Cass. crim., 26 novembre 2025, n° 24-85.087
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
N° H 24-85.087 F-D
N° 01550
ECF
26 NOVEMBRE 2025
CASSATION PARTIELLE
DECHEANCE
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 NOVEMBRE 2025
MM. [Z] [E], [W] [E] et [G] [L] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 5 juillet 2024, qui a condamné, les deux premiers, pour escroquerie aggravée en récidive, et blanchiment aggravé, chacun, à sept ans d'emprisonnement, 200 000 euros d'amende, une interdiction définitive de gérer et des confiscations, le troisième, pour complicité d'escroquerie aggravée et blanchiment aggravé, à deux ans d'emprisonnement avec sursis, 60 000 euros d'amende et des confiscations, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits, en demande pour MM. [Z] [E] et [G] [L], et en défense.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de Me Bouthors, avocat de M. [G] [L], les observations de Me François Bardoul, avocat de M. [Z] [E], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'Etat français, et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 octobre 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, M. Samuel, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces soumises à l'examen de la Cour de cassation ce qui suit.
2. A la suite d'une information, MM. [Z] [E], [G] [L] et [W] [E] ont, avec d'autres prévenus, été renvoyés des chefs précités devant le tribunal correctionnel qui, par jugement du 14 décembre 2021, les a déclarés coupables, a prononcé diverses peines et a statué sur les intérêts civils.
3. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Déchéance du pourvoi formé par M. [W] [E]
4. M. [W] [E] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
Examen des moyens des pourvois formés par MM. [G] [L] et [Z] [E]
Sur les moyens proposés pour M. [L] et les premier et deuxième moyens proposés pour M. [Z] [E]
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le troisième moyen proposé pour M. [Z] [E]
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, après requalification, déclaré M. [Z] [E] coupable des faits qui lui étaient reprochés, l'a condamné à sept ans d'emprisonnement, 200 000 euros d'amende, a prononcé une interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société définitivement, la confiscation de l'intégralité des biens et des sommes saisis, a déclaré recevable la constitution de partie civile de l'Etat Français, l'a déclaré responsable du préjudice subi par l'Etat Français et l'a condamné solidairement avec [G] [L], [R] [X] [P], [D] [B], et [W] [E] à payer à l'Etat français, partie civile la somme de 24 492 561 euros au titre du préjudice résultant des faits d'escroquerie à la TVA réalisée en bande organisée, alors :
« 1°/ que le montant de l'amende est déterminé en tenant compte des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction au jour où le juge statue ; que si le prévenu n'a pas d'initiative exposé suffisamment sa situation, ni produit de justificatifs suffisants de celle-ci, il appartient à la juridiction de questionner ledit prévenu ou son avocat sur cette situation, notamment ses ressources et charges, et de faire mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées ; qu'en retenant qu'elle fixait le montant de l'amende « eu égard aux ressources et charges, partiellement renseignées, et non justifiées à ce stade de l'appel, mais aussi au train de vie confortable, pour M. [W] [E] comme pour M. [Z] [E], outre les ressources illégales issues du blanchiment » sans indiquer le montant des ressources et charges qu'elle retenait ni avoir interrogé les avocats du prévenu sur ses ressources et charges en faisant mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées, la cour d'appel a violé l'article 132-20 du code pénal et les articles 491 et 493 du code de procédure pénale ;
2°/ que le dispositif d'une décision pénale doit énoncer la peine ; qu'il incombe au juge qui décide de confisquer un bien de préciser dans le dispositif la nature et l'origine de ce bien ; qu'en prononçant dans le dispositif de la décision pénale à l'encontre de M. [Z] [E] la confiscation de l'intégralité de l'ensemble des biens et des sommes saisis sans mieux préciser la nature des biens confisqués, la cour d'appel a violé les articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 131-21 du code pénal ;
3°/ qu'il incombe au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure ; qu'en retenant dans ses motifs que la cour « entrerait en voie de confirmation pure et simple des diverses confiscations en valeur » quand le tribunal avait retenu dans ses motifs qu'il convenait de confisquer notamment des locaux de la société [2], la cour d'appel a motivé une peine de confiscation sans indiquer précisément la nature et l'origine de l'ensemble des biens confisqués et s'assurer de leur caractère confiscable en violation des articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 131-21 du code pénal ;
