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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch. civ., 20 novembre 2025, n° 22/03043

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 22/03043

20 novembre 2025

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

2ème CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 20 NOVEMBRE 2025

N° RG 22/03043 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MYRG

S.A.R.L. ACG ARCHITECTURE

Mutuelle MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

c/

[U] [Y]

[T] [G]

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

S.A. MMA IARD

S.A. AXA FRANCE IARD

S.A.R.L. [K]

S.A. MUTUELLE DE [Localité 17] ASSURANCES

S.A.R.L. TIP

S.A. GAN ASSURANCES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 17 mai 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 12] ( RG : 21/01121) suivant déclaration d'appel du 24 juin 2022

APPELANTES :

S.A.R.L. ACG ARCHITECTURE

demeurant [Adresse 7]

Représentée par Me Stéphane MILON de la SCP LATOURNERIE - MILON - CZAMANSKI - MAZILLE, avocat au barreau de BORDEAUX

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS ès-qualités d'assureur de la société ACG ARCHITECTURE

demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Stéphane MILON de la SCP LATOURNERIE - MILON - CZAMANSKI - MAZILLE, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[U] [Y]

né le 29 Mars 1973 à [Localité 15]

de nationalité Française

Profession : Expert Automobile

demeurant [Adresse 5] / FRANCE

Représenté par Me Marie-cécile GARRAUD de la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES, avocat au barreau de BORDEAUX

[T] [G]

née le 11 Avril 1981 à [Localité 18]

de nationalité Française

Profession : Infirmière

demeurant [Adresse 5] / FRANCE

Représentée par Me Marie-cécile GARRAUD de la SCP DEFFIEUX - GARRAUD - JULES, avocat au barreau de BORDEAUX

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Perrine ESCANDE de la SCP BAYLE - JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A. MMA IARD

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Perrine ESCANDE de la SCP BAYLE - JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A. AXA FRANCE IARD en qualité d'assureur de la SARL [K]

demeurant [Adresse 4]

[Localité 10]

Représentée par Me Jean philippe LE BAIL de la SCP D'AVOCATS JEAN-PHILIPPE LE BAIL, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A.R.L. [K]

demeurant [Adresse 14]

Représentée par Me Jean philippe LE BAIL de la SCP D'AVOCATS JEAN-PHILIPPE LE BAIL, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A. MUTUELLE DE [Localité 17] ASSURANCES

demeurant [Adresse 11]

Représentée par Me Xavier LAYDEKER de la SELARL LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A.R.L. TIP

demeurant [Adresse 8]

S.A. GAN ASSURANCES au capital du 109 817 739 €, inscrite au RCS de [Localité 16] sous le n°542 063 797

demeurant [Adresse 9]

Représentée par Me Bénédicte DE BOUSSAC DI PACE de la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été examinée le 06 octobre 2025 en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Jacques BOUDY, Président

Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller

Madame Christine DEFOY, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Marie-Laure MIQUEL

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

ARRÊT :

- par défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

1. Aux termes d'un contrat du 27 septembre 2011, les époux [Y] ont confié à la Sarl ACG architecture, assurée auprès de la MAF, la construction d'une maison d'habitation sur un terrain leur appartenant, [Adresse 6] à [Localité 13].

2. Le lot plâtrerie a été attribué à la Sarl Tip, assurée auprès de la Sa Mutuelle de [Localité 17] Assurance.

Cette société a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire selon jugement du 28 octobre 2014.

Le lot charpente métallique bardage a été attribué à la Sarl [K], successivement assurée auprès de la Sa Axa France iard, puis de la Sa Mma iard et Mma assurances mutuelles et enfin de la Sa Gan assurances.

Le lot menuiseries extérieures a été attribué à la société Efficalu.

3. Ces travaux ont fait l'objet d'une réception expresse par procès verbal du 05 août 2013.

4. Se plaignant de l'apparition de différents désordres, les époux [Y] ont obtenu, par ordonnance de référé du 13 décembre 2016, la désignation d'un expert en la personne de M. [L]. Il a déposé son rapport le 28 janvier 2020.

