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Décisions

CA Reims, ch.-1 civ. et com., 18 novembre 2025, n° 23/01901

REIMS

Arrêt

Autre

CA Reims n° 23/01901

18 novembre 2025

ARRET N°

du 18 novembre 2025

R.G : N° RG 23/01901 - N° Portalis DBVQ-V-B7H-FNOE

[P]

[I]

c/

[M]

CDDS

Formule exécutoire le :

à :

Me Arnaud GERVAIS

la SELARL FOSSIER NOURDIN

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 18 NOVEMBRE 2025

APPELANTS :

d'un arrêt rendu le 02 mai 2023 par la Cour d'Appel de REIMS

1)° Madame [Z] [P]

[Adresse 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-51454-2023-00459 du 30/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 6])

Représentée par Maître Arnaud GERVAIS, avocat au barreau de REIMS

Monsieur [D] [I]

[Adresse 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-51454-2023-00459 du 30/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 6])

Représenté par Maître Arnaud GERVAIS, avocat au barreau de REIMS

INTIME :

Maître [R] [M]

pris en sa qualité d'ancien mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de Madame [Z] [P], exploitant un bar-restaurant sous l'enseigne QUO VADIS, fonction à laquelle il a été nommé par jugement du tribunal de commerce de Reims le 18 octobre 2005, domicilié es qualité

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Maître Chéryl FOSSIER-VOGT de la SELARL FOSSIER NOURDIN, avocat au barreau de REIMS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DELIBERE :

Mme Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre

Madame Anne POZZO DI BORGO, conseiller

Monsieur Kevin LECLERE VUE, conseiller

en présence de Madame [X] [N], attachée de justice

GREFFIER :

Madame Lozie SOKY, greffier placé lors des débats et de la mise à disposition

MINISTÈRE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

DÉBATS :

A l'audience publique du 30 septembre 2025, l'affaire a été mise en délibéré au 18 novembre 2025,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2025 et signé par Monsieur Kevin LECLERE VUE, conseiller, en remplacement de la présidente de chambre, empêchée, et Madame Lozie SOKY, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DES FAITS

Mme [Z] [P] exploitait une activité de bar restaurant sous le nom Quo Vadis au [Adresse 1].

Par jugement du 06 avril 2004, le tribunal de commerce de Reims a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de Mme [P]. Par jugement du 19 octobre 2004, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire, Me [M] étant désigné liquidateur judiciaire.

Sur appel interjeté par Mme [P], cette cour a, par arrêt du 7 juin 2005, infirmé le jugement de conversion en liquidation judiciaire et ordonné la poursuite du redressement judiciaire.

Par jugement du 18 octobre 2005, le tribunal de commerce de Reims a, une nouvelle fois, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de Mme [P] et désigné Me [M] en qualité de liquidateur judiciaire. Par arrêt du 15 novembre 2006, cette cour a confirmé ce jugement.

Par jugement du 14 décembre 2010, le tribunal de commerce de Reims a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif. Mme [P] a interjeté appel de cette décision et par arrêt du 26 juin 2012, la cour d'appel de Reims a infirmé le jugement entrepris et, statuant à nouveau, a ordonné la clôture de la procédure par apurement du passif avec boni de liquidation au profit de Mme [P]. Par arrêt du 8 juillet 2014, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par Me [M] ès qualités.

En 2016, Mme [P] a fait assigner Me [M] en sa qualité d'ancien mandataire liquidateur devant le tribunal de commerce de Reims afin qu'il lui soit ordonné, tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ancien mandataire judiciaire :

- de restituer le boni de liquidation subsistant,

- de lui régler la somme de 20 225,73 euros à valoir sur la restitution du boni de liquidation,

- de lui verser les sommes de 25 000 euros et 386 595 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de préjudices matériels et immatériels liés notamment à la vente de biens meubles et immeubles.

M. [D] [I], fils de Mme [P], est intervenu volontairement à l'instance.

Par jugement du 7 mars 2017, le tribunal s'est déclaré incompétent s'agissant d'une action en responsabilité civile exercée à l'encontre d'un mandataire judiciaire et a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Reims.

