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Décisions

CA Versailles, ch civ.. 1-4 construction, 24 novembre 2025, n° 22/01880

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 22/01880

24 novembre 2025

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 72C

Ch civ. 1-4 construction

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 NOVEMBRE 2025

N° RG 22/01880

N° Portalis DBV3-V-B7G-VCWO

AFFAIRE :

S.A.S. ALPHA CONTROLE

C/

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 17],

S.N.C. MARIGNAN ELYSEE,

S.A. AXA FRANCE IARD,

S.A.R.L. D'ARCHITECTURE G.E.R.A,

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS,

Société MAAF ASSURANCES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2022 par le tribunal judiciaire de PONTOISE

N° RG : 15/09196

Expéditions exécutoires, Copies certifiées conforme délivrées le :

à :

Me Asma MZE

Me Julien AUCHET

Me Alexandre OPSOMER

Me Martine GONTARD

Me Sophie POULAIN

Me Sonia OULAD BENSAID

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

APPELANTE

S.A.S. ALPHA CONTROLE

[Adresse 8]

[Localité 10]

Représentant : Me Asma MZE de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 699

Plaidant : Me Patrick MENEGHETTI de la SELEURL MENEGHETTI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : W14

****************

INTIMÉES

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 17] situé [Adresse 1] et [Adresse 6] représenté par son syndic en exercsice la société FONCIA MANAGO

[Adresse 4]

[Localité 15]

Représentant : Me Julien AUCHET de la SCP EVODROIT, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 13

S.N.C. MARIGNAN ELYSEE représentée par sa gérante, la société MARIGNAN

[Adresse 7]

[Localité 12]

Représentant : Me Alexandre OPSOMER de la SCP OPSOMER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 481

Plaidant : Me Eric GOMEZ de la SELARL LAZARE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J067

S.A. AXA FRANCE IARD

[Adresse 5]

[Localité 13]

Représentant : Me Martine GONTARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 224

Plaidant : Me Véronique GACHE GENET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0950

S.A.R.L. D'ARCHITECTURE G.E.R.A

[Adresse 2]

[Localité 14]

Représentant : Me Sophie POULAIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 180

Plaidant : Me Hélène CHAUVEL de la SELARL CHAUVEL GICQUEL Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0003

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS MAF

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentant : Me Sophie POULAIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 180

Plaidant : Me Hélène CHAUVEL de la SELARL CHAUVEL GICQUEL Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0003

Société MAAF ASSURANCES

[Adresse 16]

[Localité 11]

Représentant : Me Sonia OULAD BENSAID, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 211

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Septembre 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fabienne TROUILLER, Présidente et Madame Séverine ROMI, Conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne TROUILLER, Présidente,

Madame Séverine ROMI, Conseillère,

Madame Marie-Cécile MOULIN-ZYS, Conseillère,

Greffière lors des débats : Madame Jeannette BELROSE,

FAITS ET PROCÉDURE

La société Marignan Elysée (ci-après « société Marignan ») a entrepris en qualité de maître d'ouvrage la construction d'un immeuble d'habitation de 35 logements et d'un commerce sis [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 18] (95).

Sont notamment intervenues à l'opération :

- la société d'architecture Gera, (ci-après « société Gera »), maître d''uvre de conception, assurée auprès de la société Mutuelle des architectes français (ci-après « MAF »),

- la société Sitac, maître d''uvre d'exécution, radiée le 13 avril 2011 après liquidation, assurée auprès de la société MAF,

- la société Legendre Île-de-France (ci-après « société Legendre »), titulaire du lot gros 'uvre, assurée auprès de la société Mutuelles du Mans assurances (ci-après « société MMA »), venant aux droits de la société Covea Risks (ci-après « société Covea »),

- la société Vert Limousin, titulaire du lot espaces verts et VRD, assurée auprès de la société MMA, venant aux droits de la société Covea,

- la société d'exploitation réalisation de chauffage, (ci-après « société Serc »), titulaire du lot plomberie-VMC, assurée par la société Groupe des assurances nationales, (ci-après « société Gan »),

- la société Claude Jeannot (ci-après « société Jeannot »), titulaire du lot couverture, radiée le 1er septembre 2011 après liquidation, assurée auprès de la société mutuelle d'assurance artisanale de France (ci-après « société MAAF»),

- la société Sepia, titulaire du lot étanchéité, assurée par la société Groupama,

- la société Alpha contrôle, (ci-après « société Alpha »), contrôleur technique.

Pour cette opération, le maître d'ouvrage a souscrit une police d'assurance dommages-ouvrage avec un volet constructeur non réalisateur (CNR) auprès de la société Axa France Iard (ci-après « Axa »).

La réception a été prononcée le 26 octobre 2005.

Les logements ont été vendus au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 17] (ci-après « le syndicat des copropriétaires »).

Constatant des infiltrations dans certains appartements, le syndicat des copropriétaires a fait établir un diagnostic auprès d'un cabinet d'architecture qui a révélé divers désordres, non-conformités et malfaçons affectant les lots couverture, zinguerie charpente et divers défauts relatifs à la mise en conformité du bâtiment avec les règles de sécurité incendie.

Le 20 avril 2015 le syndicat des copropriétaires a déclaré le sinistre à la société Axa qui a accepté partiellement sa garantie après expertise amiable.

Le 21 octobre 2015, le tribunal a désigné M. [C] suite à la saisine du syndicat des copropriétaires sollicitant une mesure d'expertise.

Le 14 août 2018, l'expert a déposé son rapport.

Par actes des 16, 19, 23 octobre et 24 et 30 novembre 2015, le syndicat des copropriétaires a fait assigner les sociétés Marignan, Axa, Gera, Sitac, MAF, Legendre, Jeannot, MAAF et Alpha, devant le tribunal judiciaire de Pontoise afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices et a sollicité un sursis à statuer dans l'attente du rapport de l'expert judiciaire.

Par actes des 23 et 26 octobre 2015, la société Axa a appelé en garantie les sociétés Legendre, Covea, MAAF, Gera, MAF et Alpha et a demandé au tribunal de surseoir à statuer dans l'attente du rapport d'expertise.

Par actes des 4 et 5 mai 2016, la société Marignan a appelé en garantie les sociétés Serc, Gan, Vert Limousin, Covea et Groupama.

Les sociétés Alpha, Serc et Vert Limousin n'ont pas constitué avocat.

Par jugement réputé contradictoire du 11 février 2022 le tribunal judiciaire de Pontoise a :

- déclaré irrecevables toutes les demandes formées à l'encontre de la société MAF en qualité d'assureur de la société Sitac,

- condamné in solidum les sociétés Marignan, Axa, Alpha et MAAF à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7 074,98 euros au titre du préjudice lié aux malfaçons de la noue,

- condamné la société Axa à garantir la société Marignan de la condamnation ainsi prononcée contre elle,

- condamné les sociétés Alpha et MAAF à garantir les sociétés Axa et Marignan des condamnations ainsi prononcées contre elles,

- condamné la société Alpha à garantir la société MAAF, en qualité d'assureur de la société Jeannot, à proportion de 50 % de la condamnation ainsi prononcée contre elle,

- condamné la société Alpha à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 419 883,25 euros au titre des préjudices liés aux malfaçons et non-façons portant sur les lots couverture, charpente, électricité et cloisonnement isolation,

- dit que le montant des travaux de 325 799,63 euros devait être actualisé selon l'indice BT01 applicable au mois d'août 2018 jusqu'à la date du jugement,

- condamné la société Marignan à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2 231 euros au titre du nettoyage des coulures sur la façade,

- dit que les sommes dues porteraient intérêts à compter du jugement,

- dit qu'il n'y avait pas lieu à ordonner la capitalisation des intérêts,

- rejeté toute autre et plus ample demande,

- condamné in solidum les sociétés Alpha, Marignan, MAAF et Axa aux dépens et frais d'expertise,

