Livv
Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 25 novembre 2025, n° 23/03047

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 23/03047

25 novembre 2025

25/11/2025

ARRÊT N°2025/412

N° RG 23/03047 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PVB5

VS CG

Décision déférée du 20 Juillet 2023

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Toulouse

( 20/04636)

M. GUICHARD

S.A.S. D'ARCOLE

C/

[G] [Z]

[H] [Z]

[E] [Z]

S.A.S. SFR FIBRE

Société BELLEVUE

S.A.R.L. TDPI

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à Me Audrey BENAMOU-LEVY

Me Gilles SOREL

Me Adélie THEVENOT

Me Laurent DEPUY

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTE

S.A.S. D'ARCOLE

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentée par Me Audrey BENAMOU-LEVY, avocat postulant au barreau de TOULOUSE

Représentée par Me Pierre MENEGAUX, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [G] [Z], décédé le 24 août 2024

Monsieur [H] [Z] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Monsieur [G] [Z], décédé le 24 août 2024

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Monsieur [E] [Z] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Monsieur [G] [Z], décédé le 24 août 2024

[Adresse 2]

[Adresse 2]

SCI BELLEVUE

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représentés par Me Laura SOULIER de la SCP RSG AVOCATS, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE

Représentés par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE

S.A.S. SFR FIBRE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Claire LITAUDON de la SELARL CM & L AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS

Représentée par Me Adélie THEVENOT de la SELARL THEVENOT MAYS BOSSON, avocat postulant au barreau de TOULOUSE

S.A.R.L. TDPI

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Laurent DEPUY de la SELARL DEPUY AVOCATS & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant V. SALMERON, présidente, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

M. NORGUET, conseillère

S. MOULAYES, conseillère

Greffier, lors des débats : I. ANGER

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre

Exposé des faits et procédure :

Par acte notarié en date du 30 juin 2016, la Sas d'Arcole a conclu un bail commercial avec Messieurs [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z] sur un local situé au sis [Adresse 5] afin d'exploiter une supérette Casino.

Ces locaux ont été précédemment occupés par la société Numéricable devenue la Sas Sfr Fibre.

Le même jour, un état des lieux a été dressé à l'issue du bail commercial liant la Sas Sfr Fibre aux consorts [Z] et différentes factures de travaux de reprise ont été adressés à la Sas Sfr Fibre par la Sarl Tdpi, société en charge des travaux de remise en état .

La Sas Sfr Fibre ne s'est pas acquittée du montant des factures des travaux de remise en état.

La Sci Bellevue a procédé au règlement de certaines des factures.

Par actes d'huissier de justice en date du 3 novembre 2020, la Sas d'Arcole a fait assigner la Sas Sfr Fibre, la Sci Bellevue et Messieurs [G] [Z], [H] [Z] et [E] [Z], la Sci Bellevue ainsi que la Sarl Tdpi devant le tribunal judiciaire de Toulouse pour qu'elle obtienne le remboursement des travaux payés lors de l'installation dans le local.

Par jugement du 20 juillet 2023, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- débouté la SAS D'arcole (mentionnée par erreur SCI d'Arcole) de ses demandes,

- l'a condamné aux dépens dont distraction au profit de Maître Soulier pour ce qui la concerne et à payer à la société Sfr Fibre et à la société Tdpi la somme de 3 000 euros chacune, à la société Bellevue la somme de 1 500 euros et à Messieurs [H], [G] et [E] [Z] la somme de 500 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Sfr Fibre, la société Tdpi, la société Bellevue et Messieurs [H], [G] et [E] [Z] de leurs demandes au titre de l'abus de procédure.

Par déclaration en date du 21 août 2023, la Sas d'Arcole a relevé appel du jugement.

