CA Poitiers, 1re ch., 25 novembre 2025, n° 24/01318
POITIERS
Arrêt
Autre
ARRET N° 359
N° RG 24/01318 - N° Portalis DBV5-V-B7I-HBVT
[S]
C/
S.A.S. JS ENERGIE
Loi n° 77-1468 du30/12/1977
Copie revêtue de la formule exécutoire
Le à
Le à
Le à
Copie gratuite délivrée
Le à
Le à
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/01318 - N° Portalis DBV5-V-B7I-HBVT
Décision déférée à la Cour : jugement du 14 mars 2024 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 6].
APPELANT :
Monsieur [P] [S]
né le 16 Janvier 1955 à [Localité 7]
[Adresse 2]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me Isabelle BLANCHARD de la SELARL ADLIB, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
INTIMEE :
S.A.S. JS ENERGIE
[Adresse 1]
[Localité 4]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Angélique MARQUES-DIAS,
ARRÊT :
- Rendue par défaut
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, Président et par Mme Angélique MARQUES-DIAS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Suivant bon de commande du 19 mai 2021, un contrat portant sur la pose et la fourniture d'une pompe à chaleur et d'un ballon ECS était conclu entre M. [P] [S] et la société JS ENERGIE pour un prix de 9500 euros TTC ( 7500 + 2000 ).
La société JS ENERGIE émettait une facture le 1er décembre 2021 à payer avant le 10 juillet 2021 (sic) d'un montant de 9500 euros, facture portant sur la mise en place, fourniture, installation d'une pompe à chaleur de marque GPE EXT Quattro +3, la fourniture, l'installation, la pose d'un ballon thermodynamique aeromax 200 l.
Par courrier recommandé du 29 mars 2022, le conseil de M. [S] mettait en demeure la société de lui rembourser la somme de 2000 euros correspondant au chauffe-eau non posé et à lui payer la somme de 4884 euros correspondant à la prime attendue.
Par courrier du 14 juin 2022, la société JS ENERGIE s'excusait de sa réponse tardive, indiquait que le commercial auquel les époux [S] avaient eu affaire n'était plus dans la société et proposait un paiement échelonné en 4 mensualités.
Le conseil des époux [S] confirmait leur accord le 14 septembre 2022.
Par acte du 5 janvier 2023, M. [S] a fait assigner la société JS ENERGIE devant le tribunal judiciaire de La Roche sur Yon aux fins de condamnation à lui payer les sommes de 2000 euros au titre du remboursement du prix du chauffe-eau, 4884 euros au titre de la prime non versée, 2500 euros en réparation de son préjudice moral, outre une indemnité de procédure.
La société JS ENERGIE envoyait 3 chèques de 1300 euros chacun les 13 février, 6 mars, 25 avril 2023, soit 3900 euros.
La société JS ENERGIE, régulièrement assignée, n'a pas comparu.
Par jugement réputé contradictoire en date du 14 mars 2024 , le tribunal judiciaire de La Roche sur Yon a débouté M. [P] [S] de ses demandes, l'a condamné aux dépens.
Le premier juge a notamment retenu que :
- sur la demande relative au chauffe-eau
Le demandeur produit des copies contradictoires de ce qui paraît être le même contrat :
- une copie (en noir et blanc) d'un bon de commande signé le 19 mai 2021 portant sur une pompe à chaleur de marque Airwell d'un montant de 9500 euros TTC, somme intégralement financée par DOMOFINANCE,
- une seconde copie d'un bon signé le 19 mai 2021 portant sur une pompe à chaleur de marque Airwell d'un montant de 7500 euros TTC et sur un ballon thermodynamique d'un montant de 2000 euros avec financement intégral par un crédit affecté par un établissement dont le nom est illisible.
Les conclusions font référence au crédit affecté financé par DOMOFINANCE
Le demandeur ne prouve pas que la défenderesse avait une obligation de fourniture et de pose d'un chauffe-eau.
- sur les demandes relatives à la prime et au préjudice moral
Le demandeur produit des courriels de réclamation, une mise en demeure qui ne constituent pas non plus une preuve.
