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Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 11, 21 novembre 2025, n° 25/06439

PARIS

Ordonnance

Autre

CA Paris n° 25/06439

21 novembre 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

L. 742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU 21 NOVEMBRE 2025

(1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/06439 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CMJFR

Décision déférée : ordonnance rendue le 19 novembre 2025, à 11h13, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris

Nous, Stéphanie Gargoullaud, présidente de chambre à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Marie Bounaix, greffière aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANT :

M. [Y] [T]

né le 17 juin 1985 à [Localité 1], de nationalité russe

précisant à l'audience être M. [O] [G] [Y] [T]

RETENU au centre de rétention : [Localité 2]

assisté de Me Laura Bassaler, avocat de permanence au barreau de Paris, présent en salle d'audience de la Cour d'appel de Paris

INTIMÉ :

LE PREFET DE L'ORNE

non comparant, non représenté, ayant versé un mémoire en défense

MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience

ORDONNANCE :

- contradictoire

- prononcée en audience publique

- Vu l'ordonnance du 19 novembre 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris ordonnant la prolongation du maintien de M. [Y] [T], dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 30 jours ;

- Vu l'appel motivé interjeté le 20 novembre 2025 , à 12h31 , par M. [Y] [T] ;

- Vu le mémoire en défense versé par la préfecture de l'Orne le 20 novembre 2025 à 17h00 ;

- Après avoir entendu les observations :

- par visioconférence, de M. [Y] [T], assisté de son avocat, qui demande l'infirmation de l'ordonnance ;

- du conseil du préfet tendant à la confirmation de l'ordonnance ;

SUR QUOI,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

M. [O] [G] [Y] [T] a été placé en rétention dans le cadre d'une mesure relative à une personne condamnée pour des faits de terrorisme.

M. [O] [G] [Y] [T] a, en effet, été condamné, à une peine de 9 ans d'emprisonnement, pour des faits de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme

La troisième prolongation a été décidée par l'ordonnance du 19 novembre 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris.

M. [O] [G] [Y] [T] a interjeté appel en soutenant les moyens suivants :

- l'irrecevabilité de la requête de la préfecture du fait de l'absence de communication d'une copie actualisée du registre

- l'irrecevabilité de la requête de la préfecture du fait de l'absence de pièces prouvant les diligences de l'administration

- le défaut de présentation devant le juge des libertés et de la détention puisqu'il a refusé de signer la convocation mais n'a pas dit qu'il ne voulait pas se présenter

- l'absence de nécessité de la prolongation en rétention

Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative d'[Localité 2].

MOTIVATION

Sur le registre atualisé

M. [Y] [T] ne démontre pas davantage que devant le premier juge, dont il y a lieu d'adopter les motifs, en quoi le resgitre produit ne serait pas actualisé. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur l'absence du retenu devant le premier juge

S'il est exact qu'un refus de signer ne vaut pas refus de comparaitre, ce refus de signer prive le juge de la possibilité de savoir que l'intéressé souhaitait comparaître, alors même que le premier juge retient que 'Monsieur [Y] [T] [...] régulièrement convoqué, qui refuse de comparaître à notre audience d'après le mail du Centre de rétention administrative de [Localité 2] du 19 novembre 2025 reçu au greffe du juge des libertés et de la détention à 09h12 ce même jour; En présence de Me Farah LOQUES son conseil'.

Il s'en déduit que le moyen n'est pas fondé.

Sur les dispositions de l'article L 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'absence de preuve des diligences, pièces justificatives utiles

Selon l'article L 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par dérogation à l'article L. 742-4, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut également être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours si l'étranger a été condamné à une peine d'interdiction du territoire pour des actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal ou s'il fait l'objet d'une décision d'expulsion édictée pour un comportement lié à des activités à caractère terroriste pénalement constatées, dès lors que son éloignement demeure une perspective raisonnable et qu'aucune décision d'assignation à résidence ne permettrait un contrôle suffisant de cet étranger.

S'agissant des diligences à accomplir, il appartient au juge, en application de l'article L. 741-3 du code précité, de rechercher concrètement les diligences effectives de l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, sans qu'il y ait lieu d'imposer la réalisation d'actes sans véritable effectivité, tels que des relances auprès des consulats, dès lors que celle-ci ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires (1re Civ., 9 juin 2010, pourvoi n° 09-12.165, publié). Il ne peut être reproché à l'administration française le défaut de réponse du consulat.