- autorisé les avocats qui en ont fait la demande de recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu de provision,

- dit que la charge finale des dépens serait supportée à hauteur de 1,6 % par la société MAAF, en qualité d'assureur de la société Jeannot et 98,4 % par la société Alpha,

- condamné la société Alpha à garantir la société MAAF dans cette proportion,

- condamné in solidum les sociétés Alpha, Marignan et Axa à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que la société Marignan serait garantie par la société Axa de cette condamnation,

- dit que la société Axa serait garantie par les sociétés Alpha et MAAF de cette condamnation,

- dit que la société MAAF pourrait exercer son recours à l'encontre de la société Alpha à hauteur de 98,4 %,

- condamné la société Marignan à payer à la société Legendre la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Marignan à payer aux sociétés MMA la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Marignan à payer à la société Gan, en qualité d'assureur de la société Serc la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Marignan à payer à la société Groupama la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la société Marignan, le syndicat des copropriétaires et la société Axa à payer aux sociétés MAF et Gera la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Axa à garantir la société Marignan et le syndicat des copropriétaires à hauteur de 1 000 euros chacun,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a estimé que la responsabilité décennale des sociétés Jeannot, Sitac et Alpha était engagée seulement au titre de la réalisation non-conforme de la noue (raccord entre deux versants de toiture), ainsi que celle de la société Marignan en qualité de vendeur d'immeubles à construire.

Il a relevé, sur la base du rapport d'expertise, que l'absence d'entretien de la toiture par le syndicat des copropriétaires avait contribué à l'apparition des désordres.

Il a estimé que les désordres affectant la couverture et la charpente étaient imputables aux sociétés Jeannot et Sitac, et ceux affectant les lots électricité et cloisonnement/isolation à la société Sitac sans que la responsabilité des constructeurs puisse être recherchée, le délai décennal étant passé.

Le tribunal a jugé que la responsabilité de la société Alpha était engagée du fait de n'avoir pas émis d'avis défavorable en dépit de sa visite du chantier et alors que les malfaçons et non-façons étaient apparentes, selon l'expert.

Il a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes à l'encontre des sociétés Gera et MAF, l'expertise n'ayant révélé aucune faute de leur part.

Il a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes à l'encontre de la société Marignan concernant les désordres intermédiaires en l'absence de preuve de faute mais a relevé qu'elle lui avait causé un préjudice en l'empêchant d'exercer les recours indemnitaires concernant le coût du nettoyage des coulures et en ne révélant pas l'identité de la société ayant réalisé les travaux.

Il a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes en garantie des vices cachés à l'encontre de la société Marignan, les malfaçons et non-façons étant apparentes.

Il a jugé que les demandes du syndicat des copropriétaires et de la société Marignan formulées contre la société MAF étaient prescrites pour n'avoir pas été faites ni contre elle ni contre son assuré la société Sitac, dans le délai décennal à compter de la réception de l'ouvrage.

Le tribunal a entériné les montants retenus par l'expert au titre des travaux de reprise des désordres.

Il a relevé que la société Marignan n'avait commis aucune faute et qu'elle était bien fondée à solliciter la garantie des sociétés Alpha et MAAF.

Il a jugé que la société Axa était bien fondée à solliciter la condamnation de la société Alpha et de la société MAAF à la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

Il a jugé que la société MAAF était bien fondée à solliciter la garantie de la société Alpha à hauteur de 50 %.

Par déclaration du 25 mars 2022, la société Alpha a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance du 14 mars 2023, le conseiller de la mise en état a constaté l'extinction de l'instance entre la société Alpha et les sociétés Gan, Vert Limousin, Legendre, Serc, MMA et Groupama et a dit qu'elle se poursuivait entre l'appelant et le syndicat des copropriétaires, les sociétés Marignan, Axa, Gera, MAF et MAAF.

Aux termes de ses conclusions n° 4 remises au greffe le 12 décembre 2022 (67 pages) la société Alpha demande à la cour :

- d'infirmer la décision en totalité,

- à titre principal,

- de déclarer que les désordres allégués ne constituent pas des désordres de nature décennale,

- de déclarer que les malfaçons, non-façons et non-conformités contractuelles n'ont pas été réservées à la réception,

- de déclarer qu'elle bénéficie donc d'une exonération de responsabilité quelle que soit la nature des vices de construction et défauts de conformité,

- de déclarer qu'aucune faute ni manquement ne peut lui être reproché dans l'exécution de sa mission de contrôle technique, ni de son devoir de conseil, en liaison avec les demandes formées par le syndicat des copropriétaires,

- de déclarer qu'en tout état de cause, il n'existe aucun lien de causalité entre la prétendue faute invoquée à son encontre et les préjudices subis par le syndicat des copropriétaires,

- de déclarer que le syndicat des copropriétaires ne justifie pas de l'existence d'un préjudice légitimement indemnisable à son encontre,

- de déclarer en conséquence que les conditions de mise en jeu de sa responsabilité ne sont pas réunies,

- en conséquence, de rejeter les conclusions de l'expert en ce qu'il dit qu'elle aurait manqué à l'une de ses obligations et de débouter le syndicat des copropriétaires de l'intégralité de ses demandes dirigées à son encontre,

- à titre subsidiaire,

- de déclarer que le syndicat des copropriétaires a commis une faute exonératoire de responsabilité en raison du défaut d'entretien de la noue mis à sa charge,

- en conséquence, de débouter le syndicat des copropriétaires de l'intégralité de ses demandes à son encontre,

- à titre plus subsidiaire,

- de déclarer que le syndicat des copropriétaires a commis une faute exonératoire de responsabilité en raison du défaut d'entretien de la noue mis sa charge,

- en conséquence, de ramener le montant total des condamnations prononcées contre elle à de plus justes proportions,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de prise en charge des travaux par elle à hauteur de 325 799,63 euros outre 76 083,62 euros de frais annexes,

- de ramener le montant total de ces travaux réparatoires à de plus justes proportions,

- de limiter la condamnation prononcée à son encontre à concurrence de la part de responsabilité susceptible d'être mise à sa charge dans les limites des missions définies par le contrat la liant au maître d'ouvrage,

- de déclarer que les désordres allégués par le syndicat des copropriétaires sont également susceptibles d'être imputés à la société Sitac prise en la personne de son liquidateur, et son assureur la société MAF, et à la société Jeannot en la personne de la société MAAF son assureur,

- en conséquence,

- de condamner la société MAAF en qualité d'assureur de la société Jeannot à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre,

- condamner le syndicat des copropriétaires à la garantir de toute condamnation relative aux désordres de nature décennale prononcée à son encontre,

- de condamner in solidum la société Marignan et son assureur la société Axa à la garantir de toute condamnation relative aux malfaçons, non-façons et non-conformités contractuelles prononcées à son encontre,

- à titre subsidiaire toujours, si la juridiction retenait le caractère décennal des désordres,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande à son encontre de prise en charge des travaux formulée à hauteur de 325 799,63 euros outre 76 083,62 euros de frais annexes,

- de ramener le montant total de ces travaux à de plus justes proportions,

- de limiter sa condamnation à concurrence de la part de responsabilité susceptible d'être mise à sa charge dans les limites des missions définies par le contrat la liant au maître d'ouvrage,

- en conséquence,

- de condamner la société MAAF en sa qualité d'assureur de la société Jeannot, à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre,

- de condamner le syndicat des copropriétaires à la garantir de toute condamnation relative aux désordres de nature décennale prononcée à son encontre,

- de condamner in solidum la société Marignan et son assureur la société Axa à la garantir de toute condamnation relative aux malfaçons, non-façons et non-conformités contractuelles prononcées à son encontre,

