :
- de l'existence de prestations de conseils alors qu'il s'agissait d'une holding dite passive,
- des fausses réponses apportées sur les conventions réglementées,
- des conventions de prestations de service forfaitaires qui se produisaient à l'identique de chez Diramode chez Pimkinvest.
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2) ' La société Pimkinvest, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 septembre 2025, demande à la cour de':
Confirmer le jugement du 4 décembre 2024 en ce qu'il a':
- Déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe)
A titre subsidiaire, si la cour devait retenir la recevabilité des demandes de la société Ibisler Tekstil
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes,
En tout état de cause, à titre reconventionnel :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- Débouté les sociétés DIRAMODE, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS DIRAMODE, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS DIRAMODE, la société PIMKINVEST et Monsieur [R] [U] de leurs autres demandes ;
Statuant à nouveau et y ajoutant':
- condamner la société Ibisler Tekstil à lui verser la somme de 30 000 euros au titre de la procédure abusive ;
- condamner la même à lui verser la somme de 20 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Ibisler Tekstil aux dépens de l'instance.
La société Pimkinvest soutient en substance que 'l'action en nullité d'une délibération d'assemblée générale sur le fondement de l'abus de majorité ne peut pas être engagée contre la seule société et que les associés auteurs de l'abus doivent être mis en cause de sorte que l'action introduite par la société Ibisler Tekstil en l'absence des sociétés Lee Cooper France et Amoniss Holding Offshore est irrecevable.
Subsidiairement, elle argue que contrairement à ce qu'affirme l'appelante, le protocole d'accord transactionnel ne peut être assimilable à un pacte d'associés en l'absence de toute organisation des rapports entre associés dans cet acte et elle affirme qu'aucune fraude aux droits de la société Ibisler Tekstil n'est intervenue à l'occasion des assemblées générales critiquées.
Elle fait valoir que le défaut de convocation régulière d'un associé à une assemblée n'entraîne la nullité des délibérations de cette assemblée que si un grief est démontré et qu'en l'espèce cette preuve n'est pas rapportée dans la mesure où la société Ibisler Tekstil a été régulièrement convoquée et qu'en outre elle ne démontre pas que sa présence ou son absence était de nature à influer sur le résultat du vote.
Elle soutient également qu'au regard de l'objet statutaire de la société Pimkinvest, l'autorisation de l'assemblée générale des actionnaires n'était pas requise pour une cession des actions de la société.
S'agissant de l'abus de majorité reproché, elle fait valoir que les délibérations discutées sont conformes à l'intérêt social et qu'elles n'ont pas été adoptées au détriment des intérêts de la société Ibisler Tekstil ou dans l'unique but d'avantager l'associé majoritaire.
La société Pimkinvest conteste aussi toute violation du protocole de conciliation auquel selon elle il a été mis fin par l'ouverture de la procédure de sauvegarde ainsi qu'il est prévu par l'article L. 611-12 du code de commerce et elle oppose à l'appelante la force de chose jugée attachée au jugement du tribunal de commerce du 30 octobre 2024 arrêtant le plan de sauvegarde de la société Diramode et actant la cession devant intervenir ainsi que la réorganisation actionnariale du groupe.
D'autre part, elle s'oppose aux demandes de désignation d'un administrateur judiciaire et subsidiairement d'un expert judiciaire présentées par l'appelante aux motifs'que :
- la demande de désignation d'un administrateur provisoire ne peut être qu'une mesure exceptionnelle tenant notamment à la gravité d'une crise sociale, à un risque de paralysie de la société ou à l'urgence d'un péril imminent la menaçant, conditions dont l'existence n'est pas rapportée en l'espèce,
- la demande d'expertise judiciaire ne saurait quant à elle suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve et que la société Ibisler Tekstil dispose d'un droit d'information dont elle peut user pour obtenir les informations dont elle souhaite disposer.
Enfin, elle formule une demande de dommages-intérêts en raison d'une procédure qu'elle estime abusive dans la mesure où, alors que la société Ibisler Tekstil n'a formé aucun recours contre le jugement arrêtant le plan de sauvegarde de la société Diramode, elle a été assignée un mois après l'adoption de ce plan dans le cadre d'une procédure à bref délai alors que l'action est dénuée de tout fondement juridique.
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3) - Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31 juillet 2025, la société Diramode et la société PPP demandent à la cour de :
A titre principal :
- Confirmer le jugement rendu le 4 décembre 2024 par le tribunal de commerce de Lille Métropole en ce qu'il a :
- Déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] à la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe)
A titre subsidiaire, si la Cour devait retenir la recevabilité des demandes de la société Ibisler Tekstil':
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes
Sur l'appel incident de la société Diramode :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté les sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et Monsieur [R] [U] de leurs autres demandes ;
Statuant à nouveau et y ajoutant':
- Avant dire-droit, désigner tel expert judiciaire qu'il plaira avec pour mission notamment de :
- convoquer régulièrement les parties, après avoir pris connaissance du dossier, s'être fait remettre tous documents utiles et avoir entendu les parties ainsi que tout sachant permettant de :
- procéder à l'analyse financière et comptable des manquements de la société Ibisler tels que décrits dans le cadre de ses écritures en décrivant notamment leurs effets sur le business plan d'origine,
- évaluer les préjudices subis par la société Diramode et plus largement ses filiales.
- dire que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des
articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un
exemplaire original (éventuellement : sous format papier et en copie sous la forme
d'un fichier PDF enregistré sur un CD-ROM) au greffe du tribunal de (...), service du contrôle des expertises, (...), dans le délai de (XX mois) à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d'un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),
- Dire que l'expert devra, dès réception de l'avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l'expiration d'un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera à une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d'éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu'à l'issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle,
- Dire que, sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l'ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction,
- Dire que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappeler qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives,
- Désigner le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents,
- Dire que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,
- Fixer la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, qui devra être consignée par la société Ibisler Tekstil,
En conséquence de quoi, surseoir à statuer dans l'attente de la restitution du rapport définitif qui aura été établi par l'expert judiciaire désigné,
- condamner la société Ibisler Tekstil à leur payer la somme de 50 000 euros chacune en réparation du préjudice subi par elles et à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- En tout état de cause
- condamner la même à leur payer la somme de 25 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner la société Ibisler Tekstil aux dépens.
Les sociétés Diramode et PPP indiquent s'associer aux développements de la société Pimkinvest sur l'irrecevabilité de l'action introduite par la société Ibisler Tekstil à défaut de mise en cause des sociétés Lee Cooper France et Amoniss Holding Offshore.
Sur le fond, elles font valoir que la société Ibisler Tekstil ne peut opposer aucun grief tiré d'une prétendue violation du protocole de conciliation auquel il a été mis fin par la procédure de sauvegarde et elles s'associent également aux démonstrations de la société Pimkinvest à l'appui de ses demandes de rejet des prétentions de l'appelante.
Au soutien de sa demande d'expertise judiciaire, la société Diramode invoque l'existence de manquements contractuels de la société Ibisler Tekstil dans l'exécution des engagements prévus par le plan de retournement, et notamment au titre de l'approvisionnement en circuit court et de l'accord qu'elle devait donner pour le déblocage des fonds de la fiducie, qui auraient selon elles participé à accroître les difficultés du groupe, à accélérer le processus de fermeture des magasins et in fine auraient conduit à la faire placer sous la protection du tribunal.
Enfin, la société Diramode estime que les agissements graves et répétés de la société Ibisler Tekstil, qui agirait en réalité en entreprise tierce et concurrente, particulièrement prédatrice, de même que la procédure engagée qu'elle qualifie d'abusive, auraient perturbé gravement la confiance de son personnel et celle de sa filiale la société PPP et qu'ils auraient nuit à leur image ce qui justifierait la demande indemnitaire qu'elle présente sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
***
4) - Maître [T] [W] et Maître [A] [X] ès qualités (ci-après les co-commissaires à l'exécution du plan), demandent à la cour dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 4 avril 2025 de :
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':
- Déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
Subsidiairement et statuant à nouveau :
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes tendant à obtenir la nullité des assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024,
- leur donner acte de ce qu'ils s'en rapportent à justice quant aux demandes de désignation d'un administrateur provisoire concernant la société Pimkinvest et, subsidiairement quant à la demande de désignation d'un expert judiciaire,
En tout état de cause :
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires,
- condamner la société Ibisler Tekstil à lui régler la somme de 10'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers frais et dépens d'appel et de première instance.
Maître [T] [W] et Maître [A] [X] ès qualités exposent en substance que l'irrecevabilité invoquée par la société Pimkinvest est justifiée au regard de la jurisprudence qui considère que la mise en cause des actionnaires est indispensable lorsque l'action de l'associé est fondée sur un abus de majorité.
Sur le fond, ils soulignent qu'au regard du pourcentage des parts détenues par la société Ibisler Tekstil dans le capital de la société Diramode (15 %), et à supposer que celle-ci aurait procédé à un vote défavorable, les résolutions en cause auraient quand même été votées. Ils estiment qu'il n'existe aucune fraude qui serait caractérisée par la violation du protocole de conciliation du 17 janvier 2023, rappelant que ce protocole n'est plus en vigueur en raison de la procédure de sauvegarde ouverte à l'égard de la société Diramode le 27 mai 2024 qui a entraîné sa caducité par application de l'article L. 611-12 du code de commerce.
Enfin, ils s'en rapportent à justice sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire et celle de désignation d'un expert judiciaire pour la société Pimkinvest, prétentions qu'ils considèrent constituer un "baroud" d'honneur de la société Ibisler Tekstil plutôt qu'une mesure réellement utile.
***
5) -Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 mai 2025, la société [Localité 14] B.V. demande pour sa part à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé irrecevables les prétentions de la société Ibisler Tekstil à son encontre
- la mettre hors de cause,
- condamner la société Ibisler Tekstil à lui payer la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle fait principalement valoir qu'aucune prétention n'est formée à son encontre et que la société Ibisler Tekstil n'a jamais justifié du moindre intérêt à agir à son encontre.
