CA Nîmes, 5e ch. soc. ph, 25 novembre 2025, n° 24/02636
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/02636 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JJF5
EM/EB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES
02 juillet 2024
RG :23/00036
[X]
C/
S.C.P. [O] - [I]
Grosse délivrée le 25 NOVEMBRE 2025 à :
- Me GORAN
- Me AUTRIC
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NIMES en date du 02 Juillet 2024, N°23/00036
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Mme Delphine OLLMANN, Greffier, lors des débats et Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 30 Septembre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 Novembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Madame [S] [X]
née le 11 Avril 1986 à [Localité 4]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Kristel GORAN, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉE :
S.C.P. [O] - [I]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Thomas AUTRIC de la SELARL EVE SOULIER - JEROME PRIVAT - THOMAS AUTRIC, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Philippe LASSAU de la SCP LASSAU-GASTALDI, avocat au barreau de GRASSE
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 25 Novembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :
Mme [S] [X] a été engagée par la SCP [D] à compter du 22 février 2016 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité de secrétaire juridique.
Par courrier recommandé du 28 décembre 2021, Mme [S] [X] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement pour faute grave fixé au 10 janvier puis reporté au 20 janvier 2022, avec mise à pied conservatoire.
Par lettre du 25 janvier 2022, la SCP [O] [I] a notifié à Mme [S] [X] son licenciement pour faute grave.
Par requête du 18 juillet 2023, Mme [S] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes de diverses demandes afférentes à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.
Par lettre recommandé du 30 octobre 2023, Mme [S] [X] a été licenciée pour faute grave.
Par jugement en date du 02 juillet 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a:
- dit et jugé fondé le licenciement pour faute grave de Mme [Z] [X];
- débouté Mme [Z] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à son licenciement pour faute grave ;
- débouté Mme [Z] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives formulées au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale ;
- débouté Mme [Z] [X] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que les dépens seront partagés par chacune des parties »
Par acte du 04 août 2024, Mme [S] [X] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 05 juillet 2024.
Par ordonnance en date du 02 juin 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 29 août 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 30 septembre 2025 à laquelle elle a été retenue.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 08 août 2025 auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, Mme [S] [X] demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes en date du 2 juillet 2024 en ce qu'il a :
- dit et juge fondé le licenciement pour faute grave de Mme [Z] [X];
- débouté Mme [Z] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à son licenciement pour faute grave ;
- débouté Mme [Z] [U] l'ensemble de ses demandes relatives formulées au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale ;
- débouté Mme [Z] [X] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que les dépens seront partagés par chacune des parties »
et statuant à nouveau,
à titre principal,
- juger le licenciement de Mme [S] [X] nul,
- condamner la SCP [D] à verser à Mme [S] [X] la somme de 14.257,26 euros sur le fondement de l'article L.1235-3-1 du code du travail,
- condamner la SCP [D] à verser à Mme [S] [X] les sommes suivantes :
- 4.752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement (2 mois suivant ccn);
- 4.752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois selon ccn) ;
- 475,24 euros brut d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Mme [S] [X] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- ordonner sous astreinte journalière de 100 euros par jour de retard la remise des documents sociaux rectifiés dans la limite de 60 jours ;
- ordonner la capitalisation des intérêts ;
A titre subsidiaire, si la Cour infirmait le jugement entrepris et jugeait le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- juger le licenciement de Madame [S] [X] sans cause réelle et sérieuse ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Madame [S] [X] la somme de 7.128,63 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Madame [S] [X] les sommes suivantes :
- 4.752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement (2 mois suivant ccn);
- 4.752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois selon ccn) ;
- 475,24 euros brut d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Madame [S] [X] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- ordonner sous astreinte journalière de 100 euros par jour de retard la remise des documents sociaux rectifiés dans la limite de 60 jours ;
- ordonner la capitalisation des intérêts ;
A titre infiniment subsidiaire, si la Cour jugeait le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,
- condamner la SCP [D] à verser à Mme [S] [X] les sommes suivantes :
- 4.752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement (2 mois suivant ccn);
- 4.752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois selon ccn) ;
- 475,24 euros brut d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
(condamner la SCP chardon ' assadourian à verser à Mme [S] [X] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- ordonner sous astreinte journalière de 100 euros par jour de retard la remise des documents sociaux rectifiés dans la limite de 60 jours ;
- ordonner la capitalisation des intérêts ;
en tout état de cause,
- débouter la SCP [O] ' [I] de l'ensemble de ses moyens et prétentions ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Mme [S] [X] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du cpc et aux dépens.
En l'état de ses dernières écritures en date du 25 août 2025 auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, la SCP [O] - [I] demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Nîmes le 2 juillet 2024 en ce qu'il a :
- dit et jugé fondé le licenciement pour faute grave de Mme [S] [X],
- débouté Mme [S] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à son licenciement pour faute grave ;
- débouté Mme [S] [X] de l'ensemble, de ses demandes relatives au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale ;
- débouté Mme [S] [X] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- infirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Nîmes le 2 juillet 2024 en ce qu'il a :
- débouté la SCP [O] - [I] de ses demandes reconventionnelles relatives à l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seront partagés par chacune des parties,
y ajoutant et statuant à nouveau :
- condamner Mme [S] [X] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du cpc et aux entiers dépens,
en tout état de cause,
- débouter Mme [S] [X] de ses écritures fins et conclusions d'appel et de toutes demandes de condamnation à l'encontre de la SCP [O] - [I] dès lors que ces dernières sont infondées et injustifiées tant en fait qu'en droit, en principe et en quantum.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS :
Sur le licenciement :
En l'espèce, la lettre de licenciement datée du 25 janvier 2022 qui fixe les limites du litige, énonce les griefs suivants :
' Nous faisons suite à l'entretien préalable en date du 20 janvier 2022 auquel vous vous êtes présentée, accompagnée d'un conseiller du salarié.
Lors de cet entretien, nous vous avons fait part des motifs à l'origine de l'engagement d'une procédure disciplinaire à votre encontre.
Le 27 décembre 2021, à la suite d'un rendez-vous téléphonique avec un prestataire habituel du cabinet, au cours duquel nous faisions part de nos inquiétudes au regard de votre contamination de la Covid 19 (dont nous vous avons donné lecture au cours de l'entretien préalable), il nous a été fait part de l'existence d'un compte FACEBOOK vous appartenant, dont les publications, diffusées publiquement, étaient particulièrement choquantes :
Ainsi, et alors que votre dernier jour travaillé était le 17 décembre 2021, le 18 décembre 2021 vous 'postiez' le message suivant, particuliérement violent et insultant :
[A] [X]
18 décembre 13h
Et allez pass sanitaire hop en pass vaccinal...allez les moutons on va y aller ou va résister'''!!!
Pfff ils font vomir ces mères qui se disent être l'Etat qui veut nous protéger!!!
Rien n'est logique et les gens courent tout ça pour garder leur confort, voyager etc...
Putain c'est pas avec vous qu'on aurait gagné les guerres je vous le dis!
Mais malheureusement vous ne faites aucune recherche et vous allez à l'abattoir...
Ah pour l'instant vous n'avez rien eu alors soit vous avez eu le flacon1 : serum phy et vous avez eu de la chance soit c'est le flacon2 : Arn messager donc mort lente système immunitaire prend un coup de mois en mois...et pour ceux qui ont eu de graves effets secondaires voire la mort n'ont pas eu du tout de la chance car ils se sont chopés le flacon 3.
Bref, j'espère que les gens vont encore résister et ne pas aller courir car le jour où vous serez handicapés ou mort : ah là vos voyages....
Bref je ne me résignerai JAMAIS
Je leur offre toutes mes doses à ce gouvernement!
Merci à tous ceux qui résistent et qui ont compris on va y arriver.
Sur ce point vous nous avez indiqué que votre message n'était que le reflet de la stricte vérité et que l'avenir vous donnerait raison.
De la même manière, en date du 17 décembre, étaient diffusées les 'informations' suivantes censurées depuis par Facebook.
[A] [X]
17 décembre
L'inventeur de l'Arn messager supplie les parents de ne pas faire injecter leurs enfants!!!
[A] [X]
17 décembre
Et oui...dur dur de réveiller les gens! Pourquoi ne font ils pas leur recherche'!!
Et oui ce serait tellement grave que l'Etat nous veuille du mal qu'il est impossible de le croire...mais c'est la triste réalité.!!!
23 novembre
Pfffff malheureusement vous ne savez pas ce qu'ils prévoient...en acceptant vous devenez complices! Résister pour l'avenir de mon enfant je ne me résignerai JAMAIS. Qukis aillent se faire foutre avec leur piq.........
23 novembre
Les flics se croient au far west pfffff bravo la Guadeloupe, résistez!!!
9 novembre
A écouter, bizarre toutes les recherches mènent aux mêmes conclusions : on est dirigés par des israéliens, des religieux qui comptent bien mener jusqu'à terme leur plan ! Et arrêtez avec le complotisme ! C'est tellement grave que vous ne voulez pas y croire mais prenez le temps de faire vos recherches et on en reparlera...avant qu'il ne soit trop tard il faut qu'on soit unis et résistants à tout ça!!!!
Protégez vos enfants et ne courez pas vous faire inject...ils vont aussi faire passer le vax du covid pour la grippe....
Sur ce point, vous avez nié dans un premier temps être l'auteur de ce message et après vous l'avoir soumis, avez reconnu que celui-ci avait bien été écrit par vos soins et 'nous ne nous en rendions pas compte mais que c'était la stricte vérité, que c'était exactement ce qui était en train de se passer...'.
Nous considérons ces faits comme fautifs en ce qu'ils vont bien au delà de la liberté de penser et d'opinion, au regard de la teneur de la nature des publications éditées et/ou relayées par vos soins, aux termes desquelles figurent un conglomérat d'injures, d'insultes, de thèses antisémites, de glorification de la violence à l'encontre des forces de l'ordre....qui vont à l'encontre des valeurs de notre cabinet, indépendamment de notre serment d'avocat.
Au delà du fait que ces opinions affichées et revendiquées témoignent de ce que vous pensez d'une majorité de la population, dont votre employeur fait partie, nous sommes particulièrement choqués qu'un prestataire ait pu librement consulter vos publications, de sorte qu'il en est de même pour la clientèle du cabinet, votre page FACEBOOK étant publique et donc ouverte à tous les utilisateurs....
Or, aux termes de votre contrat de travail, vous êtes astreinte à respecter une clause d'obligation générale de réserve, dont nous considérons que celle-ci a été largement violée au regard des explications qui précèdent.
