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Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 2, 20 novembre 2025, n° 23/04620

DOUAI

Arrêt

Autre

CA Douai n° 23/04620

20 novembre 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 20/11/2025

****

MINUTE ELECTRONIQUE

N° RG 23/04620 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VEU3

Jugement (N° 2019/001225) rendu le 14 septembre 2023 par le tribunal de commerce de Douai

APPELANTE

Madame [W] [M]

née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 8]

de nationalité française,

demeurant [Adresse 10]

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Claude Dantcheff, en lieu et place de Me Catherine Vannelle, avocat constitué, avocats au barreau de Lille

INTIMÉES

SARL Erisport, représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me David Lacroix, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

SA Société Fiduciaire Nationale D'expertise Comptable, dénomination sociale abrégée Fidexpertise, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège,

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 7]

représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Nathalie Siu Billot, avocat plaidant, substitué par Me Adeline Lavault, avocats au barreau de Paris

DÉBATS à l'audience publique du 09 septembre 2025 tenue par Nadia Cordier magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Stéphanie Barbot, présidente de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Anne Soreau, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Stéphanie Barbot, présidente et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 8 juillet 2025

****

FAITS ET PROCEDURE

Mme [M] est associée de la société Erisport.

Par acte du 19 avril 2019, la société Erisport a assigné Mme [M] en paiement de la somme de 45'874, 81 euros au titre d'un solde débiteur de compte courant d'associé.

Par acte du 21 juillet 2020, cette société a appelé en intervention forcée la société Fiduciaire national d'expertise comptable (la société Fidexpertise), expert-comptable chargé de l'établissement de ses comptes.

Par jugement avant dire droit du 24 novembre 2021, le tribunal de commerce de Douai a notamment':

- déclaré irrecevable l'exception d'incompétence matérielle de ce tribunal';

- rejeté l'exception de nullité soulevée par Mme [M]';

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription invoquée par cette dernière';

- jugé l'action de la société Erisport recevable à l'égard de Mme [M] et de la société Fidexpertise';

- ordonné une mesure d'expertise, afin notamment d'avoir un avis technique sur les comptes présentés par les parties.

L'expert a déposé son rapport le 3 avril 2022.

Par jugement du 14 septembre 2023, le tribunal de commerce de Douai a':

- débouté Mme [M] de ses demandes de nullité « évoquées'» in limine litis';

- constaté que ces demandes étaient manifestement abusives';

- condamné Mme [M] au paiement d'une amende civile de 1'000 euros';

- débouté la société Erisport de ses demandes de rectification du compte courant de Mme [M] en ce qui concerne l'impôt foncier de 3'867 euros';

- débouté Mme [H] de sa demande en paiement des sommes de':

- 59'311,53 euros';

- 35'122,01 euros';

- condamné Mme [M] à payer à la société Erisport la somme de 42'402,86 euros';

- débouté Mme [M] de sa demande de dommages et intérêts de 3'000 euros';

- mis hors de cause la société Fidexpertise

- condamné Mme [M] à payer à la société Fidexpertise la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamné Mme [M] à payer à la société Erisport la somme de 8'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamné Mme [M] aux dépens en ce compris les frais d'expertise.

Par déclaration du 17 octobre 2023, Mme [M] a interjeté appel des chefs de la décision entreprise la concernant, en intimant les sociétés Erisport et Fidexpertise.

PRETENTIONS ET MOYENS

Par conclusions signifiées le 15 janvier 2024, Mme [M] demande à la cour de':

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions';

- dire et juger que la prescription quinquennale est acquise au 2 avril 2014, soit 5 ans avant la remise de l'assignation), de sorte que les opérations relatives à son compte d'associé, sont limitées à la période du 2 avril 2014 au 2 avril 2019 et que toutes les opérations antérieures sont couvertes par cette prescription';

- dire et juger que la prescription d'une créance de remboursement de compte courant d'associé ne court qu'à compter du jour où l'associé demande paiement du solde de son compte';

- dire et juger que la création d'un compte courant, réglementé par la loi et les statuts, est constituée par le paiement effectif par inscription sur le compte des dettes ou créances par l'assemblée générale, validée dans les conditions prévues aux statuts';

- «'dire et juger que les sommes figurant en comptabilité, mais non intégrées en compte courant sous les formes précitées ci-dessus, restent des dettes ou créances soumises au droit commun tant en matière de prescription que d'administration de la preuve'»';

- dire et juger qu'aucune dette ne saurait lui être réclamée au titre du prétendu compte courant débiteur, dont la date de constatation réelle et les conditions de déterminations sont inconnues';

- condamner la société Erisport à lui payer «'la somme de 59'311, 53 euros qui lui sont dus (sic) après examen de son compte courant, compensation entre le débité retenu par l'expert de 38'535, 86 euros et la déduction qui doit s'opérer des sommes non justifiées de 40'000 euros, 1290, 89 euros, 4350 euros et 52'231 euros, soit 97'847, 39 euros'»';

- condamner la société Erisport à lui payer «'la somme de 35'122, 01 euros au titre de la facture [Y] pour des travaux commandés avec devis signé par et au bénéfice exclusif de la société Erisport et imputés par erreur. Sur la facture et sur les comptes de Mme [M]'»';

- condamner la société Erisport à lui payer la somme de 3'000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire';

- condamner la société Erisport à lui payer la somme de 6'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens en ce compris le coût de l'expertise';

- réformer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Fidexpertise la somme de 3'000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance';'

- débouter la société Fidexpertise de toute demande de condamnation aux frais irrépétibles, «'Mme [M] étant totalement étrangère à l'appel en garantie et en intervention forcée engagée par la société Erisport seule'»';

- si par impossible la cour ne réformait pas le jugement de première instance, minorer très largement le montant des condamnations aux frais irrépétibles de la société Erisport et de la société Fidexpertise.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 19 janvier 2024, la société Erisport demande à la cour de':

- débouter Mme [M] de son appel et de l'intégralité de ses demandes';

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à porter la condamnation prononcée à l'encontre de Mme [M] et à son bénéfice de la somme de 42'402, 86 euros à 78'269, 41 euros';

- ajoutant au jugement, juger que la condamnation portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 mars 2019 et condamner Mme [M] à lui payer la somme de 5'000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel';

- la condamner aux entiers dépens d'appel.

