CA Versailles, ch. civ. 1-5, 20 novembre 2025, n° 25/00810
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 50B
Chambre civile 1-5
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 20 NOVEMBRE 2025
N° RG 25/00810 - N° Portalis DBV3-V-B7J-W76F
AFFAIRE :
S.C.E.A. SEPT HORSES
C/
Société HORSE EVENTING EARL
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 09 Janvier 2025 par le Président du TJ de [Localité 9]
N° RG : 24/01480
Expéditions exécutoires
Copies certifiées conformes délivrées le : 20/11/25
à :
Me Grégory VAVASSEUR, avocat au barreau de VERSAILLES, 238
Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, 627
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.C.E.A. SEPT HORSES
Prise en la personne de ses représentants légaux domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Grégory VAVASSEUR, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 238
Plaidant : Me Franck NICOLLEAU, avocat au barreau de PARIS,
APPELANTE
****************
Société HORSE EVENTING EARL
anciennement immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n° 822 864 088 et actuellement immatriculée au RCS d'[Localité 6] sous le même n°,agissant poursuite et diligences de son représentant légal y domicilié
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 25150
Plaidant : Me Nathalie CARRERE, avocat au barreau de PARIS,
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Octobre 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant M. Bertrand MAUMONT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, conseillère faisant fonction de présidente,
Monsieur Ulysse PARODI, Vice Président placé faisant fonction de conseiller
Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller,
L'adjointe faisant fonction de Greffière, lors des débats : Madame Marion SEUS,
EXPOSE DU LITIGE
Selon facture du 11 décembre 2023, l'EARL Horse Eventing, gérée par M. [S] [G], a cédé à la SCEA Sept Horses, en parallèle de la vente d'un terrain de cross équin situé à [Localité 8] appartenant à Mme [K] [W], divers matériels pour un montant de 50 000 euros.
Aux termes d'un protocole d'accord signé entre les parties le 4 avril 2024, il a été convenu que la société Sept Horses réglerait la somme par un premier versement de 15 000 euros au jour de la signature de l'acte de vente du terrain. Il a également été convenu que le solde de 35 000 euros serait réglé par mensualités de 1 521,74 euros, la première mensualité devant être versée dans le mois suivant la signature de l'acte de vente. La remise d'un chèque de garantie d'un montant de 35 000 euros a également été prévue, la société Horse Eventing pouvant présenter ce chèque à l'encaissement à défaut de paiement d'une mensualité.
L'acte de vente du terrain a été signé le 12 avril 2024 entre Mme [K] [W] et la société Sept Horses.
La société Sept Horses ayant cessé de régler les mensualités prévues par le protocole d'accord, la société Horse Eventing l'a mise en demeure d'avoir à payer la somme de 3 043,48 euros, par acte du 22 juillet 2024. La mise en demeure est restée infructueuse.
La société Horse Eventing a présenté le chèque d'un montant de 35 000 euros à sa banque qui lui a indiqué qu'il n'était pas encaissable.
Par acte de commissaire de justice délivré le 22 octobre 2024, la société Horse Eventing a fait assigner en référé la société Sept Horses aux fins d'obtenir principalement :
- le paiement d'une somme provisionnelle d'un montant de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord signé entre les parties le 22 avril 2024,
- le paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 9 janvier 2025, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :
- condamné la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme provisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord du 4 avril 2024,
- condamné la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Sept Horses aux dépens,
- rappelé que l'ordonnance est de droit exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration reçue au greffe le 30 janvier 2025, la société Sept Horses a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'elle a rappelé que l'ordonnance est de droit exécutoire à titre provisoire.
Dans ses dernières conclusions déposées le 7 octobre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Sept Horses demande à la cour, au visa des articles 1104, 1128, 1130, 1166, 1169, 1599 et 1849 du code civil, de :
'- infirmer l'ordonnance de référé du 9 janvier 2025 rendue par le tribunal judiciaire de Versailles,
statuant à nouveau,
- dire qu'il n'y a pas lieu à référé pour statuer sur les chefs de l'ordonnance critiqués ci-dessous rappelés :
* condamnons la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme provisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord du 4 avril 2024,
* condamnons la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamnons la société Sept Horses aux dépens,
- renvoyer la société Horse Eventing à mieux se pourvoir,
- condamner la société Horse Eventing à verser à la société Sept Horses la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Horse Eventing aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées le 6 octobre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Horse Eventing demande à la cour de :
' In limine litis :
- juger que les conclusions d'appel de la société Sept Horses ne respectent pas les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile en ce qu'elles ne précisent pas les chefs de la décisions critiqués ;
- juger en conséquence que la cour n'est pas valablement saisie par lesdites conclusions ;
Sur le fond :
- confirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a condamné la société Sept Horses au paiement, à la société Horse Eventing, de la somme provisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole
d'accord du 4 avril 2024, et de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
- débouter en conséquence la société Sept Horses de ses demandes, fins et prétentions ;
- condamner la société Sept Horses au paiement, à la société Horse Eventing, de la somme de 5 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel .
L'ordonnance de clôture a été rendue à l'audience du 8 octobre 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il est rappelé qu'en vertu de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Aussi, bien que l'appelante ait accompagné la communication de ses dernières conclusions, la veille de l'ordonnance de clôture, d'un message RPVA sollicitant le rejet des dernières conclusions et pièces communiquées par l'intimée, elle n'a pas formulé de demande en ce sens dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que la cour n'est pas saisie d'une demande à ce titre.
Par ailleurs, en vertu de l'article 445 du code de procédure civile " après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444 ".
En l'espèce, la société Horse Eventing a cru devoir transmettre à la cour une note en délibéré par message RPVA du 24 octobre 2025. La société Sept Horses y a répliqué dans les mêmes formes le 27 octobre 2025.
A défaut d'avoir été autorisées par le président lors de l'audience du 8 octobre 2025, ces notes en délibéré seront écartées des débats.
Sur l'étendue de la saisine de la cour
La société Horse Eventing soutient que la saisine de la cour est irrégulière, car dans ses premières conclusions, l'appelante s'est limitée à solliciter l'infirmation de l'ordonnance sans préciser quels chefs de l'ordonnance étaient critiqués. Elle y voit une violation de l'article 954 du Code de procédure civile, en déduit que les conclusions communiquées dans le délai prévu par l'article 908 du même code ne respectent pas les exigences légales, et conclut à la caducité de la déclaration d'appel.
La société Sept Horses répond que ce moyen, soulevé " in limine litis " dans les dernières conclusions de l'intimée, a été présenté trop tard et ne tient pas compte de la finalité de la dernière réforme. Elle rappelle que le décret ayant réécrit l'article 954 du code de procédure civile visait à atténuer le formalisme parfois jugé excessif gouvernant la procédure d'appel. Elle souligne que l'effet dévolutif procède de l'acte d'appel, lequel mentionne les chefs de décision contestés ; que l'article 913-1 du code de procédure civile permet au conseiller de la mise en état d'enjoindre aux avocats de mettre leurs conclusions en conformité ; que les chefs critiqués figurent dans le dispositif de ses dernières conclusions ; et, en tout état de cause, que l'article 954 invoqué ne prévoit aucune sanction.
