CA Paris, Pôle 5 - ch. 4, 26 novembre 2025, n° 25/03887
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 4
ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2025
(n° , 28 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/03887 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CK42V
Décision déférée à la Cour :
Arrêt : Cour de cassation du 4 décembre 2024 RG n° 732 F-D
Arrêt : cour d'appel de Paris du 8 février 2023 RG n° 20/08662
Jugement du 17 Juin 2020 -Tribunal de commerce de Paris- RG n° J 2020000170
DEMANDERESSE À LA SAISINE
S.A.S. FITNESS PARK DEVELOPMENT (anciennement dénommée Mov'in) agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro :B 379 818 032
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 5]
Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIÉS, avocat au barreau de Paris, toque : L0010
Assistée de Me Rébecca Ichoua, DE PUZZLE AVOCATS, avocat au barreau de Paris, toque : D 0738
DÉFENDEURS À LA SAISINE
S.C.P. [E], prise en la personne de MAÎTRE [X] [E], mandatataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL ESCALE BEAUTE
[Adresse 1]
[Localité 6]
S.A.R.L. INGENIERIE HOLDING MANAGEMENT (IHM), prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Immatriculée au RCS de Pontoise sous le numéro : 432 646 225
[Adresse 2]
[Localité 6]
Monsieur [N] [I], né le 8 Février 1960 à [Localité 8], de nationalité française, chef d'entreprise
[Adresse 3]
[Localité 4]
Madame [C] [L], née le 16 Mai 1958 à [Localité 7] ( MADAGASCAR), de nationalité française, sans emploi
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentés par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de Paris, toque : D2090
Assistés de Me Alexandre Pilliet de la SELARL FANEON & DE LABLIERE AVOCAT, avocat au barreau de Paris, toque : P585
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 15 Octobre 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bertrand Gouarin, président de chambre
M. Julien Richaud, conseiller
Mme Hélène Bussiere, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. Richaud dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffière , lors des débats : Mme Elisabeth Verbeke
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Bertrand Gouarin, président de chambre et par Mme Elisabeth Verbeke, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE
La SAS Fitness Park Development (anciennement dénommée Mov'in) développe et exploite un réseau de salles de remise en forme et de sport en concédant l'exploitation de marques dont elle est propriétaire, telles « Lady Moving », « Moving Express » et « Fitness Park ».
La SARL Ingénierie Holding Management (ci-après, « la SARL IHM »), gérée par monsieur [N] [I], est une société holding détenant des participations dans les sociétés créées par ce dernier, telle la SARL Escale Beauté qu'il gérait jusqu'à sa liquidation judiciaire prononcée le 27 septembre 2019 par jugement du tribunal de commerce de Pontoise désignant la SCP [E] en qualité de liquidateur judiciaire.
Par acte du 13 février 2006, la société SPA Bien-être a conclu avec la SAS Mov'in un contrat de réservation de zone géographique d'une durée de six mois portant promesse de licence de la marque « Lady Moving ». Le 10 juillet 2006, la SARL Escale Beauté a acquis le fonds de commerce exploité par la première dans le centre commercial de [Localité 9] et est devenue bénéficiaire de ce contrat. Pour financer l'acquisition du fonds et les travaux d'aménagement du local, la SARL Escale Beauté a souscrit deux prêts bancaires de 340 000 et 380 000 euros pour lesquels la SARL IHM s'est portée caution solidaire aux côtés de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L], sa compagne, également associée de la SARL IHM.
En dépit de la signature, motivée par l'existence d'un litige opposant la SARL Escale Beauté à son cédant, de deux avenants de prolongation du contrat de réservation les 27 mars 2007 et 19 mai 2008, le projet a été suspendu. Néanmoins, le 30 septembre 2010 la SARL Escale Beauté et la SAS Mov'in concluaient pour une durée de 12 mois un contrat de réservation de zone valant promesse de licence de la marque « Lady Moving ».
Le 26 octobre 2011, la SARL Escale Beauté et la SAS Mov'in concluaient le contrat qualifié de licence de marque envisagé. Les parties régularisaient le jour même puis le 12 février 2013 deux protocoles d'accord réglant des différends touchant notamment à la mise en place du « Pack Concept Lady Moving » et à la définition de la zone d'exclusivité de la SARL Escale Beauté.
Par courriers des 31 décembre 2013 et 18 janvier 2014, la SARL Escale Beauté imputait à la SAS Mov'in divers manquements à ses obligations précontractuelles et contractuelles fondant selon elle la désignation d'un mandataire ad hoc puis sollicitait la communication du document d'information précontractuel (ci-après, « le DIP ») et du contrat de licence de marque relatifs au centre de [Localité 9].
C'est dans ces circonstances que la SARL Escale Beauté, prise alors en la personne de son commissaire à l'exécution du plan, la SARL IHM, monsieur [N] [I] et madame [C] [L] ont, par acte d'huissier de justice du 16 juin 2014, assigné devant le tribunal de commerce de Paris la SAS Mov'in en nullité, et subsidiairement en résiliation, des contrats de réservation et de licence de marque ainsi qu'en indemnisation de leurs préjudices.
Par jugement du 17 juin 2020, le tribunal de commerce de Paris a en particulier :
- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la SAS Mov'in et s'est déclaré compétent ;
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée aux protocoles d'accord opposée par la SAS Mov'in ;
- déclaré irrecevables les demandes relatives au contrat de réservation du 16 février 2006 et aux deux avenants des 27 mars 2007 et 9 mai 2008 ;
- débouté la SAS Mov'in de sa fin de non-recevoir tirée de l'interdiction du cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle ;
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de nullité du contrat du 30 septembre 2010 et du contrat de licence de marque « Lady Moving » ;
- constaté la violation de l'exclusivité territoriale stipulée dans le contrat de réservation du 30 septembre 2010 et le contrat de licence du 29 octobre 2011 et déclaré la SAS Mov'in seule responsable de cette violation ;
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de remboursement intégral des sommes versées au titre de la réservation du territoire, des redevances contractuelles, du pack Lady Moving, des dépenses publicitaires et de la fourniture du logiciel d'origine ;
- condamné la SAS Mov'in à verser à la SARL Escale Beauté la somme de 164 400 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamné la SAS Mov'in à payer à la SARL Escale Beauté la somme de 150 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving mais débouté la SARL Escale Beauté de sa demande de remboursement des autres sommes réclamées ;
- débouté monsieur [N] [I] et madame [C] [L] de leurs demandes de condamnation de la SAS Mov'in à leur régler la somme de 35 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ;
- condamné la SAS Mov'in à payer la somme de 20 000 euros chacun à la SARL Escale Beauté, à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties de leurs autres demandes ;
- condamné la SAS Mov'in aux dépens de l'instance.
Saisie par déclarations d'appel de la SAS Mov'in du 6 juillet 2020 puis de la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, de la SARL IHM, de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L] du 21 juillet 2020, la cour d'appel de Paris, après avoir joint les instances, a, par arrêt du 8 mars 2023 rectifié le 28 juin 2023, statué en ces termes :
Déclare recevable la demande de Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à l'encontre de M. [I] et Madame [L], et la demande de condamnation de Fitness Park Development (anciennement Mov'in) pour procédure abusive ;
Infirme le jugement du tribunal en ses dispositions qui lui sont soumises, mais seulement en ce qu'il a :
Constaté la violation de l'exclusivité territoriale du contrat de réservation du 30 septembre 2010 et du contrat de licence du 29 octobre 2011 et déclaré Fitness Park Development (anciennement Mov'in) seule responsable de ladite violation ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à verser à la société Escale Beauté la somme de 164.400 € à titre de dommages et intérêts ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à payer à la société Escale Beauté la somme de 154.640 € au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à payer la somme de 20.000 € à la société Escale Beauté au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à payer la somme de 20.000 € à M. [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) aux dépens ;
Statuant de nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute la société Fitness Park Development (anciennement Movtin) de sa demande de dommages et intérêts ;
Déboute la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) de sa demande au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving ;
Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile formulées par ['] la société Fitness Park Development (anciennement Movtin), par M. [I] et par la SCP [E], ès qualités de liquidateur de la société Escale Beauté ;
Condamne la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à verser la somme de 2 000 euros à Mme [L] pour procédure abusive ;
Condamne la SCP [E], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Espace Beauté, et M. [N] [I], aux dépens.
Cependant, par arrêt du 4 décembre 2024 (n° 23-16.684), la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé cet arrêt, « sauf en ce qu'il déclare recevable la demande de la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à l'encontre de M. [I] et Mme [L] et la demande de condamnation de la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) pour procédure abusive », pour les motifs suivants :
- [premier moyen, troisième branche] Vu l'article L. 330-3 du code de commerce :
5. Selon ce texte, toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause. Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités. Ledit document ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat.
6. Pour infirmer le jugement, mais seulement en ce qu'il a constaté la violation de l'exclusivité territoriale prévue au contrat de réservation du 30septembre2010, déclaré la société Fitness Park Development seule responsable, et condamné cette société à payer à la société Escale beauté la somme de 164 400 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que celle de 154 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept « Lady Moving », outre une somme à titre d'indemnité de procédure à chacun des défendeurs, l'arrêt constate, d'abord, que le document d'information précontractuelle (DIP) a été communiqué à la société Escale beauté le 30 septembre 2010, soit bien avant la signature du contrat du 26 octobre 2011 , de sorte que le délai prévu à l'article L. 330-3 du code de commerce a été respecté.
7. Il ajoute que les informations relatives à des procédures judiciaires engagées par des membres du réseau à l'encontre de la société Fitness Park Development sont postérieures à la transmission du DIP, tandis que ce document mentionnait l'existence de liquidations judiciaires subies par certains exploitants du réseau.
8. L'arrêt en déduit qu'il n'est pas démontré que l'état du réseau a été dissimulé au futur cocontractant.
9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, entre la date de transmission du DIP et la date de signature du contrat « de licence de marque », la situation du réseau ne s'était pas trouvée modifiée dans des conditions telles que le franchisé ne se serait pas engagé, en particulier s'il avait été informé du nombre réel de sortie du réseau au 30 septembre 201 1 par suite du prononcé de liquidations judiciaires et de la procédure judiciaire engagée le 18 mars 2011 par des membres du réseau à l'encontre de la société Fitness Park Development, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
- [premier moyen, neuvième branche] Vu les articles L. 330-3 du code de commerce et 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
11. Il résulte du premier de ces textes que si les comptes prévisionnels ne figurent pas dans les éléments devant se trouver dans le document d'information précontractuelle, ils doivent, lorsqu'ils sont communiqués, présenter un caractère sérieux.
12. Aux termes du second, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
13. Pour écarter le moyen selon lequel la société Escale beauté aurait été victime d'un dol, après avoir constaté que les bilans prévisionnels communiqués par la société Fitness Park Development étaient des « prévisionnels-types non contractuels », l'arrêt retient encore que la société Escale beauté, qui avait la volonté de s'installer dans un centre commercial, ne démontre pas qu'elle aurait contracté à des conditions différentes si elle avait eu connaissance d'informations plus précises et exactes. Il ajoute qu'il doit être pris en considération qu'il s'agit d'un « concept nouveau sur un marché nouveau ».
14. En statuant ainsi, après avoir constaté qu'au titre de la fourniture du DIP, la société Fitness Park Development avait transmis des bilans prévisionnels inexacts, n'avait pas révélé le nombre exact de sorties du réseau à la suite de liquidations judiciaires et n'avait pas révélé la procédure judiciaire engagée par certains membres à son encontre, ce dont il se déduisait l'omission d'informations révélatrices du risque élevé d'échec de l'ouverture du centre, lesquelles, si la société Escale beauté les avait connues, étaient de nature à la dissuader de contracter, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.
Par déclaration reçue au greffe le 17 février 2025, la SAS Fitness Park Development a saisi la cour d'appel de renvoi.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 6 octobre 2025, la SAS Fitness Park Development demande à la cour, au visa des articles L 330-3 et R 330-1 du code de commerce, 1382, 1110 et suivants et 1147 du code civil et 122 du code de procédure civile :
- de recevoir la SAS Fitness Park Development en ses demandes et les déclarer bien fondées ;
- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 juin2020 en ce qu'il a :
o rejeté la fin de non-recevoir opposée par la SAS Mov'in et tirée de l'autorité de chose jugée des protocoles signés par les parties ;
o débouté la SAS Mov'in de sa fin de non-recevoir tirée de l'interdiction du cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, constaté la violation de l'exclusivité territoriale du contrat de réservation du 30 septembre 2010 et du contrat de licence du 26 octobre 2011, déclaré la SAS Mov'in seule responsable de cette violation et condamné la SAS Mov'in à verser à la SARL Escale Beauté la somme de 164 400 euros au titre de dommages et intérêts et celle de 150 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving, condamné la SAS Mov'in à payer la somme de 20 000 euros chacun à la SARL Escale Beauté, à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné l'exécution provisoire du jugement et condamné la SAS Mov'in aux dépens de l'instance ;
- par conséquent, statuant à nouveau, de prononcer l'irrecevabilité des demandes de la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, au titre de l'autorité de la chose jugée attachée aux protocoles d'accord des 26 octobre 2011 et 12 février 2013 conclus entre la SARL Escale Beauté et la SAS Mov'in, et de rejeter l'ensemble des demandes des intimés ;
- à titre subsidiaire, de prononcer l'irrecevabilité des demandes de la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, au titre du principe du non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, et de rejeter l'ensemble des demandes des intimés ;
- à titre infiniment subsidiaire, de débouter les intimés de l'ensemble de leurs prétentions en ce qu'elles sont mal fondées et injustifiées ;
- en tout état de cause, de condamner solidairement les intimés au paiement de la somme de 150 000 euros « au profit de la SAS Mov'in, pour dénigrement fautif et atteinte à l'image de Movin » ;
- de condamner chacun des intimés à payer « à la SAS Mov'in » la somme de 25 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner solidairement les intimés aux entiers dépens.
En réponse, dans leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 7 octobre 2025, la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la SARL IHM, monsieur [N] [I] et madame [C] [L] demandent à la cour :
- à titre principal, vu les articles 1109, 1110, 1116 du code civil et L 330-3 du code de commerce :
o d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 juin 2020 en ce qu'il a débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de nullité du contrat du 30 septembre 2010 et du contrat de licence de marque « Lady Moving » ;
o statuant à nouveau, de prononcer la nullité du contrat de réservation du 30 septembre 2010, et du contrat de licence de marque « Lady Moving » du 26 octobre 2011 pour dol et subsidiairement pour erreur.
