Livv
Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 20 novembre 2025, n° 21/13554

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/13554

20 novembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AVANT DIRE DROIT

DU 20 NOVEMBRE 2025

Rôle N° RG 21/13554 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BID5P

S.A.R.L. CASSIOPEE

C/

[A] [R] [M]

Copie exécutoire délivrée

le : 20 Novembre 2025

à :

Me Gilles ORDRONNEAU

Me Françoise BOULAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 6] en date du 29 Juillet 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 20/02616.

APPELANTE

S.A.R.L. CASSIOPEE

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Gilles ORDRONNEAU de la SELARL CABINET GILLES ORDRONNEAU, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE

Madame [A] [R] [M]

née le 08 Avril 1955 à [Localité 9] (CAMBODGE) (99234), demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Thierry DE SENA de la SELARL ALPIJURIS, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Septembre 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président Rapporteur,

et Madame Gaëlle MARTIN, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente

Madame Laetitia VIGNON, Conseillère

Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Novembre 2025, puis avisées par message le 6 Novembre 2025, que la décision était prorogée au 20 Novembre 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2025.

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [Y] [R] [M] est propriétaire, au sein d'un immeuble en copropriété dénommé '[Adresse 8] à [Localité 4], d'un local commercial dans lequel elle a exploité, par l'intermédiaire de la SARL Tokyo, une activité de restauration à compter du 19 février 2004.

Par acte sous seing privé du 13 décembre 2010, la SARL Tokyo a cédé son fonds de commerce à la SARL Cassiopée.

Par acte distinct du même jour, Mme [Y] [R] [M] divorcée [V] a consenti à la SARL Cassiopée un bail commercial portant sur les locaux, pour une durée de neuf ans à compter du 1er décembre 2010, prenant fin le 30 novembre 2019.

Aux termes de ces actes, il a été stipulé que tant la société Tokyo que Mme [Y] [R] [M] s'engageaient à procéder à la réfection de l'étanchéité de la verrière dans un délai de quinze jours à compter du 13 décembre 2010.

Par ordonnance de référé du tribunal de commerce de Fréjus en date du 10 septembre 2012, la société Tokyo a été condamnée à faire procéder aux travaux d'étanchéité de la verrière de la terrasse par une entreprise habilitée, sous astreinte de 10 euros par jour de retard.

Mme [Y] [R] [M] a fait procéder à des travaux, donnant lieu à une facture du 20 décembre 2012.

Postérieurement à la réalisation de ces travaux, la SARL Tokyo a fait l'objet d'une dissolution anticipée et d'une liquidation amiable.

Faisant valoir la persistance d'infiltrations, la SARL Cassiopée a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan afin d'obtenir l'instauration d'une mesure d'expertise et obtenu la désignation en qualité d'expert, par ordonnance du 11 juillet 2013, de M. [L] [B].

L'expert a déposé son rapport le 29 mars 2017, concluant que les infiltrations provenaient d'un solin de la couverture, d'un chéneau en zinc égout de la couverture ainsi que de la fenêtre du lot n°107, situés au-dessus des lieux loués, et précisant les travaux nécessaires pour y remédier.

Par ordonnance du 10 juillet 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a enjoint à Mme [Y] [R] [M] d'exécuter et d'achever les travaux nécessaires sur le solin et le chéneau, conformément aux préconisations de l'expert, sous astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà d'un délai de deux mois suivant la signification de la décision, ce délai expirant le 18 septembre 2019.

Mme [Y] [R] [M] a effectué de nouveaux travaux, donnant lieu à une facture du 26 septembre 2019.

Le 10 avril 2019, Mme [Y] [R] [M] a fait délivrer à la SARL Cassiopée'une mise en demeure et un congé avec refus de renouvellement du bail commercial, motivé par la démolition, sans autorisation, d'un mur porteur partie commune ayant entraîné une fissuration de la façade, la réalisation, sans autorisation, d'une terrasse en bois et d'une pergola sur une partie commune faisant l'objet d'un bail précaire entre la bailleresse et le syndicat des copropriétaires, et le non-paiement de taxes foncières par la SARL Cassiopée au titre des années 2011 à 2018.

La SARL Cassiopée a quitté les lieux le 24 décembre 2019.

Contestant la validité du congé, la SARL Cassiopée a, par acte du 4 mai 2020, fait assigner Mme [Y] [R] [M] divorcée [V] devant le tribunal judiciaire de Draguignan, sollicitant'la condamnation de la bailleresse au paiement :

- d'une indemnité d'éviction d'un montant de 400'000'euros,

- de 271'628'euros au titre de divers préjudices,

- d'une somme de 9'216'euros en répétition d'un indu,

- d'une somme de 15'000'euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par jugement du 29 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Draguignan a statué comme suit :

- dit que le congé du 10 avril 2019 repose sur des motifs légitimes,

- déboute la SARL Cassiopée de ses demandes au titre du congé, de l'indemnité d'éviction et des dommages et intérêts,

- condamne Mme [Y] [R] [M] à payer à la SARL Cassiopée la somme de 9 216 euros au titre de l'indu,

- condamne la SARL Cassiopée à payer à Mme [Y] [R] [M] la somme de 5 102 euros au titre des taxes foncières impayées,

- déboute Mme [Y] [R] [M] de sa demande de dommages et intérêts,

- condamne la SARL Cassiopée à payer à Mme [Y] [R] [M] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la SARL Cassiopée aux dépens.