- en tout état de cause,

- de débouter les intimés de toutes demandes plus amples ou contraires,

- de condamner solidairement ou à défaut in solidum la société MAAF en sa qualité d'assureur de la société Jeannot, le syndicat des copropriétaires, la société Marignan et son assureur la société Axa à lui payer la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner solidairement ou à défaut in solidum la société MAAF en sa qualité d'assureur de la société Jeannot, le syndicat des copropriétaires, la société Marignan et son assureur la société Axa aux entiers dépens de première instance et d'appel, que Mme Martine Dupuis, avocate associée du cabinet Lexavoué Paris Versailles, recouvrera conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions remises en greffe le 2 août 2022 (21 pages), le syndicat des copropriétaires forme appel incident et demande à la cour :

- de confirmer le jugement ayant retenu la responsabilité de la société Alpha,

- de débouter celle-ci de toutes prétentions,

- d'infirmer le jugement pour le surplus, et notamment en ce qu'il n'a pas retenu la garantie décennale et la responsabilité du promoteur Marignan,

- de dire et juger que les dommages relèvent des responsabilités et garanties suivantes :

- la garantie de la société Axa, assureur dommages-ouvrage et constructeur non réalisateur, couvrant la responsabilité de la société Marignan,

- la responsabilité de la société Marignan, maître d'ouvrage professionnel ayant édifié l'immeuble,

- la responsabilité de la société Gera, maître d''uvre de conception,

- la responsabilité de la société Sitac, maître d''uvre d'exécution, garantie par la société MAF, pour l'ensemble des désordres,

- la responsabilité de la société Alpha, chargée du contrôle technique,

- la responsabilité de la société Jeannot, assurée auprès de la société MAAF, pour les malfaçons de la couverture,

- de condamner solidairement les sociétés Axa, Marignan, Gera, MAF et Alpha, pour l'ensemble des désordres, à lui verser la somme de 9 649,96 euros TTC au titre de la reprise de la noue (au-dessus de l'appartement 309) et la somme de 325 799,63 euros TTC au titre des travaux réparatoires des lots couverture, charpente, électricité et cloisonnement isolation,

- de condamner solidairement la société MAAF, assureur de la société Jeannot, avec les autres intervenants, à lui verser le montant des travaux retenus par l'expert pour les malfaçons relevant des lots confiés à son assuré, soit la somme de 302 711,52 euros,

- de condamner solidairement les sociétés Axa, Marignan, Gera, MAF, Alpha et MAAF, à lui verser les sommes suivantes :

- 4 500 euros pour le nettoyage effectué par l'entreprise François,

- 2 231 euros pour le nettoyage de coulures sur la façade,

- 76 083,62 euros de frais annexes et travaux réparatoires,

- 50 000 euros de préjudice de jouissance lié à l'échafaudage,

- de condamner solidairement les sociétés Axa, Marignan, Gera, MAF, Alpha et MAAF, à lui verser une indemnité de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- de dire et juger que dans leurs rapports entre eux, les responsabilités seront fixées dans les termes et proportions du rapport d'expertise,

- de dire et juger que le montant des travaux sera actualisé selon l'indice BT01 applicable au mois d'août 2018 jusqu'à la date de l'arrêt,

- de dire et juger que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation, avec bénéfice de l'anatocisme,

- de condamner les sociétés Axa, Marignan, Gera, MAF, Alpha et MAAF en tous les dépens en ce compris les dépens de l'instance de référé, les frais d'expertise judiciaire et les dépens de la présente instance, lesquels seront recouvrés par la société Evodroit, conformément aux termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions n° 2 remises au greffe le 19 octobre 2023 (20 pages) la société Marignan demande à la cour :

- à titre principal, d'infirmer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité contractuelle au titre des coulures de façade et l'a condamnée à verser une somme de 2 231 euros à ce titre au syndicat des copropriétaires,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande formulée à son encontre au titre des coulures sur la façade,

- de confirmer le jugement pour le surplus,

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour ferait droit à tout ou partie des demandes de la société Alpha et/ou du syndicat des copropriétaires et reformait partiellement ou totalement le jugement et entrait en voie de condamnation à son encontre, de condamner in solidum la société Alpha ainsi que les assureurs respectifs des sociétés Jeannot et Sitac, MAAF et MAF et son assureur selon police CNR, la société Axa, à la garantir de toutes les condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires qui pourraient être prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires ou de toute autre partie,

- en toute hypothèse,

- de rejeter l'ensemble des demandes et appels en garantie dirigées à son encontre,

- de condamner tout succombant à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner tout succombant aux entiers dépens, qui seront recouvrés par M. Alexandre Opsomer, avocat au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions n°3 remises au greffe le 15 décembre 2023 (28 pages), la société Axa forme appel incident et demande à la cour de :

- dire que seuls les dommages relevant des articles 1792 et suivants du code civil sont susceptibles de relever de ses garanties en qualité d'assureur dommages-ouvrage et constructeur non réalisateur,

- dire que cela suppose que les demandeurs établissent que les dommages compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, et ce dans le délai d'épreuve décennal,

- dire que tel n'est le cas, en l'espèce, excepté pour les désordres relatifs à la non-conformité de la noue générant des infiltrations dans l'appartement 309,

- de dire que seule la demande formée au titre de ces désordres et s'élevant à 14 149,96 euros TTC (9 649,96 euros + 4 500 euros) est susceptible de mettre en jeu les garanties souscrites auprès d'elle,

- dire que le syndicat des copropriétaires engage sa responsabilité à hauteur de 50 % au titre d'un défaut d'entretien de la toiture,

- dire que la demande formée par le syndicat des copropriétaires au titre du préjudice de jouissance du fait de l'installation d'un échafaudage pour un montant de 50 000 euros n'est justifiée ni dans son principe, ni dans son quantum, et ne peut, en tout état de cause, mobiliser ses garanties en qualité d'assureur dommages-ouvrage et constructeur non réalisateur,

- confirmer le jugement en ce qu'il ne l'a condamnée qu'au titre du préjudice de la noue, seul désordre de nature décennale, et à hauteur de la somme de 7 074,98 euros TTC, le reste devant rester à la charge du syndicat des copropriétaires en raison de sa défaillance dans l'entretien de la toiture,

- rejeter toutes les autres demandes formées à son encontre, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et/ou constructeur non réalisateur de la société Marignan, qui sont parfaitement infondées,

- en toute hypothèse, rejeter la demande du syndicat des copropriétaires au titre du désordre affectant la noue au-delà de la somme de 9 649,96 euros TTC, le syndicat des copropriétaires ne pouvant réclamer aux défendeurs le remboursement de la somme de 4 500 euros TT qu'il aurait, en tout état de cause, dû engager pour le nettoyage de la noue,

- rejeter la demande du syndicat des copropriétaires au titre du préjudice de jouissance,

- rejeter toute demande à ce titre à son encontre,

- rejeter toutes les autres demandes formées à son encontre, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et/ou constructeur non réalisateur de la société Marignan,

- si la cour devait confirmer ou/et prononcer une quelconque condamnation à son encontre prise en qualité d'assureur dommages-ouvrage et/ou constructeur non réalisateur de la société Marignan, déclarer les sociétés Jeannot, Sitac et Alpha responsables des désordres et non-conformités alléguées,

- dire qu'ils ont concouru ensemble à la réalisation de l'entier dommage,

- dire que la société Marignan n'a commis aucune faute en tant que maître d'ouvrage non-professionnel de la construction,

- en conséquence, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum la société MAAF, assureur de la société Jeannot et la société Alpha, à la garantir, en qualité d'assureur dommages-ouvrages et CNR, sur preuve de paiement, de toutes les condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires, qui seraient prononcées à son encontre,

