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Décisions

ADLC, 3 novembre 2025, n° 25-D-05

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle exclusif de l’hypermarché Géant Casino La Batelière et de la société H Immobilier par le groupe Parfait

ADLC n° 25-D-05

2 novembre 2025

I. Contexte

1. Par décision n° 22-DCC-254 du 22 décembre 2022 relative à la prise de contrôle exclusif de l’hypermarché Géant Casino La Batelière et de la société H Immobilier par le groupe Parfait (ci-après, la « décision d’autorisation »), l’Autorité de la concurrence (ci-après, « l’Autorité ») a autorisé, sous réserve d’engagements, la prise de contrôle exclusif, par le groupe Parfait, de l’hypermarché, d’une part, et de l’ensemble immobilier dans lequel il est situé, d’autre part.

2. Seront successivement présentées la procédure ayant conduit à la décision d’autorisation (A), la décision d’autorisation (B) et la procédure d’examen du respect des engagements (C).

A. SUR LA PROCÉDURE AYANT CONDUIT À LA DÉCISION D’AUTORISATION

3. L’hypermarché La Batelière (ci-après, « l’hypermarché cible ») est un magasin à dominante alimentaire, qui dispose d’une surface de vente de 2 693 m², situé dans le centre commercial Ozanam – La Batelière sis à Schœlcher (97233) en Martinique, dans la zone de la plaine foyalaise (zone correspondant au territoire de la conurbation Schœlcher – Fort-de-France – Le Lamentin). Avant sa prise de contrôle par le groupe Parfait au mois d’avril 2020, ce magasin était exploité, sous l’enseigne Géant Casino, par la société H Alimentation (devenue Socobatelière) contrôlée par le groupe Ho Hio Hen.

4. Le centre commercial Ozanam – La Batelière (ci-après, « le centre commercial cible ») est un ensemble immobilier à usage commercial, d’une superficie de 7 868 m². Le bâtiment commercial comprend l’hypermarché cible et ses bureaux (490 m²), réserves et laboratoires (1 663 m²), une galerie marchande d’environ 2 000 m², et d’autres espaces divers (circulation, toilettes, locaux techniques, etc.) d’environ 1 022 m², ainsi qu’un parc de stationnement de 388 places. Avant sa prise de contrôle par le groupe Parfait au mois d’avril 2020, cet ensemble était détenu par la société H Immobilier (devenue Sococonseils).

5. La concentration a été réalisée dès le mois d’avril 2020 par le groupe Parfait, qui a bénéficié pour ce faire d’une dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations (1). Cette opération a donné lieu à une première procédure de notification, sous la forme d’une prise de contrôle conjoint par le groupe Parfait et l’Association des Centres Distributeurs E. Leclerc (ci-après, « ACDLec ») (2), puis, après le retrait de cette dernière, à une seconde procédure de notification sous la forme d’une prise de contrôle exclusif par le groupe Parfait (3).

1. LA DÉROGATION À L’EFFET SUSPENSIF DU CONTRÔLE DES CONCENTRATIONS ET LA RÉALISATION DE LA CONCENTRATION

6. En raison de difficultés financières, le groupe Ho Hio Hen a progressivement cédé l’intégralité de ses commerces à dominante alimentaire. Au mois de janvier 2020, il a demandé le placement en redressement judiciaire de la société H Alimentation, qui a été déclarée en cessation de paiement le 28 février 2020 puis placée en redressement judiciaire le 3 mars 2020.

7. La société H Immobilier, qui était alors détenue en fiducie par des créanciers du groupe Ho Hio Hen, a été cédée au groupe Parfait le 15 avril 2020, au prix de [15-20] millions d’euros. L’acquisition a été formellement réalisée le 17 avril 20202.

8. Par un jugement du 30 avril 2020, le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France a ordonné la cession des actifs de la société H Alimentation au groupe Parfait3. Ce jugement de cession valait réalisation de l’opération, le groupe Parfait ayant préalablement obtenu de la part de l’Autorité, le 10 avril 2020, une dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations, prévue au deuxième alinéa de l’article L. 430-4 du code de commerce (ci-après, « la dérogation »)4. En vertu de cet alinéa5, l’octroi de cette dérogation, « qui ne préjuge en rien la suite qui sera donnée [l’Autorité] », a été assorti de la condition suivante6:

« [l]a société Socohold veillera donc, pendant la période précédant la décision finale de l’Autorité, à s’abstenir de tout acte […] qui serait de nature à modifier la structure de l’opération telle qu’elle ressort de votre demande »7.

9. L’Autorité a considéré que la prise de contrôle du centre commercial cible (rachat de la société H Immobilier) était interdépendante de celle portant sur l’hypermarché cible (reprise des actifs de la société H Alimentation) et constituait ainsi une seule opération de concentration (ci-après, « l’opération de concentration »)8.

2. LA PREMIÈRE NOTIFICATION

10. Le groupe Parfait avait pour projet initial d’exploiter l’hypermarché cible sous enseigne Leclerc, sous laquelle il exploite ses autres hypermarchés en Martinique. L’Autorité a alors considéré, conformément à sa pratique décisionnelle, qu’il s’agissait d’une prise de contrôle conjoint du groupe Parfait et de l’ACDLec, eu égard notamment aux liens contractuels existant entre ces deux opérateurs9. Cette opération a été notifiée à l’Autorité le 10 avril 2020 et déclarée complète le 14 septembre 2020 (ci-après, la « première notification »)10.

11. Le 18 décembre 2020, l’Autorité a considéré que la concentration soulevait des doutes sérieux d’atteinte à la concurrence et a adopté une décision de passage en phase d’examen approfondi11, en application du dernier alinéa du III de l’article L. 430-5 du code de commerce.

12. Le 3 janvier 2021, le groupe Parfait a indiqué, par courriel adressé au service des concentrations, son intention de retirer son dossier de concentration12. Le 20 janvier 2021, le chef du service des concentrations lui a répondu : « le retrait de votre dossier de notification vous placerait automatiquement dans une situation d’infraction compte tenu des obligations légales prévues au premier alinéa de l’article L. 430-3 du code de commerce (obligation de notification d’une opération avant sa réalisation) et du premier alinéa de l’article L. 430-4 (caractère suspensif du contrôle de l’Autorité de la concurrence) »13. Dans ce même courrier, il a ajouté que le fait que le groupe Parfait n’ait toujours pas commencé à exploiter l’hypermarché cible et à investir dans ce magasin, en dépit de la dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations, engendrait un risque de dépréciation et de perte d’attractivité : « [e]n l’état, une absence d’exploitation commerciale du magasin cible et d’investissement dans ce magasin de votre part engendre un risque de dépréciation et de perte d’attractivité et est donc de nature à modifier la structure de l’opération telle qu’elle ressort de votre demande. Plus particulièrement, il apparait que le périmètre du fonds de commerce concerné par l’opération pourrait se trouver considérablement affecté en l’absence de toute exploitation commerciale, notamment du fait de la disparition de sa clientèle. Au surplus, la dégradation de la situation du magasin cible pourrait aujourd’hui entraver la capacité de l’Autorité à, par exemple, imposer des remèdes voire interdire l’opération, si elle considérait, à l’issue de l’analyse approfondie, que l’opération porte atteinte à la concurrence. En conséquence, à défaut de commencer sans délai l’exploitation commerciale du magasin cible et de consacrer tous les investissements qui s’avéreraient nécessaires pour maintenir son attractivité commerciale, économique et financière en particulier, nous considérons que votre comportement ne serait pas conforme à la condition à laquelle est soumise la dérogation qui vous a été accordée »14 (soulignements ajoutés).

13. Dans la continuité de ces échanges, le groupe Parfait a répondu le 1er février 2021 qu’il était conduit « à reconsidérer la décision de retrait du dossier de la phase 2 envisagée »15. Au sujet de l’absence d’exploitation commerciale et d’investissements dans l’hypermarché cible, il a indiqué : « le groupe Parfait va effectuer les investissements nécessaires à la réalisation des travaux pour le redémarrage de l’exploitation de l’activité situé à La Batelière, compte tenu des sanctions auxquelles il pourrait s’exposer à défaut, l’Autorité considérant que la perte d’attractivité du fonds fermé depuis le mois de janvier 2020 pourrait être imputée […] au groupe Parfait pour s’être abstenu d’avoir entrepris ces travaux d’aménagement en vue de l’exploitation. Étant donné les délais pour les approvisionnements des marchandises et équipements (4 mois) ainsi que la mise en place de l’informatique, l’ouverture ne pourra avoir lieu au plus tôt en Juillet 2021, sous réserve des contraintes liées à la crise sanitaire et aux déplacements des prestataires »16 (soulignement ajouté).

14. Le 12 mai 2021, les services d’instruction ont adressé leur rapport aux parties notifiantes (ci-après, « le rapport de phase 2 »)17. Dans ce rapport, ils concluaient que :

− la concentration était de nature à porter atteinte à la concurrence dans la mesure où elle entraînerait « la disparition d’une enseigne d’hypermarché et conduira à créer dans la plaine foyalaise une structure d’offre en duopole au niveau des hypermarchés »18 ; et que,

− le dispositif de la décision pourrait prévoir « d’interdire l'opération de concentration et d’enjoindre aux parties de prendre toute mesure propre à rétablir une concurrence suffisante. De telles mesures, qui prendront la forme de la cession du fonds de commerce et des actifs immobiliers, sont indispensables en l’espèce puisque, compte tenu de la dérogation consentie au groupe Parfait, l’opération a d’ores et déjà été réalisée »19 (soulignements ajoutés).

15. Le 8 juin 2021, l’ACDLec a informé l’Autorité qu’elle retirait, pour sa part, sa demande d’autorisation et qu’elle renonçait à la possibilité d’exercer sur les actifs cibles une influence déterminante20. L’Autorité a pris acte de cette décision et a invité le groupe Parfait à notifier une nouvelle fois l’opération, en son nom propre et sous la forme d’une prise de contrôle exclusif de l’hypermarché et du centre commercial cibles.

3. LA SECONDE NOTIFICATION

16. Le 23 septembre 2021, le groupe Parfait a donc notifié à l’Autorité, toujours dans le cadre de la dérogation du mois d’avril 2020, la prise de contrôle exclusif de l’hypermarché et du centre commercial cibles (ci-après, « la seconde notification »)21.

17. Cette seconde procédure a abouti, le 22 décembre 2022, à l’adoption, dans le cadre du III de l’article L. 430 5 du code de commerce, de la décision d’autorisation sous conditions qui est décrite ci-après.

B. SUR LA DÉCISION D’AUTORISATION DE L’AUTORITÉ

18. Sont successivement exposés l’analyse concurrentielle de la décision d’autorisation (1) et les engagements pris par le groupe Parfait et annexés à cette décision (2).

1. L’ANALYSE CONCURRENTIELLE DE LA DÉCISION D’AUTORISATION

19. Au terme de la délimitation des marchés pertinents et de l’analyse concurrentielle, la décision d’autorisation a identifié un risque d’atteinte à la concurrence sur les marchés avals de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire, dans la zone de la plaine foyalaise.

20. Sur ces marchés, la nouvelle entité aurait détenu [50-60] % de l’offre en supermarchés et commerces équivalents et [60-70] % de l’offre en hypermarchés. L’opération aurait notamment renforcé significativement la position du groupe Parfait sur ce second marché.

21. En outre, cette concentration aurait réduit le nombre d’exploitants d’hypermarchés sur la zone de trois à deux, les groupes Parfait (enseigne Leclerc) et GBH (enseigne Carrefour). Cette situation aurait ainsi entraîné « une réduction de la diversité de l’offre pour le consommateur et un risque de hausse de prix, ou en tout cas de moindre baisse de prix »22, ce risque étant renforcé par la proximité géographique entre l’hypermarché cible et celui du Rond-Point exploité par le groupe Parfait à quelques centaines de mètres.

22. L’Autorité a considéré que le risque d’atteinte à la concurrence ne pouvait être écarté sur aucun des deux marchés avals affectés soulignant en particulier que la concentration était « susceptible de soulever des problèmes de concurrence significatifs sur le marché de l’offre en hypermarchés dans la plaine foyalaise ». Pour remédier à ce risque, le groupe Parfait a proposé des engagements le 26 juillet 2022. Ceux-ci ont été modifiés à plusieurs reprises et en dernier lieu le 14 décembre 2022.

2. LES ENGAGEMENTS PRIS PAR LE GROUPE PARFAIT ET ANNEXÉS À LA DÉCISION D’AUTORISATION

23. L’Autorité a autorisé l’opération dans le cadre du III de l’article L. 430-5 du code de commerce, par décision motivée, sous réserve de la réalisation effective des engagements pris par le groupe Parfait.

24. Celui-ci s’est notamment engagé à céder le fonds de commerce de l’hypermarché cible dans un délai de 9 mois à compter de la notification de la décision d’autorisation, et à préserver la valeur tant du fonds de commerce que de l’ensemble immobilier. Les engagements prévoyaient également la nomination d’un mandataire, chargé du suivi de leur mise en œuvre et, le cas échéant, d’un mandataire chargé de la cession du fonds de commerce, avec lequel le groupe Parfait s’est engagé à coopérer pendant la durée des engagements. Ces engagements sont présentés plus en détail ci-après.

a) L’engagement de cession de l’hypermarché cible

25. L’engagement de cession (clause 2 des engagements) prévoit la cession de l’hypermarché cible dans un délai maximal de 9 mois à compter de la décision d’autorisation, soit avant le 22 septembre 2023 : « [l]a Partie Notifiante s’engage, avant la fin de la Période de cession, à la conclusion, dans les conditions ci-après définies, d’un contrat de cession du Fonds de commerce au profit d’un tiers, emportant ainsi renonciation de sa part à exploiter le Fonds de commerce, assorti de plusieurs engagements portant notamment sur l’immeuble au sein duquel le Fonds de commerce est exploité »23.

26. Lorsqu’elle en a examiné l’adéquation, l’Autorité a pris en considération le fait que cet engagement était de nature à permettre le maintien de la structure du marché qui prévalait avant la prise de contrôle par le groupe Parfait au mois d’avril 2020, avec trois enseignes d’hypermarchés contrôlées par trois opérateurs distincts24. Par ailleurs, elle a souligné le fait que « l’engagement prévoit que cette cession doit intervenir dans un délai suffisamment rapide, la partie notifiante s’engageant à ce que la cession intervienne dans un délai de 9 mois »25.

27. Le groupe Parfait s’est également obligé à fournir toute information utile aux candidats à la reprise afin de leur permettre de formuler une offre (clause 10 des engagements)26.

b) L’engagement de préservation de la valeur

28. Le groupe Parfait a souscrit un engagement de préservation de la valeur (clause 7 des engagements) ainsi rédigé : « [s]pécifiquement avant la cession du Fonds de commerce à un tiers, afin de garantir l’attractivité tant du Fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial au sein duquel ce Fonds de commerce est implanté, la Partie Notifiante s’engage à préserver la valeur tant du Fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial »27 (soulignement ajouté).

29. Tel que défini dans les engagements, le terme « [f]onds de commerce » renvoie à l’hypermarché cible. En outre, la clause 3 des engagements détaille les principales caractéristiques de ce dernier, notamment sa « surface [de vente] de 2 693 m2» et précise les éléments qui seront cédés, à savoir : « tous ses éléments corporels et incorporels, avec l’ensemble de ses accessoires, tels que définis par ce jugement. À ce titre, seront notamment cédés : - Toutes les immobilisations corporelles et incorporelles du Fonds de commerce, figurant dans la désignation des biens par le Tribunal mixte de commerce de Fort de France qui contribuent au fonctionnement actuel ou sont nécessaires pour garantir la viabilité et la compétitivité du Fonds de commerce ; - Toutes les licences, permis et autorisations délivrées par les organismes et administrations compétentes au bénéfice du Fonds de commerce ;

- Tous les contrats, baux, engagements et commandes de clients en cours dans le cadre de l’exploitation du Fonds de commerce, pour autant qu’ils soient cessibles ; - Les contrats de travail du Personnel »28.

30. Dans le cadre de son examen de l’adéquation des engagements proposés, l’Autorité a pris en compte le fait, en particulier, que les engagements « assurent […] la pérennité et l’attractivité du fonds de commerce avant sa cession, puisque le groupe Parfait s’est engagé à préserver la valeur tant du fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial jusqu’à la cession du fonds de commerce à un tiers, notamment en s’assurant que ce dernier demeurera en état »29.

c) L’engagement de coopération avec le mandataire

31. Les engagements souscrits par le groupe Parfait prévoient la nomination d’un mandataire chargé du suivi de leur mise en œuvre ainsi que, le cas échéant, d’un mandataire chargé de la cession du fonds de commerce (clause 16 des engagements), dont les missions respectives sont définies aux clauses 19 et 20 des engagements. À cet égard, le groupe Parfait a souscrit en sus un engagement de coopération (clause 21 des engagements) : « [l]a Partie Notifiante, directement ou par l’intermédiaire de ses conseils, apportera aux Mandataires coopération et assistance et leur fournira toute information raisonnablement requise par les Mandataires pour l’accomplissement de leurs tâches ».

32. Dans le cadre de l’examen de l’adéquation des engagements proposés, l’Autorité a relevé que les missions du mandataire renforçaient la crédibilité des engagements souscrits30.

C. SUR LA PROCÉDURE OUVERTE PAR L’AUTORITÉ

33. Par décision n° 23-SO-05 du 11 décembre 202331, l’Autorité s’est saisie d’office concernant l’examen du respect des engagements souscrits par le groupe Parfait dans le cadre de la décision d’autorisation, en vertu du III de l’article L. 462-5 du code de commerce.

34. Les services d’instruction ont adressé leur rapport au groupe Parfait le 20 juin 2025. Le rapporteur général de l’Autorité ayant accordé un délai supplémentaire de cinq jours ouvrés (en sus du délai légal de quinze jours ouvrés), le groupe Parfait a transmis ses observations en réponse le 21 juillet 2025.

35. Le 28 juillet 2025, les services d’instruction ont adressé au groupe Parfait et au commissaire du Gouvernement une note complémentaire et des pièces supplémentaires (reçues par l’Autorité après la notification du rapport). Le groupe Parfait a répondu à cette note complémentaire le 4 août 2025.

36. Les services d’instruction ont également communiqué au groupe Parfait les rapports mensuels des 15 août 2025 et 10 septembre 2025 établis par le mandataire. Entre le 8 et le 15 septembre 2025, le groupe Parfait a transmis plusieurs éléments complémentaires.

37. Les services d’instruction, les représentants du groupe Parfait et le commissaire du Gouvernement ont été entendus lors de la séance du 16 septembre 2025.

II. Constatations

38. Seront successivement examinés l’absence de cession du fonds de commerce dans les délais prescrits et les différents processus de négociation engagés avec plusieurs candidats repreneurs (A), l’évolution de l’hypermarché et du centre commercial cibles depuis leur prise de contrôle par le groupe Parfait (B) et enfin, le comportement du groupe Parfait vis-à-vis du mandataire (C).

A. SUR LA MISE EN ŒUVRE DE L’ENGAGEMENT DE CESSION

39. Comme indiqué ci-avant aux paragraphes 23 et suivants, le groupe Parfait s’est engagé auprès de l’Autorité à céder l’hypermarché cible. Alors qu’une négociation était engagée avec le groupe Sainte Claire, le groupe Parfait n’a pas cédé le fonds de commerce dans les délais prévus (1).

40. Par la suite, en dépit de plusieurs processus de négociations menés avec différents candidats repreneurs, le groupe Parfait n’a cédé le fonds de commerce, ainsi que l’ensemble immobilier du site La Batelière, que le 9 septembre 2025 (2).

1. L’ABSENCE DE CESSION À LA DATE BUTOIR DU 22 SEPTEMBRE 2023

41. Le groupe Parfait n’a pas procédé à la cession de l’hypermarché cible à la date butoir du 22 septembre 2023, comme prévu par les engagements, ceci en dépit de l’état avancé des négociations engagées avec le groupe Sainte Claire, qui avait été agréé par l’Autorité le 11 septembre 2023.

42. En outre, alors que conformément aux lignes directrices de l’Autorité relatives au contrôle des concentrations, les engagements prévoyaient expressément une clause de réexamen de ceux-ci afin de prolonger le délai d’exécution ou d’envisager une modification ou le remplacement des engagements (clause 23 des engagements), le groupe Parfait n’a jamais fait de demande en ce sens32.

2. LES DIFFÉRENTS PROCESSUS DE CESSION ENGAGÉS

43. Les principales étapes des différents processus de négociations sont présentées ci-après.

a) Les premières négociations avec le groupe Sainte Claire (août 2022 – février 2024)

44. Le groupe Parfait a entamé des négociations avec le groupe Sainte Claire (enseigne Ecomax) à partir du mois d’août 2022. Dès l’ouverture des discussions, ce dernier a conditionné la reprise du fonds de commerce de l’hypermarché cible à l’acquisition simultanée des titres de la société Sococonseils, propriétaire de l’ensemble immobilier33.

Les actes formalisant les négociations entre les deux groupes

45. Au mois de mars 2023, les deux groupes ont signé une lettre d’intention. Ils s’accordaient notamment sur un prix global provisoire d’environ [15-20] millions d’euros couvrant la reprise du fonds de commerce, des actifs de la société Socobatelière ainsi que des titres de la société Sococonseils. Ce prix était notamment fondé sur le bilan de la société Sococonseils arrêté au 31 décembre 2022, une situation comptable devant être établie au jour de la cession pour établir le prix définitif des actions de cette dernière.

46. En outre, étaient prévues des conditions suspensives devant être levées avant la date limite de réalisation de l’opération, dont l’obtention d’un financement bancaire, une autorisation d’exploitation commerciale accordée par la Commission départementale d’autorisation commerciale (ci-après, « l’autorisation CDAC » et « la CDAC ») en cours de validité au jour de la cession du fonds de commerce, ainsi que l’agrément du groupe Sainte Claire par l’Autorité.

47. En mai 2023, les parties ont signé deux promesses synallagmatiques de vente, l’une portant sur la cession du fonds de commerce de l’hypermarché cible et les actifs de Socobatelière, et l’autre sur la cession des titres de la société Sococonseils. Elles reprenaient, en substance, les éléments détaillés dans la lettre d’intention et fixaient la date de cession au mois de juillet 2023.

48. Si le groupe Sainte Claire a obtenu ses financements les 10 et 14 juillet 2023, il a indiqué « [qu’]il fallait encore régler la question l’assurance-crédit, le crédit vendeur, les comptes certifiés de Sococonseils (communiqués le 10 octobre 2023) et la fiducie imposée par les banques »34.

49. En conséquence, les parties ont négocié des avenants aux promesses pour (i) prolonger la date limite de réalisation des conditions suspensives et (ii) préciser les modalités d’un crédit vendeur de [1-3] millions d’euros accordé par le groupe Parfait au groupe Sainte Claire à la suite du retrait de la Banque [confidentiel].

50. Les négociations sur les modalités de ce crédit vendeur ont laissé apparaitre des premières tensions entre les parties, en particulier concernant son montant. Le groupe Parfait aurait introduit ainsi la notion de « au maximum » [1-3] millions d’euros dans le projet d’avenant sans en informer le groupe Sainte Claire35.

51. Selon le mandataire, « les tensions ont débuté en août sur le crédit-vendeur entre le groupe Parfait et le groupe Sainte Claire. Il s’agissait de l’introduction du terme "maximum" par [confidentiel] (conseil de Parfait), qui avait potentiellement des conséquences considérables pour le groupe Sainte Claire et a conduit à une importante perte de confiance de sa part vis-à-vis du groupe Parfait »36.

52. Les avenants aux promesses, signés le 10 août 2023, (i) prorogent la date butoir de signature des actes au 22 septembre 2023, soit la date limite de cession du fonds de commerce prévue par les engagements, et (ii) détaillent les modalités du crédit vendeur négociées entre les deux groupes.

La levée des conditions suspensives

53. Le groupe Sainte Claire a été agréé comme repreneur par l’Autorité le 11 septembre 2023.

54. À la date limite de cession, le 22 septembre 2023, toutes les conditions suspensives étaient levées, hormis celle liée au financement bancaire du volet immobilier. En effet, si le groupe Sainte Claire avait reçu l’accord de ses banques, la mise en place de la fiducie par ces dernières nécessitait notamment l’accès aux comptes certifiés de la société Sococonseils concernant l’exercice clos au 31 décembre 2022 et aux comptes provisoires au 31 août 202337.

55. Le mandataire confirme avoir été étonné de la transmission tardive des comptes de la société Sococonseils. Selon lui, « la première chose qui m’a choqué c'est que les comptes 2022 de Sococonseils n’étaient toujours pas audités au 21 septembre 2023. C'est comme si on vous imposait de vendre votre voiture et que la veille de la vente vous dites que vous n’avez pas passé le contrôle technique : on peut supposer que c'est parce que vous n’avez pas envie de la vendre. C'est la même chose ici, or c’est assez inédit dans une cession »38.