Devant ce tribunal, les requérants ont assigné Me [M] en son nom propre en intervention forcée, donnant lieu à l'ouverture d'une procédure distincte.

Par deux jugements des 7 décembre 2020 et 21 avril 2021, le tribunal judiciaire de Reims a notamment :

- déclaré irrecevables les demandes des requérants contre Me [M] en son nom personnel en l'absence d'intérêt à agir et comme étant prescrites,

- déclaré irrecevables les demandes dirigées contre Me [M] ès qualités d'ancien mandataire judiciaire à la liquidation, les demandes formées contre lui ès qualités ne pouvant concerner que la liquidation,

- débouté Me [M] de ses demande de dommages et intérêts,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné Mme [P] et M. [I] à payer à Me [M] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700, ainsi qu'aux dépens.

Suite aux appels interjetés par Mme [P] et M. [I], la cour d'appel de Reims a, par arrêts du 2 mai 2023 (RG 21/00147 et 21/01654) :

- s'agissant de l'instance engagée contre Me [M] en son nom personnel (arrêt RG 21/00147) :

* confirmé le jugement en toutes ses dispositions qui a notamment déclaré irrecevables les demandes en l'absence d'intérêt à agir et compte tenu de la prescription,

* débouté Me [M] de sa demande pour procédure abusive,

* condamné les appelants aux dépens et à payer à Me [M] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- s'agissant de l'instance engagée contre Me [M] ès qualités (arrêt RG 21/01654) :

* infirmé le jugement en ce qu'il a déclaré Mme [P] irrecevable en sa demande en paiement au titre du boni de liquidation et l'a condamnée aux dépens et à une indemnité de procédure,

statuant à nouveau des chefs infirmés,

* déclaré Mme [P] recevable en sa demande en paiement au titre du boni de liquidation,

* dit que les appelants et Me [M] supporteront chacun la moitié des dépens de première instance,

* condamné Me [M] ès qualités à payer à Mme [P] la somme de 1 654,07 euros au titre du boni de liquidation,

* constaté la compensation entre cette somme et la somme totale de 1 800 euros due par Mme [P] à Me [M] personnellement au titre de condamnations prononcées par arrêt de cette cour le 22 septembre 2015 et par ordonnance du conseiller de la mise en état du 28 décembre 2021,

* condamner Me [M] et M. [I] à supporter chacun la moitié des dépens d'appel.

À la suite de la requête en rectification d'erreur matérielle et omission de statuer déposée par Mme [P] à l'encontre de l'arrêt du 2 mai [Immatriculation 2]/01654 cette cour a, par arrêt du 19 septembre 2023 (RG 23/00836):

- complété le dispositif de l'arrêt rendu le 2 mai 2023 dans l'instance inscrite sous le RG 21/01664 de la façon suivante : 'Complète le jugement rendu le 21 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Reims en ce sens que les demandes de condamnation présentées par Mme [P] contre Me [M] en son nom personnel sont déclarées irrecevables',

- dit n'y avoir lieu de vérifier la pièce n°6 produite par Me [M] correspondant à 'Etat du passif et reddition des comptes' ainsi que la partie appelée 'créances nées après le 6 avril 2004',

- rejeté toutes les autres demandes des parties,

- laissé les dépens à la charge du Trésor public.

Après avoir fait assigner Me [M] en son nom personnel et ès qualités par exploit du 6 novembre 2023 en révision, Mme [P] et M. [I] ont, selon déclaration de saisine du 3 décembre 2023, saisi cette cour d'une demande en révision de ses deux arrêts du 2 mai 2023 ainsi que de celui du 19 septembre 2023.

Mme [P] et M. [I] ont ensuite demandé le dépaysement de leur demande de révision des arrêts. Par ordonnance du 24 janvier 2024, le premier président de cette cour a déclaré irrecevable la requête aux fins de dépaysement de la cour d'appel de Reims.