- à titre subsidiaire, vu l'article1134 du code civil, de confirmer le jugement en ce qu'il condamne la SAS Mov'in devenue la SAS Fitness Park Development à réparer le préjudice de la SARL Escale Beauté du fait de la violation de sa zone d'exclusivité ;
- en conséquence, en tout état de cause et statuant à nouveau :
o sur la compétence, de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 juin 2020 en ce qu'il a rejeté l'incompétence du tribunal de commerce ;
o sur la fin de non-recevoir, de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 juin 2020 en ce qu'il a rejeté l'irrecevabilité soulevé par la SAS Mov'in du fait de la signature des protocoles transactionnels des 26 octobre 2011 et du 12 février 2013, et, subsidiairement, de prononcer la nullité du protocole du 12 février 2013 pour défaut de concessions réciproques et dol ;
o sur la responsabilité civile de la SAS Fitness Park Development, d'infirmer le jugement en ce qu'il a :
débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de remboursement intégral des sommes versées au titre de la réservation du territoire, des redevances contractuelles, du pack « Lady Moving », des dépenses publicitaires et de la fourniture du logiciel d'origine ;
débouté la SARL Escale Beautéde sa demande de remboursement des autres sommes réclamées ;
débouté monsieur [N] [I] et madame [C] [L] de leur demande de condamnation de la SAS Mov'in à leur régler la somme de 35 000 euros au titre du préjudice moral ;
débouté la SARL Escale Beauté, monsieur [N] [I], madame [C] [L] et la SARL IHM de leurs autres demandes ;
o statuant à nouveau, de condamner la SAS Fitness Park Development à réparer le préjudice subi par les intimés par l'allocation de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil, et, sur la réparation, de :
condamner la SAS Fitness Park Developmentà la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre de la réservation du territoire, soit 12 500 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre des redevances contractuelles, soit 21 000 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre du pack « Lady Moving », soit 79 500 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre des dépenses publicitaires versées directement à la SAS Mov'in, et donc au paiement de la somme de 5 495 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre de la fourniture du logiciel d'origine et donc au paiement de la somme 500 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 973 976 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice matériel ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 112 715 euros de dommages et intérêts au titre de la perte d'une chance ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 221 786 euros au titre de la dépose des éléments du concept « Lady Moving » ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 5 297 euros au titre de la prise en charge des remboursements d'abonnements ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 30 809,15 euros au titre du remboursement des frais liés à la procédure de sauvegarde, de redressement et de liquidation ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 343 310 euros au titre du préjudice lié aux charges de la liquidation ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté de la somme de 57 723,37 euros au titre des dépenses de communication ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 31 854,97 euros au titre du matériel acquis hors pack « Lady Moving » ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 4 190 euros au titre des frais divers (consultants et huissiers de justice) ;
condamner la SAS Fitness Park Development à garantir monsieur [N] [I], madame [C] [L] et la SARL IHM de tout remboursement anticipé qui serait exigé par la banque populaire au titre des prêts ;
condamner la SAS Fitness Park Development à dédommager la SARL IHM au titre de la perte financière subie par cette dernière sur les exercices 2011, 2012, 2013 et 2014, en raison des sommes bloquées en compte courant, par application du taux moyen de rendement des obligations et donc à lui verser la somme de 165 350,71 euros, somme à parfaire au jour de l'audience ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] la somme de 35 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] la somme de 5 000 euros chacun au titre de leur préjudice pour procédure abusive ;
débouter la SAS Fitness Park Development de l'ensemble de ses demandes ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté, à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] la somme de 20 000 euros chacun au titre des frais irrépétibles de l'article 700 code de procédure civile ;
condamner la SAS Fitness Park Development aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux décisions entreprises et aux conclusions visées pour un exposé détaillé du litige et des moyens des parties.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 octobre 2025. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, l'arrêt sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile.
Par message RPVA du 17 octobre 2025, la SAS Fitness Park Development s'est désistée de sa demande au titre du dénigrement, désistement accepté sans réserve par les intimés par message RPVA du 20 octobre 2025.
MOTIVATION
A titre liminaire, la cour rappelle que :
- conformément à l'article 631 du code de procédure civile, l'instruction est reprise en l'état de la procédure non atteinte par la cassation, la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation n'étant de ce fait pas une déclaration d'appel et n'introduisant pas une nouvelle instance mais entraînant la poursuite de l'instance d'appel initiale ;
- en vertu des dispositions combinées des articles 562 et 954 du code de procédure civile, si l'acte d'appel opère dévolution des chefs critiqués du jugement et détermine ainsi le périmètre de l'effet dévolutif de l'appel (en ce sens, 2ème Civ., 30 janvier 2020, n° 18-22.528), seules les dernières conclusions fixent l'objet du litige au sens de l'article 4 du code de procédure civile et la portée de l'appel (en ce sens, 2ème Civ., 26 mai 2011, n° 10-18.304). Dès lors, chaque partie est libre de limiter sa critique à certains des chefs visés dans son appel principal ou incident et la cour est alors tenue de confirmer ceux qui sont abandonnés mais dont elle demeure saisie par le jeu de l'effet dévolutif.
Dans ce cadre, si la SAS Mov'in, aux droits de laquelle vient la SAS Fitness Park Development, vise dans sa déclaration d'appel du 6 juillet 2020 le chef du dispositif du jugement du 17 juin 2020 rejetant son exception d'incompétence, elle ne présente pas ce moyen de défense dans le dispositif de ses dernières conclusions et ne l'évoque d'ailleurs pas dans sa motivation. Aussi, ce moyen est réputé abandonné et la cour ne peut que confirmer le jugement de ce chef qui présuppose la requalification du contrat de licence de marque en contrat de franchise.
Par ailleurs, les intimés concluent subsidiairement à la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la SAS Fitness Park Development au titre de la violation de l'exclusivité accordée à la SARL Escale Beauté mais ne développent aucun moyen dans leurs dernières écritures au soutien de cette prétention. Ils sont ainsi, conformément à l'article 954 in fine du code de procédure civile, réputés s'approprier les motifs du jugement sur ce point.
Enfin, parfait par l'effet de son acceptation sans réserve au sens des articles 400, 401 et 403 du code de procédure civile, la perfection du désistement de la SAS Fitness Park Development de sa demande indemnitaire reconventionnelle au titre du dénigrement sera constatée.
1°) Sur la recevabilité des demandes
En vertu des articles 122 et 123 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée, cette liste n'étant pas limitative. Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.
a) Sur l'autorité de la chose jugée attachée aux protocoles d'accord
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development expose qu'elle a conclu avec la SARL Escale Beauté deux transactions. La première, signée le 26 octobre 2011 et relative aux « malfaçons dans la mise en place du Pack Concept Lady Moving », prévoyait une réduction de moitié du montant de la redevance de licence de marque entre le 1er septembre 2011 et le 31 août 2012 en contrepartie d'une renonciation par la SARL Escale Beauté à « quelque compensation ou somme complémentaire que ce soit au titre du Contrat de réservation, de la commande et de l'installation du Pack Concept Lady Moving et du contrat de licence de marque qui s'en suit » (article 2). La seconde, régularisée le 12 février 2013 et portant notamment sur « d'autres griefs concernant la définition de la zone de chalandise de son Centre, et [des] défauts de livraison dans le matériel », exonérait la SARL Escale Beauté de tout paiement des redevances pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2012 et réduisait leur montant de moitié jusqu'au terme (article 2). Soutenant qu'au jour de leur signature, la SARL Escale Beauté était informée de l'ouverture de centres de remise en forme dans les communes voisines, elle en déduit que le licencié a renoncé à invoquer la nullité des contrats au titre du non-respect de la zone d'exclusivité consentie, de l'obligation d'information précontractuelle ou de l'obligation d'assistance et est irrecevable à agir. Elle ajoute que les transactions comportent des concessions réelles de sa part et que les intimés ne prouvent aucune man'uvre frauduleuse fondant le dol qu'ils allèguent, l'erreur de droit opposée étant pour sa part inexistante et quoi qu'il en soit inopérante au sens de l'article 2052 du code civil.
En réponse, les intimés exposent que les protocoles opposés étaient destinés à mettre un terme à un autre litige relatif à des « malfaçons dans la mise en place du Pack Concept Lady Moving », l'ajout d'un cinquième paragraphe dans la seconde transaction, la veille de sa signature, n'étant pas de nature à étendre son objet à d'autres griefs, les courriers auxquels elle se réfère n'étant pas annexés et ne concernant pas les réclamations relatives au document d'information précontractuel (ci-après, « le DIP »), aux prévisionnels fournis par le franchiseur ainsi qu'aux problématiques de transmission du savoir-faire ou liées au devoir d'assistance.
Réponse de la cour
En vertu des articles 2044 (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 qui était inapplicable au jour de la conclusion des protocoles litigieux), 2048 et 2049 du code civil, la transaction, qui est un contrat écrit par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître, se renferme dans son objet, la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entendant que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu, et ne règle que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé. Les transactions, qui ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort en vertu de l'article 2052 du code civil (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 qui était inapplicable au jour de la conclusion des protocoles litigieux), ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion et ne sont rescindables qu'en cas d'erreur dans la personne ou sur l'objet de la contestation ainsi que dans tous les cas où il y a dol ou violence conformément à l'article 2053 du même code (applicable au jour des protocoles litigieux). Elles sont d'interprétation restrictive.
Par ailleurs, au sens des dispositions des articles 1156 et suivants (devenus 1188 et suivants) du code civil, qui constituent non des normes juridiques s'imposant à elle, mais un guide d'interprétation des conventions à l'usage des parties et du juge, la cour interprète les stipulations manquant de clarté en recherchant la commune intention des parties contractantes sans s'arrêter au sens littéral des termes et en donnant à celles-ci le sens qui leur permet de produire un effet plutôt que celui qui les annihile en considération de la matière et de l'économie générale du contrat dont les clauses sont interdépendantes. L'intention des parties au jour de la conclusion peut être éclairée par leur comportement contemporain de la formation du contrat et adopté durant son exécution.
Le protocole d'accord du 26 octobre 2011 (pièce 16 de l'appelante) porte sur des « malfaçons dans la mise en place du Pack Concept Lady Moving », désordres constatés par procès-verbal de constat causés par l'action d'un sous-traitant ayant impliqué des travaux de remise en état de 5 500 euros. Les parties ont convenu des concessions réciproques « afin de régler définitivement toutes réclamations nées notamment de l'exécution et de la mise en place du Pack Concept Lady Moving », la SARL Escale Beauté déclarant de ce fait être « rempli[e] de tous ses droits et renon[çant] expressément et irrévocablement à quelque compensation ou somme complémentaire que soit au titre du Contrat de réservation, de la commande et de l'installation du Pack Concept LADY MOVING et du contrat de licence de marque qui s'en suit ».
Ainsi que le résume exactement la SAS Fitness Park Development (page 15 de ses écritures), cette transaction, qui précise le coût de remise en état effectivement supporté par la SARL Escale Beauté, est relative à « la livraison du Pack Lady Moving et à des équipements présentés comme défectueux ou manquants », point qui constitue son unique objet. Aussi, ce protocole est étranger à toute faute précontractuelle, par hypothèse dissimulée au jour de la signature concomitante du contrat qualifié de licence de marque et découverte postérieurement à sa régularisation, et aux demandes de restitution et d'indemnisation qu'elle fonde.
Ce premier moyen est inopérant.
Le protocole d'accord du 12 février 2013 (pièce 10 de l'appelante) porte sur « d'autres griefs [opposés par la SARL Escale Beauté] concernant la définition de la zone de chalandise de son Centre, et de défauts de livraison dans le matériel ainsi que différents autres griefs que les parties se dispensent expressément de recenser ['], mais qui ont été largement exprimés au travers des échanges de correspondances pour aboutir notamment à des courriers recommandés avec avis de réception des 7 juin 2012 et 24 octobre 2012 qui reflètent l'essentiel des griefs formulés et une exposition des conditions de règlement de ces griefs ». En contrepartie des concessions faites par la SAS Fitness Park Development, la SARL Escale Beauté « se déclare rempli[e] de tous ses droits et renonce expressément et irrévocablement à toutes instances, à toutes actions, à toutes compensations ou demandes complémentaires ou supplémentaires au titre de la formation, de l'interprétation, de l'exécution du contrat de réservation ou du contrat de licence de marque et au titre de la commande et de l'installation du Pack Concept ».
Alors que le protocole énonce des griefs de manière trop imprécise et parcellaire pour en définir les contours et en saisir la consistance (« différents autres griefs que les parties se dispensent expressément de recenser », « l'essentiel des griefs formulés »), les échanges qu'il évoque pour pallier cette carence ne sont pas identifiés à l'exception de deux courriers qui n'y sont pas annexés et qui ne sont de surcroît pas produits, la SAS Fitness Park Development n'y faisant d'ailleurs pas référence dans son tableau de correspondance entre les griefs censés être couverts par la transaction et ceux formulés postérieurement à sa conclusion (page 16 de ses écritures). Aussi, la SAS Fitness Park Development ne démontre pas que ce second protocole concernerait des prétentions en lien avec celles soumises au tribunal.
Ce second moyen est également inopérant
En conséquence, c'est par de justes motifs que la cour adopte en complément des siens que le tribunal a rejeté la fin de non-recevoir opposée à ce titre par la SAS Fitness Park Development.
b) Sur le cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development soutient que les intimés sollicitent cumulativement la nullité des contrats au titre de sa responsabilité contractuelle et des indemnisations identiques sur le fondement de sa responsabilité délictuelle et en déduit l'irrecevabilité de l'intégralité de leurs prétentions qui sont toutes concurrentes.
En réponse, les intimés exposent que, à raison de l'anéantissement rétroactif du contrat qu'emporte sa nullité, seule la responsabilité délictuelle de l'auteur du dol qui la fonde peut être recherchée.
Réponse de la cour
En application de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er octobre 2016, les contrats litigieux des 30 septembre 2010 et 26 octobre 2011, conclus antérieurement, demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d'ordre public ains que pour leurs conditions de formation.