56. Ces deux documents comptables ont été transmis les 10 et 31 octobre 2023 respectivement, soit plusieurs semaines après la date butoir du délai de cession prévu par l’engagement.

57. Le groupe Parfait impute ces délais de communication des comptes certifiés au retard pris par ses équipes comptables et par le commissaire aux comptes, mais estime, en tout état de cause, que ces situations comptables n’avaient aucun impact sur le prix définitif des titres de Sococonseils. Or, ces documents comptables étaient indispensables à la mise en place de la fiducie, condition essentielle à la levée de la dernière condition suspensive et, par conséquent, à la réalisation effective de la vente du fonds de commerce.

58. Par ailleurs, les actes formels signés entre les deux groupes39, ainsi que les déclarations du groupe Sainte Claire40 et du mandataire41, sont concordants sur le fait que les comptes de la société Sococonseils avaient une incidence sur le prix final de cession.

Les principaux points de blocage des négociations entre les deux groupes

59. Outre les difficultés liées aux négociations sur le crédit vendeur et à l’obtention de la documentation comptable essentielle pour la mise en place des financements, d’autres points de blocage sont intervenus dans les discussions entre les deux groupes.

60. Premièrement, à la suite des tensions relatives à la mise en place du crédit vendeur, le groupe Sainte Claire a demandé, au mois d’octobre 202342, au groupe Parfait de faire réaliser l’inventaire des actifs de la société Socobatelière avant la cession, et non dans les 30 jours calendaires après la cession comme prévu par la promesse de cession du fonds de commerce de l’hypermarché cible. En retour, plusieurs courriels adressés par le groupe Parfait montrent une certaine réticence à faire droit à cette demande, son dirigeant allant jusqu’à menacer de se retirer de l’opération43.

61. Un premier inventaire, réalisé le 26 octobre 2023, s’est avéré incomplet en omettant des actifs pour une valeur totale estimée à [100 000-300 000] euros44. Le groupe Parfait, ayant admis ces omissions45, a adressé une seconde version le 22 novembre 2023, mais celle-ci s’est révélée encore une fois incomplète, comme le reconnait le conseil du groupe Parfait dans un courriel du même jour46. La version finale n’a été adressée au groupe Sainte Claire que le 25 janvier 2024.

62. Deuxièmement, les comptes certifiés de l’exercice clos au 31 décembre 2022 et provisoires au 31 août 2023 auraient fait apparaitre, selon le dirigeant du groupe Sainte Claire47 et le mandataire48, des mouvements comptables importants susceptibles d’affecter le prix final de cession ou la fiscalité future de la société.

63. Les nombreux échanges entre les conseils des deux parties, entre les mois de novembre 2023 et de février 2024, n’ont pas permis de résoudre ces points de blocage49, les solutions proposées par le groupe Parfait n’étant considérées ni comme pérennes ni de nature à rétablir la confiance par le groupe Sainte Claire.

64. Troisièmement, des difficultés sont apparues au sujet du mécanisme de garantie de passif prévu dans le cadre de la cession des titres de la société Sococonseils. Initialement actée dans les promesses datant du mois de mai 2023, cette garantie a été modifiée par un avenant du 10 août 2023 afin de l’adosser au crédit vendeur accordé par le groupe Parfait. Cette modification a engendré une incohérence relevée au mois de décembre 2023 par le conseil du groupe Sainte Claire.

65. Le même mois, le groupe Sainte Claire a alors demandé la mise en place d’une garantie à première demande (ci-après, « GAPD »). En réponse, le groupe Parfait a proposé, par courriel du 6 janvier 2024, de revenir au dispositif initialement prévu au mois de mai 2023, à savoir une caution bancaire de [1-3] million d’euros sur 24 mois, indépendante du créditvendeur. Le groupe Sainte Claire a accepté cette solution de principe, mais a demandé que la durée de la garantie soit alignée sur celle du crédit vendeur, soit cinq ans. Le groupe Parfait n’a pas consenti à prolonger la durée de la caution, ni accepté de mettre en place une GAPD ou un mécanisme alternatif, comme un séquestre notarial.

66. Ainsi, l’absence de solution acceptable concernant la garantie de passif, dans un contexte de tensions croissantes et de perte de confiance, a constitué un nouveau point de blocage décisif.

67. Quatrièmement, en dernière solution pour parvenir à une cession, le groupe Sainte Claire a proposé de passer par un acte unique de cession pour la vente du fonds de commerce et des titres de la société Sococonseils.

68. Le groupe Parfait a refusé cette solution, estimant que « cela était très inhabituel et compliqué à mettre en place, car il s’agissait de deux sociétés différentes, donc de deux vendeurs différents. Ces cessions engendraient de plus des fiscalités et des droits d’enregistrement différents. Cela n’avait aucun intérêt pour les parties, d’autant que ce n’était pas une condition à l’origine »50, sans toutefois proposer d’alternative pour débloquer la situation.

Le retrait du groupe Sainte Claire

69. Face au blocage persistant des négociations entre les parties, le mandataire a proposé plusieurs solutions pour reprendre le dialogue, mais ces propositions ont été rejetées par les deux groupes51. Il a ainsi constaté, lors de son audition, que « tous les moyens qui auraient pu être mis en place par le groupe Parfait ne l’ont pas été, alors que le calendrier était déjà très avancé »52.

70. Le 8 février 2024, du fait de blocages persistants avec le groupe Parfait, le groupe Sainte Claire a formalisé son retrait des négociations par courriel au chef du service des concentrations de l’Autorité53.

b) Les premières négociations avec les consorts X (juin 2024)

71. Au mois de juin 2024, Mme X et M. X (ci-après, « les consorts X ») ont manifesté leur intérêt pour reprendre le fonds de commerce de l’hypermarché La Batelière et acquérir les murs du centre commercial.

72. Le 27 juin 2024, ils ont visité le site de La Batelière et échangé dans le cadre d’une réunion avec un dirigeant du groupe Parfait. Les consorts X rapportent que ce dernier s’est montré « peu vendeur » pour céder l’ensemble immobilier, alors même qu’ils en faisaient une condition préalable à la reprise du fonds de commerce de l’hypermarché cible.

73. Ils précisent sur ce point « [qu’]il n’était pas possible de reprendre uniquement l’hypermarché. Pour nous, le fait d’avoir un propriétaire bailleur peut avoir un impact sur notre activité, surtout quand il est concurrent sur la zone »54. Lors de ces échanges, le dirigeant du groupe Parfait leur a indiqué « que ça ne pourrait pas se faire tout de suite et qu’il souhaite un prix de [20-25] millions d’euros pour l’ensemble du centre commercial »55.

74. Le 1er juillet 2024, les consorts X ont adressé un courrier au mandataire pour annoncer leur retrait des négociations, ayant estimé que les conditions pour la reprise de ce site « n’étaient pas réunies »56. Ils écrivent ainsi que, compte tenu de l’état vétuste et délabré du site et du montant demandé par le groupe Parfait, « ce projet n’était pas viable »57. Ils estiment toutefois avoir laissé la porte entrouverte à une reprise des négociations en identifiant les principaux points bloquants58, mais le groupe Parfait n’a pas donné suite.

c) Les négociations avec le groupe Guad Finance (juillet – août 2024)

75. Au printemps 2024, le groupe Guad Finance, qui exploite plusieurs magasins sous enseigne U en Guadeloupe, a pris contact avec le groupe Parfait puis adressé une lettre d’intention le 18 juillet 2024. Celle-ci portait à la fois sur une reprise du droit au bail pour [une somme symbolique] et sur les titres de la société Sococonseils détenant les murs de l’ensemble commercial, pour [15-20] millions d’euros59.

76. Les négociations ont rapidement achoppé. Premièrement, le groupe Parfait n’a jamais contresigné la lettre d’intention, mais a toutefois adressé, les 25 et 27 juillet 2024, des projets de promesse de vente de la société Socobatelière, d’une part, et des titres de la société Sococonseils, d’autre part.

77. Or, le groupe Guad Finance a indiqué avoir « été surpris de lire que le groupe Parfait parlait encore du fonds de commerce s’agissant de la vente de Socobatelière alors que nous envisagions une reprise du droit au bail »60, sans reprise des salariés de l’hypermarché. Le groupe Guad Finance estimait en effet que le fonds de commerce n’existait plus du fait de son inexploitation depuis plus de quatre ans.

78. Le mandataire indique sur ce point « [qu’]il y a eu une offre [du groupe Guad Finance] qui n’a pas été contresignée par le groupe Parfait et les véritables négociations n’ont jamais débuté »61. Il ajoute que « c’est sur l’aspect juridique que ça n’a pas enclenché, chacun ayant joué sa propre partition (l'un ayant envoyé une LOI [lettre d’intention], le groupe Parfait y répondant par des projets de promesses-qui ne reflétaient pas le contenu de la LOI, alors que cela aurait normalement dû être le cas-). Cela a tendu les négociations. Je pense que le groupe Parfait a essayé de garder l’option [du groupe Guad Finance] sous la main mais en les ralentissant, pour permettre [au groupe Créo] d’avancer dans sa négociation »62.

79. Deuxièmement, des tensions sont apparues entre les parties au sujet du système de production de froid. Un dirigeant du groupe Guad Finance estimait en effet que « le système de froid est fondamental dans mon projet de reprise des lieux. La reprise des actifs en bon état de marche était expressément détaillée dans la LOI (article 8, 3ème point, de la LOI) parmi les conditions essentielles de notre offre »63.

80. Or, le groupe Parfait n’a pas permis aux représentants du groupe Guad Finance de tester le système de production de froid lors d’une visite sur place le 3 août 2024, au motif que le gaz fréon (indispensable au fonctionnement du système) aurait été déplacé vers un autre site du groupe Parfait, information qui s’est avérée inexacte, comme cela ressort des déclarations du frigoriste du site La Batelière et de ses bulletins d’intervention64.

81. En outre, après que le mandataire a rendu compte au groupe Parfait des remarques du groupe Guad Finance sur les défauts constatés visuellement sur le système de production de froid, un dirigeant du groupe Parfait leur a téléphoné pour leur faire part de son mécontentement sur de telles constatations et a précisé que leur présence « sur le site de la Batelière n’était pas la bienvenue désormais »65. Le 14 août 2024, le groupe Guad Finance a adressé un courriel au groupe Parfait pour demander s’il maintenait cette position66.

82. Le 20 août 2024, le groupe Parfait répond par courriel en indiquant avoir « été très surpris et déçus de constater les déclarations que vous auriez faites au mandataire, concernant notamment le froid (risques d’explosion, impossibilité de fonctionnement sans arroser les condenseurs, etc…) et ce sans même tester le matériel. Pour votre information, nous avons remis le froid (positif et négatif) en service, sans aucune explosion et sans arroser d’eau les condenseurs. Un constat d’huissier est en cours »67.

83. Le groupe Guad Finance a précisé aux services d’instruction qu’il n’a jamais été destinataire de ce constat d’huissier ni été en mesure de tester le système de froid. Il estime que le froid a été un point de blocage avec groupe Parfait68.

84. Troisièmement, dans ce courriel du 20 août 2024, le groupe Parfait revient sur plusieurs points de la négociation entre les deux groupes. Toutefois, le groupe Guad Finance affirme que, de manière générale, ce courriel « refait un historique qui n’a pas eu lieu de cette façon »

69, notamment sur la question de la reprise des salariés, des financements du groupe Guad Finance ou encore du calendrier de réouverture.

85. À la suite de ce courriel, le groupe Guad Finance a décidé de ne plus poursuivre les négociations. Selon le rapport n° 18 du mandataire du 16 septembre 2024, les dirigeants du groupe Guad Finance « ont indiqué au mandataire ne pas avoir apprécié le contenu de ce courrier et ne pas retrouver dans les protocoles la retranscription exact[e] des discussions qui ont eu lieu notamment sur la reprise des employés du magasin »70.

86. Le groupe Parfait n’a pas essayé de reprendre les discussions avec le groupe Guad Finance. Le mandataire indique sur ce point que le groupe Parfait « voulait aller avec [le] groupe Créo. A cet égard, il n’y avait pas de volet immobilier pour [le groupe Créo] »71. Il précise par ailleurs que « le groupe Parfait avait vraisemblablement une préférence pour le candidat qui ne reprendrait que le fonds de commerce. Je pense que c’était la raison de l’échec des autres processus parallèles »72.

d) Les négociations avec le groupe Créo (janvier – novembre 2024)

87. À compter du mois de janvier 2024, et du fait du blocage des négociations avec le groupe Sainte Claire, le groupe Parfait a entamé des discussions avec le groupe Créo exploitant notamment en Martinique des enseignes telles que Leader Price, Megastock, Caraïbes Priceet Pli Bel Price.

88. Le 16 mai 2024, le groupe Créo a adressé au groupe Parfait une première lettre d’intention pour la prise à bail du local commercial de l’hypermarché pour [une somme symbolique], afin d’y installer un magasin sous enseigne Pli Bel Price73. Cette offre portait sur la reprise du bail et non du fonds de commerce comme prévu par les engagements pris par le groupe Parfait, car, selon le groupe Créo, il n’y avait plus de fonds de commerce à cette époque :

« le magasin était fermé depuis 4 ans, n’avait plus de clientèle, plus de CDAC [autorisation d’exploitation commerciale], plus de stocks, etc. »74. Le groupe Créo ne souhaitait pas reprendre les murs du centre commercial75.

89. Le 27 juin 2024, le groupe Créo a formulé une seconde lettre d’intention au groupe Parfait détaillant plusieurs points, notamment l’objet de la location, le loyer et les charges ou encore les obligations du bailleur76. En effet, « le fait d’avoir pour bailleur un concurrent impliquait justement d’avoir un grand nombre de garanties, d’où l’enjeu de tout prévoir au préalable »77. Après des discussions sur les termes de cette offre, le groupe Parfait a signé une version modifiée le 31 juillet 2024.

90. Le 3 septembre 2024, le groupe Créo a été agréé par l’Autorité, sous réserve de préservation de l’emploi du magasin cible et de la conformité du bail commercial à conclure avec les garanties et exigences prévues par les engagements pris par le groupe Parfait78.

91. Le 17 octobre 2024, le groupe Parfait a adressé une version du projet de contrat de bail commercial au groupe Créo79.

92. Toutefois, le 31 octobre 2024, le groupe Créo a informé le groupe Parfait avoir finalement décidé de se retirer du projet de reprise du droit au bail de l’hypermarché La Batelière, notamment en raison du contexte social en Martinique à cette période80. Le groupe Créo a officialisé son retrait des négociations par courriel du 12 novembre 2024 adressé au chef du service des concentrations81.

e) Le second processus de négociation avec les consorts X(novembre 2024 – février 2025)

93. À la suite du retrait du groupe Créo, le mandataire a, à nouveau, sollicité le conseil des consorts X. Ce dernier a, le 9 novembre 2024, adressé un courriel au groupe Parfait, qui a répondu le 14 novembre 2024 en faisant part de son étonnement quant à la capacité des consorts X de financer une telle opération82. Lors de ce même échange, le conseil du groupe Parfait précise que le prix attendu par le groupe Parfait pour la cession des titres de la société Sococonseils est de [15-20] millions d’euros83.

94. Le 20 novembre 2024, les consorts X font une offre de reprise du fonds de commerce pour [une somme symbolique] et d’acquisition des murs du centre commercial cible pour [10-15] millions d’euros.

95. Le 24 novembre 2024, une réunion a lieu entre les consorts X, les dirigeants du groupe Parfait et leurs conseils. Au cours de cette réunion, selon les déclarations des consorts X, le groupe Parfait et ses conseils ont eu une posture « peu avenante », en avançant que les consorts X attendaient « la réunion avec l’Autorité pour avoir un rabais sur le prix » et en leur indiquant qu’ils n’étaient « pas leur premier choix car [le groupe Parfait] connait les produits […] et sait que nous allons dynamiser la concurrence dans la zone »84.

96. Face au refus des consorts X d’augmenter leur offre, le groupe Parfait et ses conseils « suggèrent alors de réfléchir à une clause de meilleure fortune : si on atteint un certain niveau de chiffre d’affaires (ce qui est différent de la rentabilité), on peut compléter le prix d’achat par la suite », proposition déclinée par les consorts X : « nous ne voulions pas que notre concurrent direct connaisse indirectement notre chiffre d’affaires annuel »85.

97. Le 4 décembre 2024, lors d’une deuxième réunion, le groupe Parfait aurait demandé [15-20] millions d’euros pour la cession des murs, montant qu’il justifie par ses investissements sur le site La Batelière et le fait qu’il « cherche à rentrer dans ses frais »86.

98. Le 30 décembre 2024, les consorts X adressent une lettre d’intention au groupe Parfait et proposent la reprise, de façon indissociable, du droit au bail de l’hypermarché cible pour [une somme symbolique] et des murs du centre commercial cible pour [10-15] millions d’euros87. Cette offre est assortie de plusieurs conditions suspensives dont l’agrément par l’Autorité pour la reprise de l’hypermarché La Batelière et l’obtention d’un financement bancaire pour l’acquisition immobilière.

99. Le groupe Parfait a contresigné cette lettre d’intention le 14 janvier 2025, les parties ayant fixé au 28 février 2025 la date limite pour signer les compromis de vente.

100. Le 6 février 2025, l’Autorité a agréé ce projet de reprise « sous la réserve de la préservation de l’emploi du personnel du magasin. Dans le cas où les contrats de travail ne seraient pas repris par le consortium […], ceux-ci devraient être repris au sein du groupe Parfait, à des conditions non moins-disantes »88. Les autres conditions suspensives prévues par la lettre d’intention ont également été levées au début du mois de février 2024.

101. Les discussions ont cependant rapidement buté, entraînant un blocage des négociations, le groupe Parfait ne transmettant les projets de protocoles de cession que tardivement89. Les consorts X ont aussi fait état de difficultés pour accéder à l’ensemble des documents nécessaires à ce type de transaction, ceux-ci ayant été versés au fil de l’eau dans la data room constituée à cet effet, et ce jusqu’à la date butoir de signature90. Enfin, le groupe Parfait a refusé de réserver un créneau de signature des actes de cession malgré plusieurs demandes en ce sens91.

102. Le 28 février 2025, le groupe Parfait a finalement choisi de céder le fonds de commerce et les murs du centre commercial au groupe Sainte Claire, mettant de fait un terme au processus de négociation engagé avec les consorts X.

f) Le second processus de négociation avec le groupe Sainte Claire (novembre 2024 – septembre 2025)

103. À la suite du retrait du groupe Créo au mois de novembre 2024, le mandataire a, de nouveau, sollicité le groupe Sainte Claire, qui a soumis une nouvelle offre au groupe Parfait le 20 novembre 2024. Cette offre portait sur le fonds de commerce de l’hypermarché La Batelière ainsi que sur les murs du centre commercial (et non sur les titres de Sococonseils comme lors de la première offre) pour un montant de [15-20] millions d’euros.

104. Cette offre devait être financée en totalité par un crédit vendeur accordé par le groupe Parfait, l’obtention d’un prêt bancaire étant très incertaine en raison du contexte social en Martinique. Le groupe Parfait n’y a pas donné suite.

105. Le 30 décembre 2024, le groupe Sainte Claire a fait une nouvelle offre au groupe Parfait, proposant cette fois un financement par crédit-bail. Le 17 janvier 2025, une lettre d’intention a été signée par les représentants des deux groupes, prévoyant la reprise du fonds de commerce pour [une somme symbolique], ainsi que l’acquisition de l’ensemble immobilier pour [10-15] millions d’euros, étant précisé que le financement pourra s’opérer par l’intermédiaire d’un crédit-bail immobilier92.

106. Le 14 février 2025, le groupe Sainte Claire a fait l’objet d’un nouvel agrément par l’Autorité, « sous la réserve de la préservation de l’emploi du personnel du magasin. Dans le cas où les contrats de travail ne seraient pas repris par le groupe Sainte Claire, ceux-ci devraient être repris au sein du groupe Parfait, à des conditions non moins-disantes »93.

107. La CDAC a rendu, le 25 juillet 2024, un avis favorable à la demande d’autorisation d’exploitation commerciale présentée par la société Sococonseils pour l’hypermarché cible.

108. Les groupes Parfait et Sainte Claire ont signé les actes de cession du fonds de commerce et de l’ensemble immobilier du site La Batelière le 9 septembre 2025, soit près de deux ans après la date butoir prévue par les engagements.

109. Le groupe Sainte Claire envisage désormais une réouverture « du magasin en fin de premier trimestre 2026 voire en début de deuxième (…) l’obtention du permis de construire, la construction de nouveaux quais de déchargement et la durée des travaux pour un ‘‘bâtiment plus actuel’’ [faisant] envisager une ouverture dans le meilleur des cas avant la période de carnaval 2026 mais plus vraisemblablement en mars/avril 2026 »94.

B. SUR LA MISE EN ŒUVRE DE L’ENGAGEMENT DE PRÉSERVATION DE LA VALEUR

1. LA SITUATION AU MOMENT DE LA PRISE DE CONTRÔLE EN AVRIL 2020

a) Le périmètre de l’hypermarché cible en 2020

110. En premier lieu, il ressort de plusieurs éléments du dossier, et notamment de l’offre de reprise du groupe Parfait du 26 mars 202095, du jugement du tribunal mixte de commerce de Fort-de-France du 30 avril 2020 ordonnant la cession du fonds de commerce de l’hypermarché cible au groupe Parfait96, de l’inventaire réalisé par le commissaire-priseur les 19 et 20 mars 2020 dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire97 auquel renvoie le jugement du 30 avril 202098 et dont il ressort une valorisation des matériels d’exploitation de l’hypermarché cible, hors stocks, de [400 000-700 000] euros99, qu’au moment de sa reprise par le groupe Parfait, l’hypermarché cible disposait d’actifs incorporels et corporels.

111. Tel que cédé au groupe Parfait, l’hypermarché cible employait 78 salariés100, bénéficiait d’une autorisation CDAC, d’une surface de vente de 2 693 m² et recensait 82 214 coordonnées de clients, selon un fichier clientèle transmis par un ancien salarié du groupe Ho Hio Hen101.

112. L’hypermarché cible était exploité de longue date sous enseigne Géant Casino et proposait aux consommateurs de la zone une offre unique, notamment en produits sous marques de distributeurs (les hypermarchés concurrents de la zone étant sous enseigne Leclerc –précédemment sous enseigne U – ou Carrefour). Il offrait des services tels qu’un traiteur général, une poissonnerie et un traiteur asiatique, et avait la capacité d’offrir une large gamme de produits frais, bénéficiant de la présence de plusieurs laboratoires à proximité de la surface de vente (boulangerie, pâtisserie, traiteur général, traiteur asiatique, atelier de découpe boucherie)102.

113. Avec une clientèle significative bien que déclinante (l’hypermarché cible ayant réalisé des chiffres d’affaires annuels d’environ 36,6 millions d’euros en 2017, 33,3 millions d’euros en 2018 et 20,3 millions d’euros en 2019)103, l’hypermarché cible bénéficiait en outre de sa localisation dans un centre commercial animé et fréquenté, ainsi qu’en témoigne un reportage de la chaîne de télévision publique Martinique La 1ère du 14 septembre 2019104.

114. Le magasin était fermé depuis le 9 février 2020 du fait d’un mouvement social dans le contexte de difficultés financières du groupe Ho Hio Hen105. La procédure de redressement judiciaire de la société H Alimentation, exploitant l’hypermarché cible, a été ouverte le 3 mars 2020 par un jugement du tribunal mixte de commerce de Fort-de-France.

115. Dans le cadre de cette procédure, l’administrateur judiciaire a indiqué que l’activité de l’hypermarché ne pouvait pas être relancée pour cause de non-paiement de salaires ou par manque de stocks, ceux-ci ayant été écoulés pour dégager de la trésorerie106.

116. Dans son jugement du 30 avril 2020, le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France présentait le projet de reprise porté par le groupe Parfait de la manière suivante : « [l]a SAS SOCOHOLD propose d’acquérir […] le fonds de commerce […] l’offre portant sur l’ensemble des éléments incorporels et corporels au prix de [50 000-200 000] €, soit [confidentiel] € pour les éléments incorporels, et [confidentiel] € pour les éléments corporels, sans reprise des stocks. L’offre inclut la reprise de 79 salariés (avec prise en charge des droits acquis à compter de l’entrée en jouissance). Une condition suspensive a été posée par le candidat, à savoir le rachat des parts sociales ou des biens immobiliers de H HIMMOBILIER avant l’audience. L’entrée en jouissance est sollicitée au 1er mai 2020. Le projet est porté par un acteur important (groupe PARFAIT) de la distribution alimentaire sur les territoires de la Martinique et de la Guadeloupe […] susceptible d’offrir, dans un contexte de vie chère des territoires ultra-marins, une gamme de produits de qualité à des prix compétitifs, et en complémentarité avec l’offre de l’hypermarché U du Rond-Point (bientôt LECLERC), la mise en place d’un drive étant également prévue »107. La cession au groupe Parfait a été faite en vertu de l’article L. 642-1 du code de commerce, prévoyant que la cession de l’entreprise a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles d’exploitation autonome108.