LA COUR
Vu l'appel en date du 3 juin 2024 interjeté par M. [S]
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 2 septembre 2024, M. [S] a présenté les demandes suivantes :
Vu les articles L. 221-1, 2°, b, L.221-9 et L. 121-1 du Code de la consommation,
Vu les articles 1231-1, 1383, 1383-1, 1231-1, 1231-2, 1240 du Code civil,
Vu la jurisprudence et les pièces communiquées,
VOIR REFORMER LE JUGEMENT RENDU LE 14 mars 2023 PAR LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LA ROCHE SUR YON en toutes ses dispositions,
- DECLARER Monsieur [S] recevable et bien fondé en sa demande,
CONSTATER que le contrat du 19 mai 2021 n'a pas été exécuté en son intégralité,
DIRE que la société JS ENERGIE a manqué à ses obligations d'information et de conseil,
DIRE que la société JS ENERGIE a exercé des pratiques commerciales trompeuses et déloyales,
En conséquence,
- CONDAMNER la société JS ENERGIE à verser la somme de 6.884 euros à Monsieur [S], à titre d'indemnisation de l'inexécution contractuelle constituée par l'absence de fourniture et de pose du chauffe-eau, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2022, date de leur mise en demeure et comprenant la somme de 4 884 euros au titre de l'indemnisation du préjudice lié à la perte du bénéfice de la prime de l'Etat, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2022, date de leur mise en demeure.
- Ordonner la compensation entre la somme versée par la société JS ENERGIE à hauteur de 3 900 € et celle de 6 884 €, en application des articles 1347 et suivants du Code civil,
- CONDAMNER la société JS ENERGIE au paiement de la somme de 2.500 euros au titre du préjudice moral.
- CONDAMNER la société JS ENERGIE à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et à hauteur d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.
A l'appui de ses prétentions, M. [S] soutient notamment que :
- Il s'est rapproché de la société JS ENERGIE souhaitant faire installer une pompe à chaleur et un ballon d'eau chaude. Un rendez-vous a été convenu. Lors de ce rendez-vous, la société leur a annoncé qu'ils étaient éligibles à la prime de l'Etat, qu'elle se chargeait des démarches administratives. Elle évaluait le montant de l'aide à 4884 euros de sorte que le solde restant dû s'élevait à 4616 euros.
- Fort de ces informations, M. [S] concluait le contrat le 19 mai 2021 et souscrivait par l'intermédiaire de la société un prêt dédié à cet achat auprès de la société DOMOFINANCE.
- Le jour de l'installation de la pompe, il était constaté que le ballon d'eau chaude commandé ne pouvait être posé en raison d'une erreur affectant la prise de cotes.
- Les époux [S] 'relançaient' la société pour obtenir le remboursement de la somme versée pour le ballon d'eau chaude, des éléments d'information sur la prime (montant et délai d'obtention). Ils apprenaient finalement verbalement qu'ils n'étaient pas éligibles à la prime.
- La mise en demeure du 29 mars 2022 a été adressée faute de réponse à leurs mails.
- La signature du bon de commande engage le signataire, vaut acceptation des conditions générales du contrat.
- Constitue une publicité tout document commercial tel un bon de commande dont les indications et la présentation permettent aux clients potentiels auprès desquels il est diffusé de se former une opinion sur les résultats attendus du bien ou du service proposé.
- Le contrat a été conclu hors établissement ce qui entraîne une protection accrue du consommateur.
- Le bon de commande est un mode de preuve suffisant de la prestation à réaliser.
- Le bon de commande n°10345 remplaçait et annulait le bon n°10142. Le bon n°10 345 prévoit l'installation, la fourniture et la mise en route de la pompe à chaleur et d'un ballon ECS thermodynamique. Le bon de commande signé a valeur commerciale et probatoire.
La facture émise le 1er décembre 2021 n°FAC 616 confirme qu'elle portait sur une pompe à chaleur et un ballon chauffe-eau, ballon qui n'a jamais été posé.