Par ailleurs, certaines publications FACEBOOK ayant été diligentées pendant vos heures de travail, il a été procédé à la consultation de l'historique de votre ordinateur, étant ici rappelé que vos horaires de travail à hauteur de 37 heures sont répartis comme suit :
lundi
mardi
mercredi
jeudi
vendredi
8h15-13h00
8h15-13h00
8h15-13h00
8h15-13h00
8h15-13h00
14h00-17h00
14h00-17h00
14h00-17h00
14h00-17h00
14h00-16h00
vendredi 17 décembre 2021 : à partir de l2h28 consultation de plusieurs sites internet 'baslesmasques... ». ' recours contre le pass sanitaire. .. », ' Un Notre Monde PACA...', ' pass sanitaire, obligation vaccinale...',
- jeudi 16 décembre 2021: à partir de l2h29 commande internet sur le site 'chronodrive »,
- jeudi 9 décembre 2021: à partir de 8hl6 commande internet sur le site 'chronodrive', pendant une quinzaine de minutes, puis à partir de 9h29 jusqu'à environ 10h00, consultation de votre compte mail personnel puis de recherches 'vétérinaires' sur votre commune de [Localité 5]...,
- mardi 7 décembre 2021: à partir de l1h15 consultation de votre compte mail personnel OUTLOOK pendant une quinzaine de minutes,
- vendredi 3 décembre 2021: à partir de l0h10 consultation de sites de voyages 'viamichelin' et 'booking',
- mercredi 1er décembre 202] : à partir de 14h29 consultation de votre compte mail personnel OUTLOOK,
- mardi 30 novembre 2021 : à partir de l1h19 consultation de sites internet 'crédit LOA », 'meilleur taux',
- lundi 29 novembre 2021: à partir de 8h16, consultation de sites internet 'documentaire HOLD UP',
- mercredi 24 novembre 2021: à partir de l2h32 commande internet sur le site 'chronodrive',
- jeudi 18 novembre 2021: à partir de 12h36 commande internet sur le site 'chronodrive' pendant une vingtaine de minutes,
- mardi 2 novembre 2021 : à partir de 8h47 et pendant prés d'une heure, consultation de sites internet et recherches personnelles. . .,
- mercredi 27 octobre 2021 : A partir de 12h20 consultation de sites internet et recherches personnelles. . . ,
- jeudi 21 octobre 2021 : à partir de l4h25 consultation de votre compte mail personnel OUTLOOK,
- lundi 18 octobre 2021 : à partir de 10h25 consultation de sites de recherches 'le bon coin » puis consultation de votre compte mail personnel,
- vendredi 15 octobre 2021 à partir de l0hl6 consultation de votre compte mail personnel.
Aprés votre erreur, en terme de délai procédural avant l'été, non sans conséquence, nous vous avions tout de même versé une prime afin de tenter de vous remotiver et de vous renouveler notre confiance.
A compter du mois de septembre 2021, Me [I] a quasiment cessé de dicter et a travaillé tous les soirs et weekends depuis la rentrée, en pensant qu'en disposant de davantage de temps, vous éviteriez toute erreur.
Or, en contrepartie de l'effort qui a été consenti par mon associée et moi-même, nous n'avons pu malheureusement que constater que vous avez abusé de notre confiance et vous en avez profité pour vaquer à des occupations personnelles pendant vos heures de travail...
Lors de l'entretien, vous avez esquivé le sujet.
Par ailleurs, le lundi 25 octobre 2021, vous n'avez pu prendre votre poste qu'en fin de matinée en raison d'un retard lié à la consultation de votre ophtalmologue, vous n'avez rien proposé de votre propre chef pour rattraper les heures manquées et nous ne vous avons rien demandé, alors que nous étions en droit le faire. ..
Puis, le mercredi 3 novembre 2021, nous vous avons autorisée à vous absenter tout l'aprés-midi afin de vous rendre à un rendez-vous médical. Nous vous avons alors demandé de rattraper à votre convenance les heures du 3 novembre 2021, ce que vous avez refusé en prétextant que vous auriez pu vous mettre en arrêt de travail, ce qui vous avait d'ailleurs été conseillé.
Nous vous avons alors indiqué que tout chantage à l'arrêt de travail n'était pas acceptable, que nous avions toujours fait preuve de bienveillance à l'égard d'urgences particulières personnelles.
Sur ce point vous avez prétendu, lors de l'entretien, qu'il aurait fallu vous décompter la demi-journée, étant précisé qu'en ce qui nous concerne, nous n'entendions pas vous pénaliser financièrement, ce que nous n'avons jamais fait au demeurant, et sollicitions un simple rattrapage des heures.
Le 13 décembre 2021, vous êtes arrivée à 8h30 et vous avez sollicité des explications sur un prétendu problème de congés payés, soutenant que des samedis vous aurez été décomptés.
Nous avons alors vérifié ensemble les bulletins de paie et le calendrier et vous avez pu constater qu'il s'agissait en réalité d'un vendredi afin de vous permettre de faire un pont. Il semblerait que vous vous soyez trompée d'année calendaire, ce que vous avez reconnu. ..
Vous nous avez alors indiqué que vous ne compreniez pas que les journées de congés payés prises pour faire 'un pont' soient décomptées et que vous pensiez qu'elles étaient 'offertes'.
Nous vous avons rappelé que nous avions toujours fonctionné ainsi depuis l'origine de notre relation de travail et que ces ponts avaient été pris avec votre accord, au demeurant pour vous permettre de profiter de votre enfant sur ces périodes...
Le mardi 14 décembre au matin, vous avez dû vous absenter pour aller faire tester votre enfant à la demande de l'école, celle-ci étant cas contact, ce qui vous avez été signalé par un mail la veille, dont vous n'aviez pas pris connaissance.
Par la suite, alors que votre enfant présentait de la fiévre pendant la semaine, Me [I] vous a suggéré de refaire tester votre fille au regard de la situation, de la fermeture de sa classe, ce à quoi vous avez répondu ' il n'y a pas que le covid...'.
Quand vous nous avez annoncé votre contamination le dimanche 19 décembre 2021, nous nous sommes faits testés l'après-midi et Me [I] a été diagnostiquée positive.
Indépendamment du bouleversement occasionné d'un point de vue professionnel et personnel au regard des fêtes de fin d'année, et de l'annulation de tout contact avec nos proches, qui sont bien peu de choses au regard de la situation sanitaire actuelle, il est constant que votre comportement irresponsable aurait pu avoir des conséquences toutes autres au regard des personnes fragiles de notre famille, ce que vous n'êtes pas sans savoir.
Or, non seulement vous n'avez pas testé votre enfant ni vous-même durant la semaine mais vous avez également manqué au respect des gestes barrières motif pris de ce 'qu'il n'existait pas que le covid dans la vie et que les chiffres de BMF TV étaient faux...'.
Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 20 janvier 2022 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation au sujet des faits fautifs susmentionnés.
L'ensemble de ces faits, au regard de leur gravité, rendent impossible le maintien de votre contrat de travail et nous contraignent à prononcer votre licenciement pour faute grave.
Nous vous rappelons que vous 'Faites l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire, la période non travaillée nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement ne sera pas rémunérée...'.
Moyens des parties
Mme [S] [X] conteste les faits qui lui sont reprochés.
Elle indique qu'il appartient à la SCP de justifier de la réalité d'une faute grave de sa part.
S'agissant de son compte Facebook, elle indique que la SCP [D] doit justifier qu'elle était identifiable pour la clientèle du cabinet et pour toute personne tierce, que le cabinet produit au débat un courriel d'un prestataire, Socavie, du 28 décembre 2021 dont le contenu ne peut qu'interpeller. Elle fait observer que ce courriel prétendument incriminant est envoyé le même jour que celui de la convocation à entretien préalable avec mise à pied à titre conservatoire, que Socavie est le prestataire pour l'assurance santé et prévoyance du cabinet et est donc étranger au cabinet d'avocats et n'hésite pourtant pas à commenter son état de santé. Elle considère que cette pièce est déloyale et montre surtout la volonté de la SCP de monter de toutes pièces un dossier prétendument à charge, puisque la SCP pouvait parfaitement accéder elle-même aux publications. Elle ajoute que le grief se rapportant à l'atteinte au droit de réserve n'est pas démontré dès lors qu'elle n'est pas identifiable par les clients de la SCP.
Elle conteste le relevé informatique produit par la société sur lequel sont mentionnées des consultations informatiques. Elle soutient que la SCP ne peut pas non plus justifier de la mise en place, au moment des faits, d'une quelconque authentification par mot de passe personnel, permettant de lui imputer les connexions litigieuses, qu'elle n'a mis en place aucun système de sécurisation de l'accès aux ordinateurs de son entreprise, en violation des règles issues de la RGPD. Elle affirme que le relevé n'est pas fiable puisqu'il ne s'agit que d'une impression d'écran, qu'en l'absence de toute charte informatique prohibant l'utilisation d'internet à des fins personnelles, un salarié a le droit d'utiliser les moyens mis à sa disposition dans des proportions raisonnables, qu'en l'absence de toute production du moindre relevé d'horaires de travail objectivement vérifiable, elle soutient qu'il y a lieu de retenir l'horaire fixé contractuellement.
Elle soutient que l'employeur échoue à rapporter de manière objective et matériellement vérifiable ses prétendus manquements inhérents à la durée du travail, que ce grief ne peut être qu'écarté.
Elle prétend qu'en l'absence de tout passé disciplinaire, l'employeur ne peut se prévaloir que de faits commis entre le 28 octobre et le 28 décembre 2021, que le fait que l'employeur décide de remonter jusqu'au 05 octobre 2021, pour une seule publication, démontre le peu d'éléments dont il dispose pour justifier de la rupture du contrat de travail, que cet élément ne justifie pas de l'existence d'une faute grave.
Elle considère que l'ensemble des pièces produites par l'employeur ne permet donc pas de démontrer la moindre faute, a fortiori grave.
Elle prétend que le conseil de prud'hommes aurait dû juger nul son licenciement pour atteinte à la liberté d'expression et la vie privée, et à tout le moins, sans cause réelle et sérieuse.
A l'appui de ses allégations, Mme [S] [X] produit notamment au débat :
- un courriel envoyé le 28 décembre 2021 par la Socavie : ' ...concernant le contrat collectif santé, j'ai pris note de l'indisponibilité actuelle de votre salariée et de votre préoccupation au regard de son état de santé et de celui de son conjoint dans la mesure où ces derniers ne souhaitaient pas être vaccinés. Comme vous le savez c'est un sujet qui m'est tout à fait sensible puisque j'ai été personnellement touché par la Covid19, ayant été contaminé à une époque où le vaccin n'était pas disponible, avec des répercussions importantes sur ma vie professionnelle et familiale. J'espère que vous excuserez donc cet excès de curiosité dans la mesure où j'ai pris l'initiative d'aller consulter la page Facebook publique de votre employée Mme [X], je ne vous cache pas de mon étonnement et de ma stupeur au regard des propos tenus et relayés sur ladite page. Je ne vous cache non plus avoir quelque peu hésité avant de vous livrer cette information mais dans la mesure où il apparaît que vous n'avez pas de compte Facebook je ne saurai vous laisser dans l'ignorance compte tenu de la gravité des messages véhiculés',
- un extrait du compte Facebook de Mme [V] [I] ; dernière connexion 13/08/2016.
