CA Aix-en-Provence, ch. 3-3, 20 novembre 2025, n° 24/12597
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-3
ARRÊT AU FOND
DU 20 NOVEMBRE 2025
Rôle N° RG 24/12597 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BN2TT
[O] [X] [E] [G]
[M] [Z] [R] [W] épouse [G]
C/
S.A. MY MONEY BANK
Copie exécutoire délivrée
le : 20/11/25
à :
Me Pierre ARNOUX
Me Joseph MAGNAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MARSEILLE en date du 27 Septembre 2024 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 14/00039.
APPELANTS
Monsieur [O] [X] [E] [G]
né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Pierre ARNOUX, avocat au barreau de MARSEILLE
assisté de Me Arnaud TRIBILLAC de la SCP TRIBILLAC - MAYNARD, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, substitué par Me Pierre ARNOUX de la SELARL PIERRE ARNOUX AVOCAT, avocat au barreau de MARSEILLE,
Madame [M] [Z] [R] [W] épouse [G]
née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Pierre ARNOUX de la SELARL PIERRE ARNOUX AVOCAT, avocat au barreau de MARSEILLE,
assistée de Me Arnaud TRIBILLAC de la SCP TRIBILLAC - MAYNARD, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, substitué par Me Pierre ARNOUX, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
S.A. MY MONEY BANK, nouvelle dénomination de la sté GE MONEY BANK, représentée par ses dirigeants,
dont le siège social est sis [Adresse 10]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me François VERRIELE, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 Septembre 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Mme Claire OUGIER, Présidente de chambre
Mme Magali VINCENT, Conseillère, magistrat rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2025,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
[O] [G] et [M] [G] née [W] ont acquis dix biens immobiliers à l'aide de sept emprunts auprès de six établissements bancaires différents, pour un montant total de 1 968 990 euros.
Pour financer l'acquisition de deux de ces biens immobiliers dans la résidence « [Adresse 5] » à [Localité 8] [Adresse 9] [Localité 3], [O] [G] et [M] [G] née [W] ont accepté le 04.12.2007, deux offres de prêts d'un montant de 168 462 euros et de 197 339 euros émises le 19.11.2007 par la société GE Money Bank.
Ils n'en ont pas honoré toutes les échéances, de sorte que l'établissement prêteur leur a notifié la déchéance du terme le 04.05.2010.
Exposant avoir été victimes d'agissements frauduleux de la société Apollonia, agent immobilier s'étant présenté comme gestionnaire de patrimoine immobilier et intermédiaire en opérations de banque, et de la société FRI (French riviera invest), les ayant conduits à s'endetter de façon inconsidérée, et mettant en cause la responsabilité de plusieurs établissements bancaires, ainsi que de Maître [T] [P] et la SCP Raybaudo [K] [P] Courant Lestrone, notaires intervenus dans le cadre de ces opérations, nombreux particuliers dénonçant des agissements similaires, ont déposé une plainte auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille, qui a ouvert une information judiciaire, notamment, d'escroquerie en bande organisée et faux en écritures publiques.
Une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel a été rendue courant 2022 ; elle a été partiellement confirmée par un arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 15.03.2023. La chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté les pourvois sur cet appel.
[O] [G] et [M] [G] née [W] ont assigné la société Apollonia, et plusieurs établissements bancaires, dont le Crédit immobilier de France et le GE money bank, par actes d'huissier des 28 mai, 03, 04, 05, 08 et 9 juin 2009 en indemnisation des préjudices subis du fait de ces opérations et en déchéance du droit aux intérêts au taux contractuel.
Cette procédure est enregistrée sous le n° de RG 09/7865.
Le juge de la mise en état, par ordonnance en date du 17.06.10, a ordonné le sursis à statuer jusqu'au prononcée d'une décision pénale définitive suite à l'information ouverte devant le juge d'instruction de [Localité 6] et ordonné le retrait de l'affaire du rôle.
Par acte d'huissier du 09.02.2012, la société GE Money Bank a fait assigner [O] [G] et [M] [G] née [W] devant le tribunal de grande instance d'Auch, aux fins de les voir condamner à titre principal, à lui payer la somme de 186 535,92 euros due au titre du prêt n°1020 740850 0 d'un montant de 168 462 euros qu'elle leur a consenti.
Par ordonnance du 20.09.2012, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Auch a constaté l'existence d'un lien de connexité et s'est dessaisi au profit du tribunal de grande instance de Marseille.
La société GE Money Bank a formé contredit le 03.10.2012 et appel devant la cour d'appel d'Agen le 19.10.2012 à l'encontre de cette ordonnance du 20.09.2012.
Statuant sur le contredit la Cour d'appel d'Agen a, par arrêt du 22.05.2013 (n°484/13), déclaré irrecevable le contredit formé par la société GE Money Bank et invité celle-ci à justifier de la formalité de l'article 91 du code de procédure civile dans le délai d'un mois de l'avis qui sera donné par le greffe, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la société GE Money Bank aux dépens.
Par une nouvelle assignation en date du 09.02.2012, la société GE Money Bank a fait assigner [O] [G] et [M] [G] née [W] devant le tribunal de grande instance d'Auch, aux fins de les voir condamner, à titre principal, à lui payer la somme de 218 510,88 euros due au titre du prêt n° 1020 758640 2 d'un montant de 197 339 euros qu'elle leur a consenti.
Par ordonnance en date du 20.09.2012, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Auch a constaté l'existence d'un lien de connexité et s'est dessaisi au profit du tribunal de grande instance de Marseille. La société GE Money bank a déposé un contredit le 03.10.2012 et un appel le 19.10.2012 devant la cour d'appel d'Agen à l'encontre de cette ordonnance du 20.09.2012.
Statuant sur le contredit la Cour a, par arrêt du 22.05.2013, statué dans les mêmes termes que l'arrêt n°484/13. La Cour d'appel d'Agen a, par ordonnance du 15.05.2013, joint les deux procédures ensemble et confirmé, par arrêt du 13.11.2013, les deux ordonnances rendues le 20.09.2012 par le juge de la mise en état d'Auch.
Ces deux procédures sont arrivées au service de l'enrôlement du tribunal de grande instance de Marseille le 12.12.2013 et ont été enregistrées sous les n° 14/40 et n°14/39.
Par une ordonnance en date du 16.10.2014, le juge de la mise en état de céans a ordonné la jonction des affaires respectivement enrôlées sous les n° 14/40 et n° 14/39 sous ce dernier numéro.
Par une ordonnance en date du 03.12.2015, le juge de la mise en état a :
- Dit n'y avoir lieu à jonction avec l'affaire 09/7865,
- Ordonné le sursis à statuer jusqu'à ce qu'une juridiction pénale se soit prononcée définitivement sur les faits objet de l'instruction,
- Dit réserver les dépens.
Par ordonnance du juge de la mise en état en date du 18.10.2018, il a été :
- Prononcé la révocation du sursis à statuer jusqu'à décision pénale définitive prononcé par ordonnance en date du 03 décembre 2015,
- Rejeté la demande formée par [O] [G] et [M] [G] née [W] sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- Renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état et enjoint à [O] [G] et [M] [G] née [W] de conclure au fond pour cette date,
- Condamné in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] aux dépens.
Par ordonnance en date du 15.10.20, le juge de la mise en état a :
- Déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer formée par [O] [G] et [M] [G] née [W],
- Sursis à statuer d'office jusqu'à ce qu'une juridiction pénale se soit prononcée définitivement sur les faits dénoncés,
- Condamné la SA My Money Bank anciennement dénommée GE Money Bank à verser à [O] [G] et [M] [G] née [W] ensemble la somme de 1 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Rejeté la SA My Money Bank anciennement dénommée GE Money Bank de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.
Par un arrêt du 14.10.2021, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Marseille le 15.10.2020 en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer et infirmé pour le surplus.
