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Décisions

CA Lyon, ch. soc. b, 21 novembre 2025, n° 22/07577

LYON

Arrêt

Autre

CA Lyon n° 22/07577

21 novembre 2025

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 22/07577 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OTOV

[J]

C/

Association SECOURS ISLAMIQUE FRANCE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 13 Octobre 2022

RG : 20/01312

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 21 NOVEMBRE 2025

APPELANTE :

[E] [J]

née le 25 Mars 1974 à [Localité 6] (MAROC)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

et ayant pour avocat plaidant Me Christine FAUCONNET de la SELARL CONTE-JANSEN & FAUCONNET AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Association SECOURS ISLAMIQUE FRANCE

N° SIRET: 390 215 135 00042

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Blandine DAVID de la SELARL KAEM'S AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, et ayant pour avocat plaidant Me Romain RAPHAEL de la SCP DAUXOIS AVOCAT, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Septembre 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Béatrice REGNIER, Présidente

Catherine CHANEZ, Conseillère

Régis DEVAUX, Conseiller

Assistés pendant les débats de Mihaela BOGHIU, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 21 Novembre 2025, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine CHANEZ, conseillère, pour la présidente empêchée Béatrice REGNIER, et par Mihaela BOGHIU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

L'association Secours islamique France est une association non-gouvernementale de solidarité internationale à vocation sociale et humanitaire. Elle a engagé Mme [E] [J], dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, à compter du 7 avril 2015, en qualité de travailleuse sociale. La relation de travail était soumise à un accord d'entreprise.

Mme [J] était nommée aux fonctions de responsable de missions sociales, au sein de l'antenne lyonnaise de l'association, à compter du 7 juin 2016.

Mme [J] a été victime d'un accident du travail le 26 janvier 2018 et placée consécutivement en arrêt de travail, lequel a été prolongé sans discontinuité jusqu'au 16 mai 2019. Les parties concluaient, le 20 mai 2019, un avenant au contrat de travail, aux termes duquel la salariée reprenait le travail, à compter du 22 mai 2019, en mi-temps thérapeutique.

Mme [J] était de nouveau placée en arrêt de travail, à compter du 18 juin 2019.

Le 1er octobre 2019, à l'issue d'une seconde visite de reprise, le médecin du travail déclarait Mme [J] inapte à son poste, en précisant que l'état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi. Par courrier recommandé du 9 novembre 2019, l'association Secours islamique France notifiait à Mme [J] son licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement.

Par requête reçue au greffe le 4 juin 2020, Mme [J] a saisi la juridiction prud'homale afin notamment de voir juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 13 octobre 2022, le conseil de prud'hommes de Lyon a notamment :

- ordonné le remboursement de note de frais pour le montant de 179 euros ;

- débouté Mme [J] de ses demandes de dommages et intérêts ;

- dit que le licenciement de Mme [J] a une cause réelle et sérieuse ;

- débouté Mme [J] de ses demandes en nullité du licenciement et en dommages et intérêts ;

- condamné l'association Secours islamique de France à payer à Mme [J] 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté l'association Secours islamique de France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné l'association Secours islamique de France aux dépens.

Le 15 novembre 2022, Mme [J] a enregistré une déclaration d'appel à l'encontre de ce jugement, en le critiquant en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts, a dit que son licenciement a une cause réelle et sérieuse et l'a déboutée de ses demandes en nullité du licenciement et en dommages et intérêts.

Par ailleurs, Mme [J] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, aux fins de voir reconnaître que l'accident du travail survenu le 26 janvier 2018 est la conséquence d'une faute inexcusable de l'employeur.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 août 2023, Mme [E] [J] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'association Secours islamique de France à lui rembourser 179 euros de note de frais et à lui payer 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts au titre de l'exécution de son contrat de travail, a dit que son licenciement a une cause réelle et sérieuse et l'a déboutée de ses demandes en nullité du licenciement et en dommages et intérêts

Statuant à nouveau,

- condamner l'association Secours islamique de France à lui payer 30 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et 5 000 euros de dommages et intérêts du fait de la non-prise en charge des frais professionnels exposés par Mme [J]

- juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse

- condamner l'association Secours islamique de France à lui payer 14 500 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamner l'association Secours islamique de France à lui payer 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 24 juin 2025, l'association Secours islamique France demande à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [J] de ses demandes de dommages et intérêts, a dit que le licenciement de celle-ci a une cause réelle et sérieuse et a débouté Mme [J] de ses demandes en nullité du licenciement et en dommages et intérêts

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à rembourser à Mme [J] 179 euros de note de frais et à lui payer 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens

Statuant à nouveau,

- débouter Mme [J] de l'ensemble de ses demandes, y compris en application de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner Mme [J] à lui paye 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner Mme [J] aux dépens de première instance et d'appel.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

La procédure de mise en état était clôturée le 9 septembre 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur l'exécution du contrat de travail

1.1. Sur la demande en dommages et intérêts pour absence de prise en charge des frais professionnels

En droit, l'employeur a l'obligation de supporter les frais engagés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle.