-[Localité 5] mai et juin 2022, la société déclarait par mail assumer sa responsabilité, proposait un règlement en 4 mensualités, puis ne donnait plus suite.
- Le mail du 1er juin 2022 adressé par la société à leur conseil vaut aveu. Elle a demandé un échéancier. Elle a commencé à rembourser, adressé 3 chèques les 13 février, 6 mars, 25 avril 2023 soit 3900 euros.
- Le préjudice doit être intégralement réparé. Il inclut l'absence de fourniture et de pose du chauffe-eau, soit 2000 euros avec intérêts à compter de la mise en demeure, un préjudice moral en lien avec l'échec des tentatives de règlement amiable, l'anxiété, le découragement éprouvés, la tromperie pratiquée.
- La prime, son montant étaient un élément déterminant dans la décision de M. [S] de conclure avec cette société. Les documents contractuels ne comprennent aucune réserve quant à l'obtention ou le montant de la prime.
- Elle a manqué à son devoir d'information et de conseil, s'est livrée à des pratiques commerciales trompeuses et déloyales.
La société SAS JS Energie a été citée à étude le 31 juillet 2024.
Il convient de se référer aux écritures de l'appelant pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 11 septembre 2025.
SUR CE
L'article 472 du code de procédure civile dispose : Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
- sur l'existence d'une commande relative à un ballon d'eau chaude
L'article 1103 du code civil dispose: les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Selon l'article 1104, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.
L'article 1193 du code civil dispose que les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Selon l'article 1194, les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi.
Il ressort des deux bons de commande produits qu'ils portaient tous deux sur l'acquisition d'une pompe à chaleur et d'un ballon d'eau chaude.
La facture produite en appel ne vise aucun bon de commande mais porte elle aussi sur l'acquisition, l'installation d'une pompe à chaleur, d'un ballon aeromax pour un prix de 9500 euros qui correspond au prix mentionné sur le bon de commande signé.
Le mail d'excuse adressé par la société JS ENERGIE le 29 mars 2022, la proposition d'indemnisation en date du 14 juin 2022 bien que peu explicite sur son objet précis, les trois chèques émis par la société et adressés à M. [S] confirment l'existence d'un contrat conclu par la société JS ENERGIE et M. [P] [S].
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a retenu que la preuve d'une commande portant sur la fourniture et la pose d'un ballon thermodynamique n'était pas établie.
- sur l'inexécution partielle du contrat
L'article 1217 du code civil dispose : la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut:
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution ;
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.
L'article 1383 du code civil dispose que l'aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques.
Il exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de sa volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques.
La déclaration d'une partie ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu que si elle porte sur des points de fait et non sur des points de droit.
M. [S] indique que la pose du ballon ECS n'a pu se faire en raison d'une erreur de cotes.
Il ne demande pas l'exécution forcée de cette prestation mais le remboursement de la partie du prix correspondant au chauffe-eau soit la somme de 2000 euros.
Si l'affirmation relative à l'erreur de cotes repose exclusivement sur ses dires, les excuses de la société par courrier du 14 juin 2022 en réponse à un courrier de l'avocat du client qui lui reprochait notamment le défaut de remboursement du chauffe-eau, l'envoi successif de 3 chèques constituent une manifestation non équivoque de la reconnaissance par la société de sa carence dans l'exécution du contrat.
La société JS ENERGIE n'a pas proposé d'installer un autre ballon d'eau chaude, ne s'est prévalue d'aucune cause étrangère, a préféré indemniser son client.
Il résulte des pièces que les versements effectués se sont élevés à 3900 euros alors que le coût de la fourniture, de l'installation, de la pose du chauffe-eau était de 2000 euros.
Ce chef de préjudice a donc été réparé.
- sur la perte du bénéfice de la prime 'Etatique'
M. [S] soutient que la société JS ENERGIE lui a fait croire qu'il était éligible à une prime Etatique, l'a chiffrée, lui a laissé penser qu'elle était certaine, n'a émis aucune réserve.
