CA Paris, Pôle 5 - ch. 6, 26 novembre 2025, n° 22/12341
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 26 NOVEMBRE 2025
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12341 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGCKL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Juin 2022 - tribunal judiciaire de Paris 9ème chambre 3ème section - RG n° 19/11682
APPELANTE
S.A.R.L. HTPS EXPERTISE
[Adresse 1]
[Localité 5]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Mickaël RUBINSOHN, avocat au barreau de Paris, toque : G0586
INTIMÉS
Monsieur [F] [I]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représenté par Me Marie-Gabrielle BAILLET, avocat au barreau de Paris, toque : B0230, avocat plaidant
S.A. CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIALE NORD OUEST (désistement à son égard de la société HTPS par ordonnance du conseiller de la mise en état du 3 décembre 2024 et de M. [I] par ordonnance du conseiller de la mise en état du 5 novembre 2024)
[Adresse 2]
[Localité 3]
N°SIREN : 455 502 096
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jérôme HOCQUARD de la SELEURL ELOCA, avocat au barreau de Paris, toque : P0087
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Octobre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Valérie CHAMP, présidente de chambre, entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Valérie CHAMP, Présidente de chambre
Mme Laurence CHAINTRON, conseillère
Mme Anne BAMBERGER, conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Valérie CHAMP, présidente de chambre et par Mélanie THOMAS, greffière, présente lors de la mise à disposition.
* * * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant acte sous seing privé du 30 avril 2015, la société CIC Nord Ouest (la banque) a consenti à la société Osmoz Coffee (la société) un prêt de 90 000 euros remboursable au taux de 2,95 % l'an en 84 mensualités de 1 193,01 euros chacune pour financer des travaux d'aménagement, garanti par acte du même jour par M. [I] (la caution) dans la limite de 27 000 euros en principal et accessoires et de 108 mois.
Le 20 août 2015, la banque a consenti à la société un second prêt de 71 200 euros pour financer des travaux complémentaires et racheter un crédit fournisseur au taux de 2, 70 % l'an remboursable en 60 mensualités de 1 269,90 euros, garanti par la caution dans la limite de 85 440 euros en principal et accessoires et de 84 mois.
Le 18 mars 2016, la caution a cédé 960 parts sur 1 200 détenues dans le capital de la société à M. [Y] au prix global de 24 000 euros.
Le 14 février 2018, la société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Compiègne et la banque a déclaré sa créance à hauteur de 66 888,42 euros au titre du premier prêt et de 43 211,30 euros au titre du second.
Le 9 avril 2018, celle-ci a mis en demeure la caution de lui régler la somme de 70 211,30 euros, puis par exploit d'huissier du 4 octobre 2019, l'a assignée en paiement devant le tribunal judiciaire de Paris.
Par exploit du 6 février 2020, la caution a appelé en garantie la société HPTS Expertise en sa qualité de rédacteur de l'acte de cession de parts.
Suivant jugement du 2 juin 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
- condamné la caution à payer à la banque la somme de 70 211,30 euros augmentés des intérêts au taux conventionnel de 2,95 % l'an sur 27 000 euros, des intérêts au taux conventionnel de 2,70 % l'an sur 37 984,14 euros et au taux d'intérêt légal pour le surplus dès le 9 avril 2018 ;
- ordonné la capitalisation des intérêts ;
- dit que la société HPTS Expertise devra garantir la caution de cette condamnation à concurrence de 7 000 euros ;
- dit irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par la société à responsabilité limitée HPTS Expertise ;
- rejeté le surplus des demandes ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné la caution à payer à la banque la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société HPTS Expertise à payer à la caution la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la caution aux dépens de l'instance l'opposant à la banque ;
- condamné la société HPTS Expertise aux dépens de l'instance l'opposant à la caution.
La société HPTS a relevé appel du jugement le 1er juillet 2022.
Suivant ordonnance du 5 novembre 2024, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement partiel de M. [I] à l'encontre de la banque et dit que l'instance se poursuivait à l'égard des autres parties.
Suivant ordonnance du 3 décembre 2024, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement partiel de la société HTPS Expertise à l'encontre de la banque et dit que l'instance se poursuivait à l'égard des autres parties.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 septembre 2022, la société HPTS Expertise demande à la cour, de :
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 2 juin 2022 en ce qu'il a dit que la société HPTS Expertise devait garantir M. [I] de sa condamnation à concurrence de 7 000 euros et l'a condamnée à payer à ce dernier la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
En conséquence,
- condamner M. [I] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première et seconde instance.