- réformer le jugement en ce qu'il a déclaré ses demandes en qualité d'assureur dommages-ouvrage et/ou CNR irrecevables à l'encontre de la société MAF, en qualité d'assureur de la société Sitac, et l'a condamnée à lui verser ainsi qu'à la société Gera la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la société MAAF, assureur de la société Jeannot, la société MAF en qualité d'assureur de la société Sitac et la société Alpha à la garantir sur preuve de son paiement, de toutes les condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et accessoires, qui seraient prononcées à son encontre, dès lors qu'elles ont concouru ensemble à la réalisation de l'entier dommage,

- condamner in solidum la société MAAF, en qualité d'assureur de la société Jeannot, la société MAF en qualité d'assureur de la société Sitac, et la société Alpha, à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la société MAAF, en qualité d'assureur de la société Jeannot, la société MAF, en qualité d'assureur de la société Sitac, et la société Alpha, aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Martine Gontard, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 12 décembre 2022 (11 pages) les sociétés Gera et MAF demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables toutes demandes formées à l'encontre de la société MAF en sa qualité d'assureur de la société Sitac et en ce qu'il a rejeté toute demande à l'encontre de la société Gera et de son assureur, la société MAF,

- subsidiairement, constatant que sa mise en cause en qualité d'assureur de la société Sitac est postérieure à la liquidation et à la radiation du registre du commerce de la société Sitac et qu'à la date de la réclamation, la police souscrite par la société Sitac était résiliée depuis plus de cinq ans et qu'en conséquence sa garantie ne peut être recherchée qu'au titre de la garantie obligatoire décennale,

- rejeter toute demande ou appel en garantie à son encontre sur le fondement d'une responsabilité contractuelle de la société Sitac,

- en tout état de cause, rejeter toute demande de condamnation sur un fondement contractuel à son encontre au-delà des conditions et limites de la police relatives notamment à la franchise,

- plus subsidiairement, condamner sur un fondement quasi délictuel, in solidum, la société MAAF en sa qualité d'assureur de la société Jeannot et la société Alpha, à les garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à leur encontre,

- condamner tout succombant à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 19 janvier 2024 (23 pages) la société MAAF -concluant avec d'autres sociétés qui ne sont plus dans la cause- forme appel incident et demande à la cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il :

- l'a condamnée in solidum avec les sociétés Marignan, Axa et Alpha à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7 074,98 euros au titre du préjudice lié aux malfaçons de la noue,

- a condamné la société Alpha à la garantir, en qualité d'assureur de la société Jeannot, à proportion de 50 % de la condamnation ainsi prononcée contre elle,

- a jugé qu'elle pourra exercer son recours à l'encontre de la société Alpha à hauteur de 98,4 % au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile,

- a rejeté toutes les autres demandes émises à son encontre et notamment celles émises à hauteur de 419 883,25 euros au titre des non-conformités sans désordre,

- a rejeté toutes les demandes émises à l'encontre des sociétés Legendre et MMA,

- a condamné la société Marignan à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux sociétés MMA et Legendre une somme de 1 000 euros,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société MAF en qualité d'assurer de la société Sitac,

- de débouter la société Alpha de son appel en garantie irrecevable formulé à son encontre au titre des non-conformités sans désordre car hors limites de la saisine de la cour,

- de constater éteinte l'instance de la société Alpha à l'égard des sociétés Legendre et MMA,

- de prononcer la mise hors de cause de la société Legendre et des sociétés MMA prises en leur qualité d'assureur des sociétés Legendre et Vert Limousin,

- de condamner la société Alpha à régler une somme de 3 000 euros à chacune des sociétés Legendre et MMA au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de juger que le coût de réfection des désordres affectant la couverture est d'un montant total de 14 149,96 euros,

- de juger que le défaut d'entretien imputable à la copropriété est à l'origine de 50 % des désordres,

- de limiter toute condamnation à son encontre au titre de sa garantie décennale à hauteur de 7 074,98 euros,

- de juger que les non-façons, malfaçons et non-conformité sans désordre constituent des désordres apparents et qu'aucune responsabilité décennale ou contractuelle de droit commun de la société Jeannot ne peut être engagée,

- de juger que les non-façons, malfaçons et non-conformités sans désordre sont insusceptibles d'engager la responsabilité décennale ou contractuelle de droit commun de la société Jeannot,

- de juger qu'aucune garantie décennale ou responsabilité civile n'a vocation à s'appliquer à son encontre au titre des non-façons, malfaçons et non-conformités sans désordre,

- de débouter le syndicat des copropriétaires et toutes autres parties de l'intégralité de leurs autres demandes de condamnation dirigées à son encontre au titre des non-façons, malfaçons et non-conformité sans désordre et leur conséquence,

- subsidiairement,

- de juger qu'il n'est pas démontré de désordres de nature décennale caractérisés dans le délai d'épreuve concernant la charpente,

- de juger que la société Jeannot n'était pas assurée par elle au titre de l'activité charpente non déclarée,

- de débouter les intimés de leurs demandes de condamnation en garantie dirigées à son encontre au titre de la charpente et frais de chantier,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes de condamnation relatives aux frais inhérents du chantier d'un montant de 76 083,62 euros TTC, de nettoyage des coulures d'un montant de 2 231 euros TTC et de 50 000 au titre du préjudice de jouissance allégué,

- très subsidiairement,

- de réduire à de plus justes proportions le préjudice subi par la copropriété d'un montant de 50 000 euros et les frais irrépétibles d'un montant de 10 000 euros,

- de limiter toute condamnation à son encontre concernant le préjudice de jouissance allégué, les frais d'article 700 du code de procédure civile, des dépens incluant les frais d'expertise judiciaire, des dépenses inhérentes au chantier, de les limiter à hauteur de 1,6 % du montant total, la somme de 7 074,98 euros représentant 1,6 % seulement des 418 264,21 euros sollicités,

- de condamner in solidum les sociétés Sitac, MAF et Alpha à la garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

- de condamner la société Alpha et le syndicat des copropriétaires à lui régler une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2025. L'affaire a été fixée à l'audience de plaidoirie du 8 septembre 2025 et elle a été mise en délibéré au 24 novembre 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il est rappelé que l'instance ne se poursuit qu'entre la société Alpha, le syndicat des copropriétaires et les sociétés Marignan, Axa, Gera, MAF et MAAF. Les demandes concernant les sociétés Gan, Vert Limousin, Legendre, Serc, MMA et Groupama ne seront donc pas examinées.

Sur la recevabilité des demandes

Du syndicat des copropriétaires et de la société Marignan à l'encontre de la société MAF en sa qualité d'assureur de la société Sitac

À l'encontre de la société MAF, assureur de la société Sitac, maître d''uvre d'exécution, il a été jugé que les demandes du syndicat des copropriétaires et de la société Marignan étaient irrecevables.

Le syndicat des copropriétaires ne conclut pas sur ce point mais demande la condamnation de la société MAF.

La société Marignan tout en demandant la confirmation du jugement, réclame la garantie de l'assureur ne s'estimant ni prescrite, ni forclose.

Le tribunal a rappelé que l'action directe de la victime contre l'assureur de responsabilité, exercée en application de l'article L.124-3 du code des assurances, qui trouve son fondement dans le droit de la victime à réparation de son préjudice, se prescrit par le même délai que son action contre le responsable et ne peut être exercée contre l'assureur, au-delà de ce délai, que tant que celui-ci reste exposé au recours de son assuré.

En effet, l'article L.114-1 du code des assurances sur la prescription biennale applicable entre assureur et assuré dispose, « Quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier ».

Le syndicat des copropriétaires agit envers la société MAF sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs et subsidiairement sur le fondement de la responsabilité contractuelle des locateurs d'ouvrage.