Statuant à nouveau, la Cour a dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer et débouté la SA My Money Bank de sa demande d'évocation et condamné les époux [G] à verser à cette dernière la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par ordonnance en date du 16.03.2023, le juge de la mise en état a :
- Ecarté des débats les conclusions du conseil de [O] [G] et [M] [G] née [W] transmises par RPVA le 31.01.2023;
- Déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer formée par [O] [G] et [M] [G] née [W] ;
- Renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique et avisé les parties que pour cette date, elles devront avoir conclu au fond afin que l'affaire soit en état d'être clôturée ;
- Condamné solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer la SA My Money Bank, une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de l'incident ;
- Rejeté toutes les autres demandes des parties ;
- Condamné in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] au paiement des dépens de l'incident ;
Par jugement du 27 septembre 2024, le tribunal judiciaire de Marseille a :
- Déclaré irrecevable comme prescrit le moyen tiré de l'exception de nullité des contrats fondée sur le dol ;
- Condamné solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- Ordonné la capitalisation annuelle des intérêts ;
- Condamné la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, à payer à [O] [G] et [M] [G] née [W] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- Rappelé que cette somme produira, de plein droit, intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
- Rappelé que la compensation légale s'opérera de plein droit jusqu'à concurrence des sommes respectivement dues ;
- Rejeté toutes les autres demandes des parties y compris relatives à la demande de déchéance du droit aux intérêts, à l'exécution provisoire et aux frais irrépétibles ;
- Condamné in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] au paiement des dépens de l'instance ;
- Autorisé la distraction des dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 16 octobre 2024, M. et Mme [G] ont interjeté appel de la décision.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 septembre 2025. L'affaire a été appelée à l'audience du 16 septembre 2025 et a été mise en délibéré au 20 novembre 2025.
L'arrêt rendu sera contradictoire, conformément à l'article 467 du code de procédure civile.
PRETENTIONS ET MOYENS
Par conclusions n°2 signifiées par RPVA le 13 mai 2025, M. et Mme [G] demandent à la cour de :
Infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Marseille intervenu entre les parties en ce qu'il a dit :
' Condamne solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
' Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
o 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
o 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
o 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
' Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
o 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
o 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
o 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
' Ordonne la capitalisation annuelle des intérêts ;
' Condamne la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, à payer à [O] [G] et [M] [G] née [W] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
' Rejette toutes les autres demandes des parties y compris relatives à la demande de déchéance du droit aux intérêts, à l'exécution provisoire et aux frais irrépétibles ;
' Condamne in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] au paiement des dépens de l'instance ;
Statuant à nouveau,
Prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de GEMB,
Constater que GEMB ne verse pas aux débats un décompte de sa créance apuré des pénalités et intérêts,
Débouter GEMB de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Condamner GEMB au paiement de la somme de 400 000 euros à titre de dommages-intérêts,
Condamner My Money Bank au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions signifiées par RPVA le 5 juin 2025, la société My Money Bank demande à la cour de :
' Rectifier le jugement rendu le 27 septembre 2024 par le Tribunal Judiciaire de Marseille.
Il est demandé à la Cour de rectifier le paragraphe indiquant :
« Condamne solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My money bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012., »
Par :
« Condamne solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My money bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012. »
' Confirmer le jugement rendu le 27 septembre 2024 par le Tribunal judiciaire de Marseille, et Infirmer les chefs de celui-ci ayant :
' Condamné la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, à payer à [O] [G] et [M] [G] née [W] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
' Rappelé que cette somme produira, de plein droit, intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
' Rappelé que la compensation légale s'opérera de plein droit jusqu'à concurrence des sommes respectivement dues ;
' Et statuant à nouveau, ce faisant :
' Débouter les époux [G] de leur demande de nullité des prêts comme irrecevable et infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur demande de déchéance des intérêts conventionnels au titre d'un prétendu non-respect de formalisme des articles L.312-7 et L.312-10 du Code de la consommation comme irrecevable et infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur demande de déchéance des intérêts conventionnels au titre d'une prétendue irrégularité du TEG comme irrecevable et infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur demande de condamnation de la Sté My Money Bank à leur payer des dommages et intérêts comme infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur contestation du quantum des créances de la Sté My Money Bank comme infondée ;
' Débouter les époux [G] de l'ensemble de leurs fins, prétentions et demandes ;
' Condamner solidairement M. [O] [G] et Mme [M] [W] épouse [G] à payer à la Sté My Money Bank :
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
' Ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du Code civil ;
' Condamner in solidum M. [O] [G] et Mme [M] [W] épouse [G] à payer à la Sté My money bank la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
' Les condamner in solidum aux dépens qui seront recouvrés par Me Joseph Magnan dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est fait renvoi aux dernières écritures déposées pour l'exposé des moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'application du code de la consommation et la déchéance du droit aux intérêts
Les appelants soutiennent qu'ils peuvent bénéficier des dispositions du code de la consommation puisqu'ils ont la qualité de consommateur et que les prêts visent ces dispositions, la banque s'est donc soumise volontairement à ce statut. Ils font valoir que leur demande à ce titre n'est pas prescrite puisqu'ils ont assigné la banque dès 2019 sur le fondement du code de la consommation.
Ainsi, au visa de l'article L312 ' 10 ancien du code de la consommation, ils font valoir que le délai de rétractation n'a pas été respecté, que la rémunération du mandataire la société FRI n'est pas mentionnée dans l'offre de prêt, rendant ainsi le TEG erroné. Ils sollicitent donc la déchéance du droit aux intérêts.
En réplique, la banque soutient que la Cour de cassation a jugé qu'en tant que loueur meublé professionnel, un emprunteur n'est pas un consommateur pouvant bénéficier des dispositions du code de la consommation. Elle fait valoir que la référence dans l'acte de prêt à certaines dispositions du code de la consommation ne permet pas d'induire une soumission volontaire à toutes les dispositions du code.
L'article L312-3 du Code de la consommation, dans sa version applicable au litige dispose que : « Sont exclus du champ d'application du présent chapitre [relatif au crédit immobilier]:
1° Les prêts consentis à des personnes morales de droit public ;
2° Ceux destinés, sous quelque forme que ce soit, à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance ;
3° Les opérations de crédit différé régies par la loi n° 52-332 du 24 mars 1952 relative aux entreprises de crédit différé lorsqu'elles ne sont pas associées à un crédit d'anticipation. »
Il a été jugé que si les parties à un contrat peuvent se soumettre volontairement au code de la consommation dans une situation où elles n'y étaient pas assujetties, c'est à la condition que cette volonté commune soit dépourvue de toute équivoque (1è Civ., 9 mars 2022, n°20-20.390 ; 23 janvier 2019, n°17-23.919, 17-23.920, 17-23.921 et 17-23.922).
Les seules références à des articles du code de la consommation, issues de modèles standardisés de contrats, ne constituent pas une manifestation de volonté suffisamment claire et dépourvue d'ambiguïté de la banque de soumettre le contrat aux dispositions de ce code en parfaite connaissance de cause.
En l'espèce, il est acquis et non contesté que les contrats de prêt conclus ne relevaient pas par nature du champ d'application du code de la consommation, pour porter sur des opérations d'achats immobiliers multiples et d'envergure à but de location meublée caractérisant une activité professionnelle. En effet, M. et Mme [G] ont acquis dix biens immobiliers pour un montant total en principal de 1 968 990 euros, destinés à la location, dont les loyers acquis cumulés devaient leur procurer la somme minimale de 26 000 euros au titre des loyers annuels. M. [G] était ainsi inscrit au registre des commerces et des sociétés comme exerçant l'activité de location de logements à compter du 31 décembre 2007.
Il est exact que les contrats de prêt souscrits auprès de GE Money bank faisaient référence aux dispositions du code de la consommation. Toutefois, ces seules mentions standardisées ne sauraient manifester, en l'absence de stipulation supplémentaire spécifique en ce sens, une intention non équivoque de la part de la banque de les soumettre à ces dispositions et ce, d'autant plus qu'il est établi que cette dernière n'avait pas connaissance de l'empilement des crédits souscrits par les emprunteurs. Ainsi, dès lors que la banque n'avait pas été informée du cumul de crédits sollicités simultanément ni de leur ampleur, ni du fait qu'ils avaient vocation à participer à une activité de loueur de meublés professionnel, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que la banque n'a pas pu accepter de façon totalement éclairée d'appliquer le Code de la consommation à des emprunteurs qui n'en relevaient pas.