La société HPTS Expertise ne conteste pas être débitrice d'une obligation d'information et de conseil à l'égard de M. [I], cédant, portant sur la nécessité de solliciter une substitution de cautions auprès de la banque, mais soutient rapporter la preuve de l'exécution de l'obligation contractée.
S'agissant de la perte de chance alléguée, elle expose que celle-ci est nulle au regard de la dégradation des relations de la banque et de la caution du fait de la défaillance de la société garantie et au regard de la santé comptable précaire du cessionnaire, rendant peu vraisemblable une acceptation de la banque de substitution de cautions.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 mars 2024, la caution a formé appel incident et demande à la cour, de :
- infirmer le jugement déféré des chefs du dispositif suivant :
dit que la société HPTS Expertise devra garantir la caution de cette condamnation à concurrence de 7 000 euros ;
dejette le surplus des demandes ;
Et statuant à nouveau,
- donner acte à la caution du désistement de ses demandes à l'encontre de la banque à l'occasion de l'appel incident du jugement déféré,
- condamner la société HTPS Expertise à la relever et à la garantir des condamnations prononcées aux termes du jugement déféré,
- rejeter les demandes de la société HTPS Expertise,
- condamner la société HTPS Expertise à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés par Maître Marie-Gabrielle Baillet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La caution expose que la société HTPS Expertise a manqué à ses obligations d'information et de conseil à son égard, en ce qu'elle ne l'a pas informée lors de la cession de la persistance de son engagement de caution, à défaut d'insertion d'une clause de substitution de garantie à l'acte de cession de parts sociales et qu'elle doit la garantir. Elle conteste que les démarches effectuées conjointement avec M. [Y] auprès de la banque et les échanges qu'elle a pu avoir avec celle-ci afin de lever son cautionnement permettent d'établir comme le soutient la société HTPS Expertise qu'elle a satisfait à son obligation. Elle souligne au contraire que les nombreux échanges qui ont eu lieu avec celle-ci ne mentionnent jamais ce point et que la société HTPS Expertise sucombe à établir qu'elle a fourni une telle information en lui soumettant un projet d'acte comportant une telle clause ou en évoquant précisément le risque associé à ne pas la mentionner dans l'acte de cession.
Elle conteste enfin être une caution avertie et souligne avoir eu recours aux services de la société HTPS Expertise afin d'être conseillée utilement.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 mai 2025 et l'affaire fixée à l'audience du 16 octobre 2025.
MOTIFS
Sur la responsabilité de la société HTPS Expertise
Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
Il sera observé que la société HPTS Expertise ne conteste plus en appel être intervenue dans l'établissement de l'acte de cession du 18 mars 2016 et qu'elle l'a rédigé. Elle conteste désormais uniquement avoir manqué à son devoir d'information et de conseil relativement à l'opportunité d'insérer ou non une clause de substitution de garantie en soutenant rapporter la preuve d'y avoir satisfait.
La société HTPS Expertise verse notamment aux débats deux attestations émanant de M. [Y], le cessionnaire datées des 23 novembre 2020 et 13 février 2021, ainsi que trois courriels échangés entre le conseiller bancaire et M. [I], le cédant des 13 et 26 mars 2015 et du 27 décembre 2016. Il résulte de ces documents que si dans la première attestation, M. [Y] expose que que la banque a répondu in fine le 27 décembre 2016 ne pas être d'accord pour la substitution de caution, faute pour l'acte de cession de parts de comporter une clause de garantie de passif et qu'une telle clause n'a pas été évoquée par l'expert comptable et ne figurait pas dans l'acte établi par la société HTPS Expertise, il déclare dans la seconde attestation que cette même société n'était pas l'expert-comptable de la société Ozmoz Coffee et a bien conseillé aux cédants de lever les cautions, ce qui paraît contradictoire. Les échanges de courriels entre le conseiller bancaire et M. [I] n'apportent aucun élément sur l'exécution ou non de son obligation d'information et de conseil par la société HTPS Expertise.
M. [I] produit, quant à lui, d'autres attestations de M. [Y], une datée du 23 novembre 2020, dans laquelle il atteste que la société HTPS Expertise était l'expert-comptable de la société Osmoz Coffee et a rédigé les actes de cession, s'est occupée de l'enregistrement et de la publicité et une datée du 11 mars 2021, seule à être accompagnée de la pièce d'identité de M. [Y], soulignant qu'il révoque l'attestation rédigée le 13 février 2021 au bénéfice de la société HTPS Expertise et qu'il maintient celle du 23 novembre 2020, en précisant que cette société connaissait parfaitement le dossier, qu'elle a rédigé l'acte de cession et n'a jamais évoqué la question des cautions.