Rappelant que conformément à l'article L.145-17 du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement d'un bail commercial sans indemnité d'éviction en cas de motifs graves et légitimes imputables au locataire, le tribunal a écarté le grief relatif aux travaux sur murs porteurs, la locataire ayant reçu l'accord du bailleur. Il a retenu la réalisation de travaux sur les parties communes sans autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires et le non-paiement des taxes foncières comme constituant des fautes graves caractérisées, justifiant le refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction et a, en conséquence, débouté la SARL Cassiopée de ses demandes à ce titre.

Le tribunal a par ailleurs considéré que la SARL Cassiopée n'établissait pas l'existence d'un quelconque préjudice résultant directement du manquement de la bailleresse à ses obligations de délivrance et de réfection de la verrière.

Sur la demande en répétition d'un indu de loyer formée par la preneuse, le tribunal a retenu que le montant du loyer fixé au bail comprenait la jouissance de la terrasse, les lieux loués formant un tout indivisible, et que Mme [R] [M] n'était pas fondée à réclamer un loyer supplémentaire à ce titre, d'un montant annuel de 1024 euros.

Sur les demandes reconventionnelles de la bailleresse, le tribunal a énoncé qu'alors que Mme [R] [M] justifiait du montant des taxes foncières, la SARL Cassiopée ne rapportait pas la preuve des paiements qu'elle prétendait avoir effectués à ce titre.

Sur la demande en dommages et intérêts, le tribunal a considéré que le procès-verbal de constat établi plus de six mois après le départ de la locataire ne permettait pas de lui imputer l'état de saleté et de délabrement invoqué.

Par déclaration du 23 septembre 2021, la SARL Cassiopée a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions transmises par la voie électronique du 22 mars 2022, la société Cassiopée demande à la cour de :

- juger cet appel fondé et infirmer / réformer en conséquence purement et simplement le jugement du tribunal judiciaire de Draguignan du 29 juillet 2021,

- confirmer purement et simplement le jugement du tribunal judiciaire de Draguignan du 29 juillet 2021 en ce que le premier juge a :

- condamné Mme [Y] [R] [M] à payer à la société Cassiopée la somme de 9 216 euros au titre de l'indu,

- débouté Mme [Y] [R] [M] de sa demande de dommages et intérêts,

- juger cet appel fondé et infirmer / réformer en conséquence purement et simplement le jugement du tribunal judiciaire de Draguignan du 29 juillet 2021 en ce que le premier juge a :

a)- dit que le congé du 10 avril 2019 repose sur des motifs légitimes,

b)- débouté la société de ses demandes au titre du congé, de l'indemnité d'éviction et des dommages intérêts,

c)- condamné la société Cassiopée à payer à Mme [Y] [R] [M] la somme de 5 102 euros au titre des taxes foncières impayées,

d)- condamné la société Cassiopée à payer à Mme [Y] [R] [M] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

e)- condamné la société Cassiopée aux dépens,

Statuant en conséquence à nouveau du chef de cette infirmation / réformation du jugement entrepris :

a)- sur le congé délivré le 10 avril 2019 et sur l'indemnité d'éviction :

- juger que les motifs invoqués par Mme [Y] [R] [M] dans son congé du 10 avril 2019 comportant refus de renouvellement du contrat de louage du 13 décembre 2010 à l'échéance du 30 novembre 2019, sans offrir le paiement de l'indemnité d'éviction, ne sont pas graves et légitimes au sens des dispositions de l'article L 145-17 du code de commerce,

- juger que le congé délivré le 10 avril 2019 par Mme [Y] [R] [M] ouvre droit au profit de la société Cassiopée au paiement de l'indemnité d'éviction stipulée à l'article L 145-14 du code de commerce du fait de sa volonté de ne point renouveler le contrat de louage du 13 décembre 2010,

- à titre principal, condamner Mme [Y] [R] [M] à payer à la société Cassiopée la somme de 400 000 euros à titre d'indemnité d'éviction, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de délivrance de l'assignation introductive d'instance,

- à titre subsidiaire, ordonner une mesure d'instruction et désigner à cet effet tel expert judiciaire de son choix avec la mission de fournir tous les éléments d'appréciation permettant d'évaluer et de fixer le préjudice subi par la société Cassiopée à la suite du refus de renouvellement du bail des locaux loués par le contrat de louage du 13 décembre 2010, et de donner plus généralement à la cour d'appel tous les éléments permettant de fixer le montant de l'indemnité d'éviction due par Mme [Y] [R] [M] du fait de son refus de renouveler le bail commercial du 13 décembre 2010,

b)-sur les dommages intérêts résultant des manquements du bailleur à ses obligations légales / contractuelles et judiciaire :