En vertu des dispositions combinées des articles 1134, 1147 et suivants et 1382 (devenus 1103, 1231 et suivants et 1240) du code civil, la responsabilité délictuelle ne peut pas régir les rapports contractuels entre les parties. Celles-ci ne disposent ni d'une option entre ces deux régimes de responsabilité, l'existence d'une faute commise dans l'exécution d'un contrat imposant la mise en 'uvre exclusive de la responsabilité contractuelle de son auteur qui à l'inverse ne régit pas les relations hors convention, ni, en l'absence d'objet distinct des demandes, d'une possibilité de cumul des actions dont les fondements sont juridiquement incompatibles. De surcroît, le principe de la réparation intégrale, sans perte ni profit, exclut la double indemnisation d'un préjudice unique. La sanction du cumul est l'irrecevabilité de l'action (en ce sens, illustrant une position ancienne et constante : Com. 4 décembre 2019, n° 17-20.032).
Les intimés sollicitent :
- à titre principal la nullité des contrats et le bénéfice des restitutions consécutives ainsi que diverses sommes au profit de chacun d'eux à titre indemnitaire sur le fondement de l'article 1382 (ancien) du code civil ;
- subsidiairement, la réparation du préjudice de la SARL Escale Beauté causé par la violation de son exclusivité territoriale.
Contrairement à ce que soutient la SAS Fitness Park Development, la nullité pour dol ou pour erreur provoquée sanctionne des fautes précontractuelles, soit, par définition, des manquements antérieurs à la formation du contrat et de ce fait de nature délictuelle. Et, la victime de man'uvres dolosives peut exercer à son choix, outre une action en annulation du contrat, une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du dommage qu'elle a subi (en ce sens, Com., 15 janvier 2002, n° 99-18.774, confirmant une position constante désormais reprise expressément à l'article 1178 du code civil reprenant le droit positif antérieur et soulignant le caractère extracontractuel de la responsabilité résultant du dol).
Alors qu'aucun cumul de responsabilités n'est constitué par l'association de demandes de nullité et d'indemnisation consécutives au dol, le fait de solliciter à titre subsidiaire la réparation du préjudice causé par la violation d'une clause du contrat dont la nullité a été écartée et qui est par conséquent valide ne heurte pas le principe de non-option, les demandes étant clairement hiérarchisées et s'articulant sans contradiction, la prétention subsidiaire tirant les conséquences logiques du rejet des demandes principales.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir opposée par la SAS Fitness Park Development à ce titre.
2°) Sur la validité des contrats
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development expose que l'article L 330 du code de commerce, dont elle reconnaît qu'il s'applique au contrat qualifié de licence de marque litigieux, n'impose la communication ni d'une étude de marché local ni d'un prévisionnel et rappelle que tout manquement à l'obligation d'information précontractuelle qu'il institue ne fonde la nullité du contrat que s'il cause un vice du consentement prouvé, son existence ne se déduisant pas du non-respect du délai de 20 jours et le dol supposant la démonstration du caractère intentionnel des man'uvres qui le caractérisent. Concédant que tout prévisionnel communiqué par un franchiseur doit comporter des données exactes et sincères, elle indique que l'erreur sur la rentabilité n'est une cause de nullité que si elle procède des informations transmises par le franchiseur et ne repose pas sur des éléments postérieurs et imprévisibles.
Elle soutient dans ce cadre avoir remis à monsieur [N] [I] un DIP le 30 septembre 2010, soit plus de 20 jours avant la signature du contrat de réservation de zone du 30 septembre 2010 et du contrat de licence de marque du 26 octobre 2011 dont les termes confirment cette communication préalable, et note qu'il se contredit en critiquant précisément le contenu d'un document qu'il prétend ne pas avoir obtenu. Observant que le DIP mettait à la charge du candidat, qui disposait de sérieuses compétences professionnelles lui permettant d'apprécier le marché, le réseau et son évolution, l'obligation d'établir un prévisionnel, elle explique avoir transmis à monsieur [N] [I] des prévisionnels types le 18 mars 2007 puis un prévisionnel purement indicatif reposant sur des hypothèses moyennes de fonctionnement tirées des performances des autres établissements du réseau qui avait été établi le 5 mai 2010 et mis à jour le 8 juin 2011 sur la base des données et hypothèses de monsieur [N] [I], circonstances exclusives de sa responsabilité. Elle précise à cet égard qu'elle n'était tenue d'aucune obligation de résultat de réussite économique de la SARL Escale Beauté.
Elle expose que les données prétendues omises, comme les prévisionnels eux-mêmes, n'étaient pas déterminantes du consentement de la SARL Escale Beauté qui nourrissait le projet d'intégrer le réseau Mov'in depuis 2006, soit antérieurement à la remise du DIP, et aurait contracté dans les mêmes conditions si elle les avaient connues. Elle indique que les intimés, qui s'appuient sur les résultats nets globaux de la SARL Escale Beauté grevés par les nombreux litiges qu'elle a initiés et non sur son chiffre d'affaires propre à l'activité sportive objet du contrat, ne démontrent pas que le prévisionnel était irréaliste. Elle ajoute que plusieurs clubs étaient d'ailleurs bénéficiaires sur la période en cause, que les centres à l'enseigne Lady Moving étaient ceux qui résistaient le mieux à la baisse d'activité du secteur et que la SARL Escale Beauté éprouvaient d'importantes difficultés financières antérieures à la conclusion du contrat de licence de marque. Elle précise par ailleurs que la SARL Escale Beauté ne prouve pas l'existence de liquidations judiciaires postérieures au 3 septembre 2010 sciemment non mentionnées dans le DIP et note que l'assignation des licenciés Lady Moving a été signifiée par son conseil le 28 mars 2011, après remise de ce dernier, et n'a pas abouti à sa condamnation. Elle relève que le projet de monsieur [N] [I], qui a collaboré avec elle jusqu'en 2016 en commercialisant des locaux pour son compte et a négocié l'ouverture d'un centre Fitness Park, était mûrement réfléchi, les discussions ayant débuté en 2006, et que l'intervention de son salarié, monsieur [F], est sans lien avec les difficultés rencontrées par la SARL Escale Beauté. Elle soutient enfin que la SARL Escale Beauté ne démontre pas que, à les supposer réels, ses manquements à son obligation précontractuelle d'information aient vicié son consentement.
En réponse, les intimés exposent que le consentement de la SARL Escale Beauté a été, lors de la conclusion des contrats de réservation du 30 septembre 2010 et de franchise du 26 octobre 2011, vicié à raison de l'absence de transmission régulière du DIP, de ses insuffisances et inexactitudes et de l'insincérité volontaire des prévisionnels fournis par le franchiseur. Ils précisent ainsi que le DIP :
- n'a été matériellement communiqué qu'en juin 2015, postérieurement à l'assignation, après avoir été remis et « signé sur un coin de table » le 30 septembre 2010 « avec effet rétroactif au 3 septembre » puis conservé par la SAS Mov'in, carence qui ne lui a pas permis d'apprécier valablement les conséquences de la conclusion du contrat ;
- ne comprend pas les informations légalement requises relatives aux domiciliations bancaires du franchiseur, les comptes annuels des deux derniers exercices 2008 et 2009, la liste des licenciés ayant cessé leur activité, notamment en raison de liquidations, ainsi que le montant des investissements devant être effectués par le franchisé. Ils ajoutent que le document occulte également l'expérience professionnelle du directeur du réseau, monsieur [F], qui a animé un autre réseau désormais liquidé et a été condamné à cette occasion le 7 septembre 2011 ainsi que par la Cour de discipline budgétaire et financière pour des prêts octroyés frauduleusement dans le cadre d'une activité bancaire précédente. Ils indiquent que le DIP est également insincère en ce qu'il ne repose que sur des éléments relatifs à la marque Moving et non spécifiques au concept Lady Moving ;
- contient des informations obsolètes (Kbis, organigramme, bilan, étude antérieure à la création de l'enseigne) qui, si elles avaient été actualisées, auraient fait obstacle à la conclusion du contrat ;
- dissimulent de nombreuses liquidations judiciaires ouvertes à l'encontre de membres du réseau.
Ils expliquent par ailleurs que la SAS Mov'in a fourni différents prévisionnels chiffrés de 2006 à 2011 adaptés au centre de remise en forme de la SARL Escale Beauté, et non standards, qui sont très éloignés de ses résultats effectifs au titre de la seule activité fitness isolée dans l'étude Effigest qu'elle produit (en 2011, 26 298 euros contre 173 268 euros ; en 2012, 99 641 euros contre 376 681 euros ; en 2013, 102 006 euros contre 444 507 euros ; en 2014, 82 929 euros contre 532 110 euros ; en 2015, 65 269 euros contre 538 005 euros). Ils précisent que, sans même tenir compte des données manquantes propres aux sociétés liquidées, les autres centres de remise en forme exploités sous l'enseigne Lady Moving étaient déficitaires entre 2006 et 2009, un collectif de franchisé ayant dénoncé le 30 septembre 2010 l'impossibilité pour 92,5 % d'entre eux de réaliser les chiffres annoncés dans leurs prévisionnels, signe supplémentaire de l'incurie de monsieur [F], homme clé du réseau. Ils soulignent le caractère déterminant du consentement de la SARL Escale Beauté de ces prévisionnels qui n'ont approché la réalité que postérieurement à la signature du contrat de licence de marque, chronologie révélant le caractère dolosif du comportement de la SAS Mov'in dont tous les centres Lady Moving sont désormais fermés.
Les intimés exposent que s'ajoute à ces fautes la dissimulation d'informations essentielles tenant aux mauvais résultats des membres du réseau, aux actions judiciaires engagées par des franchisés dès le 28 mars 2011, aux condamnations de monsieur [F] et à l'absence d'exploitation directe d'un centre Lady Moving par la tête de réseau. Ils prétendent que celle-ci a trompé tous ses partenaires en traitant comme du fitness mixte le fitness féminin, dont elle ignorait tout ainsi qu'en attestent deux anciens cadres dirigeants du groupe à rebours des conclusions contradictoires et invérifiables du rapport [W] qu'elle produit. Ils soutiennent en outre que la confusion qu'entretient la SAS Fitness Park Development entre les zones de réservation et d'exclusivité, le contrat de réservation mentionnant une zone d'exclusivité par référence à la zone de réservation que le contrat de franchise ne reprend pas, caractérise en soi une man'uvre frauduleuse. Ils précisent que, comme madame [C] [L] qui exploitait un institut de beauté, monsieur [N] [I] n'avait aucune expérience dans ce secteur d'activité et que sa collaboration avec l'enseigne se limitait à une entremise immobilière, c'ur d'activité de la SARL IHM. Ils contestent par ailleurs toute difficulté financière de la SARL Escale Beauté antérieure à la signature des contrats litigieux et relèvent que les litiges qu'elle a initiés sont sans lien avec les déficits qu'a exclusivement et directement causés la SAS Mov'in. Ils estiment que, à défaut d'un dol, ces éléments, qu'ils ne pouvaient utilement apprécier qu'après un temps d'exploitation, caractérisent une erreur provoquée fondant à son tour la nullité des contrats.
Réponse de la cour
a) Sur le principe des nullités
En vertu de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er octobre 2016, les contrats litigieux, conclus les 30 septembre 2010 et 26 octobre 2011, demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs conditions de formation.
En application des articles 1101 et 1108 du code civil, le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. Quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention : le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter, un objet certain qui forme la matière de l'engagement et une cause licite dans l'obligation, l'article 1131 disposant que l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.
Et, conformément à l'article 1109 du code civil, il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol. En vertu de l'article 1110 du même code, l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet. De plus, en application de l'article 1116 de ce code, le dol, qui ne se présume pas et doit être prouvé, est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. A ce titre, tout silence conservé intentionnellement par un futur cocontractant sur des informations qu'il connaît mais qui sont inaccessibles à l'autre partie et sont déterminantes de son consentement caractérise un dol, l'erreur en résultant étant toujours excusable (en ce sens, 3ème Civ., 21 février 2001, n° 98-20.817).
Par ailleurs, les parties, qui ne débattent plus de la compétence du tribunal, ne contestent pas que le contrat dit de licence de marque est soumis au régime du contrat de franchise, qualification retenue par les premiers juges pour rejeter l'exception d'incompétence opposée par la SAS Mov'in.
Conformément à l'article L 330-3 du code de commerce toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause, ce DIP ainsi que le projet de contrat étant communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme exigée préalablement à celle-ci. Le contenu de ce DIP est défini à l'article R 330-1 du code de commerce.
La violation du délai prescrit par l'article L 330-3 du code de commerce, à l'instar des insuffisances et des carences éventuelles du DIP, n'emporte pas par elle-même nullité du contrat, le franchisé devant qualifier et caractériser le vice du consentement en découlant (en ce sens, Com. 10 février 1998, n° 95-21.906, et Com., 7 octobre 2014, n° 13-23.119).
- Sur la transmission du DIP
Le DIP produit par la SAS Fitness Park Development (sa pièce 7), qui comprend notamment en annexe les projets de contrats de réservation et de licence de marque envisagés, est daté du 3 septembre 2010 et comporte la signature de monsieur [N] [I] après la mention « document précontractuel et annexe remis à » dans une partie dédiée à l'accusé de réception du DIP et à l'engagement de confidentialité. Rien, dans ce document que ce dernier a personnellement complété sans arguer ni justifier d'une contrainte particulière, ne permet de déceler l'antidatage qu'il évoque dans son courrier du 7 octobre 2010 (sa pièce 29) ou de présumer un défaut de remise effective du DIP et de ses annexes dénoncée bien plus tard dans ses lettres des 12 avril 2012, 5 et 26 novembre 2013, 2 et 13 décembre 2013 et 18 janvier 2014 (ses pièces 22 et 30 à 34) puis dans son assignation du 20 mai 2014 (sa pièce 116). Or, ces missives et cet acte de procédure, qui ne sont que l'expression redondante des affirmations de la SARL Escale Beauté, n'ont aucune force probante et, à supposer le contraire, ne sont pas propres à combattre une mention librement portée par la SARL Escale Beauté sur l'acte puis confirmée lors de la signature du contrat qualifié de licence de marque (pièce 8 de l'appelante, page 5 paraphée par monsieur [N] [I]), et ce d'autant qu'ils sont ambigus puisqu'ils évoquent parfois, non un défaut de remise du DIP, mais une absence de communication du « DIP dûment ratifié » par la SAS Mov'in.
En l'absence de tout élément intrinsèque ou extrinsèque révélant l'inexactitude de la date portée par monsieur [N] [I] lui-même, le DIP a été remis dans le délai prescrit par l'article L 330-3 du code de commerce.