Ainsi, en l'absence de soumission volontaire non équivoque des parties à ces dispositions, elles ne sauraient recevoir application aux prêts litigieux et les consorts [G] seront donc déboutés de leur demande de déchéance des intérêts. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande en paiement de la banque
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2, la banque demande la condamnation solidaire des emprunteurs au paiement sa créance ventilée comme suit selon le décompte produit (pièce 11 A):
Principal : 161 014,90 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,75 %
Intérêts : 14 249,98 euros assortie des intérêts au taux légal
Accessoires : 11 271,04 euros avec intérêts au taux légal
Au titre du prêt n°1020 740 850 0, la banque demande la condamnation solidaire des emprunteurs au paiement sa créance ventilée comme suit selon le décompte produit (pièce 11 B) :
Principal : 188 615,19 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,75 %
Intérêts : 16 692,63 euros assortie des intérêts au taux légal
Accessoires : 13 203,06 euros assortie des intérêts au taux légal
Il sera fait droit à ses demandes et le jugement sera confirmé sous réserve des erreurs matérielles relatives au taux d'intérêt et aux références des prêts qui seront rectifiées. La capitalisation des intérêts sera confirmée.
Sur la responsabilité de la banque
Sur ses fautes personnelles
Les époux [G] font valoir que la banque a engagé sa responsabilité du fait de ses propres fautes d'abord. La fiche de demande de prêt n'est pas renseignée correctement et une seule a été émise alors que deux offres de prêt ont été conclues. En outre, les mentions sur les fiches d'information relatives aux revenus des emprunteurs et leur patrimoine sont différentes alors qu'elles sont toutes deux datées du même jour.
La banque réplique qu'elle a reçu un dossier complet de la part des emprunteurs, qu'elle l'a examiné et qu'elle pouvait se fier aux informations transmises par son mandataire. Elle précise qu'elle a reçu une fiche intitulée « informations fournies par vous et prise en considération pour l'acceptation de ce crédit » signée par les époux [G] et que les informations fournies étaient corroborées par les pièces justificatives.
En l'espèce, il est effectivement produit une demande de prêt immobilier remplie sommairement par M. et Mme [G]. Néanmoins, ils n'expliquent pas en quoi la banque qui a fait deux offres de prêt à la suite de cette demande, serait fautive, dès lors que par la suite, ils vont remplir deux fiches d'informations relatives à leur situation complète. En effet, il ressort de celles-ci que les différences relevées par ceux-ci résultent simplement du fait que dans la deuxième fiche relative au second prêt 758 640 2, il est tenu compte dans les charges immobilières et dans le patrimoine, du 1er prêt 740 850 0. Il sera par ailleurs rappelé que ces deux fiches datées du 19 novembre 2007 ont été signées par les emprunteurs.
Il n'est donc pas rapporté la preuve d'une faute de la banque au titre de la régularité des prêts.
Sur le devoir de mise en garde
Les appelants font valoir que le banquier est tenu à l'égard de ses clients, emprunteur profane, d'un devoir de mise en garde, en cas de risque d'endettement excessif de l'emprunteur. Ils soutiennent que leur demande à ce titre n'est pas prescrite, compte tenu de l'assignation qu'ils ont délivrée au mois de juin 2009 et qui a interrompu la prescription.
En réplique, la banque soutient que cette demande est prescrite au motif que le délai court à compter du jour du premier incident de paiement soit le 16 février 2010 et que les appelants n'ont formé cette demande pour la première fois que par conclusions du 28 février 2019.
Il a été jugé qu'il résulte de la combinaison des articles 2224 du code civil et L.110-4 du code de commerce que le délai de prescription de l'action en indemnisation du manquement d'une banque à son obligation de mettre en garde un emprunteur non averti sur le risque d'endettement excessif né de l'octroi d'un prêt commence à courir, non à la date de conclusion du contrat de prêt, mais à la date d'exigibilité des sommes au paiement desquelles l'emprunteur n'est pas en mesure de faire face. (Civ 1e, 18 septembre 2024 n°23-12.602)
En l'espèce, il n'est pas contesté que le premier incident de paiement est intervenu le 15 février 2010 et que la déchéance du terme est intervenue le 4 mai 2010 (pièces 9 A et 9 B) date à laquelle les sommes sont donc devenues exigibles. Cette date constitue donc le point de départ de la prescription de l'action à l'égard de la banque, celui-ci expirant donc le 4 mai 2015.
M. et Mme [G] ont assigné la société GE Money Bank avec d'autres banques devant le tribunal de grande instance par exploit d'huissier du 28 mai 2009. Or, il apparaît que dans ladite assignation, les époux [G] ne formulent aucune demande au titre du manquement de la banque à son devoir de mise en garde, mais uniquement au titre des fautes commises par la société Apollonia. Il n'est pas davantage rapporté la preuve qu'ils aient soulevé ce moyen avant les conclusions du 28 février 2019 soit bien après l'expiration du délai de prescription.
En conséquence, la demande formée par M. et Mme [G] au titre de la responsabilité de la banque fondée sur son devoir de mise en garde est prescrite.
Sur la responsabilité du fait des préposés
M. et Mme [G] soutiennent que compte tenu des agissements des préposés de la banque et de leurs manquements dans la conclusion du contrat de prêt, la banque a engagé sa responsabilité.
La banque soutient quant à elle, que le juge d'instruction a exclu toute faute de la part des préposés des banques et plus particulièrement ceux, de la société My money Bank.
En l'espèce, comme le relève le premier juge, les demandeurs n'ont pas jugé utile d'expliquer les fautes commises par les préposés de la banque et ce, alors qu'aucune faute pénale n'a été retenue à leur encontre.
Dès lors, il y a lieu de rejeter leur demande fondée sur ce moyen.
Sur la responsabilité de la banque au titre des agissements d'Apollonia
M. et Mme [G] soutiennent que la société Apollonia a accompli de nombreux actes juridiques au nom et pour le compte des banques et doit donc être considéré comme leur mandataire en application de l'article 1984 du Code civil. La responsabilité de la banque est donc engagée au titre des fautes commises par Apollonia.
La banque soutient qu'elle n'a jamais eu aucune relation avec la société Apollonia, ce qu'a retenu plusieurs juridictions, notamment la Cour de cassation, ainsi que le juge d'instruction. Son intermédiaire en opérations de banque était seulement la société FRI. Ainsi elle ne peut être tenue responsable de ses agissements.
Selon l'article 1984 du code civil, le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom.
Le contrat ne se forme que par l'acceptation du mandataire.
En l'espèce, il est établi par l'ensemble des pièces et notamment pénales que My money Bank n'a jamais eu aucune relation avec la société Apollonia. Aucun contrat de mandat n'a d'ailleurs été signé entre elles et elle n'a jamais été informée du fait que la société FRI avait totalement délégué son activité à celle-ci.
Dès lors, la banque ne saurait être responsable d'une société tierce avec laquelle elle n'a jamais eu de relations contractuelles et dont elle ne connaissait pas l'existence. Le moyen de ce chef sera rejeté.
Sur la responsabilité du fait des agissements de la FRI
Les époux [G] soutiennent que la banque a reconnu que son intermédiaire en opérations de banque la société FRI, avait commis des fautes, et elle engage donc sa responsabilité du fait de son mandataire au visa de l'article L341 ' 4 du code monétaire et financier.
En réplique, la banque soutient qu'elle n'engage sa responsabilité que dans la limite du mandat. Or, son mandataire est sorti du mandat en lui présentant des dossiers dont elle taisait qu'ils avaient été constitués par la société Apollonia.
L'article L341-4 du code monétaire et financier dans sa version applicable au litige prévoit :
I. - Les personnes mentionnées à l'article L. 341-3 peuvent mandater des personnes physiques afin d'exercer pour leur compte une activité de démarchage bancaire ou financier. Les établissements et entreprises ou institutions mentionnés au 1° de cet article peuvent également mandater des personnes morales à cet effet. Dans ce cas, celles-ci peuvent à leur tour mandater des personnes physiques afin d'exercer cette activité pour leur compte.
II. - Dans tous les cas, le mandat est nominatif. Il mentionne la nature des produits et services qui en sont l'objet ainsi que les conditions dans lesquelles l'activité de démarchage peut être exercée. Sa durée est limitée à deux ans. Il peut être renouvelé. Une même personne physique ou morale peut recevoir des mandats émanant de plusieurs entreprises, institutions ou établissements mentionnés au 1° de l'article L. 341-3. Cette personne informe alors l'ensemble de ses mandants des mandats ainsi détenus.