Par conclusions signifiées par voie électronique du 5 avril 2024, la société Fidexpertise demande à la cour de':

- confirmer le jugement en ce qu'il a':

- mis hors de cause la société Fidexpertise';

- condamné Mme [M] à payer à la société Fidexpertise la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamné la même aux dépens exposés par la société Fidexpertise

- y ajoutant,

- condamner toute partie succombante au paiement de la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépetibles exposés en cause d'appel';

- «'mettre les dépens d'appel exposés par Fidexexpertise'».

Par message RPVA du 30 septembre 2025, réitéré le 13 octobre 2025, la cour a invité Mme [M] à lui faire parvenir les pièces n° 95 à 146 ne figurant pas à son dossier de plaidoirie, et plus particulièrement les pièces 108/1 à , 108/12 expressément visées dans ses conclusions du 15 janvier 2024.

Le conseil de Mme [M] a indiqué être dans l'incapacité d'accéder à la demande de la cour, n'ayant pas obtenu du précédent conseil de Mme [M] les pièces manquantes.

MOTIVATION

En dépit d'une demande d'infirmation générale du jugement entrepris formulée dans le dispositif de ses dernières conclusions d'appel, Mme [U] n'élève aucune critique du chef l'ayant déboutée de ses demandes de nullité évoquées in limine litis. En l'absence de toute critique et de tout moyen, la cour ne peut que confirmer ce chef.

I - Sur la fin de non-recevoir opposée par Mme [H]

Dans une partie consacrée à la fin de non-recevoir, Mme [M] expose que':

- les moyens d'irrecevabilité soulevés par ses soins ne pouvaient être jugés dilatoires par les premiers juges';

- l'attestation d'un comptable ne peut être une reconnaissance et ne peut servir à créer une dette non corroborée par un document démontrant clairement l'origine, la date, et l'acceptation de la dette par le débiteur';

- ni la créance de la société ni la dette de l'associée ne sont en l'espèce démontrées, la société Erisport ne pouvant qu'être déboutée de sa demande';

- s'il est rappelé le principe suivant lequel en matière de compte courant, le point de départ de la prescription est la date de clôture du compte ou la demande en paiement de ce compte, il n'en demeure pas moins que «'la création d'un tel compte ne peut résulter que de la validation des comptes de l'exercice en assemblée générale, car c'est à ce moment que le paiement est réputé fait'»';

- «'en l'absence d'assemblée générale ou de convocation de Mme [M] à ladite assemblée, aucune somme ne peut être réputée inscrite sur le compte courant, de sorte que la demanderesse sera déboutée de sa demande'» ; aucun compte courant effectif n'existe à la date de l'assignation, «'compte tenu de l'absence d'assemblée générale pour l'exercice 2014 et pour les exercices antérieurs'»'; les seuls comptes déposés au greffe sont ceux arrêtés au 31 décembre 2016';

- les documents pour attester des assemblées sont critiquables et en l'absence d'assemblée générale valable, aucune dette ne peut être utilement réclamée.

Elle en déduit que «'plus de 5 années se sont écoulées entre la date de connaissance du fait dont il est demandé réparation (certaines sommes figurant selon une pièce adverse non numérotée mais numérotée par Mme [M] dès 2010, puis 2011, puis 2012, puis 2013, comme celles de 20'423, 50 euros ou 4'325,50 euros)'», de sorte que la prescription est acquise, sans que la société Erisport puisse invoquer une cause d'interruption, l'expertise démarrant au 1er janvier 2014, avec un solde créditeur de 4'225, 61euros.

La société Erisport rappelle les règles concernant le point de départ de l'action en paiement d'un compte courant débiteur et le fait que le compte litigieux n'a jamais été clôturé.

Elle estime que la mise en demeure date du 29 mars 2019 et que l'assignation a été délivrée dans le délai de prescription.

Réponse de la cour

Le'compte'courant'd'associé est une création de la pratique qui constitue une source de financement extra-bancaire très répandue dans le domaine des affaires.

Par leur inscription en compte, et en complément de leurs apports, les'associés'consentent à la société des avances, soit en lui versant des fonds, soit en laissant à sa disposition des sommes qui leur sont dues mais qu'ils renoncent temporairement à percevoir et qui correspondent à des intérêts, dividendes et rémunérations de certaines fonctions.

Juridiquement, la convention de'compte'd'associé s'analyse en un prêt consenti par l'associé à la société (Com., 18 décembre 1990, n° 89-15.808, publié ; Com., 23 juin 2004, n° 02-16.758).

En principe, le compte courant d'associé ne peut présenter un solde débiteur, des dispositions spécifiques l'interdisant expressément, telles que, dans les sociétés à responsabilité limitée, l''article L. 223-21 du code de commerce, ou encore dans les sociétés anonymes à conseil d'administration et dans celles à directoire, les'articles L. 225-43 et L. 225-91 du même code.