Sur ce,
L'article 562 du code de procédure civile dispose : " L'appel défère à la cour la connaissance des chefs du dispositif de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. Toutefois, la dévolution opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ".
D'autre part, l'article 901 du même code prévoit que " la déclaration d'appel, qui peut comporter une annexe, est faite par un acte contenant, à peine de nullité : (...)
6° L'objet de l'appel en ce qu'il tend à l'infirmation ou à l'annulation du jugement ;
7° Les chefs du dispositif du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est, sans préjudice du premier alinéa de l'article 915-2, limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ".
L'article 954 du code de procédure civile, dans sa version applicable à compter du 1er septembre 2024, dispose ensuite que : " Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues aux deuxième à quatrième alinéas de l'article 960. Elles formulent expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens et un dispositif dans lequel l'appelant indique s'il demande l'annulation ou l'infirmation du jugement et énonce, s'il conclut à l'infirmation, les chefs du dispositif du jugement critiqués, et dans lequel l'ensemble des parties récapitule leurs prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes conclusions sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. "
L'article 915-2 précise enfin que " l'appelant principal peut compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions remises dans les délais prévus au premier alinéa de l'article 906-2 et à l'article 908, les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d'appel. La cour est saisie des chefs du dispositif du jugement ainsi déterminés et de ceux qui en dépendent ".
Il se déduit de ces textes que la déclaration d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement et que l'effet dévolutif peut être modifié par les premières conclusions de l'appelant.
En l'espèce, la déclaration d'appel contient les mentions suivantes :
" Appel limité aux chefs du jugement expressément critiqués :
1er chef de jugement critiqué : condamnons la SCEA Sept Horses à payer à l'EARL Horse Eventing la somme prévisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord du 4 avril 2024
2ème chef de jugement critiqué : condamnons la SCEA Sept Horses à payer à l'EARL Horse Eventing la somme prévisionnelle de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
3ème chef de jugement critiqué : condamnons la SCEA Sept Horses aux dépens "
Dès lors, la dévolution a opéré par l'effet de cette déclaration d'appel, la circonstance que les premières conclusions d'appelante de la société Sept Horses, notifiées à la cour le 7 avril 2025, ne contiennent pas dans leur dispositif les chefs du jugement critiqués étant sans incidence, la formule " infirmer l'ordonnance de référé du 9 janvier 2025 rendue par le Tribunal Judiciaire de Versailles " étant suffisante pour que la cour soit saisie de la demande d'infirmation de la décision querellée.
Il y a lieu, en conséquence, de constater que la cour est régulièrement saisie des demandes de la société Horse Eventing.
Sur la demande de provision
La société Sept Horses fait grief au premier juge d'avoir accordé la provision sollicitée par la société Horse Eventing, alors que l'obligation dont celle-ci se prévaut se heurte à des contestations sérieuses :
- la facture émise par la société Horse Eventing présente des irrégularités (numéro SIRET, numéro de TVA intracommunautaire, adresse) et porte sur des matériels qui appartiennent en réalité à la société Cequip, anciennement gérée par M. [G] et aujourd'hui en liquidation, alors que la vente de la chose d'autrui est nulle ;
- le protocole litigieux n'a pas de contenu certain, les matériels qui en sont l'objet n'étant pas précisément identifiés ;
- le protocole a également un contenu illicite puisqu'il porte sur la vente de la chose d'autrui ;
- il n'existe pas de corrélation entre le prix convenu et la qualité des matériels acquis, ce qui contrevient aux dispositions de l'article 1166 du code civil ;
- la prestation du vendeur paraît dérisoire, au sens de l'article 1169 du code civil ;
- le protocole est entaché d'un vice du consentement : la société Horse Eventing s'est malicieusement abstenue de réaliser un inventaire précis des matériels et s'est habilement rapprochée de M. [V] [L], fils de la gérante, pour conclure le contrat avec lui, afin de tirer profit de son manque d'expérience ;
- M. [V] [L] ne disposait pas du pouvoir d'engager la société, ce pouvoir appartenant uniquement au gérant, à savoir Mme [C] [L], conformément à l'article 1849 du code civil, ce que la société Horse Eventing ne pouvait ignorer.
La société Horse Eventing répond que :
- l'obligation de paiement de la société Sept Horses est incontestable, car elle repose sur une facture proforma datée du 11 décembre 2023, validée et acceptée par la société Sept Horses, ainsi que sur le protocole d'accord du 4 avril 2024, qui a force obligatoire entre les parties et emporte renonciation à toute action en justice portant sur le même objet ;
- la facture proforma du 13 décembre 2023, distincte de la facture définitive émise le 12 avril 2024, est certes affectée par une erreur matérielle, mais les indications qu'elle renferme correspondent à la réalité de la transaction intervenue ;
- la question de la propriété des matériels a été discutée lors des négociations préparatoires à l'acte de vente du terrain de cross, et il était clair que Mme [W], propriétaire initiale des matériels cédés, en avait laissé la propriété à son compagnon, M. [G], gérant de la société Horse Eventing ; de plus, en matière de meubles, la règle " en fait de meuble, possession vaut titre " (art. 2276 du Code civil) s'applique, et aucune preuve contraire n'est rapportée quant à une appartenance des matériels à la société Cequip ;
- le protocole d'accord relatif aux modalités de paiement de la vente a un contenu certain ; il y est fait référence à la facture proforma listant les matériels cédés ; il a par ailleurs été partiellement exécuté, puisque la somme de 15 000 euros a été versée par l'intermédiaire du notaire de Mme [L], les paiements ayant cessé en raison d'un différend distinct concernant une autre créance ;
- la vente a un contenu licite, la société Horse Eventing étant possesseur de bonne foi des matériels litigieux ;
- les matériels dont la société Sept Horses a pris livraison, sont de qualité et de prix non comparables avec le matériel bas de gamme qu'elle invoque au soutien de sa contestation ;
- la contrepartie du paiement était connue de la société Sept Horses dès l'origine ; celle-ci ne peut sérieusement soutenir le caractère dérisoire de cette prestation, étant relevé qu'elle utilise les matériels depuis plus de 18 mois ;
- il n'est pas établi de man'uvre dolosive ou de tromperie susceptible d'entacher la vente d'un vice du consentement ; celle-ci a été conclue en pleine connaissance de cause par M. [V] [L], cavalier expérimenté, qui connaissait le terrain et ses équipements ; il a demandé à conclure ce protocole pour pallier ses difficultés de financement, et ce, avec la participation active de sa mère, Mme [C] [V], gérante de plusieurs sociétés ;
- M. [V] [L] a agi en qualité de gérant de fait de la société Sept Horses avec le plein assentiment de sa mère ; le contrat est à tout le moins valable en raison de l'existence d'un mandat apparent.