Il sera observé que si l'acte de cession n'est pas produit, les parties admettent qu'il ne comporte pas la clause dont l'absence est critiquée, ni une mention sur l'opportunité ou non de l'insérer dans l'acte.
Il se déduit de ces éléments, que M. [I] rapporte la preuve que la société HTPS Expertise avait contracté à son égard une obligation d'information et de conseil à l'occasion de la rédaction de l'acte de cession, indépendamment de l'absence de lettre de mission formalisée, qu'en revanche celle-ci ne démontre pas avoir exécuté une telle obligation.
L'inexécution de cette obligation, qui a privé la caution de la possibilité de se faire substituer dans ses engagements, à l'occasion de l'acte de cession, la prive d'une chance d'éviter le risque qui s'est réalisé, qui doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
Il sera relevé que si le rédacteur de l'acte devait informer les parties sur l'opportunité ou non d'insérer une clause de garantie, il ne pouvait, comme l'a exactement relevé le tribunal, inférer sur la décision de la banque d'accepter une substitution de cautions. Il ne pouvait pas plus modifier la situation financière de la société cédée.
Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a retenu que la responsabilité de la société HTPS Expertise et en ce qu'il a limité la demande indemnitaire à la somme de 7 000 euros.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'appelante sera donc condamnée aux dépens qui seront recouvrés par Maître Marie-Gabrielle Baillet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. La société HTPS Expertise sera condamnée à payer à M. [I] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 2 juin 2022 s'agissant de la condamnation de la société HTPS Expertise à garantir M. [I] à hauteur de 7 000 euros relativement à sa condamnation à payer à la société Crédit industriel et commercial Nord Ouest la somme de 70 211,30 euros augmentés des intérêts au taux conventionnel de 2,95 % l'an sur 27 000 euros, des intérêts au taux conventionnel de 2,70 % l'an sur 37 984,14 euros et au taux d'intérêt légal pour le surplus dès le 9 avril 2018, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société HTPS Expertise à payer à M. [I] une somme de 2 000 euros de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société HTPS Expertise aux entiers dépens d'appel, qui seront recouvrés par Maître Marie-Gabrielle Baillet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande.
* * * * *
La greffière La présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 26 NOVEMBRE 2025
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12341 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGCKL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Juin 2022 - tribunal judiciaire de Paris 9ème chambre 3ème section - RG n° 19/11682
APPELANTE
S.A.R.L. HTPS EXPERTISE
[Adresse 1]
[Localité 5]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Mickaël RUBINSOHN, avocat au barreau de Paris, toque : G0586
INTIMÉS
Monsieur [F] [I]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représenté par Me Marie-Gabrielle BAILLET, avocat au barreau de Paris, toque : B0230, avocat plaidant
S.A. CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIALE NORD OUEST (désistement à son égard de la société HTPS par ordonnance du conseiller de la mise en état du 3 décembre 2024 et de M. [I] par ordonnance du conseiller de la mise en état du 5 novembre 2024)
[Adresse 2]
[Localité 3]
N°SIREN : 455 502 096
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jérôme HOCQUARD de la SELEURL ELOCA, avocat au barreau de Paris, toque : P0087
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Octobre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Valérie CHAMP, présidente de chambre, entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Valérie CHAMP, Présidente de chambre
Mme Laurence CHAINTRON, conseillère
Mme Anne BAMBERGER, conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Valérie CHAMP, présidente de chambre et par Mélanie THOMAS, greffière, présente lors de la mise à disposition.
* * * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant acte sous seing privé du 30 avril 2015, la société CIC Nord Ouest (la banque) a consenti à la société Osmoz Coffee (la société) un prêt de 90 000 euros remboursable au taux de 2,95 % l'an en 84 mensualités de 1 193,01 euros chacune pour financer des travaux d'aménagement, garanti par acte du même jour par M. [I] (la caution) dans la limite de 27 000 euros en principal et accessoires et de 108 mois.
Le 20 août 2015, la banque a consenti à la société un second prêt de 71 200 euros pour financer des travaux complémentaires et racheter un crédit fournisseur au taux de 2, 70 % l'an remboursable en 60 mensualités de 1 269,90 euros, garanti par la caution dans la limite de 85 440 euros en principal et accessoires et de 84 mois.
Le 18 mars 2016, la caution a cédé 960 parts sur 1 200 détenues dans le capital de la société à M. [Y] au prix global de 24 000 euros.