La SCP [D] fait valoir que le licenciement pour faute grave de Mme [S] [X] est parfaitement justifié, que la salariée est à l'origine de plusieurs faits fautifs qui sont constitués par une violation de l'obligation de réserve stipulée par le contrat de travail, la consultation de sites internet à des fins personnelles pendant le temps de travail et la commission d'actes réitérés d'insubordination.
Elle indique, en réponse à l'argumentation de la salariée qui fait état d'un prétendu excès de curiosité du prestataire et d'une révélation de son état de santé, que cette dernière ne manque pas de témérité au vu de la nature du litige et de ses errements mutliples ayant alimenté le public le plus large. Elle fait valoir que si le courriel du prestataire doit révéler quelque chose quant au comportement de l'employeur, c'est sa sollicitude et son inquiétude quant à son état de santé, que Mme [S] [X] tente de créer la confusion pour échapper à la gravité de son comportement et sa violation délibérée et réitérée de son obligation de réserve, précisant que Me [O] ne dispose pas d'un compte Facebook et était l'interlocuteur du prestataire et que le compte de Me [I] était inactif depuis 2016. Elle affirme que les propos relayés par la salariée glorifient la violence contre les institutions et prônent des thèses complotistes et antisémites ce qui au demeurant est susceptible de constituer une infraction pénale, que la question n'est naturellement pas celle de la liberté de penser ou d'opinion mais celle de la violation d'une obligation essentielle de réserve qui lui incombait aux termes de son contrat de travail qui constitue la loi des parties. Elle entend faire observer que le devoir de réserve est un devoir qui consiste en une obligation de faire preuve de réserve et de retenue dans l'expression, qu'elle soit écrite ou orale de ses opinions personnelles, le droit de réserve s'applique également sur les réseaux sociaux, et que la liberté d'expression est limitée par ce devoir.
Elle soutient que contrairement à ce qu'elle soutient, Mme [S] [X] qui était en contact régulier avec la clientèle, était parfaitement identifiable, que les publications de Mme [S] [X] sur son compte Facebook ont été faites de manière publique et donc accessibles à tous.
Sur les horaires de travail, elle réitère que la pause de Mme [S] [X] était comprise quotidiennement entre 13 heures et 14 heures et que de nombreuses consultations informatiques étaient effectuées pendant son temps de travail.
Elle ajoute que Mme [S] [X] a multiplié les retards et les absences sans aucun justificatif, ce qui caractérise des actes d'insubordination répétés.
A l'appui de ses allégations, la SCP [D] produit notamment au débat :
- le contrat de travail de Mme [S] [X] qui stipule en son article :
6 : 'Madame [S] [X] reconnaît qu'elle est tenue, indépendamment d'une obligation de réserve générale, à une obligation impérative de secret professionnel sur tous les faits dont elle peut avoir connaissance, du fait ou à l'occasion de ses fonctions ou du seul fait de son appartenance à la société. Cette obligation de confidentialité concerne également tous les renseignements concernant la vie professionnelle et privée des dirigeants comme celle du personnel et des clients de la société.
Les documents ou rapports qu'elle établira on dont il lui sera donné communication sont la propriété de la société et elle ne pourra ni en conserver de copie, ni en donner communication à des tiers, sans l'accord exprès et écrit des dirigeants. Cette obligation subsiste après la fin du présent contrat.
Le non-respect de cette obligation sera susceptible d'entraîner le licenciement de la salariée,
sans préjudice d'éventuels dommages et intérêts.',
5 : 'une rémunération mensuelle forfaitaire brute de 1845,79 euros pour un horaire de 151,67 heures de travail effectif par mois suivant le planning défini ci-après : du lundi au vendredi de 09h à 12h00 et de 13h00 à 17h00",
- plusieurs publications sur le compte Facebook de Mme [S] [X],
- la nouvelle page Facebook de Mme [S] [X],
- des captures d'écran du compte Facebook de Mme [S] [X] du 27/01/2022 'Apocalypse nous allons disparaître',
- un courriel envoyé par le bureau DIM Technologie à Me [O] le 29/12/2021 '...je vous prie de bien vouloir trouver ci joint l'historique de navigation du poste ayant pour identifiant Team Viewer 1088657704",
- les relevés d'historique du poste informatique de Mme [S] [X],
- une publication sur le compte Facebook de Mme [S] [X] le 05 octobre 2021 à 14h01,
- une attestation de M. [N] [W], gérant de la société DIM Technologie : 'le poste informatique sur lequel l'historique a été dressé et transmis par mail le 29 décembre 2021 est bien celui utilisé par la secrétaire à l'accueil du cabinet ; ce poste porte l'Id Unique TeamViever 1088657704 ; le parc informatique du cabinet se compose uniquement de trois postes répartis comme suit : 1 poste destiné à la secrétaire à l'accueil et 2 postes un pour chacun des deux associés.',
- une attestation de l'expert comptable : l'effectif salarié de la société est resté constant du 01 janvier 2021 au 30 septembre 2023, les temps de travail, la rémunération, la fonction des salariés embauchés après le départ de Mme [S] [X] le 25 janvier 2022 sont restés identiques...Les horaires de travail stipulés sur les contrats de travail qui nous ont été communiqués mentionnaient tous ...',
- des échanges de textos entre Mme [S] [X] et son employeur: le 25/10/2021 'Super merci, j'ai eu le monsieur il était avec un client il m'a demandé de lui envoyer l'ordonnance par mail et il me répond avant la fermeture', Me [I] 'Ok top en général ils sont réactifs!', 'Ok tant mieux même 48h c'est plutôt bien. Bonne soirée à vous',
- un texto envoyé par Mme [S] [X] à 19h27 : 'je comprends pour les absences, votre cabinet doit tourner, après je fais au mieux...Là où j'appelle personne ne répond bref je vais recommencer plus tard. Mais votre message m'a fait de la peine car je ne me suis pas mise en arrêt maladie car je sais qu'il y a du boulot pour vous éviter aussi d'être dans le caca et aussi pour pas gamberger, beaucoup m'ont dit de le faire car je risquais d'être très faible et ils ne se sont pas trompés et je rattraperai ya pa de problème mais juste pour vous dire que même si cela ne fait pas partie de mon contrat je suis présente tous les matins en période scolaire dès 8h et que je bosse dès que j'arrive...',
- un texto de Mme [S] [X] du 01/08 :'bonjour à vous, je viens juste de voir mon compte, je tenais à vous remercier (même si je culpabilise toujours beaucoup de mon erreur que je ne digère toujours pas!!!) Je vous remercie pour votre gentillesse...'.
Réponse de la cour :
La liberté de pensée, de conscience et de religion est protégée par l'article 9 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales:
'1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui',
La directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, interdit toute discrimination, fondée notamment sur la religion ou les convictions (art. 1 ) et définit, en son article 2, le concept de discrimination.
L'article L.1121-1 du code du travail dispose que 'Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché'.
L'article L. 1321-3 dans sa rédaction applicable, qui est celle issue de la loi n 2012 n°954 du 6 août 2012, interdit les clauses du règlement intérieur apportant des restrictions aux libertés individuelles et collectives non justifiées par la nature de la tâche à accomplir ou celles discriminant les salariés en raison d'un motif illicite fondé notamment sur leurs opinions politiques et leurs convictions religieuses.
La loi n 2016-1088 du 8 août 2016 a permis l'introduction d'une clause de neutralité dans le règlement intérieur des entreprises privées (article L. 1321-2-1 du code du travail)
Quand le salarié laisse son 'mur' ou sa page accessible au public et s'exprime sans retenue, en se moquant voire en insultant son supérieur hiérarchique ou sa direction, l'employeur est fondé à considérer qu'il a commis une faute grave.
Le fait que le salarié utilise son ordinateur et sa messagerie professionnels pour s'exprimer dans le domaine privé, ne le prive pas de sa liberté d'expression et ne confère pas à l'employeur un droit de contrôle sur les propos tenus.
Pour autant qu'il s'agisse d'une pratique marginale et raisonnable, le salarié est en droit d'utiliser à des fins personnelles l'ordinateur professionnel qui est mis à sa disposition par son entreprise. Peu importe qu'il s'agisse d'un matériel destiné à l'exécution de son contrat de travail
L'employeur qui soupçonne un salarié de se connecter à Internet pendant son temps de travail à des fins personnelles est libre de rechercher et d'identifier ces connexions, qui sont présumées avoir un caractère professionnel
L'absence sans autorisation sollicitée, provoquée par un cas fortuit (incident familial, accident...) ne constitue pas une faute, du moins lorsque la durée du retard ou de l'absence reste en rapport avec l'événement et où l'employeur a été averti dès que possible ; ainsi, le fait pour un salarié de quitter son poste sans autorisation en raison de son état de santé afin de consulter un médecin ne constitue pas une faute.
Sur le devoir de réserve générale :
En l'espèce, même si une clause de réserve générale a été insérée dans le contrat de travail de Mme [S] [X], il n'en demeure pas moins que les propos relayés par la salariée sur son compte Facebook se rapportaient à des sujets de société et plus particulièrement d'actualité - essentiellement la campagne de vaccination dans le cadre de la crise sanitaire de la Covid19 -, donc sans rapport avec sa vie professionnelle ; dans aucun des messages retranscrits en tout ou partie dans la lettre de licenciement, Mme [S] [X] n'a pris position contre son employeur.
S'il est incontestable que les articles que la salariée a relayés sur son compte Facebook et les commentaires qu'elle a écrits, lesquels étaient accessibles au public, reflètent de la méfiance voire de l'opposition à l'égard des institutions et une banalisation des thèses dites 'complotistes' et antisémites, qui peuvent être condamnés moralement ou pénalement, il n'en demeure pas moins que la SCP [D] ne démontre pas que ces messages ont eu un impact sur les intérêts commerciaux de la société ; sur ce point, la SCP [D] produit un courriel unique d'un client prestataire dans lequel il précise avoir été choqué par certains propos retranscrits par Mme [S] [X] ; or, le compte a été ouvert au nom de [A] [X] et non pas [S] [X], en sorte qu'il n'est pas établi que la salariée pouvait être identifiée sur son compte facebook, sans une recherche approfondie.
C'est donc à tort que les premiers juges ont retenu que 'la gravité des actes va au delà de la faute simple et perturbe sérieusement le fonctionnement de l'entreprise cabinet d'avocat SCP [D]'.
Il s'en déduit que ce grief n'est pas établi.