La société Marignan agit contre la société MAF sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

En toute hypothèse, l'action se prescrit par 10 ans à compter de la réception.

Le syndicat des copropriétaires a formé une demande à l'encontre de la société MAF, assureur de la société Sitac, le 5 novembre 2018 par conclusions en ouverture de rapport, et la société Marignan a formé une demande à l'encontre de la société MAF, assureur de la société Sitac, le 23 novembre 2015, en référé, demandant qu'elle soit appelée en expertise commune.

Le dernier procès-verbal de réception est daté du 2 novembre 2005 et aucune action n'a été engagée à l'encontre de la société Sitac dans le délai de garantie et de prescription de 10 ans, de telle sorte que la société MAF n'était plus exposée au recours de son assurée à compter du 3 novembre 2015.

La société Marignan invoque les articles L.124-5 et R.124-2 du code des assurances pour le maintien des garanties pendant dix ans, toutefois, étant irrecevable à agir, ces articles ne lui permettent pas de rechercher les garanties de la société MAF.

Par conséquent, le jugement est confirmé en ce qu'il a dit que faute pour le syndicat des copropriétaires et la société Marignan d'avoir exercé une action à l'encontre de la société MAF dans le délai de 10 ans à compter de la réception, la société MAF n'étant plus exposée au recours de son assuré à l'expiration de ce même délai, leurs demandes sont déclarées irrecevables comme forcloses ou prescrites.

De la société MAAF envers la société MAF

Dans le cadre d'un éventuel appel en garantie, la société MAAF demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré prescrites toutes les demandes contre la société MAF.

Elle soutient que le délai d'appel en garantie entre constructeurs qui est de 5 ans à compter de sa mise en cause a été interrompu par la signification de conclusions au fond à l'encontre des sociétés Alpha et MAF, assureur de la société Sitac.

Elle ajoute que l'assignation au fond a été délivrée par le syndicat des copropriétaires en 2020 alors qu'elle-même avait signifié ses conclusions au fond le 18 juin 2019, comme le précise le jugement, en sollicitant notamment la condamnation in solidum des sociétés Sitac et MAF.

Toutefois, la cour constate que si le jugement a statué en déclarant irrecevables toutes les demandes à l'encontre de la société MAF, il n'a pas statué sur ce point quant à la recevabilité des demandes de la société MAAF.

Dans ses conclusions, la société MAF demande de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables toutes demandes formées à son encontre en sa qualité d'assureur de la société Sitac mais sans conclure sur la recevabilité revendiquée par la société MAAF.

De telle sorte que ce point n'est soumis à la cour qu'à l'occasion du présent litige et il ne peut être déduit du jugement attaqué qu'il a tranché une telle disposition pour dire que la société MAAF était prescrite en ses demandes à l'encontre de la société MAF. Celle-ci ne répond pas sur ce point.

Les recours entre constructeurs, qui n'ont pas contracté ensemble, ne ressortent pas de la garantie décennale mais sont fondés sur la responsabilité contractuelle, s'ils ont contracté ensemble, ou délictuelle sinon. En l'espèce, c'est la responsabilité délictuelle qui s'applique et le droit commun issu de l'article 2224 du code civil en ce qui concerne sa prescription, soit un délai de 5 ans à compter du jour où le titulaire d'un droit aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, peu important que l'assureur ainsi recherché ne soit plus exposé au recours de son assuré en raison de l'expiration de la prescription biennale de l'article L.114-1 du code des assurances.

Sur le point de départ de ce délai, il est dorénavant admis que le constructeur ne pouvant agir en garantie avant d'être lui-même assigné aux fins de paiement ou d'exécution d'une obligation en nature, il ne peut être considéré comme inactif, pour l'application de la prescription extinctive, avant l'introduction de ces demandes principales. Dès lors, l'assignation, si elle n'est pas accompagnée d'une demande de reconnaissance d'un droit, ne serait-ce que par provision, ne peut faire courir la prescription de l'action du constructeur tendant à être garanti de condamnations en nature ou par équivalent ou à obtenir le remboursement de sommes mises à sa charge en vertu de condamnations ultérieures.

En l'espèce, il ressort du jugement que la société MAAF a été attraite en responsabilité en 2015 par le syndicat des copropriétaires. La société MAAF a signifié ses conclusions au fond le 18 juin 2019 comme le précise le jugement en sollicitant notamment la condamnation in solidum de la société Sitac et de son assureur la société MAF. Donc sa demande a été formée dans le délai imparti.

De plus, la société MAF se prévaut de la résiliation du contrat d'assurance de son assurée, la société Sitac, du 13 avril 2011 et indique que la garantie subséquente de cinq ans avait expiré à la date des réclamations formulées à son encontre et que seule sa responsabilité décennale pourrait subsister.

Ceci est une question de fond qui sera tranchée, le cas échéant, ci-après.

Il résulte de ceci que la société MAAF, assureur de la société Jeannot est recevable en sa demande à l'encontre de la société MAF, assureur de la société Sitac. Le jugement est infirmé en ce qu'il a dit que toutes les actions contre la société MAF, assureur de la société Sitac étaient irrecevables, mais seulement dans cette limite.

De la société Alpha envers la société MAAF

La société MAAF demande de « débouter la société Alpha de son appel en garantie irrecevable formulé à son encontre au titre des non-conformités sans désordre car hors limites de la saisine de la cour ».

Elle soutient que la société Alpha a interjeté appel des condamnations prononcées à son encontre, mais pas du rejet des condamnations sollicitées à l'encontre de la société MAAF au titre des non-conformités, malfaçons et non-façons sans désordre. Ainsi, l'appel principal de la société Alpha tend à contester sa propre condamnation sur ce point à hauteur de 419 883,25 euros, mais pour le surplus, sur les non-façons et non conformités, elle n'a pas interjeté appel du chef de jugement suivant « Rejette toute autre et plus ample demande ». La société Alpha ne peut donc présenter le moindre appel en garantie à son encontre qui dépasse l'objet de son appel. Sa mise hors de cause au titre des non-conformités sans désordre est donc désormais définitive.

La société Alpha répond que sa déclaration d'appel précisait : « Plus généralement, l'appel porte sur toutes dispositions non visées au dispositif et faisant grief à l'appelant, selon les moyens qui seront développés dans ses conclusions et au vu des pièces de première instance et de celles qui seront communiquées devant la Cour ».

La cour constate, d'une part, que la mention portée par le tribunal « Rejette toute autre et plus ample demande » est générale, et de portée juridique limitée, et que, d'autre part, la société Alpha a interjeté appel de la totalité du jugement, incluant nécessairement cet appel en garantie.

L'appel en garantie de la société Alpha à l'encontre de la société MAAF est recevable comme inclus dans la saisine de la cour.

Sur les désordres, leur qualification juridique et les responsabilités

Relèvent de la responsabilité décennale de plein droit des constructeurs, les dommages cachés à la réception compromettant la solidité de l'ouvrage ou qui l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou de l'un de ses éléments d'équipement le rendent impropre à sa destination. La garantie décennale couvre également les désordres qui n'affectent pas la solidité ou la destination de l'ouvrage lorsqu'il est certain qu'ils l'affecteront avant 1'expiration du délai de dix ans suivant la réception.

En application de l'article 1646-1du code civil, le vendeur d'un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-3 du présent code. Ces garanties bénéficient aux propriétaires successifs de l'immeuble.

L'article 1642-1 du code civil ajoute que le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de construction ou des défauts de conformité alors apparents.