5. Par acte des 12, 21, 25, 29 janvier et 2 février 2021, les époux [Y] ont saisi le tribunal judiciaire de Bordeaux d'une action indemnitaire dirigée contre la Sarl ACG architecture, la MAF, la Sarl TIP, la société Mutuelle de Poitiers Assurance, la Sarl [K] et la Sa Axa France iard.

Par acte du 19 octobre 2021, la Sarl [K] a appelé en intervention forcée son assureur précédent, les sociétés Mma iard et Mma assurances mutuelles et son assureur suivant, la Sa Gan assurances.

6. Par jugement du 17 mai 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- déclaré irrecevables les prétentions soutenues contre la société TIP ;

- condamné la Sarl ACG architecture et la MAF à payer in solidum aux époux [Y], ensemble, la somme de 3 460,60 euros TTC au titre du dommage matériel issu de la surchauffe de la mezzanine et la somme de 2 000 euros TTC en réparation du préjudice de jouissance consécutif ainsi que les sommes de 87 922,60 euros TTC avec indexation sur le BT01 à compter du 28 janvier 2020 en réparation du préjudice matériel issu du défaut de continuité de l'isolation thermique ainsi que la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice de jouissance pendant travaux ;

- débouté les époux [Y] du surplus de leurs demandes ;

- débouté la Sarl ACG et la MAF de leurs actions récursoires ;

- condamné la Sarl ACG architecture et la MAF à payer in solidum aux époux [Y], ensemble, une indemnité de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

- rappelé que le jugement est de droit exécutoire à titre provisionnel et dit n'y avoir lieu de l'écarter ;

- débouté les autres parties de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum l'ACG architecture et la MAF aux dépens, recouvrés ainsi qu'il est dit à l'article 699 du code de procédure civile.

7. Par déclaration du 24 juin 2022, la société ACG architecture et la MAF ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions du 14 mars 2023, elles demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnées à verser les sommes de 3 460,60 euros TTC, 2 000 euros, 87 922,60 euros TTC et 1 000 euros aux époux [Y].

Statuant à nouveau,

* Sur la surchauffe de la mezzanine,

- débouter les époux [Y] de la demande qu'ils présentent au tire du préjudice de jouissance en lien avec la surchauffe de la mezzanine ;

- condamner les sociétés [K], mutuelle de [Localité 17] assurances, TIP et Axa France iard à garantir et les relever indemnes des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre et ce sur quelque fondement que ce soit au titre du désordre relatif à la surchauffe de la mezzanine et d'un éventuel préjudice de jouissance résultant de ce désordre et ce dans une proportion qui ne pourra être inférieure à 40'.

* Sur le défaut de continuité de l'isolation thermique et d'étanchéité à l'air,

si la cour devait retenir le caractère décennal du désordre,

- condamner les sociétés [K], TIP, mutuelle de [Localité 17] assurances et Axa France iard à garantir et les relever intégralement indemnes des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre au titre des désordres relatifs au défaut de continuité de l'isolation thermique et d'étanchéité à l'air ;

- à titre subsidiaire, condamner les sociétés [K], TIP, mutuelle de [Localité 17] assurances et Axa France iard à garantir et les relever indemnes des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre au titre des désordres relatifs au défaut de continuité de l'isolation technique et d'étanchéité à l'air dans une proportion qui ne pourra être inférieure à 70'.

Si la cour retient que le désordre procède de la théorie des dommages intermédiaires,

- juger qu'aucune faute n'est imputable à la société ACG en lien avec les désordres dénoncés ;

- en conséquence, prononcer leur mise hors de cause.

À titre subsidiaire,

- condamner les sociétés [K], TIP, mutuelle de [Localité 17] assurances et Axa France iard à garantir et les relever indemnes des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre au titre des désordres relatifs au défaut de continuité de l'isolation thermique et d'étanchéité à l'air dans une proportion qui ne pourra être inférieure à 70' ;

- débouter les époux [Y] des demandes qu'ils présentent au titre de leur préjudice de jouissance en lien avec les désordres.

À titre subsidiaire,

- condamner les sociétés [K], TIP, mutuelles de [Localité 17] assurances, Axa France iard, Mma iard et Mma iard assurances mutuelles à les garantir des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre au titre du préjudice de jouissance.