Il assure que cette promesse a été déterminante dans son choix de contracter avec la société JS ENERGIE.
Il indique aussi avoir été avisé verbalement qu'en fin de compte il n'était pas éligible à la prime.
Selon les articles 120-1,121-1 du code de la consommation, une pratique commerciale est réputée trompeuse lorsque soit elle contient des informations fausses soit est susceptible d'induire en erreur le consommateur moyen et en ce qu'elle est de nature à altérer de manière substantielle le comportement économique de celui-ci en le conduisant à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.
L'article 1112-1 dispose : celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.
Il ne résulte d'aucun des documents contractuels produits (bons de commande successifs, facture), ni du courriel émanant de la société du 1er juin 2022 qu'une prime ait été promise.
Si la facture fait référence à des 'démarches administratives' qui seront assurées par la société, cette expression est beaucoup trop équivoque, floue pour démontrer la promesse alléguée.
La nature de la prime Etatique promise, ses conditions ne sont pas énoncées.
Les courriels adressés les 15 et 28 septembre 2021 émanant des époux [S] à la société démontrent certes qu'ils pensaient bénéficier de la prime, mais ne démontrent pas qu'elle leur ait été promise, garantie.
M. [S] sera donc débouté de sa demande de ce chef.
- sur les préjudices
L'article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
Selon l'article 1231-2, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.
Il n'est pas contesté que M. [S] a perçu de la société JS ENERGIE la somme de 3900 euros, que le prix du chauffe-eau était de 2000 euros.
Ces sommes n'ont été versées qu'après que l'assignation a été délivrée.
S'il a subi un préjudice moral résultant des contrariétés, démarches rendues nécessaires par la défaillance de son cocontractant, ce préjudice a été réparé par le versement de la somme de 1900 euros.
Il ne justifie pas d'un préjudice différent de celui qui a été réparé par le versement de la somme précitée.
- sur les autres demandes
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
PAR CES MOTIFS
statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort
- confirme le jugement entrepris
Y ajoutant :
- condamne M. [P] [S] aux dépens d'appel
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
N° RG 24/01318 - N° Portalis DBV5-V-B7I-HBVT
[S]
C/
S.A.S. JS ENERGIE
Loi n° 77-1468 du30/12/1977
Copie revêtue de la formule exécutoire
Le à
Le à
Le à
Copie gratuite délivrée
Le à
Le à
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/01318 - N° Portalis DBV5-V-B7I-HBVT
Décision déférée à la Cour : jugement du 14 mars 2024 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 6].
APPELANT :
Monsieur [P] [S]
né le 16 Janvier 1955 à [Localité 7]
[Adresse 2]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me Isabelle BLANCHARD de la SELARL ADLIB, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
INTIMEE :
S.A.S. JS ENERGIE
[Adresse 1]
[Localité 4]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Angélique MARQUES-DIAS,
ARRÊT :
- Rendue par défaut
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, Président et par Mme Angélique MARQUES-DIAS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Suivant bon de commande du 19 mai 2021, un contrat portant sur la pose et la fourniture d'une pompe à chaleur et d'un ballon ECS était conclu entre M. [P] [S] et la société JS ENERGIE pour un prix de 9500 euros TTC ( 7500 + 2000 ).
La société JS ENERGIE émettait une facture le 1er décembre 2021 à payer avant le 10 juillet 2021 (sic) d'un montant de 9500 euros, facture portant sur la mise en place, fourniture, installation d'une pompe à chaleur de marque GPE EXT Quattro +3, la fourniture, l'installation, la pose d'un ballon thermodynamique aeromax 200 l.
Par courrier recommandé du 29 mars 2022, le conseil de M. [S] mettait en demeure la société de lui rembourser la somme de 2000 euros correspondant au chauffe-eau non posé et à lui payer la somme de 4884 euros correspondant à la prime attendue.
Par courrier du 14 juin 2022, la société JS ENERGIE s'excusait de sa réponse tardive, indiquait que le commercial auquel les époux [S] avaient eu affaire n'était plus dans la société et proposait un paiement échelonné en 4 mensualités.