117. En second lieu, le centre commercial cible (présenté au paragraphe 4 ci-dessus) bénéficie d’un emplacement stratégique le long de la route nationale 2, à proximité de la rocade de Fort-de-France, de quartiers résidentiels comme la cité Ozanam (2 500 à 3 000 habitants) et des hypermarchés Leclerc Rond-Point (groupe Parfait) et Carrefour Cluny (groupe GBH).

118. Il comprend, outre l’hypermarché cible, une galerie marchande composée de 25 cellules réparties sur deux niveaux distincts (reliés par deux escalators, un ascenseur et un escalier) et un parking de 388 places. Quatre accès extérieurs distincts permettent d’y accéder, via la galerie commerçante.

119. Au moment de sa reprise par le groupe Parfait, le centre commercial bénéficiait de la présence d’un hypermarché sous enseigne nationale, attirant une clientèle importante, et de nombreux commerces étaient exploités dans la galerie commerciale109.

120. D’après plusieurs témoignages concordants110, il était fonctionnel et offrait des animations et plusieurs services (gardiennage, sécurité, ménage, entretien) aux locataires des cellules commerciales.

b) Sur l’état matériel de l’hypermarché et du centre commercial cibles en 2020

121. Premièrement, le groupe Parfait a déclaré111 qu’au moment de la reprise au mois d’avril 2020, il n’y avait pas eu de travaux importants engagés par le précédent propriétaire depuis 1997, que l’hypermarché n’était plus aux normes, que seul l’un de ses deux monte-charges était fonctionnel et que le système de production de froid était « fonctionnel mais vieillissant », trois compresseurs sur cinq étant cassés et certaines chambres froides étant à l’arrêt (le plafond de l’une d’entre elles étant gondolé). Il a ajouté que la zone des laboratoires de production était en état moyen et celui pour la boulangerie en état d’usage mais obsolète, que les vitrines froides étaient fonctionnelles mais pour beaucoup mises à l’arrêt, que l’alimentation en eau, les moyens d’extinction et les sprinklers n’étaient pas fonctionnels, que les éclairages, les carrelages et la peinture étaient en état d’usage ou état d’usage partiel, que la climatisation était en état d’usage mais vieillissante et que les réseaux de télécommunications n’étaient pas fonctionnels.

122. Selon le groupe Parfait, le taux d’occupation du centre commercial cible était d’environ 70 %, les accès du bâtiment ainsi que les ascenseurs et les escalators étaient fonctionnels, le site était globalement nettoyé, entretenu et sécurisé mais son parking et sa toiture étaient dégradés, et il n’y avait plus de réseau de télécommunication.

123. Le groupe Parfait a également indiqué ne pas disposer d’état des lieux contradictoire, d’audit ou d’inventaire qui auraient été réalisés à l’occasion de ses processus de rachat de l’hypermarché et du centre commercial cibles112. S’agissant en particulier de l’hypermarché cible, il a précisé que son achat « a été fait pour un montant forfaitaire [à] la barre du tribunal sans vérification des immobilisations et en l’état 113.

124. En réponse à une demande de transmission de toutes les images et photographies « attestant » de l’état des lieux et des actifs lors de la reprise de l’hypermarché et du centre commercial cibles, le groupe Parfait a transmis 274 photographies. Cependant, il ressort de leur analyse que : concernant l’hypermarché cible, seules 24 photographies sur les 53 photographies étaient contemporaines ou antérieures à la prise de contrôle par le groupe Parfait114 ; concernant le centre commercial cible, seules 4 photographies et images sur les 221 transmises l’étaient115. Ces 28 photographies et images d’illustration sont donc les seules prises en compte au titre des constatations. Les autres ne permettent pas d’attester de l’état matériel au moment de la prise de contrôle du groupe Parfait puisqu’ayant été prises plusieurs semaines ou mois après celle-ci.

125. Les photographies retenues font apparaitre, au niveau de l’hypermarché, quelques matériels d’exploitation (un bac de surgélation), équipements (en particulier un monte-charge et des rideaux métalliques du quai de livraison, le système de désenfumage) et aménagements (une petite surface d’un mur type Placo) en état visiblement dysfonctionnel et, au niveau du reste du centre commercial, des dizaines de caddies emboités et couchés sur le flanc, vraisemblablement pour constituer des barrages de fortune devant des piquets de grève organisés sur le parking du site.

126. Deuxièmement, compte tenu du fait que l’hypermarché cible était encore exploité moins de trois mois avant sa prise de contrôle par le groupe Parfait et qu’il recevait alors du public, au même titre que le centre commercial cible, il peut être considéré, en l’absence de justification spécifique contraire, que leur état matériel était a minima fonctionnel, ce que confirment différents éléments concordants, en particulier des déclarations de concurrents et des témoignages de commerçants116.

2. L’ÉVOLUTION DE LA SITUATION DEPUIS AVRIL 2020

a) L’évolution du périmètre de l’hypermarché cible

127. Il ressort des éléments du dossier détaillés ci-après que le périmètre de l’hypermarché cible a été altéré par rapport à 2020.

128. Premièrement, s’agissant de ses éléments incorporels, la question même de l’existence du fonds de commerce a été soulevée par des cessionnaires potentiels qui ont été soumis à l’agrément de l’Autorité par le groupe Parfait117. Un de ces candidats a déclaré : « nous ne reprenions pas un ‘‘fonds de commerce’’, dès lors que dans notre analyse celui-ci n’existait plus : le magasin était fermé depuis 4 ans, n’avait plus de clientèle, plus de CDAC, plus de stocks, etc. »118. Les projets de reprise de deux cessionnaires potentiels qui ont été soumis à l’Autorité prévoyaient ainsi, non pas la reprise du fonds de commerce en tant que tel, mais seulement la reprise de son droit au bail (voir paragraphes 88 et 98 ci-dessus).

129. De fait, l’hypermarché a perdu son autorisation CDAC pour sa surface de vente initiale de 2 693 m² à compter du 30 avril 2023, le groupe Parfait n’ayant pas exploité le fonds de commerce depuis sa reprise. En effet, l’article L. 752-1 du code de commerce prévoit que « [s]ont soumis à une autorisation d’exploitation commerciale les projets ayant pour objet : [….] 6° La réouverture au public, sur le même emplacement, d’un magasin de commerce de détail d’une surface de vente supérieure à 2 500 mètres carrés dont les locaux ont cessé d’être exploités pendant trois ans, ce délai ne courant, en cas de procédure de redressement judiciaire de l’exploitant, que du jour où le propriétaire a recouvré la pleine et entière disposition des locaux ».

130. En réponse à un courrier du dirigeant du groupe Parfait, le préfet de la Martinique a indiqué, par courrier du 11 avril 2023 : « vous m’avez proposé un ensemble de solutions dont celle d’une diminution de la surface de vente qui passerait de 2 693 m² à 2 480 m² […] seule cette proposition permettrait de déroger réglementairement à la procédure de demande d’autorisation d’exploitation commerciale en vous précisant toutefois qu’elle sera assortie de contrôles à priori et à posteriori de la réouverture, par mes services de l’effectivité de la diminution de la surface de vente »119.

131. À la suite de ces échanges, le groupe Parfait a choisi de réduire la surface commerciale de vente de l’hypermarché cible de 213 m² afin de passer sous le seuil de 2 500 m² prévu par l’article L. 752-1 du code de commerce, plutôt que de formuler une nouvelle demande d’autorisation CDAC.

132. Il apparait encore que le groupe Parfait aurait pu éviter la perte de cette autorisation en procédant à une réouverture « a minima », voie dans laquelle il s’était initialement engagé en remettant des marchandises dans l’hypermarché cible au mois d’avril 2023, avant de se rétracter. Son dirigeant a néanmoins déclaré : « [l]ors de discussions entre le groupe Parfait et [le dirigeant du groupe Sainte Claire], celui-ci a indiqué que même si le groupe Parfait réouvre le magasin, le groupe Sainte Claire allait le refermer pour y réaliser des travaux. Le groupe Parfait estime alors que cette réouverture temporaire n’était pas de nature à garantir le maintien de la CDAC sur l’intégralité de la surface »120.

133. À cet égard, s’il apparait qu’une réunion a bien eu lieu en présence des conseils du groupe Parfait, des services de la préfecture, de représentants de la direction générale des entreprises (DGE) et du service des concentrations de l’Autorité le 22 mai 2023121, il ne peut être que constaté que la décision du groupe Parfait était nécessairement unilatérale. En particulier, la date du 30 avril 2023 était d’ores et déjà échue.

134. Le magasin ne pouvait donc plus, à ce stade, être exploité en format hypermarché ni être cédé comme tel, les candidats repreneurs étant contraints de déposer eux-mêmes une demande d’autorisation CDAC pour la surface de vente initiale de plus de 2 500 m².

135. Ensuite, la situation n’a pas évolué jusqu’à ce que, lors du second processus négociation avec le groupe Sainte Claire, une condition suspensive relative à l’obtention d’une autorisation CDAC soit introduite. Le groupe Parfait s’est alors réuni avec les services de la préfecture de Martinique le 9 avril 2025 et a reçu, le 13 mai 2025, un courrier du préfet lui indiquant qu’il « y a lieu de demander une AEC [autorisation d’exploitation commerciale], peu importe que la superficie du commerce en question soit inférieure ou non au seuil de 2 500 mètres carrés (section des finances, n° 356-190) »122.

136. Le groupe Parfait a alors déposé une demande de réactivation de la précédente autorisation CDAC le 24 juin 2025. La CDAC a rendu un avis favorable le 25 juillet 2025.

137. Ainsi, l’hypermarché cible s’est retrouvé sans autorisation CDAC pendant plus de deux ans, entre le 1er mai 2023 et le 25 juillet 2025.

138. Deuxièmement, s’agissant de l’évolution des éléments corporels de l’hypermarché cible, le groupe Parfait a fourni, le 6 janvier 2025, en réponse à une demande de communication de la liste des éléments immobilisés corporels et incorporels, ainsi que leurs accessoires, du fonds de commerce de l’hypermarché cible, un document comptable relatif aux immobilisations corporelles et incorporelles de la société Socobatelière123. Ce document liste différents matériels et agencements pour un montant total de [200 000-400 000] euros (dont [confidentiel] euros au titre du rachat du fonds de commerce) mais ne mentionne ni les caddies, ni les mobiliers des laboratoires.

139. Interrogé sur le fait que, lors de leurs constatations, les rapporteurs n’avaient aperçu ni caddies, ni mobiliers de type meubles de cuisine, lavabos, etc., dans les laboratoires, un dirigeant du groupe Parfait a répondu : « [s]ur les caddies, aujourd’hui il reste certains caddies dans le magasin. Il y en a qui ont été volés, d’autres qui ont disparu. Lorsque le groupe a repris le magasin, il y avait peu de caddies, lesquels étaient en mauvais état. Le groupe ne connait pas le nombre de caddies de l’époque [qui ont le logo Géant] » et « [s]ur le mobilier des laboratoires, le groupe Parfait a voulu faire des travaux notamment avant le rapport de phase 2 donc a démonté un certain nombre de matériels pour les stocker ensuite dans la surface de vente »124.

140. Pourtant, à cet égard, il apparait que selon l’inventaire réalisé par le commissaire-priseur au mois de mars 2020, l’hypermarché cible avait « environ cent trente chariots de type "caddie" métal époxy gris et un lot de paniers de course pvc » d’une valeur d’exploitation estimée à [0-50 000] euros125. En outre, de nombreux actifs mobiliers avaient été inventoriés dans les différents laboratoires (poissonnerie, boucherie, pâtisserie, saladerie, traiteur, cuisine) de l’hypermarché cible126.

141. Il en ressort que le périmètre des actifs corporels de l’hypermarché cible a été significativement réduit depuis 2020.

142. Troisièmement, au regard du périmètre des ressources humaines, sur les 78 salariés repris par le groupe Parfait au mois d’avril 2020 (à savoir les 79 employés repris moins un employé, qui a conclu une rupture conventionnelle entre le jugement de cession et l’acte de cession au groupe Parfait), il ne restait, au moment de la cession du fonds de commerce au 9 septembre 2025, que [confidentiel] salariés rattachés à la société Socobatelière127. Ces salariés faisaient tous l’objet d’une mise à disposition auprès d’autres magasins du groupe Parfait.

143. Quatrièmement, aucune évolution n’a été constatée concernant le bail commercial et les contrats d’utilité qui avaient été transmis dans le cadre du jugement du tribunal mixte de commerce (eau, téléphonie fixe et internet, EDF et France Electricité)128.

b) L’évolution des principales caractéristiques commerciales de l’hypermarché et du centre commercial cibles

144. Les principales caractéristiques commerciales de l’hypermarché et du centre contrastent avec celles préexistantes du début de l’année 2020 dès lors que l’hypermarché cible est resté fermé depuis la reprise par le groupe Parfait, soit pendant près de cinq ans et demi. Du fait de l’absence d’exploitation de l’hypermarché, la fréquentation du centre commercial a très fortement diminué depuis sa reprise par le groupe Parfait.

145. Cette situation a engendré (ou a minima renforcé) les difficultés rencontrées par les commerçants de la galerie marchande du centre commercial cible, entraînant la fermeture de nombreux commerces. Ceci a en conséquence affecté les habitants de la zone de chalandise. Le groupe Parfait indiquait ainsi dans sa demande d’autorisation commerciale du 24 juin 2025 : « [d]epuis la fermeture de l’hypermarché Géant-Casino en février 2020 et la disparition progressive de plusieurs boutiques de la galerie marchande depuis, le site commercial, en grande partie inexploité, pourrait nuire à l’image du quartier et constituer une friche en devenir. […] Depuis sa fermeture, les équilibres commerciaux de la commune et de la zone de chalandise ont été bouleversés. En effet, la clientèle d’habitués s’est vue[sic] obligée d’effectuer ses achats ailleurs, engendrant des déplacements réguliers qui bien souvent nécessitent l’usage de la voiture individuelle. […] Le réinvestissement du centre commercial par un hypermarché, à l’enseigne pressentie ECOMAX Hyper, apportera une nouvelle locomotive susceptible de redynamiser la galerie marchande. […] Depuis la fermeture de l’hypermarché en février 2020, les habitants de la zone de chalandise ont vu disparaitre une offre commerciale diversifiée et répondant à des besoins courants et plus occasionnels de consommation. […] Depuis, c’est tout un quartier, celui de la Cité Ozanam-Batelière (grand ensemble de logements sociaux regroupant plus de 900 logements dans une vingtaine de bâtiments) qui ne dispose plus d’un site d’approvisionnement proche, aisément accessible à pied. Les riverains dénoncent la fermeture de l’hypermarché et souhaitent que le site soit réinvesti le plus rapidement possible, permettant dès lors à la population de disposer d’une offre diversifiée au plus près de leur lieu de vie »129.

146. Il ressort encore des éléments du dossier130, et notamment du rapport de constatations du 6 février 2025131 et de témoignages de commerçants132 que, sur les 25 cellules commerciales de la galerie commerciale, seules 6 sont occupées (toutes au niveau du rez-de-chaussée), dont certaines de façon partielle. Sur les commerces encore ouverts, au moins deux rencontrent des difficultés financières importantes.

147. Par ailleurs, les services initialement offerts par le centre commercial cible ont été fortement réduits ou dégradés133. Le centre commercial n’organise plus d’animations et les dépenses de sécurité, gardiennage, entretien et ménage ont considérablement diminué depuis la reprise au mois d’avril 2020 par le groupe Parfait.

148. Enfin, il ressort encore des éléments du dossier134 que l’hypermarché cible n’est plus en mesure d’offrir certains services offerts en surface de vente en 2020 (services traiteur, traiteur asiatique, poissonnerie, etc.) compte tenu des aménagements entrepris par le groupe Parfait : l’îlot traiteur a été démantelé ainsi que le mobilier de froid attaché à ce rayon, les laboratoires ont été démontés et vidés, et les étals du rayon poissonnerie sont très dégradés.

c) L’évolution de l’état matériel de l’hypermarché et du centre commercial cibles

149. Premièrement, le groupe Parfait a indiqué avoir réalisé des travaux d’entretien et de maintenance au sujet desquels il a communiqué de nombreuses factures le 18 juillet 2024135 et le 6 janvier 2025136.

150. Concernant l’hypermarché cible, il a indiqué, à l’occasion de son premier envoi, que « les factures concernant le bloc froid, l’électricité, les luminaires, le câblage informatique, les rayonnages, la sécurité incendie … supportés par la société Soc batelière, propriétaire du fonds de commerce, soulignent les efforts du groupe Monyv pour les maintenir en très bon état de fonctionnement. L’entretien est à cet égard régulier ainsi qu’il résulte encore de l’attestation de l’entreprise mainteneur de l’installation frigorifique délivrée le 17 Juillet 2024. Comme vous pouvez le constater l’installation de froid a été maintenu en permanence. Des compresseurs ont été changés et l’installation est mise en fonctionnement de manière régulière »137.

151. En ce qui concerne le centre commercial cible, il a indiqué que « la société Sococonseils, propriétaire de l’immobilier du centre commercial de la Batelière justifie avoir réalisé des investissements réguliers pour permettre une exploitation satisfaisante par tous les exploitants des entreprises actives dans le centre commercial pour un montant total jusqu’à fin décembre 2023 de plus de [200-800] k€. Des prestations de services sont également sollicitées auprès d’entreprises spécialisées : maintenance ascenseur, système anti-incendie, assurances, gardiennage, qui confirment une volonté réelle de conservation de l’intégrité du centre commercial de la Batelière »138.

152. Le groupe Parfait a encore indiqué dans ses observations avoir investi un montant de [50 000-100 000] euros au mois de mai 2025, pour remplacer les portes automatiques et les rideaux métalliques du centre commercial.

153. Il ressort toutefois de l’analyse de ces factures qu’elles se concentrent très majoritairement sur la période 2020 – 2021, période au cours de laquelle le groupe Parfait envisageait d’exploiter le fonds de commerce. Elles sont peu étoffées par la suite. En outre, s’agissant de l’investissement au mois de mai 2025 évoqué dans ses observations, le groupe Parfait a produit et présenté un document comme étant une « facture » qui se révèle n’être qu’une « situation », émise par une société de menuiserie qui est une filiale du groupe Parfait, dont il ressort un état d’avancement partiel de [0-25 000] euros sur le marché total de [50 000-100 000] euros et certaines prestations qui sont libellées « en attente »139.

154. Par ailleurs, le groupe Parfait a déclaré au cours de l’instruction qu’après avoir compris « qu’il ne pourrait pas lui-même exploiter cet hypermarché, il a décidé d’arrêt[er] de faire des travaux »140. Dans ses observations, il a également affirmé « [qu’]il avait été expressément prévu dans la première documentation contractuelle signée avec le groupe Sainte Claire que, dorénavant des travaux supplémentaires ne devaient plus être engagés par le Groupe Parfait »141.

155. Deuxièmement, le rapport de constatations du 6 février 2025 fait état, outre des photographies prises lors de la visite par les rapporteurs de l’hypermarché et du centre commerciale pendant la semaine du 9 décembre 2024, des éléments suivants142 :

− surface de vente de l’hypermarché : « [d]’une manière globale, malgré un a priori positif au premier abord, compte tenu du fait que les peintures et l’éclairage semblaient relativement récents, que le sol était fraichement nettoyé dans certaines allées et que des gondoles semblent en bon état, l’état global de la surface de vente s’est avéré dégradé, non-entretenu et plus largement laissé à l’abandon par endroits (hormis pour les postes précédemment mentionnés) » ; « [d]es changements de configuration de la surface de vente semblent avoir été entrepris mais de façon particulièrement bâclée et non-préservatrice du mobilier affecté par ces changements. La présence de coins fourre-tout de fortune où sont entassés de manière peu protectrice des mobiliers et des éléments électroniques, de l’accumulation de poussière, de plusieurs flaques d’eau témoignant de fuites, de nombreuses traces de rouille sur les meubles de froid, d’étals très dégradés, de congélateurs et de meubles de froid positifs cassés, d’un rat mort en décomposition, etc. indiquent que la surface de vente n’a manifestement pas été entretenue à suffisance. De plus plusieurs zones de la surface de vente étaient inaccessibles. Cette zone nécessitera la réalisation de nombreuses opérations de nettoyage, de remplacement de mobiliers, de rénovation et/ou de réparation afin d’être de nouveau opérationnelle » ;

− zones techniques jouxtant la surface de vente de l’hypermarché : « [d]’une façon globale, les différents espaces de ces zones techniques se trouvent dans un état de délabrement et de saleté avancé. Ainsi, plusieurs éclairages ne fonctionnent pas, les revêtements du sol sont parfois cassés, des plafonds sont endommagés. Plusieurs éléments sont rouillés (certains sprinklers, des chariots de boulangerie et de pâtisserie, ventilations, etc.). Il n’y a pas de meubles de cuisine dans les cuisines, ni de lavabos dans deux des trois plonges. Nous n’avons pas testé les fours, par mesure de prudence. Le four de la pâtisserie, dont les parois adjacentes sont brulées, semble particulièrement dangereux. Une odeur nauséabonde se dégageait de la plupart des pièces de ces zones techniques et en particulier des chambres froides de la zone boucherie » ; « [c]es zones techniques ne sont pas opérationnelles en l’état » ;

− zone de la caisse centrale et du PC sécurité de l’hypermarché : « [l]’état global est vétuste. Le PC sécurité n’est pas dans un état fonctionnel, tout le réseau de vidéo-surveillance étant hors d’usage. De même le local matériel de caisse n’est pas fonctionnel non plus dès lors qu’aucun matériel de caisse n’y est entreposé » ;

− sous-sol de l’hypermarché : « [c]ette zone du sous-sol de l’hypermarché a largement été laissée à l’abandon. Son état est partiellement non-fonctionnel. En particulier, les deux chambres froides de ce niveau ainsi que le quai de livraison étaient dans un état de délabrement avancé, tandis que la centrale de production de froid était partiellement hors d’état d’usage au vu des témoins lumineux » ;

− étage des bureaux de l’hypermarché : « [e]n synthèse, nous avons constaté que le premier étage de l’hypermarché, qui est une zone à vocation sociale et technique, est dans un état partiellement non-opérationnel. Manifestement, cette partie de l’hypermarché n’a jamais été entretenue et a subi d’importantes infiltrations dont les dégâts sont encore en partie visibles » ;

− extérieurs du centre commercial : « malgré le fait que les extérieurs avaient apparemment fait l’objet de soins particuliers récemment (…) nous constatons néanmoins que l’extérieur du site est globalement laissé à l’abandon »143 ; et,

− galerie commerçante du centre commercial : « malgré un effort au niveau du nettoyage et une réfection du carrelage des allées, nous constatons une galerie commerçante qui n’est que partiellement fonctionnelle : deux de ses entrées (dont la principale) sont condamnées, l’une des deux entrées encore ouverte ne l’est que partiellement, les tapis roulants et ascenseurs sont à l’arrêt, aucun système de vidéo-surveillance ne semble fonctionner »144.

156. À cet égard, le groupe Parfait indique dans ses observations que « “[l]es témoins lumineux” mentionnés dans le Rapport sont en réalité un système d’alarme lumineuse qui ne se déclenche que lorsque le niveau de froid programmé et attendu n’est pas encore atteint. Une fois la température atteinte, ce système d’alarme lumineuse s’éteint. Autrement dit, la présence de ces “témoins lumineux” ne signifie en aucun cas que le matériel était hors d’usage. Au contraire, cela matérialise l’état de fonctionnement du système de froid »145.

157. Toutefois, les rapporteurs ont fait des constatations sur l’état matériel global des principaux éléments composant chaque zone de l’hypermarché et du centre commercial. Il ressort de l’analyse de ces données que dans la grande majorité des cas, l’état global des éléments de l’hypermarché et du reste du centre commercial cibles était au minimum partiellement non-fonctionnel (respectivement 68 % et 61 % des cas)146.

158. Troisièmement, il ressort de plusieurs éléments du dossier, notamment de l’analyse de factures produites par le groupe Parfait147 et de plusieurs témoignages concordants recueillis au cours de l’instruction148, que le groupe Parfait a déployé des efforts inhabituels et significatifs de ménage et d’entretien sur le site La Batelière durant le week-end précédent la visite sur site des rapporteurs (7 et 8 décembre 2024).