Sur l'utilisation de l'ordinateur professionnel à des fins privées pendant le temps de travail :
Mme [S] [X] conteste le relevé informatique produit par la SCP [D], au motif qu'il n'est pas démontré que les consultations qui y sont mentionnées sont des consultations qu'elle aurait faites ; cependant, la salariée n'apporte aucun élément de nature à le remettre en cause sérieusement. Outre le fait que Mme [S] [X] ne conteste pas avoir été la seule salariée de la SCP [D] entre octobre 2021 et janvier 2022, la structure étant composée d'une secrétaire et de deux avocats gérants, M. [R] [B] et Mme [V] [I], il apparaît que les sites consultés font échos directement à des articles de presse qu'elle avait relayés sur son compte Facebook relatifs à sa position contre le vaccin : 'contre le pass sanitaire, les avocats du Cercle..', 'BaslesMasques', 'un Nôtre monde', et à des recherches la concernant personnellement : le 15 octobre 2021, le 21 octobre 2021, le 07 décembre 2021, le 09 décembre 2021 'courrier [A] [X] Outlook'. Enfin, l'attestation de M. [N] [W], gérant de la société DIM Technologie selon laquelle le parc informatique de la société se compose uniquement de trois postes, un poste destiné à la secrétaire à l'accueil et deux postes pour chacun des deux associés, confortent le fait que Mme [S] [X] était bien l'utilisatrice du poste informatique positionné au bureau destiné à la secrétaire du cabinet.
Il résulte suffisamment des éléments produits par la SCP [D] que Mme [S] [X] s'est connectée sur son ordinateur professionnel, régulièrement, pour accéder à des sites non professionnels, et notamment pendant ses horaires de travail fixés contractuellement. Le tableau récapitulatif suivant a été établi selon les données recueillies dans le relevé informatique :
date
durée
utilisation pendant les horaires de travail
utilisation en dehors des horaires de travail
15 octobre
46 mns
10h16/10h52
18 octobre
4 mns
10h25/10h29
21 octobre
2 mns
14h25/14h27
27 octobre
1mn ( total octobre 52 mns)
X
02 novembre
44 mns
8h47/9h32
18 novembre
12 mns
X
26 novembre
6 mns
29 novembre
2 mns
30 novembre
1 ( total : 1 h05 mns)
11h19
01 décembre
1 mn
14h29/14h30
3 décembre
8 mns
10h10/10h18
7 décembre
1 mn
11h16
8 décembre
6 mns
9 décembre
44 mns
9h 9h19/9h33 9h37/9h58
16 décembre
7 + 4
17 décembre
3 mns ( total décembre : 1h 11 mns)
X
Il apparaît ainsi que Mme [S] [X] s'est connectée, sur la période visée, en moyenne 1 heure par mois, principalement sur ses horaires de travail, pour un usage privé de l'outil informatique de la SCP [D].
Si Mme [S] [X] était autorisée à faire un usage raisonnable de l'ordinateur professionnel, il n'en demeure pas moins que son utilisation pendant les horaires de travail et non pas exclusivement pendant ses pauses, ne constitue pas un usage raisonnable ; les parties ne sont pas en accord sur les horaires des pauses journalières ; même en retenant les horaires avancés par la salariée - 12h30/13h30 -, il apparaît que l'utilisation de l'ordinateur a lieu majoritairement pendant son temps de travail.
Il s'en déduit que Mme [S] [X] a commis une faute qui, si elle ne rend pas impossible le maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis, constitue néanmoins une cause réelle et sérieuse de son licenciement.
Sur les absences et retards :
Si les pièces produites par la SCP [D] démontrent que Mme [S] [X] est arrivée quelques fois en retard sur son poste de travail ou s'est s'absentée à l'occasion de deux ou trois demi journées, il apparaît que ces absences étaient pour l'essentiel justifiées pour des raisons médicales : le 25 octobre : prise de rendez-vous chez un ophtalmologue - ; le 03 novembre: selon ses propres écritures, la SCP [D] avait autorisé l'absence d'une demi journée pour un motif médical ; il en était de même pour l'absence du 14 décembre au matin : test au Covid19 de la fille de la salariée.
La SCP [D] ne produit pas d'autres éléments de nature à justifier d'autres retards ou absences non justifiées ou non autorisées, et ce de façon répétée.
Au vu de ces éléments, il apparaît que le comportement de Mme [S] [X] n'a pas pris le caractère d'une insubordination délibérée, à défaut d'un absentéisme systématique ou de retards et absences sans autorisation multipliés.
Il s'en déduit que ce grief n'est pas établi.
Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, il apparaît que le seul fait fautif qui est établi à l'encontre de Mme [S] [X] est celui de l'usage régulier de l'outil informatique à des fins personnelles pendant les horaires de travail.
Tenant à l'absence de sanction disciplinaire antérieure à la procédure de licenciement, le licenciement de Mme [S] [X] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences financières :
Au vu des dispositions conventionnelles applicables, Mme [S] [X] est en droit de solliciter une :
- indemnité compensatrice de préavis de deux mois, compte tenu d'une ancienneté acquise au jour de son licenciement supérieure à 2 ans ; il sera donc fait à sa demande à hauteur de la somme de 4 752,42 euros calculée sur la base d'un salaire mensuel moyen brut de 2 376,21 euros, et de 475,24 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférente,
- indemnité légale de licenciement d'un montant de 4 752,42 euros, la salariée ayant acquis une ancienneté supérieure à 5 ans à la fin de la relation contractuelle.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens.
Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :
Moyens des parties
Mme [S] [X] sollicite la condamnation de la SCP [D] à la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat au motif que la société a cherché à constituer de toutes pièces un dossier disciplinaire pour rompre son contrat de travail, qu'elle a dû attendre le mois de juin 2022 pour bénéficier de ses indemnités journalières retenues à tort par l'employeur.
A l'appui de ses allégations, Mme [S] [X] produit notamment au débat :
- un courriel de Mme [S] [X] du 12/02/2022 : 'suite à la réception de mon solde de tout compte en date du 4 février dernier, je constate que je n'ai pas été rendue destinataire du paiement de mes indemnités journalières pour la période maladie du 1er au 31 janvier 2022 alors que vous avez appliqué la subrogation et que ces sommes vous ont été versées directement par la CPAM. Je vous remercie de bien vouloir faire le nécessaire pour régulariser la situation et me communiquer un nouveau solde de tout compte...'.
La SCP [D] fait valoir que la subrogation avait déjà été employée antérieurement à l'arrêt de travail, que cependant, pour la période allant jusqu'au 25 janvier 2022 des indemnités ont été versées alors que Mme [S] [X] avait été mise à pied conservatoire, en sorte que l'employeur a procédé au remboursement de l'intégralité des sommes auprès de la CPAM. Elle ajoute que pour la période postérieure et jusqu'au 13 février 2022, alors que Mme [S] [X] était sortie des effectifs le 25 janvier 2022, il semblerait que la salariée ait envoyé directement à la CPAM un arrêt de travail dont l'employeur n'a jamais eu connaissance et que la CPAM a réglé, à tort entre ses mains, certaines sommes.
A l'appui de ses allégations, la SCP [D] produit notamment au débat :
- un courrier du 18 janvier 2022 adressé à Mme [S] [X] : 'Vous trouverez, ci-joint, le bulletin de salaire du mois de décembre 2021 que je viens de recevoir de mon expert-comptable. Comme je vous l'expliquais par courrier du 7 janvier dernier, ce bulletin de salaire ne pouvait pas être établi sans votre 1er arrêt de travail relatif à la Covid.
L'arrêt de travail 'scanné' que vous m'avez adressé consécutivement était illisible quant aux dates visées, si bien que nous avons dû attendre votre pli postal afin de transmettre une version plus claire, avec des dates identifiables, à notre expert-comptable. Néanmoins, et pour vous permettre de bénéficier de l'intégralité de votre salaire (sans attendre les indemnités de la CPAM), nous avons procédé au paiement de votre salaire dés le 29 décembre 2021...',
- un 'tableau récapitulatif des prestations versées à tort' concernant Mme [S] [X] qui mentionne pour la période des indemnités journalières du 26/01/2022 au 13/02/2022, une date du premier versement au 01/02/2022 et du dernier versement au 15/02/2022, le montant des sommes versées à tort 692,17 euros et l'origine de l'indu 'nouveaux éléments de salaire réceptionnés modifiant le calcul de l'indemnité journalière versée initialement' et le motif de l'indu 'erreur de destinataire du règlement' et informations complémentaires 'suite sortie des effectifs au 25/01/2022 règlement à tort à l'employeur du 26/01 au 13/02/2022",
- un courrier de la SCP [D] du 04/03/2022 adressé à la CPAM des Alpes Maritimes :'demande de notification d'indu' 'je prends attache avec votre organisme en ma qualité de gérant de la SCP [D] afin de solliciter l'émission par vos services d'un indu concernant le versement d'indemnités journalières qui nous ont été versées par subrogation au regard du prononcé d'une mise à pied à titre conservatoire puis d'un licenciement pour faute grave concernant Mme [S] [X] ...',
- un courriel de la CPAM du 25/01/2023 '... je vous informe qu'à ce jour votre dossier a été soldé par votre règlement et je vous en remercie...'.
Réponse de la cour :
Dans la mesure où la mise à pied conservatoire prononcée par la SCP [D] le 28 décembre 2021 n'est pas justifiée, Mme [S] [X] a subi une perte de salaire de cette date jusqu'au licenciement, soit le 25 janvier 2022.
Il n'est pas sérieusement discuté que Mme [S] [X] a été en arrêt de travail pour maladie ordinaire du 19 au 28 décembre 2021 puis du 30 décembre au 31 janvier 2022.
Mme [S] [X] affirme avoir bénéficié des indemnités journalières retenues à tort par l'employeur en juin 2022, en sorte que la situation 'salariale' a été régularisée.
Mme [S] [X] ne démontre pas que la SCP [D] a exécuté le contrat de travail de façon déloyale et ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice subi pendant cette période.
Mme [S] [X] sera donc déboutée de ce chef de demande.
Sur les autres demandes :
Il convient de faire droit à la demande de Mme [S] [X] tendant à ce que la SCP [D] soit condamnée à lui délivrer les documents de fin de contrat rectifiés, sans justifier de la nécessité de prononcer une astreinte, et tendant à l'application des intérêts sur les sommes qui lui sont dues.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et en dernier ressort ;
Infirme le jugement rendu le 02 juillet 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes,
Statuant sur les dispositions réformées et y ajoutant,
Juge que le licenciement de Mme [S] [X] prononcé le 25 janvier 2022 par la SCP [D] est justifié par une cause réelle et sérieuse,
Condamne la SCP [D] à payer à Mme [S] [X] les sommes suivantes:
- 4 752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement,
- 4 752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 475,24 euros brut d'indemnité de congés payés y afférents,
Ordonne à la SCP [D] de délivrer à Mme [S] [X] les documents de fin de contrat conformes au dispositif du présent arrêt,
Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées, que s'agissant des créances salariales à venir au moment de la demande, les intérêts moratoires courent à compter de chaque échéance devenue exigible, et qu'ils courent sur les sommes à caractère indemnitaire, à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus,
Condamne la SCP [D] à payer à Mme [S] [X] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne la SCP [D] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/02636 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JJF5
EM/EB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES
02 juillet 2024
RG :23/00036
[X]
C/
S.C.P. [O] - [I]
Grosse délivrée le 25 NOVEMBRE 2025 à :
- Me GORAN
- Me AUTRIC
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NIMES en date du 02 Juillet 2024, N°23/00036
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Mme Delphine OLLMANN, Greffier, lors des débats et Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 30 Septembre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 Novembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Madame [S] [X]
née le 11 Avril 1986 à [Localité 4]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Kristel GORAN, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉE :
S.C.P. [O] - [I]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Thomas AUTRIC de la SELARL EVE SOULIER - JEROME PRIVAT - THOMAS AUTRIC, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Philippe LASSAU de la SCP LASSAU-GASTALDI, avocat au barreau de GRASSE
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 25 Novembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :
Mme [S] [X] a été engagée par la SCP [D] à compter du 22 février 2016 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité de secrétaire juridique.
