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Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 1, 20 novembre 2025, n° 23/03693

DOUAI

Arrêt

Autre

CA Douai n° 23/03693

20 novembre 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 20/11/2025

****

MINUTE ELECTRONIQUE :

N° RG 23/03693 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VBSR

Jugement (N° 2023000244) rendu le 13 juin 2023 par le tribunal de commerce de Valenciennes

APPELANTE

SASU Oneiro, représentée par son président domicile cette qualité au siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me David Lacroix, avocat au barreau de Douai, avocat plaidant, Me Camille Desbouis, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

INTIMÉE

S.A.S. Platipus Productions immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le n° 0 494 390 552, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège.

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Alexandra Bodereau, avocat au barreau d'Arras, avocat constitué, Me Sophie Pradel, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

DÉBATS à l'audience publique du 24 septembre 2025 tenue par Carole Catteau magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Béatrice Capliez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Déborah Bohée, présidente de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Carole Catteau, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Déborah Bohée, présidente et Béatrice Capliez, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 3 septembre 2025

****

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Suivant devis du 4 mars 2022, la société Oneiro, qui exploite des chambres d'hôtes sur la commune de [Localité 5] (Nord), a commandé auprès de la société Platipus Productions un dôme en polycarbonate de type «'LightNight ' 4,5 m'» pour un prix de 16 009,20 euros TTC. Elle a consécutivement versé entre ses mains un acompte d'un montant de 8'004,60 euros.

Ce dôme a été livré et installé les 22 et 23 mars 2022.

Ne s'estimant pas totalement satisfaite de l'installation, la société Oneiro n'a pas réglé le solde du prix malgré plusieurs relances du créancier.

Le 19 mai 2022, à la suite d'une violente tempête de grêles, le dôme a été détruit et la société Oneiro a sollicité son remboursement.

La société Platipus Productions n'a pas accepté cette demande et a mis en demeure la société Oneiro. A défaut du règlement du solde de sa facture elle a présenté au président du tribunal de commerce de Valenciennes une requête aux fins d'injonction de payer et par ordonnance du 7 juin 2022 celui-ci a enjoint à la société Oneiro de payer à la société requérante la somme de 8 004,60 euros en principal avec intérêts au taux légal outre les dépens.

La société Oneiro a formé opposition à cette ordonnance et par jugement contradictoire du 13 juin 2023, le tribunal de commerce de Valenciennes a :

- dit l'opposition de la société Oneiro recevable mais mal fondée,

- dit que la décision se substituait à l'ordonnance portant injonction de payer rendue le 7 juin 2022,

Statuant à nouveau,

- débouté la société Oneiro de l'ensemble de ses demandes,

- accueilli partiellement la société Platipus Productions en ses demandes,

- Condamné la société Oneiro à payer à la société Platipus Productions la somme de 8 004,50 euros en règlement de la facture du 8 mars 2022, augmentée des pénalités de retard contractuellement prévues à hauteur de 10 % par an à compter du 7 mars 2023,

- Débouté la société Platipus Productions de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné la société Oneiro à payer à la société Platipus Productions la somme de 1'200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Oneiro aux dépens en ceux compris les frais d'injonction et d'opposition, les frais de greffe étant liquidés à la somme de 135,46 euros.

Par déclaration d'appel du 4 août 2023, la société Oneiro a relevé appel de l'ensemble des chefs de ce jugement. La société Platipus Productions a formé appel incident.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 2 juillet 2025, la société Oneiro demande à la cour de :

- A titre principal,

. infirmer le jugement entrepris en l'ensemble de ces dispositions.

. annuler la vente à raison de l'erreur subie du fait du dol par réticence dolosive ; à défaut prononcer la résolution de la vente en raison de la violation de l'obligation de délivrance de l'accessoire de la chose constituée par l'obligation de la monter de façon à ce qu'elle réponde aux qualités attendues soit solidité et tenue au vent.