- à titre principal, condamner Mme [Y] [R] [M] à payer à la société Cassiopée la somme de 271 628 euros à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices de toute nature subis par la locataire du fait du manquement du bailleur à ses obligations contractuelles et à ses obligations légales (articles 1719 à 1721 du code civil), ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de délivrance de l'assignation introductive d'instance,

- à titre subsidiaire, ordonner une mesure d'instruction et désigner à cet effet tel expert judiciaire de son choix avec la mission de fournir tous les éléments d'appréciation permettant d'évaluer et de fixer les préjudices de toutes natures, subis par la société Cassiopée pendant l'exécution du bail commercial du 13 décembre 2010, à raison des infiltrations d'eau généralisées et récurrentes au sein des lieux loués par ledit contrat de louage,

- condamner Mme [Y] [R] [M] à payer à la société Cassiopée la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [Y] [R] [M] aux entiers dépens de l'instance, lesquels dépens comprendront également le coût de l'expertise judiciaire confiée à Monsieur [L] [B] par l'ordonnance de référé du 11 juillet 2013, les dépens des ordonnances de référé des 11 juillet 2013, 11 février 2015 et 27 avril 2016, ainsi que le coût de l'ensemble des procès-verbaux de constat dressés par les huissiers de justice à la requête de la société Cassiopée tels que versés aux débats à l'occasion de la présente instance.

Par conclusions transmises par la voie électronique du 13 janvier 2022, Mme [Y] [R] [M] divorcée [V] demande à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que le congé du 10 avril 2019 repose sur des motifs légitimes,

- débouté la SARL Cassiopée de ses demandes au titre du congé, de l'indemnité d'éviction et des dommages et intérêts,

- condamné la SARL Cassiopée à payer à Mme [R] [M] la somme de 5 102 euros au titre des taxes foncières impayées,

- condamné la SARL Cassiopée à payer à Mme [R] [M] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL Cassiopée aux dépens,

- constater le caractère légitime et sérieux des motifs de non-renouvellement invoqués dans le congé notifié le 10 avril 2019,

- constater notamment que, contrairement à ce que soutient la société Cassiopée, Mme [R] [M] n'a jamais autorisé la locataire à démolir le gros 'uvre, partie commune de l'immeuble, puisque c'est exactement l'inverse qui est stipulé dans le contrat de bail,

- constater par ailleurs que la société Cassiopée avait été mise en demeure de procéder à sa mise en conformité ; qu'elle n'a déféré à aucune des trois injonctions qui lui étaient faites ; qu'elle a préféré quitter les lieux sans même en avertir sa bailleresse,

- débouter la société Cassiopée de ses entières demandes, fins et prétentions,

- condamner la société Cassiopée à la somme de 5 102 euros au titre des taxes foncières impayées,

Très subsidiairement,

- constater que la société Cassiopée sollicite une indemnité d'éviction sans justifier ni le montant, ni le bien fondé de sa demande et la débouter, de plus fort, de ses demandes formées de ce chef,

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- condamné Mme [R] [M] à payer à la société Cassiopée la somme de 9 216 euros au titre de l'indu,

- débouté Mme [R] [M] de sa demande de dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau sur ces points :

En ce qui concerne la répétition de l'indu :

- débouter la société Cassiopée de ses demandes de ce chef ,

Subsidiairement,

- constater que les demandes de la société Cassiopée sont prescrites pour les redevances payées au-delà du délai de 5 années précédant la signification de son acte introductif d'instance,

En ce qui concerne les dommages et intérêts :

- constater que le local commercial a été laissé dans un état de saleté et de délabrement odieux et inadmissibles,

- condamner la société Cassiopée à la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice en résultant,

- condamner la société Cassiopée à la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL Lexavoue.

L'instruction du dossier a été clôturée par une ordonnance du 22 avril 2025.

MOTIFS

Sur le congé délivré le 10 avril 2019 et la demande d'indemnité d'éviction :

L'article L.145-17 I 1° du code de commerce permet au bailleur de refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant. S'il s'agit de l'exécution d'une obligation, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur de la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire le texte de l'article.

Aux termes de la mise en demeure délivrée le 10 avril 2019, la bailleresse reproche en premier lieu à la preneuse d'avoir procédé à la démolition d'un mur porteur, partie commune, sur plusieurs mètres, ayant entraîné une fissuration de la façade, sans autorisation et en violation des articles X 8) et 11) du bail, et lui fait injonction dans le délai d'un mois de :

- faire réaliser à ses frais exclusifs les travaux nécessaires à la remise en état du mur porteur dont l'exécution devra être supervisée par l'ingénieur béton,

- faire réaliser à ses frais exclusifs tous les travaux de réparation de la fissure apparue sur la façade de l'immeuble et les autres travaux de confortement qui apparaîtraient nécessaires à l'ingénieur béton chargé de la surveillance des travaux de remise en état du mur porteur,

- transmettre une attestation de l'ingénieur béton constatant l'exécution des travaux palliant tout nouveau dommage.