La portée de l'appel est l'annulation ou l'infirmation des chefs du jugement qui ont':

- débouté la société civile immobilière D'arcole de ses demandes,

- l'a condamné aux dépens dont distraction au profit de Maître Soulier pour ce qui la concerne et à payer à la société Sfr Fibre et à la société Tdpi la somme de 3 000 euros chacune, à la société Bellevue la somme de 1 500 euros et à Messieurs [H], [G] et [E] [Z] la somme de 500 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par courrier du 19 février 2024, la Selarl [T] et Associés a indiqué révoquer Me [L] [T] et se constituer en ses lieu et place pour le compte de la Sas Sfr Fibre.

Par conclusions d'incident de mise en état en date du 27 mars 2024, la Sarl Tdpi a demandé au conseiller de la mise en état, sur le fondement des articles 117, 554 et suivants, 914 du code de procédure civile, de':

- déclarer irrecevable l'appel interjeté par la Sas d'Arcole pour défaut de capacité à agir,

- condamner la Sas d'Arcole à payer à la Sarl Tdpi la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Sas d'Arcole aux dépens.

Par conclusions de désistement d'incident en date du 2 avril 2024, la Sarl Tdpi a demandé au conseiller de la mise en état, sur le fondement de l'article 385 du code de procédure civile, de lui donner acte à la Sarl Tdpi de son désistement de l'incident soulevé par conclusions signifiées le 27 mars 2024.

Le 24 août 2024, Monsieur [G] [Z] est décédé en cours d'instance': sa quote-part de droits dans l'immeuble sis [Adresse 5] a été dévolue à ses deux fils, Messieurs [H] et [E] [Z].

La clôture est intervenue le 18 août 2025.

Prétentions et moyens des parties':

Vu les conclusions n°3 notifiées le 14 août 2025, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la Sas d'Arcole demandant, au visa des articles 1382 et 1377 anciens du code civil, 1240, 1302 et suivants nouveaux du code civil, 32-1 et 559 du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 20 juillet 2023 en ce qu'il a :

- débouté la société Sfr Fibre devenue Numericable, la société Bellevue et Messieurs [H], [G] et [E] [Z] de leurs demandes au titre de l'abus de procédure ;

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 20 juillet 2023 en ce qu'il a :

- débouté la société par actions simplifiée D'Arcole de ses demandes,

- condamné la société par actions simplifiée D'Arcole aux dépens dont distraction au profit de Maître Soulier pour ce qui la concerne et à payer à la société Sfr Fibre et à la société Tdpi la somme de 3.000 euros chacune, à la société Bellevue la somme de 1.500 euros et à Messieurs [H], [G] et [E] [Z] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

et statuant à nouveau':

à titre principal :

- juger que la société Sfr Fibre, venant aux droits de la société Numericable, a violé son obligation contractuelle de restituer les locaux loués en bon état d'entretien et d'assurer les travaux de remise en état ;

- juger que la société Sfr Fibre, venant aux droits de la société Numericable, engage sa responsabilité délictuelle à l'égard de la société D'Arcole ;

- juger que la société Sfr Fibre, venant aux droits de la société Numericable, a causé un préjudice direct à la société D'Arcole correspondant au coût des travaux de remise en état, soit 36.795 euros ;

en conséquence,

- condamner la société Sfr Fibre, venant aux droits de la société Numericable, à payer à la société D'Arcole la somme de 36.795 euros au titre de dommages-intérêts avec taux légal à compter de la mise en demeure du 21 septembre 2020 et capitalisation des intérêts ;

à titre subsidiaire :

- juger que [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z] et la SCI Bellevue ont violé leur obligation d'assurer les travaux de remise en état des locaux loués à la suite de la défaillance de la société Numericable ;

- juger que [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z] et la SCI Bellevue engagent leur responsabilité délictuelle à l'égard de la société D'Arcole ;

- juger que [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z] et la SCI Bellevue ont causé un préjudice direct à la société D'Arcole correspondant au coût des travaux de remise en état, soit 36.795 euros ;

en conséquence,

- condamner in solidum [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z] et la Sci Bellevue à payer à la société D'Arcole la somme de 36.795 euros au titre de dommages intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 septembre 2020 et capitalisation des intérêts ;

