CA Douai, ch. 8 sect. 1, 20 novembre 2025, n° 24/01427
DOUAI
Arrêt
Autre
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 20/11/2025
N° de MINUTE : 25/833
N° RG 24/01427 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VOND
Jugement (N° 23/02164) rendu le 15 Janvier 2024 par le Juge des contentieux de la protection de [Localité 11]
APPELANTS
Madame [P] [V] épouse [S]
née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 10] - de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5]
Monsieur [J] [S]
né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 9] - de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentés par Me Jérémie Boulaire, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
INTIMÉES
SELARL [F] [Z] es qualité de mandataire ad hoc de la société Evasol, Société par actions simplifiée au capital de 1 395 356,92 €, immatriculée au RCS de [Localité 12] sous le n°494 887 458, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 8]
Défaillante à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 27 juin 2024, remis à personne
SA Cofidis venant aux droits de la SA Groupe Sofemo
[Adresse 7]
[Localité 6]
Représentée par Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 18 juin 2025tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Anne-Sophie Joly
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves benhamou, président de chambre
Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Anne-Sophie Joly, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 18 juin 2025
- FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, selon bon de commande en date du 3 décembre 2009, Mme [P] [V], épouse [S], et M. [J] [S] ont conclu avec la société par action simplifiée EVASOL un contrat afférent à la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque et d'un chauffe-eau pour un montant T.T.C de 27.000 euros, dans le cadre d'un démarchage à domicile.
Une telle installation a été partiellement financée au moyen d'un crédit affecté consenti selon offre préalable en date du 3 décembre 2009 par la SA GROUPE SOFEMO à Mme [P] [V], épouse [S], et M. [J] [S] auprès de la SA GROUPE SOFEMO à hauteur de 25.000 euros, au taux nominal annuel de 4,99%, remboursable en 180 mensualités de 210,70 euros chacune.
Par jugement du 7 septembre 2016, le tribunal de commerce de LYON a clôturé la procédure de liquidation judiciaire de la S.A.S. EVASOL pour insuftisance d'actifs.
Par ordonnance du 5 mai 2022, le président du tribunal de commerce de Lyon a nommé la S.E.L.A.R.L. [F] [Z] es qualité de mandataire ad hoc de la S.A.S. EVASOL.
Par actes d'huissier de justice des 21 et 28 décembre 2022, Mme [P] [V], épouse [S], et M. [J] [S] ont fait assigner en justice la S.A. COFIDIS, venant aux droits de la S.A. GROUPE SOFEMO, et la S.E.L.A.R.L [F] [Z], es qualité de mandataire ad hoc de la S.A.S. EVASOL aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire en date du 15 janvier 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille, a:
- déclaré Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] irrecevables en leurs demandes,
- condamné solidairement Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la S.A. COFIDIS la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] aux dépens de l'instance,
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 26 mars 2024, Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] ont interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.
Vu les dernières conclusions de Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] en date du 26 juin 2024, et tendant à voir:
- INFIRMER le jugement entrepris purement et simplement.
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
- DECLARER les demandes de Monsieur [J] et Madame [P] [S] recevables et bien fondées ;
- PRONONCER la nullité du contrat de vente conclu entre Monsieur [J] et Madame [P] [S] et la société EVASOL ;
- PRONONCER en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre Monsieur [J] et Madame [P] [S] et la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO ;
- DECLARER que la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, a commis une faute dans le déblocage des fonds au préjudice de Monsieur [J] et Madame [P] [S] devant entraîner la privation de sa créance de restitution ;
- CONDAMNER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, à verser à Monsieur [J] et Madame [P] [S] l'intégralité des sommes suivantes au titre des fautes commises :
- 27 000,00 euros correspondant au montant du capital emprunté en raison de la privation de sa créance de restitution ;
- 21 875,60 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par Monsieur [J] et Madame [P] [S] à la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, en exécution du prêt souscrit ;
- 5 000,00 euros au titre du préjudice moral ;
- 6 000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
En tout état de cause,
- PRONONCER la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO ;
- CONDAMNER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO à rembourser à Monsieur [J] et Madame [P] [S] l'ensemble des intérêts versés au titre de l'exécution normale du contrat de prêt jusqu'à parfait paiement ; et LUI ENJOINDRE de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgés desdits intérêts ;
- DEBOUTER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, et la société EVASOL de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes ;
- CONDAMNER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, à supporter les entiers frais et dépens de l'instance.