La mise en demeure mentionne également le grief tiré de la réalisation par la locataire, sans autorisation de la bailleresse ni de la copropriété, d'une terrasse en bois et d'une pergola sur une partie commune faisant l'objet d'un bail précaire entre la bailleresse et le syndicat des copropriétaires, et fait injonction à la SARL Cassiopée de s'engager expressément dans le délai d'un mois à :

- réaliser à sa charge exclusive les travaux de remise en état d'origine de la partie commune dans les 30 jours suivant la demande de la requérante,

- ne plus réaliser de travaux ou aménagements sans l'autorisation préalable et écrite de la requérante et de la copropriété,

- entretenir les aménagements réalisés afin qu'aucune aggravation des charges n'intervienne,

- laisser la terrasse accessible en cas de travaux, à simple demande, sans contrainte ou dédommagement au syndicat ou au bailleur,

- s'abstenir de mentionner la terrasse dans une éventuelle cession de l'exploitation de la SARL Cassiopée.

La mise en demeure énonce enfin que la locataire s'abstient de rembourser les taxes foncières dues depuis l'année 2011 en violation de l'article IX-13) du bail et enjoint à la SARL Cassiopée de payer à Mme [R] [M] la somme de 5102 euros à ce titre dans le délai d'un mois.

Le congé délivré le même jour avec refus de renouvellement et refus de paiement d'une indemnité d'éviction est fondé sur les mêmes griefs.

- sur le motif tiré de la démolition d'un mur porteur sans autorisation :

Les actes délivrés le 10 avril 2019 rappellent les termes de l'article X - 8) des conditions générales du bail qui stipule que 'le preneur ne pourra faire dans les lieux loués aucune démolition, ni construction, et plus généralement des travaux touchant au gros oeuvre, sans avoir obtenu les autorisations administratives nécessaires et sans l'autorisation écrite du bailleur (...) Les plans des aménagements, installations, améliorations et embellissements projetés par le preneur devront, préalablement à toute exécution, être soumis pour accord au bailleur.'

Ils visent également l'article X - 11) des conditions générales qui stipule que 'le preneur devra de conformer aux obligations découlant du règlement de copropriété et du règlement intérieur de l'immeuble dont dépendent les locaux loués.'

Ils rappellent les dispositions de l'article 25b de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 relatif à l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble et mentionnent que le syndicat peut agir à l'encontre d'un copropriétaire du fait des troubles causés par le preneur à la copropriété.

La SARL Cassiopée ne conteste pas qu'à son entrée dans les lieux, elle a effectué en janvier 2011 des travaux d'aménagement du restaurant comportant la démolition d'une partie d'un mur situé à l'intérieur des locaux qui s'est révélé être un mur porteur, et qu'elle a fait réaliser des travaux de confortement en sous-oeuvre selon les préconisations de M. [H] [O], ingénieur structure, ainsi que le relate l'expert [B] dans son rapport.

L'expert considère que les travaux de démolition réalisés par la société Cassiopée sont à l'origine d'une fissure de la façade mais précise que cette fissure n'est pas à l'origine des infiltrations contrairement à ce qu'affirme la bailleresse.

Ainsi que l'a retenu le premier juge, la SARL Cassiopée établit avoir obtenu l'accord de la bailleresse pour réaliser les travaux entrepris à l'entrée dans les lieux puisqu'elle a fait annexer au bail un plan des modifications envisagées faisant apparaître l'ouverture litigieuse permettant un passage dans les cuisines, comportant la signature des deux parties au bail.

Mme [R] [M] soutient qu'elle n'a pas accepté que les travaux touchent le gros oeuvre de l'immeuble puisqu'il est stipulé à l'article XI du bail intitulé 'autorisations et règlements' que 'le bailleur autorise par la présente toutes modifications dans les lieux loués sans que cela ne touche au gros oeuvre de l'immeuble après son accord écrit et plans visés par lui et le changement de l'enseigne (plan accepté en annexe)'.

La bailleresse a cependant accepté un plan faisant clairement apparaître l'ouverture d'un mur, dont il lui appartenait de vérifier la nature.

C'est à la bailleresse, en sa qualité de copropriétaire, qu'il appartenait d'effectuer toute vérification auprès du syndicat des copropriétaires avant de signer une autorisation de travaux comportant l'ouverture d'un mur, le premier juge ayant retenu à juste titre que la locataire n'avait aucun lien de droit avec le syndicat des copropriétaires lui permettant de le saisir directement d'une demande d'autorisation.

La mise en demeure du 10 avril 2019 comporte en annexe le compte rendu de l'assemblée générale des copropriétaires du 6 août 2018 et reproduit la résolution n°11, aux termes de laquelle l'assemblée 'décide de demander qu'un dossier et attestation d'ingénieur béton soit fourni précisant que cette démolition n'engendre pas de préjudice sur la structure de l'immeuble. Dans le cas contraire, l'ingénieur donnera toute préconisation de suppression des risques.'

Il apparaît ainsi que le souhait du syndicat des copropriétaires est de s'assurer de l'absence de risque affectant la structure de l'immeuble.

