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CA Lyon, 1re ch. civ. a, 20 novembre 2025, n° 22/05561

LYON

Arrêt

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CA Lyon n° 22/05561

20 novembre 2025

N° RG 22/05561 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OOSI

Décision du Tribunal Judiciaire de VILLEFRANCHE SUR SAONE

Au fond du 16 juin 2022

RG : 22/00255

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 20 NOVEMBRE 2025

APPELANTE :

Mme [S] [K]

née le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 6] (Maroc)

Maison de Madame [R]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Pierre CIAMPORCERO, avocat au barreau de LYON, toque : 1978

INTIMEE :

UNION LOCALE DES SYNDICATS CGT DE [Localité 11], DU BEAUJOLAIS ET DU [Localité 10]

[Adresse 9]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Guillaume VANNESPENNE, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE, avocat postulant,toque : 1929

Et ayant pour avocat plaidant la SELARL JORQUERA, avocat au barreau de GRENOBLE, toque : B31

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 26 août 2025

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 septembre 2025

Date de mise à disposition : 20 novembre 2025

Composition de la cour lors des débats et du délibéré :

- Christophe VIVET, président

- Julien SEITZ, conseiller

- Emmanuelle SCHOLL, conseillère

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Christophe VIVET, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS ET PROCÉDURE

L'association Union locale des syndicats CGT de [Localité 11], du Beaujolais et du Val de Saône (l'Union locale ou l'association) est composée selon ses statuts par les syndicats nationaux, départementaux, territoriaux et locaux, ainsi que par les sections syndicales et les adhérents à ses statuts. Mme [S] [K] est adhérente à l'Union locale.

Les 25 et 26 novembre 2021, l'Union Locale a tenu son 10e congrès.

Par acte de commissaire de justice du 25 février 2022, Mme [S] [K] a fait assigner l'Union locale devant le tribunal judiciaire de Villefranche-sur-Saône selon la procédure à jour fixe.

Par jugement contradictoire du 16 juin 2022, auquel il est renvoyé pour l'exposé intégral du litige, le tribunal a dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande d'organisation d'un nouveau congrès en raison de l'irrégularité de la saisine du tribunal, a débouté Mme [K] de l'ensemble de ses demandes, et l'a condamnée à payer à l'Union locale la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Mme [K] a relevé appel de cette décision selon déclaration enregistrée le 29 juillet 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:

Par conclusions déposées le 18 janvier 2024, Mme [S] [K] demande à la cour d'infirmer le jugement et de statuer comme suit :

- Constater la violation des statuts de l'Union locale et des articles L.2133-2, L.21331-1 et suivants du code du travail, et 1103 et 1104 du code civil, lors du 10eme congrès des 25 et 26 novembre 2021, et en conséquence annuler le dit congrès et les résolutions, articles, amendements, modifications des statuts adoptés ou tout autres actes juridiques passés à cette occasion,

- Ordonner l'exécution provisoire ;

- Condamner l'Union locale à lui verser la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par conclusions déposées le 19 septembre 2023, l'Union locale demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter Mme [K] de ses demandes, et de la condamner à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé intégral de leurs prétentions et de leurs moyens.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 26 août 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 25 septembre 2025, à laquelle la décision a été mise en délibéré au 20 novembre 2025.

MOTIFS:

Sur la demande d'annulation du congrès

Il est constant que la nullité d'une assemblée générale d'une association ne peut être prononcée que dans le cas d'une irrégularité de la convocation ou de l'assemblée générale soit sanctionnée par les statuts d'une nullité, soit ayant porté atteinte au déroulement ou à la sincérité de la consultation.

En l'espèce, il est constant que les statuts de l'Union locale ne prévoient aucune sanction de nullité, en conséquence de quoi les irrégularités alléguées par l'appelante doivent être examinées à l'aune de leur incidence sur le déroulement et la sincérité de la consultation.

- Sur l'irrégularité du document d'orientation et l'absence du rapport financier

Mme [K] soutient que le document d'orientation discuté est différent de celui envoyé avec les convocations, auxquelles aucun rapport financier n'était par ailleurs joint. Elle conteste que la présence de l'expert-comptable lors du congrès permette de régulariser cette situation puisque les adhérents présents n'ont pas disposé d'une période de trente jours pour étudier le document.

L'association répond que le document d'orientation envoyé en amont est celui discuté mais qu'il a été amendé pendant la discussion. Elle ajoute que l'absence de rapport financier en annexe de la convocation résulte du retard de M. [T], alors secrétaire général, et que le rapport de l'expert-comptable a été établi après l'envoi des convocations. Elle considère que la présence de ce dernier au congrès a permis de remédier à cette difficulté, celui-ci pouvant répondre à toutes les questions. Elle souligne l'absence de difficulté lors du vote en question sur le rapport financier, la résolution ayant été adoptée à l'unanimité moins trois abstentions, sans aucun vote contre.