En tout état de cause,

- débouter les parties intimées et appelants incidents de l'ensemble des demandes qu'ils forment à leur encontre ;

- réduire à de plus justes proportions l'indemnité sollicitée par les requérants au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déclarer opposable la franchise contractuelle contenue dans la police qu'ils ont souscrite ;

- condamner les parties succombantes à lui verser une somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les parties succombantes aux dépens en suivant le pourcentage de responsabilité qui pourrait être opéré par le tribunal entre les intervenants à l'acte de construire.

8. Dans leurs dernières conclusions du 14 décembre 2022, les époux [Y] demandent à la cour de :

À titre principal,

- infirmer le jugement en ce qu'il a limité les sommes qui leur ont été allouées au titre de leur préjudice de jouissance ;

- confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions.

Statuant à nouveau,

- condamner in solidum la société ACG architecture et la MAF à leur verser :

- la somme de 5 400 euros au titre de leur préjudice de jouissance en lien avec la surchauffe au droit de la mezzanine ;

- la somme de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance à subir durant les travaux à intervenir ;

- condamner in solidum la société ACG architecture et la MAF à leur verser la somme de 2 500 euros au tire des frais irrépétibles exposés devant la cour ;

- condamner in solidum la société ACG architecture et la MAF aux entiers dépens.

À titre subsidiaire,

- condamner in solidum la société ACG, la MAF, la mutuelle de [Localité 17], l'entreprise [K], les compagnies Mma iard Sa et Mma iard assurances mutuelles et la société Axa France iard à leur verser la somme de 87 922,60 euros TTC avec indexation sur le BT01 à compter du 28 janvier 2020 au titre de leur préjudice matériel lié au défaut de continuité de l'isolation thermique et d'étanchéité à l'air.

- Plus subsidiairement, condamner in solidum la société ACG, la MAF, la mutuelle de [Localité 17], l'entreprise [K] et le Gan à leur verser la somme de 87 922,60 euros TTC avec indexation sur le BT01 à compter du 28 janvier 2020 au titre de leur préjudice matériel lié au défaut de continuité de l'isolation thermique et d'étanchéité à l'air ;

- condamner in solidum la société ACG, la MAF, la mutuelle de [Localité 17], l'entreprise [K], les compagnies Mma iard Sa et Mma iard assurances mutuelles et la société Axa France iard à leur verser la somme de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance à subir durant la réalisation des travaux de reprise des désordres :

- plus subsidiairement, condamner in solidum la société ACG, la MAF, la mutuelle de [Localité 17], l'entreprise [K] et le Gan à leur verser la somme de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance à subir durant la réalisation des travaux de reprise des désordres ;

- condamner in solidum la société ACG, la MAF, la mutuelle de Poitiers, l'entreprise [K], les compagnies Mma iard Sa et Mma iard assurances mutuelles et la société Axa France iard à leur verser la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour d'appel ;

- plus subsidiairement, condamner in solidum la mutuelle de Poitiers, l'entreprise [K] et le Gan à leur verser la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour d'appel ;

- condamner in solidum la mutuelle de [Localité 17], l'entreprise [K], la société Axa france iard et les compagnies Mma iard Sa et Mma iard assurances mutuelles aux entiers dépens, en ce compris les frais de référé et de l'expertise judiciaire menée par Monsieur [L] ;

- plus subsidiairement, condamner in solidum la mutuelle de [Localité 17], l'entreprise [K], la société Axa France iard et les compagnies Mma iard Sa et Mma iard assurances mutuelles aux entiers dépens, en ce compris les frais de référé et de l'expertise judiciaire menée par Monsieur [L].