- Dans l'un et l'autre cas :

. débouter la société Platipus Productions de sa demande de paiement du solde de prix de 8'004,50 euros augmenté des pénalités de retard contractuellement prévues à hauteur de 10'% par an à compter du 7 mars 2023,

. condamner la société Platipus Productions à rembourser la quote-part du prix de vente versée soit 8 004,60 euros,

. condamner la société Platipus Productions à lui payer une somme de 7 618,91 euros au titre du préjudice subi,

- De chef subsidiaire, juger qu'elle est bien-fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution et à obtenir indemnisation du préjudice subi du fait de l'inexécution par la société Platipus Productions de ses obligations.

- En conséquence : débouter la société Platipus Productions de l'ensemble de ses demandes.

- condamner la société Platipus Productions à lui payer une somme de 15 623,50 euros au titre du préjudice matériel subi,

- Dans tous les cas, condamner la société Platipus Productions à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 juillet 2025, la société Platipus Productions demande à la cour de :

- déclarer la société Oneiro mal fondée en son appel et l'en débouter,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Oneiro de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à lui payer :

- la somme de 8 004,50euros en règlement de la facture du 8 mars 2022, augmentée des pénalités de retard contractuellement prévues à hauteur de 10% par an à compter du 7 mars 2023,

- la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les entiers dépens de 1ère instance en ce compris les frais d'injonction, d'opposition et de greffe

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau :

- condamner la société Oneiro à lui verser la somme de 8 000 euros titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamner la même à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, avec faculté de distraction des dépens,

- débouter la société Oneiro de toutes ses demandes, fins et conclusions.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 3 septembre 2025.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties visées ci-avant pour l'exposé exhaustif de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera observé que la qualification du contrat en contrat de vente telle qu'invoquée et développée par la société Oneiro dans ses écritures ne fait l'objet d'aucune critique. Cette qualification n'est pas davantage de nature à être remise en cause par la cour au regard de la prestation commandée qui consistait en la fourniture d'un dôme en polycarbonate, soit un produit fini, sans spécificité particulière hormis son diamètre, dont le prix était de 11 941 euros HT. La mise à disposition de techniciens pour sa mise en place, qui a été facturée 1 400 euros HT, était une prestation économique accessoire à la fourniture principale du dôme et ne modifie pas la qualification du contrat à la lumière de laquelle seront examinées les prétentions des parties.

De même, l'opposabilité des conditions générales de vente de la société Platipus Productions à la société Oneiro, qui a été écartée par les premiers juges, n'est en réalité pas plus remise en cause par l'intimée qui, tout en affirmant que son cocontractant en a parfaitement eu connaissance, indique que c'est à bon droit qu'il a été jugé qu'elles ne pouvaient lui être opposées.

I - Sur la demande en nullité du contrat

Au soutien de sa prétention la société Oneiro invoque une réticence dolosive de la société Platipus Productions et un manquement du vendeur à son obligation de renseignement en ce qu'il ne l'aurait ni informée ni mise en garde sur les travaux nécessaires à assurer la solidité de la bulle de polycarbonate face aux conditions climatiques et notamment au vent.

La société Platipus Productions réfute quant à elle avoir dissimulé une quelconque information à son cocontractant et affirme qu'elle a parfaitement monté la structure, seules les conditions climatiques exceptionnelles du 19 mai 2022 étant à l'origine de la destruction du dôme.

Ceci étant exposé, aux termes de l'article 1130 du code civil, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

Selon l'article 1137 de ce code, le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

L'article 1112-1 dudit code dispose quant à lui que celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Ce texte énonce également qu'ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties et qu'il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants de ce code.

En l'espèce, le devis établi par la société Platipus Productions a été précédé d'un échange entre les parties ainsi qu'il résulte d'un courriel du 5 janvier 2022 (pièce appelante n° 1) dans lequel cette société transmettait à M. [B] [C], représentant de la SASU Oneiro, diverses informations et liens Internet, notamment sur les habitats transparents en polycarbonate de type «'LightNight'».