Il ressort du rapport d'expertise de M. [B], dont les travaux ont été conduits au contradictoire tant de la bailleresse que du syndicat des copropriétaires, que la SARL Cassiopée a communiqué dans le cadre de cette expertise les justificatifs de la réalisation par l'entreprise De Sousa, de travaux de reprise en sous-oeuvre du mur porteur conformément aux plans de structure et préconisations de M. [H] [O], ingénieur conseil.

L'expert qui a consulté ces documents et visité les lieux n'a émis aucune critique ni réserve sur les travaux de confortement réalisés.

La SARL Cassiopée verse par ailleurs aux débats l'avis de M. [D] [Z] en date du 30 avril 2018 et celui de M. [W] [C] établi le 20 octobre 2018, ces deux ingénieurs structure concluant que l'ouvrage tel que conforté suivant l'étude structure du BET [O] ne présente aucun risque pour la solidité de l'immeuble.

Ces éléments ont été communiqués à la bailleresse par LRAR du 17 avril 2019.

S'agissant de la fissure apparue sur la façade de l'immeuble, causée selon l'expert par les travaux de démolition avant confortement, la bailleresse ne justifie d'aucune demande émanant du syndicat des copropriétaires, portant mise en demeure de procéder à des travaux de reprise.

En considération de ces éléments, la mise en demeure délivrée par la bailleresse d'avoir à :

- faire réaliser à ses frais exclusifs les travaux nécessaires à la remise en état du mur porteur dont l'exécution devra être supervisée par l'ingénieur béton,

- faire réaliser à ses frais exclusifs tous les travaux de réparation de la fissure apparue sur la façade de l'immeuble et les autres travaux de confortement qui apparaîtraient nécessaires à l'ingénieur béton chargé de la surveillance des travaux de remise en état du mur porteur,

- transmettre une attestation de l'ingénieur béton constatant l'exécution des travaux palliant tout nouveau dommage,

n'est pas fondée.

Les griefs invoqués en lien avec la démolition d'un mur porteur ne peuvent en conséquence constituer un motif grave et légitime de refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction.

- sur le motif tiré de l'aménagement d'une terrasse et d'une pergola sur une partie commune sans autorisation :

Les locaux loués sont décrits à l'article II du bail liant les parties comme comportant une terrasse d'une superficie d'environ 60 m² régie par un bail précaire consenti par le syndicat des copropriétaires et Mme [Y] [R] [M].

La SARL Cassiopée ne conteste pas avoir réalisé dès son entrée en jouissance en janvier 2011 des travaux d'aménagement de la terrasse consistant en la pose d'une terrasse en bois et l'installation d'une pergola.

Elle prétend avoir obtenu l'autorisation de la bailleresse mais n'en justifie pas, le plan annexé au bail ne faisant pas apparaître clairement ces aménagements.

Ces aménagements, visibles depuis la [Adresse 10], n'ont cependant donné lieu à aucune réclamation de Mme [R] [M] entre janvier 2011 et le 10 avril 2019, ce dont il peut à tout le moins se déduire une absence d'opposition de la bailleresse.

Il résulte par ailleurs des pièces versées aux débats que sur la demande formulée par le syndic par mail du 6 juillet 2018, la SARL Cassiopée a produit un dossier de régularisation en vue de l'assemblée générale des copropriétaires du 6 août 2018, dont il ressort notamment que conformément aux contraintes qui lui avaient été communiquées, les dalles de sol ont été conservées, la terrasse en bois étant posée sur un cadre en lambourdes, la pergola vissée sur les lames en bois est démontable, l'espace vert est entretenu.

L'assemblée générale des copropriétaires a adopté le 6 août 2018 une résolution n°12 intitulée 'Régularisation des aménagements sur les parties communes (louées en bail précaire) faits par le gérant de l'exploitation Delicatessen lot C017 propriété de Mme [V]' et rédigée comme suit :

' L'assemblée générale prend acte de la réalisation des aménagements faits (terrasse en bois et pergola) sur les parties communes.

L'assemblée générale prend acte que la terrasse en partie commune pourra être remise dans son état d'origine en cas de vente, changement d'exploitant ou résiliation ou conservée en l'état avec autorisation.

L'assemblée générale prend acte que tous les frais engagés pour une remise en état d'origine seront directement imputés au copropriétaires du local lot C017. En aucun cas les aménagements ne devront être un cas d'aggravation de charges et cette partie restera en cas de travaux accessible sans contrainte ou dédommagement par le syndicat à sa simple demande.

Il est précisé que du fait de la précarité du bail en aucun cas cette terrasse ne peut être mentionnée dans une éventuelle cession de l'exploitation faite dans le local C017.

En cas de désaccord, mandat est donné au syndic pour la résiliation du bail avec remise en état des parties communes aux frais des copropriétaires du local C017.'

En considération de ces éléments, la mise en demeure délivrée par la bailleresse à la preneuse d'avoir à réaliser à sa charge exclusive les travaux de remise en état d'origine de la partie commune dans les 30 jours suivant la demande de la requérante est injustifiée.