Sur ce,
Selon l'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile : " Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ".
Ce texte impose donc au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision : celle de rechercher si l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Doivent être précisés les éléments de la contestation qui rendent celle-ci sérieuse.
Il sera retenu qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
À l'inverse, sera écartée une contestation qui serait à l'évidence superficielle ou artificielle. Le montant de la provision allouée n'a alors d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.
En l'espèce, la société Horse Eventing indique qu'elle est titulaire d'une créance d'un montant de 33 478,26 euros correspondant aux échéances non réglées prévues par un protocole d'accord relatif à la vente de matériels de cross équin, conclu avec la société Sept Horses.
Elle produit une facture, établie sur papier à en-tête de la société Horse Eventing, adressée à la société Sept Horses comportant une signature et des mentions manuscrites : " Bon pour accord " et " [Localité 7] 13/12/23 ". Est visée comme " désignation " la " cession des matériels liés au terrain de Cross de [Localité 8] ". Les matériels et leur prix respectif sont précisés (" parc obstacles sur remorque " " station de pompage/groupe électrogène/arroseur/clôture/tuyaux " " parc obstacles cross fixes et semi fixes " " obstacles XC JUMPS ") pour un montant total de 50 000 euros.
Elle verse aux débats le document intitulé " protocole d'accord " conclu entre M. [S] [G] " pour la société Horse Eventing " et M. [V] [L] " pour la société Sept Horses ", daté du 4 avril 2024, stipulant :
- que la promesse de vente notariée, datée du 20 décembre 2023, portant uniquement sur le terrain de cross, comportait une condition suspensive relative à l'obtention d'un ou de plusieurs prêts destinés à financer l'acquisition des terres mais également l'achat de matériels ; achat résultant d'une vente distincte concomitante à celle du terrain ;
- que la société Sept Horses a obtenu un prêt pour l'achat du terrain, mais n'a pas obtenu de prêt pour l'achat des matériels, raison pour laquelle elle se trouve dans l'incapacité d'honorer ses engagements ;
- que dans ces conditions " les parties se sont rapprochées et, à force de concessions réciproques, ont accepté de mettre un terme amiable à leur différend selon les modalités ci-après convenues " ;
- à l'article 1er, que la société Horse Eventing accepte que la somme de 50 000 euros soit payée selon les modalités suivantes : immédiatement à la signature de l'acte de vente du terrain à hauteur de 15 000 euros puis par échéances successives, pendant deux ans, à hauteur 35 000 euros (vingt-trois mensualités égales et consécutives de 1 521,74 euros) ;
- à l'article 2, que la société Sept Horses remet à la société Horse Eventing, en garantie du paiement, un chèque de 35 000 euros ;
- à l'article 3, qu'en contrepartie de ces modalités de paiement, la société Sept Horses consent à la société Horse Eventing, jusqu'au complet paiement de la somme de 35 000 euros, un droit d'usage commercial sur le terrain de cross et que même après paiement M. [G] conservera un droit d'usage personnel et familial ;
- à l'article 4, que " les parties déclarent avoir disposé du temps de réflexion nécessaire préalablement à la signature de la présente convention " ;
- à l'article 5, que " le présent protocole de transaction constitue une accord ferme et définitif entre les parties au sens de l'article 2044 du code civil et éteint de façon irrévocable tout recours de la société Horse Eventing contre la société Sept Horses et réciproquement, pour les causes ci-dessus mentionnées ".
L'acte de vente du terrain, daté du 12 avril 2024, comporte une clause " cession mobilière " ainsi rédigée : " Aux termes de l'avant-contrat ci-dessus visé, le vendeur a érigé en condition déterminante qu'il serait régularisé une vente mobilière entre la société Horse Eventing, [Adresse 2] et l'acquéreur.
Il a alors été stipulé que la réalisation de cette vente de mobilier et le paiement de son prix seraient concomitants à la réalisation des présentes et qu'en cas de non régularisation de la vente mobilière avec paiement du prix, la promesse de vente serait nulle et non avenue mais l'indemnité d'immobilisation stipulée serait versée au vendeur.
Les parties conviennent de dissocier la vente du mobilier et la vente de l'immeuble.
Le vendeur déclare que cette vente de mobilier avec paiement de son prix n'est plus une condition déterminante de la présente vente.
L'acquéreur déclare que la vente dudit mobilier a été conclue avec la société Horse Eventing suivant acte sous seing privé sans l'intervention ni le concours des notaires soussigné et participant.
Concernant le paiement du prix dudit mobilier, l'acquéreur déclare que son paiement se ferait à concurrence de 15 000 euros ce jour. Cette somme a été versée par l'acquéreur ce jour par la comptabilité des notaires soussigné et participant. Le notaire participant versera cette somme à la société Horse Eventing ".
La société Sept Horses ne conteste pas ne pas avoir réglé la somme qui lui est réclamée. Elle développe en revanche une série de moyens visant tantôt la vente des matériels, tantôt le protocole d'accord, qu'elle présente comme autant de contestations sérieuses faisant obstacle à la demande de provision.
- Sur les irrégularités de la facture et la vente de la chose d'autrui :
La société Sept Horses relève que les numéros Siret et TVA mentionnés sur la facture signée le 13 décembre 2023 ne correspondent pas à ceux de la société Horse Eventing mais à ceux d'une autre société, la société Cequip. Elle en déduit qu'il s'agit d'une " facture de la société Cequip ", que cette société est en réalité propriétaire des matériels cédés et qu'en conséquence la vente conclue avec la société Horse Eventing est nulle comme portant sur la chose d'autrui.
Cependant, les mentions erronées d'une facture ne suffisent pas en elles-mêmes à remettre en cause la réalité de la dette qu'elle constate, sauf à démontrer qu'aucune prestation ne correspond à cette facture, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque la société Sept Horses a effectivement pris livraison des matériels. Par ailleurs, la créance alléguée par la société Horse Eventing procède du protocole d'accord ultérieurement signé. Il s'ensuit que les irrégularités relevées, qui ne se retrouvent pas, au demeurant, dans la facture établie le 12 avril 2024, soit quelques jours après la signature du protocole d'accord, n'apparaissent pas de nature à remettre sérieusement en cause la réalité de la dette.