III. - Les personnes morales mentionnées à l'article L. 341-3 et celles mandatées en application du I du présent article sont civilement responsables du fait des démarcheurs, agissant en cette qualité, auxquels elles ont délivré un mandat. Les personnes morales mentionnées à l'article L. 341-3 demeurent responsables du fait des salariés des personnes morales qu'elles ont mandatées, dans la limite du mandat.
(...)
Il a été jugé qu'il se déduit des travaux préparatoires de la loi n°2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière et de l'article L. 341-4 III précité que doit être interprété en ce sens qu'il déroge au droit commun du mandat tel qu'il résulte désormais de l'arrêt de chambre mixte du 29 octobre 2021, selon lequel, si le mandant est, en vertu de l'article 1998 du code civil, contractuellement responsable des dommages subis du fait de l'inexécution des engagements contractés par son mandataire dans les limites du mandat conféré, les man'uvres dolosives du mandataire, dans l'exercice de son mandat, n'engagent la responsabilité du mandant que s'il a personnellement commis une faute, qu'il incombe à la victime d'établir.
Il en résulte que l'établissement de crédit est responsable de plein droit du fait des démarcheurs, agissant en cette qualité, auxquels il a donné mandat, sans pouvoir s'exonérer par la preuve d'une absence de faute. (Civ 1re 7 mai 2025, n°23-13.923)
En l'espèce, My money bank produit une convention de collaboration qu'elle a conclu avec la société FRI (French Riviera Invest) étant précisé qu'elle n'est pas datée. Néanmoins, le courrier de résiliation (pièce 13) du 14 avril 2018 produit par la banque permet de la dater au 1er août 2006. Ainsi, la banque ne conteste pas que la société FRI était son mandataire à l'époque de la souscription des prêts et qu'en vertu de la convention produite, elle agissait en qualité de démarcheur et d'intermédiaire en opérations de banque pour son compte.
Il ressort de cette convention que la mission confiée à la société FRI était de dispenser à la clientèle prospectée toutes informations sur les caractéristiques des produits, d'analyser et de sélectionner les clients et de transmettre à GE Money Bank les demandes de crédit et les justificatifs.
La lecture des pièces pénales produites par M. et Mme [G] et notamment l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel du juge d'instruction du tribunal judiciaire de Marseille permet de caractériser l'intervention de la société FRI dont le dirigeant était M. [H], dans l'octroi des prêts. Ce dernier indiquait ainsi lors de ses auditions, que son rôle consistait de fait, uniquement à se faire le relais d'Apollonia auprès des établissements bancaires désignés par celle-ci, établissements auxquels il transmettait des dossiers déjà montés, sans jamais négocier le taux d'intérêt applicable, insistant seulement sur la nécessité d'une réponse rapide. Il avait été ainsi une « courroie de transmission » entre la société Apollonia et les organismes de crédit. La société FRI était rémunérée selon un pourcentage par les banques et en rétrocédait ensuite une partie à la société Apollonia.
Il résulte de l'expertise comptable effectuée à la demande du magistrat instructeur que 689 des emprunts contractés par les clients d'Apollonia portant sur 929 lots et représentant un montant total d'investissement de 183 368 753 euros ont été conclus par l'intermédiaire de la société FRI et aucune des parties ne conteste que les prêts souscrits par les époux [G] auprès de My Money Bank en font partie.
Or, contrairement à ce qu'elle allègue, la mandante ne rapporte pas la preuve que son mandataire a agi en une autre qualité que celle de démarcheur et hors du cadre de son mandat en lui transmettant la demande de crédit des époux [G]. En effet, la seule transgression de l'interdiction de sous-traiter l'exécution du mandat à un tiers stipulée par l'article 8 de la convention de collaboration, si elle est bien fautive, ne caractérise pas que le mandataire ait agi en dehors de son mandat d'intermédiaire entre les emprunteurs et la banque.
La société FRI qui a ainsi fait preuve d'un manquement aux règles professionnelles et qui a plus précisément manqué à sa mission, notamment en ne dispensant aux emprunteurs aucune information de nature à les éclairer sur les caractéristiques précises des produits, dès lors qu'il ne les a jamais rencontrés, a commis une faute délictuelle indéniable, nonobstant l'absence de faute pénale qui a été commise dans le cadre de l'exécution du mandat. La réalité des fautes de son mandataire n'est d'ailleurs pas contestée par la banque qui les reconnaît expressément.
Dès lors, en application de l'article précité, nonobstant l'absence de toute faute personnelle de sa part, la banque est responsable de plein droit des agissements de son mandataire, qui n'était investi que du pouvoir d'exécuter, dans le cadre d'une convention de collaboration, des actes matériels précisément énumérés, préparatoires à la décision de contracter, à l'exclusion de tout acte juridique, et que son activité était soumise à l'audit du mandant, c'est à dire à un contrôle systématisé, organisé et suivi.
En conséquence, les consorts [G] sont fondés à engager la responsabilité de My Money Bank à leur égard.
Le mandant est ainsi responsable contractuellement des dommages subis aux tiers du fait des fautes commises par son mandataire. Le préjudice subi par M. et Mme [G] doit s'apprécier en une perte de chance de ne pas avoir contracter le prêt auprès de My Money Bank si la société FRI avait respecté ses obligations.
La perte de chance se définit comme « la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.» Ainsi, la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
Toutefois, la chance perdue ne doit pas être hypothétique, au contraire elle doit être réelle, mais aussi sérieuse. Ainsi, il appartient à celui qui entend obtenir réparation au titre de la perte de chance de démontrer la réalité et le sérieux de la chance perdue en établissant que la survenance de l'événement dont il a été privé était certaine avant la survenance du fait dommageable. (Civ 2e, 11 mars 2010, n°09-12.451)
En l'espèce, il apparaît que les prêts souscrits par M. et Mme [G] auprès de My money bank sont des prêts relativement usuels pour un achat immobilier en VEFA dans le cadre d'une opération de défiscalisation. Ils ne sont devenus une mauvaise opération que par le fait que les emprunteurs ont souscrit de nombreux autres prêts immobiliers en inadéquation avec leur capacité de remboursement et les rendements escomptés. Toutefois, comme le relève le magistrat instructeur dans son ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel devant le tribunal correctionnel, c'est dans l'appréhension globale de la situation des investisseurs, en y incluant les prêts sollicités et accordés directement par la société Apollonia ou son propre réseau commercial que se révélait l'escroquerie aggravée. Or, la société FRI et son dirigeant n'ayant pas accès à l'ensemble des prêts sollicités et accordés, il n'avait pas connaissance de ce montage financier désastreux. Il est donc indéniable que les informations qu'elle aurait communiquées aux emprunteurs n'auraient pu porter que sur les caractéristiques des deux prêts de My Money Bank. Or, les emprunteurs avaient eux, connaissance de la multiplicité des prêts et ont tout de même contracté ceux-ci. Dès lors, il peut en être déduit que la chance de ne pas contracter les prêts My money Bank pour les époux [G] est inexistante.
En conséquence, M. et Mme [G] seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts à l'égard de My money bank et le jugement infirmé.
Sur les demandes annexes
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.
Les dépens d'appel seront mis à la charge in solidum de M. et Mme [G].
Il n'y a pas lieu faire droit aux demandes au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rectifie le jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 27 septembre 2024 comme suit :
« Condamne solidairement M. [O] [G] et Mme [M] [W] épouse [G] à payer à la Sté My Money Bank :
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012. »
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 27 septembre 2024, sauf en ce qu'il a condamné la société My money bank à payer la somme de 10 000 euros à M. et Mme [G],
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare irrecevable la demande de M. [O] [G] et de Mme [M] [W] épouse [G] au titre du devoir de mise en garde de My Money bank ;
Déboute M. [O] [G] et de Mme [M] [W] épouse [G] de leur demande de dommages et intérêts à l'égard de la SA My money bank ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions au titre des frais irrépétibles ;
Condamne in solidum M. [O] [G] et de Mme [M] [W] épouse [G] aux dépens d'appel distraits au profit de Me Magnan, avocat.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Chambre 3-3
ARRÊT AU FOND
DU 20 NOVEMBRE 2025
Rôle N° RG 24/12597 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BN2TT
[O] [X] [E] [G]
[M] [Z] [R] [W] épouse [G]
C/
S.A. MY MONEY BANK
Copie exécutoire délivrée
le : 20/11/25
à :
Me Pierre ARNOUX
Me Joseph MAGNAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MARSEILLE en date du 27 Septembre 2024 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 14/00039.