à titre très subsidiaire :

- juger que la société D'Arcole a effectué, par erreur, le paiement de la somme de 36.795 euros due par la société Sfr Fibre, venant aux droits de la société Numericable, et les consorts [Z] au profit de la société Tdpi ;

- condamner in solidum la société Sfr Fibre, [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z], la SCI Bellevue et la société Tdpi à verser à la société D'Arcole la somme de 36.795 euros en répétition de l'indu ;

en tout état de cause :

- condamner in solidum la société Sfr Fibre, [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z], la Sci Bellevue et la société Tdpi au paiement de la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

- débouter la société Sfr Fibre, [G] [Z], [H] [Z], [E] [Z] et la Sci Bellevue de l'ensemble de leurs demandes.

Vu les conclusions n°3 notifiées le 7 août 2025 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la Sci Bellevue, Monsieur [H] [Z] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Monsieur [G] [Z] décédé le 24 août 2024 et Monsieur [E] [Z] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Monsieur [G] [Z] décédé le 24 août 2024 demandant, au visa des articles 1240 et suivants du code civil, 1719 et suivants du code civil, L145-1 et suivants du code de commerce, de :

- donner acte à Messieurs [H] [Z] et [E] [Z] de leur intervention volontaire en leur qualité d'héritiers de Monsieur [G] [Z], décédé en cours d'instance,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté la société d'Arcole de ses demandes ;

- condamné la Sas d'Arcole aux dépens dont distraction au profit de Maître Soulier pour ce qui la concerne et à payer à la société Sfr Fibre et à la société Tdpi la somme de 3.000 euros chacune, à la société Bellevue la somme de 1.500 euros et à Messieurs [H], [G] et [E] [Z] la somme de 500 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer que, eu égard au décès de Monsieur [G] [Z] en cours d'instance, la somme de 500 euros qui lui avait été allouée par le tribunal en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sera allouée à parts égales à ses héritiers, Messieurs [H] et [E] [Z],

- le réformer en ce qu'il a débouté la Sci Bellevue et Messieurs [H], [G] et [E] [Z] de leurs demandes au titre de l'abus de procédure,

statuant à nouveau,

- condamner la Sas d'Arcole à payer à la Sci Bellevue et à Messieurs [H] et [E] [Z], agissant à titre personnel et en qualité d'héritiers de Monsieur [G] [Z], une somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait du caractère abusif de l'action engagée,

subsidiairement, si par impossible la Cour faisait droit en tout ou partie aux demandes de la Sas d'Arcole,

- condamner la société Sfr Fibre, venant aux droits de Numericable, à relever et garantir la Sci Bellevue et Messieurs [H] et [E] [Z], agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'héritiers de Monsieur [G] [Z], de toute condamnation susceptible d'être mise à leur charge,

- débouter la société Sfr Fibre de sa demande tendant à voir cantonner l'appel en garantie à la somme de 3.600 euros,

en tout état de cause,

- débouter la Sas d'Arcole de son appel et de l'ensemble de ses demandes,

condamner la Sas d'Arcole et, à défaut, tout succombant, à payer à la Sci Bellevue et à Messieurs [H] et [E] [Z], agissant à titre personnel et en leur qualité d'héritiers de Monsieur [G] [Z], une somme complémentaire de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner au paiement des entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de Maître Gilles Sorel, avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les conclusions n°2 notifiées le 17 mai 2024, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la Sas Sfr Fibre demandant, au visa de l'article 32-1 du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 20 juillet 2023 en ce qu'il a :

- débouté la société d'Arcole de ses demandes ;

- condamné la Sas d'Arcole aux dépens

- condamné la société d'Arcole à payer à la société Sfr Fibre la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déclarer la société d'Arcole mal fondée en son appel et l'en débouter ;