***
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties visées ci-avant pour l'exposé exhaustif de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
1 ' Sur la recevabilité de l'action en nullité des assemblées générales
Il résulte de la combinaison des articles 1844-10 du code civil et 32 du code de procédure civile que la recevabilité d'une action en nullité d'une délibération sociale pour abus de majorité n'est pas, en l'absence de demande indemnitaire dirigée contre les associés majoritaires, subordonnée à la mise en cause de ces derniers (Com. 9 juillet 2025, n° 23-23.484 - publié).
En l'espèce, et comme le fait valoir à bon droit la société Ibisler Tekstil, si son action tend en premier lieu à l'annulation des délibérations des assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024 au titre d'un abus de majorité, elle ne formule aucune demande indemnitaire à l'encontre des associés majoritaires en sorte qu'elle n'avait pas à la diriger contre eux.
Son action est donc recevable et le jugement sera infirmé de ce chef.
2 ' Sur la demande d'annulation des assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024
Il sera liminairement précisé que l'assemblée générale mixte du 3 octobre 2024 a principalement été amenée à voter sur l'approbation des comptes sociaux de l'exercice clos au 31 décembre 2023 et l'affectation du résultat (la perte de l'exercice ayant été affectée au compte de report à nouveau). Elle a également décidé le transfert du siège social de la société Pimkinvest de [Localité 15] à [Localité 16].
L'assemblée générale extraordinaire du 10 octobre 2024 a quant à elle agréé le projet de cession par la société Pimkinvest de l'ensemble des actions qu'elle détenait dans le capital de la société Diramode au profit de la société Amoniss et donné pouvoir à M. [N] [G], en sa qualité de président, de signer la documentation juridique nécessaire à la réalisation de cette cession et de prendre toute mesure à cette fin.
2 -1 ' Sur la fraude aux droits d'un associé
Par application du premier alinéa de l'article 1844 du code civil, tout associé a le droit de participer aux décisions collectives, à peine de nullité des délibérations de l'assemblée générale d'associés et son absence de convocation à l'assemblée générale peut emporter une telle nullité en cas de grief.
Selon les statuts de la société Pimkinvest, la convocation des associés aux assemblées générales pouvait être faite par tout moyen, huit jours au moins avant la date de la réunion. L'assemblée pouvait également se réunir sans délai si tous les associés étaient présents ou représentés (article 24), 1 ' pièce appelante n° 1).
La société Ibisler Tekstil a été convoquée aux assemblées générales litigieuses suivant courrier recommandé expédié le 24 septembre 2024 pour la convocation à l'assemblée générale du 3 octobre 2024 et le 2 octobre 2024 pour l'assemblée générale du 10 octobre 2024 (pièce Pimkinvest n° 12).
Le décompte du délai de convocation des associés courant à compter de la date d'expédition, les convocations ont été adressées dans le délai et selon les modalités prévus par les statuts, dont il sera relevé qu'ils n'ont jamais été discutés par la société Ibisler Tekstil malgré son éloignement géographique.
La cour observe également que ces convocations ne sont pas intervenues durant une période durant laquelle la société Ibisler Tekstil avait fait part d'une absence ou d'une difficulté particulière ou durant laquelle elle pouvait être présumée absente ou ponctuellement indisponible (période estivale par exemple).
S'agissant de leur réception tardive, les constatations non traduites d'un notaire turc produites par l'appelante pour justifier qu'elle aurait reçu tardivement sa convocation sont assez peu compréhensibles et elles sont en tout état de cause inopérantes à caractériser une fraude à ses droits d'associés dès lors que le délai et les modalités statutaires de convocation ont été respectés, la société Pimkinvest ne pouvant au demeurant être responsable d'éventuels dysfonctionnements postaux dans l'acheminement du courrier.
De même, les statuts ne prévoyant pas une double convocation, notamment par courriel, la mise en place ponctuelle d'une telle pratique ne peut permettre d'établir que son défaut résulterait d'une volonté de nuire à l'appelante et de la priver de ses droits. La convocation en vue de la dissolution de la société Pimkinvest qu'invoque la société Ibisler Tekstil est pour sa part intervenue postérieurement aux courriers litigieux et il n'est en réalité pas démontré qu'il s'agissait d'une pratique antérieurement et habituellement mise en place qui aurait précisément fait défaut pour les deux assemblées en cause.
La volonté d'écarter l'appelante des assemblées en cause est d'autant moins établie que comme l'invoque la société Pimkinvest, une première convocation à une assemblée générale devant se tenir le 12 août 2024 lui avait préalablement été adressée le 5 août 2024 (pièce appelante n°5), laquelle fut reportée notamment à la suite d'une demande de pièces complémentaires présentée par la société Ibisler Tekstil (pièce appelante n°11). L'ordre du jour était identique à celui de l'assemblée générale du 3 octobre, de même que les pièces jointes ' à l'exception de la question du transfert du siège social et la transmission d'un projet de statuts mis à jour - de sorte que la société'Ibisler Tekstil disposait dès le mois d'août 2024 de toutes les informations nécessaires pour préparer cette assemblée dont elle était informée du report à une date ultérieure.
La convocation du 2 octobre 2024 quant à elle lui proposait de participer à l'assemblée générale du 10 octobre suivant par visioconférence compte tenu de son éloignement géographique. Par courriel du 9 octobre 2024, il lui était rappelé l'assemblée générale du 10 octobre 2024, compte tenu de la présence de son dirigeant à [Localité 13], et il lui était transmis un lien de visioconférence.
Ces éléments établissent que non seulement les éléments d'informations nécessaires à éclairer l'appelante sur les points devant être débattus lui ont été adressés mais également que des mesures de nature à faciliter sa participation aux assemblées générales ont été mises en 'uvre, écartant la fraude invoquée dans les droits de cet associé qui n'a finalement pas participé aux assemblées qu'il critique aujourd'hui.
A titre surabondant, et comme le font justement valoir la société Pimkinvest et les co-commissaires à l'exécution du plan, la violation invoquée par la société Ibisler Tekstil n'était en tout état de cause pas de nature à influer sur le résultat du processus décisionnel compte tenu de sa participation minoritaire au capital en sorte que même si la société Ibisler Tekstil avait voté défavorablement, et en l'absence de toute fraude à son égard, les résolutions litigieuses auraient été adoptées.
En conséquence, et à défaut d'irrégularité et/ou de fraude aux droits de l'appelante, le moyen sera écarté.
2-2 ' Sur l'abus de majorité
L'abus de majorité suppose la réunion de deux conditions, qui sont cumulatives':
- d'une part, que la décision litigieuse ait été prise contrairement à l'intérêt social,
- d'autre part elle qu'elle ait été prise dans l'unique dessein de favoriser les associés majoritaires au détriment des associés minoritaires.
La société Ibisler Tekstil invoque tout à la fois la violation du protocole de conciliation et le transfert du seul actif détenu par la société Pimkinvest, sans l'accord des associés, afin de la transformer en coquille vide mais également l'objectif de protéger M. [N] [E] d'une action en responsabilité, ce qui constituerait un acte frauduleux révélant un abus de majorité.
Il convient préalablement de rappeler que le capital social de la société Pimkinvest était détenu':
- à hauteur de 70'% par la société Lee Cooper France (dirigée par M. [R] [U]),
- à hauteur de 15'% par la société Amoniss Holding Offshore (dirigée par M. [N] [E]),
- à hauteur de 15'% par la société Ibisler Tekstil (dirigée par M. [J] [V]).
Comme l'expose la société Pimkinvest, son associé majoritaire était la société Lee Cooper France, qui n'est pas le cessionnaire des actions, lesquelles ont été cédées à la société Amoniss (dont M. [N] [E] était l'associé unique).
A la suite de l'autorisation de cession des actions détenues par la société Pimkinvest à la société Amoniss, l'associé majoritaire a en réalité été placé dans la même situation que la société Ibisler Tekstil et les décisions en cause n'ont donc pas créé une rupture de l'intérêt commun.
Par ailleurs, cette cession d'actions fait partie d'une opération de restructuration du groupe Pimkie plus importante, par suite de la persistance de difficultés financières rencontrées après sa cession par la société [Localité 14] B.V. qui a donné lieu à la demande d'ouverture de deux procédures de sauvegarde à l'égard des sociétés Diramode et PPP.
En effet, il ressort des projets de plan versés que les mesures initiées par le nouveau management se sont avérées insuffisantes face à une crise de la consommation et du secteur de l'habillement, très impacté par le marché asiatique, conjuguée à une baisse du chiffre d'affaires qui s'est accélérée depuis la fin de l'année 2023.
Selon le procès-verbal de l'assemblée générale du 3 octobre 2024, le résultat de l'exercice clos 2023 de la société Pimkinvest était de [' 1 526 032 euros].
Dans le cadre de la procédure de sauvegarde, le cabinet Ernst Young, désigné par le juge-commissaire pour réaliser un audit de performance passée et prévisionnelle, a établi un business plan et les sociétés Diramode et PPP ont présenté, avec le concours des co-administrateurs judiciaires, un projet de plan de sauvegarde destiné à garantir la poursuite de l'activité du groupe, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif.
Il existait également un contexte conflictuel entre les actionnaires empêchant les déblocages de trésorerie prévus dans le plan de retournement.
Ainsi, la cession de la société Pimkinvest, société Holding, est intervenue dans le cadre d'un plan de transformation global, dont elle était l'une des conditions, et qui était destiné à impulser une nouvelle dynamique au sein du groupe et à redynamiser la marque Pimkie en prévoyant notamment':
- une réorganisation actionnariale tenant à la cession de la participation de la société Pimkinvest au capital de la société Diramode au bénéfice de la société Amoniss,
- un débouclage de la fiducie-gestion mise en place en 2023 afin de libérer l'intégralité des fonds mis en place dans cette fiducie,
- une réduction du périmètre magasins,
- un repositionnement de l'image de marque,
- un plan de sauvegarde de l'emploi limitant à 33 les suppressions de poste.