SUR CE

La cour constate que l'article 4 des statuts porte les dispositions suivantes :

« les représentants dûment mandatés des syndicats, sections syndicales et adhérents se réunissent tous les trois en ans en Congrès, sur convocation de la C.E. qui en fixera la date.

Le Congrès délibérera sur le rapport d'activité et sur les tâches à venir, présents par le ou la secrétaire général(e) ou un membre de la direction collégiale de [Localité 7] Locale.

Il votera les résolutions. Il délibérera sur le rapport financier, donnera quitus au trésorier et élira les membres de la Commission de Contrôle Financier, composée de 3 ou 4 membres.

Les documents soumis à la discussion devront parvenir avec la convocation du Congrès, au moins trente jours avant la tenue de celui-ci.

La commission exécutive se compose de membres choisis parmi les syndicats, sections syndicales et adhérents à l'Union Locale. »

Le registre des débats mentionne que le document d'orientation envoyé n'est pas celui discuté, des modifications ayant été apportées. Toutefois, la cour note que le document discuté n'a pas été produit, et que la discussion a pu être longue, parfois houleuse, mais que les modifications apportées n'ont pas été de nature à remettre en cause la sincérité des débats et du vote, et ce d'autant plus que les présents avaient la possibilité de revenir au texte antérieur.

S'agissant du rapport financier, il est établi qu'il n'était pas joint à la convocation, contrairement à ce que prévoient les statuts. Les débats font apparaître que cela a été mal perçu par les personnes convoquées, étant noté à la page 28 du procès-verbal des débats : « La CE n'a vu aucun de ces nouveaux documents. On a l'impression d'être pris pour des clowns. Le rapport financier n'a pas été envoyé non plus.»

Les débats consacrés à la question de l'adoption du rapport financier sont notés brièvement, seuls les éléments principaux de la comptabilité étant visés, relatifs aux fonds propres, compte de résultat, frais de gestion, baisse des cotisations et absence de déficit.

Il en ressort que le rapport financier n'a pas été transmis aux adhérents, et qu'il n'a donc pas pu être étudié par ces derniers pendant la période trente jours prévus par les statuts à cette fin. La cour constate que plusieurs adhérents n'étaient pas présents mais étaient simplement représentés, ce dont il se déduit qu'ils n'ont donc pas pu avoir accès à ce document pour en discuter préalablement et permettre à leurs représentants de relayer leurs interrogations. La cour considère que la seule présence de l'expert-comptable lors du congrès n'était d'évidence pas de nature à faire disparaître les conséquences de l'irrégularité en question.

La cour considère que le défaut de transmission de ce document essentiel a nécessairement eu une incidence sur les débats et le vote, interdisant la réflexion préalable de l'ensemble des membres convoqués et représentés. La faiblesse des débats relevés sur le procès-verbal ne permet pas de considérer que la discussion a pu avoir lieu de manière complète et pourrait même être le marqueur de cette absence de réflexion préalable. Est ainsi caractérisée l'incidence sur la sincérité du vote justifiant l'annulation.

En conséquence, en l'absence de discussion par les parties sur l'étendue de l'annulation, il convient de prononcer l'annulation du congrès tenu les 25 et 26 novembre 2021, ainsi que les résolutions prises lors dudit congrès, l'ordre du jour et les débats ne faisant pas état de modifications des statuts ou d'amendements.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile ;

Le jugement étant infirmé sur le fond, sera infirmé sur les dépens, qui seront mis à la charge de l'Union locale, partie perdante, qui supportera donc en outre les dépens d'appel, et sera en conséquence déboutée de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Mme [K] ayant exposé des frais pour faire valoir ses droits, l'Union locale sera condamnée sur ce fondement à lui payer la somme de 1.000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire, prononcé en dernier ressort,

- Infirme le jugement prononcé le 16 juin 2022 entre les parties par le tribunal judiciaire de Villefranche-sur-Saône,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Annule le 10ème congrès de l'Union locale des syndicats CGT de [Localité 11], du Beaujolais et du [Localité 10] tenu les 25 et 26 novembre 2021 et les résolutions votées lors de ce congrès,

- Condamne l'Union locale des syndicats CGT de [Localité 11], du Beaujolais et du [Localité 10] aux dépens de première instance et d'appel,

- Condamne l'Union locale des syndicats CGT de [Localité 11], du Beaujolais et du [Localité 10] à payer à Mme [S] [K] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi jugé et prononcé à [Localité 8] le 20 novembre 2025.

Le greffier Le président

S.Polano C.Vivet

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