159. En particulier, il apparait que le site de La Batelière bénéficiait habituellement de prestations de ménage d’une durée de cinq heures hebdomadaires pour un montant mensuel de moins de [200-800] euros149 et d’une intervention mensuelle pour l’entretien des espaces verts pour un montant d’environ [1 000-2 000] euros par mois150. En comparaison, les prestations de ménage ont représenté un montant de [3 000-5 000] euros pour le mois de décembre 2024151, des prestations de « remise en état » des extérieurs – dont il est précisé qu’elles ont eu lieu du 7 au 9 décembre 2024 – ont représenté un montant de [3 000-5 000] euros152, tandis que la facture pour les prestations d’entretien des espaces verts, d’un montant de [1 000-2 000] euros, précisait de manière inhabituelle le moment de l’intervention : « passage du samedi 07/12 & lundi 09/12 »153.

160. L’un des témoignages recueillis est le suivant : « [e]ntre vendredi dernier (le 6 décembre 2024) et hier (le lundi 9 décembre 2024), tout d’un coup tout le centre commercial a été nettoyé, la pelouse a été tondue et les arbres taillés, le parking a été nettoyé, une barrière donnant accès au parking du bas, qui n’était jamais ouverte, a tout d’un coup été ouverte, les climatisations ont été nettoyées, l’éclairage du parking du bas a été remis ... On n’a jamais vu le centre commercial aussi propre depuis 2020. Le parking n’avait pas été nettoyé depuis des mois : il était dans un état déplorable, avec une odeur d’urine et énormément de détritus. À tel point qu’habituellement je ne pouvais pas me garer sur le parking, alors qu’hier j’ai pu le faire. Dans le centre commercial, la galerie est nettoyée par un monsieur deux fois par semaine habituellement. Là lundi, étonnamment elle était plus nettoyée et lustrée qu’habituellement »154.

161. En cela, les constatations réalisées par les rapporteurs sont susceptibles de ne pas refléter de manière fidèle l’état habituel du site.

C. SUR LA MISE EN ŒUVRE DE L’ENGAGEMENT DE COOPÉRATION

1. LA DÉSIGNATION DU MANDATAIRE, SA MISSION ET LES RAPPORTS ADRESSÉS À L’AUTORITÉ

162. Le cabinet Ntrust, en la personne de M. Philippe Nataf (ci-après, « le mandataire »), a été agréé par l’Autorité en qualité de mandataire le 13 février 2023155.

163. Le contrat de mandat signé, adressé à l’Autorité le 15 mars 2023, prévoit que le groupe Parfait, directement ou par l’intermédiaire de ses conseils « apportera au mandataire coopération et assistance, et lui fournira toute information raisonnablement requise par le mandataire pour l’accomplissement de ses tâches ». Il précise, conformément à la clause 16 des engagements, que la mission du mandataire est d’assurer le suivi de la bonne exécution de ces engagements et, si la cession n’a pas eu lieu avant la fin de la « première période de cession » de cinq mois (soit avant le 22 mai 2023), de procéder à la cession du fonds de commerce156. Par ce contrat, le groupe Parfait a investi le mandataire en tant que mandataire chargé du contrôle et, le cas échéant, à compter de la « seconde période de cession » telle que prévue par les engagements, en tant que mandataire chargé de la cession157.

164. Le mandataire a communiqué à l’Autorité différents rapports et éléments :

− des rapports mensuels relatifs au suivi des engagements et à l’avancée des négociations avec les différents candidats repreneurs. Au total, 30 rapports mensuels ont été adressés au service des concentrations entre le mois d’avril 2023 et le mois de septembre 2025 ;

− un rapport ad hoc du 1er septembre 2024 récapitulant le suivi des engagements jusqu’à cette date ; et,

− des avis motivés sur les demandes d’agrément des candidats repreneurs.

165. Le mandataire a également adressé des courriels de suivi aux rapporteurs pour les informer de certaines étapes dans les processus de négociation avec les candidats repreneurs.

2. LA MISE EN ŒUVRE DE L’ENGAGEMENT DE COOPÉRATION

166. Il ressort des éléments du dossier que le groupe Parfait n’a pas toujours coopéré avec le mandataire tout au long de ses missions de suivi des engagements.

167. En premier lieu, la nomination du mandataire est intervenue, comme indiquée ci-avant, le 13 mars 2023, soit un mois après son agrément par l’Autorité et deux mois et demi après la décision d’autorisation.

168. En deuxième lieu, le mandataire a fait état de difficultés pour obtenir des informations nécessaires à la réalisation de ses missions. Il a précisé lors de son audition que les échanges n’étaient « pas faciles » avec les conseils du groupe Parfait et nécessitaient systématiquement plusieurs relances158. De plus, certaines informations ne lui ont pas été transmises, comme celle concernant la perte potentielle de l’autorisation CDAC de l’hypermarché cible, alors qu’elle affectait la valeur du fonds de commerce et la possibilité pour un repreneur d’exploiter l’hypermarché.

169. En troisième lieu, le mandataire a indiqué avoir connu des difficultés pour obtenir des informations ciblées, pertinentes et triées159. En effet, il a, à plusieurs occasions, demandé des factures pour suivre la mise en œuvre de l’engagement de préservation de la valeur du fonds de commerce et de l’ensemble immobilier. En réponse, le groupe Parfait lui a adressé de très nombreux documents, non triés, sans indication des factures pertinentes ou de leur rattachement à l’une ou l’autre des sociétés Socobatelière et Sococonseils. En audition, il a indiqué que ces comportements du groupe Parfait ne lui ont pas permis de mener « un suivi très précis. C’est pour cela d’ailleurs que le suivi des ‘‘ engagements liés ’’, englobant celui des factures, n’a pas pu être précis »160.

170. En quatrième lieu, il ressort de plusieurs éléments du dossier que le mandataire n’a pas toujours été associé aux négociations avec les repreneurs potentiels sur le volet immobilier, lequel était perçu par la plupart des candidats comme indissociable de la reprise du fonds de commerce.

171. Ainsi, en ce qui concerne le premier processus de cession avec le groupe Sainte Claire, si le mandataire a déclaré, lors de son audition, avoir pu pleinement négocier la cession du fonds de commerce, il précise en revanche que le conseil du groupe Parfait a exclu sa participation à la négociation de la vente des parts de Sococonseils161.

172. De même, le mandataire n’a pas été informé de la tenue de plusieurs réunions entre le groupe Parfait, ses conseils et les consorts X, à la fin de l’année 2024162.

173. En cinquième lieu, le groupe Parfait n’a pas systématiquement suivi les recommandations du mandataire. Ainsi, alors que le mandataire a, à plusieurs occasions, recommandé de mettre en place une data room pour faciliter les transmissions de documents avec les candidats repreneurs, plutôt que de les transmettre « au compte-goutte », le groupe Parfait a refusé, jusqu’au début de l’année 2025, de procéder de la sorte. De même, le mandataire, constatant des blocages dans les négociations entre un des conseils du groupe Parfait et le dirigeant du groupe Sainte Claire163, a préconisé en vain un changement d’avocat164.

174. En sixième lieu, il ressort des éléments transmis par le mandataire ainsi que de ses rapports des mois de juillet, août et septembre 2025 qu’il a de nouveau fait état de difficultés pour exercer ses missions, à la suite de la notification du rapport des services d’instruction du 20 juin 2025, lequel constatait un manquement à l’engagement de coopération.

175. Ainsi, bien qu’il ait explicitement demandé, dans un courriel du 23 juin 2025 adressé au groupe Parfait, à être tenu informé de manière à éviter d’aller « à la pêche aux informations »165, son rapport du 10 septembre 2025 relève pourtant, à propos d’éléments relatifs à l’état des sprinklers ou à la résiliation de la police d’assurance du site de la Batelière (i.e., « sur plusieurs sujets importants »), « une difficulté à recueillir l’information nécessaire à la bonne réalisation de ses diligences »166. Le mandataire s’est également étonné de découvrir la situation exacte des locataires de la galerie commerçante « lors de la séance de signature des transactions » alors qu’il avait adressé un questionnaire à ce sujet le 23 juin 2025.

176. Le groupe Parfait dans une note adressée au service des concentrations le 12 septembre 2025, revenant notamment sur le dernier rapport du mandataire, en a contesté certains points. Il a ainsi apporté des précisions sur la nécessité de mettre les sprinklers aux normes. Sur la situation des locataires, il a précisé que « cette information figurait dans la data-room notariale depuis février 2025. [….] Tant le mandataire que l’acquéreur avaient un accès permanent à cette base de données. Nous ne pouvons être tenus pour responsable de l’inexploitation, par ces personnes et leurs conseils, de données figurant dans cette data room »167.

177. En outre, le groupe Parfait en réponse à des demandes pourtant précises du mandataire, s’est contenté de lui transmettre, parfois tardivement, des volumes importants de documents et informations non triés, et pour certains sans rapport avec l’objet de la demande. Par exemple, dans son rapport du 15 juillet 2025, le mandataire demande « une amélioration de la fluidité des échanges avec la Partie notifiante »168 et relève également que « les éléments fournis pour un suivi des engagements liés sont soit sans rapport avec l’engagement de préservation de la valeur du fonds de commerce, et du centre commercial soit transmis avec un délai de plusieurs semaines »169.

178. Enfin, le groupe Parfait n’a pas convié le mandataire à une réunion concernant le dossier CDAC alors même que l’obtention d’une autorisation CDAC était nécessaire à l’exploitation commerciale de l’hypermarché et constituait l’une des conditions suspensives à la fois pour la reprise du fonds de commerce et pour l’acquisition de l’ensemble immobilier par le groupe Sainte Claire170.

III. Discussion

179. Seront successivement examinées les questions de procédure (A) et la mise en œuvre des engagements pris par le groupe Parfait dans le cadre de la décision d’autorisation (B), l’imputabilité des manquements relevés (C) et les sanctions prononcées (D).

A. SUR LA PROCÉDURE

1. RÈGLES APPLICABLES

180. L’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés (ci-après, « CESDH ») relatif au procès équitable, applicable aux procédures devant l’Autorité171, dispose que « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ».

181. En application des dispositions de l’article L. 450-3 du code de commerce, les rapporteurs peuvent, notamment, « opérer sur la voie publique, pénétrer entre 8 heures et 20 heures dans tous lieux utilisés à des fins professionnelles et dans les lieux d’exécution d’une prestation de services, ainsi qu’accéder à tous moyens de transport à usage professionnel » et « exiger la communication et obtenir ou prendre copie, par tout moyen et sur tout support, des livres, factures et autres documents professionnels de toute nature, et, le cas échéant, de leurs moyens de déchiffrement, susceptibles d’être détenus ou d’être accessibles ou disponibles, entre quelques mains qu’ils se trouvent, propres à faciliter l’accomplissement de leur mission. Ils peuvent exiger la mise à leur disposition des moyens indispensables pour effectuer leurs vérifications. Ils peuvent également recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement, document ou toute justification nécessaire au contrôle ».

182. Par ailleurs, l’entreprise mise en cause peut être représentée ou assistée d’un avocat dès les premières étapes de la procédure ouverte à son encontre sur le fondement de l’article L. 462-5 du code de commerce en cas de manquement à l’article L. 430-8 du même code. Elle peut également utilement faire valoir son point de vue sur la pertinence des faits reprochés en produisant des observations en réponse à la communication du rapport dans un délai de quinze jours ouvrés, comme précisé par le IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, et lors de la séance tenue devant le Collège de l’Autorité.

183. En ce qui concerne plus particulièrement la phase non-contradictoire des procédures contentieuses et la conduite de l’instruction, les rapporteurs sont maîtres de leur instruction172, qu’ils doivent mener dans le respect des principes de loyauté et d’impartialité. S’agissant en particulier du principe d’impartialité, les rapporteurs ont, à l’issue de l’instruction contradictoire, pour mission de présenter leur analyse de la façon la plus claire possible, afin de permettre aux parties de répondre devant le Collège. Ils doivent viser les pièces, ou passages de pièces, qui leur paraissent utiles soit pour appuyer leur démonstration sur ces pièces, soit pour exposer en quoi celles-ci ne contredisent pas l’analyse retenue, les parties ayant, quant à elles, accès à l’ensemble des pièces du dossier. Seule la déloyauté́dans l’interprétation ou la présentation des pièces, ou encore dans la façon d’interroger les personnes en cause ou les tiers, peut conduire à constater une atteinte aux droits de la défense de l’entreprise mise en cause, ce qu’il lui revient, le cas échéant, d’étayer par des éléments de preuve173.

2. APPLICATION EN L’ESPÈCE

184. Le groupe Parfait soutient que l’instruction aurait été conduite à charge, au mépris de l’article 6, paragraphe 1, de la CESDH, et plus particulièrement des principes de respect des droits de la défense et d’impartialité.

185. Tout d’abord, les rapporteurs auraient mené une instruction exclusivement à charge à l’encontre du groupe Parfait, cherchant à « effectuer une présentation orientée des éléments du dossier » notamment concernant les constatations réalisées sur le site de l’hypermarché et du centre commercial cibles le 9 décembre 2024, les déclarations des commerçants de la galerie commerciale ou encore les renseignements relatifs aux négociations avec les candidats repreneurs.

186. Ensuite, les conditions de convocation ou recueil de déclarations sur ce site auraient porté atteinte aux droits de la défense du groupe Parfait, faute d’un délai de prévenance suffisant pour permettre à ses dirigeants de se faire assister dans des conditions normales par leurs conseils situés en métropole. Le déroulement de ce même recueil de déclarations sur place aurait également porté atteinte aux droits de la défense dès lors qu’il aurait consisté, dans les faits, en une audition de plusieurs heures.

187. En outre, le groupe Parfait avance que les rapporteurs auraient sollicité la communication de documents dans des délais « déraisonnables », en particulier à la suite du recueil de déclarations du 9 décembre 2024.

188. Enfin, la publication le 16 décembre 2024, sur le site de l’Autorité, d’un communiqué de presse faisant état de l’ouverture d’une procédure pour non-respect des engagements aurait eu pour effet de bloquer les négociations avec des repreneurs potentiels, retardant ainsi de fait la cession du fonds de commerce.

189. Ces arguments seront écartés pour les raisons exposées ci-après.

190. Premièrement, conformément aux principes rappelés au paragraphe 183 ci-dessus, les rapporteurs ont présenté de façon exhaustive toutes les pièces dès lors qu’elles ont été versées au dossier, et ont visé les pièces et les éléments du dossier qu’ils ont estimé utiles à leur démonstration dans le rapport notifié au groupe Parfait. Dès lors, il n’est pas démontré que les rapporteurs auraient fait preuve de déloyauté dans l’interprétation ou la présentation des pièces, ou encore dans la façon d’interroger les personnes en cause ou les tiers.

191. Deuxièmement, s’agissant du recueil de déclarations du 9 décembre 2024, il convient de relever que les dispositions de l’article L. 450-3 du code de commerce n’imposent aucun délai de prévenance et que le groupe Parfait ne saurait, dès lors, se prévaloir de son hypothétique insuffisance. Au demeurant, si le délai entre l’envoi de la convocation à deux dirigeants du groupe Parfait (dont l’un était alors présent en métropole) et le rendez-vous pour le recueil de déclarations et de documents sur place peut paraître bref174, ce délai a été suffisant pour leur permettre d’être présents sur place à cette occasion. Il ressort d’ailleurs du procès-verbal que ce recueil de déclarations et de copies de documents s’est tenu en présence de plusieurs employés du groupe Parfait. En outre, rien n’empêchait le groupe Parfait de solliciter la présence d’un avocat à cette occasion, qu’il s’agisse d’un avocat installé en Martinique ou d’un avocat du groupe basé en métropole. Au surplus, à la fin de la phase non-contradictoire de la procédure, les rapporteurs ont procédé à l’audition d’un dirigeant du groupe Parfait en présence de ses conseils, audition au cours de laquelle il a eu l’opportunité de faire valoir sa position sur les faits175.

192. Troisièmement, s’agissant des délais de réponse accordés au groupe Parfait, il ressort du dossier qu’ils ont été appropriés au regard des circonstances de l’espèce. La phase d’instruction est soumise à des contraintes de temps propres et l’évaluation du caractère raisonnable des délais doit se faire en tenant compte de la nature et de la quantité des informations demandées, ainsi que de l’existence éventuelle de demandes justifiées de prolongation formulées par les entreprises concernées. À cet égard, le seul fait qu’en l’espèce, à deux reprises, un délai de 24 heures ait été fixé ne suffit pas à caractériser des demandes « déraisonnables » de la part des rapporteurs. Les demandes en question, qui visaient à obtenir des documentations comptables et financières et à obtenir des précisions sur celles-ci, étaient basiques et n’impliquaient pas un important travail de collecte ou de retraitement de la part du groupe Parfait176.

193. Quatrièmement, l’Autorité souligne que le communiqué de presse publié le 16 décembre 2024 sur son site faisait état d’informations succinctes relatives aux actes d’enquête accomplis dans le cadre de la saisine d’office par les services d’instruction. En outre, comme c’est le cas pour les communications de cette nature, la publication de ces informations a été effectuée dans le strict respect de la présomption d’innocence du groupe Parfait177. Par ailleurs, ce dernier ne saurait utilement invoquer une incidence sur le respect de son engagement de cession, dès lors que le délai de cession prévu par les engagements était échu depuis près de quinze mois à la date de cette communication. Enfin, le groupe Parfait ne démontre aucune incidence spécifique de cette publication sur l’avancée des négociations.

194. Il résulte de ce qui précède que l’instruction menée par les rapporteurs n’a pas porté atteinte aux droits de la défense du groupe Parfait et en particulier au droit à un procès équitable.

B. SUR LA MISE EN ŒUVRE DES ENGAGEMENTS PAR LE GROUPE PARFAIT

195. Après un rappel des règles applicables (1), sera examinée la mise en œuvre des différents engagements pris par le groupe Parfait dans le cadre de la décision d’autorisation (2).

1. LES RÈGLES APPLICABLES

196. Les engagements proposés par une partie notifiante doivent être suffisants pour remédier aux problèmes de concurrence préalablement identifiés. La partie notifiante doit aussi s’assurer, dès le moment où elle en fait la proposition, que les engagements peuvent effectivement être exécutés, dès lors qu’ils conditionnent l’autorisation de l’opération et qu’en l’absence de souscription de tels engagements, l’Autorité n’autoriserait pas l’opération de concentration considérée, compte tenu de la subsistance d’un doute sérieux d’atteinte à la concurrence ou d’un effet anticoncurrentiel. « L’entreprise notifiante a, par conséquent, une obligation de résultat de respecter les engagements qu’elle a pris volontairement devant l’Autorité »178.

197. L’Autorité contrôle rigoureusement la bonne exécution des engagements souscrits à l’occasion d’une décision d’autorisation d’une opération de concentration, en application des dispositions du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce. À ce titre, pour déterminer si l’entreprise a correctement exécuté les engagements qui conditionnaient une décision d’autorisation, elle tient compte de l’ensemble des circonstances particulières à l’opération179.

198. À cet égard, le contrôle opéré par l’Autorité ne relève pas d’une appréciation globale mais porte sur le respect des engagements pris un par un, dont chacun a valeur obligatoire180. En effet, la décision d’autorisation de l’opération de concentration est délivrée sous la condition de la bonne exécution de l’ensemble des engagements retenus, qui sont tous nécessaires à la résolution des atteintes à la concurrence identifiées. Ainsi, la circonstance qu’une partie des engagements ait été respectée ne saurait faire échec à un constat d’inexécution181.

199. Conformément à une pratique décisionnelle constante de l’Autorité, « les engagements, comme les injonctions, sont d’interprétation stricte »182. Néanmoins, le respect formel de la lettre d’un engagement peut être insatisfaisant s’il s’avère que l’entreprise qui était tenue de le mettre en œuvre a, par ailleurs, pris des mesures aboutissant à le vider en tout ou partie de sa portée183. Le Conseil d’État a ainsi jugé que « l’Autorité de la concurrence est en droit de rechercher si, alors même que serait assuré le respect formel des critères expressément prévus par un engagement que l’évolution du marché n’a pas privé de son objet, les parties ayant pris cet engagement auraient adopté des mesures ou un comportement ayant pour conséquence de le priver de toute portée et de produire des effets anticoncurrentiels qu’il entendait prévenir »184.

200. Ainsi, l’effet du manquement sur la concurrence que les engagements visaient à préserver sera, le cas échéant, pris en considération, si les parties ont adopté un comportement de contournement, ayant pour effet de limiter la portée des engagements et de produire les effets anticoncurrentiels que ces engagements devaient prévenir. L’effet du manquement sur la concurrence peut également être pris en compte pour apprécier la gravité du non-respect185.

201. Par ailleurs, à la différence d’injonctions imposées par l’Autorité, les engagements sont proposés par les parties à l’opération de concentration elles-mêmes. Celles-ci sont tenues de proposer des engagements suffisants pour remédier aux problèmes de concurrence identifiés. Il leur appartient aussi de s’assurer qu’ils peuvent effectivement être exécutés, dès lors qu’ils conditionnent l’autorisation de l’opération. Dans ces conditions, les parties ne sauraient invoquer, au stade du contrôle de leur exécution, l’impossibilité ou la difficulté de se conformer aux engagements qu’elles ont proposés186.

202. De plus, une situation de non-respect d’engagements non seulement remet en cause le fondement de la délivrance de l’autorisation mais fait aussi obstacle au rétablissement de la situation de concurrence poursuivi par lesdits engagements. Les entreprises sont donc tenues d’exécuter complètement, et avec la plus grande diligence, les engagements qu’elles ont souscrits et qui ont conditionné l’autorisation de l’opération de concentration. Elles doivent, à cet égard, mettre tous les moyens en œuvre pour s’assurer de leur réalisation effective, dans les meilleurs délais et, en tout état de cause, avant le terme de la période prévue187.

203. L’obligation de se conformer strictement aux engagements souscrits peut toutefois, dans des circonstances particulières, être modifiée, allégée, ou levée188. Néanmoins, l’existence de difficultés particulières ou l’impossibilité d’exécuter les engagements dans les délais prévus par la décision d’autorisation ne font pas obstacle au constat d’une inexécution des obligations, mais sont seulement de nature à justifier que les parties saisissent, en temps utile, l’Autorité d’une demande de révision de leurs engagements afin d’éviter de manquer à leurs obligations. Faute d’avoir engagé une telle démarche auprès de l’Autorité, les parties sont donc tenues d’exécuter strictement les engagements souscrits189.

204. Pour contrôler la bonne exécution des engagements conditionnant l’autorisation d’une opération de concentration, il est généralement demandé à la partie notifiante de prévoir le recours à un mandataire190. La partie notifiante est alors tenue à une obligation spécifique et impérative de coopération avec le mandataire qu’elle choisit généralement après agrément de l’Autorité191. Cette obligation constitue le fondement même de l’effectivité du mécanisme de suivi des engagements.

205. En outre, la partie notifiante est seule responsable de la mise en œuvre des mesures correctives192, y compris en cas d’intervention d’un mandataire.

206. Enfin, si les rapports établis par le mandataire sont de nature à éclairer utilement l’analyse effectuée par l’Autorité, cette dernière n’est pas liée par les appréciations portées par celui-cidans le cadre de l’exercice de sa mission193.

2. L’APPRÉCIATION DE LA MISE EN ŒUVRE DES ENGAGEMENTS EN L’ESPÈCE

207. Après l’examen de l’autonomie de chacun des engagements considérés (a), la mise en œuvre de l’engagement de cession (b), de l’engagement de préservation de la valeur (c) et, enfin, de l’engagement de coopération (d) seront analysés.

a) L’autonomie des engagements considérés

Arguments du groupe Parfait

208. Le groupe Parfait soutient que le rapport des services d’instruction modifierait le périmètre des engagements pris, en y incluant un engagement autonome s’agissant de la préservation de la valeur du fonds de commerce et du centre commercial, et une obligation de coopération avec le mandataire. Il allègue, en particulier, que l’engagement de préservation serait lié à l’engagement de cession et que l’appréciation de l’exécution de cet engagement ne devrait ainsi pas faire l’objet d’une analyse distincte. En outre, le groupe soulève que, de manière générale, l’obligation de coopération avec le mandataire ne constituerait pas un engagement au sens de l’article L. 430-5 du code de commerce au motif, d’une part, qu’il n’aurait pas pour objet de remédier aux effets anticoncurrentiels de l’opération de concentration notifiée et, d’autre part, qu’il s’agirait d’une clause type résultant du modèle-type d’engagement structurel des lignes directrices de l’Autorité relatives au contrôle des concentrations.