Dans ce contexte, alors que la situation économique des sociétés Diramode et PPP continuaient de se dégrader, les résolutions litigieuses - dont la restructuration capitalistique - qui conditionnaient la mise en 'uvre de leurs plans de sauvegarde, étaient conformes à l'intérêt social de la société.
Cette conformité à l'intérêt social exclut tout abus de majorité lequel n'est en tout état de cause pas caractérisé par la société Ibisler Tekstil en l'absence de rupture de l'intérêt commun au profit d'un associé majoritaire.
Le moyen sera en conséquence écarté.
2-3 ' Sur la violation du protocole de conciliation
La société Ibisler Tekstil, qui qualifie le protocole de conciliation de pacte extra-statutaire devant être respecté par ses signataires, invoque en dernier lieu à l'appui de sa demande en annulation des assemblées générales la violation de cet acte, pour la période qui serait située entre sa signature et l'ouverture de la procédure de sauvegarde.
Sur ce dernier point, et comme le font valoir à bon droit les co-commissaires à l'exécution du plan et la société Pimkinvest, par application de l'article L. 611-12 du code de commerce, l'ouverture des procédures de sauvegarde des sociétés Diramode et PPP a mis fin au protocole de conciliation judiciairement homologué le 13 février 2023.
Le protocole de conciliation étant caduc à la date à laquelle les résolutions discutées ont été votées, ses dispositions ne s'imposaient plus à ses signataires et au regard de l'objet des deux assemblées générales en cause, la cour n'étant pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, aucune violation n'est en réalité utilement invoquée par la société Ibisler Tekstil qui ne démontre pas que lesdites décisions auraient été prises en méconnaissance dudit protocole.
Le moyen sera lui aussi écarté.
***
En considération de tout ce qui précède, la demande en annulation des assemblées générales des 3 octobre 2024 et 10 octobre 2024 présentée par la société Ibisler Tekstil ainsi que ses demandes subséquentes seront rejetées.
3 ' Sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire
Il est jugé que la désignation judiciaire d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose que soit rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent, ces deux conditions étant cumulatives.
En l'espèce, s'il existe à l'évidence une mésentente entre les associés de la société Pimkinvest, il n'est pas rapporté la preuve que cette mésentente aurait paralysé le fonctionnement de la société, celle-ci ayant pu tenir ses assemblées générales et poursuivre son activité jusqu'à sa dissolution. Cette dissolution est par ailleurs intervenue dans le cadre de l'accord global de restructuration du groupe Pimkie rappelé supra et de la procédure de sauvegarde et non du fait des détournements d'actifs allégués par la société Ibisler Tekstil.
Ce fonctionnement normal et régulier de la société fait obstacle à la nomination d'un administrateur provisoire et impose en conséquence de rejeter la demande présentée par la société Ibisler Tekstil, sans qu'il y ait lieu pour la cour d'examiner les autres moyens invoqués, les deux conditions rappelées supra étant cumulatives.
Au surplus, la cour observe qu'il résulte des propres conclusions de l'appelante et de ses pièces (pièce n°30) que la société Pimkinvest a été dissoute par une assemblée générale du 26 juin 2025 en sorte qu'elle ne peut plus être menacée d'aucun péril imminent, cette seconde condition faisant également défaut.
4 - Sur la demande subsidiaire de désignation d'un expert judiciaire présentée par la société Ibisler Tekstil
Les conditions nécessaires à la désignation d'un administrateur provisoire n'étant pas réunies, la cour n'a pas besoin de recourir aux lumières d'un technicien pour apprécier la demande présentée par la société Ibisler Tekstil.
La demande d'annulation des résolutions des assemblées générales contestées a quant à elle été rejetée, sans qu'il soit nécessaire pour la cour d'ordonner une mesure d'expertise pour l'éclairer davantage sur ce litige.
Il y a dès lors lieu de rejeter la demande d'expertise présentée à titre subsidiaire par la société Ibisler Tekstil.
5 ' Sur la demande reconventionnelle de la société Diramode aux fins de désignation d'un expert judiciaire
La société Ibisler Tekstil est totalement taisante sur la demande d'expertise présentée par la société Diramode aux fins de voir déterminer les préjudices qu'elle aurait subis avec ses filiales par suite des manquements de l'appelante aux engagements liés à la reprise d'origine et à':
- l'inexécution du contrat d'approvisionnement et du crédit-fournisseur de 10 000 000'd'euros devant être consenti sur les collections achetées,
- au refus de signature des demandes de déblocage des fonds de la fiducie-gestion.
La société Diramode affirme que ces manquements auraient participé à l'ouverture de la procédure de sauvegarde outre qu'ils lui auraient occasionné un préjudice en terme économique et d'image et elle verse de nombreux courriels échangés dans le cadre des demandes de déblocages des fonds de la fiducie-gestion.
L'analyse de ces courriels met en évidence, au-delà des silences et/ou réticences opposés par la société Ibisler Tekstil à signer l'acte de confirmation de respect des engagements permettant le déblocage du paiement planifié, l'existence de divergences entre les parties sur leurs obligations de même que sur la mission du mandataire à l'exécution de l'accord.
S'il est certain que la société Ibisler Tekstil s'est montrée très rapidement récalcitrante et qu'elle a manifesté dès le mois de mars 2023, soit en réalité dès le premier déblocage de fonds de la fiducie-gestion, une réticence à signer les accords de déblocage, la cour observe que le conflit entre les actionnaires, qui était plus profond, a finalement abouti à bref délai à une restructuration capitalistique et à une réorganisation globale destinée à permettre une remise à flot du groupe Pimkie dont il a été rappelé supra que les difficultés financières étaient plurifactorielles.
La procédure de sauvegarde a été ouverte pour permettre cette réorganisation et la cour ne dispose d'aucun élément comptable de nature à établir que les comportements reprochés à la société Ibisler Tekstil auraient eu un impact économique direct sur la situation de la société Diramode.
Elle observe à cet égard que lors de l'ouverture de la procédure de sauvegarde, qui excluait tout état de cessation des paiements, le tribunal relevait que le passif échu exigible de la société Diramode était d'un montant de 4 112 684 euros et son actif disponible d'un montant de 43 568 947 euros de sorte que la société pouvait faire face à ses engagements, y compris au regard de la situation de sa filiale, la société PPP, dont l'actif disponible était de 2 005 386 euros et le passif échu exigible de 4 981 688 euros.
La preuve que des magasins auraient été fermés prématurément du fait du comportement de l'appelante n'est pas non plus rapportée.
S'agissant de la méconnaissance du contrat d'approvisionnement, la production par la société Diramode de quelques courriels que la cour peut difficilement exploiter s'agissant d'échanges lapidaires sur des demandes de prix et de produits, ne permet pas plus d'établir que le positionnement de la société Ibisler Tekstil aurait lui aussi occasionné à la date de l'ouverture de la procédure de sauvegarde un préjudice économique et/ou d'image à la société Diramode.
En outre, le courriel de Mme [H] [L] du 19 juillet 2024, s'il mentionne que la société Ibisler Tekstil a souhaité arrêter de collaborer, précise toutefois que cette décision a finalement été revue à la suite d'une renégociation des conditions de paiement, dont la cour ne connaît pas les tenants et aboutissants. Ainsi, il n'établit aucune rupture des relations commerciales mais au contraire leur poursuite.
A défaut pour la société Diramode de caractériser l'existence d'un préjudice qui serait né des manquements reprochés à la société Ibisler Tekstil, la demande d'expertise qu'elle présente sera rejetée.
6 ' Sur la mise hors de cause de la société [Localité 14] B.V.
Comme l'invoque justement la société [Localité 14] B.V., celle-ci a été attraite au litige et intimée alors que la société Ibisler Tekstil ne formule aucune demande à son encontre de même qu'aucune autre partie. Elle sera en conséquence mise hors de cause.
7 ' Sur les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive présentées par les sociétés Pimkinvest, Diramode et PPP
La cour rappelle que l'accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles que le fait d'agir en justice ou d'exercer une voie de recours légalement ouverte est susceptible de constituer un abus.
Il en résulte que l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas à elle seule constitutive d'une telle faute de même que le caractère manifestement mal fondé d'une prétention n'est pas susceptible de faire dégénérer le droit d'agir en abus.
En l'espèce, s'il est certain qu'il existe un contentieux nourri entre la société Ibisler Tekstil, M. [N] [E] (dirigeant de la société Diramode et de la société Pimkinvest) et M. [R] [U] (Président de la société Lee Cooper France), la preuve que l'appelante aurait commis une faute dans l'exercice de son droit d'agir n'est pas suffisamment caractérisée, l'inimitié existant entre les parties apparaissant tellement forte que le litige les opposant ne pouvait être tranché que par le juge.
Les sociétés Pimkinvest, Diramode et PPP ne rapportent pas non plus la preuve du préjudice qui résulterait de l'action introduite, et notamment l'existence comme allégué par la société Diramode d'un préjudice d'image, pas plus que celle d'un préjudice distinct de celui causé par la nécessité de se défendre en justice qui sera réparé par l'allocation d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
En conséquence, la demande de dommages-intérêts qu'elles présentent sera rejetée.
8 - Sur les frais du procès
La société Ibisler Tekstil, qui est partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel, les dispositions du jugement prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Par application de l'article 700 du code de procédure civile, elle sera également condamnée au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, à payer :
- à la société Pimkinvest la somme de 5 000 euros,
- conjointement à la société Diramode et la société PPP, la même somme,
- conjointement à Maître [T] [W] et Maître [A] [X] ès qualités, la même somme.