Par courrier recommandé du 28 décembre 2021, Mme [S] [X] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement pour faute grave fixé au 10 janvier puis reporté au 20 janvier 2022, avec mise à pied conservatoire.
Par lettre du 25 janvier 2022, la SCP [O] [I] a notifié à Mme [S] [X] son licenciement pour faute grave.
Par requête du 18 juillet 2023, Mme [S] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes de diverses demandes afférentes à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.
Par lettre recommandé du 30 octobre 2023, Mme [S] [X] a été licenciée pour faute grave.
Par jugement en date du 02 juillet 2024, le conseil de prud'hommes de Nîmes a:
- dit et jugé fondé le licenciement pour faute grave de Mme [Z] [X];
- débouté Mme [Z] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à son licenciement pour faute grave ;
- débouté Mme [Z] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives formulées au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale ;
- débouté Mme [Z] [X] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que les dépens seront partagés par chacune des parties »
Par acte du 04 août 2024, Mme [S] [X] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 05 juillet 2024.
Par ordonnance en date du 02 juin 2025, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 29 août 2025. L'affaire a été fixée à l'audience du 30 septembre 2025 à laquelle elle a été retenue.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 08 août 2025 auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, Mme [S] [X] demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes en date du 2 juillet 2024 en ce qu'il a :
- dit et juge fondé le licenciement pour faute grave de Mme [Z] [X];
- débouté Mme [Z] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à son licenciement pour faute grave ;
- débouté Mme [Z] [U] l'ensemble de ses demandes relatives formulées au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale ;
- débouté Mme [Z] [X] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que les dépens seront partagés par chacune des parties »
et statuant à nouveau,
à titre principal,
- juger le licenciement de Mme [S] [X] nul,
- condamner la SCP [D] à verser à Mme [S] [X] la somme de 14.257,26 euros sur le fondement de l'article L.1235-3-1 du code du travail,
- condamner la SCP [D] à verser à Mme [S] [X] les sommes suivantes :
- 4.752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement (2 mois suivant ccn);
- 4.752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois selon ccn) ;
- 475,24 euros brut d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Mme [S] [X] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- ordonner sous astreinte journalière de 100 euros par jour de retard la remise des documents sociaux rectifiés dans la limite de 60 jours ;
- ordonner la capitalisation des intérêts ;
A titre subsidiaire, si la Cour infirmait le jugement entrepris et jugeait le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- juger le licenciement de Madame [S] [X] sans cause réelle et sérieuse ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Madame [S] [X] la somme de 7.128,63 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Madame [S] [X] les sommes suivantes :
- 4.752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement (2 mois suivant ccn);
- 4.752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois selon ccn) ;
- 475,24 euros brut d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Madame [S] [X] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- ordonner sous astreinte journalière de 100 euros par jour de retard la remise des documents sociaux rectifiés dans la limite de 60 jours ;
- ordonner la capitalisation des intérêts ;
A titre infiniment subsidiaire, si la Cour jugeait le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,
- condamner la SCP [D] à verser à Mme [S] [X] les sommes suivantes :
- 4.752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement (2 mois suivant ccn);
- 4.752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois selon ccn) ;
- 475,24 euros brut d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
(condamner la SCP chardon ' assadourian à verser à Mme [S] [X] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- ordonner sous astreinte journalière de 100 euros par jour de retard la remise des documents sociaux rectifiés dans la limite de 60 jours ;
- ordonner la capitalisation des intérêts ;
en tout état de cause,
- débouter la SCP [O] ' [I] de l'ensemble de ses moyens et prétentions ;
- condamner la SCP [O] ' [I] à verser à Mme [S] [X] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du cpc et aux dépens.
En l'état de ses dernières écritures en date du 25 août 2025 auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, la SCP [O] - [I] demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Nîmes le 2 juillet 2024 en ce qu'il a :
- dit et jugé fondé le licenciement pour faute grave de Mme [S] [X],
- débouté Mme [S] [X] de l'ensemble de ses demandes relatives à son licenciement pour faute grave ;
- débouté Mme [S] [X] de l'ensemble, de ses demandes relatives au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale ;
- débouté Mme [S] [X] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- infirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Nîmes le 2 juillet 2024 en ce qu'il a :
- débouté la SCP [O] - [I] de ses demandes reconventionnelles relatives à l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seront partagés par chacune des parties,
y ajoutant et statuant à nouveau :
- condamner Mme [S] [X] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du cpc et aux entiers dépens,
en tout état de cause,
- débouter Mme [S] [X] de ses écritures fins et conclusions d'appel et de toutes demandes de condamnation à l'encontre de la SCP [O] - [I] dès lors que ces dernières sont infondées et injustifiées tant en fait qu'en droit, en principe et en quantum.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS :
Sur le licenciement :
En l'espèce, la lettre de licenciement datée du 25 janvier 2022 qui fixe les limites du litige, énonce les griefs suivants :
' Nous faisons suite à l'entretien préalable en date du 20 janvier 2022 auquel vous vous êtes présentée, accompagnée d'un conseiller du salarié.
Lors de cet entretien, nous vous avons fait part des motifs à l'origine de l'engagement d'une procédure disciplinaire à votre encontre.
Le 27 décembre 2021, à la suite d'un rendez-vous téléphonique avec un prestataire habituel du cabinet, au cours duquel nous faisions part de nos inquiétudes au regard de votre contamination de la Covid 19 (dont nous vous avons donné lecture au cours de l'entretien préalable), il nous a été fait part de l'existence d'un compte FACEBOOK vous appartenant, dont les publications, diffusées publiquement, étaient particulièrement choquantes :
Ainsi, et alors que votre dernier jour travaillé était le 17 décembre 2021, le 18 décembre 2021 vous 'postiez' le message suivant, particuliérement violent et insultant :
[A] [X]
18 décembre 13h
Et allez pass sanitaire hop en pass vaccinal...allez les moutons on va y aller ou va résister'''!!!
Pfff ils font vomir ces mères qui se disent être l'Etat qui veut nous protéger!!!
Rien n'est logique et les gens courent tout ça pour garder leur confort, voyager etc...
Putain c'est pas avec vous qu'on aurait gagné les guerres je vous le dis!
Mais malheureusement vous ne faites aucune recherche et vous allez à l'abattoir...
Ah pour l'instant vous n'avez rien eu alors soit vous avez eu le flacon1 : serum phy et vous avez eu de la chance soit c'est le flacon2 : Arn messager donc mort lente système immunitaire prend un coup de mois en mois...et pour ceux qui ont eu de graves effets secondaires voire la mort n'ont pas eu du tout de la chance car ils se sont chopés le flacon 3.
Bref, j'espère que les gens vont encore résister et ne pas aller courir car le jour où vous serez handicapés ou mort : ah là vos voyages....
Bref je ne me résignerai JAMAIS
Je leur offre toutes mes doses à ce gouvernement!
Merci à tous ceux qui résistent et qui ont compris on va y arriver.
Sur ce point vous nous avez indiqué que votre message n'était que le reflet de la stricte vérité et que l'avenir vous donnerait raison.
De la même manière, en date du 17 décembre, étaient diffusées les 'informations' suivantes censurées depuis par Facebook.
[A] [X]
17 décembre
L'inventeur de l'Arn messager supplie les parents de ne pas faire injecter leurs enfants!!!
[A] [X]
17 décembre
Et oui...dur dur de réveiller les gens! Pourquoi ne font ils pas leur recherche'!!
Et oui ce serait tellement grave que l'Etat nous veuille du mal qu'il est impossible de le croire...mais c'est la triste réalité.!!!
23 novembre
Pfffff malheureusement vous ne savez pas ce qu'ils prévoient...en acceptant vous devenez complices! Résister pour l'avenir de mon enfant je ne me résignerai JAMAIS. Qukis aillent se faire foutre avec leur piq.........
23 novembre
Les flics se croient au far west pfffff bravo la Guadeloupe, résistez!!!
9 novembre
A écouter, bizarre toutes les recherches mènent aux mêmes conclusions : on est dirigés par des israéliens, des religieux qui comptent bien mener jusqu'à terme leur plan ! Et arrêtez avec le complotisme ! C'est tellement grave que vous ne voulez pas y croire mais prenez le temps de faire vos recherches et on en reparlera...avant qu'il ne soit trop tard il faut qu'on soit unis et résistants à tout ça!!!!
Protégez vos enfants et ne courez pas vous faire inject...ils vont aussi faire passer le vax du covid pour la grippe....
Sur ce point, vous avez nié dans un premier temps être l'auteur de ce message et après vous l'avoir soumis, avez reconnu que celui-ci avait bien été écrit par vos soins et 'nous ne nous en rendions pas compte mais que c'était la stricte vérité, que c'était exactement ce qui était en train de se passer...'.
Nous considérons ces faits comme fautifs en ce qu'ils vont bien au delà de la liberté de penser et d'opinion, au regard de la teneur de la nature des publications éditées et/ou relayées par vos soins, aux termes desquelles figurent un conglomérat d'injures, d'insultes, de thèses antisémites, de glorification de la violence à l'encontre des forces de l'ordre....qui vont à l'encontre des valeurs de notre cabinet, indépendamment de notre serment d'avocat.
Au delà du fait que ces opinions affichées et revendiquées témoignent de ce que vous pensez d'une majorité de la population, dont votre employeur fait partie, nous sommes particulièrement choqués qu'un prestataire ait pu librement consulter vos publications, de sorte qu'il en est de même pour la clientèle du cabinet, votre page FACEBOOK étant publique et donc ouverte à tous les utilisateurs....
Or, aux termes de votre contrat de travail, vous êtes astreinte à respecter une clause d'obligation générale de réserve, dont nous considérons que celle-ci a été largement violée au regard des explications qui précèdent.