Vu les dernières conclusions de la SA COFIDIS en date du 11 juin 2025, et tendant à voir:
A titre principal :
- Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.
Y ajoutant :
- Déclarer l'intégralité des demandes de Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] irrecevables.
A titre subsidiaire :
- Déclarer la SA COFIDIS recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions.
Y faisant droit,
- Déclarer Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] mal fondés en leurs demandes fins et conclusions et les en débouter.
A titre plus subsidiaire :
- Condamner COFIDIS au remboursement des seuls intérêts perçus, le capital remboursé par anticipation lui restant définitivement acquis en l'absence de faute et sous réserve que les emprunteurs versent aux débats leurs comptes bancaires afin qu'un calcul puisse être fait sous le contrôle objectif de la cour.
A défaut, débouter Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] de l'intégralité de leurs demandes.
A titre infiniment subsidiaire :
- Condamner COFIDIS à payer à Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] la somme de 1.000 euros de dommages et intérêts en raison du préjudice subi.
- Condamner COFIDIS au remboursement des seuls intérêts perçus, le capital remboursé lui restant définitivement acquis, sous réserve que Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] versent aux débats leurs comptes bancaires afin qu'un calcul puisse être fait sous le contrôle objectif de la cour.
A défaut, débouter Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] de l'intégralité de leurs demandes.
En tout état de cause :
- Condamner solidairement Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.
- Condamner solidairement Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] aux entiers dépens.
Pour sa part la S.E.L.A.R.L. [F] [Z] es qualité de mandataire ad hoc de la S.A.S. EVASOL a été assignée par M. [J] [S] et de Mme [P] [V] épouse [S] devant la cour par acte de commissaire de justice en date du 27 juin 2024 signifié à personne morale. Toutefois subséquemment cet intimé n'a pas constitué avocat ni donc conclu devant la cour.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties qui ont constitué avocat et conclu en cause d'appel, il convient de se référer à leurs écritures respectives.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 juin 2025.
- MOTIFS DE LA COUR:
- Sur la recevabilité de l'action:
' Sur la recevabilité de l'action sur le terrain du dol:
L'article 2224 du code civil prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent pas cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L'article 2224 du code civil précité a vocation à s'appliquer dans le cadre d'une action sur le fondement du dol.
En principe sur le fondement de cette disposition la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été signé.
En application des dispositions de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction résultant de la loi n°2007-308 du 5 mars 2007 et applicable au présent litige, le point de départ de l'action en nullité pour dol est la découverte de celui-ci.
S'agissant de leur action sur le fondement du dol, M. [J] [M] et Mme [P] [V] épouse [M] font valoir qu'ils ont été intentionnellement trompés par le vendeur sur la rentabilité et l'autofinancement de l'installation promis par celui-ci.
Ainsi la découverte du dol doit être considérée comme acquise dès réception de la première facture d'achat d'énergie électrique qui permettait à l'acheteur d'apprécier la rentabilité de l'installation.
La première facture d'achat d'énergie électrique ainsi qu'il ressort des justificatifs produits par les appelants est en date du 25 octobre 2011 (pièce n°7 des époux [M]).
Or, dans le cas présent les époux [M] ont initié leur action par actes de commissaire de justice en date des 21 et 28 décembre 2022.
Dès lors l'action en nullité du contrat de vente sur le fondement du dol et l'action en responsabilité dirigée contre l'établissement bancaire pour participation au dol sont prescrites pour avoir été introduites largement plus de cinq ans après la réception par la consommatrice de la première facture d'électricité.
' Sur la recevabilité de l'action sur le fondement du non respect des dispositions du code de la consommation:
L'article 2224 du code civil précité a vocation à s'appliquer également dans le cadre d'une action tendant à voir constater des irrégularités affectant le bon de commande au regard dispositions du code de la consommation.
En principe la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été signé.
S'agissant de l'action en nullité du contrat de vente fondée pour non-respect des dispositions du code de la consommation, et de l'action en responsabilité contre l'établissement de crédit pour déblocage des fonds sans vérification de la régularité et l'exécution complète du contrat, le point de départ du délai de prescription doit donc être fixé en bonne logique, le jour de la signature du bon de commande soit le 3 décembre 2009. En effet c'est à ce moment précis que les époux [S] étaient en mesure de vérifier la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation même s'ils pouvaient ne pas en appréhender toutes les conséquences juridiques. Ces irrégularités afférentes à l'absence de certaines mentions étaient parfaitement visibles (voir le bon de commande: pièce n°1 de la SA COFIDIS) par des consommateurs normalement avisés et vigilants - qui plus est informés selon toute vraisemblance par les associations de consommateurs. D'évidence la qualité de consommateurs des époux [S] ne suffit pas à elle seule à permettre de considérer qu'ils auraient été dans l'impossibilité de détecter les irrégularités affectant le bon de commande dès sa signature.