Appréciation de l’Autorité

209. Il convient d’écarter ces arguments.

210. En premier lieu, tout d’abord, l’engagement de cession, prévu par la clause 2 des engagements, prévoit que la partie notifiante s’engage sur le principe d’une cession du fonds de commerce dans un délai maximal de neuf mois. La clause 10 des engagements spécifie, en outre, une obligation pour la partie notifiante de fournir aux cessionnaires potentiels toutes les informations utiles afin de leur permettre de formuler des offres. En cela, l’engagement de cession répondait à la nécessité de délier le point de vente concerné de tout lien vis-à-vis du groupe Parfait dans un délai rapide194.

211. Ensuite, l’engagement de préservation de la valeur, prévu à la clause 7 des engagements, prévoyait deux principes de préservation distincts. Il prévoyait, d’une part, que « la Partie Notifiante s’engage à préserver la valeur tant du Fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial » spécifiquement avant la cession du fonds de commerce et, d’autre part, que « la Partie Notifiante s’assurera que le Fonds de commerce non exploité à ce jour demeurera en état ». L’Autorité, dans le cadre de son examen de l’adéquation des engagements proposés, avait ainsi pris en compte le fait, en particulier, que les engagements assuraient « la pérennité et l’attractivité du fonds de commerce avant sa cession, puisque le groupe Parfait s’est engagé à préserver la valeur tant du fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial jusqu’à la cession du fonds de commerce à un tiers, notamment en s’assurant que ce dernier demeurera en état »195.

212. En cela, l’engagement de préservation poursuivait un double objectif. Il visait, d’une part, à maintenir l’attractivité de l’hypermarché cible pendant la phase de mise en œuvre de l’engagement de cession, afin de garantir que la cession puisse intervenir dans un délai raisonnable. En effet, la préservation de la valeur d’un magasin est essentielle pour conserver son attractivité en raison de sa possible exploitation à court terme par un repreneur. L’engagement visait, d’autre part, à préserver la pérennité du fonds de commerce, dont le groupe Parfait avait déjà pris le contrôle dès le mois d’avril 2020, en s’assurant que celui-ci reste en état. En effet, le groupe Parfait n’exploitait pas le fonds de commerce au moment de la décision d’engagement, alors même qu’il disposait de la faculté de le faire dans le cadre de la dérogation à l’effet suspensif qui lui avait été accordée et que les services de l’Autorité avaient déjà fait part de craintes quant à l’enjeu de sa préservation (voir, ci-avant, le paragraphe 12). Cet engagement avait donc pour objet de maintenir l’hypermarché dans les mêmes conditions d’exploitation qu’au moment de sa prise de contrôle, assurant ainsi une continuité entre l’acquisition et la cession, et visait à permettre que l’hypermarché cible puisse être rouvert rapidement et durablement par son repreneur.

213. L’engagement de préservation de la valeur du fonds de commerce et du centre commercial était, dès lors, explicitement pris dans le cadre de la décision d’autorisation, s’ajoutant à l’engagement de cession.

214. En second lieu, l’engagement de coopération avec le mandataire, qui figure à la clause 16 des engagements, met en place un dispositif de suivi de la mise en œuvre des engagements et, le cas échéant, un dispositif de cession par le biais d’un mandataire. Il prévoit en outre que la « Partie Notifiante, directement ou par l’intermédiaire de ses conseils, apportera aux Mandataires coopération et assistance et leur fournira toute information raisonnablement requise par les Mandataires pour l’accomplissement de leurs tâches ».

215. L’engagement de coopération avec le mandataire était, dès lors, explicitement pris dans le cadre de la décision d’autorisation.

216. Cet engagement poursuit un objectif spécifique et la question de l’appréciation de sa mise en œuvre est indépendante de celle des engagements de cession et de préservation. L’engagement de coopération impose de garantir au mandataire les conditions nécessaires à l’exercice effectif de sa mission essentielle, laquelle consiste à surveiller la mise en œuvre des engagements et à signaler toute difficulté au service des concentrations. Il vise ainsi à assurer l’efficacité du dispositif correctif mis en place pour remédier aux risques d’effets anticoncurrentiels de l’opération.

217. En outre, contrairement à ce que soutient le groupe Parfait, l’engagement de coopération avec le mandataire ne saurait être considéré comme une simple « clause type ». L’économie générale du contrôle des concentrations, lequel repose sur la mise en œuvre effective, vérifiable et contrôlable des engagements pris en vue d’obtenir l’autorisation de l’opération de concentration en impose, à l’évidence, l’effectivité. Le paragraphe 354 des lignes directrices relatives au contrôle des concentrations le rappelle, en soulignant que les engagements doivent être contrôlables et que la partie notifiante doit prévoir un dispositif de contrôle, le cas échéant, en proposant la nomination d’un mandataire indépendant, permettant à l’Autorité de s’assurer de leur réalisation effective.

218. Il en résulte que tant l’engagement de préservation de la valeur que l’engagement de coopération, formulés de façon claire et précise, ont été spécifiquement et distinctement souscrits par le groupe Parfait. Il convient, dès lors, de procéder à l’analyse de la mise en œuvre de ces engagements autonomes.

b) Le non-respect de l’engagement de cession dans le délai prévu

219. Il résulte des constatations ci-avant que le groupe Parfait n’a cédé le fonds de commerce de l’hypermarché cible que le 9 septembre 2025 soit près de deux ans après la date butoir de cession du 22 septembre 2023 à laquelle il s’était engagé. Par ailleurs, il en résulte qu’il a manqué à son obligation d’information avec l’ensemble des candidats repreneurs, que ce soit en tardant, voire en omettant de leur transmettre des informations et documents essentiels, ou encore en ne leur permettant pas de tester par eux-mêmes le système de production de froid, actif essentiel en Martinique, compte tenu des habitudes locales de consommation.

Arguments du groupe Parfait

220. Premièrement, le groupe Parfait avance qu’il n’aurait pas été envisageable de solliciter une demande de prolongation de délai d’exécution ni de présenter une demande de substitution préalablement à la date butoir, car il était en cours de finalisation de la cession avec le groupe Sainte Claire, ce dernier ayant fait l’objet d’un agrément de la part de l’Autorité.

221. Deuxièmement, le groupe Parfait invoque « la difficulté de trouver un repreneur dans un secteur où le nombre d’acteurs économiques est restreint » ou encore le fait que l’absence de cession à la date butoir « est uniquement due à des circonstances indépendantes de la volonté du groupe Parfait, qui a, malgré les échecs successifs avec les divers repreneurs potentiels, toujours cherché à respecter l’engagement de cession pris, même au-delà de la date butoir ». Plus précisément, le groupe Parfait estime avoir été suffisamment diligent et avoir (i) accepté de céder également le centre commercial qui n’était pas visé par l’engagement de cession, (ii) mené des négociations de bonne foi, (iii) accepté un grand nombre de compromis et (iv) mené une stratégie commerciale normale, notamment en demandant un prix plus élevé pour démarrer les négociations ou en cherchant à rentrer un minimum dans ses frais. Il impute donc l’échec des différents processus de négociation à des comportements non diligents, voire opportunistes de certains candidats ou à des circonstances extérieures.

222. Troisièmement, le groupe Parfait estime, s’agissant de l’obligation d’information des cessionnaires potentiels, que les déclarations des candidats repreneurs seraient nécessairement à charge et devraient, par conséquent, être relativisées.

Appréciation de l’Autorité

223. Les différents arguments invoqués par le groupe Parfait doivent être écartés pour les raisons exposées ci-après.

224. En premier lieu, sur l’absence de demande de prolongation du délai d’exécution ou de demande de substitution avant la date butoir, contrairement à ce qui est avancé, le groupe Parfait n’était pas en cours de finalisation de la cession avec le groupe Sainte Claire à l’approche du 22 septembre 2023. En effet, il ressort des constatations, d’une part, que les relations entre les deux groupes ont commencé à se détériorer avant la signature des avenants du 10 août 2023 (voir, en ce sens, les paragraphes 50 et 51 ci-dessus) et, d’autre part, que la documentation comptable nécessaire à la réalisation de l’opération de cession de l’ensemble immobilier (indissociable de la reprise du fonds de commerce pour le groupe Sainte Claire), demandée à plusieurs reprises par le groupe Sainte Claire au mois de septembre 2023, n’avait toujours pas été transmise à l’approche de la date butoir de cession (voir, en ce sens, les paragraphes 54 à 57 ci-dessus). Dans ce contexte, le groupe Parfait aurait dû faire preuve de diligence en anticipant le risque de dépassement du délai et, de ce fait, en engageant, en temps utile, un dialogue avec l’Autorité afin d’envisager des solutions alternatives.

225. En deuxième lieu, le groupe Parfait ne saurait valablement se prévaloir des difficultés rencontrées pour « trouver un repreneur ». En effet, l’engagement de cession a été proposé puis souscrit par le groupe Parfait. Dès lors, comme il ressort des principes évoqués au paragraphe 196 (obligation de résultat), il lui incombait de s’assurer de la faisabilité puis de la bonne exécution de cet engagement.

226. Pour ces mêmes raisons, le groupe Parfait ne peut pas non plus, a posteriori, invoquer « un secteur où le nombre d’acteurs économiques est restreint » d’autant qu’il avait lui-même indiqué être en négociation avec le groupe Sainte Claire depuis le mois d’août 2022 et qu’ilressort des constatations ci-avant (paragraphes 44 et suivants) que le groupe Parfait a, au contraire, reçu plusieurs marques d’intérêt pour la reprise de l’hypermarché et a engagé des processus de négociation avec au moins quatre candidats repreneurs entre 2022 et 2025.

227. Par ailleurs, le groupe Parfait ne saurait davantage justifier le non-respect de son obligation de cession par « des circonstances indépendantes de [s]a volonté », et notamment le comportement des candidats repreneurs avec lesquels il a engagé des négociations. En effet, les parties ne peuvent, au stade du contrôle de l’exécution des engagements souscrits devant l’Autorité, invoquer l’impossibilité ou la difficulté de se conformer à leurs propres engagements. Dès lors, même si le groupe Parfait a rencontré des obstacles ou des difficultés dans le cadre du premier processus de négociation avec le groupe Sainte Claire, comme ceux survenus au cours des autres processus de négociation entamés après la date butoir de cession, ces circonstances ne peuvent pas être retenues pour justifier le manquement à l’obligation de cession.

228. Au surplus, il résulte des constatations exposées ci-avant (paragraphes 44 et suivants) que le groupe Parfait est responsable de l’échec des processus de négociation entamés avec les candidats repreneurs.

229. À cet égard, si la partie notifiante peut décider d’accepter ou refuser les concessions exigées par les candidats repreneurs, cette liberté ne saurait faire obstacle à l’obligation d’exécuter l’engagement de cession dans les délais prescrits. Ainsi, le prix de revente de l’immobilier importait peu dès lors que sa cession constituait une condition préalable à la cession du fonds, plusieurs candidats ayant formulé des offres interdépendantes incluant la reprise de l’immobilier. De même, la question de l’identité du repreneur ou de l’enseigne était sans incidence tant que le candidat remplissait les conditions d’agrément prévues par les engagements. Il en allait de même des demandes notamment d’exclusivité formulées par certains repreneurs, qui ne devaient pas faire obstacle à la réalisation de la cession.

230. Or, ainsi qu’il ressort des constatations exposées ci-avant, le groupe Parfait a adopté des stratégies de négociation incompatibles avec son obligation de céder rapidement le fonds de commerce et contribuant à l’échec des différents processus de négociation. En effet, le groupe Parfait a (i) entravé les négociations avec le groupe Sainte Claire sur le volet immobilier (voir, en ce sens, les paragraphes 50 à 70 ci-dessus), (ii) cherché à tirer un bénéfice de la cession immobilière au mépris de son engagement de cession (voir, en ce sens, les paragraphes 62 à 68, 73 à 74 et 95 à 97 ci-dessus) et (iii) privilégié un repreneur, au détriment d’autres candidats, alors même qu’aucun processus n’était exclusif et qu’aucune garantie de conclusion des actes n’existait (voir, en ce sens, les paragraphes 71 à 74, 76 à 86et 95 à 101 ci-dessus).

231. En troisième lieu, s’agissant des manquements du groupe Parfait à ses obligations d’information des cessionnaires, les comportements relevés dans les constatations exposées aux paragraphes 166 à 178 ont été confirmés tant par le mandataire (dans ses rapports et au cours de son audition) que par des éléments matériels probants (notamment des échanges de courriels). Le groupe Parfait, qui n’a pas contesté ces manquements sur le fond, ne saurait dès lors remettre en cause la crédibilité des déclarations des candidats repreneurs.

Conclusion

232. Au regard des éléments exposés ci-dessus, le groupe Parfait n’a pas respecté l’engagement de cession prévu à la clause 2 des engagements annexés à la décision d’autorisation. En effet, la cession n’est intervenue que le 9 septembre 2025, malgré l’ouverture de plusieurs négociations avec différents cessionnaires potentiels, dont la majorité avait pourtant été agréée par l’Autorité. Par ailleurs, les éléments du dossier révèlent que la responsabilité dans l’échec de ces différentes tentatives est très largement imputable au groupe Parfait. Le groupe Parfait a, en sus, manqué à son obligation d’information diligente à l’égard des candidats repreneurs et, de ce fait, à l’obligation spécifique prévue à la clause 10 des engagements.

233. En conséquence, l’Autorité constate, au sens du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, l’inexécution de l’engagement de cession par le groupe Parfait.

c) Le non-respect de l’engagement de préservation de la valeur

Arguments du groupe Parfait

234. Le groupe Parfait estime ne pas avoir manqué à l’engagement de préservation de la valeur tant du fonds de commerce de l’hypermarché cible que de l’ensemble immobilier. Concentrant son argumentation sur la question de l’évolution de l’état matériel de l’ensemble de La Batelière, le groupe Parfait conteste, tout d’abord, le point de référence retenu par les services d’instruction pour apprécier l’état du site, à savoir le moment des prises de contrôle par le groupe Parfait de l’hypermarché et du centre commercial cibles au mois d’avril 2020. À cet égard, il considère qu’il serait plus approprié de se fonder sur un audit bâtimentaire réalisé, à la demande d’un cessionnaire potentiel, au mois de février 2023. Ensuite, le groupe Parfait remet en cause les constatations des rapporteurs en lien avec la mise en œuvre de l’engagement de préservation, notamment lors de leur visite sur place au mois de décembre 2024. Il produit, entre autres, des constats d’huissier du 10 décembre 2024 et du 19 juillet 2025 présentant notamment une captation d’images par drone projetée lors de la séance. Enfin, le groupe Parfait avance un certain nombre de dépenses réalisées sur le site pour démontrer son intention de préserver les actifs repris.

Appréciation de l’Autorité

235. Les différents arguments invoqués par le groupe Parfait doivent être écartés pour les raisons exposées ci-après.

236. Premièrement, il convient de rappeler que la clause 7 des engagements prévoyait deux obligations de préservation distinctes stipulant, d’une part, que « la Partie Notifiante s’engage à préserver la valeur tant du Fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial » et, d’autre part, que de « manière générale » « la Partie Notifiante s’assurera que le Fonds de commerce non exploité à ce jour demeurera en état » (voir les paragraphes 28 à 30 ci-dessus)

237. L’état qui est visé dans la seconde obligation, dans lequel le « Fonds de commerce non exploité à ce jour » doit demeurer, fait référence à celui qui était le sien au moment de sa prise de contrôle par le groupe Parfait, intervenue le 30 avril 2020. Cet état de référence ne saurait ainsi correspondre à une situation postérieure, contrairement à ce qu’affirme le groupe Parfait.

238. En effet, certaines circonstances particulières de l’opération de concentration doivent être prises en compte. Tout d’abord, celle-ci a été réalisée de manière anticipée par rapport à la décision d’autorisation de l’Autorité. Comme exposé au paragraphe 8 ci-avant, le groupe Parfait a bénéficié d’une dérogation à l’effet suspensif, conformément au deuxième alinéa de l’article L. 430-4 du code de commerce, qui était notamment assortie de la condition que le groupe Parfait s’abstienne de « tout acte » qui serait « de nature à modifier la structure de l’opération » pendant toute la période précédant la décision finale de l’Autorité. Comme exposé au paragraphe 12 ci-avant, le chef du service des concentrations écrivait au groupe Parfait le 20 janvier 2021 « [qu’]en l’état, une absence d’exploitation commerciale du magasin cible et d’investissement dans ce magasin de votre part engendre un risque de dépréciation et de perte d’attractivité et est donc de nature à modifier la structure de l’opération telle qu’elle ressort de votre demande. Plus particulièrement, il apparait que le périmètre du fonds de commerce concerné par l’opération pourrait se trouver considérablement affecté en l’absence de toute exploitation commerciale, notamment du fait de la disparition de sa clientèle. Au surplus, la dégradation de la situation du magasin cible pourrait aujourd’hui entraver la capacité de l’Autorité à, par exemple, imposer des remèdes voire interdire l’opération, si elle considérait, à l’issue de l’analyse approfondie, que l’opération porte atteinte à la concurrence »196.

239. Ainsi, au cas présent, le contexte dans lequel les engagements souscrits par le groupe Parfait, dont en particulier leur clause 7, se caractérisait par le fait que (i) la concentration avait déjà été réalisée de façon anticipée à la condition que le groupe Parfait s’abstienne de modifier la structure de l’opération jusqu’au moment de l’adoption de la décision finale par l’Autorité et (ii) alors que l’Autorité nourrissait des craintes spécifiques liées à la situation de non-exploitation commerciale de l’hypermarché cible par le groupe Parfait et au risque d’absence d’investissements, qui avaient déjà été considérés par l’Autorité comme engendrant un risque de dépréciation et de perte d’attractivité, de nature à modifier la structure de l’opération.

240. C’est donc bien à la lumière de ces circonstances particulières que doivent être lues les obligations prévues à la clause 7 des engagements et, tout particulièrement, celle du maintien en état du fonds de commerce. Cette dernière mettait ainsi à la charge du groupe Parfait, dans la continuité de la condition qui assortissait la dérogation qui lui avait été accordée préalablement, la responsabilité particulière d’assurer la préservation de l’état de l’hypermarché cible en dépit de son inexploitation persistante, dès lors qu’il en conserverait encore le contrôle jusqu’à sa cession à un repreneur tiers.

241. Il est encore noté que l’Autorité n’aurait pas pu accepter les engagements proposés par le groupe Parfait si celui-ci n’avait pas fourni une telle assurance, dans la continuité de la lettre de dérogation. En effet, en toute hypothèse, dès lors que le groupe Parfait était amené à conserver le contrôle de l’hypermarché après la décision d’engagement jusqu’à sa cession effective à un tiers, mais que la condition assortissant la dérogation ne pouvait plus produire ses effets, cela aurait conduit potentiellement à créer une situation permettant qu’une partie notifiante puisse vider de son effet utile un remède structurel (en l’occurrence la cession de l’hypermarché) en tirant un avantage indu d’une réalisation anticipée au sens de l’article L. 430-4 du code de commerce.

242. En l’espèce, l’argument du groupe Parfait selon lequel l’audit bâtimentaire réalisé au mois de février 2023 pour le compte d’un cessionnaire potentiel devrait servir de situation deréférence pour apprécier la mise en œuvre de l’engagement de préservation quant à l’évolution de l’état matériel du site La Batelière, au motif qu’il serait proche de la date de la décision d’autorisation, doit être écarté. Un audit effectué près de trois ans après la prise de contrôle ne saurait, en effet, être retenu comme point de départ sans méconnaître l’objectif même de l’engagement, lequel visait à répondre à des craintes spécifiques liées à l’inexploitation de l’hypermarché depuis sa reprise au mois d’avril 2020 et qui restaient d’actualité au moment de l’adoption de la décision d’autorisation.

243. Deuxièmement, même si le groupe Parfait dans ses observations a largement consacré son argumentation à la seule question de l’évolution de l’état matériel, l’appréciation de l’exécution de l’engagement de préservation ne saurait être réduite à cette seule dimension. En effet, s’agissant d’un hypermarché situé dans un centre commercial, cette appréciation recouvre nécessairement également les éléments, incorporels et corporels, et leurs caractéristiques commerciales. En outre, la clause 3 des engagements (voir le paragraphe 29ci-avant) établissait un périmètre précis dans lequel le fonds de commerce devait être cédé, ce qui constitue une autre dimension à l’aune de laquelle la mise en œuvre de l’engagement de préservation doit être analysée.

244. En conséquence, l’appréciation de la mise en œuvre de l’engagement de préservation doit tenir compte de l’évolution des caractéristiques de l’hypermarché et du centre commercial cibles ainsi que de l’évolution de leur état matériel.

245. Troisièmement, il ressort des constatations détaillées ci-avant qu’à plusieurs égards le groupe Parfait n’a préservé ni le fonds de commerce ni le centre commercial cibles.

246. En premier lieu, le périmètre de l’hypermarché cible a été considérablement altéré depuis le mois d’avril 2020, cela à plusieurs titres.

247. Tout d’abord, il ressort des éléments du dossier que cette altération a affecté les éléments incorporels du fonds de commerce au point d’en remettre en cause l’existence. À ce titre, le groupe Parfait a proposé à l’agrément de l’Autorité notamment deux candidats qui projetaient non pas de reprendre le fonds de commerce, mais son seul droit au bail, dès lors que ces derniers tenaient le fonds de commerce pour désormais inexistant en raison de sa fermeture prolongée, de la disparition de stocks et de l’absence de clientèle rattachable197. Par ailleurs, l’autorisation CDAC de l’hypermarché cible a, quant à elle, été rendue caduque le 30 avril 2023 du fait d’une inexploitation durant trois années consécutives198 et n’a été récupérée que le 25 juillet 2025, un mois après une demande faite en ce sens par le groupe Parfait (le 24 juin 2025). Dans l’intervalle, l’hypermarché cible ne pouvait donc plus être exploité commercialement du point de vue administratif. Le groupe Parfait s’est montré négligent ou défaillant à cet égard en ne procédant pas à une réouverture « a minima » pour éviter la perte de cette autorisation199. En outre, il est constaté que, compte tenu du fait que la clause 3 des engagements prévoit expressément que la « cession portera sur un Fonds de commerce, d’une surface de 2 693 m² », le service des concentrations n’aurait aucunement pu se prononcer sur l’opportunité de la décision du groupe Parfait et que, en tout état de cause, l’Autorité n’a été saisie d’aucune demande de réexamen visant à ce que l’hypermarché puisse être cédé sous un format de magasin inférieur à 2 500 m². Il apparait encore que, selon la pratique décisionnelle établie de l’Autorité, une telle surface inférieure à 2 500 m² correspond aux surfaces habituelles des supermarchés, tandis que les engagements souscrits dans la décision d’autorisation devaient en particulier remédier à un problème de concurrence sur le marché regroupant l’offre en hypermarchés dans la zone de la plaine foyalaise (voir le paragraphe 22 ci-avant).

248. Ensuite, il apparait que, parmi les éléments corporels du fonds de commerce, plusieurs actifs matériels (caddies, éviers, caisses, etc.) ont disparu ou ont été rendus non-opérationnels.

249. Enfin, en ce qui concerne les ressources humaines de l’hypermarché cible, celles-ci ont été considérablement réduites entre les mois d’avril 2020 et de septembre 2025, passant de 78 à [confidentiel] employés sous contrat avec la société d’exploitation du fonds de commerce (Socobatelière).

250. Pourtant, la clause 3 des engagements prévoyait bien que le « Fonds de commerce […] sera cédé en tous ses éléments corporels et incorporels, avec l’ensemble de ses accessoires, tels que définis par [le jugement du 30 avril 2020 du Tribunal mixte de commerce de Fort-de-France arrêtant le plan de cession des actifs de la société H Alimentation] » et, qu’à ce titre, devaient notamment être cédés toutes « les immobilisations corporelles et incorporelles du Fonds de commerce, figurant dans la désignation des biens par le Tribunal mixte de commerce de Fort de France qui contribuent au fonctionnement actuel ou sont nécessaires pour garantir la viabilité et la compétitivité du Fonds de commerce », « les licences, permis et autorisations délivrées par les organismes et administrations compétentes au bénéfice du Fonds de commerce », « les contrats, baux, engagements et commandes de clients en cours dans le cadre de l’exploitation du Fonds de commerce, pour autant qu’ils soient cessibles », ainsi que les « contrats de travail du Personnel ».

251. En deuxième lieu, les caractéristiques commerciales de l’hypermarché et du centre commercial cibles ont été dégradées.

252. En effet, d’une part, initialement le groupe Parfait avait pris le contrôle le 30 avril 2020 d’un hypermarché sous enseigne nationale, qui était fermé depuis moins de trois mois (depuis le 9 février 2020), qui offrait certains services tels que des services de poissonnerie et de traiteur, et qui était situé dans un centre commercial animé et fréquenté, ainsi que rappelé ci-avant. Or, l’hypermarché cible a été maintenu fermé depuis sa reprise au mois d’avril 2020, a perdu ses capacités à offrir lesdits services et a connu une baisse considérable de son attractivité pour les consommateurs, pour les commerçants de la galerie commerciale comme pour les preneurs de baux commerciaux. De ce fait, de nombreux commerces ont fermé ou éprouvent de graves difficultés financières. En outre, cette situation est aggravée par le fait que le groupe Parfait, a considérablement réduit ou supprimé les services assurés dans le centre commercial, tels que le ménage, l’entretien, la sécurité ou encore les animations, le centre étant largement perçu comme laissé à l’abandon.