Ces bulles en polycarbonate étaient présentées comme adaptées aux contraintes extérieures, solides, autonomes et d'une tenue au vent et à la neige décrite comme parfaite. Il était précisé que si le client le souhaitait, les bulles pouvaient être livrées et montées et que le montage nécessitait la présence de trois personnes pendant une durée d'environ 6 heures.

Il en résulte que la prestation de livraison et de montage était optionnelle, ce qui était porté à la connaissance du client et non dissimulé. Le devis du 4 mars 2022 accepté par la société Oneiro comprend, en sus de la livraison d'un dôme LightNight d'un diamètre de 4,5 mètres, une prestation de «'mise en place'» incluant la présence de 2 personnes pour le «'montage-démontage'» pendant une durée de deux journées avec l'aide de 2 personnes de la société Oneiro pendant toute la durée de l'installation.

Dès lors, les informations relatives aux conditions d'installation du dôme ont été délivrées à la société Oneiro qui n'établit la preuve ni d'une volonté de dissimulation de son cocontractant, ni d'une erreur de sa part sur la prestation qui aurait été provoquée par un comportement dolosif de la société Platipus Productions. En outre, la modulation conventionnelle de la prestation d'installation en ce qu'elle comprenait également la présence de deux personnes mises à disposition par la société Oneiro démontre que les parties ont échangé sur ses conditions matérielles et financières puisqu'il était initialement précisé que l'installation nécessitait la présence de trois personnes pendant 6 heures et qu'une autre solution a finalement été retenue.

Il n'est pas discuté qu'à la suite de sa livraison, le dôme en polycarbonate, qui comportait à l'évidence plusieurs panneaux à assembler au regard des photographies de sa livraison versées par l'appelante, a été monté. Seule la prestation de fixation qui devait assurer sa solidité est en réalité discutée, la question de la solidité de la bulle aux conditions climatiques relevant pour sa part des qualités intrinsèques de la chose vendue.

En conséquence, et à défaut pour la société Oneiro de rapporter la preuve de l'existence d'une réticence dolosive de la société Platipus Productions dans la délivrance des informations nécessaires à l'installation du dôme dont elle a fait l'acquisition qui aurait vicié son consentement lors de la conclusion du contrat, sa demande en nullité du contrat ne peut qu'être écartée.

II - Sur la demande en résolution du contrat

A ' Sur un manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme

Il résulte de l'article 1603 du code civil que le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend, l'obligation de délivrance s'entendant de la délivrance d'une chose conforme aux stipulations contractuelles.

Aux termes de l'article 1615 de ce code, l'obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui est destiné à son usage perpétuel.

Les accessoires sont entendus comme les choses qui constituent le complément naturel ou nécessaire à l'utilisation de la chose vendue, qu'elles soient matérielles ou intellectuelles, telle l'obligation de conseil du vendeur.

Par application de l'article 1224 dudit code, seule une inexécution suffisamment grave peut emporter la résolution d'un contrat.

La société Oneiro fait valoir qu'il appartenait à la société Platipus Productions de procéder au montage et à l'installation du dôme de façon à satisfaire aux caractéristiques annoncées dans le courriel du 5 janvier 2022, à savoir un produit adapté aux contraintes extérieures, solide, avec une tenue au vent et à la neige parfaite alors qu'il a été arraché par le vent et que la bulle, qui s'est envolée, a été très sérieusement endommagée suite à la tempête.

L'intimée quant à elle expose que la bulle a été exploitée pendant les deux mois qui ont suivi son installation, que la société Oneiro ne répondait pas à ses relances pour tenter d'obtenir le paiement de sa facture et que s'il n'y avait pas eu de tempête, elle n'aurait pas repris contact. Elle soutient également qu'aucun rapport d'expertise ne permet de démontrer l'existence d'un défaut de conformité du dôme.