La caractéristique essentielle du compte courant d'associé est d'être remboursable à tout moment, sauf convention particulière ou statutaire le régissant, s'agissant d'un contrat s'analysant en un prêt à durée indéterminée. Le principe est donc l'exigibilité de l'avance en compte courant d'associé, dès la demande en remboursement (Com., 10 mai 2011, n° 10-18.749, publié).

La Cour de cassation a affiné le régime applicable aux demandes de remboursement du solde du compte courant d'associé, et plus particulièrement d'un compte courant débiteur (V. Cass. 1re civ., 27 juin 2018, n° 17-18.893).

Il se déduit de cet arrêt que l'exigibilité du compte courant se situe soit au moment de la demande de remboursement, soit à celui de la clôture du compte, et non à la date du dernier mouvement sur le compte, et que la prescription quinquennale de l'action en paiement du solde d'un compte courant d'associé court à compter de l'exigibilité du compte.

Il s'ensuit que les créances portées en compte perdent leur individualité en entrant dans le compte et que seul le solde est soumis à la prescription, ce solde n'étant exigible que par la clôture du compte ou par la demande de remboursement.

Le délai de prescription applicable à une telle demande est le délai quinquennal de droit commun, ce qui n'est d'ailleurs contesté par quiconque en l'espèce.

En premier lieu, au soutien de la fin de non-recevoir tirée de la prescription qu'elle oppose à l'action de la société Erisport en remboursement du solde débiteur de son compte courant, Mme [M] invoque confusément divers moyens qui, pour nombre d'entre eux, sont étrangers à la question de la prescription.

Ainsi consacre-t-elle des développements conséquents sur l'impossibilité de faire un appel immédiat d'un jugement rejetant une fin de non-recevoir et l'absence de caractère dilatoire de ses moyens d'irrecevabilité présentés au juge du fond, après un premier jugement avant dire droit les ayant rejetés, ce qui est sans rapport avec la caractérisation de la fin de non-recevoir invoquée.

Il en est de même des développements qui tendent à contester la réalité d'un compte courant et des opérations inscrites sur ce dernier, pour non-respect des statuts, ou encore en raison de l'absence de tenue des assemblées générales, dont Mme [M] déduit une absence de dettes pouvant être réclamées.

Il sera répondu à ces développements lors l'examen des moyens de fond opposés à la demande de la société Erisport, à supposer la demande recevable.

En second lieu, sans suivre les parties dans le détail de leur argumentation, il convient de constater que la société Erisport se prévaut d'un compte courant d'associé qui serait détenu par Mme [M] et présenterait un solde débiteur dont elle entend obtenir le remboursement, comme en attestent les termes de son assignation délivrée le 2 avril 2019.

Le compte courant d'associé invoqué n'a fait l'objet d'aucune clôture selon la société Erisport, ce qui n'est pas critiqué par Mme [M].

Par contre, le solde de ce compte a fait l'objet d'une demande en remboursement de la part de la société Erisport par mise en demeure du 29 mars 2019. Mme [M] ne soutient ni ne démontre que le paiement du solde du compte qui lui est attribué lui aurait été demandé antérieurement à cette date.

Contrairement à ce que prétend faussement Mme [M], en contradiction avec la jurisprudence précitée, le délai de prescription de l'action en remboursement du solde du compte courant d'associé commence à courir à compter de l'exigibilité du compte, et non de chacune des opérations inscrites en compte. Dès lors, en l'espèce, l'exigibilité du compte doit être fixée au 29 mars 2019, date de la première mise en demeure, qui fixe le point de départ du délai de prescription. L'assignation en paiement ayant été délivrée le 2 avril 2019, l'action de la société Erisport n'est donc pas prescrite.

Ce moyen est donc rejeté. Il sera ajouté au jugement entrepris de ce chef.

II - Sur l'existence d'un compte courant d'associé et son solde

A) Sur l'existence du compte courant d'associé

La cour comprend des développements de fond figurant dans la partie qu'elle consacre à la fin de non-recevoir (ci-dessus rappelés au point I), que Mme [M] entend critiquer, d'une part, l'existence même du compte courant d'associé, en ce que l'accord du gérant n'aurait pas été exprimé, d'autre part, la possibilité d'écrire des opérations en compte dès lors qu'il n'est pas justifié d'une assemblée générale d'approbation des comptes, en bonne et due forme.

Pour fonder cette argumentation, Mme [M] se prévaut de l'article 42 des statuts de la société Erisport, lequel stipule que':

« Chaque associé a la possibilité, avec le consentement de la gérance, de verser dans la caisse sociale les fonds jugés utiles aux besoins de la société. Les conditions de fonctionnement de ces comptes, la fixation des intérêts, les délais pour retirer les sommes sont arrêtés dans chaque cas entre la gérance et les intéressés. Les dispositions de l'article 29 [i.e., les stipulations sur les conventions réglementées entre un gérant, un associé et la société] des présents statuts seront applicables à ces conventions.»

Si cette stipulation se réfère au consentement de la gérance, elle ne mentionne toutefois aucun formalisme pour attester de ce dernier, et encore moins de la nécessité de recueillir ledit consentement dans le cadre d'une assemblée générale, comme le prétend Mme [M].

Il n'est pas plus justifié que l'inscription des opérations en compte et le fonctionnement dudit compte auraient été soumis à un formalisme qui n'aurait pas été respecté, la stipulation précitée prévoyant uniquement un recours aux règles relatives aux conventions réglementées lorsque sont envisagées des modalités de fonctionnement du compte spécifiques tenant, par exemple, à la perception d'intérêts ou au blocage des sommes déposées sur ce compte, modalités dont il n'est ni soutenu ni démontré qu'elles eussent été mises en 'uvre en l'espèce.