En outre, si la vente de la chose d'autrui est nulle, en application de l'article 1599 du code civil, encore faut-il pour que la nullité soit encourue que soit rapportée la preuve que la chose vendue appartient effectivement à un tiers. A cet égard, la société Sept Horses indique que les terrains sur lesquels ces matériels sont installés appartenaient initialement à Mme [W] et à la société Cequip, en indivision, et que la quote-part de la société Cequip a été cédée à Mme [W] à une époque où la société Cequip était en cessation des paiements. Toutefois, l'intimée ne précise pas en quoi les circonstances entourant l'acquisition des terrains permettraient d'en tirer des conséquences juridiques sur la propriété des matériels, s'agissant de deux ensembles de biens a priori distincts. Il convient également de relever que la lettre adressée par la société Sept Horses au liquidateur de la société Cequip, en date du 19 février 2025, visant à dénoncer ce que l'appelante qualifie de détournement d'actif, est manifestement restée sans suite. De fait, aucune revendication de propriété sur les matériels n'a été formulée à ce jour et notamment pas par la société Cequip, seule désignée par l'appelante comme propriétaire véritable, et ce, bien que son liquidateur ait été informé de la situation. Alors que la nullité de la vente de la chose d'autrui tend à protéger l'acquéreur d'un risque d'éviction, force est de constater que celui-ci est insuffisamment étayé.
Cette contestation n'est donc pas sérieuse.
- Sur l'absence de contenu licite et certain :
Il résulte de l'article 1128 du code civil qu'un contenu licite et certain est nécessaire à la validité du contrat.
La société Sept Horses critique le protocole d'accord en ce que celui-ci ne comporterait pas la liste précise des matériels vendus. Cependant, ce contrat n'a pas pour objet la vente des matériels : il a vocation à régler l'ensemble des conséquences induites par l'incapacité dans laquelle s'est trouvée la société Sept Horses de régler le prix de vente des matériels, faute de financement. Or, les engagements qu'il renferme, notamment en ce qui concerne le règlement du prix à tempérament, sont déterminés et ne sont d'ailleurs pas critiqués en tant que tels.
Au surplus, le paragraphe 3 du protocole liste les matériels objet de la vente litigieuse, mentionnés de manière suffisamment détaillée dans la facture du 13 décembre 2023, étant relevé que l'intention commune des parties était de faire porter la vente sur les matériels situés sur les terrains achetés par la société Sept Horses, et en cela déterminables.
Il est également prétendu que le contenu du protocole serait illicite en ce qu'il porterait sur une vente de la chose d'autrui. Toutefois, l'illicéité invoquée est étroitement liée à l'argumentation développée ci-avant ; or, comme il a été expliqué, celle-ci apparaît dépourvue d'arguments sérieux.
Les moyens développés ne recèlent en ce sens aucune contestation sérieuse.
- Sur la qualité de la prestation :
La société Sept Horses invoque l'article 1166 du code civil aux termes duquel " lorsque la qualité de la prestation n'est pas déterminée ou déterminable en vertu du contrat, le débiteur doit offrir une prestation de qualité conforme aux attentes légitimes des parties en considération de sa nature, des usages et du montant de la contrepartie. "
Elle soutient que la société Horse Eventing s'est abstenue d'offrir à la vente des matériels de qualité, correspondant au prix demandé.
Toutefois, pour venir étayer cette affirmation, elle se borne à produire des offres de vente de parcs d'obstacles neufs. Or, aucun élément ne permet de déterminer si les modèles en question sont comparables à ceux achetés. De surcroît, les matériels acquis ne se limitent pas à des parcs d'obstacles. Enfin, il n'est pas contesté que M. [V] [L] a procédé à la visite du terrain sur lequel sont installés les matériels, lui permettant ainsi d'apprécier la qualité de ces équipements avant de donner son accord.
Ce moyen ne caractérise donc pas une contestation sérieuse.
- Sur le caractère dérisoire de la prestation :
L'intimée invoque encore l'article 1169 du code civil aux termes duquel " Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire. "
Cependant, la liste des matériels achetés témoigne d'une prestation bien réelle, propre à justifier en elle-même le versement du prix, et il n'est pas davantage démontré de déséquilibre manifeste des prestations découlant directement du protocole d'accord, en sorte que cette contestation apparaît dépourvue de tout argument sérieux.
- Sur le vice du consentement :
La société Horse Eventing estime avoir été trompée par M. [G] qui aurait fait en sorte de traiter avec M. [V] [L] afin de profiter de son manque d'expérience et qui se serait abstenu, à dessein, de réaliser un inventaire précis et détaillé des matériels. Elle en déduit que le protocole d'accord est nul, en application des articles 1130 et 1137 du code civil.
Outre que les circonstances décrites concernent moins le protocole d'accord lui-même que la vente qui le précède, les simples allégations de l'appelante relatives à l'existence d'un vice du consentement, qui ne sont étayées par aucun élément probant, ne sont à l'évidence pas de nature à constituer une contestation sérieuse faisant obstacle à la demande en paiement.
- Sur le défaut de pouvoir du contractant :
La société Horse Eventing soutient, en dernier lieu, sur le fondement de l'article 1849 du code civil, que le protocole d'accord serait nul pour avoir été conclu par M. [V] [L], et non par Mme [C] [L], seule gérante de la société.
Il est un fait avéré que le protocole d'accord a été signé par M. [V] [L] qui n'est, d'après l'extrait Kbis de la société Sept Horses (pièce Horse Eventing, n° 2), qu'un associé de la société qui a pour gérante de droit Mme [C] [L].
Toutefois, l'article 1156 du code civil énonce que " l'acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté. "
Or, outre le fait que M. [V] [L] s'est présenté comme dirigeant de la société Sept Horses auprès de la fédération française d'équitation (pièce Horse Eventing, n° 21), il apparaît que celui-ci était muni du chéquier de la société (pièce Horse Eventing n° 5) et que le premier versement de 15 000 euros a été effectué à l'occasion de la vente immobilière impliquant Mme [L] (pièce Horse Eventing n° 10) dont il ressort d'un échange SMS qu'elle le laissait libre de gérer " ses affaires " en parlant en réalité de celles de la société Sept Horses (pièce Horse Eventing, n° 15).
Il est donc démontré avec l'évidence requise en référé que la société Horse Eventing pouvait légitimement croire en la réalité des pouvoirs de M. [V] [L], en sorte que la contestation tirée d'un défaut de pouvoir du représentant ne repose pas sur un fondement sérieux.
***
Etant relevé, au surplus, que les moyens de nullité allégués ne pourraient pas être invoqués par voie d'exception, compte tenu du commencement d'exécution du protocole d'accord, et qu'aucun élément ne démontre l'intention réelle de la société Sept Horses de poursuivre la nullité de la vente, il y a lieu de faire droit à la demande de provision qui n'est pas sérieusement contestable à hauteur de 33 478,26 euros ; l'ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Eu égard au sens de la présente décision, les dispositions de l'ordonnance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.