- débouter la société d'Arcole de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 20 juillet 2023 en ce qu'il a débouté la société Sfr Fibre de sa demande au titre de l'abus de procédure

et, statuant à nouveau de ce chef :

- condamner la société d'Arcole à verser à la société Sfr Fibre la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile ;

- débouter la Sci Bellevue et les Consorts [Z] de la demande de garantie qu'ils formulent à l'encontre de la société Sfr Fibre ;

à titre infiniment subsidiaire, sur l'appel en garantie :

- limiter la condamnation de Sfr Fibre à l'encontre de la Sci Bellevue et des consorts [Z] à la somme de 3.600 euros ;

en tout état de cause :

- condamner la société d'Arcole à verser à la société Sfr Fibre la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

- condamner la société d'Arcole aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Vu les conclusions notifiées le 2 avril 2024, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la Sarl Tdpi demandant, au visa des articles 117 et suivants du code de procédure civile, 1240 du code civil, de :

à titre principal':

- déclarer nul l'appel interjeté par la Sas d'Arcole pour défaut de capacité à agir ;

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement du 20 juillet 2023 ;

- condamner la Sas d'Arcole à payer à la Sarl Tdpi la somme de 10 000 euros à titre de procédure abusive ;

- condamner la Sas d'Arcole à payer à la Sarl Tdpi la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la Sas d'Arcole aux entiers dépens.

Motifs de la décision':

- Sur l'intervention volontaire des héritiers de [G] [Z]':

[H] et [E] [Z], héritiers de [G] [Z] décédé en cours d'instance d'appel, sont recevables en leur intervention volontaire en cette qualité alors qu'ils sont déjà parties en tant que propriétaires des locaux litigieux avec la SCI Bellevue.

- Sur la nullité de l'appel pour défaut de capacité à agir de la SAS d'Arcole':

la société TDPI sollicite l'annulation de la déclaration d'appel formée par une personne morale radiée à la date de la déclaration d'appel qui n'avait, selon elle, pas la capacité d'ester en justice.

La SAS d'Arcole rappelle à bon droit que la radiation administrative d'une société au registre du commerce et des sociétés ne fait pas disparaître la personnalité morale et la capacité d'ester en justice de cette société.

Il ressort en effet de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que la radiation prononcée d'office est une simple 'mesure administrative' sans incidence sur la personnalité morale (cf commerciale 20 février 2001 n°9816842 et com 4 mars 2020 n° 19-10501': La radiation d'office d'une société à responsabilité limitée du registre du commerce et des sociétés, en application de l'article R. 123-136 du code de commerce, n'a pas pour effet de mettre fin aux fonctions de son gérant).

Dès lors que la personnalité morale n'a pas disparu du seul fait d'une radiation administrative, le représentant de la société commerciale peut ester en justice.

Il n'en serait pas de même pour une société dissoute ou liquidée après la clôture de la liquidation et radiée du registre du commerce et des sociétés de ce chef.

En l'espèce, la SAS d'Arcole produit son extrait kbis qui mentionne qu'elle a été mise en sommeil à compter du 1er septembre 2019 après exécution d'un plan de sauvegarde.

Dès lors ,le président directeur général de la SAS d'Arcole pouvait représenter la société et relever appel du jugement déféré le 21 août 2023.

La nullité alléguée en cause d'appel sera donc écartée.

- Sur le fond':

La SAS d'Arcole demande à être remboursée de travaux effectués pour remettre en état les locaux qu'elle a loués au moment de son entrée dans les lieux.

