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CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 25 novembre 2025, n° 24/19128

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/19128

25 novembre 2025

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2025

(n° /2025, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/19128 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKLVP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 octobre 2024 - Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2024038125

APPELANTES

S.A.S. CMG CONSULTING GROUP, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 841 087 091,

Dont le siège social est situé [Adresse 2]

[Localité 3]

S.A. KEYRUS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 400 149 647,

Dont le siège social est situé [Adresse 1]

[Localité 6]

Représentées par Me Audrey SCHWAB de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056,

Assistées de Me Ari ASSAYAG de l'AARPI ASMAR ASSAYAG, avocat au barreau de PARIS, toque : R261,

INTIMÉE

S.A.S. E.S.E.M. HOLDING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de VERSAILLES sous le numéro 794 104 695,

Dont le siège social est situé [Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044,

Assistée de Me Angélique LAFFINEUR de la SELARL GWL, avocat au barreau de PARIS, toque L0118,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,

Madme Constance LACHEZE, conseillère,

Monsieur François VARICHON, conseiller,

Qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 15 juin 2022, la SAS Esem Holding a cédé la totalité de sa participation dans la SAS CMG Consulting Group à la SA Keyrus.

Un différend étant né relativement au complément de prix de cession réclamé par la société Esem Holding à la société Keyrus, la première a fait assigner la seconde en procédure accélérée au fond devant le président du tribunal de commerce de Paris pour voir désigner un expert en application de l'article 1843-4 du code civil

Par jugement du 7 mars 2024, le président du tribunal de commerce de Paris, statuant selon la procédure accélérée au fond et au visa de l'article 1843-4 du code civil, a désigné M.[H], avec pour mission de déterminer le complément de prix exigible en appliquant les modalités prévues par la convention d'acquisition du 15 juin 2022 à l'article 3.3 et l'annexe 3.3 ce qui suppose d'établir les comptes consolidés 2022 selon la méthode prévue à l'annexe 1.

Par un second jugement du 11 octobre 2024, statuant sur une requête en interprétation du premier jugement et subsidiairement en omission de statuer présentée par la société Esem Holding, le tribunal a précisé que la mission de l'expert consistera à déterminer le complément de prix en appliquant les modalités prévues par la Convention d'acquisition du 15 juin 2022 à l'article 3.3 et l'Annexe 3.3 afférente, ce qui supposera d'établir les comptes consolidés 2022 selon la méthode prévue à l'annexe 1, c'est à dire en tenant compte non seulement des 9 points de retraitement mais également des trois précisions méthodologiques prévues en bas de page de sorte que la contribution de la société CMG CONSULTING GROUP aux comptes consolidés 2022 devra être opérée en établissant une situation comptable des quatre premiers mois de 2022 pour l'ajouter à celle des huit derniers mois de 2022 (et non en pratiquant une extrapolation).

Suivant déclaration du 13 novembre 2024, les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus ont relevé appel nullité à l'encontre des jugements rendus les 7 mars 2024 et 11 octobre 2024.

L'appel a été orienté en circuit court.

La société Esem Holding a saisi le président de la chambre d'un incident tendant à voir déclarer irrecevable l'appel nullité formé par les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus.

Par ordonnance du 2 septembre 2025, le président de la chambre a jugé que la demande de la société Esem Holding de voir juger irrecevable l'appel nullité formé par les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus à l'encontre des jugements des 7 mars 2024 et 11 octobre 2024 excédait les pouvoirs juridictionnels du président de la chambre, renvoyé la société Esem Holding à mieux se pourvoir, débouté la société Esem Holding de sa demande de dommages et intérêts, débouté les parties de leurs demandes en paiement d'indemnités procédurales et condamné la société Esem Holding aux dépens de l'incident.

