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Décisions

Cass. com., 2 novembre 2016, n° 15-12.231

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mouillard

Cass. com. n° 15-12.231

1 novembre 2016

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et quatrième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 janvier 2014), que M. X... et son épouse, Mme Y..., ont souscrit auprès de la société Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes-Provence (la Caisse) un emprunt pour financer l'acquisition d'un fonds de commerce, garanti par le nantissement de celui-ci et le privilège du vendeur ; qu'ils ont également ouvert dans les livres du même établissement un compte joint professionnel, prévoyant une ouverture de crédit en compte courant ; qu'après le prononcé de la liquidation judiciaire de M. X..., le 10 juillet 2006, et celui du divorce des coemprunteurs, le 2 octobre suivant, la Caisse a inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur l'appartement de Mme Y... ; que celle-ci lui a reproché d'avoir, en ne mettant pas en oeuvre les sûretés prises sur le fonds de commerce, manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de prêt ;

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de la Caisse au paiement de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de prêt alors, selon le moyen :

1°/ que l'exécution de mauvaise foi d'un contrat par un cocontractant suffit à engager sa responsabilité ; qu'en retenant que la carence de la banque à mettre en oeuvre les garanties prises dans le contrat de prêt pour en demander le remboursement à Mme Y... sur ses biens propres ne pouvait pas s'analyser comme une faute puisque Mme Y... était en toute hypothèse tenue au remboursement du prêt, sans rechercher si cette carence volontaire n'était pas constitutive d'une exécution du contrat de mauvaise foi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;

2°/ que la banque a un devoir de mise en garde d'un coemprunteur non averti du risque pour son patrimoine en cas de défaillance du débiteur principal ; que l'existence de garanties spécifiques sur le fonds de commerce prises par la banque ayant déterminé le codébiteur à s'engager, la banque a manqué à son devoir de loyauté en choisissant ensuite de recouvrer sa créance sur le bien propre de Mme Y..., sans l'avoir avertie de ce risque ; qu'en ne recherchant pas si cette carence ne caractérisait pas la violation par la banque de son devoir de loyauté et de conseil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que Mme Y... était, en sa qualité de débitrice solidaire, tenue à paiement et ne pouvait chercher à être dispensée de cette obligation par la simple carence de la Caisse à mettre en oeuvre les garanties que celle-ci avait prises sur le fonds de commerce ; que par ces constatations et appréciations, dont il résulte qu'en s'abstenant de cette mise en oeuvre et en inscrivant l'hypothèque litigieuse sur un immeuble de Mme Y..., la Caisse n'avait pas manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de prêt, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu, d'autre part, que l'établissement de crédit qui a consenti un prêt à plusieurs emprunteurs et obtenu leur engagement solidaire à le rembourser n'est pas tenu d'informer chacun d'eux de ce qu'il peut avoir, conformément à la définition même de la solidarité, à répondre sur son patrimoine des conséquences d'une défaillance dans l'exécution de l'obligation de remboursement ; que la cour d'appel n'avait pas, dès lors, à effectuer la recherche inopérante invoquée par la seconde branche ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses première, troisième et cinquième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes-Provence la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux novembre deux mille seize.

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