Par ailleurs, certaines publications FACEBOOK ayant été diligentées pendant vos heures de travail, il a été procédé à la consultation de l'historique de votre ordinateur, étant ici rappelé que vos horaires de travail à hauteur de 37 heures sont répartis comme suit :
lundi
mardi
mercredi
jeudi
vendredi
8h15-13h00
8h15-13h00
8h15-13h00
8h15-13h00
8h15-13h00
14h00-17h00
14h00-17h00
14h00-17h00
14h00-17h00
14h00-16h00
vendredi 17 décembre 2021 : à partir de l2h28 consultation de plusieurs sites internet 'baslesmasques... ». ' recours contre le pass sanitaire. .. », ' Un Notre Monde PACA...', ' pass sanitaire, obligation vaccinale...',
- jeudi 16 décembre 2021: à partir de l2h29 commande internet sur le site 'chronodrive »,
- jeudi 9 décembre 2021: à partir de 8hl6 commande internet sur le site 'chronodrive', pendant une quinzaine de minutes, puis à partir de 9h29 jusqu'à environ 10h00, consultation de votre compte mail personnel puis de recherches 'vétérinaires' sur votre commune de [Localité 5]...,
- mardi 7 décembre 2021: à partir de l1h15 consultation de votre compte mail personnel OUTLOOK pendant une quinzaine de minutes,
- vendredi 3 décembre 2021: à partir de l0h10 consultation de sites de voyages 'viamichelin' et 'booking',
- mercredi 1er décembre 202] : à partir de 14h29 consultation de votre compte mail personnel OUTLOOK,
- mardi 30 novembre 2021 : à partir de l1h19 consultation de sites internet 'crédit LOA », 'meilleur taux',
- lundi 29 novembre 2021: à partir de 8h16, consultation de sites internet 'documentaire HOLD UP',
- mercredi 24 novembre 2021: à partir de l2h32 commande internet sur le site 'chronodrive',
- jeudi 18 novembre 2021: à partir de 12h36 commande internet sur le site 'chronodrive' pendant une vingtaine de minutes,
- mardi 2 novembre 2021 : à partir de 8h47 et pendant prés d'une heure, consultation de sites internet et recherches personnelles. . .,
- mercredi 27 octobre 2021 : A partir de 12h20 consultation de sites internet et recherches personnelles. . . ,
- jeudi 21 octobre 2021 : à partir de l4h25 consultation de votre compte mail personnel OUTLOOK,
- lundi 18 octobre 2021 : à partir de 10h25 consultation de sites de recherches 'le bon coin » puis consultation de votre compte mail personnel,
- vendredi 15 octobre 2021 à partir de l0hl6 consultation de votre compte mail personnel.
Aprés votre erreur, en terme de délai procédural avant l'été, non sans conséquence, nous vous avions tout de même versé une prime afin de tenter de vous remotiver et de vous renouveler notre confiance.
A compter du mois de septembre 2021, Me [I] a quasiment cessé de dicter et a travaillé tous les soirs et weekends depuis la rentrée, en pensant qu'en disposant de davantage de temps, vous éviteriez toute erreur.
Or, en contrepartie de l'effort qui a été consenti par mon associée et moi-même, nous n'avons pu malheureusement que constater que vous avez abusé de notre confiance et vous en avez profité pour vaquer à des occupations personnelles pendant vos heures de travail...
Lors de l'entretien, vous avez esquivé le sujet.
Par ailleurs, le lundi 25 octobre 2021, vous n'avez pu prendre votre poste qu'en fin de matinée en raison d'un retard lié à la consultation de votre ophtalmologue, vous n'avez rien proposé de votre propre chef pour rattraper les heures manquées et nous ne vous avons rien demandé, alors que nous étions en droit le faire. ..
Puis, le mercredi 3 novembre 2021, nous vous avons autorisée à vous absenter tout l'aprés-midi afin de vous rendre à un rendez-vous médical. Nous vous avons alors demandé de rattraper à votre convenance les heures du 3 novembre 2021, ce que vous avez refusé en prétextant que vous auriez pu vous mettre en arrêt de travail, ce qui vous avait d'ailleurs été conseillé.
Nous vous avons alors indiqué que tout chantage à l'arrêt de travail n'était pas acceptable, que nous avions toujours fait preuve de bienveillance à l'égard d'urgences particulières personnelles.
Sur ce point vous avez prétendu, lors de l'entretien, qu'il aurait fallu vous décompter la demi-journée, étant précisé qu'en ce qui nous concerne, nous n'entendions pas vous pénaliser financièrement, ce que nous n'avons jamais fait au demeurant, et sollicitions un simple rattrapage des heures.
Le 13 décembre 2021, vous êtes arrivée à 8h30 et vous avez sollicité des explications sur un prétendu problème de congés payés, soutenant que des samedis vous aurez été décomptés.
Nous avons alors vérifié ensemble les bulletins de paie et le calendrier et vous avez pu constater qu'il s'agissait en réalité d'un vendredi afin de vous permettre de faire un pont. Il semblerait que vous vous soyez trompée d'année calendaire, ce que vous avez reconnu. ..
Vous nous avez alors indiqué que vous ne compreniez pas que les journées de congés payés prises pour faire 'un pont' soient décomptées et que vous pensiez qu'elles étaient 'offertes'.
Nous vous avons rappelé que nous avions toujours fonctionné ainsi depuis l'origine de notre relation de travail et que ces ponts avaient été pris avec votre accord, au demeurant pour vous permettre de profiter de votre enfant sur ces périodes...
Le mardi 14 décembre au matin, vous avez dû vous absenter pour aller faire tester votre enfant à la demande de l'école, celle-ci étant cas contact, ce qui vous avez été signalé par un mail la veille, dont vous n'aviez pas pris connaissance.
Par la suite, alors que votre enfant présentait de la fiévre pendant la semaine, Me [I] vous a suggéré de refaire tester votre fille au regard de la situation, de la fermeture de sa classe, ce à quoi vous avez répondu ' il n'y a pas que le covid...'.
Quand vous nous avez annoncé votre contamination le dimanche 19 décembre 2021, nous nous sommes faits testés l'après-midi et Me [I] a été diagnostiquée positive.
Indépendamment du bouleversement occasionné d'un point de vue professionnel et personnel au regard des fêtes de fin d'année, et de l'annulation de tout contact avec nos proches, qui sont bien peu de choses au regard de la situation sanitaire actuelle, il est constant que votre comportement irresponsable aurait pu avoir des conséquences toutes autres au regard des personnes fragiles de notre famille, ce que vous n'êtes pas sans savoir.
Or, non seulement vous n'avez pas testé votre enfant ni vous-même durant la semaine mais vous avez également manqué au respect des gestes barrières motif pris de ce 'qu'il n'existait pas que le covid dans la vie et que les chiffres de BMF TV étaient faux...'.
Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 20 janvier 2022 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation au sujet des faits fautifs susmentionnés.
L'ensemble de ces faits, au regard de leur gravité, rendent impossible le maintien de votre contrat de travail et nous contraignent à prononcer votre licenciement pour faute grave.
Nous vous rappelons que vous 'Faites l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire, la période non travaillée nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement ne sera pas rémunérée...'.
Moyens des parties
Mme [S] [X] conteste les faits qui lui sont reprochés.
Elle indique qu'il appartient à la SCP de justifier de la réalité d'une faute grave de sa part.
S'agissant de son compte Facebook, elle indique que la SCP [D] doit justifier qu'elle était identifiable pour la clientèle du cabinet et pour toute personne tierce, que le cabinet produit au débat un courriel d'un prestataire, Socavie, du 28 décembre 2021 dont le contenu ne peut qu'interpeller. Elle fait observer que ce courriel prétendument incriminant est envoyé le même jour que celui de la convocation à entretien préalable avec mise à pied à titre conservatoire, que Socavie est le prestataire pour l'assurance santé et prévoyance du cabinet et est donc étranger au cabinet d'avocats et n'hésite pourtant pas à commenter son état de santé. Elle considère que cette pièce est déloyale et montre surtout la volonté de la SCP de monter de toutes pièces un dossier prétendument à charge, puisque la SCP pouvait parfaitement accéder elle-même aux publications. Elle ajoute que le grief se rapportant à l'atteinte au droit de réserve n'est pas démontré dès lors qu'elle n'est pas identifiable par les clients de la SCP.
Elle conteste le relevé informatique produit par la société sur lequel sont mentionnées des consultations informatiques. Elle soutient que la SCP ne peut pas non plus justifier de la mise en place, au moment des faits, d'une quelconque authentification par mot de passe personnel, permettant de lui imputer les connexions litigieuses, qu'elle n'a mis en place aucun système de sécurisation de l'accès aux ordinateurs de son entreprise, en violation des règles issues de la RGPD. Elle affirme que le relevé n'est pas fiable puisqu'il ne s'agit que d'une impression d'écran, qu'en l'absence de toute charte informatique prohibant l'utilisation d'internet à des fins personnelles, un salarié a le droit d'utiliser les moyens mis à sa disposition dans des proportions raisonnables, qu'en l'absence de toute production du moindre relevé d'horaires de travail objectivement vérifiable, elle soutient qu'il y a lieu de retenir l'horaire fixé contractuellement.
Elle soutient que l'employeur échoue à rapporter de manière objective et matériellement vérifiable ses prétendus manquements inhérents à la durée du travail, que ce grief ne peut être qu'écarté.
Elle prétend qu'en l'absence de tout passé disciplinaire, l'employeur ne peut se prévaloir que de faits commis entre le 28 octobre et le 28 décembre 2021, que le fait que l'employeur décide de remonter jusqu'au 05 octobre 2021, pour une seule publication, démontre le peu d'éléments dont il dispose pour justifier de la rupture du contrat de travail, que cet élément ne justifie pas de l'existence d'une faute grave.
Elle considère que l'ensemble des pièces produites par l'employeur ne permet donc pas de démontrer la moindre faute, a fortiori grave.
Elle prétend que le conseil de prud'hommes aurait dû juger nul son licenciement pour atteinte à la liberté d'expression et la vie privée, et à tout le moins, sans cause réelle et sérieuse.
A l'appui de ses allégations, Mme [S] [X] produit notamment au débat :
- un courriel envoyé le 28 décembre 2021 par la Socavie : ' ...concernant le contrat collectif santé, j'ai pris note de l'indisponibilité actuelle de votre salariée et de votre préoccupation au regard de son état de santé et de celui de son conjoint dans la mesure où ces derniers ne souhaitaient pas être vaccinés. Comme vous le savez c'est un sujet qui m'est tout à fait sensible puisque j'ai été personnellement touché par la Covid19, ayant été contaminé à une époque où le vaccin n'était pas disponible, avec des répercussions importantes sur ma vie professionnelle et familiale. J'espère que vous excuserez donc cet excès de curiosité dans la mesure où j'ai pris l'initiative d'aller consulter la page Facebook publique de votre employée Mme [X], je ne vous cache pas de mon étonnement et de ma stupeur au regard des propos tenus et relayés sur ladite page. Je ne vous cache non plus avoir quelque peu hésité avant de vous livrer cette information mais dans la mesure où il apparaît que vous n'avez pas de compte Facebook je ne saurai vous laisser dans l'ignorance compte tenu de la gravité des messages véhiculés',
- un extrait du compte Facebook de Mme [V] [I] ; dernière connexion 13/08/2016.