L'affirmation de Mme [M] selon laquelle, faute de tenue d'assemblée générale, «'ni la créance de la société ni la dette de l'associée ne sont démontrées'», «'aucun compte courant effectif en l'absence d'assemblée générale tenue pour l'exercice 2014 et pour les exercices antérieurs'» ne pouvant exister, et «'en l'absence d'assemblée générale valable, aucune '''dette'' ne p[ouvant]exister'», est inopérante.

Enfin, Mme [M] ne peut prétendre qu'aucun accord de la gérance n'existerait sur l'ouverture d'un compte courant d'associé à son profit, à elle, Mme [M], dans les comptes de la société Erisport.

En effet, les pièces versées aux débats établissent l'ouverture, dans les grand-livres de cette société, d'un compte courant d'associé à son nom, peu important que les comptes de la société n'aient fait l'objet d'aucune assemblée générale d'approbation des comptes, en bonne et due forme, à supposer ce fait établi.

Ce moyen est donc rejeté.

B ) Sur le solde du compte courant d'associé

Mme [M] précise que «'quatre réclamations de la société Erisport antérieurs à 2014 sont rejetées par le tribunal pour prescription ou pour faute de production de pièces'», poursuivant ainsi':

«'Ce qui vaut dans un cas, vaut pour tous et partout, et le jugement doit être réformé car si une prétention chiffrée est prescrite ou si une prétention chiffrée est rejetée pour défaut de justificatif comptable, le jugement doit aller au bout de son appréciation et déduire ou annuler lesdites prétentions chiffrées des réclamations faites'» à son encontre'; «'Or, le tribunal ne juge plus prescrite ou annulée la même prétention chiffrée quand il s'agit de la condamn[er]'», sous entendu elle, Mme [M]. ( page 9 des conclusions de l'appelante).

La société Erisport fait valoir que l'expert conclut à un compte débiteur de 38'535,86 euros, après avoir retranché plusieurs opérations, ce qu'elle conteste.

Elle souligne que':

- lors des opérations d'expertise, et à la suite des multiples contestations élevées par Mme [M], des vérifications ont été réalisées sur les opérations prises en compte par l'expert, ce qui l'a conduite, elle, société Erisport, à constater des anomalies dans le travail de l'expert';

- les opérations qu'elle a identifiées augmentent le débit du compte, ce qui l'a conduite à modifier ses demandes':

- absence de comptabilisation d'une somme de 8'000 euros payée par ses soins en règlement d'un acompte d'IRPP de Mme [M] en mai 2007, cette dernière ayant fait débité le compte courant de son associé, en lieu et place de son propre compte courant';

- comptabilisation au crédit du compte courant d'associé de deux sommes qu'elles n'a jamais reçues) : 2 loyers de 5 967, 30 euros reçus pour le compte de Mme [M] pour son local loué à la société Pimkie, qui ne figurent pourtant par sur l'unique compte bancaire de la société Erisport ouvert dans les livres de la banque populaires du Nord';

- absence de comptabilisation d'une somme de 12'460 euros payée par ses soins en règlement d'un acompte d'IRPP de Mme [M] en février 2010, ladite somme ayant été passée au débit du compte courant de M. [F], son associé';

- l'expert ne pouvait objecter l'absence de M. [F] dans le présent litige pour refuser de prendre en compte ces sommes, étant observé que, d'une part, ce motif ne pouvait être opposé à la demande au titre des deux loyers, d'autre part, l'absence de M. [F] est sans incidence, l'objet du présent procès étant bien de déterminer uniquement le montant des sommes dues à elle-même par Mme [M].

La société Erisport critique les motifs du jugement ayant estimé que les sommes en question étaient prescrites au regard de leur date, le tribunal distinguant entre la prescription de l'action en paiement du solde débiteur et la prescription d'une demande de rectification de compte courant d'associé.

Elle ajoute que concernant les créances non inscrites en compte courant, ce sont les règles de prescription de droit commun qui doivent s'appliquer. Elle souligne que':

- les deux sommes inscrites au crédit du compte datant des 11 juillet 2008 et 2 septembre 2009, la demande visant à les supprimer du débit du compte n'est donc pas prescrite';

- pour les autres rectifications demandées, elle n'a pas eu connaissance des paiements de dettes personnelles opérées par Mme [M] sans que ces derniers soient inscrits au débit de son compte courant. Elle précise que, à l'inverse de M. [F], Mme [M] s'occupait de la partie administrative et de la comptabilité, et donnait ses instructions au comptable et à l'expert-comptable.

La société Erisport estime que c'est à juste titre que le tribunal a comptabilisé des opérations dont l'expert judiciaire était d'avis qu'elles ne pouvaient être retenues. Elle revient sur différentes opérations (chèque du trésor public, virement «'demi-compte'» au profit de SCI) et sur chacune des contestations de Mme [M].

Réponse de la cour

En premier lieu, les écritures de Mme [M] sont très imprécises et dénuées de cohérence concernant les créances à rejeter. Elles contiennent les moyens ci-dessus reproduits, qui présentent un caractère inintelligible, ne permettant pas à la cour d'y répondre précisément.

Si Mme [M] renvoie au «'tableau récapitulatif de l'expert du 3 octobre 2022'», elle mentionne cependant un «'solde accordé à la société Erisport de 42'402, 86 euros'», montant qui correspond non pas à celui arrêté par l'expert (38'535, 86 euros en faveur de la société Erisport), mais à celui alloué à la société Erisport par le tribunal.