Suivant exploit délivré le 26 août 2025, dénoncée à Mme la procureure générale, Mme [P] et M. [I] ont fait assigner Me [M], en son nom personnel et ès qualités de mandataire liquidateur à comparaître devant la cour d'appel de Reims aux fins de :

- vu les articles 593 et 595 du code de procédure civile,

- les juger recevables et fondés en leur demande en révision portant sur les arrêts rendus par la cour d'appel de Reims les 2 mai 2023 et 19 septembre 2023,

- juger que Me [M] a commis une fraude en ce qu'il a volontairement menti sur l'avancement de la procédure diligentée à son encontre à titre personnel, notamment en suite du jugement de renvoi du tribunal de commerce du 17 mars 2019,

- juger que Me [M] n'a disposé d'aucun mandat pour réaliser les actifs constituant des biens meubles,

- juger que le délai de prescription a été interrompu par le jugement du tribunal de commerce de Reims du 17 mars 2017,

- juger que le boni de liquidation doit être calculé après avoir soustrait les créances nées après le 6 avril 2004 d'un montant de 46 522,90 euros, non étayé par Me [M], tel qu'il apparait dans l'arrêt du 26 juin 2012,

- juger que Me [M], liquidateur judiciaire de Mme [P], n'a pas été amené à restituer à la requérante le boni de liquidiation subsistant à l'issue de la procédure de liquidation judiciaire dont elle a fait ensuite l'objet de la clôture pour apurement du passif prononcée selon arrêts de la cour d'appel de Reims et de la cour de cassation les 26 juin 2012 et 8 juillet 2014,

- juger que le boni de liquidation doit être fixé à la somme de 20 225,73 euros, soit un actif de 37 140,93 euros auquel se soustrait le passif vérifié de 18 571,66 euros,

- condamner Me [M] tant en son nom personnel qu'ès qualités à régler à la requérante :

* la somme de 20 225,73 euros de boni de liquidation subsistant à l'issue de sa procédure collective, outre les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 14 décembre 2010,

* celle de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices matériels et immatériels liés à l'absence de restitution des fonds précités à bonne date ainsi qu'à la vente fautive des meubles de la concluante,

* celle de 150 000 euros au titre de la perte de son fonds de commerce tel qu'estimé à l'époque par Me [K], notaire, outre celle de 390 000 euros correspondant à la perte d'exploitation du fond soit 30 000 euros par an pendant 13 ans,

* celle de 386 595 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi par la concluante en raison de l'intervention de Me [M] ès qualités dans le cadre de l'assemblée générale de la SCI Padam du 22 février 2006,

- condamner Me [M] tant en son nom personnel qu'ès qualités à leur payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 18 septembre 2025 M. [I] a déposé au greffe de cette cour un 'incident d'inscription de faux', le document précisant qu'il est 'en présence de Mme [P]' et tendant notamment à voir juger que Me [M] a commis une fraude et déclarer faux d'une part l'état du passif et reddition de comptes et créances nées après le 6 avril 2004 et d'autre part l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 12 mars 2019 au motif qu'il a été obtenu par des manoeuvres frauduleuses.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 septembre 2025 Mme [P] et M. [I] demandent à la cour de :

- vu les trois arrêts rendus par la cour d'appel de Reims les 2 mai 2023 et 19 septembre 2023,

- vu le jugement de renvoi du tribunal de commerce de Reims du 17 mars 2017,

- vu les articles 593 et 595 du code de procédure civile,

- les juger recevables et fondés en la demande de révision portant sur les arrêts rendus par la cour d'appel de Reims les 2 mai 2023 et 19 septembre 2023,

ce faisant,

- juger que Me [M] a commis une fraude en ce qu'il a volontairement menti sur l'avancement de la procédure diligentée à son encontre à titre personnel, notamment en suite du jugement de renvoi du tribunal de commerce du 17 mars 2019,

- déclarer faux l'état du passif et reddition des comptes et créances nées après le 6 avril 2004 ainsi que le jugement du tribunal de commerce du 13 mars 2007,

- juger que Me [M] n'a disposé d'aucun mandat pour réaliser les actifs constituant des biens meubles,