4°/ que la possibilité de confisquer au condamné un bien dont il a la libre disposition, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, a été étendue à la confiscation en valeur prévue à l'article 131-21 § 9 du code pénal par la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 ; que peuvent être seules prononcées les peines applicables à la date à laquelle les faits ont été commis ; que lorsque le juge entend procéder à la confiscation en valeur du produit de l'infraction, il doit s'assurer que la valeur de ce bien n'excède pas celle du produit de l'infraction ; que la cour d'appel a prononcé à titre de peine pour des faits s'étant déroulés de 2007 à 2014 la confiscation en valeur de biens n'appartenant pas à M. [E] dont les biens sis sur la commune de [Localité 3], [Adresse 1], propriété de la société [2], qu'en statuant ainsi sans caractériser que M. [E] ait eu la libre disposition des biens confisqués et, au surplus, vérifier que la valeur des biens confisqués prétendument mis à disposition n'ait pas excédé le produit généré par des seuls faits infractionnels commis après l'entrée en vigueur de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013, la cour d'appel a violé les articles 112-1 et 132-21, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Sur le moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches
7. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la confiscation de l'ensemble des biens et sommes saisis, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que l'ensemble immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 3] a été acquis par la société civile immobilière [2], dont M. [Z] [E] était le gérant, au moyen de deux prêts.
8. Les juges ajoutent qu'il aurait été possible d'ordonner aussi une confiscation générale sur le fondement de l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal et que les biens en cause, qui constituent le produit de l'infraction en tant qu'avantage économique tiré des escroqueries en cascade, atteignent une valeur totale largement en-deçà du produit de l'escroquerie à la TVA en bande organisée qui s'élève à environ 24 000 000 euros.
9. En prononçant ainsi la confiscation d'un bien précisément identifié, par des motifs qui font ressortir le fondement juridique retenu et établissent que la valeur du bien confisqué est inférieure au produit de l'infraction, la cour d'appel a justifié sa décision.
10. Ainsi, les griefs doivent être écartés.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Vu les articles 132-1, 132-20 du code pénal et 593 du code de procédure pénale :
11. Selon les deux premiers de ces textes, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur et de sa situation matérielle, familiale et sociale. La juridiction qui prononce une amende en détermine le montant en considération des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.
12. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
13. Pour condamner M. [Z] [E] à 200 000 euros d'amende, l'arrêt attaqué énonce notamment que le caractère très lucratif des faits justifie une peine de cette nature.
14. Les juges ajoutent que le montant doit être fixé eu égard aux ressources et charges partiellement renseignées et non justifiées au stade de l'appel, mais aussi au train de vie confortable de l'intéressé et à ses ressources illégales issues du blanchiment.
15. En se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur les ressources et charges de la personne prévenue, représentée à l'audience par son avocat, la cour d'appel, à laquelle il appartenait d'inviter ce dernier à fournir toutes précisions utiles à cet égard, puis de faire mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées, n'a pas justifié sa décision.
16. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
17. La cassation sera limitée aux peines prononcées à l'encontre de M. [Z] [E], dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure. Les autres dispositions seront donc maintenues.
Examen des demandes fondées sur l'article 618-1 du code de procédure pénale
18. Les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de M. [Z] [E] et la condamnation de M. [G] [L] étant devenues définitives par suite de la non-admission ou du rejet des autres moyens, il y a lieu de faire partiellement droit aux demandes.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Sur le pourvoi formé par M. [W] [E] :
CONSTATE la déchéance du pourvoi ;
Sur le pourvoi formé par M. [G] [L] :
Le REJETTE ;
Sur le pourvoi formé par M. [Z] [E] :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 5 juillet 2024, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l'encontre de M. [Z] [E], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. [Z] [E] devra payer à l'Etat français en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. [G] [L] devra payer à l'Etat français en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt-cinq.