La société Sept Horses succombant, supportera les dépens d'appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile, l'équité commandant en outre de la condamner à régler à la société Horse Eventing la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a nécessairement dû exposer pour assurer sa défense à hauteur d'appel, sur le fondement de l'article 700 du même code.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition,
Constate que la cour est régulièrement saisie des demandes de la société Horse Eventing,
Confirme l'ordonnance entreprise en ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Condamne la société Sept Horses aux dépens d'appel,
Condamne la société Sept Horses à régler à la société Horse Eventing la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame Elisabeth TODINI, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
DE
VERSAILLES
Code nac : 50B
Chambre civile 1-5
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 20 NOVEMBRE 2025
N° RG 25/00810 - N° Portalis DBV3-V-B7J-W76F
AFFAIRE :
S.C.E.A. SEPT HORSES
C/
Société HORSE EVENTING EARL
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 09 Janvier 2025 par le Président du TJ de [Localité 9]
N° RG : 24/01480
Expéditions exécutoires
Copies certifiées conformes délivrées le : 20/11/25
à :
Me Grégory VAVASSEUR, avocat au barreau de VERSAILLES, 238
Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, 627
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.C.E.A. SEPT HORSES
Prise en la personne de ses représentants légaux domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Grégory VAVASSEUR, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 238
Plaidant : Me Franck NICOLLEAU, avocat au barreau de PARIS,
APPELANTE
****************
Société HORSE EVENTING EARL
anciennement immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n° 822 864 088 et actuellement immatriculée au RCS d'[Localité 6] sous le même n°,agissant poursuite et diligences de son représentant légal y domicilié
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 25150
Plaidant : Me Nathalie CARRERE, avocat au barreau de PARIS,
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Octobre 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant M. Bertrand MAUMONT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, conseillère faisant fonction de présidente,
Monsieur Ulysse PARODI, Vice Président placé faisant fonction de conseiller
Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller,
L'adjointe faisant fonction de Greffière, lors des débats : Madame Marion SEUS,
EXPOSE DU LITIGE
Selon facture du 11 décembre 2023, l'EARL Horse Eventing, gérée par M. [S] [G], a cédé à la SCEA Sept Horses, en parallèle de la vente d'un terrain de cross équin situé à [Localité 8] appartenant à Mme [K] [W], divers matériels pour un montant de 50 000 euros.
Aux termes d'un protocole d'accord signé entre les parties le 4 avril 2024, il a été convenu que la société Sept Horses réglerait la somme par un premier versement de 15 000 euros au jour de la signature de l'acte de vente du terrain. Il a également été convenu que le solde de 35 000 euros serait réglé par mensualités de 1 521,74 euros, la première mensualité devant être versée dans le mois suivant la signature de l'acte de vente. La remise d'un chèque de garantie d'un montant de 35 000 euros a également été prévue, la société Horse Eventing pouvant présenter ce chèque à l'encaissement à défaut de paiement d'une mensualité.
L'acte de vente du terrain a été signé le 12 avril 2024 entre Mme [K] [W] et la société Sept Horses.
La société Sept Horses ayant cessé de régler les mensualités prévues par le protocole d'accord, la société Horse Eventing l'a mise en demeure d'avoir à payer la somme de 3 043,48 euros, par acte du 22 juillet 2024. La mise en demeure est restée infructueuse.
La société Horse Eventing a présenté le chèque d'un montant de 35 000 euros à sa banque qui lui a indiqué qu'il n'était pas encaissable.
Par acte de commissaire de justice délivré le 22 octobre 2024, la société Horse Eventing a fait assigner en référé la société Sept Horses aux fins d'obtenir principalement :
- le paiement d'une somme provisionnelle d'un montant de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord signé entre les parties le 22 avril 2024,
- le paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 9 janvier 2025, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :
- condamné la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme provisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord du 4 avril 2024,
- condamné la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Sept Horses aux dépens,
- rappelé que l'ordonnance est de droit exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration reçue au greffe le 30 janvier 2025, la société Sept Horses a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'elle a rappelé que l'ordonnance est de droit exécutoire à titre provisoire.
Dans ses dernières conclusions déposées le 7 octobre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Sept Horses demande à la cour, au visa des articles 1104, 1128, 1130, 1166, 1169, 1599 et 1849 du code civil, de :
'- infirmer l'ordonnance de référé du 9 janvier 2025 rendue par le tribunal judiciaire de Versailles,
statuant à nouveau,
- dire qu'il n'y a pas lieu à référé pour statuer sur les chefs de l'ordonnance critiqués ci-dessous rappelés :
* condamnons la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme provisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord du 4 avril 2024,
* condamnons la société Sept Horses à payer la société Horse Eventing la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamnons la société Sept Horses aux dépens,
- renvoyer la société Horse Eventing à mieux se pourvoir,
- condamner la société Horse Eventing à verser à la société Sept Horses la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Horse Eventing aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées le 6 octobre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Horse Eventing demande à la cour de :
' In limine litis :
- juger que les conclusions d'appel de la société Sept Horses ne respectent pas les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile en ce qu'elles ne précisent pas les chefs de la décisions critiqués ;
- juger en conséquence que la cour n'est pas valablement saisie par lesdites conclusions ;
Sur le fond :
- confirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a condamné la société Sept Horses au paiement, à la société Horse Eventing, de la somme provisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole
d'accord du 4 avril 2024, et de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
- débouter en conséquence la société Sept Horses de ses demandes, fins et prétentions ;
- condamner la société Sept Horses au paiement, à la société Horse Eventing, de la somme de 5 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel .
L'ordonnance de clôture a été rendue à l'audience du 8 octobre 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il est rappelé qu'en vertu de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Aussi, bien que l'appelante ait accompagné la communication de ses dernières conclusions, la veille de l'ordonnance de clôture, d'un message RPVA sollicitant le rejet des dernières conclusions et pièces communiquées par l'intimée, elle n'a pas formulé de demande en ce sens dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que la cour n'est pas saisie d'une demande à ce titre.
Par ailleurs, en vertu de l'article 445 du code de procédure civile " après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444 ".
En l'espèce, la société Horse Eventing a cru devoir transmettre à la cour une note en délibéré par message RPVA du 24 octobre 2025. La société Sept Horses y a répliqué dans les mêmes formes le 27 octobre 2025.
A défaut d'avoir été autorisées par le président lors de l'audience du 8 octobre 2025, ces notes en délibéré seront écartées des débats.
Sur l'étendue de la saisine de la cour
La société Horse Eventing soutient que la saisine de la cour est irrégulière, car dans ses premières conclusions, l'appelante s'est limitée à solliciter l'infirmation de l'ordonnance sans préciser quels chefs de l'ordonnance étaient critiqués. Elle y voit une violation de l'article 954 du Code de procédure civile, en déduit que les conclusions communiquées dans le délai prévu par l'article 908 du même code ne respectent pas les exigences légales, et conclut à la caducité de la déclaration d'appel.
La société Sept Horses répond que ce moyen, soulevé " in limine litis " dans les dernières conclusions de l'intimée, a été présenté trop tard et ne tient pas compte de la finalité de la dernière réforme. Elle rappelle que le décret ayant réécrit l'article 954 du code de procédure civile visait à atténuer le formalisme parfois jugé excessif gouvernant la procédure d'appel. Elle souligne que l'effet dévolutif procède de l'acte d'appel, lequel mentionne les chefs de décision contestés ; que l'article 913-1 du code de procédure civile permet au conseiller de la mise en état d'enjoindre aux avocats de mettre leurs conclusions en conformité ; que les chefs critiqués figurent dans le dispositif de ses dernières conclusions ; et, en tout état de cause, que l'article 954 invoqué ne prévoit aucune sanction.