Dans leurs conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 17 juin 2025, les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus demandent à la cour de :

- juger recevables les appels nullité pour excès de pouvoir relevé à l'encontre des jugements des 7 mars 2024 et 11 octobre 2024,

- en conséquence, annuler pour excès de pouvoir le jugement du 7 mars 2024, en ce qu'il a désigné M.[H] avec la mission de déterminer le complément de prix en appliquant les modalités prévues par la convention d'acquisition du 15 juin 2022 à l'article 3.3 et l'annexe 3.3, ce qui suppose d'établir les comptes consolidés 2022 selon la méthode prévue à l'annexe 1, débouté les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus de leurs autres demandes et laissé les dépens par moitié entre les parties,

- annuler pour excès de pouvoir le jugement interprétatif du 11 octobre 2024 en ce qu'il a fait droit à la requête en interprétation de la société Esem Holding et a de ce fait interprété les termes de la convention d'acquisition du 15 juin 2022 en indiquant que la mission de l'expert consistera à déterminer le complément de prix en appliquant les modalités prévues par la convention d'acquisition du 15 juin 2022 à l'article 3.3 et l'annexe 3.3 afférente, ce qui supposera d'établir les comptes consolidés 2022 selon la méthode prévue à l'annexe 1, c'est à dire en tenant compte non seulement des 9 points de retraitement mais également des trois précisions méthodologiques prévues en bas de page de sorte que la contribution de la société CMG Consulting Group aux comptes consolidés 2022 devra être opérée en établissant une situation comptable des quatre premiers mois de 2022 pour l'ajouter à celle des huit derniers mois de 2022 ( et non en pratiquant une extrapolation.),

- les déclarer de nuls effets,

- débouter la société E.S.E.M holding de toutes ses demandes,

- condamner la société Esem Holding à régler à chacune d'elles une somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 14 mai 2025, la société Esem Consulting demande au président de la chambre de:

- juger irrecevable l'appel nullité pour excès de pouvoir interjeté par les sociétés Keyrus et CMG Consulting Group à l'encontre du jugement du 7 mars 2024,

- juger irrecevable l'appel nullité pour excès de pouvoir interjeté par les sociétés Keyrus et CMG Consulting Group à l'encontre du jugement du 11 octobre 2024,

- débouter les appelantes de toutes leurs demandes,

- condamner les sociétés Keyrus et CMG Consulting Group in solidum à lui payer une indemnité de 25.000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile et une indemnité procédurale de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance,

- subsidiairement:

- désigner M.[H] avec pour mission de déterminer le complément de prix conformément aux dispositions de la convention du 15 juin 2022 en appliquant la méthodologie de calcul de l'EBITDA 2022 Normalisée décrite à l'annexe 1 qui stipule que:

- le résultat 2022 d'exploitation du Groupe doit être ajusté de 9 retraitements,

- la contribution de CMG Consulting Group au Résultat consolidé doit s'établir selon les mêmes critères que ceux retenus lors de l'établissement des comptes consolidés 2021 avec cependant trois différences: (i) la prise en compte dans les comptes consolidés des comptes sociaux clôturés au 31 décembre 2022 des sociétés françaises CMG Conseil, CMG Advisory, Amo Conseil et de la société Axco immatriculée au Portugal, (ii) en intégrant aux comptes consolidés, un arrêté comptable au 31 décembre 2022 portant sur 8 mois d'activité ( du 1/5/22 au 31/12/22) de la société CMG Consulting Group et un arrêté comptable portant sur la période entre le 1/1/22 et le 30/4/22 pour CMG Consulting Group dans le but d'harmoniser les comptes de CMG Consulting Group sur une durée de 12 mois d'exercice, (iii) et sans tenir compte de la moindre réorganisation du périmère qui pourrait intervenir sur l'exercice 2022,

- condamner les sociétés Keyrus et CMG Consulting Group in solidum à lui payer une indemnité de 25.000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile et une indemnité procédurale de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance,

SUR CE,

- Sur les appels nullité

Les décisions désignant un expert au visa de l'article 1844-3 du code civil étant rendues en dernier ressort, les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus ont formé un appel-nullité à l'encontre du jugement du 7 mars 2024 ayant désigné M. [H] et du jugement interprétatif du 11 octobre 2024, fondé sur l'allégation d'un excès de pouvoir du premier juge, qu'il appartient aux appelantes de caractériser.