9. Dans leurs dernières conclusions du 14 décembre 2022, la Sarl [K] et la Sa Axa France iard demandent à la cour de :

À titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions en déboutant la Sarl ACG architecture et la MAF de leur appel et en les condamnant à leur payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

À titre subsidiaire,

- condamner la société ACG architecture et la MAF ainsi que la mutuelle de [Localité 17] assurance, assureur de la Sarl TIP, à les relever indemnes de toute condamnation prononcée à leur encontre ;

- condamner la compagnie Gan et, à titre subsidiaire, les compagnies Mma iard et Mma iard assurances mutuelles à la garantie de toute condamnation prononcée à son encontre sur un fondement autre que celui de la garantie décennale ;

- condamner la Sarl ACG architecture, les compagnies MAF, mutuelle de [Localité 17] assurance, Gan et, subsidiairement, Mma iard et Mma iard assurances mutuelles à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

10. Dans leurs dernières conclusions du 07 mars 2023, les sociétés Mma iard et la Mma iard assurances mutuelles demandent à la cour de :

À titre principal,

- juger que la société [K] n'a commis aucune faute ;

- juger que la responsabilité de la société [K] ne peut être recherchée ;

- en conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce que la responsabilité exclusive des désordres incombe à la société ACG architecture.

À titre subsidiaire,

* si la cour considérait les désordres comme étant de nature décennale,

- juger qu'elles n'étaient pas les assureurs à la date de réclamation ;

- juger que le contrat d'assurance souscrit par la société [K] auprès d'elles exclut la prise en charge des dommages immatériels consécutifs qui ne sont pas de nature pécuniaire ;

- prononcer leur mise hors de cause ;

- débouter la société ACG architecture, la compagnie MAF, la société [K], Axa France iard, la mutuelle de [Localité 17] et les époux [Y] de l'ensemble des demandes formulées à leur encontre.

* Si la cour considérait les désordres comme n'étant pas de nature décennale,

- juger que la société [K] avait connaissance du désordre relatif à la surchauffe de la mezzanine lors de la souscription de son contrat auprès d'elles ;

- juger que le contrat d'assurance souscrit par la société [K] auprès d'elles exclut la reprise des ouvrages de l'assuré, les travaux nécessaires pour compléter l'ouvrage et les dommages immatériels consécutifs qui ne sont pas de nature pécuniaire ;

en conséquence,

- prononcer leur mise hors de cause ;

- débouter les époux [Y], la mutuelle de [Localité 17], la société [K], Axa France iard, la société ACG architecture et la MAF de l'ensemble des demandes formulées à leur encontre ;

- à défaut, appliquer la franchise contractuelle d'un montant de 3 000 euros au titre du préjudice immatériel pour la garantie responsabilité civile professionnelle ou de 10 000 euros en cas de préjudice immatériel consécutif à un désordre de nature décennale.

En tout état de cause,

- condamner la société ACG architecture et la MAF ou toute partie succombant à leur payer une indemnité de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel, outre les entiers dépens.

11. Dans ses dernières conclusions du 14 décembre 2022, la Sa Gan assurances demande à la cour de :

- constater qu'aucun appel n'a été interjeté à son encontre ;

- ordonner sa mise hors de cause ;

- condamner in solidum la Sarl ACG architecture et la MAF à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

À titre subsidiaire,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

À titre infiniment subsidiaire,

- juger que sa garantie n'est pas acquise ;

- débouter l'ensemble des parties de leurs éventuelles réclamations dirigées à son encontre.

À titre plus infiniment subsidiaire,

- déclarer opposable à l'ensemble des parties la franchise prévue au contrat souscrit par la Sarl [K] auprès d'elle et déclarer cette dernière recevable et bien fondée à déduire le montant de sa franchise contractuelle de l'indemnité due, soit 10' avec un minimum de 1,50 l'indice BT01 et un maximum de 6,09 l'indice BT01.

12. Dans ses dernières conclusions du 15 décembre 2022, la société Mutuelle de [Localité 17] Assurances demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

à titre principal,

- débouter les époux [Y] et toute autre partie qui viendrait à conclure à son encontre de leurs demandes dirigées contre elle.