253. D’autre part, dans ses observations, le groupe Parfait a contesté le fait que l’hypermarché cible puisse être considéré comme ayant été en état d’être exploité au moment où il en a pris le contrôle. Selon lui, l’hypermarché avait alors subi plusieurs mouvements de grève depuis le début de l’année 2020 et était resté fermé depuis le début du mois de février 2020. Unreportage télévisé versé au dossier, diffusé au mois septembre 2019, intitulé « Casino Géant : les étals se vident », en attesterait.

254. Cependant, un tel argument n’apparait pas fondé en fait. En effet, si l’hypermarché cible a bien fait l’objet d’une fermeture dès le 9 février 2020 (comme cela est indiqué dans les engagements), à la suite d’un mouvement de grève, il n’en résulte pas qu’il n’était plus en état d’être exploité. Au contraire, il ressort du jugement du 30 avril 2020 du tribunal mixte de commerce de Fort-de-France, arrêtant le plan de cession des actifs de la société H Alimentation, que l’hypermarché cible disposait alors d’actifs corporels et incorporels. Il bénéficiait notamment d’une autorisation CDAC, d’un bail commercial, d’actifs matériels, de ressources humaines et d’un fichier clientèle, qui lui permettaient d’être exploité immédiatement sous réserve d’un réapprovisionnement (le stock laissé par l’ancien exploitant n’a pas été repris par le groupe Parfait qui l’a qualifié d’extrêmement bas). D’ailleurs, il ressort du jugement du 30 avril 2020 que le projet de reprise, qui était porté par le groupe Parfait, visait à améliorer l’existant dès lors qu’il visait à acquérir le fonds de commerce avec l’objectif « [d’]améliorer » la rentabilité de l’hypermarché cible « grâce à l’implantation d’une nouvelle enseigne plus attractive » et la « mise en place d’un drive »200. De plus, la cession au groupe Parfait s’est faite en vertu de l’article L. 642-1 du code de commerce prévoyant que la cession de l’entreprise a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles d’exploitation autonome201. Enfin, le reportage télévisé mentionné par le groupe Parfait montre des rayons normalement achalandés, des personnels affairés, et un hypermarché en état d’exploitation.

255. Il résulte de ce qui précède que les caractéristiques de l’hypermarché et du centre commercial cibles ont effectivement été dégradées. Or, le groupe Parfait s’était engagé tant « à préserver la valeur tant du Fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial » qu’à s’assurer de manière générale « que le Fonds de commerce non exploité à ce jour demeurera en état » (clause 7 des engagements).

256. En troisième lieu, l’état matériel de l’hypermarché et du centre commercial cibles a été dégradé.

257. Tout d’abord, ainsi que rappelé aux paragraphes 153 et 154 ci-avant, alors que le groupe Parfait affirme avoir procédé à d’importants travaux de rénovation, d’entretien et de nettoyage, les factures qu’il a produites au soutien de cette affirmation se rapportent essentiellement aux années 2020 et 2021, période au cours de laquelle le groupe Parfait envisageait d’exploiter le fonds de commerce, et sont peu étoffées par la suite. Le groupe Parfait reconnait lui-même avoir arrêté de réaliser des travaux pour le site La Batelière. Un de ses dirigeants a ainsi déclaré « [qu’]une fois que le groupe Parfait a compris qu’il ne pourrait pas lui-même exploiter cet hypermarché, il a décidé d’arrêt[er] de faire des travaux »202.

258. À cet égard, le groupe Parfait a indiqué dans ses observations « [qu’]il avait été expressément prévu dans la première documentation contractuelle signée avec le groupe Sainte Claire que, dorénavant des travaux supplémentaires ne devaient plus être engagés par le Groupe Parfait »203. Cette clause avait été prévue car la cession en question portant sur la société propriétaire de l’ensemble immobilier (Sococonseils), le coût des travaux aurait été susceptible in fine de reposer sur le cessionnaire. Du fait de cette clause contractuelle signée dans le cadre du processus de négociation avec le groupe Sainte Claire au premier semestre 2023, le groupe Parfait n’aurait eu d’autre choix que de cesser tous travaux sur le site.

259. Or, le groupe Parfait, par ailleurs tenu par les engagements pris devant l’Autorité incompatibles avec une telle clause, aurait dû refuser d’y souscrire.

260. Dans ses observations, le groupe Parfait a encore indiqué avoir investi un montant de [50 000-100 000] euros au mois de mai 2025, pour remplacer les portes automatiques et les rideaux métalliques du centre commercial. Néanmoins, le document produit et présenté comme étant une « facture » apparait en fait n’être qu’une « situation », émise par une société de menuiserie, filiale du groupe Parfait, dont il ressort un état d’avancement partiel de [0 - 25 000] euros et certaines prestations qui sont libellées « en attente »204.

261. Enfin, d’une part, ainsi que rappelé au paragraphe 157 ci-avant, il ressort du rapport de constatations du 6 février 2025 que l’hypermarché cible n’est globalement plus fonctionnel en l’état, 68 % de ses éléments s’étant avérés a minima partiellement non-fonctionnels. Un constat similaire a été opéré relativement aux autres zones du centre commercial cible, confirmé par plusieurs témoignages recueillis au cours de l’instruction.

262. Ainsi, l’état matériel de l’hypermarché cible s’est significativement dégradé depuis sa prise de contrôle par le groupe Parfait au mois d’avril 2020. Cette dégradation matérielle induit des délais significatifs supplémentaires de réouverture compte tenu de la nécessité de réaliser des travaux préalables de remise en état, en particulier dans les zones techniques (laboratoires et chambres froides), d’aménagements, de fourniture et d’installation de nouveaux équipements avant toute nouvelle exploitation. Ces travaux de remise en état seront nécessairement longs, coûteux et importants (de fait, le groupe Sainte Claire, auquel l’hypermarché et le centre commercial cibles ont été cédés le 9 septembre 2025, prévoit une réouverture de l’hypermarché au printemps 2026). S’agissant des autres zones du centre commercial cible, les extérieurs ainsi que les entrées, en particulier, apparaissent aujourd’hui très dégradés.

263. D’autre part, le groupe Parfait remet en cause la matérialité des constatations opérées par les rapporteurs. Dans un premier temps, en ce qui concerne la détermination de l’état matériel de référence, le rapport de constatations n’en fournirait qu’une « description contestable ». Le groupe Parfait a ainsi déclaré que205 « [l]a réalité est qu’il n’y a pas eu d’état des lieux au moment de l’entrée en jouissance et que personne n’est en mesure de pouvoir définir avec objectivité l’état du bâtiment et du site, autrement que par des affirmations péremptoires, et non probantes », que la « seule certitude » est « [qu’il] a dû entamer des travaux de remise en état significatifs pour remettre en état certaines installations ». Le groupe Parfait a encore produit sept photographies provenant d’un constat d’huissier de 2020 et d’une agence de mise en conformité en 2018 (dont il s’est servi pour effectuer une comparaison avec quatre photographies provenant d’un procès-verbal d’huissiers faites au mois de décembre 2024). Il a également soutenu en séance qu’un audit bâtimentaire réalisé au début de l’année 2023 à la demande d’un cessionnaire potentiel devrait servir de point de référence pour l’état matériel. Dans un second temps, en ce qui concerne la détermination de l’évolution de l’état matériel, le groupe Parfait conteste le fait que celle-ci s’apparente à une dégradation. À cet effet, il s’appuie sur un constat d’huissier réalisé le 10 décembre 2024206 et une vidéo filmée par un commissaire de justice le 19 juillet 2025207 qui l’infirmerait.

264. En l’occurrence, les rapporteurs ont établi des procès-verbaux et des rapports dans le cadre de l’instruction et de leurs enquêtes, en application des articles L. 450-1 et L. 450-2 du code de commerce. Leurs conclusions ont été établies sur la base d’un faisceau d’indices graves, précis et concordants, notamment les quelques photographies et images pertinentes transmises par le groupe Parfait en réponse à une demande d’information. Or, le groupe Parfait n’a apporté aucun élément remettant en cause les constatations des services d’instruction sur l’état matériel de référence, de 2020. En particulier, les sept photographies produites par le groupe Parfait dans ses observations ne sont pas de nature à remettre en cause le faisceau d’indices. En effet, celles-ci sont produites par le groupe Parfait afin de « constater les travaux qui ont été réalisés ; rénovation du carrelage, mise en peinture et rénovation des plafonds »208, or ce point n’a pas été contesté dans le rapport.

265. S’agissant de la question de l’appréciation de l’évolution de l’état matériel, le groupe Parfait a produit un constat d’huissier et une vidéo. Or, ses différentes productions se rapportent en réalité à des éléments distincts, qu’il s’agisse d’actifs ou de zones du site de La Batelière. Plus particulièrement, le constat d’huissier, établi le 10 décembre 2024209, est intervenu alors que le site n’était pas dans son état habituel, mais à la suite d’un ménage intensif lors du week-end précédent évoqué auparavant, et d’autre part, ne retient pas les angles de vue portant sur les zones dégradées dénoncées par les services d’instruction. Il en va de même de la captation d’images vidéo par drone le 19 juillet 2025210, qui se limite à une vue extérieure très superficielle du site, de la galerie commerciale et de la surface de vente de l’hypermarché. Elle n’apporte aucun élément sur l’état de fonctionnement des actifs, ni sur l’état des zones non filmées telles que les réserves, chambres froides (positives ou négatives), bureaux, ou encore les cellules commerciales inoccupées de la galerie commerciale. En outre, le constat d’huissier comme la captation vidéo apparaissent comme étant considérablement moins détaillés que les constatations des rapporteurs. Ainsi, les éléments produits par le groupe Parfait sont non seulement partiels et ciblés, mais également inopérants pour remettre en cause ces constatations. Au surplus, il apparait que ces dernières sont corroborées par d’autres éléments du dossier, en particulier par plusieurs témoignages attestant de l’état matériel dégradé.

266. Il résulte de ce qui précède que le groupe Parfait n’a pas apporté de preuve de nature à remettre en cause les constatations de l’état matériel dégradé de l’hypermarché et du centre commercial cibles. Or, comme cela a déjà été exposé, le groupe Parfait s’était engagé non seulement « à préserver la valeur tant du Fonds de commerce que de l’ensemble immobilier abritant le centre commercial » mais également à s’assurer de manière générale « que le Fonds de commerce non exploité à ce jour demeurera en état » (clause 7 des engagements).

Conclusion

267. Au regard des éléments exposés ci-dessus, le groupe Parfait n’a pas respecté, à plusieurs titres, l’engagement de préservation de la valeur prévu à la clause 7 des engagements.

268. En conséquence, l’Autorité constate, au sens du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, l’inexécution de cet engagement par le groupe Parfait.

d) Le non-respect de l’engagement de coopération

Arguments du groupe Parfait

269. Le groupe Parfait conteste avoir entravé l’office du mandataire dans l’exercice de ses missions et avance, à ce titre, plusieurs arguments. Premièrement, le mandataire n’aurait pas été nommé tardivement, d’autant qu’aucune date limite de nomination n’était précisée par les engagements. Deuxièmement, le groupe Parfait recense dans ses observations au moins 750 échanges entre le mandataire et l’un de ses conseils, voire, comme indiqué en séance, « plus de 1435 mails [qui] ont été envoyés par [confidentiel] sans compter les appels téléphoniques, sms et messages Whatsapp », ce qui démontrerait une bonne coopération entre le groupe et le mandataire. Troisièmement, le groupe Parfait dément avoir omis de communiquer ou d’avoir communiqué tardivement des informations essentielles pour la réalisation des missions du mandataire. Quatrièmement, le groupe Parfait estime avoir fait preuve de coopération avec le mandataire en lui adressant un grand nombre de factures en réponse à ses demandes. Cinquièmement, le groupe justifie le fait de ne pas avoir convié le mandataire à toutes les réunions portant sur le volet immobilier des négociations par le fait que l’immobilier ne faisait pas partie du périmètre de la mission du mandataire, d’une part, et qu’une telle mission du mandataire ne serait pas licite, dès lors que le cabinet du mandataire ne dispose pas d’une carte professionnelle spécifique aux agents immobiliers. Sixièmement, le groupe Parfait a avancé, en séance, que le mandataire aurait lui-même manqué à de multiples reprises à ses obligations, notamment en ne cherchant pas activement des repreneurs potentiels ou en ne proposant pas de solution.

Appréciation de l’Autorité

270. Les différents arguments invoqués par le groupe Parfait doivent être écartés pour les raisons exposées ci-après.

271. À titre liminaire, il convient de rappeler que, comme l’Autorité a eu l’occasion de préciser dans la décision n° 24-D-03 du 15 mars 2024, « le respect de l’obligation de coopération avec le Mandataire ne saurait s’apprécier uniquement à l’aune du nombre d’échanges ou de réunions tenues mais à la lumière du comportement de Google s’agissant des points structurants de sa relation avec le Mandataire »211. Le contrôle de la mise en œuvre de cette obligation requiert ainsi une appréciation qualitative de la nature de la coopération, notamment s’agissant de la réactivité de la partie notifiante, de l’accessibilité de ses interlocuteurs, de la lisibilité des données transmises, ainsi que de son aptitude à anticiper ou résoudre les difficultés susceptibles d’affecter la mise en œuvre des engagements.

272. Par ailleurs, les points 433 à 435 des lignes directrices relatives au contrôle des concentrations précisent que « [l]a partie notifiante apporte au mandataire chargé du suivi des mesures correctives coopération et assistance administrative et de gestion en lui fournissant toute information requise pour l’accomplissement de ses tâches. Le mandataire peut proposer à la partie notifiante toute mesure qu’il considère nécessaire pour assurer le respect des mesures correctives. La partie notifiante est seule responsable de la mise en œuvre des mesures correctives. Il appartient à la partie notifiante de se rapprocher du service des concentrations en cas de difficulté anticipée ou constatée ».

273. Ainsi, le mandataire ne peut en aucun cas être considéré comme un supplétif de la partie notifiante. Il n’a ni vocation ni mandat pour pallier ses carences. Il agit en qualité d’intermédiaire indépendant entre la partie notifiante et l’Autorité, chargé de contrôler la bonne exécution des engagements, d’identifier toute difficulté et d’en assurer le suivi vis-à-vis du service des concentrations.

274. Ces principes ayant été rappelés, il convient de souligner, premièrement, s’agissant de la date de nomination du mandataire, qu’il est exact, comme le relève le groupe Parfait, que l’engagement ne fixait pas de date limite de désignation du mandataire. Toutefois, sa nomination, intervenue le 13 mars 2023, soit 2 mois et 22 jours après la décision d’autorisation de l’Autorité, apparait très tardive compte tenu de l’avancée des négociations avec le groupe Sainte Claire à cette date, de la courte durée de la première période de cession (cinq mois) et de l’objectif de cession dans un délai total de neuf mois. Une désignation plus rapide et un suivi plus diligent de sa finalisation par le groupe Parfait auraient pu contribuer à assurer l’efficacité de la procédure et à préserver le respect des engagements souscrits.

275. Deuxièmement, la quantité des échanges entre le groupe Parfait et le mandataire ne saurait démontrer la qualité de la coopération. En l’espèce, au contraire, elle illustre une absence de coopération effective. Le mandataire a dû en effet réitérer à plusieurs reprises les mêmes demandes de documents, témoignant non pas d’un dialogue fluide mais d’un manque de coopération et de réactivité de la part du groupe Parfait.

276. Troisièmement, il ressort des éléments du dossier que le groupe Parfait a communiqué tardivement, voire omis de communiquer, des informations pourtant essentielles à la réalisation des missions du mandataire.

277. S’agissant des communications en lien avec l’information relative à l’autorisation CDAC de l’hypermarché cible, en dépit de la déclaration du groupe Parfait selon laquelle « ni le groupe Parfait ni leurs conseils n’ont le souvenir de ne pas avoir informé le mandataire », il ressort du dossier que le mandataire n’a pas été informé, de manière claire et documentée, de la problématique liée à l’autorisation CDAC, pourtant susceptible d’affecter directement la cession du fonds de commerce. Ce manquement participe d’une mise à l’écart du mandataire, en particulier sur des éléments cruciaux susceptibles d’influer, directement ou indirectement, la cession du fonds de commerce et donc la mise en œuvre de l’engagement de cession.

278. Quatrièmement, il ressort de rapports du mandataire et de son audition que le groupe Parfait n’a pas permis au mandataire d’exploiter utilement les informations transmises. Le mandataire a ainsi indiqué à plusieurs reprises avoir reçu, en réponse à ses demandes de factures pour suivre le respect de l’engagement de préservation de la valeur du fonds de commerce et de l’ensemble immobilier, de très nombreux documents non triés, sans indication claire quant à leur rattachement au fonds de commerce ou au centre commercial, rendant leur analyse longue et fastidieuse.

279. Ce comportement a perduré après la notification du rapport, comme l’a indiqué le mandataire dans ses rapports du 15 juillet 2025et du 9 septembre 2025. Ainsi, les échanges de courriels du 23 juin 2025 entre le mandataire et le groupe Parfait ainsi que les rapports mensuels des mois de juillet et de septembre 2025 montrent que le mandataire a dû relancer le groupe Parfait pour obtenir des informations déjà demandées et, par ailleurs, a reçu transmission de réponses multiples et éparses en réponse à ces demandes.

280. À cet égard, le groupe Parfait ne saurait utilement se défendre en faisant valoir qu’il aurait transmis un grand nombre de documents en réponse aux demandes ou que les informations sollicitées figuraient dans une data room mise en place au mois de février 2025. En effet, il lui appartenait de répondre de manière précise aux questions posées, en identifiant clairement les documents essentiels et pertinents, afin de permettre au mandataire d’exercer efficacement sa mission. La simple mise à disposition d’un volume important de documents, sans tri, ni orientation, ne saurait être assimilée à une coopération active et loyale, telle qu’exigée dans ce cadre.

281. Cinquièmement, s’agissant de l’exclusion du mandataire des négociations portant sur le volet immobilier des projets de reprise, il convient tout d’abord de rappeler que, bien que la mission du mandataire ait été formellement limitée à la cession de l’hypermarché, il ressort du dossier que l’ensemble des candidats repreneurs (à l’exception du groupe Créo) ont subordonné la reprise de l’hypermarché cible à celle de l’immobilier (soit par l’acquisition des titres de la société Sococonseils, soit dans le cadre d’une opération immobilière « pure »). Dans ce contexte, la participation du mandataire aux réunions relatives au volet immobilier, sans qu’il dispose pour autant d’un pouvoir décisionnel, apparaissait indispensable à la conduite effective de sa mission. Ensuite, l’argument selon lequel le mandataire ne disposait pas d’une carte professionnelle d’agent immobilier est dénué de pertinence dans la mesure où il ne s’agissait pas pour lui d’exercer une activité d’intermédiation immobilière, mais de participer aux négociations immobilières dans le cadre de son suivi de la mise en œuvre de l’engagement de cession. En effet, le déroulement des négociations portant sur le volet immobilier revêtait un intérêt direct pour le suivi de la mise en œuvre de l’engagement de cession. En refusant au mandataire l’accès à ces négociations, le groupe Parfait l’a ainsi empêché d’exercer pleinement sa mission.

282. Enfin, le groupe Parfait ne saurait justifier l’absence de coopération avec le mandataire par le fait que ce dernier aurait, lui aussi, manqué à ses obligations, notamment en ne cherchant pas activement des repreneurs ou en ne proposant pas de solution ou modification des actes de cession. En effet, les carences du mandataire, fussent-elles avérées ce qui n’est pas démontré en l’espèce, sont sans effet sur la responsabilité du groupe Parfait, seul tenu de la mise en œuvre des engagements et auquel il appartenait de se rapprocher de l’Autorité pour signaler toute difficulté identifiée dans leur suivi. À cet égard, les engagements prévoyaient à la clause 22 que, « [s]i un Mandataire cesse d’accomplir ses fonctions au titre des Engagements ou pour tout autre motif légitime, y compris pour des raisons de conflit d’intérêts du Mandataire : - L’Autorité pourra, après avoir entendu le Mandataire, exiger que la Partie Notifiante remplace le Mandataire ; ou - La Partie Notifiante pourra, avec l’autorisation préalable de l’Autorité, remplacer le Mandataire en cause ». Or, l’Autorité n’a été saisie d’aucune demande du groupe Parfait en ce sens.

283. Au demeurant, les critiques formulées à l’encontre du mandataire apparaissent infondées. En effet, ce dernier a relancé, sans délai, l’ensemble des candidats repreneurs dès qu’il a été informé du retrait du groupe Créo, le 4 novembre 2024. Par ailleurs, le groupe Parfait n’a pas donné suite aux recommandations émises par le mandataire au mois de janvier 2024 pour tenter de débloquer la situation avec le groupe Sainte Claire. Enfin, en ayant expressément écarté le mandataire des négociations portant sur le volet immobilier des projets de reprise, le groupe Parfait ne saurait lui reprocher de ne pas avoir modifié les projets d’acte de cession en conséquence.

Conclusion

284. Au regard des éléments exposés ci-dessus, le groupe Parfait n’a pas respecté l’engagement de coopération prévu à la clause 21 des engagements annexés à la décision autorisation.

285. En conséquence, l’Autorité constate, au sens du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, l’inexécution de l’engagement de coopération par le groupe Parfait.

C. IMPUTABILITÉ

286. Il résulte des dispositions du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce que les sanctions prononcées par l’Autorité sont infligées « aux personnes auxquelles incombait l’obligation non exécutée ».

287. En l’espèce, les engagements ont été souscrits par la partie notifiante, le groupe Parfait, dont la société « tête de groupe » est la société Monyv, dont le siège social est sis c/o Lextenso, 12 Place Dauphine, 75001 Paris, et qui est immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 421 594 896. Il y a donc lieu d’imputer les non-respects d’engagements à cette dernière. Ce point n’est pas contesté.

D. SANCTIONS

288. Après un rappel des règles applicables (1) et la présentation du choix des mesures correctives et de l’opportunité d’imposer plusieurs sanctions (2), seront examinés les éléments d’appréciation au cas d’espèce (3) et le montant final des sanctions (4).

1. SUR LE RAPPEL DES RÈGLES APPLICABLES

289. Selon les dispositions du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, si l’Autorité « estime que les parties n’ont pas exécuté dans les délais fixés une injonction, une prescription ou un engagement [elle] constate l’inexécution ». Elle peut alors décider de retirer la décision d’autorisation ou « [e]njoindre sous astreinte (…) aux parties auxquelles incombait l’obligation non exécutée » d’exécuter cette dernière ou des injonctions ou prescriptions se substituant à l’obligation non exécutée.

290. Selon les mêmes dispositions, l’Autorité peut aussi « infliger aux personnes auxquelles incombait l’obligation non exécutée une sanction pécuniaire qui ne peut dépasser le montant défini au I », à savoir, « pour les personnes morales, de 5 % du chiffre d’affaires réalisé en France lors du dernier exercice clos, augmenté le cas échéant, de celui qu’a réalisé en France durant la même période la partie acquise ».

291. Pour identifier les mesures, parmi celles prévues par ces dispositions, qu’appelle une inexécution des engagements de la décision d’autorisation, l’Autorité prend en compte l’ensemble des circonstances de l’espèce. Elle examine notamment la nature des manquements constatés, en appréciant leur gravité et l’atteinte à la concurrence que la décision d’autorisation avait pour objet de prévenir. L’Autorité peut également prendre en compte la nature des engagements souscrits, leur importance dans l’économie générale de la décision d’autorisation, ou encore le temps écoulé depuis l’opération de concentration et la durée des engagements restant à courir à la date à laquelle elle statue212.

292. Lorsque l’Autorité prononce une sanction sur le fondement des dispositions du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, elle doit s’assurer que celle-ci est proportionnée aux circonstances de l’espèce.

293. Dans ce contexte, elle peut prendre en compte, si elles sont établies, les éventuelles difficultés particulières que les parties allèguent avoir rencontrées pour exécuter leurs obligations : « dans le cadre d’une procédure de sanction pour manquements, les parties sanctionnées peuvent, pour soutenir que les manquements commis ne justifiaient pas la sanction prononcée, faire valoir des difficultés particulières qu’elles auraient rencontrées pour respecter leurs engagements »213. Toutefois, la nature spécifique du manquement tenant au non-respect d’engagements souscrits dans le cadre de l’autorisation d’une opération de concentration doit être prise en compte. Il importe ainsi que la sanction pécuniaire imposée en cas de non-respect d’engagements soit fixée à un niveau suffisant pour dissuader les entreprises concernées de ne pas exécuter leurs engagements ou de proposer sciemment des engagements difficilement exécutables214. L’entreprise ne doit pas être incitée à se livrer à un calcul économique consistant à proposer des engagements à l’Autorité en vue d’obtenir l’autorisation de la concentration, mais sans avoir l’intention de les exécuter effectivement ou de prendre les mesures nécessaires à cet effet.