En outre, dans ses écritures, Mme [M] associe de manière constante la prescription et l'absence de production de pièces.

Néanmoins, la cour comprend des développements confus de Mme [M], d'une part, qu'elle ne conteste pas la somme de 3'867 euros ajouté au solde arrêté par l'expert, ce qui porte la créance de la société Erisport à 42'402,86 euros, en sollicitant uniquement la réintégration de 4 opérations (40'000 euros'; 52'231 euros, 1'290, 89 euros, et 4'325, 50 euros), d'autre part, qu'elle réitère une demande de rejet tirée de la prescription des sommes réclamées au titre de ces dernières opérations.

En deuxième lieu, les parties s'opposent sur la détermination du solde du compte courant et la possibilité de remettre en question ledit solde, en intégrant éventuellement des opérations qui auraient été omises.

Les créances portées en compte perdant leur individualité en entrant dans le compte, elles se fondent dans le solde du compte, lequel se trouve soumis aux règles de prescription ci-dessus rappelées.

Par contre, concernant les demandes d'inscription en compte, aux fins de réintégration des opérations au solde, soit au crédit soit au débit, celles-ci s'analysent en des demandes, en paiement ou en remboursement, et se trouvent dès lors soumises à la prescription quinquennale de droit commun.

La société Erisport n'en disconvient pas, qui rappelle, pour les sommes non inscrites en compte, cette règle selon laquelle la prescription est de 5 ans à compter du jour où le titulaire du droit à connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer, conformément aux dispositions de l'article 2224 du code civil.

Néanmoins, il doit être constaté que la société Erisport se contente d'appliquer ces règles (cette règle') aux opérations effectuées par Mme [M], dont la société demande l'inscription en compte, tout particulièrement pour les règlements au titre de l'impôt sur le revenu, mais non aux opérations dont Mme [M] se prévaut, aux motifs qu'elles n'ont pas été portées au crédit de son compte courant. En d'autres termes, cette société soutient que les sommes dont elle demande l'inscription en compte courant ne sont pas prescrites, mais elle ne fait pas valoir que les sommes dont Mme [M] demande l'inscription seraient atteintes par la prescription.

Par ailleurs, aux termes du dispositif de ses conclusions, Mme [M] se contente de demander à la cour d'appel de «'dire et juger que les sommes figurant en comptabilité mais non intégrées en comptes courants sous les formes précitées ci-dessus, restent des dettes ou créances soumises au droit commun tant en matière de prescription que d'administration de la preuve'», sans caractériser, en application de l'article 6 du code de procédure civile, le point de départ de cette prescription. La cour n'en est donc pas valablement saisie d'un moyen visant à voir constater la prescription de l'une quelconque des dettes que lui impute la société Erisport.

Enfin, Mme [M] concluant à l'infirmation de la décision entreprise et la société Erisport à sa confirmation sauf à porter la condamnation de 42'402, 86 euros à 78'269, 41 euros, ce qui équivaut à demander la réformation de cette décision, aucune des parties ne peut être réputée s'approprier les motifs du jugement qui retiennent la prescription de certaines opérations dont il était demandé l'inscription en compte courant.

En conséquence, la cour ne peut que constater qu'elle n'est saisie, ni par Mme [M] ni par la société Erisport, d'une fin de non-recevoir tirée de la prescription concernant l'inscription des sommes en compte courant. Il n'y a donc pas lieu d'y répondre.

En troisième lieu, compte tenu de ces éléments, il convient d'examiner successivement les 4 opérations listées par Mme [M] (40'000 euros'; 52'231 euros, 1'290, 89 euros, et 4'325, 50 euros), dont elle sollicite qu'elles soient réintégrées au solde réclamé, ce qui rendrait ainsi son compte créditeur.

Concernant l'opération à hauteur de 40'000 euros, intitulée dans les écritures de Mme [M] «'extourne 40 000 euros'», la cour constate qu'il n'existe aucune opération de ce montant répertoriée sur le compte.

En réalité, ce montant correspond à l'addition de trois opérations, à hauteur de 15'000, 20'000 euros et 5'000 euros, au titre des SCI que Mme [M] détient, comme le note la société Erisport, sans être contredite par l'appelante. Ce fait est d'ailleurs confirmé par les travaux de l'expert.

Or, l'opération d'extourne (au titre des trois sommes précitées) figure bien sur le compte courant d'associé (pièce 2).

Enfin, l'expert souligne, dans son rapport, l'existence de deux comptes détenus par Mme [M] dans les comptes sociaux de la société Erisport, à savoir, d'une part, le compte courant litigieux et détenu en sa qualité d'associé, d'autre part, le compte fournisseur détenu en sa qualité de bailleresse des immeubles dont elle est propriétaire ou qu'elle détient par le biais de sociétés civiles immobilières (page 10/37 du rapport).

L'expert note d'ailleurs, sans être contredit par Mme [M], que cette somme de 40'000 euros figure bien au crédit du compte fournisseur détenu par l'intéressée dans les livres de la société Erisport (page 18/37 du rapport).

Il n'y a donc pas lieu de procéder à la rectification du solde en intégrant cette somme au crédit du compte courant d'associé de Mme [M].

Concernant la somme de 52'231 euros, elle a été prise en compte au titre de l'écriture figurant en ligne 35 du compte courant d'associé pour un montant de 20'423 euros au débit du compte (Annexes 2 et 3 pour le détail).