En l'espèce, Mme [J] réclame des dommages et intérêts car son employeur n'a jamais pris en charge ses frais professionnels, en particulier ceux découlant du fait qu'elle effectuait, d'avril 2015 à novembre 2016, ses déplacements professionnels avec son véhicule personnel. Elle souligne que son employeur a, par mail du 23 juin 2016, refusé par principe de prendre en charge les frais kilométriques (pièce n° 8-1 de l'appelante).

Toutefois, Mme [J] ne justifie pas avoir subi un préjudice distinct de celui découlant du refus de l'employeur de payer ses frais kilométriques, qu'au demeurant elle ne justifie pas et pour lesquels elle ne chiffre pas le montant total.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé, en ce qu'il a débouté Mme [J] de sa demande en dommages et intérêts du fait de la non-prise en charge des frais professionnels.

1.2. Sur la demande en remboursement de frais professionnels

Mme [J] justifie qu'elle a payé, le 24 janvier 2018, 179 euros pour effectuer un trajet aller-retour en train, [Localité 5] ' [Localité 7]. Elle a établi, le 11 juin 2019, une note de frais concernant cette dépense. Elle a relancé son employeur, par mails du 5 août 2019 et du 12 novembre 2019, afin qu'il lui rembourse cette somme (pièces n° 9-1, 9-2, 9-3 et 34 de l'appelante).

L'association Secours islamique France ne conteste pas le caractère professionnel de ce déplacement de Mme [J] à [Localité 7]. Elle affirme toutefois qu'elle avait remis, en janvier 2018, à la salariée la somme de 2 000 euros, à titre d'avance pour le paiement de ses frais professionnels et que cette dernière n'a pas justifié des dépenses qu'elle était censée régler avec cette avance.

Toutefois, l'association Secours islamique France ne démontre pas qu'elle a effectivement versé à Mme [J], en janvier 2018, la somme de 2 000 euros à titre d'avance pour le paiement des frais professionnels, en ce y compris les frais liés aux déplacements professionnels de la salariée. Elle ne rapporte pas la preuve qu'elle s'est libérée de son obligation de prendre en charge les frais professionnels visés dans la note de frais établie le 11 juin 2019.

Dès lors, le jugement sera confirmé, en ce qu'il a condamné l'association Secours islamique de France à rembourser à Mme [J] 179 euros de frais professionnels.

1.3. Sur la demande en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Au visa des articles L. 1222-1 et L. 4121-1 du code du travail, Mme [J] reproche à l'association Secours islamique France d'avoir exécuté de manière déloyale son contrat de travail, en la contraignant à travailler dans des conditions délétères, marquées par un manque d'effectif et de moyens, ce qui empêchait la structure de fonctionner correctement et a participé à la survenue d'un accident de travail le 26 janvier 2018. Elle ajoute que, au terme de l'arrêt de travail qui a suivi cet accident, l'employeur ne lui a pas permis de reprendre le travail dans de bonnes conditions.

' Mme [J] a plusieurs fois demandé à son employeur de doter l'antenne lyonnaise de différents équipements et également de recruter un salarié pour occuper le poste d'agent d'accueil-secrétariat, elle-même assumant cette fonction en plus des siennes propres (pièces n° 13, 16 et 17 de l'appelante). Au moment de son embauche, elle regrettait l'absence de logisticien, ce poste n'étant pourvu qu'en octobre 2016, et elle allègue avoir également été amenée à remplir cette fonction.

Toutefois, le seul fait que l'employeur n'a pas répondu ou a répondu avec retard aux sollicitations de la salariée, qui n'allègue pas avoir souffert d'une surcharge de travail, n'est pas de nature à caractériser la déloyauté de celui-ci dans l'exécution du contrat de travail ou un manquement à son obligation de sécurité.