Les constructeurs concernés par des désordres relevant des garanties décennale ou biennale, et le vendeur d'immeuble à construire concerné par un désordre apparent relevant de l'article 1642-1 du code civil, engagent leur responsabilité de plein droit ' autrement dit sans que soit exigée la démonstration d'une faute ' à l'égard du maître d'ouvrage ou de l'acquéreur, sauf s'ils établissent que les désordres proviennent d'une cause étrangère ou ne rentrent pas dans leur sphère d'intervention, étant précisé que la mission de chaque intervenant à l'acte de construire s'interprète strictement.

Le contrôleur technique, en application des articles aujourd'hui numérotés L.125-1 et L.125-2 du code de la construction et de l'habitation, a pour mission de contribuer à la prévention des différents aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages. Il intervient à la demande du maître de l'ouvrage et donne son avis à ce dernier sur les problèmes d'ordre technique, dans le cadre du contrat qui le lie à celui-ci. Cet avis porte notamment sur les problèmes qui concernent la solidité de l'ouvrage et la sécurité des personnes.

Il est également soumis à la garantie décennale dans les limites de la mission à lui confiée par le maître d'ouvrage.

En outre, d'une façon générale, chacun des coauteurs d'un même dommage, conséquence de leurs fautes respectives, doit être condamné in solidum à la réparation de l'entier dommage, chacune de ces fautes ayant concouru à le causer tout entier, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilités entre les coauteurs, lequel n'affecte que les rapports réciproques de ces derniers, mais non le caractère et l'étendue de leur obligation à l'égard de la victime du dommage.

Le contrôleur technique est inclus dans cette obligation in solidum à l'issue des actions dirigées par le propriétaire de l'ouvrage contre l'ensemble des débiteurs de la garantie décennale, dès lors que le désordre litigieux lui est imputable au regard de la définition contractuelle de sa mission. Il n'est tenu vis-à-vis des constructeurs à supporter la réparation de dommages qu'à concurrence de la part de responsabilité susceptible d'être mise à sa charge dans les limites de ses missions contractuelles.

En l'espèce, différents désordres ont été constatés par l'expert judiciaire et seront examinés successivement. L'expert a souligné en exergue de son rapport le manque de diligence des parties à lui fournir les pièces nécessaires au bon déroulement de sa mission. Par suite, le rapport apparaît lacunaire sur certains points et certaines conclusions peu pertinentes.

Sur les désordres affectant l'appartement 309

L'expert judiciaire écrit que « les seuls désordres constatés se caractérisent par des infiltrations dans l'appartement 309 » et qu'ils ont pour origine un problème de raccord entre deux versants de toiture, soit dans la noue. Il précise que ces dommages dégradent les embellissements intérieurs situés sous la noue, soit le placard et la chambre et ajoute qu'ils rendent « cet emplacement impropre à sa destination ».

Sur ce point, le contrôleur technique, la société Alpha, critique la qualification décennale de ce désordre affectant la noue et l'engagement de sa responsabilité.

La société MAAF demande la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a rejeté son appel en garantie contre la société MAF, assureur de la société Sitac.

Le syndicat des copropriétaires demande de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la garantie décennale mais demande que la garantie des autres constructeurs ou assimilés soit retenue, avec celle de leurs assureurs.

La société Marignan ne conteste pas la garantie décennale en ce qui concerne ce désordre.

La société Axa rappelant qu'elle n'est qu'assureur décennal, accepte sa garantie juste pour ces dommages affectant la noue et générant des infiltrations dans l'appartement 309, dont elle réclame au syndicat des copropriétaires de prendre en charge la moitié au titre de son défaut d'entretien.

Les premiers juges ont retenu que les seuls désordres ayant entraîné des dommages au sens de l'article 1792 du code civil sont ceux liés à la non-conformité de la noue qui sont la cause principale des infiltrations dans l'appartement 309.

L'expert indique que ce dommage est apparu le 11 février 2015 selon la déclaration de sinistre qui en a été faite. La réception a été prononcée le 26 octobre 2005. Le dommage est donc apparu dans le délai d'épreuve.

L'expert précise que ce dommage non réservé à la réception n'était pas visible lors de celle-ci.

Pour que soit engagée la garantie décennale il faut notamment que soit constaté que la solidité de l'ouvrage est compromise ou une impropriété à sa destination.

Or ici, l'expert indique que l'emplacement sous la noue est impropre à son usage, puis ajoute que ces infiltrations affectent la solidité du bien.

Ainsi, c'est justement que les premiers juges ont retenu la garantie décennale pour cette malfaçon.

La société Jeannot, titulaire du lot couverture, est incriminée -elle est radiée mais assurée par la société MAAF pour ces désordres- par l'expert pour réalisation non-conforme des travaux et le syndicat des copropriétaires pour défaut d'entretien, à parts égales.

Concernant la société Jeannot, titulaire du lot incriminé, son implication est évidente, sa garantie de constructeur est retenue. Son assureur décennal la société MAAF doit être condamnée.

La société Marignan, en sa qualité de vendeur d'immeuble à construire, est tenue à garantie envers le syndicat des copropriétaires avec son assureur la société Axa.

Le maître d''uvre d'exécution, la société Sitac, et les recours contre son assureur la société MAF ne sont pas recevables sauf pour la société MAAF qui a été déclarée recevable en cette demande.

Enfin, la société Alpha, contrôleur technique, chargée d'une mission sur la solidité et l'isolation de l'ouvrage, est également retenue en sa garantie.

Quant au syndicat des copropriétaires, l'expert précise qu'il le retient en responsabilité pour le motif suivant : « Il est à noter que de nombreuses noues, bien que non réalisées conformément au DTU telles que celles de l'immeuble sis [Adresse 6] à [Localité 18], ne génèrent pas de désordres si elles sont entretenues régulièrement tous les ans. De même qu'il serait exceptionnel qu'une noue réalisée conformément aux règles de l'art génère des désordres même sans entretien régulier ».

La réparation de ce dommage est évaluée par l'expert à 9 649,96 euros TTC. L'expert indique également qu'un nettoyage de toiture a été effectué pour 4 500 euros TTC, soit la somme totale de 14 149,96 euros, divisée par deux : 7 074,98 euros.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés MAAF, Marignan, Axa et Alpha à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7 074,98 euros au titre du préjudice lié aux malfaçons de la noue.

Dans leurs relations, la société Marignan n'a pas commis de faute, elle doit être garantie avec son assureur la société Axa par les sociétés MAAF et Alpha.

Entre elles, en raison de leurs fautes respectives, la société MAAF garde 80 % de la charge finale du dommage et la société Alpha 20 %. Le jugement est infirmé sur ce point.

Sur le recours de la société MAAF envers l'assureur de la société Sitac, la première invoque les articles L.124-5 et R.124-2 du code des assurances d'où il résulte que le délai subséquent de maintien des garanties est de dix ans pour les constructeurs. Mais ce délai ne concerne que la garantie décennale des constructeurs et non leur responsabilité civile délictuelle. Or le recours de la société MAAF est fondé sur la responsabilité délictuelle, la garantie de la société MAF en sa qualité d'assureur de la société Sitac n'est donc pas mobilisable dans le cadre du recours d'un co-constructeur. Son recours en garantie est rejetée.

Sur les coulures en façade

La société Marignan demande d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au titre des coulures en façade.

L'expert a constaté des coulures noirâtres sur la façade. Il indique qu'elles proviennent d'un défaut d'assemblage des couvertines des murets, d'un défaut d'étanchéité de la toiture et d'un défaut d'assemblage et de fixation des descentes des eaux pluviales.

Les responsabilités ne sont pas définies faute, selon l'expert, d'avoir obtenu les documents idoines pourtant réclamés aux parties.

La réparation de ce dommage est évaluée par l'expert à 2 231 euros TTC sans le coût de la reprise des ouvrages générant les coulures.

Les premiers juges ont ici justement retenu le régime de la responsabilité contractuelle.