Le 14 février 2018, la société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Compiègne et la banque a déclaré sa créance à hauteur de 66 888,42 euros au titre du premier prêt et de 43 211,30 euros au titre du second.
Le 9 avril 2018, celle-ci a mis en demeure la caution de lui régler la somme de 70 211,30 euros, puis par exploit d'huissier du 4 octobre 2019, l'a assignée en paiement devant le tribunal judiciaire de Paris.
Par exploit du 6 février 2020, la caution a appelé en garantie la société HPTS Expertise en sa qualité de rédacteur de l'acte de cession de parts.
Suivant jugement du 2 juin 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
- condamné la caution à payer à la banque la somme de 70 211,30 euros augmentés des intérêts au taux conventionnel de 2,95 % l'an sur 27 000 euros, des intérêts au taux conventionnel de 2,70 % l'an sur 37 984,14 euros et au taux d'intérêt légal pour le surplus dès le 9 avril 2018 ;
- ordonné la capitalisation des intérêts ;
- dit que la société HPTS Expertise devra garantir la caution de cette condamnation à concurrence de 7 000 euros ;
- dit irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par la société à responsabilité limitée HPTS Expertise ;
- rejeté le surplus des demandes ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné la caution à payer à la banque la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société HPTS Expertise à payer à la caution la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la caution aux dépens de l'instance l'opposant à la banque ;
- condamné la société HPTS Expertise aux dépens de l'instance l'opposant à la caution.
La société HPTS a relevé appel du jugement le 1er juillet 2022.
Suivant ordonnance du 5 novembre 2024, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement partiel de M. [I] à l'encontre de la banque et dit que l'instance se poursuivait à l'égard des autres parties.
Suivant ordonnance du 3 décembre 2024, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement partiel de la société HTPS Expertise à l'encontre de la banque et dit que l'instance se poursuivait à l'égard des autres parties.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 septembre 2022, la société HPTS Expertise demande à la cour, de :
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 2 juin 2022 en ce qu'il a dit que la société HPTS Expertise devait garantir M. [I] de sa condamnation à concurrence de 7 000 euros et l'a condamnée à payer à ce dernier la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
En conséquence,
- condamner M. [I] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première et seconde instance.
La société HPTS Expertise ne conteste pas être débitrice d'une obligation d'information et de conseil à l'égard de M. [I], cédant, portant sur la nécessité de solliciter une substitution de cautions auprès de la banque, mais soutient rapporter la preuve de l'exécution de l'obligation contractée.
S'agissant de la perte de chance alléguée, elle expose que celle-ci est nulle au regard de la dégradation des relations de la banque et de la caution du fait de la défaillance de la société garantie et au regard de la santé comptable précaire du cessionnaire, rendant peu vraisemblable une acceptation de la banque de substitution de cautions.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 mars 2024, la caution a formé appel incident et demande à la cour, de :
- infirmer le jugement déféré des chefs du dispositif suivant :
dit que la société HPTS Expertise devra garantir la caution de cette condamnation à concurrence de 7 000 euros ;
dejette le surplus des demandes ;
Et statuant à nouveau,
- donner acte à la caution du désistement de ses demandes à l'encontre de la banque à l'occasion de l'appel incident du jugement déféré,
- condamner la société HTPS Expertise à la relever et à la garantir des condamnations prononcées aux termes du jugement déféré,
- rejeter les demandes de la société HTPS Expertise,
- condamner la société HTPS Expertise à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés par Maître Marie-Gabrielle Baillet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La caution expose que la société HTPS Expertise a manqué à ses obligations d'information et de conseil à son égard, en ce qu'elle ne l'a pas informée lors de la cession de la persistance de son engagement de caution, à défaut d'insertion d'une clause de substitution de garantie à l'acte de cession de parts sociales et qu'elle doit la garantir. Elle conteste que les démarches effectuées conjointement avec M. [Y] auprès de la banque et les échanges qu'elle a pu avoir avec celle-ci afin de lever son cautionnement permettent d'établir comme le soutient la société HTPS Expertise qu'elle a satisfait à son obligation. Elle souligne au contraire que les nombreux échanges qui ont eu lieu avec celle-ci ne mentionnent jamais ce point et que la société HTPS Expertise sucombe à établir qu'elle a fourni une telle information en lui soumettant un projet d'acte comportant une telle clause ou en évoquant précisément le risque associé à ne pas la mentionner dans l'acte de cession.
Elle conteste enfin être une caution avertie et souligne avoir eu recours aux services de la société HTPS Expertise afin d'être conseillée utilement.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 mai 2025 et l'affaire fixée à l'audience du 16 octobre 2025.
MOTIFS
Sur la responsabilité de la société HTPS Expertise
Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
Il sera observé que la société HPTS Expertise ne conteste plus en appel être intervenue dans l'établissement de l'acte de cession du 18 mars 2016 et qu'elle l'a rédigé. Elle conteste désormais uniquement avoir manqué à son devoir d'information et de conseil relativement à l'opportunité d'insérer ou non une clause de substitution de garantie en soutenant rapporter la preuve d'y avoir satisfait.
La société HTPS Expertise verse notamment aux débats deux attestations émanant de M. [Y], le cessionnaire datées des 23 novembre 2020 et 13 février 2021, ainsi que trois courriels échangés entre le conseiller bancaire et M. [I], le cédant des 13 et 26 mars 2015 et du 27 décembre 2016. Il résulte de ces documents que si dans la première attestation, M. [Y] expose que que la banque a répondu in fine le 27 décembre 2016 ne pas être d'accord pour la substitution de caution, faute pour l'acte de cession de parts de comporter une clause de garantie de passif et qu'une telle clause n'a pas été évoquée par l'expert comptable et ne figurait pas dans l'acte établi par la société HTPS Expertise, il déclare dans la seconde attestation que cette même société n'était pas l'expert-comptable de la société Ozmoz Coffee et a bien conseillé aux cédants de lever les cautions, ce qui paraît contradictoire. Les échanges de courriels entre le conseiller bancaire et M. [I] n'apportent aucun élément sur l'exécution ou non de son obligation d'information et de conseil par la société HTPS Expertise.
M. [I] produit, quant à lui, d'autres attestations de M. [Y], une datée du 23 novembre 2020, dans laquelle il atteste que la société HTPS Expertise était l'expert-comptable de la société Osmoz Coffee et a rédigé les actes de cession, s'est occupée de l'enregistrement et de la publicité et une datée du 11 mars 2021, seule à être accompagnée de la pièce d'identité de M. [Y], soulignant qu'il révoque l'attestation rédigée le 13 février 2021 au bénéfice de la société HTPS Expertise et qu'il maintient celle du 23 novembre 2020, en précisant que cette société connaissait parfaitement le dossier, qu'elle a rédigé l'acte de cession et n'a jamais évoqué la question des cautions.
Il sera observé que si l'acte de cession n'est pas produit, les parties admettent qu'il ne comporte pas la clause dont l'absence est critiquée, ni une mention sur l'opportunité ou non de l'insérer dans l'acte.
Il se déduit de ces éléments, que M. [I] rapporte la preuve que la société HTPS Expertise avait contracté à son égard une obligation d'information et de conseil à l'occasion de la rédaction de l'acte de cession, indépendamment de l'absence de lettre de mission formalisée, qu'en revanche celle-ci ne démontre pas avoir exécuté une telle obligation.
L'inexécution de cette obligation, qui a privé la caution de la possibilité de se faire substituer dans ses engagements, à l'occasion de l'acte de cession, la prive d'une chance d'éviter le risque qui s'est réalisé, qui doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
Il sera relevé que si le rédacteur de l'acte devait informer les parties sur l'opportunité ou non d'insérer une clause de garantie, il ne pouvait, comme l'a exactement relevé le tribunal, inférer sur la décision de la banque d'accepter une substitution de cautions. Il ne pouvait pas plus modifier la situation financière de la société cédée.
Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a retenu que la responsabilité de la société HTPS Expertise et en ce qu'il a limité la demande indemnitaire à la somme de 7 000 euros.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'appelante sera donc condamnée aux dépens qui seront recouvrés par Maître Marie-Gabrielle Baillet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. La société HTPS Expertise sera condamnée à payer à M. [I] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 2 juin 2022 s'agissant de la condamnation de la société HTPS Expertise à garantir M. [I] à hauteur de 7 000 euros relativement à sa condamnation à payer à la société Crédit industriel et commercial Nord Ouest la somme de 70 211,30 euros augmentés des intérêts au taux conventionnel de 2,95 % l'an sur 27 000 euros, des intérêts au taux conventionnel de 2,70 % l'an sur 37 984,14 euros et au taux d'intérêt légal pour le surplus dès le 9 avril 2018, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société HTPS Expertise à payer à M. [I] une somme de 2 000 euros de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société HTPS Expertise aux entiers dépens d'appel, qui seront recouvrés par Maître Marie-Gabrielle Baillet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande.
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La greffière La présidente