294. Cette analyse a été confirmée par le Conseil d’État dans une décision du 7 novembre 2019, qui précise « [qu’]à la différence des sanctions que l’Autorité de la concurrence peut prononcer en application des dispositions précitées des 1°, 2° et 3° du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, la sanction financière qu’elle peut, en outre, infliger en cas d’absence de réalisation effective d’engagements pris par les parties à une opération de concentration a un objet purement répressif. Eu égard à cet objet, il incombe à l’Autorité de la concurrence, ainsi qu’au juge saisi d’un recours de pleine juridiction, d’apprécier la proportionnalité d’une telle sanction au regard de la gravité des manquements constatés, c’est-à-dire de l’importance des engagements non respectés dans l’ensemble des mesures correctrices adoptées afin de prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération de concentration, du comportement de l’entreprise dans la mise en œuvre des engagements souscrits ainsi que de sa situation particulière, notamment de sa situation financière »215.

295. En outre, s’agissant d’une infraction de nature procédurale, l’Autorité a eu l’occasion de préciser que « le non-respect d’un engagement pris à l’occasion de l’autorisation d’une opération de concentration revêt, par nature, un caractère particulièrement grave. En effet, ce manquement rompt l’équilibre qui avait conduit à autoriser l’opération sous condition, et porte atteinte, de ce seul fait, à l’ordre public économique et à la concurrence »216.

296. Par ailleurs, le Conseil d’État a indiqué, dans sa décision du 7 novembre 2019, que l’Autorité « n’était pas tenue de procéder à une analyse des conséquences des manquements constatés sur l’état de la concurrence ni de prendre en compte de tels éléments pour apprécier la gravité des manquements commis et prononcer une sanction financière »217.

2. SUR LE CHOIX DES MESURES CORRECTIVES ET L’OPPORTUNITÉ D’IMPOSER PLUSIEURS SANCTIONS

a) Le choix des mesures correctives

297. Comme rappelé au paragraphe 289, lorsqu’elle constate qu’un engagement n’a pas été respecté, l’Autorité peut décider de retirer la décision d’autorisation ou imposer des injonctions.

298. Au cas d’espèce, l’Autorité a constaté que le groupe Parfait n’a pas respecté son engagement de céder l’hypermarché cible dans un délai de neuf mois après la notification de la décision d’autorisation. Toutefois, l’hypermarché ayant finalement été cédé au groupe Sainte Claire le 9 septembre 2025, soit une semaine avant la séance, l’Autorité considère qu’il n’y a lieu ni de retirer la décision d’autorisation ni de recourir à une injonction.

299. Néanmoins, en raison de la gravité des manquements constatés, l’Autorité estime qu’il y a lieu de prononcer des sanctions pécuniaires.

b) L’opportunité de prononcer plusieurs sanctions

300. Il ressort de la pratique décisionnelle de l’Autorité en matière de pratiques anticoncurrentielles, ainsi que de la jurisprudence de la Cour de cassation, que l’Autorité peut imposer, à une même entreprise, plusieurs sanctions correspondant à plusieurs infractions218, en déterminant chacune d’elles en fonction des critères prévus par le code de commerce219.

301. En matière de non-respect d’engagements pris au titre du contrôle des concentrations, l’Autorité a déjà eu l’occasion de sanctionner, dans deux décisions distinctes, des manquements à plusieurs engagements pris par les parties notifiantes dans le cadre d’une même opération de concentration. L’Autorité a ainsi sanctionné le groupe Altice au mois d’avril 2016 puis au mois de mars 2017 pour la non-exécution de plusieurs engagements pris dans le cadre de l’opération de rachat, en 2014, de SFR par Numericable220.

302. Dans une décision du 31 mars 2017, le Conseil d’État a confirmé que c’était sans méconnaître le principe de légalité des délits et des peines que l’Autorité avait sanctionné le non-respect d’un engagement de préservation de valeur, le considérant comme étant constitutif d’un engagement à part entière dont le non-respect était susceptible, conformément au IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, d’être sanctionné dans la mesure où, « [q]uand bien même [l’engagement de préservation de valeur] constituait un engagement lié à celui du principe de la cession des activités de téléphonie mobile d’OMT à la Réunion et à Mayotte, il en était autonome »221. Dès lors, l’Autorité peut donc sanctionner séparément des manquements à l’exécution des engagements pris dans le cadre du contrôle des concentrations, dès lors que chaque engagement peut être considéré comme étant autonome.

303. Au cas d’espèce, bien qu’étant liés à l’engagement de cession de l’hypermarché cible, les engagements de préservation de la valeur et de coopération avec le mandataire peuvent, chacun, être considérés comme autonomes comme ceci a été développé ci-avant aux paragraphes 209 à 218. L’Autorité peut donc choisir de fixer trois sanctions distinctes, une pour chacun des manquements constatés.

304. Au cas d’espèce, les engagements avaient des objectifs bien distincts : (i) l’engagement de cession visait à rétablir au plus vite une concurrence suffisante sur le marché aval de la distribution en hypermarchés dans la zone foyalaise, (ii) l’engagement de préservation de la valeur visait à permettre au repreneur d’exploiter sans délai l’hypermarché cible, et (iii) l’engagement de coopération avec le mandataire visait à permettre un suivi efficace de la mise en œuvre des engagements. Pour cette raison, l’Autorité considère que les non-respects d’engagements ont des conséquences distinctes sur le marché et qu’il y a donc lieu de fixer trois sanctions distinctes.

3. SUR LES ÉLÉMENTS D’APPRÉCIATION AU CAS D’ESPÈCE

305. Compte tenu de ce qui précède, seront successivement abordés les déterminants spécifiques des sanctions pécuniaires des trois non-respects d’engagements constatés, afin d’en apprécier la proportionnalité au regard de la gravité des manquements constatés, du comportement du groupe Parfait dans la mise en œuvre des engagements souscrits ainsi que de sa situation particulière.

306. À titre liminaire, il est rappelé, s’agissant de la gravité, que le non-respect d’un engagement pris à l’occasion de l’autorisation d’une opération de concentration revêt, par nature, un caractère particulièrement grave dans la mesure où il rompt l’équilibre qui avait conduit à autoriser l’opération sous condition, et porte atteinte, de ce seul fait, à l’ordre public économique et à la concurrence. Dans cette mesure, l’Autorité considère que chacun des manquements constatés ci-avant se range parmi les infractions les plus graves au droit de la concurrence.

307. En outre, les inexécutions constatées apparaissent comme étant d’autant plus graves qu’elles concernent des engagements dont le groupe Parfait devait s’assurer qu’ils pourraient être mis en œuvre. Par ailleurs, le groupe Parfait avait bénéficié, dès le mois d’avril 2020, d’une dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations qui lui a permis de prendre le contrôle effectif de l’hypermarché cible sans attendre la décision de l’Autorité. L’atteinte à la concurrence identifiée par l’Autorité à l’issue de la procédure du contrôle des concentrations – qui suspend, en principe, ces potentiels effets – s’est ainsi produite dès le mois d’avril 2020, et non à partir du moment où la décision d’autorisation a été rendue par l’Autorité au mois de décembre 2022.

a) La sanction pécuniaire du non-respect de l’engagement de cession

La gravité des manquements constatés

308. Premièrement, l’engagement de cession constituait le principal remède aux risques concurrentiels identifiés, à savoir la réduction significative de la concurrence sur le marché aval de la distribution alimentaire dans la plaine foyalaise. En outre, il s’agit d’un remède structurel, privilégié par l’Autorité pour répondre aux problèmes de concurrence posés par une concentration excessive d’un marché, dans la mesure où les cessions d’actifs doivent permettre de rétablir, efficacement et rapidement, la structure concurrentielle du marché concerné.

309. Deuxièmement, tout d’abord, la mise en œuvre rapide de cet engagement était considérée comme essentielle par l’Autorité pour le rétablissement à brève échéance d’une concurrence effective, dans la mesure où l’opération avait été réalisée depuis le mois d’avril 2020, soit 2 ans et 8 mois avant la décision d’autorisation, en vertu de la dérogation accordée au groupe Parfait. Dès lors, les effets anticoncurrentiels identifiés de l’opération affectaient déjà la zone de chalandise concernée, notamment en matière de diversité de l’offre et de pression sur les prix, dans un contexte marqué par un coût de la vie particulièrement élevé dans les territoires ultramarins. L’engagement de cession visait donc à rétablir au plus vite des conditions normales de concurrence sur le marché.

310. Ensuite, la cession n’a pas eu lieu dans le délai de neuf mois, prévu dans les engagements pris par le groupe Parfait, mais le 9 septembre 2025, soit près de 24 mois après la date butoir. Le fait que l’hypermarché cible ait été cédé une semaine avant la séance ne saurait donc être considéré comme un facteur limitant la gravité du manquement, quand bien même il a permis la réalisation de l’engagement de cession.

311. Enfin, l’inexécution de l’engagement de cession a imposé, de façon indue, la prolongation de la fermeture de l’hypermarché cible et a ainsi pu affecter l’activité du centre commercial cible. En effet, la fermeture prolongée de l’hypermarché a pu priver les commerçants de ce centre d’un flux de consommateurs nécessaire à leur activé, comme l’a reconnu le groupe Parfait dans le cadre de sa demande d’autorisation CDAC (voir paragraphe 145 ci-avant). Cet effet potentiel de la fermeture prolongée de l’hypermarché cible avait été identifié par l’Autorité au paragraphe 32 de la décision d’autorisation : « l’équilibre économique d’un centre commercial d’une manière générale, et plus particulièrement celui du centre commercial Ozanam – La Batelière, dépend largement de la capacité de sa galerie commerçante à drainer un flux de clientèle qui profitera également à l’hypermarché et, réciproquement, de la capacité de l’hypermarché à être suffisamment attractif pour drainer un flux de clientèle qui profitera également à la galerie commerçante ».

312. Troisièmement, s’agissant des atteintes à la concurrence, l’Autorité considère qu’il n’est pas nécessaire de démontrer qu’un manquement a eu des effets réels sur la concurrence, même si la preuve de tels effets peut naturellement être prise en compte. C’est par rapport à l’objectif ayant conduit à la prise de l’engagement qu’il convient de raisonner : lorsqu’une décision d’autorisation rend obligatoire un engagement souscrit par une entreprise en vue de remédier à un risque d’atteinte à la concurrence identifié dans le cadre de l’analyse de l’opération, c’est dans le but de garantir qu’une telle atteinte ne puisse pas se matérialiser dans le futur.

313. Sur ce point, le groupe Parfait a avancé qu’il n’aurait pas profité de la fermeture prolongée de l’hypermarché, notamment à travers un éventuel report de clientèle vers son autre hypermarché, le Leclerc Rond-Point. Il convient toutefois de noter que la cession rapide de l’hypermarché cible aurait vraisemblablement conduit à une baisse du chiffre d’affaires du Leclerc du Rond-Point dans la mesure où la présence d’un troisième acteur dans la zone de chalandise aurait conduit à augmenter significativement la pression concurrentielle sur les hypermarchés Leclerc du groupe Parfait et Carrefour du groupe GBH présents dans cette zone.

314. Il ressort de ce qui précède qu’aussi bien en raison de sa nature intrinsèque que de l’importance de l’engagement concerné dans l’économie générale de la décision d’autorisation, l’inexécution de l’engagement de cession par le groupe Parfait revêt une gravité très importante.

Le comportement du groupe Parfait

315. Au cas présent, l’Autorité relève que, par ses comportements adoptés tout au long de la phase de mise en œuvre de l’engagement de cession, le groupe Parfait démontre qu’il n’a pas saisi la pleine portée de ses obligations et de la responsabilité qui lui incombaient.

316. L’Autorité rappelle que les engagements sont volontairement proposés par les parties à l’opération qui doivent donc s’assurer que leurs engagements peuvent effectivement être exécutés dans les délais souscrits, dès lors qu’ils conditionnent l’autorisation de l’opération.

En effet, il ressort de la décision n° 18-D-16 du 27 juillet 2018 que « [l]es entreprises sont donc tenues d’exécuter complètement, et avec la plus grande diligence, les engagements qu’elles ont souscrits et qui ont conditionné l’autorisation de l’opération de concentration.

Elles doivent à cet égard mettre tous les moyens en œuvre pour s’assurer de leur réalisation effective, dans les meilleurs délais, et en tout état de cause avant le terme de la période prévue »

317. Pour autant, des difficultés particulières totalement imprévisibles rendant plus difficile la mise en œuvre des engagements peuvent se présenter. L’entreprise peut alors se prévaloir de telles difficultés.

318. Dans ses observations en réponse au rapport, le groupe Parfait considère que le contexte social difficile (mouvement contre la vie chère) aurait été à l’origine de l’abandon de plusieurs projets de reprise et que « [c]’est donc à tort que les services d’instruction affirment qu’il n’existerait ‘‘aucune cause extérieure ni aucun cas de force majeure’’ qui aurait empêché ou compromis les négociations engagées avec les différents repreneurs alors qu’il est manifeste que la situation difficile en Martinique (Rapport, § 1137), notamment pour les GSA, a eu des conséquences préjudiciables dans les négociations engagées par le Groupe Parfait qui doivent être prises en compte »

319. S’il est vrai que les émeutes contre la vie chère en Martinique ont pu conduire des repreneurs à abandonner leur projet et mettre fin aux négociations avec le groupe Parfait, il convient de rappeler que ce mouvement a débuté au mois de septembre 2024, soit quasiment un an après la date butoir prévue par les engagements pour la cession de l’hypermarché cible.

320. Par ailleurs, il est faux d’affirmer, comme le fait le groupe Parfait, que « le nombre de repreneurs potentiels est très limité. En effet, le groupe Parfait a reçu plusieurs manifestations d’intérêts pour la reprise du fonds de commerce (ou droit au bail) et de l’immobilier, par des repreneurs agréés par l’Autorité ou remplissant prima facie les conditions pour obtenir un agrément par l’Autorité, et plusieurs négociations ont eu lieu avec ces repreneurs potentiels.

321. En revanche, il ressort des éléments du dossier que le groupe Parfait a été à l’origine de la plupart des échecs des négociations avec les différents candidats potentiels, que les discussions soient déjà très avancées ou non, du fait de comportements dissuasifs ou de ses manquements à son obligation spécifique d’information des cessionnaires potentiels, comme cela ressort des paragraphes 228 et suivants ci-avant.

322. En tout état de cause, comme l’a notamment souligné le Conseil d’État, « les parties notifiantes à l’opération de concentration peuvent, si elles s’y croient fondées, faire état devant l’Autorité de la concurrence de circonstances de droit ou de fait nouvelles de natureà justifier qu’elles soient déliées, par une décision de l’Autorité, de tout ou partie des obligations découlant des engagements, injonctions ou prescriptions dont est assortie une autorisation de concentration, en raison soit de l’évolution de la situation des marchés pertinents et des conséquences pouvant en résulter sur la pertinence de ces engagements, injonctions ou prescriptions, soit de ce que de telles circonstances rendent l’exécution de ces engagements, injonctions ou prescriptions impossible ou particulièrement difficile »323. Or, le groupe Parfait n’a demandé ni prolongation de délai, ni modification ou substitution

de l’engagement de cession depuis la décision d’autorisation. Faute d’avoir engagé une telle démarche, le groupe Parfait était donc tenu d’exécuter strictement les engagements souscrits. Le montant de la sanction pécuniaire en lien avec ce non-respect

324. La société Monyv a réalisé un chiffre d’affaires consolidé en France de [550-600] millions d’euros au cours de l’exercice clos au 31 décembre 2024. Selon les dispositions du I de l’article L. 430-8 du code de commerce, le plafond légal de sanction s’élève donc à [27,5-30] millions d’euros.

325. Compte tenu de l’ensemble des éléments exposés ci-dessus relatifs à la gravité du manquement à l’engagement de cession et aux éléments propres au comportement du groupe

Parfait, il y a lieu d’infliger à la société Monyv une sanction d’un montant de 4,5 millions d’euros au titre du non-respect de l’engagement de cession. Ce montant est inférieur au plafond légal.

b) La sanction pécuniaire du non-respect de l’engagement de préservation de la valeur

La gravité des manquements constatés

326. En premier lieu, l’importance de l’engagement de préservation de la valeur dans l’économie générale de la décision d’autorisation doit être appréhendée à l’aune du double objectif qu’il recouvrait au cas d’espèce. Ainsi, cet engagement visait non seulement à maintenir l’attractivité de l’hypermarché cible pendant la phase de mise en œuvre de l’engagement de cession, afin de garantir que la cession puisse intervenir dans un délai raisonnable, mais aussi à préserver la pérennité du fonds de commerce, dont le groupe Parfait avait déjà pris le contrôle dès le mois d’avril 2020, afin que celui-ci reste en état d’être exploitable (voir, ci-avant, le paragraphe 240).

327. D’une part, il convient de remarquer que, de manière générale, lorsqu’un engagement de cession est prévu, les conditions de la cession restent décisives pour s’assurer que la dynamique concurrentielle est maintenue sur les marchés concernés après la vente226. Les engagements prévoyaient, pour cette raison, des garanties de préservation de la capacité concurrentielle du fonds de commerce devant être cédé. Les obligations prévues à la clause 7 des engagements visaient à préserver la valeur de l’actif devant être cédé afin d’éviter tout risque de perte de compétitivité, visant notamment à préserver à moyen terme la capacité du futur repreneur à animer la concurrence postérieurement à la cession.

328. D’autre part, cet engagement de préservation de la valeur s’avère particulièrement essentiel en l’espèce, dans la mesure où les engagements ont été pris alors que la concentration était déjà réalisée depuis plus de deux ans et demi et que l’Autorité avait déjà exprimé des craintes quant au risque de dépréciation de la valeur et de l’attractivité de l’hypermarché cible du fait de sa non-exploitation par le groupe Parfait. Or, comme l’indiquent les engagements, le fonds de commerce restait « non exploité à ce jour » (clause 7), « depuis le 9 février 2020 » (clause 3), au moment de l’adoption des engagements. En outre, la condition prévue dans la lettre de dérogation selon laquelle la partie notifiante « veillera donc, pendant la période précédant la décision finale de l’Autorité, à s’abstenir de tout acte […], qui serait de nature à modifier la structure de l’opération telle qu’elle ressort de votre demande » n’était plusvalable après l’adoption de la décision finale (voir, également, les paragraphes 236 à 240ci-avant). L’engagement de préservation de la valeur apportait ainsi la garantie que, dans la continuité de la lettre de dérogation, le groupe Parfait préserverait l’hypermarché cible dans l’état dans lequel il se trouvait au moment de sa prise de contrôle le 30 avril 2020.

329. Le respect de cet engagement dans toutes ses dimensions était donc central dans l’économie générale de la décision d’autorisation. Tout manquement à cet engagement est donc de nature à porter atteinte à l’effet utile du remède structurel qui avait été accepté dans le cadre de la décision d’autorisation.

330. En second lieu, s’agissant de la teneur des manquements qui ont été caractérisés, il a été établi que le groupe Parfait n’a pas exécuté l’engagement de préservation à plusieurs titres.

Le groupe Parfait n’a ni préservé la valeur afin d’en garantir l’attractivité, ni, de manière générale, maintenu en état le fonds de commerce. À l’inverse, il a été établi que, depuis la prise de contrôle par le groupe Parfait, le périmètre et les caractéristiques de l’hypermarché cible ainsi que son état matériel, de même que les caractéristiques et l’état matériel du centre commercial cible, ont été réduits et dégradés.

331. Les conséquences de l’inexécution de cet engagement sont nombreuses. Au cas d’espèce, l’hypermarché cible a perdu en attractivité pour des potentiels repreneurs, a subi une quasi-disparition de sa composante immatérielle (fonds de commerce, clientèle, ressources humaines) ainsi qu’une dégradation des états matériels de l’hypermarché et du centre commercial cibles, qui sont générateurs de délais supplémentaires préalables à toute réouverture.

332. À cet égard, si l’autorisation d’exploitation commerciale attachée à l’hypermarché cible, qui avait été perdue du fait de la carence du groupe Parfait le 30 avril 2023, a finalement été récupérée, de façon particulièrement tardive, le 25 juillet 2025, il convient de noter qu’il est constant que sa perte dans l’intervalle a été de nature à ralentir les processus de reprise et, spécifiquement, a ralenti le second processus de reprise avec le groupe Sainte Claire, compte tenu des incertitudes juridiques que cela engendrait.

333. En outre, le groupe Sainte Claire a indiqué qu’il envisageait désormais une réouverture de l’hypermarché, au mieux au mois de mars 2026 et plus probablement pour la fin du mois d’avril 2026. Ainsi, la structure concurrentielle de la zone de chalandise ne pourra pas être rétablie avant cette date, sans que l’Autorité ait d’assurance sur l’effectivité de cette ouverture.

Le comportement du groupe Parfait

334. S’agissant du comportement de l’entreprise en cause, le groupe Parfait a délibérément choisi de ne pas exécuter ses obligations tirées de l’engagement de préservation. En effet, dès lors qu’il est apparu que le groupe ne pourrait pas exploiter lui-même l’hypermarché cible, que ce soit sous l’enseigne Leclerc ou sous une enseigne indépendante, il a manifesté sa volonté de cesser tout investissement sur ce site. En effet, il ressort des éléments du dossier que le groupe Parfait a délibérément choisi de ne pas préserver la valeur de l’hypermarché cible et de ne pas s’assurer que le fonds de commerce demeure en état.

Le montant de la sanction pécuniaire en lien avec ce non-respect

335. Compte tenu de l’ensemble des éléments exposés ci-dessus relatifs à la gravité du manquement à l’engagement de préservation de la valeur et aux éléments propres au comportement du groupe Parfait, il y a lieu d’infliger à la société Monyv une sanction d’un montant de 2,5 millions d’euros au titre du non-respect de l’engagement de préservation de la valeur de l’hypermarché et du centre commercial cibles. Ce montant est inférieur au plafond légal.

c) La sanction pécuniaire du non-respect de l’engagement de coopération

La gravité des manquements constatés

336. Tout d’abord, l’engagement de coopération avec le mandataire revêt une nature comportementale et encadre la manière dont la partie notifiante doit agir vis-à-vis d’un tiers indépendant chargé de veiller à la bonne exécution des engagements. Il s’agit donc d’un engagement autonome, qui vise à garantir l’effectivité des engagements principaux, qu’ils soient eux-mêmes de nature structurelle ou comportementale, et qui constitue nécessairement un corollaire de l’entier dispositif de contrôle. La coopération entière, proactive et continue de la partie notifiante est indispensable non seulement au bon déroulement du suivi, mais également à la bonne exécution des engagements dans les délais impartis et à son contrôle par l’Autorité.

337. Ensuite, s’agissant du mandataire chargé de la cession, dans l’hypothèse où la cession de l’actif n’aurait pas été réalisée par la partie notifiante lors de la première phase de cession, comme cela a été le cas en l’espèce, la coopération active de la partie notifiante est tout aussi cruciale. Elle doit lui garantir un accès complet aux informations, aux documents commerciaux et techniques relatifs à l’actif, faciliter ses échanges avec les repreneurs potentiels, et s’abstenir de tout comportement susceptible de retarder ou d’entraver le processus. Le non-respect de cette obligation compromet la mise en œuvre effective des engagements et retarde le rétablissement d’une concurrence effective sur le marché concerné.

338. Ainsi, le respect de cet engagement, qui fait partie intégrante de la décision d’autorisation, était indispensable à l’Autorité pour s’assurer, d’une part, d’une mise en œuvre effective des autres engagements souscrits par le groupe Parfait et, d’autre part, pour garantir la cession dans les délais du fonds de commerce de l’hypermarché cible. La décision d’autorisation indique à cet égard que, « [s]’agissant de la mise en œuvre des engagements, le groupe

Parfait proposera à l’Autorité la nomination d’un mandataire qui aura pour mission de veiller au respect des obligations résultant de la présente décision. […] Par ailleurs, si le groupe Parfait ne trouve pas de repreneur dans un délai de 5 mois, un mandataire sera chargé de trouver des repreneurs du fonds du commerce cédé et de négocier avec eux, pour le compte du groupe Parfait, les conditions de la cession du fonds de commerce. […] Ces éléments renforcent ainsi la crédibilité des engagements souscrits par la partie notifiante »227.