' Mme [J] ajoute que l'association Secours islamique France n'a jamais équipé l'antenne de [Localité 5], où elle travaillait, d'équipements de sécurité, alors même que la structure était susceptibles d'accueillir des usagers violents ou agressifs ' elle avait d'ailleurs signalé, par mail du 25 novembre 2016, qu'une femme s'était présentée pour s'inscrire auprès de la structure et s'était montrée très véhémentes et agressive. L'employeur lui avait répondu, le même jour, que le logisticien devait jouer le rôle « protection et sécurité » et que, en cas de répétition de menaces, il recruterait un agent de sécurité à titre temporaire (pièce n° 36 de l'intimée).

Mme [J] affirme que, dans ce contexte, le 26 janvier 2018, un usager lui a porté des coups et l'a traînée sur le sol sur plusieurs mètres, en la tirant par les cheveux. Elle a déposé plainte pour ces faits (pièce n° 4-2 de l'appelante). Ce fait a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance-maladie en tant qu'accident du travail (pièce n° 4-4 de l'appelante).

Sur ce point précis, la Cour retient que Mme [J] fonde sa demande en dommages et intérêts sur un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, plutôt qu'à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail.

Mme [J] détaille le préjudice subi lors de l'agression du 26 janvier 2018, en produisant plusieurs documents de nature médicale (pièces n° 10-1 et 10-2 de l'appelante).

Toutefois, au visa des articles L. 451-1 et L. 142-1 du code de la sécurité sociale, relève de la compétence exclusive du pôle social du tribunal judiciaire l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail, qu'il soit ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité (en ce sens : Cass. Soc., 9 juillet 2014, n° 13-18.696).

Mme [J] ne peut donc pas obtenir réparation du préjudice subi en suite de l'agression du 26 janvier 2018 devant le juge prud'homal, alors que les lésions qui ont résulté ont été prises en charge au titre de la législation sur les risques professionnels et que, au surplus, elle a saisi le pôle social aux fins de voir juger que son employeur a commis une faute inexcusable, laquelle se confond avec le manquement allégué à l'obligation de sécurité.

' Au terme de l'arrêt de travail consécutif à l'accident du 26 janvier 2018, Mme [J] a voulu reprendre le travail le 22 mai 2019 et indique avoir découvert que les locaux de l'antenne lyonnaise de l'association Secours islamique France étaient fermés à clé, sans qu'elle ait le moyen d'y accéder, alors même que l'employeur avait régularisé un avenant à son contrat de travail le 20 mai 2019.

Il résulte d'ailleurs de sa feuille de pointage, concernant les jours travaillés en mai et juin 2019, que Mme [J] n'a pas pu travailler les 22, 23 et 24 mai 2019, faute pour l'employeur de lui avoir remis les clés des locaux de l'antenne lyonnaise.

L'association Secours islamique France répond que Mme [J] l'a informée, par mail du 27 mai 2019, qu'elle avait retrouvé les clés des locaux ce jour là (pièce n° 8 de l'intimée). Elle n'allègue pas avoir remis à la salariée ces clés dès le jour de sa reprise de travail, soit le 22 mai 2019, alors même que la salariée lui a immédiatement signalé la difficulté (pièce n° 23 de l'appelante).

Alors que l'employeur ne conteste pas qu'il avait connaissance de la date de reprise du travail de Mme [J], il n'a pas pris les dispositions nécessaires pour que celle-ci puisse accéder à son lieu de travail, ce qui a eu pour conséquence qu'il ne lui a pas fourni de travail pendant trois jours (les 22, 23 et 24 mai 2019).

Ainsi, Mme [J] démontre que son employeur a exécuté de manière déloyale le contrat de travail, ce qui lui a occasionné un préjudice moral, qui sera justement indemnisé par le versement de la somme de 500 euros.

Dès lors, après infirmation du jugement déféré, l'association Secours islamique France sera condamnée à payer à Mme [J] 500 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

2. Sur la rupture du contrat de travail

A l'appui de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme [J] fait valoir que :

- le signataire de la lettre de licenciement n'avait pas le pouvoir de licencier

- son inaptitude est consécutive à un manquement de l'employeur à ses obligations de sécurité et d'exécuter loyalement le contrat de travail

- les délégués du personnel n'ont pas été consultés dans le cadre de la procédure de licenciement.

Il convient d'analyser successivement ses moyens.

' En droit, lorsque les statuts d'une association ne réservent pas au conseil d'administration la mise en 'uvre de la procédure de licenciement, il entre dans les attributions du président de procéder au licenciement du salarié (en ce sens : Cass. Soc., 7 novembre 2018, n° 17-18.800).