En l'espèce, l'intéressé fait l'objet d'une décision d'expulsion édictée pour un comportement lié à des activités à caractère terroriste pénalement, il convient de rechercher si son éloignement demeure une perspective raisonnable et si aucune décision d'assignation à résidence ne permettrait un contrôle suffisant de cet étranger.

Or l'éloignement demeure une perspective raisonnable au regard des diligences accomplies puisque

la préfecture a saisi :

- avant le placement en retention : les autorités consulaires géorgiennes ;

- le 06 octobre 2025, les autorités consulaires azerbaïdjanaises (qui ont répondu ne pas reconnaître l'intéressé le 6 novembre);

- le 13 octobre et le 13 novembre 2025, à nouveau, les autorités consulaires géorgiennes ;

- le 13 novembre 2025, les autorités consulaires du Kazakhstan ;

Sur la possibilité d'une assignation à résidence, M. [O] [G] [Y] [T] soutient qu'il présente des garanties de représentation qui suffiraient à la mise en 'uvre de son éloignement.

Or, aucune pièce du dossier ne permet de considérer qu'il se maintiendrait à disposition de l'administration alors même qu'il a fait l'objet d'un arrêté ministériel d'expulsion, lequel se fonde, notamment, sur la menace à l'ordre public représenté par l'intéressé qui a été condamné :

1/ par la cour d'appel de Paris à une peine de 9 ans d'emprisonnement, pour des faits de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme

2/ par jugement du 17 janvier 2018 rendu par le tribunal correctionnel de Pontoise, à une peine 4 mois d'emprisonnement, pour des faits de recel de bien provenant d'un délit puni d'une peine n'excédant par 5 ans d'emprisonnement ;

3/ par jugement du 09 janvier 2019 rendu par le tribunal correctionnel de Pontoise, à une peine de 8 mois d'emprisonnement, pour des faits de recel de bien provenant d'un délit puni d'une peine n'excédant par 5 ans d'emprisonnement en récidive.

M. [O] [G] [Y] [T] n'est pas titulaire d'un document de voyage de sorte que l'administration demeure dans l'attente d'un laissez-passer consulaire, .

M. [O] [G] [Y] [T] n'a jamais entamé de démarches en vue de quitter le territoire français, le risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement est ainsi caractérisé et actuel.

Ainsi la saisine des consulats n'est pas serieusement contestée, peu important que la Russie ne soit pas la destination choisie par l'administration. Les diligences sont en cours et les pièces produites ne permettent pas de considérer que les relations avec les autorités seraient inexistantes. L'éloignement demeure à cet égard une perspective raisonnable, étant précisé que la recherche d'un pays de retour peut justifier la poursuite de la mesure de rétention ( Avis CE, 14 décembre 2015, n° 393591) et qu'il n'est pas démontré l'impossibilité de procéder à un éloignement dans le temps de la rétention (1re Civ., 18 novembre 2015, n° 14-29.075).

Au demeurant, il résulte d'une jurisprudence constante que le juge administratif est seul compétent pour connaître de la légalité des décisions relatives au séjour et à l'éloignement, quand bien même leur illégalité serait invoquée par voie d'exception à l'occasion de la contestation, devant le juge judiciaire, de la décision de placement en rétention (1re Civ., 27 septembre 2017, pourvoi n° 17-10.207).

La critique en ce qu'elle porterait sur l'éloignement ne relève donc pas de la compétence de notre juridiction qui ne saurait, sans excès de pouvoir, statuer sur ce point.

Il y a donc lieu d'adopter les motifs retenus par le premier juge.

Dans ces conditions, en l'absence d'irrégularité résultant des actes antérieurs au placement en rétention, en l'absence de toute illégalité susceptible d'affecter les conditions, découlant du droit de l'Union, de légalité de la rétention, et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer l'ordonnance critiquée.

PAR CES MOTIFS

CONFIRMONS l'ordonnance,

DISONS que la présente ordonnance sera notifiée à l'intéressé par l'intermédiaire du chef du centre de rétention administrative (avec traduction orale du dispositif de l'ordonnance dans la langue comprise par l'intéressé ),

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.

Fait à [Localité 3] le 21 novembre 2025 à

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Le préfet ou son représentant L'avocat de l'intéressé

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