Cass. com., 14 octobre 2014, n° 13-17.638
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mouillard
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 février 2013), que, le 12 mars 2010, la SARL Sifas (la société Sifas), dont M. X... était gérant, a émis deux billets à ordre de 250 000 euros chacun au profit de la société Crédit du Nord (la banque), lesquels mentionnaient la société Sifas comme souscripteur et comportaient la double signature de M. X... ; que, le 18 mai 2010, la société Sifas a été mise sous sauvegarde ; que, par ordonnance du 2 septembre 2010, la banque a été autorisée par le juge de l'exécution à inscrire un nantissement judiciaire provisoire sur les parts sociales détenues par M. X... au sein de la SCI Le Lido ; que, le 4 octobre 2010, la banque a assigné en paiement de la somme de 500 000 euros M. X... en qualité de donneur d'aval ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque la somme de 500 000 euros, majorée des intérêts au taux légal, d'avoir dit que les intérêts seront capitalisés annuellement et que, pendant la durée du plan de sauvegarde de la société Sifas, les poursuites à son encontre seraient conditionnées à la justification du jugement arrêtant le plan et aux dispositions de ce dernier et dont pourrait se prévaloir le garant alors, selon le moyen :
1°/ que M. X... s'était engagé à titre personnel, et non en sa qualité de représentant de la société Sifas, à avaliser les billets à ordre établis au bénéfice de la banque sans rechercher, comme elle y était invitée, s'ils ne venaient pas en renouvellement de deux précédents billets à ordre qui ne contenaient pas l'aval personnel de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 511-21 du code de commerce ;
2°/ que seul un créancier ayant fait inscrire, après le jugement ayant arrêté le plan de sauvegarde, une mesure conservatoire sur les biens de l'avaliste peut poursuivre la condamnation de celui-ci en vue de l'obtention d'un titre sans que la dette principale aménagée soit échue ou exigible au regard des dispositions de ce plan ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la banque a pris une mesure de nantissement judiciaire sur les parts détenues par M. X... dans la SCI Le Lido le 2 septembre 2010, soit antérieurement au jugement du tribunal de commerce de Cannes du 6 décembre 2011 ayant arrêté le plan de sauvegarde de la société Sifas ; qu'en condamnant M. X... à paiement, la cour d'appel a violé les articles L. 626-11, L. 622-28 et R. 622-26 du code de commerce, ensemble l'article 215 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 ;
3°/ qu'en prononçant une condamnation ferme à paiement cependant qu'elle ne pouvait que prononcer un sursis à statuer total sur la demande du créancier jusqu'à ce que sa créance devienne exigible selon les termes du plan, la cour d'appel a violé l'article L. 626-11 du code de commerce ;
4°/ que le créancier qui a été autorisé à pratiquer une mesure conservatoire doit, dans le mois qui suit son exécution, à peine de caducité, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire ; que la cour d'appel a relevé que la banque avait été autorisée à prendre un nantissement judiciaire sur les parts sociales détenues par M. X... au sein de la SCI Le Lido le 2 septembre 2010 puis l'avait assigné le 4 octobre suivant ; qu'en condamnant à paiement M. X... cependant qu'il résultait de ses propres constatations que son action était caduque, la cour d'appel a violé l'article 215 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que la double signature de M. X... était apposée au recto de chaque billet à ordre à la fois dans leur partie inférieure droite, sous la mention « signature du souscripteur », et dans leur partie inférieure gauche sous la mention dactylographiée « bon pour aval », sans autre élément l'accompagnant, la cour d'appel en a déduit que cette double signature sur chaque billet ne pouvait correspondre qu'à son double engagement tant en qualité de représentant de la société Sifas, souscripteur des billets à ordre litigieux, qu'en sa qualité de donneur d'aval à titre personnel ; qu'en cet état, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche invoquée à la première branche, que ces constatations et appréciations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des écritures de M. X... que ce dernier ait soutenu, d'une part, que la délivrance à la banque de l'autorisation de nantir à titre provisoire ses parts sociales le 2 septembre 2010, soit antérieurement au jugement du 6 décembre 2011 ayant arrêté le plan de sauvegarde, la priverait d'une action en condamnation ultérieure à son encontre en vue de l'obtention d'un titre exécutoire, cette action étant uniquement réservée aux créanciers ayant fait inscrire leur mesure conservatoire sur les biens de l'avaliste après le jugement ayant arrêté le plan et, d'autre part, que le nantissement judiciaire provisoire ainsi autorisé serait devenu caduc en raison de la délivrance de son assignation en paiement par la banque le 4 octobre 2010, soit au-delà du délai d'un mois suivant son exécution ; que ces griefs, mélangés de fait et de droit, sont dès lors nouveaux ;
Et attendu, en dernier lieu, que la cour d'appel ne s'est pas bornée à condamner purement et simplement M. X... à payer à la banque la somme de 500 000 euros en principal, mais a assorti cette condamnation de conditions en mentionnant expressément dans le dispositif de l'arrêt attaqué que, pendant la durée du plan de sauvegarde de la société Sifas, les poursuites contre celui-ci seront subordonnées aux dispositions de ce plan dont il pourra se prévaloir en sa qualité de garant personnel ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en ses deuxième et quatrième branches et qui manque en fait en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille quatorze.