Au surplus il convient de souligner que l'argumentation des appelants reviendrait en réalité à rendre imprescriptible une action fondée sur les irrégularités affectant le bon de commande au regard des dispositions du code de la consommation.
Cette solution serait à la fois juridiquement très contestable et génératrice d'une très grave insécurité juridique.
Là encore le bon de commande ayant été signé le 3 décembre 2009, et l'assignation introductive d'instance ayant été délivrée par actes de commissaire de justice en dates des 21 et 28 décembre 2022, l'action en nullité du contrat de vente pour non respect des dispositions du code de la consommation et l'action en responsabilité corrélative contre la SA COFIDIS tout comme l'action en déchéance du prêteur de son droit aux intérêts contractuels encourent également la prescription.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement querellé en ce qu'il déclaré Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] irrecevables en leurs demandes.
- Sur les autres points déférés à la cour dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel:
Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge dans la décision entreprise, a, à bon droit:
' condamné solidairement Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la S.A. COFIDIS la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamné in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] aux dépens de l'instance,
' rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Le jugement querellé sera donc confirmé sur ces points.
- Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel:
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA COFIDIS les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.
Il convient dès lors de condamner in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
En revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] les frais irrépétibles exposés par eux devant la cour et non compris dans les dépens.
Il y a lieu en conséquence de débouter Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
- Sur le surplus des demandes:
Au regard des considérations qui précédent, il y a lieu de débouter les parties du surplus de leurs demandes.
- Sur les dépens d'appel:
Il convient de condamner in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] qui succombent, aux entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,
- Confirme en toutes ses dispositions le jugement querellé,
Y ajoutant,
- Condamne in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,
- Déboute Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
- Condamne in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] aux entiers dépens d'appel.
Le greffier
Anne-Sophie JOLY
Le président
Yves BENHAMOU
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 20/11/2025
N° de MINUTE : 25/833
N° RG 24/01427 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VOND
Jugement (N° 23/02164) rendu le 15 Janvier 2024 par le Juge des contentieux de la protection de [Localité 11]
APPELANTS
Madame [P] [V] épouse [S]
née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 10] - de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5]
Monsieur [J] [S]
né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 9] - de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentés par Me Jérémie Boulaire, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
INTIMÉES
SELARL [F] [Z] es qualité de mandataire ad hoc de la société Evasol, Société par actions simplifiée au capital de 1 395 356,92 €, immatriculée au RCS de [Localité 12] sous le n°494 887 458, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 8]
Défaillante à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 27 juin 2024, remis à personne
SA Cofidis venant aux droits de la SA Groupe Sofemo
[Adresse 7]
[Localité 6]
Représentée par Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 18 juin 2025tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Anne-Sophie Joly
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves benhamou, président de chambre
Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Anne-Sophie Joly, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 18 juin 2025
- FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, selon bon de commande en date du 3 décembre 2009, Mme [P] [V], épouse [S], et M. [J] [S] ont conclu avec la société par action simplifiée EVASOL un contrat afférent à la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque et d'un chauffe-eau pour un montant T.T.C de 27.000 euros, dans le cadre d'un démarchage à domicile.
Une telle installation a été partiellement financée au moyen d'un crédit affecté consenti selon offre préalable en date du 3 décembre 2009 par la SA GROUPE SOFEMO à Mme [P] [V], épouse [S], et M. [J] [S] auprès de la SA GROUPE SOFEMO à hauteur de 25.000 euros, au taux nominal annuel de 4,99%, remboursable en 180 mensualités de 210,70 euros chacune.
Par jugement du 7 septembre 2016, le tribunal de commerce de LYON a clôturé la procédure de liquidation judiciaire de la S.A.S. EVASOL pour insuftisance d'actifs.
Par ordonnance du 5 mai 2022, le président du tribunal de commerce de Lyon a nommé la S.E.L.A.R.L. [F] [Z] es qualité de mandataire ad hoc de la S.A.S. EVASOL.