Tout d'abord la cour relève qu'il n'est aucunement discuté que le dôme litigieux correspondait aux besoins de la société Oneiro et aucun manquement n'existe à ce titre.

Il a été rappelé que le devis prévoyait la livraison d'un dôme en polycarbonate de type LightNight d'un diamètre de 4,5 mètre qui a été livré et dont la conformité n'est pas remise en cause. Il prévoyait également sa «'mise en place'» par des techniciens, outre deux personnes que le client s'engageait à mettre à disposition. En conséquence, la société Platipus Productions devait livrer et installer le dôme commandé, ce qui s'entendait non seulement de son assemblage, mais aussi de son installation jusqu'à sa fixation dans le sol dès lors qu'il était présenté comme étant un «'habitat'» qui était destiné à être installé à l'extérieur et qu'il était directement exposé aux évènements climatiques.

L'existence de cette prestation est d'ailleurs établie par les attestations des deux salariés de la société Platipus Productions (pièces n° 24 et 25) qui déclarent l'un et l'autre que «'l'igloo'» n'avait pas été fixé au sol (sur son emplacement final) et que les vis avaient été remises en main propre à M. [B] [C], à la demande de l'intéressé, ce qui induit qu'il avait été prévu que le dôme soit vissé dans le sol.

S'agissant de l'affirmation selon laquelle il ne l'aurait pas été à la demande du client, qui est litigieuse, le lien de subordination qui existe entre les deux témoins et l'intimée ne permet pas à la cour de donner valeur probante à leurs déclarations sur ce point alors même qu'elles sont contredites par le courriel de M. [B] [C] et l'attestation de M. [M] [T]. En effet, dès le lendemain de l'installation, M. [B] [C] se plaignait de l'absence de fixation du sol (pièce appelante n° 6) et dans son attestation du 30 mars 2022 (pièce appelante n° 8), M. [M] [T] déclarait avoir constaté la non-fixation au sol et l'absence de fixation du dôme se situant sur la partie supérieure.

Il est dès lors suffisamment établi que le dôme litigieux n'a pas été fixé au sol à l'issue de la prestation de la société Platipus Productions, qui s'était engagée à le fixer, ce qui constitue un manquement à son obligation de délivrance conforme.

Concernant la «'fixation de la bulle de façon à satisfaire aux caractéristiques annoncées dans [le] courriel du 5 janvier 2022'», à savoir un produit adapté aux contraintes extérieures, solide avec une tenue au vent et à la neige parfaite, il convient d'observer que le dôme a pu être exploité conformément à sa destination normale durant près de deux mois et il a à l'évidence été endommagé par une chute de grêles qualifiée d'exceptionnelle en sorte que la preuve qu'il n'était pas conforme aux caractéristiques convenues et que cette non-conformité serait à l'origine de sa destruction n'est pour sa part pas établie.

B ' Sur les conséquences de l'absence de délivrance conforme

Le manquement caractérisé en l'espèce qui a porté sur une prestation annexe à la vente et n'a pas fait obstacle à l'utilisation par la société Oneiro de la chose vendue ainsi qu'il résulte des photos postées sur son compte Facebook (pièce intimée n° 14) ne présente pas un degré de gravité suffisant susceptible d'emporter résolution judiciaire de la vente.

En conséquence, cette demande sera écartée.

La preuve d'une inexécution étant toutefois rapportée, la société Platipus Productions a engagé sa responsabilité à ce titre.

III ' Sur la demande en paiement présentée par la société Platipus Productions

. Sur l'exception d'inexécution

Selon l'article 1219 du code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

L'appelante, qui s'oppose à la demande en paiement présentée par la société Platipus Productions, affirme qu'elle pouvait, du fait de l'inexécution de son cocontractant, refuser de verser le solde du prix et elle réclame en réparation de son préjudice matériel la restitution de l'acompte qu'elle avait versé, soit la somme de 8 004,60 euros, outre une somme de 7 618,91 euros en réparation du préjudice lié à la perte de chance d'exploiter le dôme après sa destruction du 19 mai 2022 au 29 août 2022.