Les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus soutiennent que les parties divergent sur le point de savoir s'il faut ou non tenir compte des précisions méthodologiques figurant dans l'annexe 1 en sus de l'annexe 3.3, spécialement de sa deuxième précision qui se trouve en contradiction avec le fait que les parties étaient convenues dans la convention d'une identité dans la méthode de consolidation entre les exercices 2021 et 2022, qu'il y a donc matière à interprétation, qu'une telle interprétation relevant du juge du fond, le président du tribunal de commerce a excédé ses pouvoirs en interprétant la convention litigieuse alors qu'il était saisi au visa de l'article 1843-4 du code civil.Elles précisent que par assignation délivrée le 26 septembre 2024, elles ont saisi au fond le tribunal de commerce de Paris afin qu'il tranche cette divergence d'appréciation.

La société Esem Holding réplique qu'aucun excès de pouvoir n'est caractérisé, arguant que si le juge et l'expert sont effectivement tenus par les dispositions contractuelles, le président du tribunal s'est bien contenté dans ses jugements de reprendre les dispositions contractuelles prévoyant les modalités de calcul du complément de prix, que ces dispositions sont explicites et n'ont pas besoin d'être interprétées. Elle en déduit que les jugements ne font que retenir les dispositions contractuelles sans imposer une méthode de calcul à l'expert désigné.

Il résulte du second alinéa de l'article 1843-4 du code civil, en sa version applicable au litige issue de l'ordonnance du 31 juillet 2014, que 'L'expert ainsi désigné est tenu d'appliquer lorsqu'elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts ou par toute convention liant les parties.'

Les parties conviennent de ce que l'expert doit appliquer la méthode prévue dans le protocole de cession.

L'article 3.3 du protocole d'acquisition intitulé 'Complément du Prix de Cession' stipule que:

' L'Acheteur s'engage à verser un complément au Prix de Cession ( ci-après désigné le 'Complément de Prix') dont le montant sera déterminé en fonction de l'EBITDA 2022 Normalisé dans les trente (30) jours suivant la présentation des comptes audités 2022, conformément à la méthode de calcul figurant en Annexe 3.3".[....]

Le calcul du complément de prix sera réalisé par l'Acheteur, conformément à la méthodologie précitée figurant en Annexe 3.3 sur la base des comptes audités 2022 de la Société, et au plus tard le 30 juin 2023.[....].

Si le Représentant des Vendeurs et l'Acheteur ne parviennent pas à un accord pendant le délai susvisé, ils s'engagent à établir un document identifiant leurs points de désaccord [...] et à faire trancher leur différend, conformément aux dispositions de l'article 1843-4 du Code Civil, par un expert indépendant de chacune des parties (ci-après désigné l''Expert') désigné, à défaut de désignation amiable dans les quinze (15) jours suivant la constatation du désaccord, par Monsieur le Président du tribunal de commerce de Paris statuant en référé sur requête conjointe ou à défaut de la Partie la plus diligente.

L'expert devra déterminer le montant du complément de prix exigible en appliquant les modalités prévues par la présente Convention d'Acquisition à l'Article 3.3 et l'Annexe 3.3 afférente. Il sera lié par les points qui ne font pas l'objet d'un désaccord entre les Parties, et devra seulement arbitrer ceux sur lesquels portent les désaccords.[....]

Pour ce faire, l'expert appliquera strictement les formules et définitions de la présente Convention d'Acquisition, sauf le cas où l'un ou plusieurs des éléments contenus dans ces formules et/ou définitions s'avéreraient en pratique impossible à utiliser ou fixer et rendrait également impossible la détermination définitive et effective du complément de prix exigible.

Dans ce cas, l'Expert pourra remplacer, après concertation avec les Parties, le ou lesdits éléments inutilisables par tout élément similaire ou équivalent de son choix, dans le respect qu'il appréciera de l'équilibre et de la volonté des Parties. [....]