Elle fonde son action sur la responsabilité délictuelle du tiers qui a manqué à son obligation contractuelle avant de quitter les lieux à l'encontre de la société Numéricable (a), puis sur la responsabilité des bailleurs qui n'ont pas exigé du preneur de remettre les locaux en l'état avant son départ (b) et sur la répétition de l'indu (c).

a) Sur la demande de remboursement des travaux réglés à la sarl TDPI par la SAS d'Arcole à la société Numéricable devenue SAS Sfr Fibre':

La sas d'Arcole fonde son action sur la responsabilité délictuelle de l'ancien preneur à bail à son égard en tant que tiers au contrat de bail commercial signé par l'ancien preneur en ne respectant pas ses engagements contractuels à l'égard du bailleur à la sortie du bail.

Pour justifier du manquement contractuel, elle se fonde sur le bail signé entre la société Numéricable et la SCI Bellevue et les autres propriétaires le 22 septembre 2005, sur l'état des lieux de sortie établi le 30 juin 2016 par [F] [W] qui a évalué le montant des réparations à effectuer à 30.980 euros HT et sur un complément à l'état des lieux du 3 juillet 2016 adressé par la société TDPI à la société Numéricable et aux bailleurs avec devis et factures de travaux joints. Elle entend se prévaloir du fait que la société Numéricable a signé le devis du 28 juin 2016 pour des travaux de reprise de 36 795 euros ttc mais n'a jamais réglé les dits travaux.

La SCI Bellevue a pris en charge les postes de déménagement et dépose pour 11.972 euros ttc et le solde a été réglé par la SAS d'Arcole soit 36.795 euros ttc.

La sas Sfr Fibre, venant aux droits de la société Numéricable, conteste la présentation des faits décrits par le nouveau preneur des locaux en cause d'appel alors qu'en première instance, la responsabilité délictuelle pour manquement contractuel n'était pas alléguée. Elle rappelle qu'en réalité la sas d'Arcole a elle-même commandé les travaux pour installer une supérette Casino dans les lieux pris à bail et que le contrat de bail qu'elle a signé stipule lors de l'état des lieux auquel la gérante a participé qu'elle prend les lieux dans leur état actuel' sans pouvoir faire aucune réclamation à ce sujet au bailleur ; il n'est donc pas stipulé qu'elle exige une quelconque réparation ni remise en état avant son entrée dans les lieux.

Elle insiste sur le fait qu'elle ne s'est pas engagée à effectuer des travaux à sa sortie des locaux et n'a signé aucun devis sauf un devis de déménagement de ses meubles, devis qui a été en définitive pris en charge pas la SCI Bellevue au moment de son départ. Elle fait observer en outre que les travaux litigieux comportaient l'installation de la fibre optique dans des locaux qu'elle n'occupait plus.

Enfin, elle indique qu'elle n'a commis aucune faute contractuelle ayant rendu les locaux après 11 ans d'occupation sans les avoir dégradés et les bailleurs n'ayant exigé aucune remise en état des locaux.

De surcroît, elle estime que le dommage allégué n'est pas établi dès lors que la SAS d'Arcole a pris des locaux en l'état pour les transformer en un logement de fonction et en une supérette et les factures produites ne peuvent être analysées en travaux de remise en état.

Il appartient à la société d'Arcole de justifier de ses demandes et notamment de prouver

les manquements qu'elle allègue et le préjudice qu'elle en subit directement en application de l'article 1240 du code civil.

Pour justifier de ses demandes, la SAS d'Arcole s'appuie sur les clauses du bail souscrit entre la société Numéricable et la SCI Bellevue et les autres consorts [Z] propriétaires signé le 22 septembre 2005 et sur un prétendu état des lieux de sortie de la société Numéricable du 30 juin 2016 (en pièce 2).

Sur la pièce 2 intitulée «'état des lieux de sortie du 30 juin 2016'», la cour constate qu'il est signé par la gérante de la SAS d'Arcole et par [F] [W] présent alors que le représentant de la société Numéricable est absent. Cet état des lieux se borne sur 6 lignes à préciser que les locaux sont déménagés et nettoyés et que l'ensemble des peintures et du revêtement sol sont à reprendre pour un total de 30.980 euros HT.