Les pièces versées aux débats, à savoir le relevé bancaire de la société Erisport du 10 septembre 2010, mentionnant un virement à la trésorerie des non-résidents pour ce montant, ainsi que le courrier du 8 septembre 2010 adressé par Mme [M] à la trésorerie de [Localité 9] (pièce 27) annonçant le règlement de cette imposition, démontrent que ce virement correspond bien à une dépense personnelle de Mme [M], réglée par la société, ce qui justifie l'absence de réintégration de cette somme en sa faveur dans le décompte arrêté par l'expert.

La somme de 1 290,89 euros du 30 janvier 2014 avec pour bénéficiaire «'lema181 faubourg'» a, à juste titre, été inscrite au débit du compte courant d'associé de Mme [M]. Sa demande visant à la réintégrer, en sa faveur, au solde arrêté par l'expert, n'est pas justifiée au vu des constatations de l'expert.

En effet, il ressort du rapport de l'expert et des pièces, communiquées à celui-ci à l'appui d'un dire et versées aux débats dans le cadre de la présente procédure, que cette dépense correspond à des charges de copropriété dont le bénéficiaire est la société Lema immobilier, société assurant la gestion de la copropriété dans laquelle Mme [M] dispose de deux appartements. Si cette société assure également la gestion d'immeubles appartenant à la SCI Bellain, la production des appels de fonds de cette société et les justificatifs des règlements effectués par cette société, établissent, sans confusion possible, que le règlement de 1'290, 89 euros ne correspond pas à un paiement opéré au profit de cette SCI, mais constitue le paiement de charges de copropriété incombant à Mme [M] à titre personnel.

Concernant le paiement opéré à la société XD Elec, à hauteur de 4'325,50 euros, sont versés aux débats le relevé de compte bancaire de la société Erisport portant mention de ce débit, ainsi que l'extrait de journal comptable imputant cette somme à Mme [M]. Cette dernière n'allègue pas que cette opération aurait été réalisée pour le compte de la société et n'apporte aucun élément pour en attester.

C'est donc de manière justifiée que cette opération a été portée au débit du compte courant de Mme [M].

En conclusion, les critiques soulevées par Mme [M] au titre de ces 4 opérations ne sont pas justifiées. Il n'y a donc pas lieu de modifier, de ces chefs, le solde arrêté par l'expert.

En quatrième lieu, la société Erisport sollicite la prise en compte de différentes opérations, non comptabilisés par l'expert, et venant augmenter le solde débiteur du compte courant de Mme [M].

Compte tenu de l'imprécision des écritures de Mme [M] et de son appropriation du solde retenu par le tribunal, la cour estime que cette dernière fait sienne les observations et conclusions de l'expert quant au fait, d'une part, que certaines sommes dont il est demandé la réintégration auraient été inscrites au débit du compte courant d'associé de M. [F], d'autre part, que ces sommes ne peuvent être prises en compte du fait de l'absence de M. [F] à la présente procédure.

De première part, pour écarter la demande de la société Erisport en rectification du solde du compte courant d'associé de Mme [M] en portant au débit certaines sommes qui, selon l'intimée, auraient été portées au débit du compte courant d'associé de M. [F] par Mme [M], l'expert a indiqué que «'les opérations qui pourraient le concerner [i.e. M. [F]] ne peuvent être retenues'», précisant ainsi qu' « aucune analyse ou réclamation ayant pour preuve ou fondement le compte courant de M. [F] n'est prise en considération dans le cadre des présents travaux d'expertise'» (page 11 sur 37 du rapport).

Cependant, ces observations de l'expert procèdent d'une confusion, puisque l'objet de l'expertise et du présent litige n'est pas la remise en cause des mentions portées sur le compte courant d'associé de M. [F], mais uniquement de déterminer si la société a honoré, par quelque moyen que ce soit, des dépenses personnelles de Mme [M].

A supposer que tel soit le cas, la comptabilisation de cette somme au débit du compte courant d'associé de M. [F] engendre le fait que le même montant n'a pas été porté au débit du compte de Mme [M].

Pour que le solde du compte puisse être rectifié dans le sens sollicité par la société Erisport, il appartient donc uniquement à cette dernière d'apporter la preuve que les dépenses concernées n'étaient pas des dépenses effectuées pour son compte, mais au profit de Mme [M].

De deuxième part, pour justifier du bien-fondé de ses prétentions, la société Erisport allègue qu'elle aurait réglé des acomptes d'impôt sur le revenu (IRPP) de Mme [M], laquelle n'aurait fait figurer qu'une partie du montant honoré au débit de son compte, l'autre partie ayant été débitée du compte courant d'associé de M. [F] pour un montant de 8'000 euros et de 12'460 euros.

Concernant l'IRPP de mai 2017, sont ainsi produits aux débats':

- le relevé de compte courant d'associé de Mme [M] portant au débit, le 11 mai 2017, une écriture d'un montant de 7'048 euros sous l'intitulé «'chèque trésor acpte IRPP'»';

- l'avis d'imposition de Mme [U] de l'année 2017 au titre duquel les acomptes étaient d'un montant de 15'048 euros';

- une souche d'un chèque de la société Erisport d'un montant de 15'048 euros' avec la précision «'acompte d'IRPP'» et le relevé de compte de la société faisant apparaître un débit de 15'048 euros le 14 mai 2017

- et un feuillet, extrait du compte courant d'associé de M. [F], portant au 11 mai 2007 la mention «'CEQ Trésor 8'000 euros'».

La cour d'appel estime que ces pièces établissent que la société Erisport a supporté une dépense personnelle de Mme [M], à hauteur de 15'048 euros, dont seul un montant de 7 048 euros a été comptabilisé au débit du compte courant de cette dernière.