L'annexe 3.3 à laquelle renvoie l'article 3.3 correspond à un tableau intitulé

'Modalités de l'opération Adaptation de notre offre initiale au regard des résultats de la due diligence 2/2.

Complément de prix (Earn-Out)

Un complément de prix de 2,1m€ pour l'acquisition des 80,66% de E.S.E.M Holding sera payé au cours du premier semestre 2023, suite à la clôture des comptes de l'exercice 2022 si et seulement si l'EBITDA normalisé de 2m€ est atteint conformément au business plan.

Plus précisément:

- le montant du complément de prix sera déterminé en fonction de l'EBITDA normalisé réalisé sur 2022 et établi selon la même méthode de calcul et de normalisation que la première tranche(cf.définition de l'EBITDA p.15).'

[....]

L'excès de pouvoir invoqué tient dans la mission confiée à l'expert à la référence à l'annexe 1 de la convention d'acquisition et plus précisément à l'application des précisions méthodologiques prévues en bas de page.

Il convient tout d'abord de rechercher si le renvoi à l'annexe 1 de la convention d'acquisition, caractérise ou non en lui-même un manquement aux dispositions contractuelles.

L'annexe 1 correspond à la 'Définition de l'EBITDA 2022 Normalisé'. Elle indique que l'EBITDA 2022 Normalisé désigne ' le résultat d'exploitation consolidé du Groupe (établi conformément au Périmètre (tel que ce terme est défini ci-après)) pour l'exercice 2022 du Groupe.'L'annexe détaille ensuite les éléments devant venir d'une part en déduction, d'autre part en augmentation du résultat d'exploitation consolidé du groupe, et stipule que l'EBITDA 2022 sera déterminé sur la base des éléments financiers consolidés de CMG Consulting Group visés par l'expert-comptable pour l'exercice 2022.

In fine, l'annexe 1 indique ' Il est expressément convenu que le périmètre de consolidation 2022 du Groupe (ci-après désigné le 'Périmètre') sera établi selon les mêmes critères que ceux retenus lors de l'établissement des comptes consolidés 2021 ( qui ont servi de comptes de référence dans le cadre de la Cession) avec:

- la prise en compte, dans les comptes consolidés, des comptes sociaux clôturés au 31/12/2022 des sociétés françaises CMG Conseil, CMG Advisory et AMO Conseil et de la société Axco, immatriculée au Portugal;

- en intégrant, aux comptes consolidés, un arrêté comptable au 31/12/2022 portant sur 8 mois d'activité (du 01/05/2022 au 31/12/2022) de la société CMG Consulting Group et un arrêté comptable portant sur la période entre le 01/01/2022 et 30/04/2022 pour CMG Consulting Group dans le but d'harmoniser les comptes de CMG Consulting Group sur une durée d'exercice de 12 mois; (mis en gras par la cour)

- et sans tenir compte de la moindre réorganisation de périmètre qui pourrait intervenir sur l'exercice 2022.'

Dès lors que le complément de prix doit contractuellement être déterminé sur la base de l'EBITDA 2022 Normalisé, que l'annexe 3.3 si elle détaille 'la méthode de calcul du complément de prix' ne définit pas l'EBITDA 2022 Normalisé à partir duquel la méthode de calcul doit être appliquée, que l'article 3.3 stipule qu'il doit être strictement fait application des définitions de la présente Convention d'Acquisition et que l'annexe 1 a justement et uniquement pour objet de donner la définition contractuelle d'EBITDA 2022 Normalisé, le président en se référant à l'annexe 1 n'a fait que dérouler les dispositions contractuelles, sans les interpréter ou les modifier.

Il s'ensuit que le premier juge n'a commis aucun excès de pouvoir en donnant mission à l'expert de déterminer le complément de prix exigible en appliquant les modalités prévues par la convention d'acquisition du 15 juin 2022 à l'article 3.3 et l'annexe 3.3 en précisant que cela supposait 'd'établir les comptes consolidés 2022 selon la méthode prévue à l'annexe 1".