- Sur l'exhaustivité, l'exactitude et l'actualité des données du DIP
Aux termes de l'article R 330-1 du code de commerce dans sa version issue du décret n° 2009-557 du 19 mai 2009 applicable au jour de la remise du DIP, celui-ci contient les informations suivantes :
1° L'adresse du siège de l'entreprise et la nature de ses activités avec l'indication de sa forme juridique et de l'identité du chef d'entreprise s'il s'agit d'une personne physique ou des dirigeants s'il s'agit d'une personne morale ; le cas échéant, le montant du capital ;
2° Les mentions visées aux 1° et 2° de l'article R. 123-237 ou le numéro d'inscription au répertoire des métiers ainsi que la date et le numéro d'enregistrement ou du dépôt de la marque et, dans le cas où la marque qui doit faire l'objet du contrat a été acquise à la suite d'une cession ou d'une licence, la date et le numéro de l'inscription correspondante au registre national des marques avec, pour les contrats de licence, l'indication de la durée pour laquelle la licence a été consentie ;
3° La ou les domiciliations bancaires de l'entreprise. Cette information peut être limitée aux cinq principales domiciliations bancaires ;
4° La date de la création de l'entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d'exploitants, s'il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d'apprécier l'expérience professionnelle acquise par l'exploitant ou par les dirigeants. Ces informations peuvent ne porter que sur les cinq dernières années qui précèdent celle de la remise du document. Elles doivent être complétées par une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché. Doivent être annexés à cette partie du document les comptes annuels des deux derniers exercices ou, pour les sociétés dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les rapports établis au titre des deux derniers exercices en application du III de l'article L 451-1-2 du code monétaire et financier ;
5° Une présentation du réseau d'exploitants qui comporte :
a) La liste des entreprises qui en font partie avec l'indication pour chacune d'elles du mode d'exploitation convenu ;
b) L'adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée ; la date de conclusion ou de renouvellement de ces contrats est précisée. Lorsque le réseau compte plus de cinquante exploitants, ces informations ne sont exigées que pour les cinquante entreprises les plus proches du lieu de l'exploitation envisagée ;
c) Le nombre d'entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l'année précédant celle de la délivrance du document. Le document précise si le contrat est venu à expiration ou s'il a été résilié ou annulé ;
d) S'il y a lieu, la présence, dans la zone d'activité de l'implantation prévue par le contrat proposé, de tout établissement dans lequel sont offerts, avec l'accord exprès de la personne qui propose le contrat, les produits ou services faisant l'objet de celui-ci ;
6° L'indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités.
Le document précise, en outre, la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation.
Contrairement à ce que soutiennent les intimés qui n'expliquent pas en quoi ces mentions seraient erronées ou insuffisantes, le DIP précise les domiciliations bancaires de la SAS Mov'in (§II.7) ainsi que le montant des investissements supportés par le licencié (§III.5 et 6, données complétées par le prévisionnel type fourni en annexe 17).
En outre, si, quoiqu'il vise les comptes annuels 2008/2009, son annexe 6 ne contient que les comptes annuels de l'exercice clos au 31 octobre 2008 (pages 33 et suivantes), la SARL Escale Beauté n'établit pas l'impact de cette omission sur l'intégrité de son consentement alors que les bons résultats de la SAS Mov'in, avant comme après la remise du DIP et la signature des contrats litigieux, n'est pas en débat.
Par ailleurs, la SAS Fitness Park Development ne conteste pas que monsieur [M], présenté comme directeur général opérationnel dans le DIP et les organigrammes qui l'accompagnent (annexes 2 et 3), était décédé en août 2010, avant sa transmission. Elle ne nie pas non plus que monsieur [F], nommé en 2008 comme directeur de l'exploitation des ouvertures et en charge des formations et présenté par le directeur général opérationnel du groupe Moving en 2014 comme la personne sur qui reposait « toute la structure » (pièces 77, 88, 106 et 107 des intimés), jouait un rôle clé dans la gestion de la franchise naissante sous enseigne Lady Moving. Pour autant, outre le fait que ces fonctions opérationnelles ne font pas nécessairement de monsieur [F] un dirigeant ou un exploitant au sens de l'article R 330-1 4° du code de commerce, ce texte ne fait pas obligation à la tête de réseau de communiquer les antécédents judiciaires de ses dirigeants. En outre, les informations dont l'omission est dénoncée par les intimées sont soit antérieures à la période impérative de 5 ans visée par l'article R 330-1 4° du code de commerce (pièces 75 et 76 des intimées pour les liquidations judiciaires des centres sous enseigne Gymnasium et la condamnation par la Cour de discipline budgétaire et financière), soit postérieures à la remise du DIP et à la signature du contrat de réservation (pièce 37 des intimés pour la condamnation dont le caractère définitif n'est pas établi pour des faits de banqueroute, d'abus de biens sociaux et de violation d'une interdiction de gérer). Aussi, l'inexactitude des mentions relatives à monsieur [M] étant sans conséquence sur l'intégrité du consentement de la SARL Escale Beauté et le silence conservé sur l'expérience professionnelle de monsieur [F] n'étant pas illicite, ce moyen est inopérant.
En revanche, la présentation du réseau figurant dans le DIP est incomplète, les intimés démontrant par la production des extraits Kbis de sociétés exerçant leur activité sous l'enseigne Lady Moving (leur pièce 121) que, sur la période définie par l'article R 330-1 5°c du code de commerce, les sociétés Theb'elle, Arthéo et Catmar ont été respectivement objet de liquidations judiciaires prononcées les 4 et 24 mars 2010 et 6 juillet 2010. En outre entre la date de la remise du DIP et celle de la signature du contrat qualifié par les parties de licence de marque, dont l'arrêt du 4 décembre 2024 souligne la nécessaire prise en compte pour l'appréciation du respect de l'obligation d'information précontractuelle découlant de l'article L 330-3 du code de commerce, les sociétés Culture Physique & Bien-Etre, Debeaumont Lady Sport, Easyform, Christie Club, Lady Feist, CDA Ladies, Vital Fitness Compain et Stemaness ont été respectivement liquidées les 25 octobre et 16 novembre 2010, 18 janvier, 1er février, 10 mars, 27 avril, 10 et 11 mai 2011.
A raison de leur nombre, particulièrement important rapporté au nombre total de licenciés, et de leur succession rapide et régulière ainsi que de leur cause exclusivement économique, ces sorties du réseau révélaient la réalité et l'ampleur des difficultés d'exploitation, insurmontables pour de nombreux licenciés, auxquelles la SARL Escale Beauté seraient confrontées en régularisant le contrat qualifié de licence de marque. Inquiétantes et de ce fait propres à dissuader le candidat d'intégrer le réseau, elles étaient déterminantes de son consentement. A cet égard, il importe peu que monsieur [N] [I] et madame [C] [L] fussent des « professionnels aguerris », d'ailleurs dans des secteurs différents de la gestion de centres de remise en forme (immobilier et soins/beauté), ou que la SARL Escale Beauté ait pu mûrir son projet depuis 2006, les informations utiles à sa pleine appréhension de ses conditions de possibilité et de réussite lui étant par hypothèse dissimulées et n'étant vérifiables qu'au prix de recherches que l'obligation d'exhaustivité et de sincérité de la SAS Mov'in les dispensait d'accomplir.
A l'inverse, cette dernière, en sa qualité de tête de réseau, avait connaissance de ces renseignements qui étaient d'autant plus significatifs qu'elle était alertée depuis le 30 septembre 2010 de l'incapacité de la grande majorité de ses licenciés Lady Moving à exercer une activité rentable (pièce 86 des intimés, courrier adressé alors que le conseil assistant les licenciés mécontents, qui ont assigné la SAS Mov'in le 28 mars 2011, n'étaient pas encore celui des intimés). Et, elle ne pouvait ignorer, en ce qu'elles éclairaient spécifiquement l'aptitude du réseau naissant Lady Moving à se développer et à se maintenir que masquait la présentation générale des bons résultats du réseau Moving, qu'elles étaient déterminantes du consentement de leur partenaire.
Dès lors, en occultant ces données dans le DIP et en les taisant jusqu'à la signature du contrat dit de licence de marque, la SAS Mov'in a commis une réticence dolosive fondant à elle seule l'annulation des contrats de réservation et de licence.
Conformément aux articles L 330-3 et R 330-1 du code de commerce le franchiseur est tenu de communiquer au candidat, non une étude de marché local (en ce sens, Com.,7 mars 2018, n° 16-25.654) mais des précisions sincères et exactes sur l'état et les perspectives de développement du marché concerné. Or, la SAS Mov'in a fourni sur ce plan à la SARL Escale Beauté :
- un sondage de 2008 sur les habitudes des français en matière de « forme et de bien-être » (annexe 8 : budget consacré, motivations, nature des activités pratiquées et combinées) qui complète modestement une étude de 2006 du cabinet Deloitte sur l'industrie des clubs de sport dans le monde et en France (annexe 9) ne livrant aucune information sur le fitness féminin objet du concept Lady Moving ;
- une « analyse du marché potentiel d'un centre Lady Moving » se résumant en l'explicitation d'un unique exemple constitué d'une zone de chalandise de 50 000 personnes qui est adaptée à un centre « Cinq Pôles » (pièce 64 de l'appelante, page 33) mais excède la population de la commune de [Localité 9], accompagné de la reproduction de la page Wikipédia consacrée à la communauté d'agglomération de [Localité 10] (annexes 11 et 12) ;
- un extrait des Pages Jaunes listant les « clubs de forme » au sein de cette dernière (annexe 13).
Ces élément sont très insuffisants pour apprécier l'état du marché national ou local et ne sont spécifiques ni à la clientèle locale ni au concept Lady Moving axé sur le fitness exclusivement féminin et n'éclaire pas les perspectives du marché pourtant présenté en annexe 17 comme « considérable ». Cette carence aggrave le défaut d'information relatif aux sorties du réseau.
- Sur les prévisionnels
Le défaut de rentabilité de l'exploitation encadrée par le contrat litigieux doit être appréhendé sous l'angle de l'erreur portant, non sur la valeur qui est indifférente en elle-même, mais sur la substance de la chose qui vicie le consentement du franchisé au sens de l'article 1110 du code civil. En effet, dans le contrat de franchise, qualification définitivement retenue par le tribunal, l'espérance de gain, que fonde l'intégration à un réseau censé avoir fait économiquement la preuve de sa capacité à dégager des bénéfices selon une méthode éprouvée et qui touche à la substance de l'engagement du franchisé qui espère par hypothèse itérer le succès commercial du franchiseur, est déterminante du consentement du premier (en ce sens, Com., 4 octobre 2011, n° 10-20956 ; Com., 12 juin 2012, n° 11-19.047).
Cependant, la rentabilité future d'une exploitation est affectée d'un aléa et le vice du consentement, même éclairé ou révélé par des éléments postérieurs, ne peut être caractérisé qu'au jour de la formation du contrat. Aussi, le défaut de rentabilité, qui ne traduit pas à lui seul une faille du modèle économique du franchiseur qui n'est pas tenu de garantir la réussite de son franchisé, doit s'entendre, non de l'insuffisance subjective des résultats, mais d'une impropriété objective des méthodes et savoir-faire objet du contrat de franchise à réaliser cette fin appréciée au jour de sa formation (le cas échéant sous l'éclairage d'éléments ultérieurs). L'erreur doit être excusable et de ce fait découler d'une inadéquation entre les éléments d'information fournis par le franchiseur, tels les prévisionnels ou les données sur lesquelles ils ont été conçus par le franchisé, et la réalité de l'exploitation non entravée par des fautes du franchisé (en ce sens, sur le second point : Com., 24 juin 2020, n° 18-15.249 : « L'erreur sur la rentabilité du concept d'une franchise ne peut conduire à la nullité du contrat pour vice du consentement du franchisé si elle ne procède pas de données établies et communiquées par le franchiseur »). Ainsi, si la loi ne lui impose pas de le faire, le franchiseur qui fournit spontanément au franchisé une étude de marché ou des comptes prévisionnels s'oblige à lui communiquer des données sincères et exactes (en ce sens, Com., 18 octobre 2023, n° 22-19.329).
Par courrier du 18 mai 2007, la SAS Mov'in adressait à madame [C] [L] le « document prévisionnel type » qu'elle avait élaboré pour toutes les ouvertures récentes en annonçant des résultats au démarrage en pratique supérieurs à ceux envisagés (pièces 7 et 14-2 des intimés). Ce faisant, elle admettait être l'auteur du tableau joint qui, peu important qu'il soit un document « type », était destiné à éclairer le candidat sur la rentabilité de son activité future et devait de ce seul fait comporter des données sérieuses. Elle lui communiquait d'ailleurs le 22 février 2008, sans reprendre ces précautions langagières, « un nouveau bilan prévisionnel adapté aux caractéristiques de [son] implantation », individualisation, également exprimée le 5 mai 2010, exclusive de la standardisation qu'oppose la SAS Fitness Park Development (pièces 14-3 et 14-6 des intimés). Elle a ainsi fourni dix prévisionnels entre 2006 et 2011 (pièce 14 des intimés). Il importe peu dans ces conditions que ces derniers aient pu être mis à jour sur « la base des données et hypothèses du franchisé » le 8 juin 2011 puisque les informations sur lesquelles s'appuient ces révisions avaient été préalablement déterminées et transmises par la SAS Mov'in (sa pièce 13.6).
Les prévisionnels établis par la SAS Fitness Park Development sont par nature déterminants du consentement des candidats en ce qu'ils éclairent la rentabilité de leur activité future qui est la condition même de leur engagement.
Pour établir l'inexactitude de ces prévisionnels, la SARL Escale Beauté produit un courrier du cabinet d'expertise comptable Effigest du 12 juin 2017 présentant les comptes analytiques propres à l'activité Lady Moving (sa pièce 40), méthodologie privant de pertinence les critiques de la SAS Fitness Park Development fondées sur les bilans et les comptes de résultats de la SARL Escale Beauté qui exerçait parallèlement une activité de SPA (pièce 72 de l'appelante). Outre le fait que l'auteur de cette lettre exerce une profession règlementée et engage sa responsabilité contractuelle et délictuelle à raison notamment des inexactitudes qu'il certifie, cadre juridique qui constitue un gage sérieux de la sincérité de ses assertions, la SAS Fitness Park Development ne critique pas les ventilations opérées pour individualiser l'activité Lady Moving. Or, tant pour les résultats nets, qui sont des indicateurs utiles puisque l'activité Lady Moving est isolée et qu'aucune faute de gestion n'est prouvée, que pour les chiffres d'affaires, les écarts entre ceux effectivement réalisés et ceux annoncés dans le prévisionnel de mai 2010, qui est représentatif de l'ensemble des prévisionnels fournis, dépassent 78 % en moyenne ainsi que l'a relevé le tribunal.