Le solde du compte courant d'associé de Mme [M] doit donc être rectifié, au débit, de la d'une somme de 8'000 euros (15 048 ' 7 048).

Une même pratique s'observe, concernant l'IRPP de février 2010, puisque n'a pas été comptabilisée une la somme de 12'460 euros.

Pour en attester, il est communiqué':

- le courrier de Mme [M] à la trésorerie du 8 septembre 2010 annonçant un virement de solde d'IRPP, après les règlements effectués de 12'460 euros pour l'acompte du 15 février 2010 et une somme de 9 493 euros pour l'acompte du 15 octobre 2010';

- les souches de chèques de la société Erisport du 5 mai 2010 d'un montant, pour l'une, de 12 460 euros avec la précision «'Trésor public'», pour l'autre, de 9 493 euros avec la mention «'Trésor public 2ème acompte IRPP'», ainsi que le relevé de compte bancaire de la société faisant apparaître des débits de 9 493 euros et 12 460 euros au 10 mai 2010';

- un extrait du compte courant d'associé de Mme [M] portant mention au débit, le 5 mai 2010, d'une opération intitulée «'CHQ Trésor 2ème acompte IRPP 9 493 euros'»';

- un extrait du compte courant d'associé de M. [F] portant mention au débit, à la même date du 5 mai 2010, d'une opération intitulée «'CHQ Trésor 12'460 euros'», étant observé qu'il est justifié que, sur cette année 2010, les acomptes au titre de l'IRPP de M. [F] s'élevaient aux sommes de 9 211 euros pour les deux premiers acomptes et de 10'429 euros pour le dernier.

Il est ainsi établi qu'en 2010, la société Erisport a procédé au règlement de l'IRPP de Mme [M] à hauteur de 12'460 euros, sans que cette dernière fasse figurer cette dépense personnelle au débit de son compte courant. Cela justifie la demande de rectification opérée par la société Erisport en ce sens.

De troisième part, Mme [M] n'élève aucune critique à l'encontre de l'affirmation de la société Erisport suivant laquelle les associés des SCI Les Oliviers et Bellain, à savoir M. [F] et Mme [M], ont décidé de solder le compte débiteur de chacune de ces sociétés dans les livres de la société Erisport par apports à égalité entre chacun des associés, via le débit de leurs comptes courants personnels d'associés

De plus, pour attester de ses dires, la société Erisport produit le relevé de compte courant de M. [F], un extrait du journal opération diverses, et les extraits de compte des sociétés portant traces des débits et crédits au titre de ces opérations.'

Il est ainsi établi qu'il s'agissait d'une dette personnelle de Mme [M] mais qui a bien été inscrite au débit de son compte courant d'associé, comme en attestent les explications de la société Erisport elle-même. Il n'y a donc pas lieu à rectification du solde du compte de ce chef, peu important le motif erroné retenue par l'expert tenant au «'rejet des opérations relevant du compte de M. [F]'».

De troisième part, ont été inscrites au crédit du compte courant d'associé de Mme [M] deux sommes de 5'967,30 euros chacune, l'une le 11 juin 2008, l'autre le 2 septembre 2009, qui seraient constituées de loyers reçus pour le compte de Mme [M] pour son local loué à la société Pimkie.

La société Erisport, qui conteste avoir perçu ces sommes, remet en cause l'inscription en compte de ces deux montants, en produisant notamment les relevés de son compte bancaire ouvert auprès de la banque populaire du Nord pour la période du 1er mai 2008 au 30 septembre 2008.

Cette affirmation de la société Erisport n'est pas contestée par l'appelante, pas plus que ne sont discutées les preuves versées aux débats pour attester de la non-perception des sommes litigieuses sur le compte courant de la société, qui indique, sans être contredite, n'avoir qu'un seul compte.

Il convient donc de porter au débit du compte courant d'associé de Mme [U] la somme de 11 934,60 euros (5 967,30 X 2).

En conséquence, il sera fait droit à la demande de rectification du solde du compte courant de Mme [M] afin de le porter à la somme de 74'797, 46 euros (42 402,86 + 8 000 + 12 460 + 11 934,60).

La décision entreprise est donc infirmée en ce qu'elle a condamné Mme [M] à payer à la société Erisport la somme de 42'402,86 euros. Il convient de condamner Mme [M] à payer à la société Erisport la somme de 74'797, 46 euros au titre du solde débiteur du compte courant d'associé.

Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compte de la mise en demeure du 29 mars 2019, conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil.

En conséquence, la demande de Mme [M] tendant à la condamnation de la société Erisport à lui payer le solde créditeur de son compte courant d'associé est rejetée. La décision entreprise est confirmée de ce chef.

III- Sur les demandes reconventionnelles de Mme [M]

Mme [M] estime la société Erisport redevable de la somme de 35'122, 01 euros au titre de la facture [Y] pour des travaux commandés par la société pour elle-même, et «'imputés par erreur sur la facture de Mme [M]'».

Elle conteste tout caractère dilatoire et abusif à sa défense et critique le fait que les premiers juges aient pu estimé abusifs et dilatoires les moyens d'irrecevabilité par elle soulevés, en la condamnant à une amende civile.

La société Erisport fait valoir que la demande au titre de la facture [Y] est prescrite, la décision entreprise devant être confirmée de ce chef, et conclut au rejet de la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, précisant que Mme [M] a fait payer pendant des années l'ensemble de ses charges personnelles et ayant tenté de manipuler la situation, en créditant artificiellement son compte.