La société Platipus Productions conteste toute inexécution dans le montage du dôme et fait valoir qu'il a pu être exploité entre le 24 mars et le 19 mai 2022. Elle oppose le caractère exceptionnel de la tempête du 19 mai 2022 et affirme qu'il doit exister une certaine concomitance entre l'élément fautif et l'exception d'inexécution permettant d'exclure toute volonté de «'vengeance'».

Sur ce, la cour a jugé que la société Platipus Productions avait manqué à son obligation de délivrance conforme et qu'elle engageait sa responsabilité à ce titre. Toutefois, son manquement n'est pas suffisamment grave pour emporter résolution de la vente mais également, et pour les mêmes motifs que ceux développés supra, pour justifier que la société Oneiro soit fondée à conserver par-devers elle la moitié du prix de vente et à ne pas payer son solde. L'obligation de l'appelante à l'égard de la société Platipus Productions est en effet distincte de la demande indemnitaire qu'elle présente et qui sera examinée ci-après.

En outre, la preuve du lien de causalité entre la destruction du dôme et l'inexécution reprochée n'est pas rapportée.

En effet, la tempête du 19 mai 2022 apparaît comme ayant été un phénomène climatique d'une particulière violence et exceptionnel. Il ressort à cet égard du courrier de l'assureur de la société Oneiro que la bulle a «'littéralement [été] soufflée par les rafales de vent et détruite par la chute de grêles' (aussi bien l'ossature que les branchements électriques) » (pièce n° 16). Elle a été déclarée irréparable. Le maire de la commune de [Localité 5] a quant à lui attesté qu'un orage de grêle accompagné de vents violents et de fortes pluies d'une ampleur exceptionnelle avaient frappé l'ensemble de sa commune le 19 mai 2022.

Il en résulte que le dôme a été irrémédiablement endommagé à la suite de ces conditions climatiques exceptionnelles qui sont étrangères à la prestation réalisée par la société Platipus Productions, celle-ci fut-elle incomplète.

Le moyen sera en conséquence écarté.

La société Oneiro s'est engagée aux termes du devis du 4 mars 2022, qu'elle a expressément accepté, au paiement de la somme de 16 009,20 euros et elle ne démontre pas de manière opérante qu'elle serait fondée à ne pas exécuter son obligation de paiement.

C'est dès lors à bon droit que les premiers juges l'ont condamnée à payer à la société Platipus Productions la somme de 8 004,50 euros au titre de la facture litigieuse et le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Aucun moyen n'étant développé relativement à l'application à cette condamnation des pénalités de retard contractuelles d'un montant de 10'% l'an depuis le 7 mars 2023, le jugement sera également confirmé sur ce point.

IV - Sur la demande indemnitaire présentée par la société Oneiro

La société Platipus Productions doit réparer le préjudice subi du fait de son inexécution, lequel ne peut toutefois résulter de la destruction du dôme consécutivement à la tempête du 19 mai 2022 compte tenu de l'analyse qui précède.

Dès lors, la demande de dommages-intérêts présentée par la société Oneiro à raison d'une perte de chance de pouvoir exploiter le dôme qui aurait été subie à compter du 19 mai 2022 jusqu'au 29 août 2022 doit être rejetée.

S'agissant du préjudice matériel allégué, la cour observe que la société Oneiro ne conteste pas avoir pu exploiter la chambre d'hôte installée dans le dôme jusqu'à sa destruction et en réalité, le seul préjudice dont la preuve est rapportée est celui de la facturation d'une prestation non réalisée, à savoir la fixation du dôme au sol.

Compte tenu de sa nature, ce préjudice sera justement indemnisé par l'octroi de la somme de 1 000 euros que la société Platipus Productions sera condamnée à payer à la société Oneiro à titre de dommages-intérêts.

Le jugement dont appel sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté la société Oneiro de l'ensemble de ses demandes.

V- Sur la demande de dommages-intérêts présentée par la société Platipus Productions

La société Platipus Productions soutient que la société Oneiro, qui savait qu'il n'existait aucun problème majeur de montage du dôme, n'a pas exécuté le contrat de bonne foi et n'a pas voulu trouver de solution au litige opposant les parties. Elle lui reproche également de ne pas avoir spontanément exécuté le jugement, exposant qu'elle a dû faire intervenir un commissaire de justice pour le recouvrement des condamnations. Elle fait valoir que ce comportement a eu des conséquences lourdes sur sa santé financière et celle de son dirigeant qui a dû se faire accompagner médicalement.

L'appelante, qui conteste toute mauvaise foi de sa part, affirme qu'elle a tenté d'obtenir un accord et qu'elle n'a pas payé spontanément les causes du jugement compte tenu de l'infirmation qu'elle sollicitait. Elle expose également que le préjudice moral éventuel du dirigeant, qui n'est pas justifié, n'est pas identique à celui de la société et que les difficultés de trésorerie ne sont pas plus démontrées.

La bonne foi se présume et il convient de rappeler que la mauvaise appréciation qu'une partie fait de ses droits ne suffit pas à établir qu'elle serait de mauvaise foi. De même, l'absence de paiement spontané d'un débiteur ne permet pas de caractériser sa mauvaise foi ou son intention malveillante.

La société Oneiro, si elle n'est pas fondée à invoquer la nullité du contrat ni à solliciter sa résolution, voit toutefois une partie de ses prétentions prospérer en ce que le manquement de la société Platipus Productions à son obligation de délivrance conforme a été établi.

Elle a par ailleurs à plusieurs reprises manifesté un mécontentement dans les courriers adressés après la tempête, puis proposé une solution amiable le 11 février 2023 (pièce appelante n° 28), ce qui ne permet pas de caractériser sa mauvaise foi.

Au surplus, la société Platipus Productions ne justifie aucunement de l'existence du préjudice distinct de l'intérêt au taux légal majorant la somme due qui résulterait de l'absence de paiement de sa facture, ainsi qu'il est prévu par l'article 1231-6 du code civil. Elle ne démontre en effet pas les difficultés de paiement alléguées ni les problèmes de santé rencontrés par son représentant qui seraient en lien avec la facture impayée.

En conséquence, la demande de dommages-intérêts qu'elle présente sera rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.

VII - Sur les frais du procès

Le jugement sera en confirmé en ce que la société Oneiro a été condamnée aux dépens de première instance ainsi qu'à payer à la société Platipus Productions la somme de 1'200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Oneiro, qui succombe partiellement, sera condamnée aux dépens de l'appel. Le sens de la décision commande de rejeter la demande d'indemnité de procédure présentée par la société Platipus productions en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans les limites de l'appel';

Rejette la demande en annulation de la vente présentée par la société Oneiro' ainsi que sa demande en résolution de la vente';

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a':

- Condamné la société Oneiro à payer à la société Platipus Productions la somme de 8 004,50 euros en règlement de la facture du 8 mars 2022, augmentée des pénalités de retard contractuellement prévues à hauteur de 10 % par an à compter du 7 mars 2023';

- Débouté la société Platipus Productions de sa demande de dommages et intérêts';

- Condamné la société Oneiro aux dépens, en ce compris les frais d'injonction de payer, les frais de greffe étant liquidés à la somme de 135,46 euros';

- condamné la société Oneiro à payer à la société Platipus Productions la somme de 1 200 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

L'infirme pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant';

- Juge que la société Platipus Productions a manqué à son obligation de délivrance conforme';

- Condamne la société Platipus Productions à payer à la société Oneiro la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts';

- Condamne la société Oneiro aux dépens de la procédure d'appel';

- Dit n'y avoir lieu à condamnation de la société Oneiro au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier

La présidente

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