Les arguments opposés par la SAS Fitness Park Development, qui ne caractérise aucune faute de gestion imputable à la SARL Escale Beauté expliquant l'ampleur des discordances constatées, ne convainquent pas pour les raisons suivantes :
- le fait que plusieurs centres à l'enseigne Lady Moving aient pu être bénéficiaires sur la période concernée (sa pièce 64) ne dit rien de la sincérité et de l'exactitude des chiffres ayant fondé les prévisions de la SARL Escale Beauté et de la possibilité d'une exploitation rentable sur la zone concédée. Il est en outre sérieusement contrebalancé par le nombre important de sorties du réseau à raison de liquidations judiciaires qui laissait entrevoir, dès la formation des contrats, le risque majeur d'un échec commercial, la SAS Fitness Park Development ne contestant à ce titre pas que tous les centres à l'enseigne Lady Moving sont désormais fermés ;
- les charges liées aux différents contentieux initiés par la SARL Escale Beauté et son gérant peuvent expliquer, en partie au moins, les mauvais résultats mais pas le montant des chiffres d'affaires dégagés dont la faiblesse ne peut non plus découler seule de l'insuffisante visibilité que la SARL Escale Beauté reprochait au propriétaire du centre commercial. Et, les difficultés économiques évoquées par monsieur [N] [I] dans son courrier du 6 décembre 2011 portaient par hypothèse sur d'autres activités que celle propre au centre de remise en forme Lady Moving dont l'exploitation débutait, l'impact effectif et durable des premières sur la seconde n'étant d'ailleurs pas déterminé par la SAS Fitness Park Development ;
- le fait que la SARL IHM ait recherché, pour le compte du groupe Moving, des locaux à exploiter sous ses différentes enseignes n'implique ni une satisfaction à l'endroit de l'activité Lady Moving exercée par la SARL Escale Beauté ni une reconnaissance de la sincérité des prévisionnels transmis ;
- les éventuelles compétences professionnelles des candidats acquises dans des secteurs distincts de celui objet des contrats projetés n'étaient pas de nature à leur permettre de déceler les insuffisances de ces prévisionnels, cette vérification supposant une connaissance fine de l'état du réseau et du marché national et local du fitness féminin que les informations abstraites et lacunaires du DIP ne leur offraient pas.
Aussi, en fournissant des prévisionnels grossièrement inexacts et optimistes, la SAS Mov'in a trompé la SARL Escale Beauté dont le consentement était déjà vicié par les insuffisances du DIP qui occultaient le risque élevé d'échec du projet d'ouverture de son centre sous l'enseigne Lady Moving. Ces manquements combinés, dont le constat rend inutile l'examen des autres griefs opposés par les intimés, caractérisent une réticence dolosive et une erreur provoquée sur la rentabilité de l'opération projetée, soit une erreur sur la substance, et fonde la nullité des contrats de réservation et de licence de marque.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande et les contrats de réservation et de licence de marque seront annulés. Privée d'objet par le prononcé de la nullité des contrats, la demande subsidiaire au titre de la violation de l'exclusivité ne sera pas examinée et le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la SAS Fitness Park Development au paiement des sommes de 164 400 euros et 150 640 euros sur ce fondement.
b) Sur les conséquences des nullités
- Sur les restitutions réciproques
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development expose que les restitutions réclamées ne sont pas dues au motif que :
- le droit d'entrée a pour contrepartie l'exclusivité accordée au licencié et les formations initiales qui lui ont été dispensées, le contrat de réservation initial de 2006 n'ayant en outre pas été annulé ;
- les redevances ont été réglées en contrepartie notamment du droit d'exploitation de la marque, des signes distinctifs de l'enseigne de l'utilisation du savoir-faire et de l'assistance fournie ;
- les frais d'expertise comptable de 2006 engagés lors de l'acquisition du fonds de commerce sont sans lien avec la signature du contrat de 2011 ;
- les sommes perçues au titre du pack « Lady Moving » ont financé l'achat du matériel qui a été livré et dont le licencié a bénéficié, celui-ci constituant un actif amorti, non spécifique à l'enseigne, réalisable lors de la liquidation judiciaire. Elle ajoute que la SARL Escale Beauté ne démontre ni la réalité des frais publicitaires qu'elle allègue ni qu'ils aient été engagés à raison de l'exploitation du centre Lady Moving.
En réponse, les intimés expliquent que l'anéantissement rétroactif des contrats résultant de leur nullité commande la restitution des sommes de 12 500 euros au titre de la réservation du territoire, 21 000 euros au titre des redevances stipulées au contrat, 79 500 euros au titre du pack Lady Moving (Pack et frais de ports), 5 495 euros au titre des frais publicitaires et 500 euros au titre du logiciel du Pack.
Réponse de la cour
Par l'effet de l'anéantissement rétroactif des contrats découlant de leur nullité, les parties sont tenues à des restitutions réciproques qui ne relèvent pas de la répétition de l'indu mais seulement des règles de la nullité (en ce sens, 1ère Civ., 24 septembre 2002, n° 00-21.278). Les restitutions, qui doivent être intégrales pour replacer les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du contrat qui est censé n'avoir jamais existé, s'opèrent par principe en nature, quand elle est possible, et, à défaut, en valeur, et sont ordonnées sans égard pour la faute d'une partie (en ce sens, Com., 28 juin 2023, n° 22-15.676). Ainsi, la restitution d'une prestation de services ne peut avoir lieu qu'en valeur, celle-ci étant appréciée à la date à laquelle elle été fournie (solution désormais posée par l'article 1352-8 du code civil mais acquise dans le droit positif antérieur) sans égard pour les bénéfices effectivement retirés de l'exécution du contrat (en ce sens, 1ère Civ., 10 décembre 2014, n° 13-23.903).
Le contrat de réservation annulé stipule en son article 2 que la SARL Escale Beautés s'oblige à payer à la SAS Mov'in les sommes de :
- 12 500 euros au titre du droit d'entrée territorial exclusif. Conformément à son article 4, cette somme est automatiquement affectée au contrat de licence au titre du droit d'entrée et d'exclusivité territoriale en cas d'ouverture du centre dans le délai prescrit et ce montant est minoré de 5 000 euros en raison d'un paiement antérieur ;
- 4 euros le mètre carré par mois à compter de l'ouverture du centre à titre de redevance de licence de marque ;
- 79 500 euros au titre du « Pack Concept & Equipements ».
La SARL Escale Beauté ne conteste pas que la réduction de 5 000 euros du montant du droit d'entrée, dont elle a effectivement bénéficié et qu'elle ne prétend pas avoir remboursée à la société SPA Bien-Etre ainsi que le stipulait l'acte de cession de fonds de commerce du 10 juillet 2006 (sa pièce 2, page 4), est causée par le paiement réalisé en exécution du contrat du 12 février 2006 fixant le droit d'entrée à 5 000 euros en son article 2. Cet acte n'étant pas affecté par la nullité, le montant correspondant n'a pas à être restitué. Le contrat postérieur étant nul, la SARL Escale Beauté a droit à la restitution des sommes de 7 500 euros et 21 000 euros au titre du droit d'entrée et des redevances dont le paiement intégral n'est pas en débat.
Pour s'opposer au remboursement de ces sommes à raison d'une compensation intégrale des restitutions réciproques à leur endroit, la SAS Fitness Park Development excipe de la réalité des contreparties servies (exclusivité accordée et formations initiales dispensées au licencié d'une part, et droit d'exploitation de la marque et des signes distinctifs de l'enseigne, utilisation du savoir-faire et bénéfice de son assistance d'autre part). Elle ne fournit cependant aucun élément permettant d'apprécier la consistance précise et la valeur de ces prestations et de son savoir-faire ainsi que celle de ses signes distinctifs, tels son enseigne ou sa marque. A défaut de toute autre donnée, les stipulations non détaillées du contrat annulé étant à cet égard insuffisantes, l'utilité économique de la prestation est le seul élément pertinent pour les valoriser.
Or, ainsi que le démontre la SARL Escale Beauté, l'intégration dans le réseau Lady Moving ne lui a procuré aucun avantage économique, le chiffre d'affaires dégagé ne lui ayant pas permis de générer le moindre bénéfice sur la période d'exécution alors qu'aucune faute de gestion ne lui est imputable et que les charges attachées aux procédures judiciaires ou les difficultés économiques rencontrées en 2011 n'expliquent pas ses déficits systématiques. Cette analyse est confortée par le nombre de licenciés confrontés à des difficultés économiques majeures au jour de la conclusion des contrats et par la disparition actuelle du réseau Lady Moving. Aussi, en pareilles circonstances et au regard de la carence probatoire de la SAS Fitness Park Development, la valeur des contreparties servies sera réputée nulle. Il en est de même du coût d'initialisation de 500 euros du logiciel imposé par la SAS Mov'in dédié à l'exploitation sous enseigne Lady Moving (article 6.5 du contrat de licence).
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la SARL Escale Beauté au titre de la restitution du droit d'entrée et du montant des redevances versées ainsi que du coût du logiciel, et la SAS Fitness Park Development sera condamnée à lui payer la somme totale de 29 000 euros.
En revanche, la SARL Escale Beauté ne conteste pas la livraison des différents éléments matériels constituant le pack Lady Moving. Ces actifs ne sont plus restituables en nature, cette dernière en ayant disposé dans des conditions indéterminées, les termes du jugement de liquidation ne permettant pas de savoir s'ils ont été appréhendés et réalisés dans son cadre (pièce 62 de l'appelante). La facture annexée au contrat de réservation révèle que cet ensemble était constitué de biens qui n'étaient pas spécifiques à une exploitation sous enseigne Lady Moving et pouvaient, dépouillés des signes distinctifs de l'enseigne, être réutilisés par la SARL Escale Beauté ou par un tiers cessionnaire à l'occasion de l'exercice d'une activité de même nature. Or, celle-ci ne précise ni le sort de ce matériel ni le prix qu'elle en a le cas échéant rétiré au sens de l'article 1352-2 alinéa 1 du code civil consacrant le droit positif antérieur. Et, l'article 1352 du code civil prévoyant que la valeur de la chose non restituable en nature s'apprécie au jour de la restitution étant inapplicable au litige, cette évaluation doit être faite au jour de l'acte annulé conformément au droit positif antérieur (en ce sens, Com., 14 juin 2005, n° 03-12.339). A cet égard, le seul élément en débat utile est la facture déterminant objectivement et dans le détail la valeur des matériels compris dans le pack. De ce fait, la valeur du matériel que la SARL Escale Beauté est tenue de restituer à raison de l'annulation du contrat de réservation sera réputée égale à celle payée lors de sa conclusion. La compensation étant intégrale entre les valeurs à restituer, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la SARL Escale Beauté à ce titre.
Enfin, la SARL Escale Beauté n'explicite pas le poste « frais publicitaires » dont elle poursuit la restitution à hauteur de 5 495 euros et ne précise pas à quelle stipulation il se rattache ni en quoi il se distingue des frais de même nature objet d'une demande d'indemnisation complémentaire. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande à ce titre.
- Sur les demandes indemnitaires
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development conteste tout préjudice matériel au motif que la SARL Escale Beauté ne peut souligner le caractère irréaliste des prévisionnels tout en les mobilisant pour calculer son préjudice qui a de surcroît la nature d'une perte de chance, le résultat attendu, par hypothèse incertain, dépendant de la conjoncture économique et des choix de gestion de l'exploitant. Elle ajoute que la SARL Escale Beauté ne peut solliciter la nullité du contrat et réclamer l'allocation de dommages et intérêts correspondant à la non-obtention des résultats commerciaux qu'elle espérait retirer de son exécution. Elle estime que la perte de chance alléguée n'est pas caractérisée à raison de l'antériorité des difficultés économiques de la SARL Escale Beauté et que les dépenses de communication dont elle sollicite le remboursement ne sont pas en lien avec les fautes qu'elle lui impute, lien de causalité qui fait également défaut au titre des demandes relatives à la liquidation judiciaire et à celui des engagements de caution de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L], qui poursuivent la réparation d'un préjudice hypothétique, ainsi qu'à l'endroit des demandes de la SARL IHM. Elle expose qu'elle n'a à financer ni le choix de l'aménagement d'un club mixte auquel elle est étrangère ni les travaux de démolition et de réfection dont la réalité n'est pas prouvée.
En réponse, les intimées expliquent que la SARL Escale Beauté a subi un préjudice économique résidant en un gain manqué consistant en l'écart entre les résultats annoncés par la SAS Mov'in et ceux effectivement réalisés (973 976 euros) ainsi qu'en une perte de chance de réaliser un résultat net de 112 715 euros sur l'année 2017. Subsidiairement, la SARL Escale Beauté soutient que son préjudice matériel consiste en la perte de chance de ne pas contracter et d'éviter des pertes en appliquant un taux de perte de chance de 5 % au montant total de ses pertes d'exploitation. Les intimés ajoutent que les fautes délictuelles de la SAS Mov'in ont en outre :
- directement causé les frais de fermeture de la salle de fitness exploitée par la SARL Escale Beauté (5 297 euros) ainsi que l'ouverture de la procédure collective qui a abouti à sa liquidation (30 809,15 euros) et à la perte du bénéfice de ses immobilisations réalisées par le liquidateur (343 310 euros) ;
- rendu inutiles les efforts publicitaires de la SARL Escale Beauté (57 723,37 euros), ses dépenses de matériel hors Pack Lady Moving (31 854,97 euros) et ses frais d'expertise-comptable et d'huissier de justice (1 190 euros) ;
- fondé l'assignation de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L] par la banque au titre de leur engagement de caution solidaire le 16 mars 2021, action qui justifie la garantie de la SAS Fitness Park Development de toute condamnation au remboursement anticipé du prêt souscrit pour permettre l'exploitation du centre Lady Moving ;
- causé à la SARL IHM, qui a vainement investi dans la SARL Escale Beauté, un préjudice calculé en appliquant au montant total de ses apports « le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées depuis [ses] premiers apports ['] en compte courant depuis la constatation de pertes » (165 350,47 euros).