Elle sera en outre condamnée à payer la somme de 2 000 euros à la société [Localité 14] B.V. au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant dans les limites de l'appel';
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
CONFIRME ledit jugement en ce qu'il a':
- condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à I'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [F] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de de procédure civile ;
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;
- condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe) ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT
JUGE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi recevable à agir en annulation de l'assemblée générale mixte de la société Pimkinvest du 3 octobre 2024 et de l'assemblée générale extraordinaire du 10 octobre 2024 ;
REJETTE la demande d'annulation desdites assemblées générales présentée par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi ainsi que sa demande tendant à voir juger nuls et de nul effet tous les procès-verbaux subséquents ainsi que les actes commis en exécution des assemblées générales annulées ;
REJETTE la demande de désignation d'un administrateur provisoire présentée par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi ;
REJETTE la demande de désignation d'un expert judiciaire présentée par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi ;
REJETTE la demande de désignation d'un expert judiciaire présentée par la société Diramode ;
REJETTE les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive présentées par les sociétés Pimkinvest, Diramode et Promotion du Prêt-à-Porter ;
MET HORS DE CAUSE la société [Localité 14] B.V. ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi aux dépens de l'instance d'appel ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à la société Pimkinvest la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à la société Diramode et à la société Promotion du prêt-à-porter la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à La SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et la SELARL BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] en leurs qualités de co-commissaires à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à la société [Localité 14] B.V. la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le greffier
La présidente
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 20/11/2025
****
MINUTE ELECTRONIQUE :
N° RG 25/00001 - N° Portalis DBVT-V-B7J-V6J2
Jugement (N° 2024023441) rendu le 04 décembre 2024 par le tribunal de commerce de Lille metropole
APPELANTE
Société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirke Ti agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège,
ayant son siège social [Adresse 11]
[Localité 6] (Turquie)
représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Eric Delfly, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant,
INTIMÉS
Monsieur [R] [U],
de nationalité française
demeurant [Adresse 1]
[Localité 10]
défaillant, à qui la déclaration d'appel et l'avis de fixation ont été signifiées le 09 avril 2025 à étude
Les conclusions ont été signifiées le 29 août 2025 par procés verbal 659 pcp
S.A.S. Diramode, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés, en cette qualité au siège,
ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Laurent Azoulai, avocat au barreau de Paris, substitué par Me Diana Dukic, avocat au barreau de Melun, avocat plaidant
S.E.L.A.R.L. Fhbx, prise en la personne de Me [T] [W], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode, désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lille du 30 octobre 2024
ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 9]
S.E.L.A.S. Bma Administrateurs Judiciaires, prise en la personne de Me [A] [X], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode, désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lille du 30 octobre 2024
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 7]
représentées par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, substituée par Me Thomas Obajtek, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
S.A.S. Pimkinvest, prise en la personne de son président,
ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai, avocat constitué,
Me Thomas Deschryver, substitué par Me Marion Raes, avocats au barreau de Lille, avocat plaidant,
S.A.S. Promotion du Pret a Porter (Ppp), prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés, en cette qualité audit siège,
ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
Société [Localité 14] B.V. , agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège,
ayant son siège social [Adresse 12]
[Adresse 2] Pays-bas
représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, substitué par Me Gilles Podeur, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Déborah Bohée, présidente de chambre
Pauline Mimiague, conseiller
Carole Catteau, conseiller
---------------------
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne Dufossé
DÉBATS à l'audience publique du 18 septembre 2025, après rapport oral de l'affaire par Carole Catteau.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT RENDU PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Déborah Bohée, présidente, et Béatrice Capliez, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 10 septembre 2025
****
EXPOSE DU LITIGE
La société Diramode, détentrice de la marque Pimkie qu'elle a concédée à sa filiale la société Promotion du Prêt-à-Porter (ci-après la société PPP), exerce les fonctions de siège au niveau du groupe Pimkie. Elle était initialement détenue par la société de droit néerlandais [Localité 14] B.V.
La société Pimkinvest a été créée en 2022 et elle était détenue à hauteur de 70'% par la société Lee Cooper France, de 15'% par la société Amoniss Holding Offshore et de 15'% par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi (ci-après la société Ibisler Tekstil). Elle était présidée par M. [N] [E].
A la suite de difficultés financières persistantes, une procédure de conciliation a été initiée durant l'année 2021 par la société [Localité 14] B.V. Cette procédure s'est achevée par la signature entre la société [Localité 14] B.V., la société Diramode, la société Pimkinvest et l'ensemble de ses actionnaires ainsi que par M. [R] [U] d'un protocole de conciliation le 17 janvier 2023, judiciairement homologué le 13 février suivant, aux termes duquel l'intégralité des participations de la société [Localité 14] B.V. dans la société Diramode a été cédée à hauteur de':
- 95'% au profit de la société Pimkinvest,
- 5'% au profit de la société Amoniss Holding Offshore.
Aux termes de ce protocole de conciliation, la société [Localité 14] B.V., sous diverses modalités et conditions, s'engageait à apporter à la société Diramode une certaine somme d'argent afin de permettre la mise en oeuvre de la restructuration et de financer le plan d'affaires.
Il contenait en outre divers engagements des parties dont':
- un transfert de 10 millions d'euros par la société Lee Cooper France et M. [R] [U] à la société Pimkinvest, laquelle s'engageait à octroyer à la société Diramode un prêt d'actionnaire du même montant bloqué jusqu'au 31 décembre 2026,
- un apport complémentaire de 5 millions d'euros par M. [R] [U], dirigeant de la société Lee Cooper France, si les pertes 2023 et 2024 étaient supérieures au plan d'affaires,
- la conclusion d'un contrat d'approvisionnement entre la société Ibisler Tekstil et la société Diramode à hauteur de 10 millions d'euros et des termes de paiement d'une durée de six mois,
- une absence de distribution de dividendes pendant la durée du plan d'affaires,
- une limitation des managements fees versés aux repreneurs et/ou à leurs affiliés.
Une fiducie-gestion a été constituée le 20 février 2023 entre la société [Localité 14] B.V., la société Diramode et le fiduciaire Equitis gestion pour matérialiser l'engagement de la société [Localité 14] B.V. d'apporter une somme de 119 millions d'euros et organiser les décaissements sur une période de deux années et demi. La SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W], a été instituée mandataire à l'exécution de l'accord. La société Ibisler Tekstil est intervenue à cette convention aux côtés des sociétés Pimkinvest, Amoniss Holding Offshore, Lee Cooper France et de M. [R] [U].
En pratique, la société [Localité 14] B.V. a apporté une somme de 154 000 000 d'euros et la différence de 35 000 000 d'euros a été conservée par la société Diramode pour financer le plan d'affaires des trois premiers mois.
Des divergences sont intervenues entre les actionnaires de la société Pimkinvest. Les membres du comité social et économique de l'UER Pimkie ont désigné le 19 septembre 2023, dans le cadre de leur droit d'alerte, le cabinet Sextant Expertise, expert-comptable, qui a déposé son rapport dans le courant du mois d'avril 2024.
Par jugements du 27 mai 2024, le tribunal de commerce de Lille Métropole a ouvert à l'égard de chacune des sociétés Diramode et PPP une procédure de sauvegarde. La SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et la SELARL BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] ont été désignées en qualité de co-administrateurs judiciaires avec mission d'assistance pour tous les actes de gestion et d'administration. La SCP BTSG prise en la personne de Maître [K] [I] et la SELAS MJ PARTNERS en la personne de [C] [O] ont été désignées quant à elles en qualité de co-mandataires judiciaires des sociétés.
Dans le contexte des divergences intervenues, la société Ibisler Tekstil a été autorisée à assigner la société Diramode ainsi que ses co-administrateurs judiciaires et ses co-mandataires judiciaires en référé à heure indiquée devant le président du tribunal de commerce de Lille-Métropole aux fins de voir désigner un administrateur provisoire.
Suivant ordonnance contradictoire du 12 septembre 2024, à laquelle il sera renvoyé pour plus ample exposé, le juge des référés a sursis à statuer sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire présentée et a ordonné une mesure d'expertise judiciaire confiée à M. [Z] [S], lequel a reçu notamment pour mission d'analyser et décrire les flux financiers, directs ou indirects, entre les sociétés Diramode, ses actionnaires, ses dirigeants, les sociétés du groupe Pimkie et/ou toute autre société ou tiers et plus généralement d'identifier tout acte anormal de gestion au sein de la société Diramode.
Parallèlement, les sociétés Diramode et PPP ont préparé la présentation de leurs plans de sauvegarde et envisagé une réorganisation actionnariale du groupe Pimkie passant par la cession de la participation que détenait la société Pimkinvest au capital de la société Diramode au profit de la société Amoniss.
Deux assemblées générales de la société Pimkinvest ont été organisées les 3 et 10 octobre 2024 pour régulariser les comptes sociaux puis autoriser la cession envisagée. Celle-ci a été agréée au cours de l'assemblée générale extraordinaire des associés du 10 octobre 2024, à laquelle n'a pas participé la société Ibisler Tekstil.
Suivant jugements du 30 octobre 2024, le tribunal de commerce a arrêté les plans de sauvegarde des sociétés Diramode et PPP. Les SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] ont été désignées en qualité de co-commissaires à l'exécution des plans de sauvegarde.
Contestant les conditions dans lesquelles s'étaient déroulées les assemblées générales des associés de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024 et invoquant un abus de majorité, la société Ibisler Tekstil a sollicité du président du tribunal de commerce de Lille Métropole l'autorisation d'assigner à bref délai la société Diramode, la société PPP, les SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] en leurs qualités de co-commissaires à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode, ainsi que la société Pimkinvest, M. [R] [U] et la société [Localité 14] B.V.