À titre subsidiaire,

- condamner la Sarl ACG architecture et son assureur, la Sarl [K] et ses assureurs Axa France iard, Mma iard, Mma iard assurances mutuelles et Gan assurances à garantir et la relever indemne de l'ensemble des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre au profit des époux [Y] ;

- faire application de la franchise contractuelle de 10' avec un minimum de 457 euros et un maximum de 1 232 euros qui est opposable au titre des préjudices immatériels ;

- débouter toute partie du surplus de leurs demandes ;

- condamner la partie succombante à lui régler une indemnité de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

13. La Sarl TIP n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 septembre 2025.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I- Sur la chaleur excessive dans la mezzanine

14. L'expert a constaté la matérialité de ce désordre: « Nous avons noté que les constats de surchauffe faits par notre confrère [D] ne sont pas contestés par les parties. Notre confrère a relevé au niveau de la mezzanine une température de 4 à 5°C [supérieure] à la température extérieure : 34° pour 30°, le 23/06/2016 et 39° pour 34° le

18/07/2016, avec une température de paroi de 43 et 51°C. »

L'expert considère cependant : « Ce dommage est gênant pour l'utilisation de la mezzanine, mais ne rend pas la maison impropre à sa destination, dans son ensemble car, s'il participe à une ambiance chaude dans la maison, la chaleur se concentre en partie haute de la maison et affecte donc moins les pièces de séjour du rez-de-chaussée » (rapport page 14).

En ce qui concerne sa cause, l'expert indique que la société ACG avait prévu dans son CCTP (lot n°3) que la couverture métallique serait constituée de panneaux sandwich isolants de 10 cm d'épaisseur mais qu'au stade de l'appel d'offres, cette prestation a été modifiée.

En effet, la société [K] avait prévu dans son devis du 1er août 2012, la pose d'un simple bac acier non isolant dont l'expert précise que cette prestation est nettement moins coûteuse.

15. Ce désordre est imputé par l'expert à la seule société ACG à laquelle il reproche un défaut de conception : 'investi d'une mission complète il appartenait à l'architecte, auteur d'une conception originale de l'ouvrage intégrant deux types d'isolant, de prévoir un dispositif propre à prévenir les effets de ce mode constructif allait inévitablement engendrer, quand bien même chacun d'eux était-il réalisé en parfaite conformité avec le CCTP et les règles de l'art ».

Pour remédier à ce désordre, l'expert préconise la création d'une ventilation des combles perdus avec le renforcement de l'isolation thermique en allège et la mise en place d'un écran d'étanchéité à l'air raccordé sur le bardage isolant extérieur.

Cette prestation a été chiffrée par la société [K] dans un devis retenu par l'expert judiciaire et dont le montant s'élève à la somme de 3.146 € HT, soit 3.460,62 € TTC (TVA 10%).

16. Il n'est pas contesté que ce désordre ne relève pas de la garantie décennale en ce qu'il ne rend pas l'ouvrage impropre à sa destination.

17. La société ACG Architecture ne conteste pas non plus avoir une part de responsabilité en ayant validé le devis de la société [K] qui répondait à un souci d'économie des maîtres de l'ouvrage, mais soutient que cette dernière ne saurait s'exonérer de toute responsabilité.

Qu'en effet, elle était tenue à son égard d'une obligation de conseil.

Que, société spécialisée, elle a commis une faute en prévoyant une solution inadaptée à la place de celle qui avait été prévue dans le CCTP (cahier des clauses techniques particulières).

18. La société ACG incrimine également la société Tip, titulaire du lot plâtrerie, qui devait 'se soucier de l'isolation qui devait être mise en place en sous-face de la couverture'.

Sur ce,

19. Il convient de rappeler que la modification apportée à la couverture de la mezzanine ne provient pas de la société [K] mais de l'architecte lui-même.

Celui-ci avait nécessairement conscience des conséquences de cette modification et il lui appartenait de prévoir les moyens d'y pallier ou d'alerter les maîtres de l'ouvrage.

20. La société [K] et plus encore, la société Tip, n'avaient pas de raisons particulières d'alerter le maître d'oeuvre dont ils étaient fondés à penser qu'il avait pleine conscience des conséquences de sa décision.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il n'a retenu que la seule responsabilité de ce dernier.

Il sera également confirmé quant à la réparation du préjudice matériel dont l'évaluation n'est pas contesté.

21. Les époux [Y] concluent en revanche à l'infirmation du jugement quant au préjudice de jouissance qu'ils évaluent à 600 € par an pendant 9 ans, soit 5 400 €.

Il est vrai que la pièce dont il s'agit est quasiment inutilisable dès que les températures extérieures dépassent un certain seuil.