Réponse de la cour
Conformément à l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au jour du dol, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
La victime de man'uvres dolosives peut exercer, outre une action en annulation du contrat, une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du dommage qu'elle a subi (en ce sens, de manière constante, Com. 15 janv. 2002, n° 99-18.774, déjà cité), le rejet de la première n'impliquant pas nécessairement celui de la seconde (en ce sens, 1ère Civ., 14 janvier 2021, n° 19-24.881). La victime a droit à réparation intégrale des préjudices directement causés par la faute et dont elle souffre personnellement, l'indemnisation accordée l'étant sans perte ni profit, à la mesure du préjudice prouvé en son principe et sa mesure. Le juge, tenu de réparer intégralement tout préjudice dont il constate le principe (en ce sens, Com., 10 janvier 2018, n° 16-21.500, et 2ème Civ., 28 mars 2013, n° 12-14.655), apprécie souverainement, au jour de sa décision, son montant dont il justifie l'existence par la seule évaluation qu'il en fait sans être tenu d'en préciser les divers éléments (en ce sens, Ass. plén., 26 mars 1999, n° 95-20.640).
Sur le gain manqué et la perte de chance de réaliser un gain
La demande au titre de la chance de réaliser un gain n'est que le prolongement pour l'année 2017 non abordée par les prévisionnels fournis par la SAS Mov'in de celle portant sur le préjudice matériel résidant en la différence entre les résultats nets annoncés et ceux effectivement réalisés. Par ces prétentions, la SARL Escale Beauté sollicite une indemnisation équivalente aux gains que l'exécution du contrat lui aurait procurés. Cette prétention, empreinte de contradiction puisqu'elle repose sur l'hypothèse de l'exécution optimale d'un contrat nul, est infondée : en cas d'annulation du contrat pour dol, seuls peuvent être indemnisés les préjudices résultant de la conclusion du contrat, dont la perte de chance de ne pas contracter et d'éviter ainsi de subir des pertes, ou de contracter à des conditions plus avantageuses, le défaut de perception des gains attendus, comme la perte de chance de les obtenir, n'étant pas réparable (en ce sens, Com., 18 oct. 2011, n° 10-23.524, et Com., 28 juin 2023, n° 22-15.671).
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes de la SARL Escale Beauté.
Sur la perte de chance de ne pas contracter
La perte de chance s'entend de la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable et suppose établie la preuve du sérieux de la chance perdue. Son indemnisation, qui implique un calcul de probabilité de la survenance de l'évènement irrémédiablement impossible, ne peut être égale au montant de la chance réalisée.
Il est établi que, durant l'exécution du contrat, la SARL Escale Beauté a subi des pertes (sa pièce 40 déjà examinée), ses résultats nets étant négatifs sur toute la période avec un total global de 418 847 euros, réduite sans explication à 418 642 en page 63 de ses écritures.
La SARL Escale Beauté, pour établir le dol dont elle a été victime, s'appuie notamment sur le rapport [W] produit par la SAS Fitness Park Development qui souligne une contraction du marché dès 2010 et la faveur des français pour les prestations low-cost au détriment des concepts payants classiques, tels Lady Moving. Elle relève également que l'opérateur de référence en matière de fitness féminin, Curves, a décliné dès 2005 avec une accélération en 2010, et que l'enseigne Ladyfitness, autre inspirateur de la SAS Mov'in pour sa licence Lady Moving implanté en France en 2004 (« La société MOV'IN n'a fait que se placer sur ce créneau en copiant purement et simplement le concept de ces deux enseignes »), a subi des revers précoces, à l'instar du concurrent O'Sport en faillite en 2007 (pages 22 et 54 et suivantes de ses écritures). Le marché était ainsi peu favorable au développement d'une activité de fitness féminin.
Or, la SARL Escale Beauté nourrissait le projet de développer une telle activité, complémentaire de celle exploitée par madame [C] [L] dans les mêmes locaux, dès 2006 ainsi que le révèle l'acquisition du fonds de commerce de la société SPA Bien-Etre, très antérieure à la conclusion des conventions viciées par le dol. Aussi, il est certain qu'elle aurait exercé une activité de même nature que celle objet de ces dernières indépendamment de ses relations avec la SAS Mov'in. Et, elle ne précise quelles modifications elle aurait apportées à son exploitation pour éviter les écueils qu'elle a rencontrés durant l'exécution du contrat dit de licence.
En pareilles circonstances, la chance perdue de ne pas contracter et d'éviter ainsi des pertes est très faible. Le taux de perte de chance sera fixé à 20 %, sans toutefois être minoré à raison des difficultés économiques évoquées dans le courrier de monsieur [N] [I] du 6 décembre 2011 qui ne sont pas rattachables à l'activité de fitness (pièce 65 de l'appelante). Appliqué au montant total des pertes, le préjudice indemnisable de la SARL Escale Beauté atteint 83 728,40 euros.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande indemnitaire et la SAS Fitness Park Development sera condamnée à payer à la SARL Escale Beauté la somme de 83 728,40 euros en réparation du préjudice de perte de chance de ne pas contracter.
Sur les frais
La SARL Escale Beauté ne produit aucun justificatif établissant le coût des « frais liés à la fermeture de la salle », et ne vise d'ailleurs à ce titre, au sens de l'article 954 alinéa 1 du code de procédure civile dans sa version applicable au jour de la déclaration d'appel, aucune pièce. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Par ailleurs, alors qu'elle ne conteste pas qu'elle exerçait deux activités distinctes dans ses locaux, la SARL Escale Beauté ne prouve pas que les difficultés insurmontables qui ont conduit à sa liquidation judiciaire sont causées par les fautes précontractuelles de la SAS Mov'in. Et, son redressement judiciaire, qui suivait une procédure de sauvegarde en 2014, date à laquelle aucun état de cessation des paiements n'était par hypothèse constaté conformément à l'article L 620-1 du code de commerce, a été prononcé le 29 mars 2019, bien après l'assignation devant le tribunal de commerce en juin 2014 et la fermeture de la salle de fitness en mars 2017. Aussi, faute de preuve d'un lien de causalité entre les fautes de la SAS Mov'in et le redressement puis la liquidation judiciaire de la SARL Escale Beauté, le jugement du tribunal sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande indemnitaire.
En outre, il est acquis que la SARL Escale Beauté aurait exercé une activité de fitness féminin indépendamment de ses relations avec la SAS Mov'in. Dans ce cadre, elle aurait nécessairement :
- procédé à un agrandissement de ses locaux. Et, l'acquisition du fonds de commerce, à l'occasion de laquelle a été souscrit le prêt du 4 août 2006, dont la SARL IHM, madame [C] [L] et monsieur [N] [I] se sont portés cautions solidaires (leur pièce 70), a été réalisée avant les premiers contacts démontrés avec la SAS Mov'in et quoi qu'il en soit très antérieurement à la réticence dolosive qui lui est imputable, le contrat de réservation du 16 février 2006 et ses avenants de prolongation étant valables ;
- réalisé des travaux d'aménagement de son bien pour l'adapter à l'exploitation projetée. Or, elle ne prétend pas qu'elle aurait été en mesure de financer ces derniers sans recours à un emprunt, objet des mêmes garanties (sa pièce 69), et n'explique pas en quoi son montant aurait pu être différent en l'absence de relations avec la SAS Mov'in. Enfin, il n'est pas prouvé, au regard de la double activité de la SARL Escale Beauté, que les difficultés de remboursement des deux prêts trouvent leur cause dans les mauvais résultats de la seule activité de fitness féminin ;
- eu recours aux services d'un expert-comptable pour établir des prévisionnels dont la charge lui incombait ;
- engagé des dépenses publicitaires, notamment pour pallier l'insuffisante visibilité qu'elle imputait au gestionnaire du centre commercial (pièce 73 de l'appelante). La cour constate de surcroît que cette demande est motivée par « l'installation de franchisés de la même enseigne ou d'enseignes appartenant également à MOV'IN dans sa zone de chalandise » (page 65 de ses écritures), faute contractuelle insusceptible d'être invoquée puisque le contrat support de l'obligation violée a été annulé ;
- acquis du matériel, dont il n'est pas établi qu'il remplaçait ou complétait celui fourni par la SAS Mov'in à raison de son obsolescence ou de sa mauvaise qualité qui ne sont pas prouvées, et développé des « cours coachés »
Par ailleurs, non seulement les frais d'établissement de procès-verbaux destinés à établir la preuve de la violation par la SAS Mov'in de la zone d'exclusivité relèvent par nature des frais irrépétibles et doivent être intégrés dans la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, mais ces éléments sont inutiles à la solution du litige, le prononcé de la nullité des contrats excluant l'examen de leurs conditions d'exécution. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Enfin, outre le fait que la SARL IHM aurait réalisé des apports pour accompagner la SARL Escale Beauté dans la réalisation de son projet et que leur perte, à la supposer réelle, n'est pas rattachable au seul échec de l'activité Lady Moving, cette dernière exerçant parallèlement une activité complémentaire mais distincte de SPA, elle n'en prouve pas la réalité et le montant, les documents produits à ce titre, établis par elle-même pour son compte, n'étant ni certifiés ni étayés (ses pièces 65 et 85). Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Sur le préjudice moral
La demande de monsieur [N] [I] et madame [C] [L] au titre de leur préjudice n'est pas motivée. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a rejetée.
4°) Sur la procédure abusive
En vertu des dispositions des articles 1240 et 1241 (anciennement 1382 et 1383) du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
Au sens de ces textes, l'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur équipollente au dol.
Cette demande n'est pas motivée. L'abus ne pouvant découler de la seule succombance de l'appelante, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de madame [C] [L] et de monsieur [N] [I], dont les prétentions au fond sont de surcroît rejetées.
5°) Sur les frais irrépétibles et les dépens
En vertu de l'article 639 du code de procédure civile, la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond, y compris sur ceux afférents à la décision cassée.
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Succombant, la SAS Fitness Park Development, dont la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée, sera condamnée à payer la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Si monsieur [N] [I], madame [C] [L] et la SARL IHM succombent en leurs prétentions, constat qui commande le rejet de leurs prétentions fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, l'équité commande de rejeter la demande de la SAS Fitness Park Development formée au titre des frais irrépétibles à leur endroit.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
Constate la perfection du désistement de la SAS Fitness Park Development de sa demande indemnitaire reconventionnelle au titre du dénigrement ;
Confirme, dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation, le jugement entrepris ses dispositions, sauf en ce qu'il a
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de nullité des contrats des 30 septembre 2010 et 29 octobre 2011 ;
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de restitution des sommes versées au titre de la réservation du territoire, des redevances contractuelles et de la fourniture du logiciel d'origine ;
- constaté la violation de l'exclusivité territoriale stipulée dans le contrat de réservation du 30 septembre 2010 et le contrat de licence du 29 octobre 2011 et déclaré la SAS Mov'in seule responsable de cette violation ;
- condamné la SAS Mov'in à verser à la SARL Escale Beauté la somme de 164 400 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamné la SAS Mov'in à payer à la SARL Escale Beauté la somme de 150 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving ;
- rejeté la demande indemnitaire de la SARL Escale Beauté au titre de la perte de chance de ne pas contracter et d'éviter des pertes ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Prononce la nullité du contrat de réservation de zone du 30 septembre 2010 et du contrat qualifié par les parties de licence de marque du 26 octobre 2011 pour réticence dolosive et erreur provoquée sur la substance ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à restituer à la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 29 000 euros au titre de la restitution du droit d'entrée et du montant des redevances versées ainsi que du coût du logiciel ;
Rejette la demande de restitutions réciproques de la SAS Fitness Park Development à ce titre ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à payer à la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 83 728,40 euros en réparation du préjudice de perte de chance de ne pas contracter et d'éviter des pertes ;
Constate que la demande indemnitaire présentée au titre de la violation de l'exclusivité est subsidiaire et est privée par d'objet par le succès de la demande principale en nullité ;
Y ajoutant,
Rejette la demande de la SAS Fitness Park Development, de la SARL IHM, de madame [C] [L] et de monsieur [N] [I] au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à supporter les entiers dépens d'appel qui seront recouvrés directement par Maître Nathalie Lesenechal conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à payer à la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 4
ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2025
(n° , 28 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/03887 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CK42V
Décision déférée à la Cour :
Arrêt : Cour de cassation du 4 décembre 2024 RG n° 732 F-D
Arrêt : cour d'appel de Paris du 8 février 2023 RG n° 20/08662
Jugement du 17 Juin 2020 -Tribunal de commerce de Paris- RG n° J 2020000170
DEMANDERESSE À LA SAISINE
S.A.S. FITNESS PARK DEVELOPMENT (anciennement dénommée Mov'in) agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro :B 379 818 032
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 5]
Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIÉS, avocat au barreau de Paris, toque : L0010
Assistée de Me Rébecca Ichoua, DE PUZZLE AVOCATS, avocat au barreau de Paris, toque : D 0738
DÉFENDEURS À LA SAISINE
S.C.P. [E], prise en la personne de MAÎTRE [X] [E], mandatataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL ESCALE BEAUTE
[Adresse 1]
[Localité 6]
S.A.R.L. INGENIERIE HOLDING MANAGEMENT (IHM), prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Immatriculée au RCS de Pontoise sous le numéro : 432 646 225
[Adresse 2]
[Localité 6]
Monsieur [N] [I], né le 8 Février 1960 à [Localité 8], de nationalité française, chef d'entreprise
[Adresse 3]
[Localité 4]
Madame [C] [L], née le 16 Mai 1958 à [Localité 7] ( MADAGASCAR), de nationalité française, sans emploi
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentés par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de Paris, toque : D2090
Assistés de Me Alexandre Pilliet de la SELARL FANEON & DE LABLIERE AVOCAT, avocat au barreau de Paris, toque : P585
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 15 Octobre 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bertrand Gouarin, président de chambre
M. Julien Richaud, conseiller
Mme Hélène Bussiere, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. Richaud dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffière , lors des débats : Mme Elisabeth Verbeke
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Bertrand Gouarin, président de chambre et par Mme Elisabeth Verbeke, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE
La SAS Fitness Park Development (anciennement dénommée Mov'in) développe et exploite un réseau de salles de remise en forme et de sport en concédant l'exploitation de marques dont elle est propriétaire, telles « Lady Moving », « Moving Express » et « Fitness Park ».