APPELANTS
Monsieur [O] [X] [E] [G]
né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Pierre ARNOUX, avocat au barreau de MARSEILLE
assisté de Me Arnaud TRIBILLAC de la SCP TRIBILLAC - MAYNARD, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, substitué par Me Pierre ARNOUX de la SELARL PIERRE ARNOUX AVOCAT, avocat au barreau de MARSEILLE,
Madame [M] [Z] [R] [W] épouse [G]
née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Pierre ARNOUX de la SELARL PIERRE ARNOUX AVOCAT, avocat au barreau de MARSEILLE,
assistée de Me Arnaud TRIBILLAC de la SCP TRIBILLAC - MAYNARD, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, substitué par Me Pierre ARNOUX, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
S.A. MY MONEY BANK, nouvelle dénomination de la sté GE MONEY BANK, représentée par ses dirigeants,
dont le siège social est sis [Adresse 10]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me François VERRIELE, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 Septembre 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Mme Claire OUGIER, Présidente de chambre
Mme Magali VINCENT, Conseillère, magistrat rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Novembre 2025,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
[O] [G] et [M] [G] née [W] ont acquis dix biens immobiliers à l'aide de sept emprunts auprès de six établissements bancaires différents, pour un montant total de 1 968 990 euros.
Pour financer l'acquisition de deux de ces biens immobiliers dans la résidence « [Adresse 5] » à [Localité 8] [Adresse 9] [Localité 3], [O] [G] et [M] [G] née [W] ont accepté le 04.12.2007, deux offres de prêts d'un montant de 168 462 euros et de 197 339 euros émises le 19.11.2007 par la société GE Money Bank.
Ils n'en ont pas honoré toutes les échéances, de sorte que l'établissement prêteur leur a notifié la déchéance du terme le 04.05.2010.
Exposant avoir été victimes d'agissements frauduleux de la société Apollonia, agent immobilier s'étant présenté comme gestionnaire de patrimoine immobilier et intermédiaire en opérations de banque, et de la société FRI (French riviera invest), les ayant conduits à s'endetter de façon inconsidérée, et mettant en cause la responsabilité de plusieurs établissements bancaires, ainsi que de Maître [T] [P] et la SCP Raybaudo [K] [P] Courant Lestrone, notaires intervenus dans le cadre de ces opérations, nombreux particuliers dénonçant des agissements similaires, ont déposé une plainte auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille, qui a ouvert une information judiciaire, notamment, d'escroquerie en bande organisée et faux en écritures publiques.
Une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel a été rendue courant 2022 ; elle a été partiellement confirmée par un arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 15.03.2023. La chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté les pourvois sur cet appel.
[O] [G] et [M] [G] née [W] ont assigné la société Apollonia, et plusieurs établissements bancaires, dont le Crédit immobilier de France et le GE money bank, par actes d'huissier des 28 mai, 03, 04, 05, 08 et 9 juin 2009 en indemnisation des préjudices subis du fait de ces opérations et en déchéance du droit aux intérêts au taux contractuel.
Cette procédure est enregistrée sous le n° de RG 09/7865.
Le juge de la mise en état, par ordonnance en date du 17.06.10, a ordonné le sursis à statuer jusqu'au prononcée d'une décision pénale définitive suite à l'information ouverte devant le juge d'instruction de [Localité 6] et ordonné le retrait de l'affaire du rôle.
Par acte d'huissier du 09.02.2012, la société GE Money Bank a fait assigner [O] [G] et [M] [G] née [W] devant le tribunal de grande instance d'Auch, aux fins de les voir condamner à titre principal, à lui payer la somme de 186 535,92 euros due au titre du prêt n°1020 740850 0 d'un montant de 168 462 euros qu'elle leur a consenti.
Par ordonnance du 20.09.2012, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Auch a constaté l'existence d'un lien de connexité et s'est dessaisi au profit du tribunal de grande instance de Marseille.
La société GE Money Bank a formé contredit le 03.10.2012 et appel devant la cour d'appel d'Agen le 19.10.2012 à l'encontre de cette ordonnance du 20.09.2012.
Statuant sur le contredit la Cour d'appel d'Agen a, par arrêt du 22.05.2013 (n°484/13), déclaré irrecevable le contredit formé par la société GE Money Bank et invité celle-ci à justifier de la formalité de l'article 91 du code de procédure civile dans le délai d'un mois de l'avis qui sera donné par le greffe, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la société GE Money Bank aux dépens.
Par une nouvelle assignation en date du 09.02.2012, la société GE Money Bank a fait assigner [O] [G] et [M] [G] née [W] devant le tribunal de grande instance d'Auch, aux fins de les voir condamner, à titre principal, à lui payer la somme de 218 510,88 euros due au titre du prêt n° 1020 758640 2 d'un montant de 197 339 euros qu'elle leur a consenti.
Par ordonnance en date du 20.09.2012, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Auch a constaté l'existence d'un lien de connexité et s'est dessaisi au profit du tribunal de grande instance de Marseille. La société GE Money bank a déposé un contredit le 03.10.2012 et un appel le 19.10.2012 devant la cour d'appel d'Agen à l'encontre de cette ordonnance du 20.09.2012.
Statuant sur le contredit la Cour a, par arrêt du 22.05.2013, statué dans les mêmes termes que l'arrêt n°484/13. La Cour d'appel d'Agen a, par ordonnance du 15.05.2013, joint les deux procédures ensemble et confirmé, par arrêt du 13.11.2013, les deux ordonnances rendues le 20.09.2012 par le juge de la mise en état d'Auch.
Ces deux procédures sont arrivées au service de l'enrôlement du tribunal de grande instance de Marseille le 12.12.2013 et ont été enregistrées sous les n° 14/40 et n°14/39.
Par une ordonnance en date du 16.10.2014, le juge de la mise en état de céans a ordonné la jonction des affaires respectivement enrôlées sous les n° 14/40 et n° 14/39 sous ce dernier numéro.
Par une ordonnance en date du 03.12.2015, le juge de la mise en état a :
- Dit n'y avoir lieu à jonction avec l'affaire 09/7865,
- Ordonné le sursis à statuer jusqu'à ce qu'une juridiction pénale se soit prononcée définitivement sur les faits objet de l'instruction,
- Dit réserver les dépens.
Par ordonnance du juge de la mise en état en date du 18.10.2018, il a été :
- Prononcé la révocation du sursis à statuer jusqu'à décision pénale définitive prononcé par ordonnance en date du 03 décembre 2015,
- Rejeté la demande formée par [O] [G] et [M] [G] née [W] sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- Renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état et enjoint à [O] [G] et [M] [G] née [W] de conclure au fond pour cette date,
- Condamné in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] aux dépens.
Par ordonnance en date du 15.10.20, le juge de la mise en état a :
- Déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer formée par [O] [G] et [M] [G] née [W],
- Sursis à statuer d'office jusqu'à ce qu'une juridiction pénale se soit prononcée définitivement sur les faits dénoncés,
- Condamné la SA My Money Bank anciennement dénommée GE Money Bank à verser à [O] [G] et [M] [G] née [W] ensemble la somme de 1 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Rejeté la SA My Money Bank anciennement dénommée GE Money Bank de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.
Par un arrêt du 14.10.2021, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Marseille le 15.10.2020 en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer et infirmé pour le surplus.
Statuant à nouveau, la Cour a dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer et débouté la SA My Money Bank de sa demande d'évocation et condamné les époux [G] à verser à cette dernière la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par ordonnance en date du 16.03.2023, le juge de la mise en état a :
- Ecarté des débats les conclusions du conseil de [O] [G] et [M] [G] née [W] transmises par RPVA le 31.01.2023;
- Déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer formée par [O] [G] et [M] [G] née [W] ;
- Renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique et avisé les parties que pour cette date, elles devront avoir conclu au fond afin que l'affaire soit en état d'être clôturée ;
- Condamné solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer la SA My Money Bank, une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de l'incident ;
- Rejeté toutes les autres demandes des parties ;
- Condamné in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] au paiement des dépens de l'incident ;
Par jugement du 27 septembre 2024, le tribunal judiciaire de Marseille a :
- Déclaré irrecevable comme prescrit le moyen tiré de l'exception de nullité des contrats fondée sur le dol ;
- Condamné solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- Ordonné la capitalisation annuelle des intérêts ;
- Condamné la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, à payer à [O] [G] et [M] [G] née [W] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- Rappelé que cette somme produira, de plein droit, intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
- Rappelé que la compensation légale s'opérera de plein droit jusqu'à concurrence des sommes respectivement dues ;
- Rejeté toutes les autres demandes des parties y compris relatives à la demande de déchéance du droit aux intérêts, à l'exécution provisoire et aux frais irrépétibles ;
- Condamné in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] au paiement des dépens de l'instance ;
- Autorisé la distraction des dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 16 octobre 2024, M. et Mme [G] ont interjeté appel de la décision.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 septembre 2025. L'affaire a été appelée à l'audience du 16 septembre 2025 et a été mise en délibéré au 20 novembre 2025.