La SCP [D] fait valoir que le licenciement pour faute grave de Mme [S] [X] est parfaitement justifié, que la salariée est à l'origine de plusieurs faits fautifs qui sont constitués par une violation de l'obligation de réserve stipulée par le contrat de travail, la consultation de sites internet à des fins personnelles pendant le temps de travail et la commission d'actes réitérés d'insubordination.
Elle indique, en réponse à l'argumentation de la salariée qui fait état d'un prétendu excès de curiosité du prestataire et d'une révélation de son état de santé, que cette dernière ne manque pas de témérité au vu de la nature du litige et de ses errements mutliples ayant alimenté le public le plus large. Elle fait valoir que si le courriel du prestataire doit révéler quelque chose quant au comportement de l'employeur, c'est sa sollicitude et son inquiétude quant à son état de santé, que Mme [S] [X] tente de créer la confusion pour échapper à la gravité de son comportement et sa violation délibérée et réitérée de son obligation de réserve, précisant que Me [O] ne dispose pas d'un compte Facebook et était l'interlocuteur du prestataire et que le compte de Me [I] était inactif depuis 2016. Elle affirme que les propos relayés par la salariée glorifient la violence contre les institutions et prônent des thèses complotistes et antisémites ce qui au demeurant est susceptible de constituer une infraction pénale, que la question n'est naturellement pas celle de la liberté de penser ou d'opinion mais celle de la violation d'une obligation essentielle de réserve qui lui incombait aux termes de son contrat de travail qui constitue la loi des parties. Elle entend faire observer que le devoir de réserve est un devoir qui consiste en une obligation de faire preuve de réserve et de retenue dans l'expression, qu'elle soit écrite ou orale de ses opinions personnelles, le droit de réserve s'applique également sur les réseaux sociaux, et que la liberté d'expression est limitée par ce devoir.
Elle soutient que contrairement à ce qu'elle soutient, Mme [S] [X] qui était en contact régulier avec la clientèle, était parfaitement identifiable, que les publications de Mme [S] [X] sur son compte Facebook ont été faites de manière publique et donc accessibles à tous.
Sur les horaires de travail, elle réitère que la pause de Mme [S] [X] était comprise quotidiennement entre 13 heures et 14 heures et que de nombreuses consultations informatiques étaient effectuées pendant son temps de travail.
Elle ajoute que Mme [S] [X] a multiplié les retards et les absences sans aucun justificatif, ce qui caractérise des actes d'insubordination répétés.
A l'appui de ses allégations, la SCP [D] produit notamment au débat :
- le contrat de travail de Mme [S] [X] qui stipule en son article :
6 : 'Madame [S] [X] reconnaît qu'elle est tenue, indépendamment d'une obligation de réserve générale, à une obligation impérative de secret professionnel sur tous les faits dont elle peut avoir connaissance, du fait ou à l'occasion de ses fonctions ou du seul fait de son appartenance à la société. Cette obligation de confidentialité concerne également tous les renseignements concernant la vie professionnelle et privée des dirigeants comme celle du personnel et des clients de la société.
Les documents ou rapports qu'elle établira on dont il lui sera donné communication sont la propriété de la société et elle ne pourra ni en conserver de copie, ni en donner communication à des tiers, sans l'accord exprès et écrit des dirigeants. Cette obligation subsiste après la fin du présent contrat.
Le non-respect de cette obligation sera susceptible d'entraîner le licenciement de la salariée,
sans préjudice d'éventuels dommages et intérêts.',
5 : 'une rémunération mensuelle forfaitaire brute de 1845,79 euros pour un horaire de 151,67 heures de travail effectif par mois suivant le planning défini ci-après : du lundi au vendredi de 09h à 12h00 et de 13h00 à 17h00",
- plusieurs publications sur le compte Facebook de Mme [S] [X],
- la nouvelle page Facebook de Mme [S] [X],
- des captures d'écran du compte Facebook de Mme [S] [X] du 27/01/2022 'Apocalypse nous allons disparaître',
- un courriel envoyé par le bureau DIM Technologie à Me [O] le 29/12/2021 '...je vous prie de bien vouloir trouver ci joint l'historique de navigation du poste ayant pour identifiant Team Viewer 1088657704",
- les relevés d'historique du poste informatique de Mme [S] [X],
- une publication sur le compte Facebook de Mme [S] [X] le 05 octobre 2021 à 14h01,
- une attestation de M. [N] [W], gérant de la société DIM Technologie : 'le poste informatique sur lequel l'historique a été dressé et transmis par mail le 29 décembre 2021 est bien celui utilisé par la secrétaire à l'accueil du cabinet ; ce poste porte l'Id Unique TeamViever 1088657704 ; le parc informatique du cabinet se compose uniquement de trois postes répartis comme suit : 1 poste destiné à la secrétaire à l'accueil et 2 postes un pour chacun des deux associés.',
- une attestation de l'expert comptable : l'effectif salarié de la société est resté constant du 01 janvier 2021 au 30 septembre 2023, les temps de travail, la rémunération, la fonction des salariés embauchés après le départ de Mme [S] [X] le 25 janvier 2022 sont restés identiques...Les horaires de travail stipulés sur les contrats de travail qui nous ont été communiqués mentionnaient tous ...',
- des échanges de textos entre Mme [S] [X] et son employeur: le 25/10/2021 'Super merci, j'ai eu le monsieur il était avec un client il m'a demandé de lui envoyer l'ordonnance par mail et il me répond avant la fermeture', Me [I] 'Ok top en général ils sont réactifs!', 'Ok tant mieux même 48h c'est plutôt bien. Bonne soirée à vous',
- un texto envoyé par Mme [S] [X] à 19h27 : 'je comprends pour les absences, votre cabinet doit tourner, après je fais au mieux...Là où j'appelle personne ne répond bref je vais recommencer plus tard. Mais votre message m'a fait de la peine car je ne me suis pas mise en arrêt maladie car je sais qu'il y a du boulot pour vous éviter aussi d'être dans le caca et aussi pour pas gamberger, beaucoup m'ont dit de le faire car je risquais d'être très faible et ils ne se sont pas trompés et je rattraperai ya pa de problème mais juste pour vous dire que même si cela ne fait pas partie de mon contrat je suis présente tous les matins en période scolaire dès 8h et que je bosse dès que j'arrive...',
- un texto de Mme [S] [X] du 01/08 :'bonjour à vous, je viens juste de voir mon compte, je tenais à vous remercier (même si je culpabilise toujours beaucoup de mon erreur que je ne digère toujours pas!!!) Je vous remercie pour votre gentillesse...'.
Réponse de la cour :
La liberté de pensée, de conscience et de religion est protégée par l'article 9 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales:
'1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui',
La directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, interdit toute discrimination, fondée notamment sur la religion ou les convictions (art. 1 ) et définit, en son article 2, le concept de discrimination.
L'article L.1121-1 du code du travail dispose que 'Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché'.
L'article L. 1321-3 dans sa rédaction applicable, qui est celle issue de la loi n 2012 n°954 du 6 août 2012, interdit les clauses du règlement intérieur apportant des restrictions aux libertés individuelles et collectives non justifiées par la nature de la tâche à accomplir ou celles discriminant les salariés en raison d'un motif illicite fondé notamment sur leurs opinions politiques et leurs convictions religieuses.
La loi n 2016-1088 du 8 août 2016 a permis l'introduction d'une clause de neutralité dans le règlement intérieur des entreprises privées (article L. 1321-2-1 du code du travail)
Quand le salarié laisse son 'mur' ou sa page accessible au public et s'exprime sans retenue, en se moquant voire en insultant son supérieur hiérarchique ou sa direction, l'employeur est fondé à considérer qu'il a commis une faute grave.
Le fait que le salarié utilise son ordinateur et sa messagerie professionnels pour s'exprimer dans le domaine privé, ne le prive pas de sa liberté d'expression et ne confère pas à l'employeur un droit de contrôle sur les propos tenus.
Pour autant qu'il s'agisse d'une pratique marginale et raisonnable, le salarié est en droit d'utiliser à des fins personnelles l'ordinateur professionnel qui est mis à sa disposition par son entreprise. Peu importe qu'il s'agisse d'un matériel destiné à l'exécution de son contrat de travail
L'employeur qui soupçonne un salarié de se connecter à Internet pendant son temps de travail à des fins personnelles est libre de rechercher et d'identifier ces connexions, qui sont présumées avoir un caractère professionnel
L'absence sans autorisation sollicitée, provoquée par un cas fortuit (incident familial, accident...) ne constitue pas une faute, du moins lorsque la durée du retard ou de l'absence reste en rapport avec l'événement et où l'employeur a été averti dès que possible ; ainsi, le fait pour un salarié de quitter son poste sans autorisation en raison de son état de santé afin de consulter un médecin ne constitue pas une faute.
Sur le devoir de réserve générale :
En l'espèce, même si une clause de réserve générale a été insérée dans le contrat de travail de Mme [S] [X], il n'en demeure pas moins que les propos relayés par la salariée sur son compte Facebook se rapportaient à des sujets de société et plus particulièrement d'actualité - essentiellement la campagne de vaccination dans le cadre de la crise sanitaire de la Covid19 -, donc sans rapport avec sa vie professionnelle ; dans aucun des messages retranscrits en tout ou partie dans la lettre de licenciement, Mme [S] [X] n'a pris position contre son employeur.
S'il est incontestable que les articles que la salariée a relayés sur son compte Facebook et les commentaires qu'elle a écrits, lesquels étaient accessibles au public, reflètent de la méfiance voire de l'opposition à l'égard des institutions et une banalisation des thèses dites 'complotistes' et antisémites, qui peuvent être condamnés moralement ou pénalement, il n'en demeure pas moins que la SCP [D] ne démontre pas que ces messages ont eu un impact sur les intérêts commerciaux de la société ; sur ce point, la SCP [D] produit un courriel unique d'un client prestataire dans lequel il précise avoir été choqué par certains propos retranscrits par Mme [S] [X] ; or, le compte a été ouvert au nom de [A] [X] et non pas [S] [X], en sorte qu'il n'est pas établi que la salariée pouvait être identifiée sur son compte facebook, sans une recherche approfondie.
C'est donc à tort que les premiers juges ont retenu que 'la gravité des actes va au delà de la faute simple et perturbe sérieusement le fonctionnement de l'entreprise cabinet d'avocat SCP [D]'.
Il s'en déduit que ce grief n'est pas établi.