Toutefois, en dehors des dispositions de l'article 1646-1 du code civil précité, il est admis que le vendeur d'immeuble à construire est tenu de la responsabilité contractuelle résiduelle au titre des dommages intermédiaires à condition toutefois de démontrer sa faute.

Le fait que le vendeur n'ait pas lui-même réalisé les travaux n'est pas en soi suffisant pour écarter toute faute de sa part, il convient de démontrer qu'il a commis une faute personnelle décorrélée de celle qui serait imputable aux constructeurs, mais également distincte de ses propres engagements contractuels.

Or, une telle faute de la société Marignan n'est pas prouvée. Il est par suite impossible d'imputer ce désordre à l'une des parties.

Le jugement est infirmé et le syndicat des copropriétaires est débouté de cette demande.

Sur les autres malfaçons et non-façons

L'expert a constaté des malfaçons et non-façons qui touchent la charpente, la couverture, l'électricité et les cloisons et l'isolation. Il affirme qu'elles étaient visibles à la réception.

Il est patent qu'elles n'ont pas été réservées.

La société Alpha se fondent sur ces constatations pour affirmer qu'elle bénéficie d'une exonération de responsabilité. Elle ajoute n'avoir commis aucune faute, qu'il n'y a aucun lien de causalité entre une prétendue faute invoquée à son encontre et les préjudices subis par le syndicat des copropriétaires et de toute façon qu'il n'existe aucun préjudice de ce dernier puisque seize ans après les travaux, aucun dommage n'est constaté.

Le syndicat des copropriétaires soutient lui que les dommages relèvent des responsabilités et garanties suivantes, de la société :

- Axa, assureur DO et CNR couvrant la responsabilité de la société Marignan,

- Marignan, maître d'ouvrage professionnel ayant édifié l'immeuble,

- Gera, maître d''uvre de conception,

- Sitac, maître d''uvre d'exécution, garantie par la société MAF, pour l'ensemble des désordres,

- Alpha, contrôleur technique,

- Jeannot, assurée auprès de la société MAAF, pour les malfaçons de la couverture.

Il cite l'expert judiciaire qui relève en page 21 de son rapport que les malfaçons sur la charpente et la couverture affectent la solidité du bien et retient que les malfaçons et non-conformités dans les combles et sur le lot électricité affectent le bon fonctionnement de l'ouvrage. Il ajoute que l'expert identifie par ailleurs un risque accru d'incendie, faute de degré coupe-feu des parois des combles et vu les malfaçons électriques graves, ainsi qu'un risque pour la sécurité des personnes, du fait du défaut d'accessibilité et d'éclairage des combles. Il fait remarquer qu'il n'est pas utile d'attendre que le bâtiment brûle ou qu'un ouvrier chute dans les combles pour l'application de la garantie décennale, qui doit être retenue dès lors que l'impropriété à sa destination de l'ouvrage est caractérisée.

Il invoque les articles 1646-1,1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-3 du code civil ou à tout le moins, le fondement contractuel notamment de la société Marignan qui est tenue d'une obligation de résultat à son égard.

La société Marignan et son assureur déclinent toute responsabilité et garantie pour ces dommages.

Les sociétés Gera et MAF estiment que la demande en indemnisation ne peut être admise à leur encontre, les désordres ne relevant pas de la sphère d'intervention du concepteur.

L'expert affirmant que les malfaçons et non-façons relevées étaient visibles à la réception et qu'elles n'ont pas été réservées, peu importe leur gravité et leur incidence, la garantie décennale ne peut être appliquée. Seule la responsabilité contractuelle ou délictuelle peut être retenue.

C'est la solution retenue par les premiers juges pour un autre motif, convenable également, c'est-à-dire que ces malfaçons et non-façons n'ont pas entraîné de dommages dans le délai d'épreuve de 10 ans de telle sorte que le syndicat des copropriétaires ne pourrait rechercher la responsabilité des constructeurs sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

C'est donc la responsabilité contractuelle des intervenants, pour faute, qui est retenue comme fondement de la réparation.

L'expert décrit ainsi les malfaçons :

« En couverture

- Pureaux irréguliers de 23 cm à 25,5 cm ;

- Pose de l'écran de sous-toiture non-conforme : lame d'air minimale de 2 cm entre le dessous du liteau et le dessus de l'écran non-respectée ;

- Ventilation de la toiture non-conforme : nombre insuffisant de chatières ;

- Réalisation des raccords de couverture, noues, rives et entablements en zinc, non-conforme aux règles de l'art ;

- Gouttières sous-dimensionnées, présence d'eau stagnante : signe de contrepente, premiers rangs de tuiles à l'égout trop bas dans la gouttière :

- Tuyaux de descente mal dimensionnés, coudes déboités et non soudés ;

- Cuvettes de branchement mal fixées ;

- Traces d'infiltrations au niveau des traversées des balcons par les tuyaux de descente EP.

b. En charpente

- Contreventement longitudinal partiellement manquant ;

- Défaut de liaison entre panne faîtière et poinçon ;

- Défaut de fixation des pannes en pied de rampant ;

- Absence de platelage de circulation sécurisé dans les combles.

c. VMC

- Défaut d'étanchéité sur le rejet du collecteur en couverture ;

- Système de VMC non-conforme pour un immeuble classé en 2' famille, absence de clapet coupe-feu.

d. En électricité

- Absence d'éclairage dans les combles ;

- Mauvais positionnement des câbles et fourreaux sur la laine de verre :

- Absence de fixation sur les boites de dérivation ;

- Défaut d'accessibilité.

e. En plâtrerie/isolation

- Les combles ne sont pas recoupés tous les 45 ml, absence de porte coupe-feu ¿ heure

dans passage au niveau de la paroi béton ;

- La laine de verre est écrasée sur le cheminement en béton, absence de platelage sur le

cheminement en béton, absence de platelage bois au-dessus, en protection avec garde-

corps pour la sécurité des personnes (entretien, maintenance et visites).

f. En étanchéité/VRD

- Présence de regards collecteurs EP non raccordés sur la terrasse en étanchéité côté cour ».

L'expert incrimine les intervenants suivants pour les désordres affectant :

- la charpente et la couverture : la société Jeannot, exécutant, et la maîtrise d''uvre d'exécution, la société Sitac,

- l'électricité : une société TEB, exécutant, et la maîtrise d''uvre d'exécution, la société Sitac,

- les cloisons et l'isolation : une société Taquet, exécutant, et la maîtrise d''uvre d'exécution, la société Sitac

Il ajoute que le contrôleur technique, la société Alpha, a émis un avis favorable sur les travaux de charpente après visite des lieux, malgré des malfaçons et non-façons visibles à cette date.

Les désordres visibles à la réception auraient dû être réservés, la réception sans réserve a purgé ces dommages envers les sociétés exécutantes, notamment la société Jeannot, société exécutante, de toute responsabilité. Seule aurait pu subsister la responsabilité du maître d''uvre au titre de son devoir de conseil à la réception, mais comme il a été vu la responsabilité du maître d''uvre d'exécution et la garantie de son assureur ne peuvent plus être engagées par le syndicat des copropriétaires qui a dépassé le délai imposé pour exercer son action. Rien ne peut être reproché à la société Marignan, ni au maître d''uvre de conception.

Seule la société Alpha pourrait être retenue en condamnation dans la mesure où les autres sociétés n'existent plus ou ne sont pas dans le litige ou ne peuvent être condamnées ni leurs assureurs.

Comme indiqué supra, les obligations du contrôleur technique, outre la garantie décennale, sont limitées à la mission définie dans le cadre du contrat qui le lie au maître d'ouvrage et il ne doit conserver que la part de sa responsabilité à l'égard des constructeurs. Toutefois, le contrôleur technique peut engager plus que sa part de responsabilité et donc supporter l'insolvabilité des autres constructeurs puisqu'il reste à l'égard du maître d'ouvrage tenu in solidum de ces derniers. En outre, comme il a été vu ci-avant, aucun appel en garantie n'est ici possible.