Le conseil des époux [S] confirmait leur accord le 14 septembre 2022.
Par acte du 5 janvier 2023, M. [S] a fait assigner la société JS ENERGIE devant le tribunal judiciaire de La Roche sur Yon aux fins de condamnation à lui payer les sommes de 2000 euros au titre du remboursement du prix du chauffe-eau, 4884 euros au titre de la prime non versée, 2500 euros en réparation de son préjudice moral, outre une indemnité de procédure.
La société JS ENERGIE envoyait 3 chèques de 1300 euros chacun les 13 février, 6 mars, 25 avril 2023, soit 3900 euros.
La société JS ENERGIE, régulièrement assignée, n'a pas comparu.
Par jugement réputé contradictoire en date du 14 mars 2024 , le tribunal judiciaire de La Roche sur Yon a débouté M. [P] [S] de ses demandes, l'a condamné aux dépens.
Le premier juge a notamment retenu que :
- sur la demande relative au chauffe-eau
Le demandeur produit des copies contradictoires de ce qui paraît être le même contrat :
- une copie (en noir et blanc) d'un bon de commande signé le 19 mai 2021 portant sur une pompe à chaleur de marque Airwell d'un montant de 9500 euros TTC, somme intégralement financée par DOMOFINANCE,
- une seconde copie d'un bon signé le 19 mai 2021 portant sur une pompe à chaleur de marque Airwell d'un montant de 7500 euros TTC et sur un ballon thermodynamique d'un montant de 2000 euros avec financement intégral par un crédit affecté par un établissement dont le nom est illisible.
Les conclusions font référence au crédit affecté financé par DOMOFINANCE
Le demandeur ne prouve pas que la défenderesse avait une obligation de fourniture et de pose d'un chauffe-eau.
- sur les demandes relatives à la prime et au préjudice moral
Le demandeur produit des courriels de réclamation, une mise en demeure qui ne constituent pas non plus une preuve.
LA COUR
Vu l'appel en date du 3 juin 2024 interjeté par M. [S]
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 2 septembre 2024, M. [S] a présenté les demandes suivantes :
Vu les articles L. 221-1, 2°, b, L.221-9 et L. 121-1 du Code de la consommation,
Vu les articles 1231-1, 1383, 1383-1, 1231-1, 1231-2, 1240 du Code civil,
Vu la jurisprudence et les pièces communiquées,
VOIR REFORMER LE JUGEMENT RENDU LE 14 mars 2023 PAR LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LA ROCHE SUR YON en toutes ses dispositions,
- DECLARER Monsieur [S] recevable et bien fondé en sa demande,
CONSTATER que le contrat du 19 mai 2021 n'a pas été exécuté en son intégralité,
DIRE que la société JS ENERGIE a manqué à ses obligations d'information et de conseil,
DIRE que la société JS ENERGIE a exercé des pratiques commerciales trompeuses et déloyales,
En conséquence,
- CONDAMNER la société JS ENERGIE à verser la somme de 6.884 euros à Monsieur [S], à titre d'indemnisation de l'inexécution contractuelle constituée par l'absence de fourniture et de pose du chauffe-eau, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2022, date de leur mise en demeure et comprenant la somme de 4 884 euros au titre de l'indemnisation du préjudice lié à la perte du bénéfice de la prime de l'Etat, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2022, date de leur mise en demeure.
- Ordonner la compensation entre la somme versée par la société JS ENERGIE à hauteur de 3 900 € et celle de 6 884 €, en application des articles 1347 et suivants du Code civil,
- CONDAMNER la société JS ENERGIE au paiement de la somme de 2.500 euros au titre du préjudice moral.
- CONDAMNER la société JS ENERGIE à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et à hauteur d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.