Sur ce,
L'article 562 du code de procédure civile dispose : " L'appel défère à la cour la connaissance des chefs du dispositif de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. Toutefois, la dévolution opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ".
D'autre part, l'article 901 du même code prévoit que " la déclaration d'appel, qui peut comporter une annexe, est faite par un acte contenant, à peine de nullité : (...)
6° L'objet de l'appel en ce qu'il tend à l'infirmation ou à l'annulation du jugement ;
7° Les chefs du dispositif du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est, sans préjudice du premier alinéa de l'article 915-2, limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ".
L'article 954 du code de procédure civile, dans sa version applicable à compter du 1er septembre 2024, dispose ensuite que : " Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues aux deuxième à quatrième alinéas de l'article 960. Elles formulent expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens et un dispositif dans lequel l'appelant indique s'il demande l'annulation ou l'infirmation du jugement et énonce, s'il conclut à l'infirmation, les chefs du dispositif du jugement critiqués, et dans lequel l'ensemble des parties récapitule leurs prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes conclusions sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. "
L'article 915-2 précise enfin que " l'appelant principal peut compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions remises dans les délais prévus au premier alinéa de l'article 906-2 et à l'article 908, les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d'appel. La cour est saisie des chefs du dispositif du jugement ainsi déterminés et de ceux qui en dépendent ".
Il se déduit de ces textes que la déclaration d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement et que l'effet dévolutif peut être modifié par les premières conclusions de l'appelant.
En l'espèce, la déclaration d'appel contient les mentions suivantes :
" Appel limité aux chefs du jugement expressément critiqués :
1er chef de jugement critiqué : condamnons la SCEA Sept Horses à payer à l'EARL Horse Eventing la somme prévisionnelle de 33 478,26 euros en exécution du protocole d'accord du 4 avril 2024
2ème chef de jugement critiqué : condamnons la SCEA Sept Horses à payer à l'EARL Horse Eventing la somme prévisionnelle de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
3ème chef de jugement critiqué : condamnons la SCEA Sept Horses aux dépens "
Dès lors, la dévolution a opéré par l'effet de cette déclaration d'appel, la circonstance que les premières conclusions d'appelante de la société Sept Horses, notifiées à la cour le 7 avril 2025, ne contiennent pas dans leur dispositif les chefs du jugement critiqués étant sans incidence, la formule " infirmer l'ordonnance de référé du 9 janvier 2025 rendue par le Tribunal Judiciaire de Versailles " étant suffisante pour que la cour soit saisie de la demande d'infirmation de la décision querellée.
Il y a lieu, en conséquence, de constater que la cour est régulièrement saisie des demandes de la société Horse Eventing.
Sur la demande de provision
La société Sept Horses fait grief au premier juge d'avoir accordé la provision sollicitée par la société Horse Eventing, alors que l'obligation dont celle-ci se prévaut se heurte à des contestations sérieuses :
- la facture émise par la société Horse Eventing présente des irrégularités (numéro SIRET, numéro de TVA intracommunautaire, adresse) et porte sur des matériels qui appartiennent en réalité à la société Cequip, anciennement gérée par M. [G] et aujourd'hui en liquidation, alors que la vente de la chose d'autrui est nulle ;
- le protocole litigieux n'a pas de contenu certain, les matériels qui en sont l'objet n'étant pas précisément identifiés ;
- le protocole a également un contenu illicite puisqu'il porte sur la vente de la chose d'autrui ;
- il n'existe pas de corrélation entre le prix convenu et la qualité des matériels acquis, ce qui contrevient aux dispositions de l'article 1166 du code civil ;
- la prestation du vendeur paraît dérisoire, au sens de l'article 1169 du code civil ;
- le protocole est entaché d'un vice du consentement : la société Horse Eventing s'est malicieusement abstenue de réaliser un inventaire précis des matériels et s'est habilement rapprochée de M. [V] [L], fils de la gérante, pour conclure le contrat avec lui, afin de tirer profit de son manque d'expérience ;
- M. [V] [L] ne disposait pas du pouvoir d'engager la société, ce pouvoir appartenant uniquement au gérant, à savoir Mme [C] [L], conformément à l'article 1849 du code civil, ce que la société Horse Eventing ne pouvait ignorer.
La société Horse Eventing répond que :
- l'obligation de paiement de la société Sept Horses est incontestable, car elle repose sur une facture proforma datée du 11 décembre 2023, validée et acceptée par la société Sept Horses, ainsi que sur le protocole d'accord du 4 avril 2024, qui a force obligatoire entre les parties et emporte renonciation à toute action en justice portant sur le même objet ;
- la facture proforma du 13 décembre 2023, distincte de la facture définitive émise le 12 avril 2024, est certes affectée par une erreur matérielle, mais les indications qu'elle renferme correspondent à la réalité de la transaction intervenue ;
- la question de la propriété des matériels a été discutée lors des négociations préparatoires à l'acte de vente du terrain de cross, et il était clair que Mme [W], propriétaire initiale des matériels cédés, en avait laissé la propriété à son compagnon, M. [G], gérant de la société Horse Eventing ; de plus, en matière de meubles, la règle " en fait de meuble, possession vaut titre " (art. 2276 du Code civil) s'applique, et aucune preuve contraire n'est rapportée quant à une appartenance des matériels à la société Cequip ;
- le protocole d'accord relatif aux modalités de paiement de la vente a un contenu certain ; il y est fait référence à la facture proforma listant les matériels cédés ; il a par ailleurs été partiellement exécuté, puisque la somme de 15 000 euros a été versée par l'intermédiaire du notaire de Mme [L], les paiements ayant cessé en raison d'un différend distinct concernant une autre créance ;
- la vente a un contenu licite, la société Horse Eventing étant possesseur de bonne foi des matériels litigieux ;
- les matériels dont la société Sept Horses a pris livraison, sont de qualité et de prix non comparables avec le matériel bas de gamme qu'elle invoque au soutien de sa contestation ;
- la contrepartie du paiement était connue de la société Sept Horses dès l'origine ; celle-ci ne peut sérieusement soutenir le caractère dérisoire de cette prestation, étant relevé qu'elle utilise les matériels depuis plus de 18 mois ;
- il n'est pas établi de man'uvre dolosive ou de tromperie susceptible d'entacher la vente d'un vice du consentement ; celle-ci a été conclue en pleine connaissance de cause par M. [V] [L], cavalier expérimenté, qui connaissait le terrain et ses équipements ; il a demandé à conclure ce protocole pour pallier ses difficultés de financement, et ce, avec la participation active de sa mère, Mme [C] [V], gérante de plusieurs sociétés ;
- M. [V] [L] a agi en qualité de gérant de fait de la société Sept Horses avec le plein assentiment de sa mère ; le contrat est à tout le moins valable en raison de l'existence d'un mandat apparent.