- juger que le délai de prescription a été interrompu par le jugement du tribunal de commerce de Reims du 17 mars 2017,

- ce faisant,

- les juger recevables et bien fondés en leurs demandes,

- juger que le boni de liquidation doit être calculé après avoir soustrait les 'créances nées après le 6 avril 2004' d'un montant de 46 522,90 euros, non étayé par Me [M], tel qu'il apparaît dans l'arrêt du 26 juin 2012,

par conséquent,

- juger que Me [M], liquidateur judiciaire de Mme [P], n'a pas été amené à restituer à la requérante le boni de liquidation substituant à l'issue de la procédure de liquidation judiciaire dont elle a ensuite fait l'objet de la clôture pour apurement du passif prononcée selon arrêts de la cour d'appel de Reims et de la Cour de cassation les 26 juin 2012 et 8 juillet 2014,

- juger que le boni de liquidation doit être fixé à la somme de 20 225,73 euros soit un actif de 37 140,93 euros auquel se soustrait le passif vérifié de 18 571,66 euros,

- condamner Me [M] tant en son nom personnel qu'en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de Mme [P] à régler à la requérante la somme de 20 225,73 euros de boni de liquidation subsistant à l'issue de sa procédure collective, outre les intérêts au taux légal à valoir sur cette somme à compter du 14 décembre 2010 jusqu'à parfait paiement,

- condamner Me [M] tant en son nom personnel qu'en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de Mme [P] à payer à Mme [P] la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels à valoir sur l'indemnisation de ses préjudcies matériels et immatériels liés à l'absence de restitution des fonds précités à bonne date ainsi qu'à la vente fautive des meubles de la concluante,

- condamner Me [M] tant en son nom personnel qu'en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de Mme [P] à payer à Mme [P] la somme de 150 000 euros au titre de la perte de son fonds de commerce tel qu'estimé à l'époque par Me [K], notaire, outre celle de 390 000 euros correspondant à la perte d'exploitation du fonds soit 30 000 euros par an pendant 13 années,

- condamner Me [M] tant en son nom personnel qu'en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire à régler à M. [I], intervenant volontaire, la somme de 362 000 euros à titre d'indemnités, cette somme correspondant à une perte de salaire calculée sur la base de 2 000 euros par mois et sur une durée de 13 ans, plus la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- condamner Me [M] à payer à Mme [P] la somme de 386 595 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi par la concluante en raison de l'intervention de Me [M] ès qualités dans le cadre de l'assemblée générale de la SCI PADAM du 22 février 2006,

- condamner Me [M] à régler aux requérants la somme de 7 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- si la cour n'entendait pas faire droit en l'état aux prétentions des demandeurs, juger qu'il convient pour sa parfaite information que Me [M] satisfasse aux sommations de communiquer et interpellatives qui lui ont été délivrées par les concluants,

- en l'état et avant dire droit :

- faire injonction à Me [M] ès qualités de produire aux débats sous astreinte de 200 euros par document et jour de retard à compter de la date de signification de la décision à intervenir les documents suivants :

- toute décision contraire aux termes du jugement rendue par le tribunal de commerce de Reims du 7 mars 2017,

- toute décision ayant autorisé Me [M] à procéder à la vente des biens ayant appartenu à Mme [P],

- toute décision contraire aux termes des décisions rendues par la cour d'appel de Reims le 26 juin 2012 et la Cour de cassation le 8 juillet 2014,

- la preuve du versement de la somme de 18 571,66 euros à la SCI PADAM,

- l'autorisation de participation à l'assemblée du 22 février 2006 par Mme [P] elle-même ou par le tribunal de commerce,

- la notification de la tenue de l'assemblée générale extraordinaire du 22 février 2006 et des résolutions envisagées à Mme [P],

- la notification du procès verbal d'assemblée générale extraordinaire du 22 février 2006,

- la bonne exécution des résolutions du procès verbal d'assemblée générale extraordinaire du 22 février 2006 que Me [M] a contresigné et, le cas échéant, de toute action en réparation des violations desdites résolutions,

- les documents sollicités au terme de la sommation interpellative délivrée à Mme [M] par Me [L] le 26 août 2025,

- dans l'attente de ces documents surseoir à statuer sur les demandes respectives des parties et renvoyer la cause et les parties à la première date utile,

- débouter Me [M] ès qualités ou agissant en son nom personnel de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Ils font valoir que les 3 arrêts dont ils demandent la révision ont été obtenus par la fraude de Me [M] qui a présenté une pièce intitulée ' Etat du passif et reddition des comptes' ainsi que la partie appelée 'créances nées après le 6 avril 20204' visiblement fausses.