Il n'est par ailleurs allégué aucune contravention aux autres injonctions à savoir :

- ne plus réaliser de travaux ou aménagements sans l'autorisation préalable et écrite de la requérante et de la copropriété,

- entretenir les aménagements réalisés afin qu'aucune aggravation des charges n'intervienne,

- laisser la terrasse accessible en cas de travaux, à simple demande, sans contrainte ou dédommagement au syndicat ou au bailleur,

- s'abstenir de mentionner la terrasse dans une éventuelle cession de l'exploitation de la SARL Cassiopée.

Les griefs invoqués en lien avec l'aménagement de la terrasse ne peuvent en conséquence constituer un motif grave et légitime de refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction.

- sur le motif tiré du défaut de remboursement de la taxe foncière :

Aux termes de l'article IX - conditions particulières 13) du bail, l'impôt foncier est à la charge du preneur sur présentation du justificatif des impôts.

La mise en demeure du 10 avril 2019 fait injonction à la SARL Cassiopée de payer à Mme [V] [R] [M] la somme de 5102 euros correspondant au remboursement des taxes foncières pour les années 2012 à 2018 dans un délai d'un mois et comporte en annexe les justificatifs suivants :

- avis d'impôt 2011 pour un montant de 524 euros,

- avis d'impôt 2012 pour un montant de 535 euros,

- avis d'impôt 2013 pour un montant de 577 euros,

- fiche de rôle de taxes foncières année 2014 pour un montant de 617 euros,

- avis d'impôt 2015 pour un montant de 689 euros,

- avis d'impôt 2016 pour un montant de 699 euros,

- avis d'impôt 2017 pour un montant de 721 euros,

- avis d'impôt 2018 pour un montant de 740 euros.

Il est rappelé dans la mise en demeure que par courrier du 14 janvier 2015, la SARL Cassiopée avait adressé un chèque de 2277 euros correspondant au remboursement des taxes foncières dues au titre des années 2011 à 2014 mais que la bailleresse lui avait retourné ce chèque, ayant fait entre-temps diligenter une saisie conservatoire sur le compte bancaire de la preneuse.

Par arrêt du 16 décembre 2016, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a constaté la caducité de cette saisie conservatoire.

Par LRAR de son conseil en date du 17 avril 2019, la SARL Cassiopée a rappelé à la bailleresse qu'elle avait procédé au remboursement de la taxe foncière de l'année 2015 par un chèque tiré sur la banque LCL n°4347869 d'un montant de 689 euros.

Il est justifié de la réalité de ce règlement par la production de la copie du chèque du 9 novembre 2015 et du relevé de compte faisant apparaître son débit au 18 novembre 2015.

Aux termes de ce même courrier la SARL Cassiopée s'est prévalue d'une compensation avec une créance détenue à l'encontre de la bailleresse au titre des condamnations prononcées par l'arrêt du 16 décembre 2016 précité à hauteur de 1610 euros.

Elle a par ailleurs joint à ce courrier un chèque de 2803 euros correspondant au solde réclamé au titre des taxes foncières après déduction du règlement de 689 euros déjà effectué et de la compensation invoquée en application de l'article 1347 du code civil.

Elle justifie de l'encaissement effectif du chèque de 2803 euros le 30 avril 2019 par la production de son relevé de compte bancaire.

Il ne peut dès lors être retenu aucun motif grave et légitime de refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a dit que le congé du 10 avril 2019 repose sur des motifs légitimes, débouté la SARL Cassiopée de ses demandes au titre du congé et de l'indemnité d'éviction et condamné la SARL Cassiopée à payer à Mme [Y] [R] [M] la somme de 5 102 euros au titre des taxes foncières impayées.

La SARL Cassiopée ne fournit aucun justificatif ni aucune explication relativement à la somme de 400000 euros qu'elle réclame au titre de l'indemnité d'éviction.

Il sera recouru à une mesure d'expertise.

Sur la demande de la SARL Cassiopée en dommages et intérêts pour manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance :

La société Cassiopée expose qu'à la date de signature du bail, les lieux loués présentaient des infiltrations d'eau importantes constatées contradictoirement et conduisant les parties à insérer au bail une stipulation particulière, imposant au bailleur de réaliser les travaux nécessaires dans les règles de l'art pour mettre fin à ces infiltrations.

Elle reproche à Mme [R] [M] de ne pas avoir respecté cette obligation, se contentant d'effectuer de menus travaux inefficaces à remédier aux désordres, sans entreprendre de démarche sérieuse pour identifier l'origine des infiltrations, et de ne pas avoir déféré à l'ordonnance de référé du 10 juillet 2019 lui imposant de réaliser les travaux décrits par l'expert.

Elle impute à ce manquement un préjudice commercial conséquent, qu'elle chiffre à 271 628 euros selon l'attestation de son expert-comptable, sollicitant subsidiairement l'instauration d'une mesure d'expertise.

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire déposé par M. [B] le 29 mars 2017 que l'expert a constaté la réalité des infiltrations affectant le local loué et identifié leur origine comme provenant :

- pour 40% du solin de la couverture de la verrière, mal mis en oeuvre,

- pour 20% du chéneau en zinc de cette même couverture, non étanche,

- pour 40% de la fenêtre du lot 107, dont les joints étaient dégradés.