L'arrêt rendu sera contradictoire, conformément à l'article 467 du code de procédure civile.
PRETENTIONS ET MOYENS
Par conclusions n°2 signifiées par RPVA le 13 mai 2025, M. et Mme [G] demandent à la cour de :
Infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Marseille intervenu entre les parties en ce qu'il a dit :
' Condamne solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
' Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
o 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
o 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
o 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
' Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
o 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
o 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
o 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
' Ordonne la capitalisation annuelle des intérêts ;
' Condamne la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, à payer à [O] [G] et [M] [G] née [W] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
' Rejette toutes les autres demandes des parties y compris relatives à la demande de déchéance du droit aux intérêts, à l'exécution provisoire et aux frais irrépétibles ;
' Condamne in solidum [O] [G] et [M] [G] née [W] au paiement des dépens de l'instance ;
Statuant à nouveau,
Prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de GEMB,
Constater que GEMB ne verse pas aux débats un décompte de sa créance apuré des pénalités et intérêts,
Débouter GEMB de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Condamner GEMB au paiement de la somme de 400 000 euros à titre de dommages-intérêts,
Condamner My Money Bank au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions signifiées par RPVA le 5 juin 2025, la société My Money Bank demande à la cour de :
' Rectifier le jugement rendu le 27 septembre 2024 par le Tribunal Judiciaire de Marseille.
Il est demandé à la Cour de rectifier le paragraphe indiquant :
« Condamne solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My money bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 euros sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012., »
Par :
« Condamne solidairement [O] [G] et [M] [G] née [W] à payer à la société My money bank, anciennement dénommée GE Money Bank, les sommes suivantes :
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012. »
' Confirmer le jugement rendu le 27 septembre 2024 par le Tribunal judiciaire de Marseille, et Infirmer les chefs de celui-ci ayant :
' Condamné la société My Money Bank, anciennement dénommée GE Money Bank, à payer à [O] [G] et [M] [G] née [W] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
' Rappelé que cette somme produira, de plein droit, intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
' Rappelé que la compensation légale s'opérera de plein droit jusqu'à concurrence des sommes respectivement dues ;
' Et statuant à nouveau, ce faisant :
' Débouter les époux [G] de leur demande de nullité des prêts comme irrecevable et infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur demande de déchéance des intérêts conventionnels au titre d'un prétendu non-respect de formalisme des articles L.312-7 et L.312-10 du Code de la consommation comme irrecevable et infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur demande de déchéance des intérêts conventionnels au titre d'une prétendue irrégularité du TEG comme irrecevable et infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur demande de condamnation de la Sté My Money Bank à leur payer des dommages et intérêts comme infondée et la rejeter ;
' Débouter les époux [G] de leur contestation du quantum des créances de la Sté My Money Bank comme infondée ;
' Débouter les époux [G] de l'ensemble de leurs fins, prétentions et demandes ;
' Condamner solidairement M. [O] [G] et Mme [M] [W] épouse [G] à payer à la Sté My Money Bank :
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % sommes à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
' Ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du Code civil ;
' Condamner in solidum M. [O] [G] et Mme [M] [W] épouse [G] à payer à la Sté My money bank la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
' Les condamner in solidum aux dépens qui seront recouvrés par Me Joseph Magnan dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est fait renvoi aux dernières écritures déposées pour l'exposé des moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'application du code de la consommation et la déchéance du droit aux intérêts
Les appelants soutiennent qu'ils peuvent bénéficier des dispositions du code de la consommation puisqu'ils ont la qualité de consommateur et que les prêts visent ces dispositions, la banque s'est donc soumise volontairement à ce statut. Ils font valoir que leur demande à ce titre n'est pas prescrite puisqu'ils ont assigné la banque dès 2019 sur le fondement du code de la consommation.
Ainsi, au visa de l'article L312 ' 10 ancien du code de la consommation, ils font valoir que le délai de rétractation n'a pas été respecté, que la rémunération du mandataire la société FRI n'est pas mentionnée dans l'offre de prêt, rendant ainsi le TEG erroné. Ils sollicitent donc la déchéance du droit aux intérêts.
En réplique, la banque soutient que la Cour de cassation a jugé qu'en tant que loueur meublé professionnel, un emprunteur n'est pas un consommateur pouvant bénéficier des dispositions du code de la consommation. Elle fait valoir que la référence dans l'acte de prêt à certaines dispositions du code de la consommation ne permet pas d'induire une soumission volontaire à toutes les dispositions du code.
L'article L312-3 du Code de la consommation, dans sa version applicable au litige dispose que : « Sont exclus du champ d'application du présent chapitre [relatif au crédit immobilier]:
1° Les prêts consentis à des personnes morales de droit public ;
2° Ceux destinés, sous quelque forme que ce soit, à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance ;
3° Les opérations de crédit différé régies par la loi n° 52-332 du 24 mars 1952 relative aux entreprises de crédit différé lorsqu'elles ne sont pas associées à un crédit d'anticipation. »
Il a été jugé que si les parties à un contrat peuvent se soumettre volontairement au code de la consommation dans une situation où elles n'y étaient pas assujetties, c'est à la condition que cette volonté commune soit dépourvue de toute équivoque (1è Civ., 9 mars 2022, n°20-20.390 ; 23 janvier 2019, n°17-23.919, 17-23.920, 17-23.921 et 17-23.922).
Les seules références à des articles du code de la consommation, issues de modèles standardisés de contrats, ne constituent pas une manifestation de volonté suffisamment claire et dépourvue d'ambiguïté de la banque de soumettre le contrat aux dispositions de ce code en parfaite connaissance de cause.
En l'espèce, il est acquis et non contesté que les contrats de prêt conclus ne relevaient pas par nature du champ d'application du code de la consommation, pour porter sur des opérations d'achats immobiliers multiples et d'envergure à but de location meublée caractérisant une activité professionnelle. En effet, M. et Mme [G] ont acquis dix biens immobiliers pour un montant total en principal de 1 968 990 euros, destinés à la location, dont les loyers acquis cumulés devaient leur procurer la somme minimale de 26 000 euros au titre des loyers annuels. M. [G] était ainsi inscrit au registre des commerces et des sociétés comme exerçant l'activité de location de logements à compter du 31 décembre 2007.
Il est exact que les contrats de prêt souscrits auprès de GE Money bank faisaient référence aux dispositions du code de la consommation. Toutefois, ces seules mentions standardisées ne sauraient manifester, en l'absence de stipulation supplémentaire spécifique en ce sens, une intention non équivoque de la part de la banque de les soumettre à ces dispositions et ce, d'autant plus qu'il est établi que cette dernière n'avait pas connaissance de l'empilement des crédits souscrits par les emprunteurs. Ainsi, dès lors que la banque n'avait pas été informée du cumul de crédits sollicités simultanément ni de leur ampleur, ni du fait qu'ils avaient vocation à participer à une activité de loueur de meublés professionnel, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que la banque n'a pas pu accepter de façon totalement éclairée d'appliquer le Code de la consommation à des emprunteurs qui n'en relevaient pas.