Ils expliquent que les éléments contenus dans cette pièce ont été remis en cause devant la cour d'appel qui a pu statuer par 2 décisions du 26 juin 2012 ; que l'ordonnance du 26 juin 2012 statuant sur la rémunération du mandataire à la liquidation de Mme [P] a réduit la somme réclamée par Me [M] de 5 893,64 euros à 1 522,88 euros.

Ils indiquent qu'au vu de l'arrêt du 26 juin 2012 confirmé par la Cour de cassation, seul le montant de 18 571,66 euros est à retenir, toute autre somme étant exclue du calcul des créances.

Ils soutiennent que les arrêts dont il est demandé la révision ont été obtenus par la fraude de Me [M] qui s'est évertué à dissocier les dossiers 21/1654 et 21/147 pour échapper à une condamnation certaine en violation du jugement du tribunal de commerce de Reims du 17 mars 2017 saisi d'une demande de dommages et intérêts, renvoyant la cause et les parties devant le tribunal de grande instance de Reims.

Ils font valoir que Me [M] produit un arrêt de la cour d'appel de Reims l'ayant relaxé de l'accusation de faux public, s'agissant en l'occurrence d'un faux jugement du tribunal de commerce du 13 mars 2007 l'ayant autorisé à vendre les biens meubles appartenant à Mme [P]. Ils ajoutent que le jugement concernant la vente des biens meubles n'a pas été signifiée à cette dernière comme le relève la cour d'appel dans son ordonnance du 19 avril 2012. Ils en concluent que dans ces conditions la vente des biens meubles, d'une valeur de 40 000 euros est illicite et leur ouvre droit à dédommagement.

Ils plaident encore que Me [M] indique être intervenu dans la vente de l'immeuble appartenant à la SCI PADAM en son rôle de mandataire liquidateur de Mme [P] alors qu'aucun mandat ne lui a été donné à cet effet par le tribunal de commerce de Reims ou par Mme [P] et il doit donc l'indemniser de son préjudice subi.

Ils ajoutent que Me [M] ne produit pas les éléments l'ayant autorisé à procéder à la vente des biens de Mme [P] et il doit lui être fait sommation d'en justifier.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 septembre 2025, Me [R] [M], pris en sa qualité d'ancien mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de Mme [T], et en son nom personnel, demande à la cour de :

- déclarer, dire et juger Mme [P] et M. [I] irrecevables et infondés,

- les débouter,

- les condamner solidairement à payer à chacun des défendeurs la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner solidairement à payer à chacun des défendeurs la somme de 20 000 euros pour procédure abusive.

Il fait valoir que Mme [P] et M. [I] ont déposé un incident en l'inscription de faux de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 12 mars 2019 mais ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un faux.

Il plaide que Mme [P] et M. [I], qui soutiennent que les arrêts dont ils demandent la révision ont été surpris par la fraude, se contentent de simples affirmations et d'invectives sans rapporter la moindre preuve ni développer un moyen pertinent.

Il indique que l'ensemble des prétendus faits et agissements dont ils entendent se prévaloir à l'appui de leur demande de révision, ont été débattus et discutés dans le cadre des procédures ayant mené aux arrêts des 2 mai 2023 et 19 septembre 2023, soit bien antérieurement au délai de 2 mois prévu par l'article 596 du code de procédure civile.

Il ajoute que Mme [P] et M. [I] ont eu tout loisir de défendre leur cause au sens de l'article 595 dernier alinéa du code de procédure civile avant que la cour d'appel ne rendent les 3 arrêts litigieux ; qu'ils n'ont d'ailleurs pas manqué de le faire dans chacune des procédures visées ; que leur recours en révision est donc irrecevable.