L'expert énonce clairement et à plusieurs reprises que la fissure apparue sur la façade à la suite des travaux de démolition du mur porteur effectués par la SARL Cassiopée n'est pas à l'origine des infiltrations, même si elle participe au cheminement de l'eau infiltrée.

La réparation des désordres affectant la fenêtre du lot 107 a été effectuée à l'initiative du syndic en cours d'expertise.

L'expert a décrit précisément et chiffré les travaux à effectuer sur le solin et le chéneau en zinc pour remédier aux infiltrations.

Par ordonnance du 10 juillet 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a enjoint à Mme [Y] [R] [M] d'exécuter et d'achever les travaux nécessaires sur le solin et le chéneau, conformément aux préconisations de l'expert, sous astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà d'un délai de deux mois suivant la signification de la décision, ce délai expirant le 18 septembre 2019.

La SARL Cassiopée a fait constater par huissier de justice la persistance des infiltrations lors d'intempéries survenues les 23 octobre et 23 novembre 2019.

En outre, par jugement du 2 février 2021, le juge de l'exécution saisi par la SARL Cassiopée d'une demande de liquidation de l'astreinte a constaté que Mme [R] [M] avait fait réaliser des travaux selon facture du 26 septembre 2019, consistant en une réfection d'étanchéité par apposition de couches de résine pour un coût de 3137 euros ne correspondaient pas du tout aux travaux préconisés par l'expert, consistant à déposer le solin existant et d'en reconstruire un nouveau, et de démonter le chéneau zinc, reconstruire le caniveau zinc avec changement de l'ossature bois et des bois de charpente attenants pour un coût estimé à 8123 euros.

Les manquements de Mme [R] [M] à son obligation de délivrance légale renforcée par des engagements contractuels exprès ainsi qu'aux injonctions judiciaires sont ainsi parfaitement établis.

S'agissant du préjudice de jouissance allégué par la preneuse, l'expert précise dans son rapport que le local subit des infiltrations à chaque intempérie forte et pluvieuse provenant de l'est et que la preneuse ne peut exercer son activité de restauration lors de ces intempéries.

Le montant de 271628 euros réclamé par la SARL Cassiopée correspond à la perte de chiffre d'affaires évaluée par son expert-comptable sur la base d'un tableau distinguant le nombre de 'beaux jours' et de 'jours mauvais' sur les exercices 2011 à 2019.

La cour relève en premier lieu que le préjudice d'exploitation ne peut être calculé que sur la perte de marge brute, dont l'expert-comptable précise qu'elle s'élève à 164917 euros, et non sur la perte de chiffre d'affaires.

D'autre part, il n'est fourni aucun justificatif ni aucune explication concernant le nombre de 'jours mauvais' retenus par l'expert-comptable, s'élevant entre 19 et 48 jours par an selon les exercices, alors que selon le rapport de l'expert, les infiltrations ne se produisaient que lors des intempéries fortes et pluvieuses provenant de l'est et non pas à chaque jour de mauvais temps.

Il ressort d'ailleurs d'un courrier de l'assureur de la SARL Cassiopée en date du 19 mars 2013 que cette dernière avait déclaré 4 sinistres depuis le 15 mars 2011, alors que sur les exercices 2011 et 2012 le tableau de l'expert-comptable mentionne 47 jours mauvais.

En considération de ces éléments, des procès-verbaux de constats versés aux débats et du caractère très épisodique des fortes intempéries pluvieuses venant de l'est, la perte de chiffre d'affaires TTC subie par la preneuse sera évaluée à 25000 euros, générant une perte de marge brute de l'ordre de 15000 euros, montant qui lui sera alloué à titre de dommages et intérêts.

Sur la demande de la SARL Cassiopée en restitution de l'indu :

La SARL Cassiopée expose que sur la demande de la bailleresse, elle s'est acquittée d'une somme totale de 9216 euros, correspondant au remboursement de la redevance annuelle de 1024 euros payée par la bailleresse au titre du bail précaire de la terrasse.

Ainsi que l'a relevé le premier juge, la désignation des lieux loués figurant au bail comporte, outre le local commercial et un garage au sous-sol, la terrasse d'une superficie d'environ 60 m² régie par un bail précaire consenti à la bailleresse par le syndicat des copropriétaires. Il est précisé que 'les parties conviennent que les lieux loués forment un tout indivisible'.

Le tribunal a retenu à juste titre que le loyer annuel et principal stipulé au bail comportait nécessairement le droit à la jouissance de la terrasse, les lieux loués formant un tout indivisible, et que Mme [R] [M] n'était pas fondée à réclamer un loyer pour la jouissance de la terrasse en sus du loyer fixé au bail.

Les clauses du bail mettant à la charge du preneur le remboursement des charges et prestations de toutes natures afférentes aux locaux loués ne permettent pas à Mme [R] [M] de faire supporter à la SARL Cassiopée une contrepartie déjà incluse dans le loyer principal.