A l'appui de ses prétentions, M. [S] soutient notamment que :
- Il s'est rapproché de la société JS ENERGIE souhaitant faire installer une pompe à chaleur et un ballon d'eau chaude. Un rendez-vous a été convenu. Lors de ce rendez-vous, la société leur a annoncé qu'ils étaient éligibles à la prime de l'Etat, qu'elle se chargeait des démarches administratives. Elle évaluait le montant de l'aide à 4884 euros de sorte que le solde restant dû s'élevait à 4616 euros.
- Fort de ces informations, M. [S] concluait le contrat le 19 mai 2021 et souscrivait par l'intermédiaire de la société un prêt dédié à cet achat auprès de la société DOMOFINANCE.
- Le jour de l'installation de la pompe, il était constaté que le ballon d'eau chaude commandé ne pouvait être posé en raison d'une erreur affectant la prise de cotes.
- Les époux [S] 'relançaient' la société pour obtenir le remboursement de la somme versée pour le ballon d'eau chaude, des éléments d'information sur la prime (montant et délai d'obtention). Ils apprenaient finalement verbalement qu'ils n'étaient pas éligibles à la prime.
- La mise en demeure du 29 mars 2022 a été adressée faute de réponse à leurs mails.
- La signature du bon de commande engage le signataire, vaut acceptation des conditions générales du contrat.
- Constitue une publicité tout document commercial tel un bon de commande dont les indications et la présentation permettent aux clients potentiels auprès desquels il est diffusé de se former une opinion sur les résultats attendus du bien ou du service proposé.
- Le contrat a été conclu hors établissement ce qui entraîne une protection accrue du consommateur.
- Le bon de commande est un mode de preuve suffisant de la prestation à réaliser.
- Le bon de commande n°10345 remplaçait et annulait le bon n°10142. Le bon n°10 345 prévoit l'installation, la fourniture et la mise en route de la pompe à chaleur et d'un ballon ECS thermodynamique. Le bon de commande signé a valeur commerciale et probatoire.
La facture émise le 1er décembre 2021 n°FAC 616 confirme qu'elle portait sur une pompe à chaleur et un ballon chauffe-eau, ballon qui n'a jamais été posé.
-[Localité 5] mai et juin 2022, la société déclarait par mail assumer sa responsabilité, proposait un règlement en 4 mensualités, puis ne donnait plus suite.
- Le mail du 1er juin 2022 adressé par la société à leur conseil vaut aveu. Elle a demandé un échéancier. Elle a commencé à rembourser, adressé 3 chèques les 13 février, 6 mars, 25 avril 2023 soit 3900 euros.
- Le préjudice doit être intégralement réparé. Il inclut l'absence de fourniture et de pose du chauffe-eau, soit 2000 euros avec intérêts à compter de la mise en demeure, un préjudice moral en lien avec l'échec des tentatives de règlement amiable, l'anxiété, le découragement éprouvés, la tromperie pratiquée.
- La prime, son montant étaient un élément déterminant dans la décision de M. [S] de conclure avec cette société. Les documents contractuels ne comprennent aucune réserve quant à l'obtention ou le montant de la prime.
- Elle a manqué à son devoir d'information et de conseil, s'est livrée à des pratiques commerciales trompeuses et déloyales.
La société SAS JS Energie a été citée à étude le 31 juillet 2024.
Il convient de se référer aux écritures de l'appelant pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 11 septembre 2025.
SUR CE
L'article 472 du code de procédure civile dispose : Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
- sur l'existence d'une commande relative à un ballon d'eau chaude
L'article 1103 du code civil dispose: les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Selon l'article 1104, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.
L'article 1193 du code civil dispose que les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Selon l'article 1194, les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi.
Il ressort des deux bons de commande produits qu'ils portaient tous deux sur l'acquisition d'une pompe à chaleur et d'un ballon d'eau chaude.
La facture produite en appel ne vise aucun bon de commande mais porte elle aussi sur l'acquisition, l'installation d'une pompe à chaleur, d'un ballon aeromax pour un prix de 9500 euros qui correspond au prix mentionné sur le bon de commande signé.