Autorisée par une ordonnance présidentielle du 20 novembre 2024, la société Ibisler Tekstil a fait délivrer assignations aux intéressés et par jugement réputé contradictoire du 4 décembre 2024, le tribunal de commerce a :
- débouté les sociétés Diramode et Promotion du Prêt-à-Porter de leur demande en exception de nullité de l'assignation à bref délai,
- déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes,
- condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de de procédure civile,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
- condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe).
Par déclaration au greffe en date du 2 janvier 2025, la société Ibisler Tekstil a relevé appel de cette décision sauf en ce qu'elle a débouté les sociétés Diramode et Promotion du Prêt-à-Porter de leur demande en exception de nullité de l'assignation à bref délai.
Suivant avis du 7 février 2025, accueillant la demande présentée par l'appelante, le président de la chambre a fixé l'affaire à bref délai.
La déclaration d'appel et l'avis de fixation ont été notifiés':
- le 13 février 2025 aux conseils de la société Pimkinvest et des co-commissaires à l'exécution du plan,
- le 19 février 2025 aux sociétés Diramode, PPP et [Localité 14] B.V.,
- le 20 février 2025 à M. [R] [U].
Les sociétés Diramode, PPP et Pimkinvest ont formé appel incident.
Bien qu'assigné par acte remis à domicile (son épouse ayant accepté de recevoir une copie de l'acte), M. [R] [U] n'a quant à lui pas comparu devant la cour.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 septembre 2025 et l'affaire plaidée au cours de l'audience du 18 septembre 2025.
1) - Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 septembre 2025, la société Ibisler Tekstil, demande à la cour de :
- Réformer le jugement entrepris en ce que :
- il a déclaré ses demandes irrecevables,
- il l'a condamnée à payer à chacune des sociétés Diramode, SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et Monsieur [R] [U] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes
- il l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe),
- Statuant à nouveau des chefs critiqués
- déclarer recevable son action et ses demandes,
- déclarer qu'elle est bien fondée en ses demandes,
- Par conséquent :
- annuler les assemblées générales mixte du 3 octobre 2024 et extraordinaire du 10 octobre 2024 et juger nul et de nul effet les PV subséquents
- juger nul et de nul effet tous les actes commis en exécution desdites assemblées précédemment annulées.
- En toute hypothèse
- débouter toutes les parties de toutes leurs demandes,
- désigner tel administrateur provisoire ou mandataire ad hoc qu'il plaira à la cour dès lors qu'il n'a pas été un des organes de la procédure collective ouverte au profit de Diramode et de PPP (Promotion du prêt à porter), avec mission de': :
- représenter la société [Pimkinvest] dans le cadre d'une mission d'administration générale ;
- procéder à l'audit des comptes sociaux de la société [Pimkinvest] clos au 31 décembre 2023 et le cas échéant de la situation intermédiaire arrêtée à la date de sa nomination et rechercher, si les charges supportées par la société correspondent à une réalité économique, ont été exposées dans l'intérêt de la société et identifier d'une manière générale tout acte anormal de gestion ;
- introduire toute action de nature à contester les dépenses comptabilisées et obtenir la restitution de tout paiement ou de tout actif détourné en contrariété avec les intérêts de la société [Pimkinvest] ;
- juger que l'administrateur devra exercer sa mission pour une période de 6 mois laquelle pourra être reconduite si l'intérêt de la société l'exige une ou plusieurs fois, quitte à limiter le périmètre de la mission au suivi des procédures introduite à son initiative et la récupération des fonds.
Subsidiairement
- désigner tel expert, et si possible M. [S], avec mission de donner son avis :
- Sur la nature fictive ou pas du contrat de travail comptabilisé dans les livres de la société ;
- Sur l'ensemble des conventions passées entre les sociétés contrôlées ou dirigées par Messieurs [E] ou [U], et notamment la réalité des prestations facturées et leur intérêt pour la société ;
- Sur le poste « Autres achats charges externes » comptabilisé pour un montant de 1'984 060 euros, la nature de la prestation fournie, sa réalité et son intérêt pour la société.
- Dire que l'expertise sera réalisée aux frais avancés de Pimkinvest avec la possibilité pour elle-même de se substituer à la carence de Pimkinvest et d'en obtenir le remboursement auprès de celle-ci.
- condamner Monsieur [R] [U] et la société Pimkinvest à lui payer une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner les mêmes en tous les frais et dépens de la procédure.
La société Ibisler Tekstil fait valoir que son action est recevable dès lors que la recevabilité d'une action en nullité d'une délibération sociale pour abus de majorité n'est pas selon elle, en l'absence de demande indemnitaire dirigée contre les associés majoritaires, subordonnée à la mise en cause de ces derniers, ainsi qu'il a été affirmé par un arrêt de la Cour de cassation du 9 juillet 2025 (Com. 9 juillet 2025 ' 23-23.484),
Sur le fond, elle expose que les assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024 doivent être annulées en ce qu'elles ont été prises en fraude de ses droits d'actionnaire et qu'il existe un abus de majorité destiné notamment à protéger M. [N] [E], président de la société, directeur général de la société Diramode et président de la société Amoniss Holding Off Shore, d'une action en responsabilité à raison de détournements qu'il aurait réalisés.
Elle critique tout d'abord les conditions dans lesquelles les convocations pour ses assemblées générales lui ont été adressées par lettres recommandées non doublées d'un courriel, dans un contexte où l'acheminement postal était problématique ce qui démontrerait une volonté délibérée de ne pas lui permettre d'être présente, alors qu'elle a reçu un courriel pour l'assemblée générale ayant abouti à la dissolution de la société Pimkinvest. Elle affirme que si elle avait été informée dans des délais raisonnables, elle aurait pu agir pour obtenir un report de l'assemblée, la désignation de tel mandataire, ainsi que faire constater son désaccord et son opposition aux résolutions proposées.
Elle réfute toute application de la théorie du vote dit utile laquelle explique-t-elle, dans sa forme négative (absence d'un associé qui a le droit de participer à une assemblée) n'aurait été consacrée par aucune jurisprudence. Elle argue qu'elle a été privée de ses droits fondamentaux liés à son droit de propriété et que son intervention aurait permis de protéger, au-delà des intérêts de l'associé minoritaire, les intérêts de la société.
Elle invoque par ailleurs un abus de majorité ayant conduit au transfert du seul actif de la société Pimkinvest au profit de l'un de ses associés et ce en méconnaissance du protocole de conciliation qui constituerait un pacte extra-statutaire dès lors que la société Pimkinvest y intervient comme partie cosignataire.
Cette violation doit selon la société'Ibisler Tekstil être sanctionnée de la même manière que la violation des statuts, à savoir par la nullité. Elle affirme que si le protocole est caduc, elle est néanmoins en droit de revendiquer sa violation entre sa signature et l'ouverture de la procédure de sauvegarde, toute somme perçue au-delà ou en dehors du protocole jusqu'à sa caducité constituant des griefs opposables.
Elle soutient aussi que la seconde assemblée générale s'inscrit dans le détournement d'une décision de justice et notamment de l'ordonnance de référé désignant M. [S] afin qu'il donne son avis sur les détournements d'actifs au sein de la société Diramode.
A l'appui de sa demande de désignation d'un administrateur provisoire, elle invoque l'existence d'un péril imminent lié à une mésentente lourde entre les associés dans une société privée de tout actif au bénéfice d'un seul d'entre eux, dans laquelle a été mise en place une organisation parallèle en dehors de la démocratie sociale alors que les comptes de la société Pimkinvest étaient révélateurs d'un état de cessation des paiements.
Subsidiairement, à l'appui de sa demande de désignation d'un expert judiciaire, la société Ibisler Tekstil invoque la fin de la procédure de sauvegarde et des griefs pouvant se reproduire en l'absence de tout contrôle dans la société compte tenu de son éviction. Elle estime la fraude aux droits de la société Pimkinvest manifeste au regard :
- de l'existence de prestations de conseils alors qu'il s'agissait d'une holding dite passive,
- des fausses réponses apportées sur les conventions réglementées,
- des conventions de prestations de service forfaitaires qui se produisaient à l'identique de chez Diramode chez Pimkinvest.
***
2) ' La société Pimkinvest, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 septembre 2025, demande à la cour de':
Confirmer le jugement du 4 décembre 2024 en ce qu'il a':
- Déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe)
A titre subsidiaire, si la cour devait retenir la recevabilité des demandes de la société Ibisler Tekstil
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes,
En tout état de cause, à titre reconventionnel :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- Débouté les sociétés DIRAMODE, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS DIRAMODE, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS DIRAMODE, la société PIMKINVEST et Monsieur [R] [U] de leurs autres demandes ;
Statuant à nouveau et y ajoutant':
- condamner la société Ibisler Tekstil à lui verser la somme de 30 000 euros au titre de la procédure abusive ;
- condamner la même à lui verser la somme de 20 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Ibisler Tekstil aux dépens de l'instance.
La société Pimkinvest soutient en substance que 'l'action en nullité d'une délibération d'assemblée générale sur le fondement de l'abus de majorité ne peut pas être engagée contre la seule société et que les associés auteurs de l'abus doivent être mis en cause de sorte que l'action introduite par la société Ibisler Tekstil en l'absence des sociétés Lee Cooper France et Amoniss Holding Offshore est irrecevable.
Subsidiairement, elle argue que contrairement à ce qu'affirme l'appelante, le protocole d'accord transactionnel ne peut être assimilable à un pacte d'associés en l'absence de toute organisation des rapports entre associés dans cet acte et elle affirme qu'aucune fraude aux droits de la société Ibisler Tekstil n'est intervenue à l'occasion des assemblées générales critiquées.
Elle fait valoir que le défaut de convocation régulière d'un associé à une assemblée n'entraîne la nullité des délibérations de cette assemblée que si un grief est démontré et qu'en l'espèce cette preuve n'est pas rapportée dans la mesure où la société Ibisler Tekstil a été régulièrement convoquée et qu'en outre elle ne démontre pas que sa présence ou son absence était de nature à influer sur le résultat du vote.