Mme [R] [M] opposant la prescription quinquennale prévue à l'article 2224 du code civil, la demande en restitution ne sera reçue qu'à hauteur de 5120 euros, correspondant aux redevances versées au titre des 5 années précédant l'assignation, le jugement étant réformé sur ce point.

Sur la demande en dommages et intérêts formée par Mme [R] [M] :

Dans le dispositif de ses conclusions, Mme [R] [M] demande à la cour de constater que le local commercial a été laissé dans un état de saleté et de délabrement odieux et inadmissibles et de condamner la société Cassiopée à la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice en résultant.

Le corps de ses conclusions ne comporte aucun développement à l'appui de cette demande ni aucune critique du jugement l'en ayant déboutée, au motif que le procès-verbal de constat d'huissier, produit par la bailleresse, établi plus de six mois après le départ de la locataire ne permettait pas de lui imputer l'état de saleté et de délabrement invoqué.

Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point.

Le présent arrêt ne vidant pas la saisine de la cour, les dépens et demandes en indemnités pour frais irrépétibles seront réservés jusqu'à l'arrêt à intervenir après dépôt du rapport d'expertise.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il déboute Mme [Y] [R] [M] de sa demande en dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

Dit que le congé délivré le 10 avril 2019 par Mme [Y] [R] [M] divorcée [V] à la SARL Cassiopée ouvre droit au profit de la preneuse à une indemnité d'éviction,

Déboute Mme [R] [M] divorcée [V] de sa demande en remboursement des taxes foncières dues au titre des années 2012 à 2018,

Déclare partiellement irrecevable comme prescrite la demande en restitution d'un indu de redevances réglées au titre de la terrasse,

Condamne Mme [Y] [R] [M] à payer à la SARL Cassiopée la somme de 5120 euros au titre de l'indu non prescrit,

Condamne Mme [Y] [R] [M] à payer à la SARL Cassiopée la somme de 15000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice d'exploitation,

Déboute la SARL Cassiopée du surplus de sa demande en dommages et intérêts pour manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance,

Avant dire droit sur le montant de l'indemnité d'éviction due à la SARL Cassiopée :

Commet en qualité d'expert M. [J] [U],

Expert inscrit sur la liste de la cour d'appel d'Aix-en-Provence,

[Adresse 2]

[Localité 3]

[Courriel 5]

avec mission de :

- entendre les parties et leurs avocats en leurs observations, recueillir toutes informations, entendre tous sachants, se faire remettre tous documents utiles à sa mission,

- donner son avis sur le montant de l'indemnité d'éviction due à la SARL Cassiopée ensuite du congé délivré par la bailleresse le 10 avril 2019,

- fournir à cet effet à la juridiction, en tenant compte des activités professionnelles autorisées par le bail et des facilités offertes à celles-ci par la situation des lieux, tous éléments utiles à l'estimation de l'indemnité résultant de la perte du fonds de commerce, indemnité comprenant notamment la valeur marchande du fonds, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que les frais et droits de mutation afférents à la cession d'un fonds de commerce de même importance et du montant du préjudice correspondant au trouble commercial subi par le locataire et tous autres postes de préjudice tels que frais de licenciements ou frais divers sur justificatifs,

- faire toutes observations techniques utiles à la solution du litige,

Dit que l'expert fera connaître sans délai son acceptation et que, dans l'hypothèse d'un refus ou d'un empêchement légitime, il sera aussitôt pourvu à son remplacement,

Dit qu'il sera procédé aux opérations d'expertise en présence des parties ou celles-ci régulièrement convoquées et leurs conseils avisés selon les formes de l'article 160 du code de procédure civile,

Dit que la SARL Cassiopée devra consigner auprès de la régie d'avances et de recettes de la cour la somme de 3500 euros à valoir sur les frais d'expertise au plus tard le 31 décembre 2025,

Dit qu'à défaut de consignation dans le délai prescrit, la désignation de l'expert sera caduque,

Dit que l'expert ne pourra commencer sa mission qu'à compter de l'avis de consignation délivré par le greffe,

Dit qu'après avoir établi un pré-rapport et répondu aux dires des parties, l'expert devra déposer son rapport et en adresser copie à chacune des parties avant le 30 juin 2026, délai de rigueur, sauf prorogation qui serait accordée sur rapport de l'expert à cet effet,

Rappelle que le dépôt par l'expert de son rapport est accompagné de sa demande de rémunération, dont il adresse un exemplaire aux parties par tout moyen permettant d'en établir la réception. S'il y a lieu, celles-ci adressent à l'expert et à la juridiction ou, le cas échéant, au conseiller chargé de contrôler les mesures d'instruction, leurs observations écrites sur cette demande dans un délai de quinze jours à compter de sa réception,

Désigne le conseiller de la mise en état de la chambre pour surveiller les opérations d'expertise et ordonner le remplacement de l'expert en cas de refus ou d'empêchement,

Dit qu'après le dépôt du rapport d'expertise, l'affaire sera audiencée à la diligence du conseiller de la mise en état,

Réserve les dépens et demandes en indemnités pour frais irrépétibles.

Le Greffier, La Présidente,

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site