Sur ce,
Selon l'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile : " Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ".
Ce texte impose donc au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision : celle de rechercher si l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Doivent être précisés les éléments de la contestation qui rendent celle-ci sérieuse.
Il sera retenu qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
À l'inverse, sera écartée une contestation qui serait à l'évidence superficielle ou artificielle. Le montant de la provision allouée n'a alors d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.
En l'espèce, la société Horse Eventing indique qu'elle est titulaire d'une créance d'un montant de 33 478,26 euros correspondant aux échéances non réglées prévues par un protocole d'accord relatif à la vente de matériels de cross équin, conclu avec la société Sept Horses.
Elle produit une facture, établie sur papier à en-tête de la société Horse Eventing, adressée à la société Sept Horses comportant une signature et des mentions manuscrites : " Bon pour accord " et " [Localité 7] 13/12/23 ". Est visée comme " désignation " la " cession des matériels liés au terrain de Cross de [Localité 8] ". Les matériels et leur prix respectif sont précisés (" parc obstacles sur remorque " " station de pompage/groupe électrogène/arroseur/clôture/tuyaux " " parc obstacles cross fixes et semi fixes " " obstacles XC JUMPS ") pour un montant total de 50 000 euros.
Elle verse aux débats le document intitulé " protocole d'accord " conclu entre M. [S] [G] " pour la société Horse Eventing " et M. [V] [L] " pour la société Sept Horses ", daté du 4 avril 2024, stipulant :
- que la promesse de vente notariée, datée du 20 décembre 2023, portant uniquement sur le terrain de cross, comportait une condition suspensive relative à l'obtention d'un ou de plusieurs prêts destinés à financer l'acquisition des terres mais également l'achat de matériels ; achat résultant d'une vente distincte concomitante à celle du terrain ;
- que la société Sept Horses a obtenu un prêt pour l'achat du terrain, mais n'a pas obtenu de prêt pour l'achat des matériels, raison pour laquelle elle se trouve dans l'incapacité d'honorer ses engagements ;
- que dans ces conditions " les parties se sont rapprochées et, à force de concessions réciproques, ont accepté de mettre un terme amiable à leur différend selon les modalités ci-après convenues " ;
- à l'article 1er, que la société Horse Eventing accepte que la somme de 50 000 euros soit payée selon les modalités suivantes : immédiatement à la signature de l'acte de vente du terrain à hauteur de 15 000 euros puis par échéances successives, pendant deux ans, à hauteur 35 000 euros (vingt-trois mensualités égales et consécutives de 1 521,74 euros) ;
- à l'article 2, que la société Sept Horses remet à la société Horse Eventing, en garantie du paiement, un chèque de 35 000 euros ;
- à l'article 3, qu'en contrepartie de ces modalités de paiement, la société Sept Horses consent à la société Horse Eventing, jusqu'au complet paiement de la somme de 35 000 euros, un droit d'usage commercial sur le terrain de cross et que même après paiement M. [G] conservera un droit d'usage personnel et familial ;
- à l'article 4, que " les parties déclarent avoir disposé du temps de réflexion nécessaire préalablement à la signature de la présente convention " ;
- à l'article 5, que " le présent protocole de transaction constitue une accord ferme et définitif entre les parties au sens de l'article 2044 du code civil et éteint de façon irrévocable tout recours de la société Horse Eventing contre la société Sept Horses et réciproquement, pour les causes ci-dessus mentionnées ".
L'acte de vente du terrain, daté du 12 avril 2024, comporte une clause " cession mobilière " ainsi rédigée : " Aux termes de l'avant-contrat ci-dessus visé, le vendeur a érigé en condition déterminante qu'il serait régularisé une vente mobilière entre la société Horse Eventing, [Adresse 2] et l'acquéreur.
Il a alors été stipulé que la réalisation de cette vente de mobilier et le paiement de son prix seraient concomitants à la réalisation des présentes et qu'en cas de non régularisation de la vente mobilière avec paiement du prix, la promesse de vente serait nulle et non avenue mais l'indemnité d'immobilisation stipulée serait versée au vendeur.
Les parties conviennent de dissocier la vente du mobilier et la vente de l'immeuble.
Le vendeur déclare que cette vente de mobilier avec paiement de son prix n'est plus une condition déterminante de la présente vente.
L'acquéreur déclare que la vente dudit mobilier a été conclue avec la société Horse Eventing suivant acte sous seing privé sans l'intervention ni le concours des notaires soussigné et participant.
Concernant le paiement du prix dudit mobilier, l'acquéreur déclare que son paiement se ferait à concurrence de 15 000 euros ce jour. Cette somme a été versée par l'acquéreur ce jour par la comptabilité des notaires soussigné et participant. Le notaire participant versera cette somme à la société Horse Eventing ".
La société Sept Horses ne conteste pas ne pas avoir réglé la somme qui lui est réclamée. Elle développe en revanche une série de moyens visant tantôt la vente des matériels, tantôt le protocole d'accord, qu'elle présente comme autant de contestations sérieuses faisant obstacle à la demande de provision.
- Sur les irrégularités de la facture et la vente de la chose d'autrui :
La société Sept Horses relève que les numéros Siret et TVA mentionnés sur la facture signée le 13 décembre 2023 ne correspondent pas à ceux de la société Horse Eventing mais à ceux d'une autre société, la société Cequip. Elle en déduit qu'il s'agit d'une " facture de la société Cequip ", que cette société est en réalité propriétaire des matériels cédés et qu'en conséquence la vente conclue avec la société Horse Eventing est nulle comme portant sur la chose d'autrui.
Cependant, les mentions erronées d'une facture ne suffisent pas en elles-mêmes à remettre en cause la réalité de la dette qu'elle constate, sauf à démontrer qu'aucune prestation ne correspond à cette facture, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque la société Sept Horses a effectivement pris livraison des matériels. Par ailleurs, la créance alléguée par la société Horse Eventing procède du protocole d'accord ultérieurement signé. Il s'ensuit que les irrégularités relevées, qui ne se retrouvent pas, au demeurant, dans la facture établie le 12 avril 2024, soit quelques jours après la signature du protocole d'accord, n'apparaissent pas de nature à remettre sérieusement en cause la réalité de la dette.