Elle soutient également qu'au regard de l'objet statutaire de la société Pimkinvest, l'autorisation de l'assemblée générale des actionnaires n'était pas requise pour une cession des actions de la société.
S'agissant de l'abus de majorité reproché, elle fait valoir que les délibérations discutées sont conformes à l'intérêt social et qu'elles n'ont pas été adoptées au détriment des intérêts de la société Ibisler Tekstil ou dans l'unique but d'avantager l'associé majoritaire.
La société Pimkinvest conteste aussi toute violation du protocole de conciliation auquel selon elle il a été mis fin par l'ouverture de la procédure de sauvegarde ainsi qu'il est prévu par l'article L. 611-12 du code de commerce et elle oppose à l'appelante la force de chose jugée attachée au jugement du tribunal de commerce du 30 octobre 2024 arrêtant le plan de sauvegarde de la société Diramode et actant la cession devant intervenir ainsi que la réorganisation actionnariale du groupe.
D'autre part, elle s'oppose aux demandes de désignation d'un administrateur judiciaire et subsidiairement d'un expert judiciaire présentées par l'appelante aux motifs'que :
- la demande de désignation d'un administrateur provisoire ne peut être qu'une mesure exceptionnelle tenant notamment à la gravité d'une crise sociale, à un risque de paralysie de la société ou à l'urgence d'un péril imminent la menaçant, conditions dont l'existence n'est pas rapportée en l'espèce,
- la demande d'expertise judiciaire ne saurait quant à elle suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve et que la société Ibisler Tekstil dispose d'un droit d'information dont elle peut user pour obtenir les informations dont elle souhaite disposer.
Enfin, elle formule une demande de dommages-intérêts en raison d'une procédure qu'elle estime abusive dans la mesure où, alors que la société Ibisler Tekstil n'a formé aucun recours contre le jugement arrêtant le plan de sauvegarde de la société Diramode, elle a été assignée un mois après l'adoption de ce plan dans le cadre d'une procédure à bref délai alors que l'action est dénuée de tout fondement juridique.
***
3) - Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31 juillet 2025, la société Diramode et la société PPP demandent à la cour de :
A titre principal :
- Confirmer le jugement rendu le 4 décembre 2024 par le tribunal de commerce de Lille Métropole en ce qu'il a :
- Déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] à la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe)
A titre subsidiaire, si la Cour devait retenir la recevabilité des demandes de la société Ibisler Tekstil':
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes
Sur l'appel incident de la société Diramode :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté les sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et Monsieur [R] [U] de leurs autres demandes ;
Statuant à nouveau et y ajoutant':
- Avant dire-droit, désigner tel expert judiciaire qu'il plaira avec pour mission notamment de :
- convoquer régulièrement les parties, après avoir pris connaissance du dossier, s'être fait remettre tous documents utiles et avoir entendu les parties ainsi que tout sachant permettant de :
- procéder à l'analyse financière et comptable des manquements de la société Ibisler tels que décrits dans le cadre de ses écritures en décrivant notamment leurs effets sur le business plan d'origine,
- évaluer les préjudices subis par la société Diramode et plus largement ses filiales.
- dire que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des
articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un
exemplaire original (éventuellement : sous format papier et en copie sous la forme
d'un fichier PDF enregistré sur un CD-ROM) au greffe du tribunal de (...), service du contrôle des expertises, (...), dans le délai de (XX mois) à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d'un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),
- Dire que l'expert devra, dès réception de l'avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l'expiration d'un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera à une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d'éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu'à l'issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle,
- Dire que, sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l'ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction,
- Dire que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappeler qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives,
- Désigner le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents,
- Dire que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,
- Fixer la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, qui devra être consignée par la société Ibisler Tekstil,
En conséquence de quoi, surseoir à statuer dans l'attente de la restitution du rapport définitif qui aura été établi par l'expert judiciaire désigné,
- condamner la société Ibisler Tekstil à leur payer la somme de 50 000 euros chacune en réparation du préjudice subi par elles et à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- En tout état de cause
- condamner la même à leur payer la somme de 25 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner la société Ibisler Tekstil aux dépens.
Les sociétés Diramode et PPP indiquent s'associer aux développements de la société Pimkinvest sur l'irrecevabilité de l'action introduite par la société Ibisler Tekstil à défaut de mise en cause des sociétés Lee Cooper France et Amoniss Holding Offshore.
Sur le fond, elles font valoir que la société Ibisler Tekstil ne peut opposer aucun grief tiré d'une prétendue violation du protocole de conciliation auquel il a été mis fin par la procédure de sauvegarde et elles s'associent également aux démonstrations de la société Pimkinvest à l'appui de ses demandes de rejet des prétentions de l'appelante.
Au soutien de sa demande d'expertise judiciaire, la société Diramode invoque l'existence de manquements contractuels de la société Ibisler Tekstil dans l'exécution des engagements prévus par le plan de retournement, et notamment au titre de l'approvisionnement en circuit court et de l'accord qu'elle devait donner pour le déblocage des fonds de la fiducie, qui auraient selon elles participé à accroître les difficultés du groupe, à accélérer le processus de fermeture des magasins et in fine auraient conduit à la faire placer sous la protection du tribunal.
Enfin, la société Diramode estime que les agissements graves et répétés de la société Ibisler Tekstil, qui agirait en réalité en entreprise tierce et concurrente, particulièrement prédatrice, de même que la procédure engagée qu'elle qualifie d'abusive, auraient perturbé gravement la confiance de son personnel et celle de sa filiale la société PPP et qu'ils auraient nuit à leur image ce qui justifierait la demande indemnitaire qu'elle présente sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
***
4) - Maître [T] [W] et Maître [A] [X] ès qualités (ci-après les co-commissaires à l'exécution du plan), demandent à la cour dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 4 avril 2025 de :
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':
- Déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
- Condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, la SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [U] à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
Subsidiairement et statuant à nouveau :
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes tendant à obtenir la nullité des assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024,
- leur donner acte de ce qu'ils s'en rapportent à justice quant aux demandes de désignation d'un administrateur provisoire concernant la société Pimkinvest et, subsidiairement quant à la demande de désignation d'un expert judiciaire,
En tout état de cause :
- débouter la société Ibisler Tekstil de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires,
- condamner la société Ibisler Tekstil à lui régler la somme de 10'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers frais et dépens d'appel et de première instance.
Maître [T] [W] et Maître [A] [X] ès qualités exposent en substance que l'irrecevabilité invoquée par la société Pimkinvest est justifiée au regard de la jurisprudence qui considère que la mise en cause des actionnaires est indispensable lorsque l'action de l'associé est fondée sur un abus de majorité.
Sur le fond, ils soulignent qu'au regard du pourcentage des parts détenues par la société Ibisler Tekstil dans le capital de la société Diramode (15 %), et à supposer que celle-ci aurait procédé à un vote défavorable, les résolutions en cause auraient quand même été votées. Ils estiment qu'il n'existe aucune fraude qui serait caractérisée par la violation du protocole de conciliation du 17 janvier 2023, rappelant que ce protocole n'est plus en vigueur en raison de la procédure de sauvegarde ouverte à l'égard de la société Diramode le 27 mai 2024 qui a entraîné sa caducité par application de l'article L. 611-12 du code de commerce.
Enfin, ils s'en rapportent à justice sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire et celle de désignation d'un expert judiciaire pour la société Pimkinvest, prétentions qu'ils considèrent constituer un "baroud" d'honneur de la société Ibisler Tekstil plutôt qu'une mesure réellement utile.
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5) -Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 mai 2025, la société [Localité 14] B.V. demande pour sa part à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé irrecevables les prétentions de la société Ibisler Tekstil à son encontre
- la mettre hors de cause,
- condamner la société Ibisler Tekstil à lui payer la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle fait principalement valoir qu'aucune prétention n'est formée à son encontre et que la société Ibisler Tekstil n'a jamais justifié du moindre intérêt à agir à son encontre.
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En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties visées ci-avant pour l'exposé exhaustif de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
1 ' Sur la recevabilité de l'action en nullité des assemblées générales
Il résulte de la combinaison des articles 1844-10 du code civil et 32 du code de procédure civile que la recevabilité d'une action en nullité d'une délibération sociale pour abus de majorité n'est pas, en l'absence de demande indemnitaire dirigée contre les associés majoritaires, subordonnée à la mise en cause de ces derniers (Com. 9 juillet 2025, n° 23-23.484 - publié).
En l'espèce, et comme le fait valoir à bon droit la société Ibisler Tekstil, si son action tend en premier lieu à l'annulation des délibérations des assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024 au titre d'un abus de majorité, elle ne formule aucune demande indemnitaire à l'encontre des associés majoritaires en sorte qu'elle n'avait pas à la diriger contre eux.
Son action est donc recevable et le jugement sera infirmé de ce chef.
2 ' Sur la demande d'annulation des assemblées générales de la société Pimkinvest des 3 et 10 octobre 2024
Il sera liminairement précisé que l'assemblée générale mixte du 3 octobre 2024 a principalement été amenée à voter sur l'approbation des comptes sociaux de l'exercice clos au 31 décembre 2023 et l'affectation du résultat (la perte de l'exercice ayant été affectée au compte de report à nouveau). Elle a également décidé le transfert du siège social de la société Pimkinvest de [Localité 15] à [Localité 16].
L'assemblée générale extraordinaire du 10 octobre 2024 a quant à elle agréé le projet de cession par la société Pimkinvest de l'ensemble des actions qu'elle détenait dans le capital de la société Diramode au profit de la société Amoniss et donné pouvoir à M. [N] [G], en sa qualité de président, de signer la documentation juridique nécessaire à la réalisation de cette cession et de prendre toute mesure à cette fin.
2 -1 ' Sur la fraude aux droits d'un associé
Par application du premier alinéa de l'article 1844 du code civil, tout associé a le droit de participer aux décisions collectives, à peine de nullité des délibérations de l'assemblée générale d'associés et son absence de convocation à l'assemblée générale peut emporter une telle nullité en cas de grief.