Sur l'utilisation de l'ordinateur professionnel à des fins privées pendant le temps de travail :
Mme [S] [X] conteste le relevé informatique produit par la SCP [D], au motif qu'il n'est pas démontré que les consultations qui y sont mentionnées sont des consultations qu'elle aurait faites ; cependant, la salariée n'apporte aucun élément de nature à le remettre en cause sérieusement. Outre le fait que Mme [S] [X] ne conteste pas avoir été la seule salariée de la SCP [D] entre octobre 2021 et janvier 2022, la structure étant composée d'une secrétaire et de deux avocats gérants, M. [R] [B] et Mme [V] [I], il apparaît que les sites consultés font échos directement à des articles de presse qu'elle avait relayés sur son compte Facebook relatifs à sa position contre le vaccin : 'contre le pass sanitaire, les avocats du Cercle..', 'BaslesMasques', 'un Nôtre monde', et à des recherches la concernant personnellement : le 15 octobre 2021, le 21 octobre 2021, le 07 décembre 2021, le 09 décembre 2021 'courrier [A] [X] Outlook'. Enfin, l'attestation de M. [N] [W], gérant de la société DIM Technologie selon laquelle le parc informatique de la société se compose uniquement de trois postes, un poste destiné à la secrétaire à l'accueil et deux postes pour chacun des deux associés, confortent le fait que Mme [S] [X] était bien l'utilisatrice du poste informatique positionné au bureau destiné à la secrétaire du cabinet.
Il résulte suffisamment des éléments produits par la SCP [D] que Mme [S] [X] s'est connectée sur son ordinateur professionnel, régulièrement, pour accéder à des sites non professionnels, et notamment pendant ses horaires de travail fixés contractuellement. Le tableau récapitulatif suivant a été établi selon les données recueillies dans le relevé informatique :
date
durée
utilisation pendant les horaires de travail
utilisation en dehors des horaires de travail
15 octobre
46 mns
10h16/10h52
18 octobre
4 mns
10h25/10h29
21 octobre
2 mns
14h25/14h27
27 octobre
1mn ( total octobre 52 mns)
X
02 novembre
44 mns
8h47/9h32
18 novembre
12 mns
X
26 novembre
6 mns
29 novembre
2 mns
30 novembre
1 ( total : 1 h05 mns)
11h19
01 décembre
1 mn
14h29/14h30
3 décembre
8 mns
10h10/10h18
7 décembre
1 mn
11h16
8 décembre
6 mns
9 décembre
44 mns
9h 9h19/9h33 9h37/9h58
16 décembre
7 + 4
17 décembre
3 mns ( total décembre : 1h 11 mns)
X
Il apparaît ainsi que Mme [S] [X] s'est connectée, sur la période visée, en moyenne 1 heure par mois, principalement sur ses horaires de travail, pour un usage privé de l'outil informatique de la SCP [D].
Si Mme [S] [X] était autorisée à faire un usage raisonnable de l'ordinateur professionnel, il n'en demeure pas moins que son utilisation pendant les horaires de travail et non pas exclusivement pendant ses pauses, ne constitue pas un usage raisonnable ; les parties ne sont pas en accord sur les horaires des pauses journalières ; même en retenant les horaires avancés par la salariée - 12h30/13h30 -, il apparaît que l'utilisation de l'ordinateur a lieu majoritairement pendant son temps de travail.
Il s'en déduit que Mme [S] [X] a commis une faute qui, si elle ne rend pas impossible le maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis, constitue néanmoins une cause réelle et sérieuse de son licenciement.
Sur les absences et retards :
Si les pièces produites par la SCP [D] démontrent que Mme [S] [X] est arrivée quelques fois en retard sur son poste de travail ou s'est s'absentée à l'occasion de deux ou trois demi journées, il apparaît que ces absences étaient pour l'essentiel justifiées pour des raisons médicales : le 25 octobre : prise de rendez-vous chez un ophtalmologue - ; le 03 novembre: selon ses propres écritures, la SCP [D] avait autorisé l'absence d'une demi journée pour un motif médical ; il en était de même pour l'absence du 14 décembre au matin : test au Covid19 de la fille de la salariée.
La SCP [D] ne produit pas d'autres éléments de nature à justifier d'autres retards ou absences non justifiées ou non autorisées, et ce de façon répétée.
Au vu de ces éléments, il apparaît que le comportement de Mme [S] [X] n'a pas pris le caractère d'une insubordination délibérée, à défaut d'un absentéisme systématique ou de retards et absences sans autorisation multipliés.
Il s'en déduit que ce grief n'est pas établi.
Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, il apparaît que le seul fait fautif qui est établi à l'encontre de Mme [S] [X] est celui de l'usage régulier de l'outil informatique à des fins personnelles pendant les horaires de travail.
Tenant à l'absence de sanction disciplinaire antérieure à la procédure de licenciement, le licenciement de Mme [S] [X] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences financières :
Au vu des dispositions conventionnelles applicables, Mme [S] [X] est en droit de solliciter une :
- indemnité compensatrice de préavis de deux mois, compte tenu d'une ancienneté acquise au jour de son licenciement supérieure à 2 ans ; il sera donc fait à sa demande à hauteur de la somme de 4 752,42 euros calculée sur la base d'un salaire mensuel moyen brut de 2 376,21 euros, et de 475,24 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférente,
- indemnité légale de licenciement d'un montant de 4 752,42 euros, la salariée ayant acquis une ancienneté supérieure à 5 ans à la fin de la relation contractuelle.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce sens.
Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :
Moyens des parties
Mme [S] [X] sollicite la condamnation de la SCP [D] à la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat au motif que la société a cherché à constituer de toutes pièces un dossier disciplinaire pour rompre son contrat de travail, qu'elle a dû attendre le mois de juin 2022 pour bénéficier de ses indemnités journalières retenues à tort par l'employeur.
A l'appui de ses allégations, Mme [S] [X] produit notamment au débat :
- un courriel de Mme [S] [X] du 12/02/2022 : 'suite à la réception de mon solde de tout compte en date du 4 février dernier, je constate que je n'ai pas été rendue destinataire du paiement de mes indemnités journalières pour la période maladie du 1er au 31 janvier 2022 alors que vous avez appliqué la subrogation et que ces sommes vous ont été versées directement par la CPAM. Je vous remercie de bien vouloir faire le nécessaire pour régulariser la situation et me communiquer un nouveau solde de tout compte...'.
La SCP [D] fait valoir que la subrogation avait déjà été employée antérieurement à l'arrêt de travail, que cependant, pour la période allant jusqu'au 25 janvier 2022 des indemnités ont été versées alors que Mme [S] [X] avait été mise à pied conservatoire, en sorte que l'employeur a procédé au remboursement de l'intégralité des sommes auprès de la CPAM. Elle ajoute que pour la période postérieure et jusqu'au 13 février 2022, alors que Mme [S] [X] était sortie des effectifs le 25 janvier 2022, il semblerait que la salariée ait envoyé directement à la CPAM un arrêt de travail dont l'employeur n'a jamais eu connaissance et que la CPAM a réglé, à tort entre ses mains, certaines sommes.
A l'appui de ses allégations, la SCP [D] produit notamment au débat :
- un courrier du 18 janvier 2022 adressé à Mme [S] [X] : 'Vous trouverez, ci-joint, le bulletin de salaire du mois de décembre 2021 que je viens de recevoir de mon expert-comptable. Comme je vous l'expliquais par courrier du 7 janvier dernier, ce bulletin de salaire ne pouvait pas être établi sans votre 1er arrêt de travail relatif à la Covid.
L'arrêt de travail 'scanné' que vous m'avez adressé consécutivement était illisible quant aux dates visées, si bien que nous avons dû attendre votre pli postal afin de transmettre une version plus claire, avec des dates identifiables, à notre expert-comptable. Néanmoins, et pour vous permettre de bénéficier de l'intégralité de votre salaire (sans attendre les indemnités de la CPAM), nous avons procédé au paiement de votre salaire dés le 29 décembre 2021...',
- un 'tableau récapitulatif des prestations versées à tort' concernant Mme [S] [X] qui mentionne pour la période des indemnités journalières du 26/01/2022 au 13/02/2022, une date du premier versement au 01/02/2022 et du dernier versement au 15/02/2022, le montant des sommes versées à tort 692,17 euros et l'origine de l'indu 'nouveaux éléments de salaire réceptionnés modifiant le calcul de l'indemnité journalière versée initialement' et le motif de l'indu 'erreur de destinataire du règlement' et informations complémentaires 'suite sortie des effectifs au 25/01/2022 règlement à tort à l'employeur du 26/01 au 13/02/2022",
- un courrier de la SCP [D] du 04/03/2022 adressé à la CPAM des Alpes Maritimes :'demande de notification d'indu' 'je prends attache avec votre organisme en ma qualité de gérant de la SCP [D] afin de solliciter l'émission par vos services d'un indu concernant le versement d'indemnités journalières qui nous ont été versées par subrogation au regard du prononcé d'une mise à pied à titre conservatoire puis d'un licenciement pour faute grave concernant Mme [S] [X] ...',
- un courriel de la CPAM du 25/01/2023 '... je vous informe qu'à ce jour votre dossier a été soldé par votre règlement et je vous en remercie...'.
Réponse de la cour :
Dans la mesure où la mise à pied conservatoire prononcée par la SCP [D] le 28 décembre 2021 n'est pas justifiée, Mme [S] [X] a subi une perte de salaire de cette date jusqu'au licenciement, soit le 25 janvier 2022.
Il n'est pas sérieusement discuté que Mme [S] [X] a été en arrêt de travail pour maladie ordinaire du 19 au 28 décembre 2021 puis du 30 décembre au 31 janvier 2022.
Mme [S] [X] affirme avoir bénéficié des indemnités journalières retenues à tort par l'employeur en juin 2022, en sorte que la situation 'salariale' a été régularisée.
Mme [S] [X] ne démontre pas que la SCP [D] a exécuté le contrat de travail de façon déloyale et ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice subi pendant cette période.
Mme [S] [X] sera donc déboutée de ce chef de demande.
Sur les autres demandes :
Il convient de faire droit à la demande de Mme [S] [X] tendant à ce que la SCP [D] soit condamnée à lui délivrer les documents de fin de contrat rectifiés, sans justifier de la nécessité de prononcer une astreinte, et tendant à l'application des intérêts sur les sommes qui lui sont dues.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale et en dernier ressort ;
Infirme le jugement rendu le 02 juillet 2024 par le conseil de prud'hommes de Nîmes,
Statuant sur les dispositions réformées et y ajoutant,
Juge que le licenciement de Mme [S] [X] prononcé le 25 janvier 2022 par la SCP [D] est justifié par une cause réelle et sérieuse,
Condamne la SCP [D] à payer à Mme [S] [X] les sommes suivantes:
- 4 752,42 euros net au titre de l'indemnité de licenciement,
- 4 752,42 bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 475,24 euros brut d'indemnité de congés payés y afférents,
Ordonne à la SCP [D] de délivrer à Mme [S] [X] les documents de fin de contrat conformes au dispositif du présent arrêt,
Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées, que s'agissant des créances salariales à venir au moment de la demande, les intérêts moratoires courent à compter de chaque échéance devenue exigible, et qu'ils courent sur les sommes à caractère indemnitaire, à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus,
Condamne la SCP [D] à payer à Mme [S] [X] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne la SCP [D] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,