La SARL Ingénierie Holding Management (ci-après, « la SARL IHM »), gérée par monsieur [N] [I], est une société holding détenant des participations dans les sociétés créées par ce dernier, telle la SARL Escale Beauté qu'il gérait jusqu'à sa liquidation judiciaire prononcée le 27 septembre 2019 par jugement du tribunal de commerce de Pontoise désignant la SCP [E] en qualité de liquidateur judiciaire.
Par acte du 13 février 2006, la société SPA Bien-être a conclu avec la SAS Mov'in un contrat de réservation de zone géographique d'une durée de six mois portant promesse de licence de la marque « Lady Moving ». Le 10 juillet 2006, la SARL Escale Beauté a acquis le fonds de commerce exploité par la première dans le centre commercial de [Localité 9] et est devenue bénéficiaire de ce contrat. Pour financer l'acquisition du fonds et les travaux d'aménagement du local, la SARL Escale Beauté a souscrit deux prêts bancaires de 340 000 et 380 000 euros pour lesquels la SARL IHM s'est portée caution solidaire aux côtés de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L], sa compagne, également associée de la SARL IHM.
En dépit de la signature, motivée par l'existence d'un litige opposant la SARL Escale Beauté à son cédant, de deux avenants de prolongation du contrat de réservation les 27 mars 2007 et 19 mai 2008, le projet a été suspendu. Néanmoins, le 30 septembre 2010 la SARL Escale Beauté et la SAS Mov'in concluaient pour une durée de 12 mois un contrat de réservation de zone valant promesse de licence de la marque « Lady Moving ».
Le 26 octobre 2011, la SARL Escale Beauté et la SAS Mov'in concluaient le contrat qualifié de licence de marque envisagé. Les parties régularisaient le jour même puis le 12 février 2013 deux protocoles d'accord réglant des différends touchant notamment à la mise en place du « Pack Concept Lady Moving » et à la définition de la zone d'exclusivité de la SARL Escale Beauté.
Par courriers des 31 décembre 2013 et 18 janvier 2014, la SARL Escale Beauté imputait à la SAS Mov'in divers manquements à ses obligations précontractuelles et contractuelles fondant selon elle la désignation d'un mandataire ad hoc puis sollicitait la communication du document d'information précontractuel (ci-après, « le DIP ») et du contrat de licence de marque relatifs au centre de [Localité 9].
C'est dans ces circonstances que la SARL Escale Beauté, prise alors en la personne de son commissaire à l'exécution du plan, la SARL IHM, monsieur [N] [I] et madame [C] [L] ont, par acte d'huissier de justice du 16 juin 2014, assigné devant le tribunal de commerce de Paris la SAS Mov'in en nullité, et subsidiairement en résiliation, des contrats de réservation et de licence de marque ainsi qu'en indemnisation de leurs préjudices.
Par jugement du 17 juin 2020, le tribunal de commerce de Paris a en particulier :
- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la SAS Mov'in et s'est déclaré compétent ;
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée aux protocoles d'accord opposée par la SAS Mov'in ;
- déclaré irrecevables les demandes relatives au contrat de réservation du 16 février 2006 et aux deux avenants des 27 mars 2007 et 9 mai 2008 ;
- débouté la SAS Mov'in de sa fin de non-recevoir tirée de l'interdiction du cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle ;
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de nullité du contrat du 30 septembre 2010 et du contrat de licence de marque « Lady Moving » ;
- constaté la violation de l'exclusivité territoriale stipulée dans le contrat de réservation du 30 septembre 2010 et le contrat de licence du 29 octobre 2011 et déclaré la SAS Mov'in seule responsable de cette violation ;
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de remboursement intégral des sommes versées au titre de la réservation du territoire, des redevances contractuelles, du pack Lady Moving, des dépenses publicitaires et de la fourniture du logiciel d'origine ;
- condamné la SAS Mov'in à verser à la SARL Escale Beauté la somme de 164 400 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamné la SAS Mov'in à payer à la SARL Escale Beauté la somme de 150 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving mais débouté la SARL Escale Beauté de sa demande de remboursement des autres sommes réclamées ;
- débouté monsieur [N] [I] et madame [C] [L] de leurs demandes de condamnation de la SAS Mov'in à leur régler la somme de 35 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ;
- condamné la SAS Mov'in à payer la somme de 20 000 euros chacun à la SARL Escale Beauté, à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties de leurs autres demandes ;
- condamné la SAS Mov'in aux dépens de l'instance.
Saisie par déclarations d'appel de la SAS Mov'in du 6 juillet 2020 puis de la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, de la SARL IHM, de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L] du 21 juillet 2020, la cour d'appel de Paris, après avoir joint les instances, a, par arrêt du 8 mars 2023 rectifié le 28 juin 2023, statué en ces termes :
Déclare recevable la demande de Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à l'encontre de M. [I] et Madame [L], et la demande de condamnation de Fitness Park Development (anciennement Mov'in) pour procédure abusive ;
Infirme le jugement du tribunal en ses dispositions qui lui sont soumises, mais seulement en ce qu'il a :
Constaté la violation de l'exclusivité territoriale du contrat de réservation du 30 septembre 2010 et du contrat de licence du 29 octobre 2011 et déclaré Fitness Park Development (anciennement Mov'in) seule responsable de ladite violation ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à verser à la société Escale Beauté la somme de 164.400 € à titre de dommages et intérêts ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à payer à la société Escale Beauté la somme de 154.640 € au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à payer la somme de 20.000 € à la société Escale Beauté au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à payer la somme de 20.000 € à M. [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) aux dépens ;
Statuant de nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute la société Fitness Park Development (anciennement Movtin) de sa demande de dommages et intérêts ;
Déboute la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) de sa demande au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving ;
Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile formulées par ['] la société Fitness Park Development (anciennement Movtin), par M. [I] et par la SCP [E], ès qualités de liquidateur de la société Escale Beauté ;
Condamne la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à verser la somme de 2 000 euros à Mme [L] pour procédure abusive ;
Condamne la SCP [E], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Espace Beauté, et M. [N] [I], aux dépens.
Cependant, par arrêt du 4 décembre 2024 (n° 23-16.684), la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé cet arrêt, « sauf en ce qu'il déclare recevable la demande de la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) à l'encontre de M. [I] et Mme [L] et la demande de condamnation de la société Fitness Park Development (anciennement Mov'in) pour procédure abusive », pour les motifs suivants :
- [premier moyen, troisième branche] Vu l'article L. 330-3 du code de commerce :
5. Selon ce texte, toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause. Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités. Ledit document ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat.
6. Pour infirmer le jugement, mais seulement en ce qu'il a constaté la violation de l'exclusivité territoriale prévue au contrat de réservation du 30septembre2010, déclaré la société Fitness Park Development seule responsable, et condamné cette société à payer à la société Escale beauté la somme de 164 400 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que celle de 154 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept « Lady Moving », outre une somme à titre d'indemnité de procédure à chacun des défendeurs, l'arrêt constate, d'abord, que le document d'information précontractuelle (DIP) a été communiqué à la société Escale beauté le 30 septembre 2010, soit bien avant la signature du contrat du 26 octobre 2011 , de sorte que le délai prévu à l'article L. 330-3 du code de commerce a été respecté.
7. Il ajoute que les informations relatives à des procédures judiciaires engagées par des membres du réseau à l'encontre de la société Fitness Park Development sont postérieures à la transmission du DIP, tandis que ce document mentionnait l'existence de liquidations judiciaires subies par certains exploitants du réseau.
8. L'arrêt en déduit qu'il n'est pas démontré que l'état du réseau a été dissimulé au futur cocontractant.
9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, entre la date de transmission du DIP et la date de signature du contrat « de licence de marque », la situation du réseau ne s'était pas trouvée modifiée dans des conditions telles que le franchisé ne se serait pas engagé, en particulier s'il avait été informé du nombre réel de sortie du réseau au 30 septembre 201 1 par suite du prononcé de liquidations judiciaires et de la procédure judiciaire engagée le 18 mars 2011 par des membres du réseau à l'encontre de la société Fitness Park Development, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
- [premier moyen, neuvième branche] Vu les articles L. 330-3 du code de commerce et 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
11. Il résulte du premier de ces textes que si les comptes prévisionnels ne figurent pas dans les éléments devant se trouver dans le document d'information précontractuelle, ils doivent, lorsqu'ils sont communiqués, présenter un caractère sérieux.
12. Aux termes du second, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
13. Pour écarter le moyen selon lequel la société Escale beauté aurait été victime d'un dol, après avoir constaté que les bilans prévisionnels communiqués par la société Fitness Park Development étaient des « prévisionnels-types non contractuels », l'arrêt retient encore que la société Escale beauté, qui avait la volonté de s'installer dans un centre commercial, ne démontre pas qu'elle aurait contracté à des conditions différentes si elle avait eu connaissance d'informations plus précises et exactes. Il ajoute qu'il doit être pris en considération qu'il s'agit d'un « concept nouveau sur un marché nouveau ».
14. En statuant ainsi, après avoir constaté qu'au titre de la fourniture du DIP, la société Fitness Park Development avait transmis des bilans prévisionnels inexacts, n'avait pas révélé le nombre exact de sorties du réseau à la suite de liquidations judiciaires et n'avait pas révélé la procédure judiciaire engagée par certains membres à son encontre, ce dont il se déduisait l'omission d'informations révélatrices du risque élevé d'échec de l'ouverture du centre, lesquelles, si la société Escale beauté les avait connues, étaient de nature à la dissuader de contracter, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.
Par déclaration reçue au greffe le 17 février 2025, la SAS Fitness Park Development a saisi la cour d'appel de renvoi.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 6 octobre 2025, la SAS Fitness Park Development demande à la cour, au visa des articles L 330-3 et R 330-1 du code de commerce, 1382, 1110 et suivants et 1147 du code civil et 122 du code de procédure civile :
- de recevoir la SAS Fitness Park Development en ses demandes et les déclarer bien fondées ;
- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 juin2020 en ce qu'il a :
o rejeté la fin de non-recevoir opposée par la SAS Mov'in et tirée de l'autorité de chose jugée des protocoles signés par les parties ;
o débouté la SAS Mov'in de sa fin de non-recevoir tirée de l'interdiction du cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, constaté la violation de l'exclusivité territoriale du contrat de réservation du 30 septembre 2010 et du contrat de licence du 26 octobre 2011, déclaré la SAS Mov'in seule responsable de cette violation et condamné la SAS Mov'in à verser à la SARL Escale Beauté la somme de 164 400 euros au titre de dommages et intérêts et celle de 150 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving, condamné la SAS Mov'in à payer la somme de 20 000 euros chacun à la SARL Escale Beauté, à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné l'exécution provisoire du jugement et condamné la SAS Mov'in aux dépens de l'instance ;
- par conséquent, statuant à nouveau, de prononcer l'irrecevabilité des demandes de la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, au titre de l'autorité de la chose jugée attachée aux protocoles d'accord des 26 octobre 2011 et 12 février 2013 conclus entre la SARL Escale Beauté et la SAS Mov'in, et de rejeter l'ensemble des demandes des intimés ;
- à titre subsidiaire, de prononcer l'irrecevabilité des demandes de la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, au titre du principe du non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, et de rejeter l'ensemble des demandes des intimés ;
- à titre infiniment subsidiaire, de débouter les intimés de l'ensemble de leurs prétentions en ce qu'elles sont mal fondées et injustifiées ;
- en tout état de cause, de condamner solidairement les intimés au paiement de la somme de 150 000 euros « au profit de la SAS Mov'in, pour dénigrement fautif et atteinte à l'image de Movin » ;
- de condamner chacun des intimés à payer « à la SAS Mov'in » la somme de 25 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner solidairement les intimés aux entiers dépens.
En réponse, dans leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 7 octobre 2025, la SARL Escale Beauté, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, la SARL IHM, monsieur [N] [I] et madame [C] [L] demandent à la cour :
- à titre principal, vu les articles 1109, 1110, 1116 du code civil et L 330-3 du code de commerce :
o d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 juin 2020 en ce qu'il a débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de nullité du contrat du 30 septembre 2010 et du contrat de licence de marque « Lady Moving » ;
o statuant à nouveau, de prononcer la nullité du contrat de réservation du 30 septembre 2010, et du contrat de licence de marque « Lady Moving » du 26 octobre 2011 pour dol et subsidiairement pour erreur.
- à titre subsidiaire, vu l'article1134 du code civil, de confirmer le jugement en ce qu'il condamne la SAS Mov'in devenue la SAS Fitness Park Development à réparer le préjudice de la SARL Escale Beauté du fait de la violation de sa zone d'exclusivité ;
- en conséquence, en tout état de cause et statuant à nouveau :
o sur la compétence, de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 juin 2020 en ce qu'il a rejeté l'incompétence du tribunal de commerce ;
o sur la fin de non-recevoir, de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 juin 2020 en ce qu'il a rejeté l'irrecevabilité soulevé par la SAS Mov'in du fait de la signature des protocoles transactionnels des 26 octobre 2011 et du 12 février 2013, et, subsidiairement, de prononcer la nullité du protocole du 12 février 2013 pour défaut de concessions réciproques et dol ;
o sur la responsabilité civile de la SAS Fitness Park Development, d'infirmer le jugement en ce qu'il a :
débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de remboursement intégral des sommes versées au titre de la réservation du territoire, des redevances contractuelles, du pack « Lady Moving », des dépenses publicitaires et de la fourniture du logiciel d'origine ;
débouté la SARL Escale Beautéde sa demande de remboursement des autres sommes réclamées ;
débouté monsieur [N] [I] et madame [C] [L] de leur demande de condamnation de la SAS Mov'in à leur régler la somme de 35 000 euros au titre du préjudice moral ;
débouté la SARL Escale Beauté, monsieur [N] [I], madame [C] [L] et la SARL IHM de leurs autres demandes ;
o statuant à nouveau, de condamner la SAS Fitness Park Development à réparer le préjudice subi par les intimés par l'allocation de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil, et, sur la réparation, de :
condamner la SAS Fitness Park Developmentà la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre de la réservation du territoire, soit 12 500 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre des redevances contractuelles, soit 21 000 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre du pack « Lady Moving », soit 79 500 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre des dépenses publicitaires versées directement à la SAS Mov'in, et donc au paiement de la somme de 5 495 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à la restitution intégrale des sommes versées par la SARL Escale Beauté au titre de la fourniture du logiciel d'origine et donc au paiement de la somme 500 euros ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 973 976 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice matériel ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 112 715 euros de dommages et intérêts au titre de la perte d'une chance ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 221 786 euros au titre de la dépose des éléments du concept « Lady Moving » ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 5 297 euros au titre de la prise en charge des remboursements d'abonnements ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 30 809,15 euros au titre du remboursement des frais liés à la procédure de sauvegarde, de redressement et de liquidation ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 343 310 euros au titre du préjudice lié aux charges de la liquidation ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté de la somme de 57 723,37 euros au titre des dépenses de communication ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 31 854,97 euros au titre du matériel acquis hors pack « Lady Moving » ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté la somme de 4 190 euros au titre des frais divers (consultants et huissiers de justice) ;
condamner la SAS Fitness Park Development à garantir monsieur [N] [I], madame [C] [L] et la SARL IHM de tout remboursement anticipé qui serait exigé par la banque populaire au titre des prêts ;
condamner la SAS Fitness Park Development à dédommager la SARL IHM au titre de la perte financière subie par cette dernière sur les exercices 2011, 2012, 2013 et 2014, en raison des sommes bloquées en compte courant, par application du taux moyen de rendement des obligations et donc à lui verser la somme de 165 350,71 euros, somme à parfaire au jour de l'audience ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] la somme de 35 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] la somme de 5 000 euros chacun au titre de leur préjudice pour procédure abusive ;
débouter la SAS Fitness Park Development de l'ensemble de ses demandes ;
condamner la SAS Fitness Park Development à verser à la SCP [E] en la personne de Maître [X] [E] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Escale Beauté, à monsieur [N] [I] et à madame [C] [L] la somme de 20 000 euros chacun au titre des frais irrépétibles de l'article 700 code de procédure civile ;
condamner la SAS Fitness Park Development aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux décisions entreprises et aux conclusions visées pour un exposé détaillé du litige et des moyens des parties.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 octobre 2025. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, l'arrêt sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile.