Par actes d'huissier de justice des 21 et 28 décembre 2022, Mme [P] [V], épouse [S], et M. [J] [S] ont fait assigner en justice la S.A. COFIDIS, venant aux droits de la S.A. GROUPE SOFEMO, et la S.E.L.A.R.L [F] [Z], es qualité de mandataire ad hoc de la S.A.S. EVASOL aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire en date du 15 janvier 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille, a:
- déclaré Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] irrecevables en leurs demandes,
- condamné solidairement Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la S.A. COFIDIS la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] aux dépens de l'instance,
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 26 mars 2024, Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] ont interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.
Vu les dernières conclusions de Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] en date du 26 juin 2024, et tendant à voir:
- INFIRMER le jugement entrepris purement et simplement.
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
- DECLARER les demandes de Monsieur [J] et Madame [P] [S] recevables et bien fondées ;
- PRONONCER la nullité du contrat de vente conclu entre Monsieur [J] et Madame [P] [S] et la société EVASOL ;
- PRONONCER en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre Monsieur [J] et Madame [P] [S] et la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO ;
- DECLARER que la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, a commis une faute dans le déblocage des fonds au préjudice de Monsieur [J] et Madame [P] [S] devant entraîner la privation de sa créance de restitution ;
- CONDAMNER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, à verser à Monsieur [J] et Madame [P] [S] l'intégralité des sommes suivantes au titre des fautes commises :
- 27 000,00 euros correspondant au montant du capital emprunté en raison de la privation de sa créance de restitution ;
- 21 875,60 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par Monsieur [J] et Madame [P] [S] à la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, en exécution du prêt souscrit ;
- 5 000,00 euros au titre du préjudice moral ;
- 6 000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
En tout état de cause,
- PRONONCER la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO ;
- CONDAMNER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO à rembourser à Monsieur [J] et Madame [P] [S] l'ensemble des intérêts versés au titre de l'exécution normale du contrat de prêt jusqu'à parfait paiement ; et LUI ENJOINDRE de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgés desdits intérêts ;
- DEBOUTER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, et la société EVASOL de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes ;
- CONDAMNER la société COFIDIS, venant aux droits de la société GROUPE SOFEMO, à supporter les entiers frais et dépens de l'instance.
Vu les dernières conclusions de la SA COFIDIS en date du 11 juin 2025, et tendant à voir:
A titre principal :
- Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.
Y ajoutant :
- Déclarer l'intégralité des demandes de Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] irrecevables.
A titre subsidiaire :
- Déclarer la SA COFIDIS recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions.
Y faisant droit,
- Déclarer Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] mal fondés en leurs demandes fins et conclusions et les en débouter.
A titre plus subsidiaire :
- Condamner COFIDIS au remboursement des seuls intérêts perçus, le capital remboursé par anticipation lui restant définitivement acquis en l'absence de faute et sous réserve que les emprunteurs versent aux débats leurs comptes bancaires afin qu'un calcul puisse être fait sous le contrôle objectif de la cour.
A défaut, débouter Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] de l'intégralité de leurs demandes.
A titre infiniment subsidiaire :
- Condamner COFIDIS à payer à Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] la somme de 1.000 euros de dommages et intérêts en raison du préjudice subi.
- Condamner COFIDIS au remboursement des seuls intérêts perçus, le capital remboursé lui restant définitivement acquis, sous réserve que Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] versent aux débats leurs comptes bancaires afin qu'un calcul puisse être fait sous le contrôle objectif de la cour.
A défaut, débouter Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] de l'intégralité de leurs demandes.
En tout état de cause :
- Condamner solidairement Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.
- Condamner solidairement Monsieur [J] [S] et de Madame [P] [V] épouse [S] aux entiers dépens.
Pour sa part la S.E.L.A.R.L. [F] [Z] es qualité de mandataire ad hoc de la S.A.S. EVASOL a été assignée par M. [J] [S] et de Mme [P] [V] épouse [S] devant la cour par acte de commissaire de justice en date du 27 juin 2024 signifié à personne morale. Toutefois subséquemment cet intimé n'a pas constitué avocat ni donc conclu devant la cour.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties qui ont constitué avocat et conclu en cause d'appel, il convient de se référer à leurs écritures respectives.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 juin 2025.
- MOTIFS DE LA COUR:
- Sur la recevabilité de l'action:
' Sur la recevabilité de l'action sur le terrain du dol:
L'article 2224 du code civil prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent pas cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L'article 2224 du code civil précité a vocation à s'appliquer dans le cadre d'une action sur le fondement du dol.
En principe sur le fondement de cette disposition la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été signé.