Ainsi, l'expert [D], appelé à titre amiable par les époux [Y], a-t-il pu mesurer une température intérieure de 34 ° C le 23 juin 2016 à 18h pour une température extérieure de 30 ° et une température intérieure de 39 °, le 18 juillet 2016, pour une température extérieure de 34 °.

Par suite, la somme réclamée n'apparaît pas excessive et sera retenue.

II- Sur le défaut de continuité de l'isolation thermique et d'étanchéité à l'air.

22. L'expert judiciaire a constaté que les parois extérieures de la maison sont constituées par deux types d'ouvrages :

- un bardage isolant à double peau, faisant partie du lot charpente métallique et bardage dévolu à l'entreprise [K],

- un doublage isolant intérieur de type Placostyl avec rails verticaux de 48 mm et panneaux de laine de verre de 60 mm, attaché à l'ossature secondaire de la charpente métallique (société Efficalu).

23. Qu'il existait des défauts de continuité de l'étanchéité à l'air au droit des encadrements des menuiseries et des volets roulants qu'il impute à des erreurs de conception.

Il indique en effet : les « ouvrages de bardage isolation et de doublage intérieur ont chacun été réalisés conformément aux marchés, aux plans EXE et aux règles de l'art.

De ce fait, la lame d'air située entre les deux parois est recoupée au périmètre des menuiseries extérieures et rien n'a été prévu pour empêcher l'air extérieur d'y pénétrer, les bavettes normales d'habillage étant faites pour l'étanchéité à l'eau, mais pas à l'air.

Il s'agit d'une erreur de conception technique de la jonction des ouvrages de deux entreprises différentes ».

24. L'expert judiciaire retient la responsabilité de la société ACG Architecture au titre de ce défaut de conception: « En effet compte tenu de la conception d'origine de la maison, mêlant des techniques à caractère industriel et des techniques plus traditionnelles de bâtiment, il était indispensable d'étudier les conséquences de ce mélange, aux raccords entre les ouvrages des différentes entreprises. »

25. L'expert reproche aussi aux entreprises : [K], TIP et Efficalu "leur absence de réserves sur l'absence des plans de détail des interfaces et lors de leurs travaux" (page 24).

26. Les époux [Y] soutiennent qu'il s'agit d'un désordre relevant de la garantie décennale en relevant la mention de l'expert selon laquelle 'cette circulation parasite d'air d'une lame, normalement étanche, affecte directement l'étanchéité à l'air de la maison et porte donc atteinte au clos et au couvert » .

27. La sarl ACG Architecture considère que la position du tribunal qui a retenu la théorie des désordres intermédiaires, est contestable et qu'en toute hypothèse, la responsabilité des sociétés [K] et Tip ne pouvait être écartée.

Qu'en effet, en matière de conception pour exécution, les études sont dues par les entrepreneurs de sorte qu'il leur appartenait d'étudier l'incidence de la mise en oeuvre d'une menuiserie et de son coffre de volets roulants dans la paroi intérieure.

Elle sollicite donc d'être relevée indemne de toute condamnation par ces entreprises.

28. Cependant, il n'est pas établi que ce désordre est de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination dans la mesure où ses conséquences n'ont pu être mesurées en termes de déficit de chauffage et de surconsommation d'énergie et ce d'autant moins, que, comme l'a relevé l'expert, qu'il n'y a pas eu de relevé objectif des températures et que surtout, les travaux réservés par les maîtres de l'ouvrage portent sur la séparation entre le volume chauffé et le sous-sol.

Qu'ainsi, en l'absence de séparation, l'air froid pénétrant par la porte du garage et l'effet de l'absence normale de chauffage du sous-sol affectent le volume chauffé et participent grandement à la gêne ressentie.

Par conséquent, le jugement sera confirmé qui a écarté la présomption de responsabilité issue de l'article 1792 du code civil et s'est fondée sur les principes de la responsabilité pour faute prouvée propre aux dommages intermédiaires.

29. Or, l'expert a parfaitement caractérisé la faute de l'architecte qui ne s'est pas préoccupé de veiller à ce que la mise en place de trois éléments de construction distincts, à savoir les menuiseries et les coffrets de volets roulants, le bardage extérieur métallique et le dispositif de plâtrerie et d'isolation intérieure, par trois entreprises distinctes ne se traduise pas par un défaut de cohérence entre eux et par une rupture de continuité dans l'isolation.

