Cass. crim., 26 novembre 2025, n° 24-86.731
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
N° U 24-86.731 F-D
N° 01543
ECF
26 NOVEMBRE 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 NOVEMBRE 2025
Mme [F] [M], épouse [R], a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Reims, chambre correctionnelle, en date du 24 octobre 2024, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-81.137), pour abus de confiance et abus de biens sociaux, l'a condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis, 100 000 euros d'amende, cinq ans d'inéligibilité, dix ans d'interdiction de gérer, des confiscations et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [F] [M], épouse [R], et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 octobre 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, M. Wyon, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces soumises à l'examen de la Cour de cassation ce qui suit.
2. A l'issue de l'enquête préliminaire portant notamment sur les versements suspects de sommes parfois importantes de la société [R] [1] et de la société [2], Mme [F] [M] a été renvoyée devant le tribunal correctionnel notamment pour abus de confiance et abus de biens sociaux.
3. Les juges du premier degré l'ont déclarée coupable.
4. Mme [M] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et quatrième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné Mme [M] au paiement d'une amende de 100 000 euros, alors « que le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges et ne saurait se retrancher derrière l'absence de justificatifs produits par le prévenu ; qu'en condamnant Mme [R] à une amende de 100 000 euros fixée en fonction de ses revenus et des profits illicites tirés de ses agissements sans s'expliquer sur ses charges, au motif qu'elle n'avait apporté aucun document sur ses revenus et son patrimoine et qu'elle était tenue de soumettre à la cour à tout le moins ses avis d'imposition, la cour d'appel a violé les articles 132-1 et 132-20, alinéa 2, du code pénal, 591et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 132-1 et 132-20 et 593 du code de procédure pénale :
7. Selon les deux premiers de ces textes, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur et de sa situation matérielle, familiale et sociale. La juridiction qui prononce une amende en détermine le montant en considération des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.
8. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
9. Pour infirmer le jugement et porter de 20 000 à 100 000 euros la peine d'amende prononcée contre la prévenue, l'arrêt attaqué énonce que celle-ci n'apporte aucun document concernant ses revenus et son patrimoine, alors même qu'elle est tenue de soumettre à la cour d'appel, à tout le moins, ses avis d'imposition, et qu'elle admet percevoir des loyers démontrant qu'elle demeure propriétaire d'un bien immobilier.
10. Les juges en concluent que cette peine est justifiée par le fait qu'ils doivent statuer au regard des éléments figurant à la procédure et par la prise en compte des revenus actuels de la prévenue et des profits illicites qu'elle a tirés de ses agissements qui peuvent être évalués, d'une part, au titre des fonds réinvestis dans le cadre de différents contrats d'assurance-vie, à 876 000 euros, d'autre part, au titre des détournements, à hauteur de 283 735 euros dans le cadre de la société [2] et de 714 550 euros dans le cadre de la société [R] [1].
11. En se déterminant ainsi, alors que la prévenue n'ayant pas d'initiative exposé ses charges ou produit de justificatifs de celles-ci, il appartenait à la juridiction de l'interroger sur ce point et de faire mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.
12. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
13. La cassation sera limitée aux peines, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Reims, en date du 24 octobre 2024, mais en ses seules dispositions relatives aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Reims et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt-cinq.
N° 01543
ECF
26 NOVEMBRE 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 NOVEMBRE 2025
Mme [F] [M], épouse [R], a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Reims, chambre correctionnelle, en date du 24 octobre 2024, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-81.137), pour abus de confiance et abus de biens sociaux, l'a condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis, 100 000 euros d'amende, cinq ans d'inéligibilité, dix ans d'interdiction de gérer, des confiscations et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [F] [M], épouse [R], et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 octobre 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, M. Wyon, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces soumises à l'examen de la Cour de cassation ce qui suit.
2. A l'issue de l'enquête préliminaire portant notamment sur les versements suspects de sommes parfois importantes de la société [R] [1] et de la société [2], Mme [F] [M] a été renvoyée devant le tribunal correctionnel notamment pour abus de confiance et abus de biens sociaux.
3. Les juges du premier degré l'ont déclarée coupable.
4. Mme [M] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et quatrième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné Mme [M] au paiement d'une amende de 100 000 euros, alors « que le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges et ne saurait se retrancher derrière l'absence de justificatifs produits par le prévenu ; qu'en condamnant Mme [R] à une amende de 100 000 euros fixée en fonction de ses revenus et des profits illicites tirés de ses agissements sans s'expliquer sur ses charges, au motif qu'elle n'avait apporté aucun document sur ses revenus et son patrimoine et qu'elle était tenue de soumettre à la cour à tout le moins ses avis d'imposition, la cour d'appel a violé les articles 132-1 et 132-20, alinéa 2, du code pénal, 591et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 132-1 et 132-20 et 593 du code de procédure pénale :
7. Selon les deux premiers de ces textes, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur et de sa situation matérielle, familiale et sociale. La juridiction qui prononce une amende en détermine le montant en considération des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.
8. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
9. Pour infirmer le jugement et porter de 20 000 à 100 000 euros la peine d'amende prononcée contre la prévenue, l'arrêt attaqué énonce que celle-ci n'apporte aucun document concernant ses revenus et son patrimoine, alors même qu'elle est tenue de soumettre à la cour d'appel, à tout le moins, ses avis d'imposition, et qu'elle admet percevoir des loyers démontrant qu'elle demeure propriétaire d'un bien immobilier.
10. Les juges en concluent que cette peine est justifiée par le fait qu'ils doivent statuer au regard des éléments figurant à la procédure et par la prise en compte des revenus actuels de la prévenue et des profits illicites qu'elle a tirés de ses agissements qui peuvent être évalués, d'une part, au titre des fonds réinvestis dans le cadre de différents contrats d'assurance-vie, à 876 000 euros, d'autre part, au titre des détournements, à hauteur de 283 735 euros dans le cadre de la société [2] et de 714 550 euros dans le cadre de la société [R] [1].
11. En se déterminant ainsi, alors que la prévenue n'ayant pas d'initiative exposé ses charges ou produit de justificatifs de celles-ci, il appartenait à la juridiction de l'interroger sur ce point et de faire mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.
12. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
13. La cassation sera limitée aux peines, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Reims, en date du 24 octobre 2024, mais en ses seules dispositions relatives aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Reims et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt-cinq.