En application des dispositions de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction résultant de la loi n°2007-308 du 5 mars 2007 et applicable au présent litige, le point de départ de l'action en nullité pour dol est la découverte de celui-ci.
S'agissant de leur action sur le fondement du dol, M. [J] [M] et Mme [P] [V] épouse [M] font valoir qu'ils ont été intentionnellement trompés par le vendeur sur la rentabilité et l'autofinancement de l'installation promis par celui-ci.
Ainsi la découverte du dol doit être considérée comme acquise dès réception de la première facture d'achat d'énergie électrique qui permettait à l'acheteur d'apprécier la rentabilité de l'installation.
La première facture d'achat d'énergie électrique ainsi qu'il ressort des justificatifs produits par les appelants est en date du 25 octobre 2011 (pièce n°7 des époux [M]).
Or, dans le cas présent les époux [M] ont initié leur action par actes de commissaire de justice en date des 21 et 28 décembre 2022.
Dès lors l'action en nullité du contrat de vente sur le fondement du dol et l'action en responsabilité dirigée contre l'établissement bancaire pour participation au dol sont prescrites pour avoir été introduites largement plus de cinq ans après la réception par la consommatrice de la première facture d'électricité.
' Sur la recevabilité de l'action sur le fondement du non respect des dispositions du code de la consommation:
L'article 2224 du code civil précité a vocation à s'appliquer également dans le cadre d'une action tendant à voir constater des irrégularités affectant le bon de commande au regard dispositions du code de la consommation.
En principe la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été signé.
S'agissant de l'action en nullité du contrat de vente fondée pour non-respect des dispositions du code de la consommation, et de l'action en responsabilité contre l'établissement de crédit pour déblocage des fonds sans vérification de la régularité et l'exécution complète du contrat, le point de départ du délai de prescription doit donc être fixé en bonne logique, le jour de la signature du bon de commande soit le 3 décembre 2009. En effet c'est à ce moment précis que les époux [S] étaient en mesure de vérifier la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation même s'ils pouvaient ne pas en appréhender toutes les conséquences juridiques. Ces irrégularités afférentes à l'absence de certaines mentions étaient parfaitement visibles (voir le bon de commande: pièce n°1 de la SA COFIDIS) par des consommateurs normalement avisés et vigilants - qui plus est informés selon toute vraisemblance par les associations de consommateurs. D'évidence la qualité de consommateurs des époux [S] ne suffit pas à elle seule à permettre de considérer qu'ils auraient été dans l'impossibilité de détecter les irrégularités affectant le bon de commande dès sa signature.
Au surplus il convient de souligner que l'argumentation des appelants reviendrait en réalité à rendre imprescriptible une action fondée sur les irrégularités affectant le bon de commande au regard des dispositions du code de la consommation.
Cette solution serait à la fois juridiquement très contestable et génératrice d'une très grave insécurité juridique.
Là encore le bon de commande ayant été signé le 3 décembre 2009, et l'assignation introductive d'instance ayant été délivrée par actes de commissaire de justice en dates des 21 et 28 décembre 2022, l'action en nullité du contrat de vente pour non respect des dispositions du code de la consommation et l'action en responsabilité corrélative contre la SA COFIDIS tout comme l'action en déchéance du prêteur de son droit aux intérêts contractuels encourent également la prescription.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement querellé en ce qu'il déclaré Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] irrecevables en leurs demandes.
- Sur les autres points déférés à la cour dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel:
Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge dans la décision entreprise, a, à bon droit:
' condamné solidairement Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la S.A. COFIDIS la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamné in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] aux dépens de l'instance,
' rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Le jugement querellé sera donc confirmé sur ces points.
- Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel:
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA COFIDIS les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.
Il convient dès lors de condamner in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
En revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] les frais irrépétibles exposés par eux devant la cour et non compris dans les dépens.
Il y a lieu en conséquence de débouter Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
- Sur le surplus des demandes:
Au regard des considérations qui précédent, il y a lieu de débouter les parties du surplus de leurs demandes.
- Sur les dépens d'appel:
Il convient de condamner in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] qui succombent, aux entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,
- Confirme en toutes ses dispositions le jugement querellé,
Y ajoutant,
- Condamne in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,
- Déboute Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
- Condamne in solidum Mme [P] [V] épouse [S], et M. [J] [S] aux entiers dépens d'appel.
Le greffier
Anne-Sophie JOLY
Le président
Yves BENHAMOU