Sur le fond il plaide que Mme [P] et M. [I] ne rapportent pas la preuve de la fausseté des pièces produites par lui ès qualités ou à titre personnel ni que ces pièces auraient été essentielles à la solution du litige.

Il plaide que les poursuites entreprises depuis 10 ans par Mme [P], ou plutôt son fils M. [I], constituent une forme d'acharnement judiciaire et moral qui doit être sanctionné par l'allocation de dommages-intérêts pour procédure abusive mais également par leur condamnation à une amende civile.

Le ministère public n'a pas conclu.

L'affaire a été plaidée lors de l'audience du 30 septembre 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient dans l'intérêt d'une bonne justice d'ordonner la jonction des dossiers portant les numéros de RG 23/1901, 23/1902 et 23/1903, Mme [P] et M. [I] n'ayant saisi la cour que d'un seul recours en révision même s'il concerne trois arrêts rendus par cette cour.

Selon l'article 593 du code de procédure civile le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit.

L'article 595 du même code précise :

'Le recours en révision n'est ouvert que pour l'une des causes suivantes :

1. S'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ;

2. Si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives qui avaient été retenues par le fait d'une autre partie ;

3. S'il a été jugé sur des pièces reconnues ou judiciairement déclarées fausses depuis le jugement ;

4. S'il a été jugé sur des attestations, témoignages ou serments judiciairement déclarés faux depuis le jugement.

Dans tous ces cas, le recours n'est recevable que si son auteur n'a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu'il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée.'

L'article 596 dudit code ajoute que le délai du recours en révision est de deux mois. Il court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque.

Il appartient au demandeur à la révision de rapporter la preuve de la date à laquelle il a eu connaissance du fait qu'il invoque.

En l'espèce Mme [P] et M. [I] soutiennent que les deux arrêts rendu par cette cour le 2 mai 2023 et celui rendu le 19 septembre 2023 ont été surpris par la fraude commise par Me [M] consistant à avoir menti sur l'avancement de la procédure diligentée à son encontre à titre personnel en suite du jugement de renvoi du tribunal de commerce daté du 17 mars 2019 et en présentant un faux état du passif et reddition de comptes et créances nées après le 6 avril 2004.

Il ressort des éléments communiqués que l'état du passif et la reddition des comptes et créances ont déjà été remis en cause à de nombreuses reprises par les demandeurs au présent recours en révision à l'occasion des procédures les ayant opposés à Me [M] ès qualités de liquidateur ou en nom propre. Ainsi l'arrêt rendu par cette cour le 26 juin 2012 sous le numéro RG 11/187 (pièce 3 des demandeurs au recours ) fait état des incidents de faux à titre incident soulevés par les appelants relativement à ces pièces. Cet arrêt a d'ailleurs, infirmant le jugement du tribunal de commerce qui avait ordonné la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, ordonné la clôture de la procédure collective par apurement du passif avec boni de liquidation.

Au demeurant dans leurs dernières conclusions les demandeurs au recours expliquent en page 10 de leurs dernières conclusions que 'Les trois arrêts rendus les 2 mai 2023 (N° RG 21/01654 et 20/00147) et 19 septembre 2023 (N° RG 23/00836) ont été obtenus par la fraude, Maître [M] ayant présenté une pièce, 'Etat du passif et reddition des comptes' ainsi que la partie appelée 'créances nées après le 6 avril 2004" visiblement fausse.' Ils indiquent dans ces conclusions que ' Les éléments contenus dans cette pièce ont été remis en cause par devant la cour d'appel de Reims qui a pu statuer par deux décisions du 26 juin 2012". Ils ajoutent en page 11 que ces deux décisions ont force de chose jugée et qu'elles ne peuvent être remises en cause.