Selon les statuts de la société Pimkinvest, la convocation des associés aux assemblées générales pouvait être faite par tout moyen, huit jours au moins avant la date de la réunion. L'assemblée pouvait également se réunir sans délai si tous les associés étaient présents ou représentés (article 24), 1 ' pièce appelante n° 1).
La société Ibisler Tekstil a été convoquée aux assemblées générales litigieuses suivant courrier recommandé expédié le 24 septembre 2024 pour la convocation à l'assemblée générale du 3 octobre 2024 et le 2 octobre 2024 pour l'assemblée générale du 10 octobre 2024 (pièce Pimkinvest n° 12).
Le décompte du délai de convocation des associés courant à compter de la date d'expédition, les convocations ont été adressées dans le délai et selon les modalités prévus par les statuts, dont il sera relevé qu'ils n'ont jamais été discutés par la société Ibisler Tekstil malgré son éloignement géographique.
La cour observe également que ces convocations ne sont pas intervenues durant une période durant laquelle la société Ibisler Tekstil avait fait part d'une absence ou d'une difficulté particulière ou durant laquelle elle pouvait être présumée absente ou ponctuellement indisponible (période estivale par exemple).
S'agissant de leur réception tardive, les constatations non traduites d'un notaire turc produites par l'appelante pour justifier qu'elle aurait reçu tardivement sa convocation sont assez peu compréhensibles et elles sont en tout état de cause inopérantes à caractériser une fraude à ses droits d'associés dès lors que le délai et les modalités statutaires de convocation ont été respectés, la société Pimkinvest ne pouvant au demeurant être responsable d'éventuels dysfonctionnements postaux dans l'acheminement du courrier.
De même, les statuts ne prévoyant pas une double convocation, notamment par courriel, la mise en place ponctuelle d'une telle pratique ne peut permettre d'établir que son défaut résulterait d'une volonté de nuire à l'appelante et de la priver de ses droits. La convocation en vue de la dissolution de la société Pimkinvest qu'invoque la société Ibisler Tekstil est pour sa part intervenue postérieurement aux courriers litigieux et il n'est en réalité pas démontré qu'il s'agissait d'une pratique antérieurement et habituellement mise en place qui aurait précisément fait défaut pour les deux assemblées en cause.
La volonté d'écarter l'appelante des assemblées en cause est d'autant moins établie que comme l'invoque la société Pimkinvest, une première convocation à une assemblée générale devant se tenir le 12 août 2024 lui avait préalablement été adressée le 5 août 2024 (pièce appelante n°5), laquelle fut reportée notamment à la suite d'une demande de pièces complémentaires présentée par la société Ibisler Tekstil (pièce appelante n°11). L'ordre du jour était identique à celui de l'assemblée générale du 3 octobre, de même que les pièces jointes ' à l'exception de la question du transfert du siège social et la transmission d'un projet de statuts mis à jour - de sorte que la société'Ibisler Tekstil disposait dès le mois d'août 2024 de toutes les informations nécessaires pour préparer cette assemblée dont elle était informée du report à une date ultérieure.
La convocation du 2 octobre 2024 quant à elle lui proposait de participer à l'assemblée générale du 10 octobre suivant par visioconférence compte tenu de son éloignement géographique. Par courriel du 9 octobre 2024, il lui était rappelé l'assemblée générale du 10 octobre 2024, compte tenu de la présence de son dirigeant à [Localité 13], et il lui était transmis un lien de visioconférence.
Ces éléments établissent que non seulement les éléments d'informations nécessaires à éclairer l'appelante sur les points devant être débattus lui ont été adressés mais également que des mesures de nature à faciliter sa participation aux assemblées générales ont été mises en 'uvre, écartant la fraude invoquée dans les droits de cet associé qui n'a finalement pas participé aux assemblées qu'il critique aujourd'hui.
A titre surabondant, et comme le font justement valoir la société Pimkinvest et les co-commissaires à l'exécution du plan, la violation invoquée par la société Ibisler Tekstil n'était en tout état de cause pas de nature à influer sur le résultat du processus décisionnel compte tenu de sa participation minoritaire au capital en sorte que même si la société Ibisler Tekstil avait voté défavorablement, et en l'absence de toute fraude à son égard, les résolutions litigieuses auraient été adoptées.
En conséquence, et à défaut d'irrégularité et/ou de fraude aux droits de l'appelante, le moyen sera écarté.
2-2 ' Sur l'abus de majorité
L'abus de majorité suppose la réunion de deux conditions, qui sont cumulatives':
- d'une part, que la décision litigieuse ait été prise contrairement à l'intérêt social,
- d'autre part elle qu'elle ait été prise dans l'unique dessein de favoriser les associés majoritaires au détriment des associés minoritaires.
La société Ibisler Tekstil invoque tout à la fois la violation du protocole de conciliation et le transfert du seul actif détenu par la société Pimkinvest, sans l'accord des associés, afin de la transformer en coquille vide mais également l'objectif de protéger M. [N] [E] d'une action en responsabilité, ce qui constituerait un acte frauduleux révélant un abus de majorité.
Il convient préalablement de rappeler que le capital social de la société Pimkinvest était détenu':
- à hauteur de 70'% par la société Lee Cooper France (dirigée par M. [R] [U]),
- à hauteur de 15'% par la société Amoniss Holding Offshore (dirigée par M. [N] [E]),
- à hauteur de 15'% par la société Ibisler Tekstil (dirigée par M. [J] [V]).
Comme l'expose la société Pimkinvest, son associé majoritaire était la société Lee Cooper France, qui n'est pas le cessionnaire des actions, lesquelles ont été cédées à la société Amoniss (dont M. [N] [E] était l'associé unique).
A la suite de l'autorisation de cession des actions détenues par la société Pimkinvest à la société Amoniss, l'associé majoritaire a en réalité été placé dans la même situation que la société Ibisler Tekstil et les décisions en cause n'ont donc pas créé une rupture de l'intérêt commun.
Par ailleurs, cette cession d'actions fait partie d'une opération de restructuration du groupe Pimkie plus importante, par suite de la persistance de difficultés financières rencontrées après sa cession par la société [Localité 14] B.V. qui a donné lieu à la demande d'ouverture de deux procédures de sauvegarde à l'égard des sociétés Diramode et PPP.
En effet, il ressort des projets de plan versés que les mesures initiées par le nouveau management se sont avérées insuffisantes face à une crise de la consommation et du secteur de l'habillement, très impacté par le marché asiatique, conjuguée à une baisse du chiffre d'affaires qui s'est accélérée depuis la fin de l'année 2023.
Selon le procès-verbal de l'assemblée générale du 3 octobre 2024, le résultat de l'exercice clos 2023 de la société Pimkinvest était de [' 1 526 032 euros].
Dans le cadre de la procédure de sauvegarde, le cabinet Ernst Young, désigné par le juge-commissaire pour réaliser un audit de performance passée et prévisionnelle, a établi un business plan et les sociétés Diramode et PPP ont présenté, avec le concours des co-administrateurs judiciaires, un projet de plan de sauvegarde destiné à garantir la poursuite de l'activité du groupe, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif.
Il existait également un contexte conflictuel entre les actionnaires empêchant les déblocages de trésorerie prévus dans le plan de retournement.
Ainsi, la cession de la société Pimkinvest, société Holding, est intervenue dans le cadre d'un plan de transformation global, dont elle était l'une des conditions, et qui était destiné à impulser une nouvelle dynamique au sein du groupe et à redynamiser la marque Pimkie en prévoyant notamment':
- une réorganisation actionnariale tenant à la cession de la participation de la société Pimkinvest au capital de la société Diramode au bénéfice de la société Amoniss,
- un débouclage de la fiducie-gestion mise en place en 2023 afin de libérer l'intégralité des fonds mis en place dans cette fiducie,
- une réduction du périmètre magasins,
- un repositionnement de l'image de marque,
- un plan de sauvegarde de l'emploi limitant à 33 les suppressions de poste.
Dans ce contexte, alors que la situation économique des sociétés Diramode et PPP continuaient de se dégrader, les résolutions litigieuses - dont la restructuration capitalistique - qui conditionnaient la mise en 'uvre de leurs plans de sauvegarde, étaient conformes à l'intérêt social de la société.
Cette conformité à l'intérêt social exclut tout abus de majorité lequel n'est en tout état de cause pas caractérisé par la société Ibisler Tekstil en l'absence de rupture de l'intérêt commun au profit d'un associé majoritaire.
Le moyen sera en conséquence écarté.
2-3 ' Sur la violation du protocole de conciliation
La société Ibisler Tekstil, qui qualifie le protocole de conciliation de pacte extra-statutaire devant être respecté par ses signataires, invoque en dernier lieu à l'appui de sa demande en annulation des assemblées générales la violation de cet acte, pour la période qui serait située entre sa signature et l'ouverture de la procédure de sauvegarde.
Sur ce dernier point, et comme le font valoir à bon droit les co-commissaires à l'exécution du plan et la société Pimkinvest, par application de l'article L. 611-12 du code de commerce, l'ouverture des procédures de sauvegarde des sociétés Diramode et PPP a mis fin au protocole de conciliation judiciairement homologué le 13 février 2023.
Le protocole de conciliation étant caduc à la date à laquelle les résolutions discutées ont été votées, ses dispositions ne s'imposaient plus à ses signataires et au regard de l'objet des deux assemblées générales en cause, la cour n'étant pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, aucune violation n'est en réalité utilement invoquée par la société Ibisler Tekstil qui ne démontre pas que lesdites décisions auraient été prises en méconnaissance dudit protocole.
Le moyen sera lui aussi écarté.
***
En considération de tout ce qui précède, la demande en annulation des assemblées générales des 3 octobre 2024 et 10 octobre 2024 présentée par la société Ibisler Tekstil ainsi que ses demandes subséquentes seront rejetées.