A la lecture de l'ensemble des pièces, il semble que l'expert judiciaire [F] [W] a été missionné pour établir l'état des lieux d'entrée de la sas d'Arcole le 30 juin 2016 puisque le bail signé par cette dernière, le même jour, en fait état et ce en présence d'un expert judiciaire mais le dit état d'entrée dans les lieux n'est pas produit.

Toutefois, le seul document produit aux débats et intitulé «'état de sortie du 30 juin 2016'» ne précise pas à quel titre [F] [W], expert judiciaire, est présent et par qui il a été missionné.

D'une part, cet état des lieux n'est donc pas contradictoire à l'égard de la société Numéricable en sortie des locaux.

D'autre part, la succincte description de l'état général des locaux relève plus d'un état de vétusté normale de locaux utilisés après 9 ans d'activité que d'un état relevant d'une dégradation anormale et de la nécessité de remise en état des locaux «'en bon état d'entretien'» comme le stipulait le bail.

En outre, la description de l'état des locaux n'est pas du tout détaillée et relève davantage d'une impression générale de la personne qui a établi les 6 lignes du document présenté comme un état des lieux de sortie. Cette pièce ne peut pas être un état des lieux de sortie contradictoire opposable à un preneur à bail commercial, le document fut il établi en présence ou par un expert judiciaire près la cour d'appel, et ce d'autant plus que sa société TDPI va établir les devis et factures des travaux effectués ensuite pour engager les travaux voulus par le nouveau preneur.

La pièce 14 enfin est un courriel adressé par [F] [W], cité dans le document dit «'état des lieux de sortie'» précité, à M. [I] responsable de la société Numéricable en lui annonçant «'des factures pour le local de [Localité 7] Arcole'». Et en pièce 20, [F] [W] atteste le 20 décembre 2017 que, par téléphone, M. [I] lui a indiqué qu'il pouvait réaliser les travaux de remise en état et qu'il s'engageait à prendre en charge les travaux de reprise pour 36 795 euros ttc et qu'il n'avait pas le temps de se déplacer pour voir les désordres.

Enfin, le seul devis, que la sas Numéricable a signé, est en effet le devis de déménagement du mobilier pour 3600 euros ttc (pièce 13) et n'a donc rien à voir avec les travaux de remise en état des locaux.

Force est de constater que ces seules pièces n'établissent pas un quelconque manquement à un engagement contractuel de la société Numéricable à l'égard de ses bailleurs pour prendre en charge des travaux de remise en état des dits locaux.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SAS d'Arcole de ses demandes à l'encontre de la société Numéricable, devenue SAS Sfr fibre.

b) A titre subsidiaire sur la demande de remboursement formée à l'encontre des bailleurs':

la SAS d'Arcole entend engager la responsabilité délictuelle des consorts [Z] en se fondant sur l'article 13 du bail commercial du 22 septembre 2005 qui les obligeait à se substituer au preneur défaillant dans la prise en charge des travaux.

Les consorts [Z] et la SCI Bellevue n'ont pris en charge que les factures de déménagement et d'enseigne.

Elle précise qu'elle ne vise pas la responsabilité contractuelle des bailleurs à son encontre mais les manquements des bailleurs à l'égard du preneur précédant au titre de l'article 13 du contrat de bail de 2005 et de leur carence à exiger du preneur sortant la remise en état des lieux.

Les consorts [Z] et la SCI Bellevue rappellent le non-cumul des responsabilités contractuelle et extra contractuelle précisé par la jurisprudence (Cf Com 23 juin 2009 n°0812430) alors qu'en première instance la SAS d'Arcole visait leur seule responsabilité contractuelle.