Force est d'ailleurs de constater que la société CMG Consulting Group a attendu pour relever appel nullité à l'encontre de ce jugement, qu'intervienne la seconde décision.

En conséquence, l'appel nullité à l'encontre du jugement du 7 mars 2024 est irrecevable.

S'agissant à présent du second jugement, il sera liminairement relevé que la requête visait à interpréter le premier jugement et non pas une disposition de la convention d'acquisition. Le président a ainsi été amené à préciser la disposition figurant dans le jugement du 7 mars 2024, par la mention suivante ' ce qui suppose d'établir les comptes consolidés 2022 selon la méthode prévue à l'annexe 1 ' c'est à dire en tenant compte non seulement des 9 points de retraitement mais également des trois précisions méthodologiques prévues en bas de page de sorte que la contribution de la société CMG CONSULTING GROUP aux comptes consolidés 2022 devra être opérée en établissant une situation comptable des quatre premiers mois de 2022 pour l'ajouter à celle des huit derniers mois de 2022 (et non en pratiquant une extrapolation).'

La précision ainsi apportée à la mission correspond à la seconde précision méthodologique de l'annexe 1, ci-dessus rappelée et mise en gras par la cour, de sorte que le premier juge n'a pas dénaturé au travers de cette mention les dispositions contractuelles.

Les appelantes considérent cependant que l'application de cette seconde précision contractuelle se trouve en contradiction avec la mention deux paragraphes plus haut dans cette même annexe 1, selon laquelle il est convenu que le périmètre de la consolidation 2022 du Groupe sera établi 'selon les mêmes critères que ceux retenus lors de l'établissement des comptes consolidés 2021" dès lors qu'en 2021, le deuxième point n'a pas été appliqué par impossibilité technique pour l'expert-comptable et que donc il ne l'a pas été non plus en 2022 pour la même raison et parce que la méthode de consolidation doit être identique entre 2021 et 2022.

En précisant que le complément de prix sera déterminé en appliquant aux comptes consolidés 2022 les neuf points de retraitement et les trois précisions méthodologiques, le premier juge n'a fait que se référer aux dispositions de l'annexe 1 définissant contractuellement la notion d'EBITDA 2022 Normalisé, qu'en effet cette définition comprend dans ses trois derniers paragraphes des précisions particulières convenues par les parties, qui sont claires et qui doivent être appliquées sans qu'il soit nécessaire de les interpréter.

Il s'ensuit que les sociétés appelantes n'établissent pas que le premier juge a excédé ses pouvoirs.

En conséquence, l'appel nullité à l'encontre du jugement du 11 octobre 2024 sera également déclaré irrecevable.

- Sur l'application de l'article 32-1 du code de procédure civile

La société Esem Holding forme une demande de dommages et intérêts au visa de l'article 32-1 du code de procédure civile, arguant que l'action engagée procède d'une stratégie d'obstruction et d'instrumentalisation de la justice pour empêcher le calcul du complément de prix.

La cour considére que les appels formés par les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus, bien que jugés irrecevables, n'ont pas outrepassé la possibilité admise en jurisprudence d'exercer un appel nullité en invoquant un excès de pouvoir du premier juge et le droit de débattre. La demande de dommages et intérêts sera en conséquence rejetée.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus seront condamnées in solidum aux dépens et déboutées de leur demande en paiement d'une indemnité procédurale

Elles seront condamnées in solidum à payer à la société Esem Holding une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Déclare irrecevable l'appel nullité formé à l'encontre du jugement du 7 mars 2024,

Déclare irrecevable l'appel nullité formé à l'encontre du jugement du 11 octobre 2024,

Déboute la société Esem Holding de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne in solidum la SAS CMG Consulting Group et la SA Keyrus aux entiers dépens et à payer à la société E.S.E.M Holding une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les sociétés CMG Consulting Group et Keyrus de leur demande en paiement d'une indemnité procédurale.

Liselotte FENOUIL

Greffière

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

Présidente

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