Comme le rappellent à juste titre les maîtres de l'ouvrage, le maître d'oeuvre était chargé d'une mission complète et ne peut donc se retrancher derrière l'affirmation que son rôle se limitait au seul aspect architectural.

30. Il ne peut non plus incriminer les sociétés [K] et Tip dont il n'est pas contesté qu'elles n'ont pas failli dans l'exécution des lots qui leur étaient confiés.

En effet, aucune faute n'est caractérisée à leur charge alors d'une part, qu'une troisième entreprise était également concernée, la société Efficalu (pose des menuiseries) et que d'autre part et surtout, ces sociétés n'intervenaient pas nécessairement simultanément et que la chronologie de leurs interventions respectives n'est pas établie.

Qu'en d'autres termes, à supposer qu'elles fussent débitrices d'un devoir de conseil ou d'alerte à l'égard du maître d'oeuvre, il n'est pas possible de déterminer sur laquelle de ces entreprises il pèserait précisément alors que seul le maître d'oeuvre disposait d'une vision globale des tâches imparties à chacune et par voie de conséquence, des mesures à prendre pour assurer une isolation parfaite.

31. Il s'ensuit que les actions récursoires seront rejetées.

32. Pour remédier à ce désordre, l'expert prévoit la création d'une étanchéité à l'air au périmètre des menuiseries extérieures par la mise en place d'un écran, avec dépose et repose des tôles d'habillage.

Cette prestation a été chiffrée à la somme de 74.003,60 € TTC dans un devis produit par la société [K].

En complément de ce devis, l'expert prévoit les prestations complémentaires suivantes :

- isolation thermique et acoustique complémentaire, nécessaire au périmètre des menuiseries extérieures pour un montant de 10.362 € TTC suivant devis de la société Antunes Plâtrerie en date du 15 octobre 2018,

- isolation du comble avec une trappe d'accès suivant devis établi par la société Gironde Bâtiment en date du 12 décembre 2019 pour un montant de 1.562,40 € TTC,

- dépose et repose des coffres de volets roulants avec façonnage de ces derniers et mise en place d'un joint étanche. Ces prestations sont évaluées à la somme de 3.420 € TTC.

33. Ces évaluations ne sont pas contestées de même que la société Maf ne conteste pas devoir sa garantie.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a mis à la charge de cette dernière, in solidum avec la sarl Acg Architecture, la somme totale de 87 922,60 € TTC avec indexation.

Pour ce qui concerne le préjudice de jouissance subi pendant la réalisation des travaux, les époux [Y] sollicitent une somme de 5000 € alors que le tribunal ne leur a alloué que celle de 1 000 € au motif que la gêne sera minime, seuls quelques meubles devant être déplacés et à protéger, les travaux se déroulant pour l'essentiel à l'extérieur.

La sarl Acg et la société Maf concluent au rejet de la demande.

Il convient de confirmer le jugement car même si les travaux se dérouleront à l'extérieur, il en résultera inévitablement une gêne dans la vie quotidienne des occupants.

Il résulte de ce qui précède que sont mis hors de cause les autres parties à l'instance.

Il n'apparaît pas inéquitable d'accorder aux époux [Y], en cause d'appel, la somme de 2 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile .

Les dispositions du jugement frappé d'appel sur ce point seront confirmées.

Il ne sera pas fait application de ce texte pour le surplus.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux du 17 mai 2022 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a accordé la somme de 1 000 € en réparation du préjudice de jouissance subi du fait de la chaleur excessive régnant dans la mezzanine;

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Condamne in solidum la sarl Acg Architecture et la société Maf à payer aux époux [Y] la somme de 5 400 € en réparation du préjudice de jouissance subi du fait de la chaleur excessive régnant dans la mezzanine;

Y ajoutant,

Condamne in solidum la sarl Acg Architecture et la société Maf à payer aux époux [Y] la somme de 2 500 €par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

Dit n'y avoir lieu de faire application de ce texte pour le surplus.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Marie-Laure MIQUEL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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