Ainsi, en l'absence de soumission volontaire non équivoque des parties à ces dispositions, elles ne sauraient recevoir application aux prêts litigieux et les consorts [G] seront donc déboutés de leur demande de déchéance des intérêts. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande en paiement de la banque
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2, la banque demande la condamnation solidaire des emprunteurs au paiement sa créance ventilée comme suit selon le décompte produit (pièce 11 A):
Principal : 161 014,90 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,75 %
Intérêts : 14 249,98 euros assortie des intérêts au taux légal
Accessoires : 11 271,04 euros avec intérêts au taux légal
Au titre du prêt n°1020 740 850 0, la banque demande la condamnation solidaire des emprunteurs au paiement sa créance ventilée comme suit selon le décompte produit (pièce 11 B) :
Principal : 188 615,19 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,75 %
Intérêts : 16 692,63 euros assortie des intérêts au taux légal
Accessoires : 13 203,06 euros assortie des intérêts au taux légal
Il sera fait droit à ses demandes et le jugement sera confirmé sous réserve des erreurs matérielles relatives au taux d'intérêt et aux références des prêts qui seront rectifiées. La capitalisation des intérêts sera confirmée.
Sur la responsabilité de la banque
Sur ses fautes personnelles
Les époux [G] font valoir que la banque a engagé sa responsabilité du fait de ses propres fautes d'abord. La fiche de demande de prêt n'est pas renseignée correctement et une seule a été émise alors que deux offres de prêt ont été conclues. En outre, les mentions sur les fiches d'information relatives aux revenus des emprunteurs et leur patrimoine sont différentes alors qu'elles sont toutes deux datées du même jour.
La banque réplique qu'elle a reçu un dossier complet de la part des emprunteurs, qu'elle l'a examiné et qu'elle pouvait se fier aux informations transmises par son mandataire. Elle précise qu'elle a reçu une fiche intitulée « informations fournies par vous et prise en considération pour l'acceptation de ce crédit » signée par les époux [G] et que les informations fournies étaient corroborées par les pièces justificatives.
En l'espèce, il est effectivement produit une demande de prêt immobilier remplie sommairement par M. et Mme [G]. Néanmoins, ils n'expliquent pas en quoi la banque qui a fait deux offres de prêt à la suite de cette demande, serait fautive, dès lors que par la suite, ils vont remplir deux fiches d'informations relatives à leur situation complète. En effet, il ressort de celles-ci que les différences relevées par ceux-ci résultent simplement du fait que dans la deuxième fiche relative au second prêt 758 640 2, il est tenu compte dans les charges immobilières et dans le patrimoine, du 1er prêt 740 850 0. Il sera par ailleurs rappelé que ces deux fiches datées du 19 novembre 2007 ont été signées par les emprunteurs.
Il n'est donc pas rapporté la preuve d'une faute de la banque au titre de la régularité des prêts.
Sur le devoir de mise en garde
Les appelants font valoir que le banquier est tenu à l'égard de ses clients, emprunteur profane, d'un devoir de mise en garde, en cas de risque d'endettement excessif de l'emprunteur. Ils soutiennent que leur demande à ce titre n'est pas prescrite, compte tenu de l'assignation qu'ils ont délivrée au mois de juin 2009 et qui a interrompu la prescription.
En réplique, la banque soutient que cette demande est prescrite au motif que le délai court à compter du jour du premier incident de paiement soit le 16 février 2010 et que les appelants n'ont formé cette demande pour la première fois que par conclusions du 28 février 2019.
Il a été jugé qu'il résulte de la combinaison des articles 2224 du code civil et L.110-4 du code de commerce que le délai de prescription de l'action en indemnisation du manquement d'une banque à son obligation de mettre en garde un emprunteur non averti sur le risque d'endettement excessif né de l'octroi d'un prêt commence à courir, non à la date de conclusion du contrat de prêt, mais à la date d'exigibilité des sommes au paiement desquelles l'emprunteur n'est pas en mesure de faire face. (Civ 1e, 18 septembre 2024 n°23-12.602)
En l'espèce, il n'est pas contesté que le premier incident de paiement est intervenu le 15 février 2010 et que la déchéance du terme est intervenue le 4 mai 2010 (pièces 9 A et 9 B) date à laquelle les sommes sont donc devenues exigibles. Cette date constitue donc le point de départ de la prescription de l'action à l'égard de la banque, celui-ci expirant donc le 4 mai 2015.
M. et Mme [G] ont assigné la société GE Money Bank avec d'autres banques devant le tribunal de grande instance par exploit d'huissier du 28 mai 2009. Or, il apparaît que dans ladite assignation, les époux [G] ne formulent aucune demande au titre du manquement de la banque à son devoir de mise en garde, mais uniquement au titre des fautes commises par la société Apollonia. Il n'est pas davantage rapporté la preuve qu'ils aient soulevé ce moyen avant les conclusions du 28 février 2019 soit bien après l'expiration du délai de prescription.
En conséquence, la demande formée par M. et Mme [G] au titre de la responsabilité de la banque fondée sur son devoir de mise en garde est prescrite.
Sur la responsabilité du fait des préposés
M. et Mme [G] soutiennent que compte tenu des agissements des préposés de la banque et de leurs manquements dans la conclusion du contrat de prêt, la banque a engagé sa responsabilité.
La banque soutient quant à elle, que le juge d'instruction a exclu toute faute de la part des préposés des banques et plus particulièrement ceux, de la société My money Bank.
En l'espèce, comme le relève le premier juge, les demandeurs n'ont pas jugé utile d'expliquer les fautes commises par les préposés de la banque et ce, alors qu'aucune faute pénale n'a été retenue à leur encontre.
Dès lors, il y a lieu de rejeter leur demande fondée sur ce moyen.
Sur la responsabilité de la banque au titre des agissements d'Apollonia
M. et Mme [G] soutiennent que la société Apollonia a accompli de nombreux actes juridiques au nom et pour le compte des banques et doit donc être considéré comme leur mandataire en application de l'article 1984 du Code civil. La responsabilité de la banque est donc engagée au titre des fautes commises par Apollonia.
La banque soutient qu'elle n'a jamais eu aucune relation avec la société Apollonia, ce qu'a retenu plusieurs juridictions, notamment la Cour de cassation, ainsi que le juge d'instruction. Son intermédiaire en opérations de banque était seulement la société FRI. Ainsi elle ne peut être tenue responsable de ses agissements.
Selon l'article 1984 du code civil, le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom.
Le contrat ne se forme que par l'acceptation du mandataire.
En l'espèce, il est établi par l'ensemble des pièces et notamment pénales que My money Bank n'a jamais eu aucune relation avec la société Apollonia. Aucun contrat de mandat n'a d'ailleurs été signé entre elles et elle n'a jamais été informée du fait que la société FRI avait totalement délégué son activité à celle-ci.
Dès lors, la banque ne saurait être responsable d'une société tierce avec laquelle elle n'a jamais eu de relations contractuelles et dont elle ne connaissait pas l'existence. Le moyen de ce chef sera rejeté.
Sur la responsabilité du fait des agissements de la FRI
Les époux [G] soutiennent que la banque a reconnu que son intermédiaire en opérations de banque la société FRI, avait commis des fautes, et elle engage donc sa responsabilité du fait de son mandataire au visa de l'article L341 ' 4 du code monétaire et financier.
En réplique, la banque soutient qu'elle n'engage sa responsabilité que dans la limite du mandat. Or, son mandataire est sorti du mandat en lui présentant des dossiers dont elle taisait qu'ils avaient été constitués par la société Apollonia.
L'article L341-4 du code monétaire et financier dans sa version applicable au litige prévoit :
I. - Les personnes mentionnées à l'article L. 341-3 peuvent mandater des personnes physiques afin d'exercer pour leur compte une activité de démarchage bancaire ou financier. Les établissements et entreprises ou institutions mentionnés au 1° de cet article peuvent également mandater des personnes morales à cet effet. Dans ce cas, celles-ci peuvent à leur tour mandater des personnes physiques afin d'exercer cette activité pour leur compte.
II. - Dans tous les cas, le mandat est nominatif. Il mentionne la nature des produits et services qui en sont l'objet ainsi que les conditions dans lesquelles l'activité de démarchage peut être exercée. Sa durée est limitée à deux ans. Il peut être renouvelé. Une même personne physique ou morale peut recevoir des mandats émanant de plusieurs entreprises, institutions ou établissements mentionnés au 1° de l'article L. 341-3. Cette personne informe alors l'ensemble de ses mandants des mandats ainsi détenus.
III. - Les personnes morales mentionnées à l'article L. 341-3 et celles mandatées en application du I du présent article sont civilement responsables du fait des démarcheurs, agissant en cette qualité, auxquels elles ont délivré un mandat. Les personnes morales mentionnées à l'article L. 341-3 demeurent responsables du fait des salariés des personnes morales qu'elles ont mandatées, dans la limite du mandat.