3 ' Sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire
Il est jugé que la désignation judiciaire d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose que soit rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent, ces deux conditions étant cumulatives.
En l'espèce, s'il existe à l'évidence une mésentente entre les associés de la société Pimkinvest, il n'est pas rapporté la preuve que cette mésentente aurait paralysé le fonctionnement de la société, celle-ci ayant pu tenir ses assemblées générales et poursuivre son activité jusqu'à sa dissolution. Cette dissolution est par ailleurs intervenue dans le cadre de l'accord global de restructuration du groupe Pimkie rappelé supra et de la procédure de sauvegarde et non du fait des détournements d'actifs allégués par la société Ibisler Tekstil.
Ce fonctionnement normal et régulier de la société fait obstacle à la nomination d'un administrateur provisoire et impose en conséquence de rejeter la demande présentée par la société Ibisler Tekstil, sans qu'il y ait lieu pour la cour d'examiner les autres moyens invoqués, les deux conditions rappelées supra étant cumulatives.
Au surplus, la cour observe qu'il résulte des propres conclusions de l'appelante et de ses pièces (pièce n°30) que la société Pimkinvest a été dissoute par une assemblée générale du 26 juin 2025 en sorte qu'elle ne peut plus être menacée d'aucun péril imminent, cette seconde condition faisant également défaut.
4 - Sur la demande subsidiaire de désignation d'un expert judiciaire présentée par la société Ibisler Tekstil
Les conditions nécessaires à la désignation d'un administrateur provisoire n'étant pas réunies, la cour n'a pas besoin de recourir aux lumières d'un technicien pour apprécier la demande présentée par la société Ibisler Tekstil.
La demande d'annulation des résolutions des assemblées générales contestées a quant à elle été rejetée, sans qu'il soit nécessaire pour la cour d'ordonner une mesure d'expertise pour l'éclairer davantage sur ce litige.
Il y a dès lors lieu de rejeter la demande d'expertise présentée à titre subsidiaire par la société Ibisler Tekstil.
5 ' Sur la demande reconventionnelle de la société Diramode aux fins de désignation d'un expert judiciaire
La société Ibisler Tekstil est totalement taisante sur la demande d'expertise présentée par la société Diramode aux fins de voir déterminer les préjudices qu'elle aurait subis avec ses filiales par suite des manquements de l'appelante aux engagements liés à la reprise d'origine et à':
- l'inexécution du contrat d'approvisionnement et du crédit-fournisseur de 10 000 000'd'euros devant être consenti sur les collections achetées,
- au refus de signature des demandes de déblocage des fonds de la fiducie-gestion.
La société Diramode affirme que ces manquements auraient participé à l'ouverture de la procédure de sauvegarde outre qu'ils lui auraient occasionné un préjudice en terme économique et d'image et elle verse de nombreux courriels échangés dans le cadre des demandes de déblocages des fonds de la fiducie-gestion.
L'analyse de ces courriels met en évidence, au-delà des silences et/ou réticences opposés par la société Ibisler Tekstil à signer l'acte de confirmation de respect des engagements permettant le déblocage du paiement planifié, l'existence de divergences entre les parties sur leurs obligations de même que sur la mission du mandataire à l'exécution de l'accord.
S'il est certain que la société Ibisler Tekstil s'est montrée très rapidement récalcitrante et qu'elle a manifesté dès le mois de mars 2023, soit en réalité dès le premier déblocage de fonds de la fiducie-gestion, une réticence à signer les accords de déblocage, la cour observe que le conflit entre les actionnaires, qui était plus profond, a finalement abouti à bref délai à une restructuration capitalistique et à une réorganisation globale destinée à permettre une remise à flot du groupe Pimkie dont il a été rappelé supra que les difficultés financières étaient plurifactorielles.
La procédure de sauvegarde a été ouverte pour permettre cette réorganisation et la cour ne dispose d'aucun élément comptable de nature à établir que les comportements reprochés à la société Ibisler Tekstil auraient eu un impact économique direct sur la situation de la société Diramode.
Elle observe à cet égard que lors de l'ouverture de la procédure de sauvegarde, qui excluait tout état de cessation des paiements, le tribunal relevait que le passif échu exigible de la société Diramode était d'un montant de 4 112 684 euros et son actif disponible d'un montant de 43 568 947 euros de sorte que la société pouvait faire face à ses engagements, y compris au regard de la situation de sa filiale, la société PPP, dont l'actif disponible était de 2 005 386 euros et le passif échu exigible de 4 981 688 euros.
La preuve que des magasins auraient été fermés prématurément du fait du comportement de l'appelante n'est pas non plus rapportée.
S'agissant de la méconnaissance du contrat d'approvisionnement, la production par la société Diramode de quelques courriels que la cour peut difficilement exploiter s'agissant d'échanges lapidaires sur des demandes de prix et de produits, ne permet pas plus d'établir que le positionnement de la société Ibisler Tekstil aurait lui aussi occasionné à la date de l'ouverture de la procédure de sauvegarde un préjudice économique et/ou d'image à la société Diramode.
En outre, le courriel de Mme [H] [L] du 19 juillet 2024, s'il mentionne que la société Ibisler Tekstil a souhaité arrêter de collaborer, précise toutefois que cette décision a finalement été revue à la suite d'une renégociation des conditions de paiement, dont la cour ne connaît pas les tenants et aboutissants. Ainsi, il n'établit aucune rupture des relations commerciales mais au contraire leur poursuite.
A défaut pour la société Diramode de caractériser l'existence d'un préjudice qui serait né des manquements reprochés à la société Ibisler Tekstil, la demande d'expertise qu'elle présente sera rejetée.
6 ' Sur la mise hors de cause de la société [Localité 14] B.V.
Comme l'invoque justement la société [Localité 14] B.V., celle-ci a été attraite au litige et intimée alors que la société Ibisler Tekstil ne formule aucune demande à son encontre de même qu'aucune autre partie. Elle sera en conséquence mise hors de cause.
7 ' Sur les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive présentées par les sociétés Pimkinvest, Diramode et PPP
La cour rappelle que l'accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles que le fait d'agir en justice ou d'exercer une voie de recours légalement ouverte est susceptible de constituer un abus.
Il en résulte que l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas à elle seule constitutive d'une telle faute de même que le caractère manifestement mal fondé d'une prétention n'est pas susceptible de faire dégénérer le droit d'agir en abus.
En l'espèce, s'il est certain qu'il existe un contentieux nourri entre la société Ibisler Tekstil, M. [N] [E] (dirigeant de la société Diramode et de la société Pimkinvest) et M. [R] [U] (Président de la société Lee Cooper France), la preuve que l'appelante aurait commis une faute dans l'exercice de son droit d'agir n'est pas suffisamment caractérisée, l'inimitié existant entre les parties apparaissant tellement forte que le litige les opposant ne pouvait être tranché que par le juge.
Les sociétés Pimkinvest, Diramode et PPP ne rapportent pas non plus la preuve du préjudice qui résulterait de l'action introduite, et notamment l'existence comme allégué par la société Diramode d'un préjudice d'image, pas plus que celle d'un préjudice distinct de celui causé par la nécessité de se défendre en justice qui sera réparé par l'allocation d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
En conséquence, la demande de dommages-intérêts qu'elles présentent sera rejetée.
8 - Sur les frais du procès
La société Ibisler Tekstil, qui est partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel, les dispositions du jugement prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Par application de l'article 700 du code de procédure civile, elle sera également condamnée au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, à payer :
- à la société Pimkinvest la somme de 5 000 euros,
- conjointement à la société Diramode et la société PPP, la même somme,
- conjointement à Maître [T] [W] et Maître [A] [X] ès qualités, la même somme.
Elle sera en outre condamnée à payer la somme de 2 000 euros à la société [Localité 14] B.V. au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant dans les limites de l'appel';
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société Ibisler Tekstil irrecevable en ses demandes ;
CONFIRME ledit jugement en ce qu'il a':
- condamné la société Ibisler Tekstil à payer à chacune des sociétés Diramode, SELARL FHBX, prise en la personne de Maître [T] [W] ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la SELARL BMA, prise en la personne de Maître [A] [X], ès qualités de co-commissaire à I'exécution du plan de sauvegarde de la SAS Diramode, la société Pimkinvest et M. [R] [F] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de de procédure civile ;
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;
- condamné la société Ibisler Tekstil aux entiers dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 171,58 euros (en ce qui concerne les frais de greffe) ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT
JUGE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi recevable à agir en annulation de l'assemblée générale mixte de la société Pimkinvest du 3 octobre 2024 et de l'assemblée générale extraordinaire du 10 octobre 2024 ;
REJETTE la demande d'annulation desdites assemblées générales présentée par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi ainsi que sa demande tendant à voir juger nuls et de nul effet tous les procès-verbaux subséquents ainsi que les actes commis en exécution des assemblées générales annulées ;
REJETTE la demande de désignation d'un administrateur provisoire présentée par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi ;
REJETTE la demande de désignation d'un expert judiciaire présentée par la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi ;
REJETTE la demande de désignation d'un expert judiciaire présentée par la société Diramode ;
REJETTE les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive présentées par les sociétés Pimkinvest, Diramode et Promotion du Prêt-à-Porter ;
MET HORS DE CAUSE la société [Localité 14] B.V. ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi aux dépens de l'instance d'appel ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à la société Pimkinvest la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à la société Diramode et à la société Promotion du prêt-à-porter la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à La SELARL FHBX prise en la personne de Maître [T] [W] et la SELARL BMA Administrateurs prise en la personne de Maître [A] [X] en leurs qualités de co-commissaires à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Diramode la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société Ibisler Tekstil Sanayi Ve Dis Ticaret Anonim Sirketi à payer à la société [Localité 14] B.V. la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le greffier
La présidente