Il sera encore observé que lors de l'instance ayant conduit à l'arrêt RG 23/836 daté du 19 septembre 2023 Mme [P] et M. [I] avaient déjà remis au greffe une déclaration tendant à ce que soit inscrite en faux et déclaré faux idéologique la pièce 6 produite par Me [M] dans la procédure 23/836 correspondant à 'Etat du passif et reddition des comptes' ainsi que la partie appelée 'créances nées après le 6 avril 2004' ( page 3 de l'arrêt cité ).

Les demandeurs à la révision soutiennent encore que Me [M] est intervenu dans la vente de l'immeuble appartenant à la SCI PADAM ès qualités de mandataire liquidateur de Mme [P] alors qu'aucun mandat ne lui a été donné à cet effet.

Cependant il est constant que Mme [P] a fait assigner Me [M] en nullité de la vente devant le tribunal de grande instance de Paris qui l'a déboutée de ses demandes et que sur son appel, la cour d'appel de Paris l'a, par arrêt du 12 mars 2019, notamment déclarée prescrite en sa demande de nullité de la vente. À la suite de son pourvoi la Cour de cassation a, par arrêt du 1er avril 2021 cassé cet arrêt en ce qu'il a déclaré Mme [P] prescrite en sa demande de nullité de la vente immobilière et la cour d'appel de renvoi dans son arrêt du 15 novembre 2022 a notamment dit irrecevables les demandes formées par Mme [P] aux fins d'annulation de la vente pour violation du procès verbal d'assemblée générale.

Il est à noter que parallèlement au pourvoi formé contre l'arrêt du 12 mars 2019, Mme [P] et M. [I] ont saisi la cour d'appel de Paris d'un recours en révision de ce même arrêt qui a, par arrêt du 13 septembre 2022, déclaré ce recours irrecevable.

Il résulte de ces développements que les faits et agissements invoqués par Mme [P] et M. [I] au soutien de leur demande de révision ont déjà été débattus à plusieurs reprises au cours des instances les ayants opposés à Me [M]. Les motivations des décisions rendues démontrent que ceux-ci ont fait valoir leur cause avant que les décisions ne soient passées en force de chose jugée et qu'ils avaient connaissance depuis plusieurs années des faits invoqués au soutien de leur présente demande de révision. Il s'ensuit que le recours en révision est irrecevable.

Au demeurant et à titre surrabondant il sera rappelé qu'en application de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile dans sa version applicable à la cause, les prétentions des parties formulées dans les conclusions d'appel sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

En l'espèce aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions notifiées le 30 septembre 2025, Mme [P] et M. [I] demandent de les juger recevables et fondés en la demande de révision portant sur les arrêts rendus par la cour d'appel de Reims les 2 mai 2023 et 19 septembre 2023. Ils ne tirent cependant aucune conséquence de leur demande de révision ne réclamant pas la rétractation des arrêts querellés et n'explicitant pas les chefs des dispositifs de ces décisions qui sont dévolues à la cour par leur recours en révision.

Me [M] réclame à titre reconventionnel la condamnation solidaire de Mme [P] et M. [I] au paiement de la somme de 20 000 euros pour procédure abusive.

Il convient sur ce point de rappeler que l'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages et intérêts que lorsqu'est caractérisée une faute en lien de causalité avec un préjudice.

En l'espèce Me [M] n'établit pas l'existence d'une faute commise par les demandeurs au recours en révision lui ayant directement causé un préjudice. Sa demande de dommages et intérêts ne peut donc prospérer.

Mme [P] et M. [I], qui succombent en leur recours, doivent être condamnés in solidum aux dépens de la procédure et verser à M. [M] une indemnité de procédure tel que précisé au dispositif, leur demande faite à ce titre étant nécessairement mal fondée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Ordonne la jonction des affaires enrôlées sous les numéros de RG 23/1901, 23/1902 et 23/1903 ;

Déclare irrecevable le recours en révision formé par Mme [P] et M. [I] ;

Déboute Me [M] de ses demandes de dommages et intérêts ;

Condamne in solidum Mme [P] et M. [I] aux dépens ;

Condamne in solidum Mme [P] et M. [I] à payer à Me [M] la somme de 5 000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le conseiller

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