En outre, si la vente de la chose d'autrui est nulle, en application de l'article 1599 du code civil, encore faut-il pour que la nullité soit encourue que soit rapportée la preuve que la chose vendue appartient effectivement à un tiers. A cet égard, la société Sept Horses indique que les terrains sur lesquels ces matériels sont installés appartenaient initialement à Mme [W] et à la société Cequip, en indivision, et que la quote-part de la société Cequip a été cédée à Mme [W] à une époque où la société Cequip était en cessation des paiements. Toutefois, l'intimée ne précise pas en quoi les circonstances entourant l'acquisition des terrains permettraient d'en tirer des conséquences juridiques sur la propriété des matériels, s'agissant de deux ensembles de biens a priori distincts. Il convient également de relever que la lettre adressée par la société Sept Horses au liquidateur de la société Cequip, en date du 19 février 2025, visant à dénoncer ce que l'appelante qualifie de détournement d'actif, est manifestement restée sans suite. De fait, aucune revendication de propriété sur les matériels n'a été formulée à ce jour et notamment pas par la société Cequip, seule désignée par l'appelante comme propriétaire véritable, et ce, bien que son liquidateur ait été informé de la situation. Alors que la nullité de la vente de la chose d'autrui tend à protéger l'acquéreur d'un risque d'éviction, force est de constater que celui-ci est insuffisamment étayé.
Cette contestation n'est donc pas sérieuse.
- Sur l'absence de contenu licite et certain :
Il résulte de l'article 1128 du code civil qu'un contenu licite et certain est nécessaire à la validité du contrat.
La société Sept Horses critique le protocole d'accord en ce que celui-ci ne comporterait pas la liste précise des matériels vendus. Cependant, ce contrat n'a pas pour objet la vente des matériels : il a vocation à régler l'ensemble des conséquences induites par l'incapacité dans laquelle s'est trouvée la société Sept Horses de régler le prix de vente des matériels, faute de financement. Or, les engagements qu'il renferme, notamment en ce qui concerne le règlement du prix à tempérament, sont déterminés et ne sont d'ailleurs pas critiqués en tant que tels.
Au surplus, le paragraphe 3 du protocole liste les matériels objet de la vente litigieuse, mentionnés de manière suffisamment détaillée dans la facture du 13 décembre 2023, étant relevé que l'intention commune des parties était de faire porter la vente sur les matériels situés sur les terrains achetés par la société Sept Horses, et en cela déterminables.
Il est également prétendu que le contenu du protocole serait illicite en ce qu'il porterait sur une vente de la chose d'autrui. Toutefois, l'illicéité invoquée est étroitement liée à l'argumentation développée ci-avant ; or, comme il a été expliqué, celle-ci apparaît dépourvue d'arguments sérieux.
Les moyens développés ne recèlent en ce sens aucune contestation sérieuse.
- Sur la qualité de la prestation :
La société Sept Horses invoque l'article 1166 du code civil aux termes duquel " lorsque la qualité de la prestation n'est pas déterminée ou déterminable en vertu du contrat, le débiteur doit offrir une prestation de qualité conforme aux attentes légitimes des parties en considération de sa nature, des usages et du montant de la contrepartie. "
Elle soutient que la société Horse Eventing s'est abstenue d'offrir à la vente des matériels de qualité, correspondant au prix demandé.
Toutefois, pour venir étayer cette affirmation, elle se borne à produire des offres de vente de parcs d'obstacles neufs. Or, aucun élément ne permet de déterminer si les modèles en question sont comparables à ceux achetés. De surcroît, les matériels acquis ne se limitent pas à des parcs d'obstacles. Enfin, il n'est pas contesté que M. [V] [L] a procédé à la visite du terrain sur lequel sont installés les matériels, lui permettant ainsi d'apprécier la qualité de ces équipements avant de donner son accord.
Ce moyen ne caractérise donc pas une contestation sérieuse.
- Sur le caractère dérisoire de la prestation :
L'intimée invoque encore l'article 1169 du code civil aux termes duquel " Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire. "
Cependant, la liste des matériels achetés témoigne d'une prestation bien réelle, propre à justifier en elle-même le versement du prix, et il n'est pas davantage démontré de déséquilibre manifeste des prestations découlant directement du protocole d'accord, en sorte que cette contestation apparaît dépourvue de tout argument sérieux.
- Sur le vice du consentement :
La société Horse Eventing estime avoir été trompée par M. [G] qui aurait fait en sorte de traiter avec M. [V] [L] afin de profiter de son manque d'expérience et qui se serait abstenu, à dessein, de réaliser un inventaire précis et détaillé des matériels. Elle en déduit que le protocole d'accord est nul, en application des articles 1130 et 1137 du code civil.
Outre que les circonstances décrites concernent moins le protocole d'accord lui-même que la vente qui le précède, les simples allégations de l'appelante relatives à l'existence d'un vice du consentement, qui ne sont étayées par aucun élément probant, ne sont à l'évidence pas de nature à constituer une contestation sérieuse faisant obstacle à la demande en paiement.
- Sur le défaut de pouvoir du contractant :
La société Horse Eventing soutient, en dernier lieu, sur le fondement de l'article 1849 du code civil, que le protocole d'accord serait nul pour avoir été conclu par M. [V] [L], et non par Mme [C] [L], seule gérante de la société.
Il est un fait avéré que le protocole d'accord a été signé par M. [V] [L] qui n'est, d'après l'extrait Kbis de la société Sept Horses (pièce Horse Eventing, n° 2), qu'un associé de la société qui a pour gérante de droit Mme [C] [L].
Toutefois, l'article 1156 du code civil énonce que " l'acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté. "
Or, outre le fait que M. [V] [L] s'est présenté comme dirigeant de la société Sept Horses auprès de la fédération française d'équitation (pièce Horse Eventing, n° 21), il apparaît que celui-ci était muni du chéquier de la société (pièce Horse Eventing n° 5) et que le premier versement de 15 000 euros a été effectué à l'occasion de la vente immobilière impliquant Mme [L] (pièce Horse Eventing n° 10) dont il ressort d'un échange SMS qu'elle le laissait libre de gérer " ses affaires " en parlant en réalité de celles de la société Sept Horses (pièce Horse Eventing, n° 15).
Il est donc démontré avec l'évidence requise en référé que la société Horse Eventing pouvait légitimement croire en la réalité des pouvoirs de M. [V] [L], en sorte que la contestation tirée d'un défaut de pouvoir du représentant ne repose pas sur un fondement sérieux.
***
Etant relevé, au surplus, que les moyens de nullité allégués ne pourraient pas être invoqués par voie d'exception, compte tenu du commencement d'exécution du protocole d'accord, et qu'aucun élément ne démontre l'intention réelle de la société Sept Horses de poursuivre la nullité de la vente, il y a lieu de faire droit à la demande de provision qui n'est pas sérieusement contestable à hauteur de 33 478,26 euros ; l'ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Eu égard au sens de la présente décision, les dispositions de l'ordonnance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.
La société Sept Horses succombant, supportera les dépens d'appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile, l'équité commandant en outre de la condamner à régler à la société Horse Eventing la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a nécessairement dû exposer pour assurer sa défense à hauteur d'appel, sur le fondement de l'article 700 du même code.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition,
Constate que la cour est régulièrement saisie des demandes de la société Horse Eventing,
Confirme l'ordonnance entreprise en ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Condamne la société Sept Horses aux dépens d'appel,
Condamne la société Sept Horses à régler à la société Horse Eventing la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame Elisabeth TODINI, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente