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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-3, 21 novembre 2025, n° 21/04625

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/04625

21 novembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT AU FOND

DU 21 NOVEMBRE 2025

N° 2025/228

Rôle N° RG 21/04625 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHGDF

S.C.I. OCEANE

C/

[H] [S]

[R] [P] épouse [S]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Philippe RULLIER

Me Isabelle TERRANCLE

Décision déférée à la cour :

Jugement du tribunal judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 23 février 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/00686.

APPELANTE

S.C.I. OCEANE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

sis [Adresse 3]

représentée par Me Philippe RULLIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉS

Monsieur [H] [S] exerçant sous l'enseigne 'ASSUR [S]'

né le 28 août 1971 à [Localité 2]

demeurant [Adresse 1]

Madame [R] [P] épouse [S] exerçant sous l'enseigne 'ASSUR [S]'

née le 08 novembre 1965 à [Localité 2]

demeurant [Adresse 1]

représentés par Me Isabelle TERRANCLE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Julien DESOMBRE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et assistés de Me Béatrice LOUPPE de la SELARL KL2A - KNAFOU & LOUPPE AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 juillet 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Béatrice MARS, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marianne FEBVRE, présidente,

Madame Béatrice MARS, conseillère rapporteure,

Madame Florence TANGUY, conseillère.

Greffier lors des débats : Mme Flavie DRILHON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2025, prorogé au 21 novembre 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2025,

Signé par Marianne FEBVRE, présidente et Flavie DRILHON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La société Océane a assigné en indemnisation sur le fondement de l'article 1242 du code civil et des articles L 520-1 et 521-1 du code des assurances M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S], en leur qualité d'agent général, leur reprochant d'avoir manqué à leur devoir de conseil et de loyauté en ne lui indiquant pas la nécessité de souscrire une assurance dommages-ouvrage dans le cadre d'une opération de construction dont les travaux ont été confiés à la société DMB Bâtiment et en n'attirant pas son attention sur le risque de prescription encouru au titre de la responsabilité décennale des constructeurs de cette société.

Par jugement du 23 février 2021, le tribunal judiciaire d'Aix en Provence a :

- déclaré irrecevable l'action en responsabilité de la SCI Océane à l'encontre de M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S], comme étant prescrite ;

- condamné la SCI Océane à payer à M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S] la somme globale de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SCI Océane aux dépens, avec droit de recouvrement au profit des avocats l'ayant réclamé et pouvant y prétendre ;

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement.

La société Océane a relevé appel de cette décision le 29 mars 2021.

Vu les dernières conclusions de la société Océane, notifiées par voie électronique le 18 septembre 2023, aux termes desquelles il est demandé à la cour d'infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Aix en Provence en date du 23 février 2021 et, statuant à nouveau, de :

- condamner in solidum M. [H] [S] et Mme [R] [S] à lui payer la somme de 157 197,12 euros à titre de dommages et intérêts,

- débouter M. [H] [S] et Mme [R] [S] de toutes leurs demandes,

- condamner ces derniers in solidum M au paiement de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions de M. [H] [S] et de Mme [R] [P] [S], notifiées par voie électronique le 5 avril 2024, aux termes desquelles il est demandé à la cour, de :

A titre principal,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Aix en Provence le 23 février 2021 en ce qu'il a jugé l'action de la SCI Océane prescrite,

A titre subsidiaire en cas d'infirmation,

- juger l'action de la SCI Océane au titre de l'absence de souscription d'un contrat dommages-ouvrage à l'encontre de M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S] est prescrite et donc irrecevable,

- juger que la SCI Océane, tiers au contrat d'assurance de responsabilité civile décennale, n'a pas qualité à agir à l'encontre de M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S] et que son action est donc irrecevable,

- juger que le caractère décennal des désordres n'est pas prouvé,

- juger que la SCI Océane, gérée par un professionnel de la construction, avait connaissance de l'obligation de souscrire une assurance dommages-ouvrages à l'ouverture du chantier,

- juger que le préjudice allégué par la SCI Océane n'est pas prouvé,

En conséquence,

- débouter la SCI Océane de toutes demandes, fins et conclusions tournées à l'encontre de M. [H] [S] et Mme [P] [S],

En tout état de cause,

- condamner la SCI Océane à payer à M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI Océane à aux dépens,

L'ordonnance de clôture est en date du 6 mai 2025.

A l'audience du 4 juillet 2025, les parties ont été avisées de ce que l'affaire était mise en délibéré au 24 octobre 2025, puis informées qu'il était prorogé au 21 novembre 2025.

MOTIFS DE LA DECISION :

La société Océane soutient que le point de départ de la prescription quinquennale prévue à l'article 2224 du code civil se situe au 19 juin 2017, date du refus de garantie qui lui a été opposé par la société Areas Dommages et que son action introduite par acte du 21 février 2019 n'est donc pas prescrite.

M. et Mme [S] font valoir que le point de départ de l'action de la société Océane se situe à la date à laquelle cette dernière savait ou aurait dû savoir qu'elle n'avait pas souscrit de police dommages-ouvrage.

Le courrier adressé à la société Océane le 19 juin 2017 par la société Aeras, assureur responsabilité civile décennale de la société DMB Bâtiment, mentionne : « la facture de travaux du 30 juillet 2007 correspondant à la 2ème et dernière situation de travaux constitue la date de réception tacite de l'ouvrage (') les constructeurs sont déchargés des responsabilités et garanties pesant sur eux en application des articles 1792 après 10 ans à compter de la réception des travaux. La responsabilité décennale de la société DM Bâtiment, et par conséquent notre garantie, ne peuvent plus être recherchée compte tenu de la prescription acquise ».

Il convient de rappeler que l'obligation pour le maître d'ouvrage, avant le début des travaux, de souscrire une assurance dommages-ouvrage est sans rapport avec celle incombant au constructeur de contracter une assurance de responsabilité civile décennale.

En conséquence, il ne peut être soutenu que la société Océane a eu connaissance du dommage lié à l'absence de souscription d'une assurance dommages-ouvrage au moment du refus de garantie opposé par l'assureur de la société DMB Bâtiment.

Ainsi, le courrier du 19 juin 2017 de la société Aeras, assureur de la société DMB Bâtiment, notifiant un refus de garantie à la société Océane du fait de la prescription de l'action en responsabilité décennale ne peut constituer le point de départ de la prescription relative à l'action engagée par cette société à l'encontre de M. et Mme [S], en leur qualité d'agent général d'assurance, auxquels il est reproché de ne pas avoir conseillé la souscription d'une assurance dommages-ouvrage.

C'est à la date à laquelle aurait dû être souscrite cette assurance dommages-ouvrage, soit préalablement au début des travaux que s'est réalisé le dommage pouvant éventuellement ouvrir droit à réparation et l'action en responsabilité devait être intentée dans les cinq ans, étant rappelé que la société Océane indique que les travaux ont débuté « courant 2005 ».

En conséquence, comme l'indique à juste titre le premier juge dont la décision sera confirmée, l'action en responsabilité intentée par la société Océane ayant été introduite par acte du 21 février 2019 et aucun acte interruptif ou suspensif de la prescription n'étant intervenu entre temps, elle est irrecevable comme étant prescrite.

Partie perdante, la société Océane sera condamnée à payer à M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S], ensemble, une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant contradictoirement, par arrêt mis à la disposition des parties au greffe ;

Confirme dans son intégralité le jugement du 23 février 2021 ;

Y ajoutant,

Condamne la société Océane à payer à M. [H] [S] et Mme [R] [P] [S], ensemble, une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Océane aux entiers dépens de la présente instance.

Le Greffier, La Présidente,

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