En outre, le pouvoir de licencier peut faire l'objet d'une délégation.

En l'espèce, la lettre de licenciement de Mme [J] a été signée par M. [N] [L], directeur exécutif de l'association Secours islamique France.

Il résulte de l'article 11.4.d des statuts de l'association (pièce n° 2 de l'intimée) que son président est investi des pouvoirs les plus étendus qui ne sont pas strictement réservés à l'assemblée générale ni au conseil d'administration pour gérer, administrer l'association et disposer de ses biens.

Le fait que l'article 10.3.g prévoit que le conseil d'administration décide de la création et de la suppression d'emplois n'implique pas que le pouvoir de licencier était réservé à celui-ci.

Il s'en déduit que le président de l'association dispose du pouvoir de licencier un salarié de l'association.

M. [W], président de l'association, a, par acte du 31 janvier 2017 (dont la régularité n'et pas contestée par l'appelante), consenti une délégation de pouvoirs à M. [L], directeur exécutif, notamment pour « procéder aux ruptures des contrats de travail » (pièce n° 3 de l'intimée).

En conséquence, le signataire de la lettre de licenciement adressé à Mme [J] avait le pouvoir de licencier.

' En droit, au visa des articles L.1235-3, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, le licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsqu'il est démontré que l'inaptitude est consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée (en ce sens : Cass. Soc., 6 juillet 2022, n°21-13.387).

En l'espèce, Mme [J] affirme, de manière péremptoire, que son inaptitude résulte du comportement fautif de l'employeur qui a manqué à son obligation de sécurité et à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail.

Mme [J] était placée en arrêt de travail, à compter du 18 juin 2019 et jusqu'au jour de son licenciement, au motif que « le médecin du travail refusait la prolongation du mi-temps » (pièce n° 4.3 de l'appelante). Le 1er octobre 2019, le médecin du travail déclarait Mme [J] inapte à son poste, en précisant que l'état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi (pièce n° 4.7 de l'appelante).

L'appelante ne verse aux débats aucune pièce extraite du dossier de la médecine du travail.

La Cour a retenu que l'employeur avait exécuté de mauvaise foi le contrat de travail uniquement pour avoir privé Mme [J] d'un moyen d'accéder à son lieu de travail les 22, 23 et 24 mai 2019. Toutefois, l'appelante ne démontre pas l'existence d'un lien de causalité entre ce comportement fautif de l'employeur et son inaptitude, alors qu'elle a régulièrement travaillé entre-temps.

Ensuite, l'appelante n'allègue pas que l'association Secours islamique France n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail concernant le mi-temps thérapeutique. Par ailleurs, à supposer que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité et que ce manquement a, au moins pour partie, contribué à la survenue de l'accident du travail le 26 janvier 2018, l'appelante, qui n'établit pas le motif médical qui a justifié la prescription de l'arrêt de travail qui était en cours au moment du prononcé de l'inaptitude, ne démontre pas que son inaptitude est consécutive à un manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité.

' En droit, lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis d'inaptitude que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l'employeur, qui n'est pas tenu de rechercher un reclassement, n'a pas l'obligation de consulter les délégués du personnel (en ce sens : Cass. Soc., 16 novembre 2022, n° 21-17.255).

En l'espèce, le 1er octobre 2019, le médecin du travail déclarait Mme [J] inapte à son poste, en précisant que l'état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Il s'en déduit que l'association Secours islamique France n'était pas tenu de rechercher un reclassement et n'avait pas l'obligation de consulter les délégués du personnel.

En définitive, le licenciement de Mme [J] pour inaptitude et impossibilité de reclasssement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé, en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [J] a une cause réelle et sérieuse et a débouté celle-ci de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

3. Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

L'association Secours islamique France, partie perdante, sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel, en application du principe énoncé par l'article 696 du code de procédure civile. Sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

Pour un motif tiré de l'équité, l'association Secours islamique France sera condamnée à payer à Mme [J] 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement rendu le 13 octobre 2022 par le conseil de prud'hommes de Lyon, en ses dispositions déférées, sauf en ce qu'il a débouté Mme [J] de sa demande en dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

Statuant sur la disposition infirmée et ajoutant,

Condamne l'association Secours islamique France sera condamnée à payer à Mme [E] [J] :

- 500 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'association Secours islamique France aux dépens de l'instance d'appel ;

Rejette la demande de l'association Secours islamique France en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, POUR LA PRÉSIDENTE EMPÊCHÉE,

LA CONSEILLÈRE

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