Le mail d'excuse adressé par la société JS ENERGIE le 29 mars 2022, la proposition d'indemnisation en date du 14 juin 2022 bien que peu explicite sur son objet précis, les trois chèques émis par la société et adressés à M. [S] confirment l'existence d'un contrat conclu par la société JS ENERGIE et M. [P] [S].
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a retenu que la preuve d'une commande portant sur la fourniture et la pose d'un ballon thermodynamique n'était pas établie.
- sur l'inexécution partielle du contrat
L'article 1217 du code civil dispose : la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut:
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution ;
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.
L'article 1383 du code civil dispose que l'aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques.
Il exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de sa volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques.
La déclaration d'une partie ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu que si elle porte sur des points de fait et non sur des points de droit.
M. [S] indique que la pose du ballon ECS n'a pu se faire en raison d'une erreur de cotes.
Il ne demande pas l'exécution forcée de cette prestation mais le remboursement de la partie du prix correspondant au chauffe-eau soit la somme de 2000 euros.
Si l'affirmation relative à l'erreur de cotes repose exclusivement sur ses dires, les excuses de la société par courrier du 14 juin 2022 en réponse à un courrier de l'avocat du client qui lui reprochait notamment le défaut de remboursement du chauffe-eau, l'envoi successif de 3 chèques constituent une manifestation non équivoque de la reconnaissance par la société de sa carence dans l'exécution du contrat.
La société JS ENERGIE n'a pas proposé d'installer un autre ballon d'eau chaude, ne s'est prévalue d'aucune cause étrangère, a préféré indemniser son client.
Il résulte des pièces que les versements effectués se sont élevés à 3900 euros alors que le coût de la fourniture, de l'installation, de la pose du chauffe-eau était de 2000 euros.
Ce chef de préjudice a donc été réparé.
- sur la perte du bénéfice de la prime 'Etatique'
M. [S] soutient que la société JS ENERGIE lui a fait croire qu'il était éligible à une prime Etatique, l'a chiffrée, lui a laissé penser qu'elle était certaine, n'a émis aucune réserve.
Il assure que cette promesse a été déterminante dans son choix de contracter avec la société JS ENERGIE.
Il indique aussi avoir été avisé verbalement qu'en fin de compte il n'était pas éligible à la prime.
Selon les articles 120-1,121-1 du code de la consommation, une pratique commerciale est réputée trompeuse lorsque soit elle contient des informations fausses soit est susceptible d'induire en erreur le consommateur moyen et en ce qu'elle est de nature à altérer de manière substantielle le comportement économique de celui-ci en le conduisant à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.
L'article 1112-1 dispose : celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.
Il ne résulte d'aucun des documents contractuels produits (bons de commande successifs, facture), ni du courriel émanant de la société du 1er juin 2022 qu'une prime ait été promise.
Si la facture fait référence à des 'démarches administratives' qui seront assurées par la société, cette expression est beaucoup trop équivoque, floue pour démontrer la promesse alléguée.
La nature de la prime Etatique promise, ses conditions ne sont pas énoncées.
Les courriels adressés les 15 et 28 septembre 2021 émanant des époux [S] à la société démontrent certes qu'ils pensaient bénéficier de la prime, mais ne démontrent pas qu'elle leur ait été promise, garantie.
M. [S] sera donc débouté de sa demande de ce chef.
- sur les préjudices
L'article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
Selon l'article 1231-2, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.
Il n'est pas contesté que M. [S] a perçu de la société JS ENERGIE la somme de 3900 euros, que le prix du chauffe-eau était de 2000 euros.
Ces sommes n'ont été versées qu'après que l'assignation a été délivrée.
S'il a subi un préjudice moral résultant des contrariétés, démarches rendues nécessaires par la défaillance de son cocontractant, ce préjudice a été réparé par le versement de la somme de 1900 euros.
Il ne justifie pas d'un préjudice différent de celui qui a été réparé par le versement de la somme précitée.
- sur les autres demandes
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
PAR CES MOTIFS
statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort
- confirme le jugement entrepris
Y ajoutant :
- condamne M. [P] [S] aux dépens d'appel
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,