Elle précise que l'appréciation du caractère abusif et dilatoire de l'attitude procédurale de Mme [M] est fondée, cette dernière ayant représenté au fond des moyens d'irrecevabilité qui avaient d'ores et déjà été tranchés dans le jugement avant dire droit du 24 novembre 2021.

Réponse de la cour

1) Sur la demande au titre de la facture [Y]

En premier lieu, si la société Erisport développe des moyens tendant à voir constater la prescription de cette demande, force est de constater que le dispositif de ses écritures, dont seul la cour est saisie en application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, ne comporte aucune fin de non-recevoir tirée de la prescription.

Par ailleurs, il convient de souligner que le dispositif du jugement entrepris ne comporte aucune irrecevabilité de ce chef, quand bien même les premiers juges y consacrent des motifs.

Dès lors, la demande de confirmation du jugement en toutes ses dispositions, formée par la société Erisport dans le dispositif de ses conclusions d'appel, ne peut pas inclure, fût-ce implicitement, de demande de confirmation du chef d'une prescription non constatée par les premiers juges.

La cour n'étant ainsi saisie d'aucune fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette demande, il n'y a donc pas lieu d'y répondre.

En second lieu, aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En dépit de la demande formée par la cour d'appel, Mme [M] n'a pas produit, en cours de délibéré, la facture [Y] et les pièces l'accompagnant, figurant sur son bordereau de communication de pièce sous les n° 108/1 à 108-12, expressément visées dans ses conclusions d'appel notifiées le 15 janvier 2024 au soutien de cette demande.

La cour d'appel ne peut dès lors tenir compte que des seules pièces jointes à l'expertise sur ce point. Or, ces pièces ne permettent pas d'établir que lesdits travaux auraient été effectuées au profit de la société Erisport, et non de Mme [M], et ce en contradiction avec l'intitulé même de la facture.

Cette demande ne peut donc qu'être rejetée. La décision entreprise est confirmée en ce qu'elle a débouté Mme [M] de cette demande.

2) Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

En vertu des dispositions des articles 1240 et suivant du code civil, l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et nécessite que soit caractérisée une faute faisant dégénérer en abus le droit d'agir en justice pour que puissent être octroyés des dommages et intérêts à titre de réparation.

Aucun élément de fait et de droit n'est évoqué au soutien de cette prétention, de nature à caractériser et prouver la faute ayant fait dégénérer en abus l'action introduite par la société Erisport, ainsi que le préjudice dont il est sollicité réparation. La demande ne peut donc qu'être rejetée.

La décision entreprise est confirmée en ce qu'elle a débouté Mme [M] de cette demande.

IV - Sur la demande de mise hors de cause de l'expert-comptable

Mme [M] rappelle qu'elle est étrangère à l'appel en intervention forcée et en garantie engagée par la société Erisport à l'encontre de l'expert-comptable.

La société Fidexpertise reprend la motivation des premiers juges, qui a souligné l'absence de prétention de l'une quelconque des parties à son encontre, et conclut à sa mise hors de cause.

La société Erisport est taisante.

Réponse de la cour

Ni Mme [M] ni la société Erisport ne formulant de demande à l'encontre de la société Fidexpertise, en sa qualité d'expert-comptable chargé des opérations de comptabilité de la société Erisport, il ne peut qu'être fait droit à sa demande de mise hors de cause.

V- Sur l'amende civile prononcée par les premiers juges

L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10'000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

La cour comprend de la demande d'infirmation générale formulée par Mme [M] et des critiques qu'elle énonce quant au fait que les premiers juges ne pouvaient estimer abusifs et dilatoires les moyens d'irrecevabilité soulevés par ses soins, que, quand bien même une première décision aurait statué sur ces points, elle entend voir réformer le chef du jugement l'ayant condamnée à une amende civile.

Le fait, pour Mme [M], de présenter des fins de non-recevoir, alors que le jugement avant dire droit avait déjà statué sur celles-ci, fussent-elles identiques - ce que la cour ne peut vérifier, faute pour les parties de produire le jugement avant dire droit - ne constitue ni un abus du droit d'agir ni une action dilatoire, justifiant le prononcé d'une amende civile.

La décision entreprise est donc infirmée en ce qu'elle a prononcé une amende civile à l'encontre de Mme [M].

VI- Sur les dépens et accessoires

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [M] succombant principalement en ses demandes, il convient de la condamner aux dépens d'appel.

Les chefs de la décision entreprise relatifs aux dépens et à l'indemnité procédurale sont confirmés.

Mme [M] supportant la charge des dépens, il convient de la condamner à payer à chacune des sociétés Erisport et Fidexepertise une indemnité de procédure et, en outre, de la débouter de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS'

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a':

- débouté Mme [M] de ses demandes de nullité évoquées in limine litis';

- débouté Mme [H] de sa demande en paiement des sommes de 59'311,53 euros et de 35'122,01 euros';

- débouté Mme [M] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- mis hors de cause la société Fiduciaire national d'expertise comptable';

- condamné Mme [M] aux dépens';

- et condamné Mme [M] à payer aux sociétés Erisport et Fiduciaire national d'expertise comptable des indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par Mme [M]';

CONDAMNE condamner Mme [M] à payer à la société Erisport la somme de 74'797, 46 euros au titre du solde débiteur de son compte courant d'associé, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2019';

DIT n'y avoir lieu de condamner Mme [M] au paiement d'une amende civile';

CONDAMNE Mme [M] aux dépens d'appel';

CONDAMNE Mme [M] à payer à la société Fiduciaire national d'expertise comptable la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE Mme [M] à payer à la société Erisport la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

REJETTE la demande d'indemnité procédurale formée par Mme [M].

Le greffier

La présidente

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