N° 01550
ECF
26 NOVEMBRE 2025
CASSATION PARTIELLE
DECHEANCE
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 NOVEMBRE 2025
MM. [Z] [E], [W] [E] et [G] [L] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 5 juillet 2024, qui a condamné, les deux premiers, pour escroquerie aggravée en récidive, et blanchiment aggravé, chacun, à sept ans d'emprisonnement, 200 000 euros d'amende, une interdiction définitive de gérer et des confiscations, le troisième, pour complicité d'escroquerie aggravée et blanchiment aggravé, à deux ans d'emprisonnement avec sursis, 60 000 euros d'amende et des confiscations, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits, en demande pour MM. [Z] [E] et [G] [L], et en défense.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de Me Bouthors, avocat de M. [G] [L], les observations de Me François Bardoul, avocat de M. [Z] [E], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'Etat français, et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 octobre 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, M. Samuel, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces soumises à l'examen de la Cour de cassation ce qui suit.
2. A la suite d'une information, MM. [Z] [E], [G] [L] et [W] [E] ont, avec d'autres prévenus, été renvoyés des chefs précités devant le tribunal correctionnel qui, par jugement du 14 décembre 2021, les a déclarés coupables, a prononcé diverses peines et a statué sur les intérêts civils.
3. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Déchéance du pourvoi formé par M. [W] [E]
4. M. [W] [E] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
Examen des moyens des pourvois formés par MM. [G] [L] et [Z] [E]
Sur les moyens proposés pour M. [L] et les premier et deuxième moyens proposés pour M. [Z] [E]
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le troisième moyen proposé pour M. [Z] [E]
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, après requalification, déclaré M. [Z] [E] coupable des faits qui lui étaient reprochés, l'a condamné à sept ans d'emprisonnement, 200 000 euros d'amende, a prononcé une interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société définitivement, la confiscation de l'intégralité des biens et des sommes saisis, a déclaré recevable la constitution de partie civile de l'Etat Français, l'a déclaré responsable du préjudice subi par l'Etat Français et l'a condamné solidairement avec [G] [L], [R] [X] [P], [D] [B], et [W] [E] à payer à l'Etat français, partie civile la somme de 24 492 561 euros au titre du préjudice résultant des faits d'escroquerie à la TVA réalisée en bande organisée, alors :
« 1°/ que le montant de l'amende est déterminé en tenant compte des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction au jour où le juge statue ; que si le prévenu n'a pas d'initiative exposé suffisamment sa situation, ni produit de justificatifs suffisants de celle-ci, il appartient à la juridiction de questionner ledit prévenu ou son avocat sur cette situation, notamment ses ressources et charges, et de faire mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées ; qu'en retenant qu'elle fixait le montant de l'amende « eu égard aux ressources et charges, partiellement renseignées, et non justifiées à ce stade de l'appel, mais aussi au train de vie confortable, pour M. [W] [E] comme pour M. [Z] [E], outre les ressources illégales issues du blanchiment » sans indiquer le montant des ressources et charges qu'elle retenait ni avoir interrogé les avocats du prévenu sur ses ressources et charges en faisant mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées, la cour d'appel a violé l'article 132-20 du code pénal et les articles 491 et 493 du code de procédure pénale ;
2°/ que le dispositif d'une décision pénale doit énoncer la peine ; qu'il incombe au juge qui décide de confisquer un bien de préciser dans le dispositif la nature et l'origine de ce bien ; qu'en prononçant dans le dispositif de la décision pénale à l'encontre de M. [Z] [E] la confiscation de l'intégralité de l'ensemble des biens et des sommes saisis sans mieux préciser la nature des biens confisqués, la cour d'appel a violé les articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 131-21 du code pénal ;
3°/ qu'il incombe au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure ; qu'en retenant dans ses motifs que la cour « entrerait en voie de confirmation pure et simple des diverses confiscations en valeur » quand le tribunal avait retenu dans ses motifs qu'il convenait de confisquer notamment des locaux de la société [2], la cour d'appel a motivé une peine de confiscation sans indiquer précisément la nature et l'origine de l'ensemble des biens confisqués et s'assurer de leur caractère confiscable en violation des articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 131-21 du code pénal ;