Ainsi, les premiers juges ont été conduits à la condamner pour l'intégralité des dommages.

La mission de la société Alpha, à la lecture de son contrat, était la suivante :

- LP : solidité des ouvrages et éléments d'équipements dissociables et indissociables,

- SH : sécurité des personnes dans les bâtiments d'habitation,

- PV : récolement des procès-verbaux d'essais des équipements,

- PHH et TH : isolation acoustique des bâtiments d'habitation, isolation thermique et économies d'énergie,

- BRD : transport des brancards dans les constructions.

L'expert chiffre la reprise de la totalité des désordres à la somme totale de 418 264,21 euros TTC comprenant les frais annexes indispensables de maîtrise d''uvre, de frais de syndic, de coordinateur SPS, de bureau d'études, d'assurance DO et de contrôle technique.

La responsabilité pour faute doit être démontrée par le syndicat des copropriétaires, ainsi qu'un préjudice réparable et un lien de causalité unissant la faute et le préjudice.

Pour tenter de l'établir, celui-ci cite le jugement qui reprend les assertions de l'expert « Le bureau de contrôle ALPHA CONTROLE a émis un avis favorable sur les travaux de charpente, après visite sur les lieux, malgré les malfaçons et non-façons visibles à cette date. Je laisse au Tribunal l'appréciation de l'évaluation proportionnelle de l'imputabilité des désordres ».

Les premiers juges ajoutent ce que l'expert relève également « dans son rapport final du 21 février 2006, la société ALPHA CONTRÔLE n'a pas émis d'avis défavorable sur les travaux ».

En effet le 30 mars 2005, le contrôleur technique écrit que dans le cadre de sa « mission concernant l`affaire ci-dessus référencée. Nous avons procédé à une visite de chantier en date du 30 mars 2005. Au cours de cette visite, nous avons vérifié par sondages, les points suivants :

- Mise en 'uvre de la charpente ;

- Mise en 'uvre des menuiseries.

Nous n'avons pas de remarque à formuler sur ces deux point dans le cadre de notre mission ».

Dans son rapport définitif du 21 février 2006, la société Alpha n'a pas émis d'avis défavorables sur les travaux litigieux examinés par l'expert.

L'examen des travaux de charpente entrait dans sa mission au titre de la solidité des ouvrages. Ainsi, c'est au titre de son devoir de conseil que le contrôleur technique doit être tenu responsable en ce qu'il aurait dû attirer l'attention du maître de l'ouvrage sur les désordres affectant les travaux de charpente.

Quant aux désordres affectant la toiture-couverture, ils concernent essentiellement la pose de l'écran sous-toiture qui n'est pas conforme, les raccords de couverture et les descentes d'EP, l'expert ayant constaté des traces d'infiltration. Il entrait dans la mission de la société Alpha de donner également son avis sur les travaux d'isolation notamment thermique, pour la même raison que ci-dessus, n'ayant pas signalé ces problèmes visibles à la réception, elle a manqué à son devoir de conseil.

Les travaux d'isolation dans les rampants entraient également dans sa mission.

Sur le reste des non-façons et malfaçons, la vérification des travaux effectués ne ressortait pas de la mission du contrôleur technique ou aucun manquement à son devoir de conseil ne peut être retenu, l'expert ne l'incrimine d'ailleurs pas.

Sur les dommages, il faut rappeler que l'expert affirme que « les seuls désordres constatés se caractérisent par des infiltrations dans l'appartement 309 ».

Sur les conséquences de ces malfaçons et non-façons, l'expert écrit qu'elles « vont générer à moyen ou long terme des dommages affectant l'ouvrage' avec risque'». Puis, il écrit, non sans contradiction, que les malfaçons constatées sur la charpente nuisent à la solidité de l'ouvrage. Il ajoute que les autres malfaçons nuisent à la sécurité des biens ou des personnes.

L'expert ne précise pas quelles normes n'ont pas été respectées, ce point est relevé par la société Alpha qui affirme ne pas être soumise aux préconisations contractuelles. Les autres parties admettent les constatations de l'expert sur les malfaçons et non-façons.

En matière de réparation du préjudice, il est constant que la responsabilité civile impose de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit afin de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage.

Il est admis que le dommage futur car inéluctable est réparable, au contraire du dommage éventuel dont la survenance est incertaine et qui n'est pas lui susceptible de réparation.

En l'espèce, la nécessité de refaire totalement la toiture et la charpente ne ressort pas des constatations de l'expert dans la mesure où depuis la réception des travaux en 2005, aucun dommage sur la toiture ou la charpente -autre que les infiltrations de l'appartement 309 réparées supra- n'est allégué. Il faut remarquer que l'expert n'a préconisé aucuns travaux urgents qui auraient été nécessaires en cas de véritable atteinte à la solidité.

Enfin, les préconisations de l'expert de refaire la toiture et la charpente pour une somme de plus de 300 000 euros aboutiraient indéniablement à un enrichissement pour la copropriété.

Comme le fait remarquer la société Alpha, l'ouvrage ayant très largement dépassé le délai d'épreuve sans désordre ni dommage, l'utilité de la réalisation de travaux préconisés par l'expert judiciaire sur la charpente et la couverture n'est aucunement établie, et leur réalisation ne saurait correspondre à la réparation intégrale d'un quelconque préjudice.

Enfin, il n'est pas non plus apporté de preuve de dommage concernant l'isolation dans les rampants.

En conséquence, aucun dommage réparable n'est retenu, le syndicat des copropriétaires est débouté de l'intégralité de ses demandes sur ce point.

Sur les dépens et les autres frais de procédure

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer la condamnation de première instance aux dépens. Le syndicat des copropriétaires qui succombe en appel, est condamné aux dépens de première instance d'appel, conformément à l'article 696 du code de procédure civile. Les dépens pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l'article 699 du même code.

Selon l'article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

Le premier juge a fait une application équitable de ces dispositions, les circonstances de l'espèce justifient de condamner le syndicat des copropriétaires à payer à la société Alpha une indemnité de 3 000 euros au titre des frais exclus des dépens exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire,

Dit recevable la société Alpha contrôle en sa demande à l'encontre de la société Mutuelle d'assurance artisanale de France ;

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- déclaré irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société Mutuelle des architectes français en qualité d'assureur de la société Sitac hormis celles de la société Mutuelle d'assurance artisanale de France ;

- condamné in solidum les sociétés Marignan Élysée, Axa France Iard, Alpha contrôle et Mutuelle d'assurance artisanale de France à payer au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 17] la somme de 7 074,98 euros au titre du préjudice lié aux malfaçons de la noue ;

- condamné la société Axa France Iard à garantir la société Marignan Elysée de cette condamnation ;

- condamné les sociétés Alpha contrôle et Mutuelle d'assurance artisanale de France assurance à garantir les sociétés Axa France Iard et Marignan Élysée des condamnations ainsi prononcées contre elles ;

- condamné les parties aux dépens et frais irrépétibles comme précisés au jugement ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare recevables les demandes formées à l'encontre de la société Mutuelle des architectes français en qualité d'assureur de la société Sitac par la société Mutuelle d'assurance artisanale de France, l'en déboute ;

Condamne la société Mutuelle d'assurance artisanale de France en qualité d'assureur de la société Claude Jeannot à garantir la société Alpha contrôle à hauteur de 80 % de la condamnation ci-dessus ;

Déboute le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 17] du surplus de ses demandes ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 17] à payer les entiers dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 17] à payer à la société Alpha contrôle une indemnité de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Fabienne TROUILLER, Présidente et par Madame Jeannette BELROSE, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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