339. Par ailleurs, s’agissant de l’ampleur des manquements, ceux-ci se sont révélés à la fois nombreux et persistants et ont entravé la réalisation de la mission confiée au mandataire. Ils ont affecté non seulement le suivi du respect des engagements, mais également la mise en œuvre de la cession du fonds de commerce de l’hypermarché cible.

340. En effet, comme cela a déjà été exposé ci-avant, le groupe Parfait a notamment transmis au mandataire des informations incomplètes, non hiérarchisées (souvent sous forme de documents bruts, non triés). Il a également omis de communiquer certaines informations pourtant indispensables à l’exercice des missions de contrôle et de cession du mandataire.

Le groupe Parfait a également limité l’intervention du mandataire dans les négociations immobilières, alors que la réalisation effective de la cession du fonds de commerce était juridiquement conditionnée à la résolution préalable de ces questions immobilières pour la quasi-totalité des projets de reprise qui ont été portés.

341. Enfin, il apparait que l’inexécution de cet engagement de coopération par le groupe Parfait a été constante tout au long de la période d’effet des engagements, depuis le moment de sa nomination, tardive (intervenue près d’un mois après l’agrément du mandataire par l’Autorité) jusqu’à la toute fin de la période de mise en œuvre, notamment après la notification du rapport des services d’instruction du 20 juin 2025.

Le comportement du groupe Parfait

342. Le comportement du groupe Parfait traduit un défaut de coopération grave et persistant avec un acteur essentiel du dispositif de mise en œuvre des engagements. Il s’inscrit, par ailleurs, dans un contexte de non-respect plus large des engagements souscrits, renforçant le caractère cumulatif et systémique du manquement imputable au groupe Parfait.

343. Le groupe Parfait a, en outre, persisté dans ce comportement après le rapport du 20 juin 2025, démontrant à nouveau qu’il n’a pas saisi la pleine portée de ses obligations, en lien avec cet engagement de coopération, ni mis en œuvre tous les moyens qui étaient requis pour s’assurer de l’exécution de l’engagement de coopération avec le mandataire.

344. Il résulte de ce qui précède que le non-respect par le groupe Parfait de son engagement de coopération avec le mandataire revêt un caractère grave, d’autant qu’il a persisté jusqu’à la cession du fonds de commerce de l’hypermarché et du centre commercial cibles le 9 septembre 2025.Le montant de la sanction pécuniaire en lien avec ce non-respect

345. Compte tenu de l’ensemble des éléments exposés ci-dessus relatifs à la gravité du manquement à l’engagement de coopération et aux éléments propres au comportement du groupe Parfait, il y a lieu d’infliger à la société Monyv une sanction d’un montant de 600 000 euros au titre du non-respect de l’engagement de coopération avec le mandataire. Ce montant est inférieur au plafond légal.

4. LE MONTANT FINAL DES SANCTIONS PÉCUNIAIRES

346. Il résulte de ce qui précède que le montant cumulé des sanctions imposées au groupe Parfait s’établit à 7,6 millions d’euros.

347. À cet égard, la prise en compte de la situation particulière du groupe Parfait ne conduit pas à devoir adapter ce montant cumulé. Si le groupe Parfait a fait état, dans ses observations au rapport, de la baisse des résultats nets dégagés par le pôle alimentaire du groupe Parfait depuis 2019, il n’a pas justifié de difficultés financières particulières du groupe (ou de la société Monyv) l’empêchant de s’acquitter de ces sanctions. En effet, il convient de rappeler que la capacité contributive s’apprécie au niveau de l’entreprise et non de l’une de ses composantes en lien direct avec l’infraction – le pôle alimentaire, en l’espèce.

348. En conséquence, les montants finals des sanctions pécuniaires infligées au groupe Parfait s’établissent comme suit :

Article 1er : Il est établi que le groupe Parfait n’a pas respecté les engagements de cession du fonds de commerce de l’hypermarché cible avant le 22 septembre 2023, de préservation de la valeur tant du fonds de commerce de l’hypermarché cible que de l’ensemble immobilier du centre commercial cible et de coopération avec le mandataire, engagements auxquels était subordonnée la décision d’autorisation sous conditions de l’Autorité de la concurrencen° 22-DCC-254 du 22 décembre 2022 relative à la prise de contrôle exclusif de l’hypermarché Géant Casino La Batelière et de la société H Immobilier par le groupe Parfait.

Article 2 : Une sanction pécuniaire totale de 7 600 000 euros est infligée à la société Monyv (RCS Paris, 421 594 896) au titre des manquements mentionnés à l’article 1er, dont :

− 4 500 000 euros au titre du non-respect de l’engagement de cession ;

− 2 500 000 euros au titre du non-respect de l’engagement de préservation de la valeur ; et,

− 600 000 euros au titre du non-respect de l’engagement de coopération avec le mandataire.

Délibéré sur le rapport oral de Mme Ariane Garciabueno et M. Antoine Pidancet, rapporteurs, et l’intervention de M. Umberto Berkani, rapporteur général et deM. Jérôme Vidal, rapporteur général adjoint, par M. Thibaud Vergé, vice-président, président de séance, Mme Catherine Prieto et Mme Muriel Lacoue-Labarthe, membres.

NOTES

2 Cote 17 095.

3 Cotes 4 555 à 4 651.

4 Cotes 17 011 et 17 012.

5 Cote 4 609.

6 La société Socohold est une société holding qui détient une partie des activités de distribution alimentaire du groupe Monyv dont la société Socobateliere.

7 Cote 4 609.

8 Voir les paragraphes 17 à 81 du rapport de phase 2 (cotes 17 961 à 17 975) et les paragraphes 22 et suivants de la décision d’autorisation.

9 Voir, à cet égard, les paragraphes 5 et suivants de la décision n° 20-DEX-02 du 18 décembre 2020 relative à la prise de contrôle conjoint de l’hypermarché Géant-Casino La Batelière par le groupe Parfait aux côtés de l’Association des Centres Distributeurs E. Leclerc et à la prise de contrôle exclusif de la société H Immobilier par le groupe Parfait.

10 Pour la version consolidée au 8 septembre 2020 de la première notification, déclarée complète, voir cotes 18 225 à 18 368.

11 Décision de l’Autorité n° 20-DEX-02 du 18 décembre 2020 relative à la prise de contrôle conjoint de l’hypermarché Géant Casino La Batelière par le groupe Parfait aux côtés de l’Association des Centres Distributeurs E. Leclerc et à la prise de contrôle exclusif de la société H Immobilier par le groupe Parfait.

12 Cote 17 947.

13 Cotes 17 948 à 17 950.

14 Cote 17 949.

15 Cote 17 953.

16 Cote 17 954.

17 Cotes 17 955 à 18 055.

18 Cote 18 053.

19 Cote 18 055.

20 Communiqué de presse de l’Autorité du 10 juin 2021.

21 Cotes 24 028 à 24 074.

22 Paragraphe 111 de la décision d’autorisation.

23 Cote 42.

24 Paragraphes 164 et 165 de la décision d’autorisation.

25 Paragraphe 164 de la décision d’autorisation.

26 Cote 47.

27 Cote 46.

28 Cote 43.

29 Paragraphe 167 de la décision d’autorisation.

30 Paragraphes 168 à 170 de la décision d’autorisation.

31 Cote 2.

32 Le 20 mai 2023, le groupe Parfait a formulé une demande de prolongation de la première période de cession (initialement prévue pour une durée de cinq mois) jusqu’au 15 juillet 2023. Par courrier du 2 juin 2023, le Président de l’Autorité a accepté cette demande, tout en précisant que la date butoir de cession était toujours fixée au 22 septembre 2023 (cotes 1 551, 1 582 et 1 583).

33 Cotes 6 351, 9 130 et 9 420.

34 Cote 6 358.

35 Cotes 6 356 et 6 359.

36 Cote 16 861.

37 Cote 6 360.

38 Cote 16 862.

39 Cotes 350 et 351 ainsi que 3 750 à 3 753.

40 Cotes 6 360 à 6 364.

41 Cote 16 862.

42 Cote 6 361.

43 Cote 6 558.

44 Cote 606 VC (2 538 VNC).

45 Cote 16 795.

46 Cotes 13 409 et 13 410.

47 Cotes 6 360 et 6 362.

48 Cote 16 862.

49 Cotes 13 456 à 13 459 (courrier du 16 novembre 2023), 13 443 à 13 454 (courriel du 12 novembre 2023 et nouvelle situation comptable au 31 octobre 2023), 13 483,13 484, 13 368 à 13 397 (courriel du 30 novembre 2023 proposant une nouvelle méthode pour fixer le prix final de cession), 13 472 à 13 474 (courriel du 5 décembre 2023), 13 496 et 13 497 (courriels du 12 décembre 2023 qui refait le point sur les différents blocages et propose des solutions), 13 495 (courriel du 13 décembre 2023), 13 506 et 13 507 (courriel du 15 décembre 2023), 13 612 (courrier du 21 décembre 2023), 13 622 et 13 623 (courriel du 28 décembre 2023), 13 619 à 13 621 (courrier du 6 janvier 2024), 13 699 à 13 701 (courriel du 17 janvier 2024), 13 698 (courriel du 17 janvier 2024), 13 676 et 13 677 (courriel du 19 janvier 2024), 13 675 (courriel du 29 janvier 2024), 13 720 à 13 722 (courriel du 6 février 2024).

50 Cote 16 797.

51 Cotes 16 863 et 16 864.

52 Cote 16 863.

53 Cote 22 312.

54 Cote 15 379.

55 Cote 15 385.

56 Cote 15 386.

57 Cote 15 386.

58 Cote 15 387.

59 Cotes 897 à 905 VC (2 807 à 2 815 VNC).

60 Cote 8 900.

61 Cote 16 865.

62 Cote 16 872.

63 Cote 8 901.

64 Cotes 5 084 et 5 092 à 5 171.

65 Cote 8 900.

66 Cote 9 018.

67 Cote 9 020.

68 Cote 8 902.

69 Cote 8 904.

70 Cote 931 VC (2 840 VNC).

71 Cote 16 865.

72 Cote 16 868.

73 Cotes 837 et 838 VC (2 755 et 2 756 VNC).

74 Cote 9 057.

75 Cote 9 058.

76 Cotes 9 057 et 9 058.

77 Cote 9 058.

78 Cotes 22 671 et 22 672.

79 Cotes 1 112 et 1 113.

80 Cote 16 857.

81 Cotes 22 503 à 22 505.

82 Cotes 1 114, 1 115 VC (2 957 VNC), 1 120 VC (2 962 VNC) et 1 123 VC (2 963 VNC).

83 Cote 1 123 VC (2 963 VNC).

84 Cote 15 389.

85 Cote 15 388.

86 Cote 15 388.

87 Cote 15 526.

88 Cotes 22 676 à 22 678.

89 Cote 24 621.

90 Cotes 24 615 et 24 616.

91 Cote 5 431.

92 Cotes 22 225 à 22 231.

93 Cotes 22 680 à 22 682.

94 Cote 24 380 VC (24 500 VNC).

95 Cotes 17 258 à 17 269.

96 Cotes 4 555 à 4 561.

97 Cotes 4 645 à 4 660.

98 Cote 4 560 : « parmi les actifs mobiliers transférés figurent ceux inventoriés les 19 et 20 mars 2020 par [le]commissaire-priseur, sauf dans l’hypothèse où ils seraient grevés de sûretés, feraient l’objet de clause de réserve de propriété, d’un contrat de location ou de crédit-bail ».

99 Cotes 4 645 à 4 660.

100 Cote 4 634.

101 Cote 18 058.

102 Cotes 22 507 à 22 613.

103 Cote 4 631.

104 L’article du 14 septembre 2019 est disponible sur le site internet de la chaîne Martinique La 1ère : Géant Batelière et Casino du groupe Ho Hio Hen en quête d'un repreneur (https://la1ere.francetvinfo.fr/martinique/geant-bateliere-casino-du-groupe-ho-hio-hen-quete-repreneur[1]749251.html). Le lien permanent de la vidéo du reportage, hébergée sur la plateforme YouTube, est le suivant : https://youtu.be/PJfVsrdHsnk?feature=shared ; voir aussi cote 22 541.

105 Voir cotes 24 756, 24 759 à 24 761.

106 Cote 17 066 : « [f]ermeture du magasin au 03 mars : le magasin devait rouvrir ses portes sur trois week[1]end[s] à partir du 21 mars pour écouler 200K€ de stock mais la situation sanitaire a conduit à annuler cette décision et à céder le stock aux ECOMAX pour assurer sa commercialisation et assurer des remontées de fonds sur H ALIMENTATION », « l’absence de trésorerie et un niveau de stock extrêmement bas tant au niveau de la société H ALIMENTATION qu’au niveau des autres sociétés du groupe en redressement judiciaire ne permettaient pas une relance de l’activité (à l’arrêt soit pour cause de non-paiement des salaires, soit par manque de stocks) ».

107 Cote 4 557.

108 « La cession de l’entreprise a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles d’exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d’apurer le passif ».

109 Cotes 3 905 et 3 907.

110 Voir cotes 5 183 à 5 193, 5 219, et 9 108 à 9 120.

111 Cotes 3 855 à 3 859.

112 Cotes 16 989, 24 328, 3 862 et 4 643.

113 Cote 24 328.

114 3 photos n’ayant plus leurs métadonnées d’origine (cotes 23 907 à 23 909) et 21 sur lesquelles figure en surimpression un horodatage au 29 avril 2020 (cote 6 329) peuvent être considérées contemporaines ou antérieures. Les autres photos indiquent un horodatage du 11 juin 2020 (cotes 23 880 à 23 906) ou du 1er septembre 2020 (cote 6 329).

115 Les images retenues sont les quatre copies d’images provenant du site RCI et illustrant des articles du 11 février 2020 (cotes 23 937 à 23 949). Les autres images ou photographies sont toutes postérieures à la prise de contrôle par le groupe Parfait : 160 sont datées du 11 ou 13 juin 2020 (cotes 6 330, 23 950 à 23 961), du 18 novembre 2020 (cotes 23 935 et 23 936), du 12 juin 2024 (cote 23 943), ou n’ont plus de données permettant d’identifier la date de la prise de vue mais plusieurs éléments concordants indiquent qu’elles sont manifestement postérieures à la prise de contrôle du groupe Parfait sur le centre commercial.

116 Cotes 5 188, 5 193, 6 355, 9 118 et 15 382.

117 Cotes 2 041, 2 042, 3 373, 3 374, 3 424 et 9 057.

118 Cote 9 057.

119 Cote 488 VC (2 437 VNC).

120 Cotes 16 790 et 16 791.

121 Cote 1 575.

122 Cotes 24 383 et 24 384 VC (24 504 et 24 505 VNC).

123 Cote 4 477.

124 Cote 16 792.

125 Cote 4 655.

126 Cotes 4 649 à 4 655.

127 Cotes 4 374 à 4 377. Le groupe Parfait a confirmé en séance que la société Socobatelière employait [confidentiel] employés au moment de la cession au groupe Sainte Claire.

128 Cotes 17 258 à 17 269.

129 Cote 24 390.

130 Cotes 26 626 et 26 627.

131 Cotes 22 533 à 22 539.

132 Cotes 5 188, 5 219, 9 108, 9 109 et 9 115.

133 Cotes 5 183 à 5 189, 5 193, 5 219, 9 110 à 9 120, 22 618 à 22 631.

134 À savoir des déclarations du groupe Parfait (cotes 3 858 et 4 138) et du rapport de constatations du

6 février 2025 (22 506 à 22 613).

135 Cotes 15 112 à 15 272.

136 Cote 6 328 (dossier Socobatelière).

137 Cote 15 114.

138 Cote 15 114.

139 Cote 25 969.

140 Cote 16 788.

141 Cote 25 527.

142 Cotes 22 506 à 22 613.

143 Cote 22 531.

144 Cotes 22 538 et 22 539.

145 Cote 25 600.

146 Cotes 22 609 à 22 612.

147 Cotes 24 321 à 24 323 et 24 350 à 24 357.

148 Cotes 5 183, 5 188, 5 189, 5 193, 5 207 à 5 216, 9 111, 9 118 à 9 120.

149 Cotes 1 357 VC (3 239 VNC), 24 350 et 24 351.

150 Cotes 24 352 à 24 354.

151 Cotes 24 321 à 24 323

152 Cotes 24 356 et 24 357.

153 Cote 24 355.

154 Cote 9 111.

155 Cotes 153 à 155.

156 Cotes 192 à 206. Le contrat de mandat a été signé le 1er mars 2023 par le groupe Parfait et le 13 mars 2023 par le mandataire.

157 Cotes 195 à 206.

158 Cotes 16 857 et 16 876.

159 Voir, notamment, cotes 1 220 et 23 730.

160 Cote 16 876.

161 Cotes 16 859 et 16 860.

162 Cotes 15 387, 15 388 et 16 865.

163 Cotes 6 356 et 6 357.

164 Cotes 6 357 et 16 863.

165 Cote 25 211.

166 Cote 27 775.

167 Cote 28 071.

168 Cote 26 490.

169 Cote 26 497

170 Cote 26 373.

171 Voir en particulier CEDH, 3 déc. 2002, Lilly c. France, requête n° 53892/00. S’agissant des décisions de sanction de non-respect d’engagement, Voir CE, 21 décembre 2012, société groupe Canal plus, n° 353856.

172 Voir, notamment, la décision n° 21-D-20 du 22 juillet 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lunettes et montures de lunettes, paragraphe 491.

173 Voir, en ce sens, la décision n° 23-D-12 du 11 décembre 2023 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des thés de luxe, paragraphe 44. Voir aussi les arrêts de la cour d’appel de Paris, Umicore, 17 mai 2018, n° 2016/16621, page 18 et La Banque Postale, 21 décembre 2017, n° 2015/17638, pages 31 et 32.

174 La convocation a été adressée par courriel le vendredi 6 décembre 2024 à 18h36 (heure de Paris), pour un recueil de déclarations et de copies de documents sur place le lundi 9 décembre 2024 à 11h00 (heure de Martinique) (voir cotes 3 708 à 3 714).

175 Cotes 16 783 à 16 803.

176 Cotes 24 803 à 24 808.

177 À cet égard, le communiqué comportait la mention « cette enquête ne préjuge en rien de la culpabilité du groupe Parfait. Seule une instruction menée de façon contradictoire, dans le respect des droits de la défense des parties concernées, permettrait au collège de déterminer, après échanges d’observations écrites et après une séance orale, si les engagements pris en 2022 ont été respectés ou non ».

178 Décision n° 22-D-15 du 29 septembre 2022 relative à l’exécution des injonctions prononcées dans la décision n° 17-D-04 du 8 mars 2017, paragraphe 112.

179 Décision n° 18-D-16 du 27 juillet 2018 relative au respect des engagements annexés à la décision n° 16-DCC-111 du 27 juillet 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de Darty par la Fnac, paragraphe 70.

180 Décisions n° 11-D-12 du 20 septembre 2011 relative au respect des engagements figurant dans la décision autorisant l’acquisition de TPS et CanalSatellite par Vivendi Universal et Groupe Canal Plus, n° 12-D-15 du 9 juillet 2012 relative au respect des engagements figurant dans la décision autorisant l’acquisition de Socopa Viandes par Groupe Bigard et n° 17-D-04 du 8 mars 2017 relative au respect de l’engagement figurant dans la décision autorisant l’acquisition de SFR par le groupe Altice relatif à l’accord conclu avec Bouygues Telecom le 9 novembre 2010.

181 Voir, en ce sens, la décision du Conseil d’État du 21 décembre 2012, société Groupe Canal Plus, société Vivendi Universal, n° 353856.

182 Décision n° 22-D-15 du 29 septembre 2022 précitée.

183 Ibid.

184 Décision du Conseil d’État du 21 décembre 2012, précitée.

185 Voir, en ce sens, la décision n° 22-D-15 du 29 septembre 2022 précitée.

186 Décision n° 18-D-16 du 27 juillet 2018 précitée, paragraphe 70.

187 Décision n° 18-D-16 du 27 juillet 2018 précitée, paragraphes 75 et 76.

188 Voir, à cet égard, la décision du Conseil d’État du 28 septembre 2017, Société Altice Luxembourg, Société SFR Group, n° 409770 : « les parties notifiantes à l’opération de concentration peuvent, si elles s’y croient fondées, faire état devant l’Autorité de la concurrence de circonstances de droit ou de fait nouvelles de nature à justifier qu’elles soient déliées, par une décision de l’Autorité, de tout ou partie des obligations découlant des engagements, injonctions ou prescriptions dont est assortie une autorisation de concentration, en raison soit de l’évolution de la situation des marchés pertinents et des conséquences pouvant en résulter sur la pertinence de ces engagements, injonctions ou prescriptions, soit de ce que de telles circonstances rendent l’exécution de ces engagements, injonctions ou prescriptions impossible ou particulièrement difficile ».

189 Décision n° 18-D-16 du 27 juillet 2018 précitée, paragraphes 77 à 79.

190 Voir paragraphe 424 des lignes directrices de l’Autorité relatives au contrôle des concentrations.

191 Voir notamment les paragraphes 431 et 432 des lignes directrices de l’Autorité relatives au contrôle des concentrations.

192 Voir le paragraphe 435 des lignes directrices de l’Autorité relatives au contrôle des concentrations.

193 Décisions n° 12-D-15 du 9 juillet 2012 et n° 17-D-04 du 8 mars 2017 précitées.

194 Voir, à cet égard, le paragraphe 164 de la décision d’autorisation : « [s]’agissant tout d’abord de la cession du fonds de commerce de l’hypermarché La Batelière, cet engagement est adéquat en ce qu’il délie le point de vente concerné de tout lien vis-à-vis du groupe Parfait en permettant à un opérateur concurrent, préalablementagréé par l’Autorité, d’acquérir le fonds de commerce de l’hypermarché cible. En outre, l’engagement prévoit que cette cession doit intervenir dans un délai suffisamment rapide, la partie notifiante s’engageant à ce que la cession intervienne dans un délai de 9 mois ».

195 Paragraphe 167 de la décision d’autorisation.

196 Cote 17 949.

197 Cotes 1 909 et 1 910 VC (3 373 et 3 374 VNC), 20 412, 2 042 et 9 057.

198 En application de l’article L. 752-1 du code de commerce.

199 Cotes 16 790 et 16 791.

200 Cote 4 557.

201 « La cession de l’entreprise a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles d’exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d’apurer le passif ».

202 Cote 16 788.

203 Cote 25 527.

204 Cote 25 969.

205 Cote 25 589.

206 Cotes 25 778 à 25 899.

207 Cotes 25 970 à 25 972.

208 Cotes 25 592 et 25 945 à 25 952.

209 Cotes 25 778 à 25 899.

210 Cotes 25 970 à 25 972.

211 Décision n° 24-D-03 du 15 mars 2024 relative au respect des engagements figurant dans la décision de l’Autorité de la concurrence n° 22-D-13 du 21 juin 2022 relative à des pratiques mises en œuvre par Google dans le secteur de la presse, paragraphe 292.

212 Voir notamment les décisions précitées n° 17-D-04 du 08 mars 2017, paragraphe 352 et n° 18-D-16 du 27 juillet 2018, paragraphe 136.

213 Décision du Conseil d’État du 28 septembre 2017, Altice / SFR, n° 409770.

214 Voir notamment les décisions précitées n° 17-D-04 du 8 mars 2017, paragraphe 353 et n° 18-D-16 du 27 juillet 2018, paragraphe 141.

215 Décision du Conseil d’État du 7 novembre 2019, n° 424702, paragraphe 8.

216 Voir, notamment, la décision n° 18-D-16 du 27 juillet 2018 précitée, paragraphe 149.

217 Décision du Conseil d’État du 7 novembre 2019, n° 424702, paragraphe 10.

218 Arrêt de la Cour de cassation du 29 juin 2007, Bouygues Telecom, n° 07-10303.

219 Arrêt de la Cour de cassation du 12 juillet 2011, Lafarge, n° 10-17482.

220 Décisions n° 16-D-07 du 19 avril 2016 relative au respect de l’engagement de cession des activités de téléphonie mobile d’Outremer Telecom à La Réunion et à Mayotte figurant dans la décision autorisant l’acquisition de SFR par le groupe Altice et n° 17-D-04 du 8 mars 2017 précitée.

221 Décision du Conseil d’État du 31 mars 2017, Altice/SFR, n° 401059.

222 Décision n° 18-D-16 du 27 juillet 2018 précitée, paragraphe 76.

223 Cote 25 659.

224 Cote 25 659.

225 Arrêt du Conseil d’État du 28 septembre 2017, Altice/SFR n° 409770.

226 Voir, en ce sens, les paragraphes 215 et suivants de la décision n° 16-D-07 du 19 avril 2016 précitée.

227 Paragraphes 168 à 170 de la décision d’autorisation.

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