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Cass. crim., 26 novembre 2025, n° 23-84.446

COUR DE CASSATION

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Cassation

Cass. crim. n° 23-84.446

26 novembre 2025

N° Q 23-84.446 F-D

N° 01544

ECF
26 NOVEMBRE 2025

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 NOVEMBRE 2025

M. [B] [M] et la société [1] ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 29 juin 2023, qui, pour, notamment, abus de confiance et travail dissimulé, a condamné, le premier, à deux ans d'emprisonnement avec sursis, 5 000 euros d'amende, une interdiction définitive de gérer, cinq ans d'inéligibilité et une confiscation, la seconde, à une fermeture définitive de l'entreprise et une confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été produits.

Sur le rapport de M. de Lamy, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [B] [M] et de la société [1], et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 octobre 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. de Lamy, conseiller rapporteur, M. Samuel, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces soumises à l'examen de la Cour de cassation ce qui suit.

2. Une enquête a été diligentée à l'encontre de la société [1] (la société), ayant pour objet la vente de pneumatiques, d'accessoires et de pièces pour des véhicules terrestres à moteur, et de son gérant, M. [B] [M], à la suite de la commission de vols aggravés au garage [1].

3. L'enquête a démontré, notamment, que M. [M] aurait vendu le véhicule automobile de M. [X] [K], qui le lui aurait confié pour des réparations dont il n'a pu s'acquitter du prix. Selon ce dernier, la différence de montant entre le prix de vente et celui des réparations aurait dû lui être retournée, alors que seul un chèque de 5 000 euros, qui s'est avéré sans provision, lui a été adressé pour solde de tout compte.

4. Il ressort également des investigations que M. [M] aurait exercé son activité de garagiste en ne percevant que des sommes en espèces sans déclaration légale afin de dissimuler ses revenus.

5. A l'issue de l'enquête, M. [M] et la société ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour y répondre, notamment, de faits constitutifs d'abus de confiance et de travail dissimulé.

6. Les juges du premier degré les ont déclarés coupables, entre autres, de ces chefs.

7. La société et M. [M] ont relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

8. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

9. Le moyen critique l'a arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [M] et la société coupables de travail dissimulé, alors « que le délit de travail dissimulé par dissimulation d'activité ou par dissimulation d'emploi salarié est une infraction intentionnelle ; qu'en retenant M. [M] et la société [1] dans les liens de la prévention des chefs de travail dissimulé qui leur étaient reprochés sans relever ou constater que ce serait intentionnellement qu'ils s'étaient soustraits aux obligations déclaratives qui pesaient sur eux, la cour d'appel a violé les articles L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-5 et L. 8224-1 du Code du travail. »

Réponse de la Cour

10. Pour déclarer M. [M] et la société coupables de travail dissimulé, l'arrêt attaqué énonce qu'il ressort des éléments de l'enquête, confortés par les déclarations de M. [M], que celui-ci a perçu sur son compte bancaire personnel, jusqu'à l'ouverture d'un compte bancaire de la société, les paiements effectués par ses clients.

11. Les juges ajoutent que la somme de 40 000 euros, provenant pour une partie de la société [1] et pour l'autre de sa société suisse, n'a jamais fait l'objet de déclaration à l'administration fiscale, ni à aucun organisme social.

12. En statuant ainsi, et dès lors que la seule constatation de la violation en connaissance de cause d'une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l'intention coupable exigée par l'article 121-3 du code pénal, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

13. Ainsi, le moyen doit être écarté.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [M] et la société coupables d'abus de confiance au préjudice de M. [K], alors « que l'abus de confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé ; qu'en retenant que M. [M] n'aurait pas remis à M. [K] la totalité de la somme correspondant au reliquat entre le prix de vente et le montant des réparations du véhicule, la cour d'appel, ne met pas la Cour de cassation en mesure de contrôler si c'est le véhicule ou son prix de vente qui devrait, en l'espèce, être regardé comme ayant été détourné ; qu'elle n'a pas, ce faisant, caractérisé la remise précaire d'un bien susceptible d'appropriation que M. [M] aurait, ensuite, omis de représenter et qu'il aurait détourné, en méconnaissance de l'article 314-1 du Code pénal. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 314-1 du code pénal :

15. Selon ce texte, l'abus de confiance ne peut porter que sur des fonds, des valeurs ou un bien quelconque remis à titre précaire.

16. Pour déclarer le prévenu coupable d'abus de confiance au préjudice de M. [K], l'arrêt attaqué énonce que celui-ci a soutenu n'avoir pas perçu le reliquat entre le prix de vente de son véhicule et des réparations réalisées sur ce dernier.

17. Les juges relèvent que M. [K] a acheté ce véhicule pour un prix de 17 900 euros, que le prévenu l'a estimé entre 8 000 et 10 000 euros et que l'acquéreur dudit véhicule a indiqué l'avoir obtenu en contrepartie de la somme de 14 000 euros.

18. Ils ajoutent qu'il n'existe pas de preuve que M. [K] ait remis au prévenu un mandat de vente.

19. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

20. En effet, les motifs de l'arrêt attaqué, qui ne permettent pas de déterminer si l'objet du délit est constitué par le véhicule vendu ou le prix de cette vente, ne caractérisent, par conséquent, pas le caractère précaire de la remise.

21. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

22. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives aux déclarations de culpabilité de M. [M] et de la société [1] du chef d'abus de confiance au préjudice de M. [X] [K] et aux peines prononcées à l'égard des deux prévenus. Les autres dispositions seront donc maintenues.

23. En raison de la cassation prononcée, il n'y a pas lieu d'examiner les quatrième et cinquième moyens de cassation proposés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 29 juin 2023, mais en ses seules dispositions relatives aux déclarations de culpabilité de M. [M] et de la société [1] du chef d'abus de confiance au préjudice de M. [X] [K], et aux peines prononcées à l'égard des deux prévenus, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt-cinq.

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