4°/ que la possibilité de confisquer au condamné un bien dont il a la libre disposition, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, a été étendue à la confiscation en valeur prévue à l'article 131-21 § 9 du code pénal par la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 ; que peuvent être seules prononcées les peines applicables à la date à laquelle les faits ont été commis ; que lorsque le juge entend procéder à la confiscation en valeur du produit de l'infraction, il doit s'assurer que la valeur de ce bien n'excède pas celle du produit de l'infraction ; que la cour d'appel a prononcé à titre de peine pour des faits s'étant déroulés de 2007 à 2014 la confiscation en valeur de biens n'appartenant pas à M. [E] dont les biens sis sur la commune de [Localité 3], [Adresse 1], propriété de la société [2], qu'en statuant ainsi sans caractériser que M. [E] ait eu la libre disposition des biens confisqués et, au surplus, vérifier que la valeur des biens confisqués prétendument mis à disposition n'ait pas excédé le produit généré par des seuls faits infractionnels commis après l'entrée en vigueur de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013, la cour d'appel a violé les articles 112-1 et 132-21, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Sur le moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches
7. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la confiscation de l'ensemble des biens et sommes saisis, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que l'ensemble immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 3] a été acquis par la société civile immobilière [2], dont M. [Z] [E] était le gérant, au moyen de deux prêts.
8. Les juges ajoutent qu'il aurait été possible d'ordonner aussi une confiscation générale sur le fondement de l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal et que les biens en cause, qui constituent le produit de l'infraction en tant qu'avantage économique tiré des escroqueries en cascade, atteignent une valeur totale largement en-deçà du produit de l'escroquerie à la TVA en bande organisée qui s'élève à environ 24 000 000 euros.
9. En prononçant ainsi la confiscation d'un bien précisément identifié, par des motifs qui font ressortir le fondement juridique retenu et établissent que la valeur du bien confisqué est inférieure au produit de l'infraction, la cour d'appel a justifié sa décision.
10. Ainsi, les griefs doivent être écartés.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Vu les articles 132-1, 132-20 du code pénal et 593 du code de procédure pénale :
11. Selon les deux premiers de ces textes, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur et de sa situation matérielle, familiale et sociale. La juridiction qui prononce une amende en détermine le montant en considération des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.
12. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
13. Pour condamner M. [Z] [E] à 200 000 euros d'amende, l'arrêt attaqué énonce notamment que le caractère très lucratif des faits justifie une peine de cette nature.
14. Les juges ajoutent que le montant doit être fixé eu égard aux ressources et charges partiellement renseignées et non justifiées au stade de l'appel, mais aussi au train de vie confortable de l'intéressé et à ses ressources illégales issues du blanchiment.
15. En se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur les ressources et charges de la personne prévenue, représentée à l'audience par son avocat, la cour d'appel, à laquelle il appartenait d'inviter ce dernier à fournir toutes précisions utiles à cet égard, puis de faire mention dans sa décision tant de cette interrogation que des réponses apportées, n'a pas justifié sa décision.
16. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
17. La cassation sera limitée aux peines prononcées à l'encontre de M. [Z] [E], dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure. Les autres dispositions seront donc maintenues.
Examen des demandes fondées sur l'article 618-1 du code de procédure pénale
18. Les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de M. [Z] [E] et la condamnation de M. [G] [L] étant devenues définitives par suite de la non-admission ou du rejet des autres moyens, il y a lieu de faire partiellement droit aux demandes.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Sur le pourvoi formé par M. [W] [E] :
CONSTATE la déchéance du pourvoi ;
Sur le pourvoi formé par M. [G] [L] :
Le REJETTE ;
Sur le pourvoi formé par M. [Z] [E] :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 5 juillet 2024, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l'encontre de M. [Z] [E], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. [Z] [E] devra payer à l'Etat français en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. [G] [L] devra payer à l'Etat français en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt-cinq.