Ils contestent tout manquement à leurs obligations rappelant que l'article 13 repose sur la faculté du bailleur à faire procéder à des travaux par le précédent preneur et non sur une obligation impérative. Ils précisent que la SCI Bellevue a pris en charge 5 factures de la sarl TDPI pour 11.972 euros ttc au titre du déménagement de Numéricable, du nettoyage des locaux, de la dépose de l'enseigne, de la dépose du film publicitaire, de leur évacuation et du mobilier et stockage se trouvant au grenier. Ils rappellent enfin que la SAS d'Arcole a accepté de prendre les locaux en l'état sans exiger aucune remise en état et qu'elle avait prévu de réaliser d'importants travaux d'aménagement dont les devis revêtement mur et lot peinture de la sarl TDPI qui ont été établis après la visite des locaux.

A l'examen des pièces produites, la cour constate, au-delà de la règle du non- cumul des responsabilités, que sur le fondement de seule la responsabilité délictuelle des bailleurs en appel, l'article 13 du contrat de bail commercial du 22 septembre 2005 n'instaure aucune obligation pour le bailleur de forcer le preneur à remettre en état les locaux'; il peut le forcer à y procéder mais ce n'est qu'une faculté.

En revanche, il y était stipulé que si un état des lieux a été dressé, dans les 15 jours de l'état des lieux, les travaux seraient effectués par le bailleur sous la direction de son architecte.

Or, tel n'est pas le cas en l'espèce'; le document intitulé état de sortie du 30 juin 2016 n'est signé ni par le preneur ni par le représentant des bailleurs mais par le futur preneur à bail, la sas d'Arcole, et par [F] [W], qui n'est mandaté par personne sauf éventuellement par la sas d'Arcole. Sur ce document, les bailleurs sont représentés par le gérant de la SCI Bellevue mais il ne signe pas le document et la société Numéricable est absente et non représentée.

Dans ces conditions, ce seul document ne peut servir d'état des lieux de sortie au sens de l'article 13 allégué. Aucune autre pièce ne vient établir que les bailleurs ont demandé à la société Numéricable de prendre en charge des travaux de remise en état et ni qu'ils ont fait établir un état des lieux avec engagement d'effectuer les travaux sous 15 jours par leur architecte'.

De plus fort, dans le bail commercial souscrit le jour même, le 30 juin 2016, par la SAS d'Arcole auprès des bailleurs, il est stipulé en page 7 au paragraphe «'état des lieux'»': «'le preneur (la SAS d'Arcole) prend les lieux loués dans leur état actuel, sans pouvoir faire aucune réclamation à ce sujet au bailleur, ni exiger de lui aucune réparation et remise en état. Un état des lieux a été dressé contradictoirement entre les parties ce jour par un expert judiciaire'».

Les manquements allégués à l'encontre des bailleurs ne sont donc pas davantage établis en première instance qu'en appel. Le jugement sera confirmé de ce chef.

c) sur la demande infiniment subsidiaire fondée sur la répétition de l'indu':

la SAS d'Arcole, à titre très subsidiaire, invoque l'article 1302 du code civil qui dispose que «'tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. La restitution n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées'» ainsi que l'article 1302-2 du code civil qui précise que «'celui qui par erreur ou sous la contrainte a acquitté la dette d'autrui peut agir en restitution contre le créancier. Néanmoins ce droit cesse dans le cas où le créancier, par suite du paiement, a détruit son titre ou abandonné les sûretés qui garantissaient sa créance.

La restitution peut aussi être demandée à celui dont la dette a été acquittée par erreur'».

La SAS d'Arcole estime que le paiement de la dette des travaux de remise en état des locaux incombe à la société Numéricable et aux bailleurs, voire à la sarl TDPI, qui lui a demandé de régler les factures.

Il appartient donc à la SAS d'Arcole de justifier de l'erreur ou de la contrainte et de la dette d'autrui qu'elle aurait réglée à tort.

Or, rien ne permet d'affirmer que la dette de travaux effectués par la société TDPI dont elle demande le remboursement était due par la société Numéricable ni par les bailleurs alors que les devis ont été établis après la signature du bail du 30 juin 2016 et l'état des lieux du même jour. Elle a accepté de prendre les locaux visités en l'état le même jour et la sarl TDPI a effectué les travaux selon ses seuls souhaits pour les transformer en supérette Casino.