(...)
Il a été jugé qu'il se déduit des travaux préparatoires de la loi n°2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière et de l'article L. 341-4 III précité que doit être interprété en ce sens qu'il déroge au droit commun du mandat tel qu'il résulte désormais de l'arrêt de chambre mixte du 29 octobre 2021, selon lequel, si le mandant est, en vertu de l'article 1998 du code civil, contractuellement responsable des dommages subis du fait de l'inexécution des engagements contractés par son mandataire dans les limites du mandat conféré, les man'uvres dolosives du mandataire, dans l'exercice de son mandat, n'engagent la responsabilité du mandant que s'il a personnellement commis une faute, qu'il incombe à la victime d'établir.
Il en résulte que l'établissement de crédit est responsable de plein droit du fait des démarcheurs, agissant en cette qualité, auxquels il a donné mandat, sans pouvoir s'exonérer par la preuve d'une absence de faute. (Civ 1re 7 mai 2025, n°23-13.923)
En l'espèce, My money bank produit une convention de collaboration qu'elle a conclu avec la société FRI (French Riviera Invest) étant précisé qu'elle n'est pas datée. Néanmoins, le courrier de résiliation (pièce 13) du 14 avril 2018 produit par la banque permet de la dater au 1er août 2006. Ainsi, la banque ne conteste pas que la société FRI était son mandataire à l'époque de la souscription des prêts et qu'en vertu de la convention produite, elle agissait en qualité de démarcheur et d'intermédiaire en opérations de banque pour son compte.
Il ressort de cette convention que la mission confiée à la société FRI était de dispenser à la clientèle prospectée toutes informations sur les caractéristiques des produits, d'analyser et de sélectionner les clients et de transmettre à GE Money Bank les demandes de crédit et les justificatifs.
La lecture des pièces pénales produites par M. et Mme [G] et notamment l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel du juge d'instruction du tribunal judiciaire de Marseille permet de caractériser l'intervention de la société FRI dont le dirigeant était M. [H], dans l'octroi des prêts. Ce dernier indiquait ainsi lors de ses auditions, que son rôle consistait de fait, uniquement à se faire le relais d'Apollonia auprès des établissements bancaires désignés par celle-ci, établissements auxquels il transmettait des dossiers déjà montés, sans jamais négocier le taux d'intérêt applicable, insistant seulement sur la nécessité d'une réponse rapide. Il avait été ainsi une « courroie de transmission » entre la société Apollonia et les organismes de crédit. La société FRI était rémunérée selon un pourcentage par les banques et en rétrocédait ensuite une partie à la société Apollonia.
Il résulte de l'expertise comptable effectuée à la demande du magistrat instructeur que 689 des emprunts contractés par les clients d'Apollonia portant sur 929 lots et représentant un montant total d'investissement de 183 368 753 euros ont été conclus par l'intermédiaire de la société FRI et aucune des parties ne conteste que les prêts souscrits par les époux [G] auprès de My Money Bank en font partie.
Or, contrairement à ce qu'elle allègue, la mandante ne rapporte pas la preuve que son mandataire a agi en une autre qualité que celle de démarcheur et hors du cadre de son mandat en lui transmettant la demande de crédit des époux [G]. En effet, la seule transgression de l'interdiction de sous-traiter l'exécution du mandat à un tiers stipulée par l'article 8 de la convention de collaboration, si elle est bien fautive, ne caractérise pas que le mandataire ait agi en dehors de son mandat d'intermédiaire entre les emprunteurs et la banque.
La société FRI qui a ainsi fait preuve d'un manquement aux règles professionnelles et qui a plus précisément manqué à sa mission, notamment en ne dispensant aux emprunteurs aucune information de nature à les éclairer sur les caractéristiques précises des produits, dès lors qu'il ne les a jamais rencontrés, a commis une faute délictuelle indéniable, nonobstant l'absence de faute pénale qui a été commise dans le cadre de l'exécution du mandat. La réalité des fautes de son mandataire n'est d'ailleurs pas contestée par la banque qui les reconnaît expressément.
Dès lors, en application de l'article précité, nonobstant l'absence de toute faute personnelle de sa part, la banque est responsable de plein droit des agissements de son mandataire, qui n'était investi que du pouvoir d'exécuter, dans le cadre d'une convention de collaboration, des actes matériels précisément énumérés, préparatoires à la décision de contracter, à l'exclusion de tout acte juridique, et que son activité était soumise à l'audit du mandant, c'est à dire à un contrôle systématisé, organisé et suivi.
En conséquence, les consorts [G] sont fondés à engager la responsabilité de My Money Bank à leur égard.
Le mandant est ainsi responsable contractuellement des dommages subis aux tiers du fait des fautes commises par son mandataire. Le préjudice subi par M. et Mme [G] doit s'apprécier en une perte de chance de ne pas avoir contracter le prêt auprès de My Money Bank si la société FRI avait respecté ses obligations.
La perte de chance se définit comme « la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.» Ainsi, la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
Toutefois, la chance perdue ne doit pas être hypothétique, au contraire elle doit être réelle, mais aussi sérieuse. Ainsi, il appartient à celui qui entend obtenir réparation au titre de la perte de chance de démontrer la réalité et le sérieux de la chance perdue en établissant que la survenance de l'événement dont il a été privé était certaine avant la survenance du fait dommageable. (Civ 2e, 11 mars 2010, n°09-12.451)
En l'espèce, il apparaît que les prêts souscrits par M. et Mme [G] auprès de My money bank sont des prêts relativement usuels pour un achat immobilier en VEFA dans le cadre d'une opération de défiscalisation. Ils ne sont devenus une mauvaise opération que par le fait que les emprunteurs ont souscrit de nombreux autres prêts immobiliers en inadéquation avec leur capacité de remboursement et les rendements escomptés. Toutefois, comme le relève le magistrat instructeur dans son ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel devant le tribunal correctionnel, c'est dans l'appréhension globale de la situation des investisseurs, en y incluant les prêts sollicités et accordés directement par la société Apollonia ou son propre réseau commercial que se révélait l'escroquerie aggravée. Or, la société FRI et son dirigeant n'ayant pas accès à l'ensemble des prêts sollicités et accordés, il n'avait pas connaissance de ce montage financier désastreux. Il est donc indéniable que les informations qu'elle aurait communiquées aux emprunteurs n'auraient pu porter que sur les caractéristiques des deux prêts de My Money Bank. Or, les emprunteurs avaient eux, connaissance de la multiplicité des prêts et ont tout de même contracté ceux-ci. Dès lors, il peut en être déduit que la chance de ne pas contracter les prêts My money Bank pour les époux [G] est inexistante.
En conséquence, M. et Mme [G] seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts à l'égard de My money bank et le jugement infirmé.
Sur les demandes annexes
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.
Les dépens d'appel seront mis à la charge in solidum de M. et Mme [G].
Il n'y a pas lieu faire droit aux demandes au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rectifie le jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 27 septembre 2024 comme suit :
« Condamne solidairement M. [O] [G] et Mme [M] [W] épouse [G] à payer à la Sté My Money Bank :
Au titre du prêt n° 1020 758 640 2 :
- 188 615,19 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % à compter du 26 janvier 2012,
- 16 692,63 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 13 203,06 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012.
Au titre du prêt n° 1020 740 850 0 :
- 161 014,90 euros en principal, assortie des intérêts au taux de 4,75 % à compter du 26 janvier 2012,
- 14 249,98 euros au titre des intérêts, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012,
- 11 271,04 euros au titre des accessoires, assortis des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2012. »
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 27 septembre 2024, sauf en ce qu'il a condamné la société My money bank à payer la somme de 10 000 euros à M. et Mme [G],
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare irrecevable la demande de M. [O] [G] et de Mme [M] [W] épouse [G] au titre du devoir de mise en garde de My Money bank ;
Déboute M. [O] [G] et de Mme [M] [W] épouse [G] de leur demande de dommages et intérêts à l'égard de la SA My money bank ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions au titre des frais irrépétibles ;
Condamne in solidum M. [O] [G] et de Mme [M] [W] épouse [G] aux dépens d'appel distraits au profit de Me Magnan, avocat.
LE GREFFIER LE PRESIDENT