Elle ne produit pas un état des lieux avec des réserves et des engagements de la société Numéricable ou des bailleurs de prendre en charge une quelconque partie des travaux à effectuer'; elle n'a pas davantage fait mentionner dans le contrat de bail souscrit que des travaux préalables à son entrée dans les lieux étaient pris en charge par l'ancien preneur ou par les bailleurs. Dès lors, la dette d'autrui alléguée n'existe pas et aucune erreur ni contrainte ne sont établies, dont la SAS d'Arcole pourrait se prévaloir, à l'encontre des bailleurs, de la société Numéricable ou encore de la sarl TDPI .

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Il convient de débouter la sas d'Arcole de sa demande de ces chefs également.

- Sur les demandes de dommages intérêts des bailleurs, de la société TDPI à l'encontre de la SAS d'Arcole pour procédure abusive et sur la demande de la société Sfr Fibre d'application d'une amende civile :

La société Sfr Fibre demande l'application d'une amende civile sur le fondement de l'article 32-1 de code de procédure civile qui dispose que «'celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés'».

S'agissant du pouvoir discrétionnaire de la juridiction, la cour estime qu'il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande.

Par ailleurs, les bailleurs sollicitent 5000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive en faisant valoir que les prétentions n'étaient sérieuses ni en première instance ni en appel, qu'en outre, la sas d'Arcole sollicitait en première instance la restitution du dépôt de garantie dont elle avait obtenu le remboursement par le cessionnaire de son fonds de commerce.

De son coté, la sarl TDPI sollicite 10.000 euros de ce chef, en réponse à la demande de la SAS d'Arcole de restitution du règlement des travaux qu'elle estimait incomber à la société Numéricable ou aux bailleurs.

Après examen de l'ensemble des pièces fournies au débat et de la procédure diligentée, la cour rappelle que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en faute pouvant donner lieu à des dommages-intérêts que si le demandeur a agi par malice ou de mauvaise foi, ou avec légèreté blâmable tous faits insuffisamment caractérisés en l'espèce.

Il semble plutôt que la SAS d'Arcole se soit méprise sur l'étendue de ses droits au regard de ses engagements contractuels mais également de ceux des autres parties avec elle et entre elles.

La demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive présentée tant par les bailleurs que par la société TDPI doit être rejetée.

- Sur les demandes accessoires':

La sas d'Arcole qui succombe à l'issue du litige, doit prendre en charge les dépens de première instance et d'appel.

Eu égard aux particularités du litige, la cour réforme les condamnations au titre des frais irrépétibles et condamne en définitive au titre des frais engagés, pour la première instance et l'appel, la sas d'Arcole à verser à':

- la société Sfr fibre, venant aux droits de la société Numéricable, 3000 euros

- la SCI Bellevue et aux consorts [Z] 3000 euros

- la société TDPI la somme de 2000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

- Rejette l'exception de nullité de la déclaration d'appel de la SAS d'Arcole

- Confirme le jugement sauf en qu'il a condamné la sas d'Arcole à payer à la société Sfr fibre et à la société TDPI la somme de 3000 euros chacune, à la société Bellevue la somme de 1500 euros et à Messieurs [H], [G] et [E] [Z] la somme de 500 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Et, statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

- Déboute la sas d'Arcole de ses demandes à l'encontre de la société TDPI en appel

- Dit n'y avoir lieu à amende civile

- Condamne la sas d'Arcole aux entiers dépens d'appel avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- Condamne, en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel, la sas d'Arcole à verser à':

- la société Sfr fibre, venant aux droits de la société Numéricable, 3000 euros

- la SCI Bellevue et aux consorts [Z] 3000 euros

- la société TDPI la somme de 2000 euros.

Le greffier La présidente

.

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site