Par message RPVA du 17 octobre 2025, la SAS Fitness Park Development s'est désistée de sa demande au titre du dénigrement, désistement accepté sans réserve par les intimés par message RPVA du 20 octobre 2025.
MOTIVATION
A titre liminaire, la cour rappelle que :
- conformément à l'article 631 du code de procédure civile, l'instruction est reprise en l'état de la procédure non atteinte par la cassation, la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation n'étant de ce fait pas une déclaration d'appel et n'introduisant pas une nouvelle instance mais entraînant la poursuite de l'instance d'appel initiale ;
- en vertu des dispositions combinées des articles 562 et 954 du code de procédure civile, si l'acte d'appel opère dévolution des chefs critiqués du jugement et détermine ainsi le périmètre de l'effet dévolutif de l'appel (en ce sens, 2ème Civ., 30 janvier 2020, n° 18-22.528), seules les dernières conclusions fixent l'objet du litige au sens de l'article 4 du code de procédure civile et la portée de l'appel (en ce sens, 2ème Civ., 26 mai 2011, n° 10-18.304). Dès lors, chaque partie est libre de limiter sa critique à certains des chefs visés dans son appel principal ou incident et la cour est alors tenue de confirmer ceux qui sont abandonnés mais dont elle demeure saisie par le jeu de l'effet dévolutif.
Dans ce cadre, si la SAS Mov'in, aux droits de laquelle vient la SAS Fitness Park Development, vise dans sa déclaration d'appel du 6 juillet 2020 le chef du dispositif du jugement du 17 juin 2020 rejetant son exception d'incompétence, elle ne présente pas ce moyen de défense dans le dispositif de ses dernières conclusions et ne l'évoque d'ailleurs pas dans sa motivation. Aussi, ce moyen est réputé abandonné et la cour ne peut que confirmer le jugement de ce chef qui présuppose la requalification du contrat de licence de marque en contrat de franchise.
Par ailleurs, les intimés concluent subsidiairement à la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la SAS Fitness Park Development au titre de la violation de l'exclusivité accordée à la SARL Escale Beauté mais ne développent aucun moyen dans leurs dernières écritures au soutien de cette prétention. Ils sont ainsi, conformément à l'article 954 in fine du code de procédure civile, réputés s'approprier les motifs du jugement sur ce point.
Enfin, parfait par l'effet de son acceptation sans réserve au sens des articles 400, 401 et 403 du code de procédure civile, la perfection du désistement de la SAS Fitness Park Development de sa demande indemnitaire reconventionnelle au titre du dénigrement sera constatée.
1°) Sur la recevabilité des demandes
En vertu des articles 122 et 123 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée, cette liste n'étant pas limitative. Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.
a) Sur l'autorité de la chose jugée attachée aux protocoles d'accord
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development expose qu'elle a conclu avec la SARL Escale Beauté deux transactions. La première, signée le 26 octobre 2011 et relative aux « malfaçons dans la mise en place du Pack Concept Lady Moving », prévoyait une réduction de moitié du montant de la redevance de licence de marque entre le 1er septembre 2011 et le 31 août 2012 en contrepartie d'une renonciation par la SARL Escale Beauté à « quelque compensation ou somme complémentaire que ce soit au titre du Contrat de réservation, de la commande et de l'installation du Pack Concept Lady Moving et du contrat de licence de marque qui s'en suit » (article 2). La seconde, régularisée le 12 février 2013 et portant notamment sur « d'autres griefs concernant la définition de la zone de chalandise de son Centre, et [des] défauts de livraison dans le matériel », exonérait la SARL Escale Beauté de tout paiement des redevances pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2012 et réduisait leur montant de moitié jusqu'au terme (article 2). Soutenant qu'au jour de leur signature, la SARL Escale Beauté était informée de l'ouverture de centres de remise en forme dans les communes voisines, elle en déduit que le licencié a renoncé à invoquer la nullité des contrats au titre du non-respect de la zone d'exclusivité consentie, de l'obligation d'information précontractuelle ou de l'obligation d'assistance et est irrecevable à agir. Elle ajoute que les transactions comportent des concessions réelles de sa part et que les intimés ne prouvent aucune man'uvre frauduleuse fondant le dol qu'ils allèguent, l'erreur de droit opposée étant pour sa part inexistante et quoi qu'il en soit inopérante au sens de l'article 2052 du code civil.
En réponse, les intimés exposent que les protocoles opposés étaient destinés à mettre un terme à un autre litige relatif à des « malfaçons dans la mise en place du Pack Concept Lady Moving », l'ajout d'un cinquième paragraphe dans la seconde transaction, la veille de sa signature, n'étant pas de nature à étendre son objet à d'autres griefs, les courriers auxquels elle se réfère n'étant pas annexés et ne concernant pas les réclamations relatives au document d'information précontractuel (ci-après, « le DIP »), aux prévisionnels fournis par le franchiseur ainsi qu'aux problématiques de transmission du savoir-faire ou liées au devoir d'assistance.
Réponse de la cour
En vertu des articles 2044 (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 qui était inapplicable au jour de la conclusion des protocoles litigieux), 2048 et 2049 du code civil, la transaction, qui est un contrat écrit par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître, se renferme dans son objet, la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entendant que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu, et ne règle que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé. Les transactions, qui ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort en vertu de l'article 2052 du code civil (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 qui était inapplicable au jour de la conclusion des protocoles litigieux), ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion et ne sont rescindables qu'en cas d'erreur dans la personne ou sur l'objet de la contestation ainsi que dans tous les cas où il y a dol ou violence conformément à l'article 2053 du même code (applicable au jour des protocoles litigieux). Elles sont d'interprétation restrictive.
Par ailleurs, au sens des dispositions des articles 1156 et suivants (devenus 1188 et suivants) du code civil, qui constituent non des normes juridiques s'imposant à elle, mais un guide d'interprétation des conventions à l'usage des parties et du juge, la cour interprète les stipulations manquant de clarté en recherchant la commune intention des parties contractantes sans s'arrêter au sens littéral des termes et en donnant à celles-ci le sens qui leur permet de produire un effet plutôt que celui qui les annihile en considération de la matière et de l'économie générale du contrat dont les clauses sont interdépendantes. L'intention des parties au jour de la conclusion peut être éclairée par leur comportement contemporain de la formation du contrat et adopté durant son exécution.
Le protocole d'accord du 26 octobre 2011 (pièce 16 de l'appelante) porte sur des « malfaçons dans la mise en place du Pack Concept Lady Moving », désordres constatés par procès-verbal de constat causés par l'action d'un sous-traitant ayant impliqué des travaux de remise en état de 5 500 euros. Les parties ont convenu des concessions réciproques « afin de régler définitivement toutes réclamations nées notamment de l'exécution et de la mise en place du Pack Concept Lady Moving », la SARL Escale Beauté déclarant de ce fait être « rempli[e] de tous ses droits et renon[çant] expressément et irrévocablement à quelque compensation ou somme complémentaire que soit au titre du Contrat de réservation, de la commande et de l'installation du Pack Concept LADY MOVING et du contrat de licence de marque qui s'en suit ».
Ainsi que le résume exactement la SAS Fitness Park Development (page 15 de ses écritures), cette transaction, qui précise le coût de remise en état effectivement supporté par la SARL Escale Beauté, est relative à « la livraison du Pack Lady Moving et à des équipements présentés comme défectueux ou manquants », point qui constitue son unique objet. Aussi, ce protocole est étranger à toute faute précontractuelle, par hypothèse dissimulée au jour de la signature concomitante du contrat qualifié de licence de marque et découverte postérieurement à sa régularisation, et aux demandes de restitution et d'indemnisation qu'elle fonde.
Ce premier moyen est inopérant.
Le protocole d'accord du 12 février 2013 (pièce 10 de l'appelante) porte sur « d'autres griefs [opposés par la SARL Escale Beauté] concernant la définition de la zone de chalandise de son Centre, et de défauts de livraison dans le matériel ainsi que différents autres griefs que les parties se dispensent expressément de recenser ['], mais qui ont été largement exprimés au travers des échanges de correspondances pour aboutir notamment à des courriers recommandés avec avis de réception des 7 juin 2012 et 24 octobre 2012 qui reflètent l'essentiel des griefs formulés et une exposition des conditions de règlement de ces griefs ». En contrepartie des concessions faites par la SAS Fitness Park Development, la SARL Escale Beauté « se déclare rempli[e] de tous ses droits et renonce expressément et irrévocablement à toutes instances, à toutes actions, à toutes compensations ou demandes complémentaires ou supplémentaires au titre de la formation, de l'interprétation, de l'exécution du contrat de réservation ou du contrat de licence de marque et au titre de la commande et de l'installation du Pack Concept ».
Alors que le protocole énonce des griefs de manière trop imprécise et parcellaire pour en définir les contours et en saisir la consistance (« différents autres griefs que les parties se dispensent expressément de recenser », « l'essentiel des griefs formulés »), les échanges qu'il évoque pour pallier cette carence ne sont pas identifiés à l'exception de deux courriers qui n'y sont pas annexés et qui ne sont de surcroît pas produits, la SAS Fitness Park Development n'y faisant d'ailleurs pas référence dans son tableau de correspondance entre les griefs censés être couverts par la transaction et ceux formulés postérieurement à sa conclusion (page 16 de ses écritures). Aussi, la SAS Fitness Park Development ne démontre pas que ce second protocole concernerait des prétentions en lien avec celles soumises au tribunal.
Ce second moyen est également inopérant
En conséquence, c'est par de justes motifs que la cour adopte en complément des siens que le tribunal a rejeté la fin de non-recevoir opposée à ce titre par la SAS Fitness Park Development.
b) Sur le cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development soutient que les intimés sollicitent cumulativement la nullité des contrats au titre de sa responsabilité contractuelle et des indemnisations identiques sur le fondement de sa responsabilité délictuelle et en déduit l'irrecevabilité de l'intégralité de leurs prétentions qui sont toutes concurrentes.
En réponse, les intimés exposent que, à raison de l'anéantissement rétroactif du contrat qu'emporte sa nullité, seule la responsabilité délictuelle de l'auteur du dol qui la fonde peut être recherchée.
Réponse de la cour
En application de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er octobre 2016, les contrats litigieux des 30 septembre 2010 et 26 octobre 2011, conclus antérieurement, demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d'ordre public ains que pour leurs conditions de formation.
En vertu des dispositions combinées des articles 1134, 1147 et suivants et 1382 (devenus 1103, 1231 et suivants et 1240) du code civil, la responsabilité délictuelle ne peut pas régir les rapports contractuels entre les parties. Celles-ci ne disposent ni d'une option entre ces deux régimes de responsabilité, l'existence d'une faute commise dans l'exécution d'un contrat imposant la mise en 'uvre exclusive de la responsabilité contractuelle de son auteur qui à l'inverse ne régit pas les relations hors convention, ni, en l'absence d'objet distinct des demandes, d'une possibilité de cumul des actions dont les fondements sont juridiquement incompatibles. De surcroît, le principe de la réparation intégrale, sans perte ni profit, exclut la double indemnisation d'un préjudice unique. La sanction du cumul est l'irrecevabilité de l'action (en ce sens, illustrant une position ancienne et constante : Com. 4 décembre 2019, n° 17-20.032).
Les intimés sollicitent :
- à titre principal la nullité des contrats et le bénéfice des restitutions consécutives ainsi que diverses sommes au profit de chacun d'eux à titre indemnitaire sur le fondement de l'article 1382 (ancien) du code civil ;
- subsidiairement, la réparation du préjudice de la SARL Escale Beauté causé par la violation de son exclusivité territoriale.
Contrairement à ce que soutient la SAS Fitness Park Development, la nullité pour dol ou pour erreur provoquée sanctionne des fautes précontractuelles, soit, par définition, des manquements antérieurs à la formation du contrat et de ce fait de nature délictuelle. Et, la victime de man'uvres dolosives peut exercer à son choix, outre une action en annulation du contrat, une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du dommage qu'elle a subi (en ce sens, Com., 15 janvier 2002, n° 99-18.774, confirmant une position constante désormais reprise expressément à l'article 1178 du code civil reprenant le droit positif antérieur et soulignant le caractère extracontractuel de la responsabilité résultant du dol).
Alors qu'aucun cumul de responsabilités n'est constitué par l'association de demandes de nullité et d'indemnisation consécutives au dol, le fait de solliciter à titre subsidiaire la réparation du préjudice causé par la violation d'une clause du contrat dont la nullité a été écartée et qui est par conséquent valide ne heurte pas le principe de non-option, les demandes étant clairement hiérarchisées et s'articulant sans contradiction, la prétention subsidiaire tirant les conséquences logiques du rejet des demandes principales.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir opposée par la SAS Fitness Park Development à ce titre.
2°) Sur la validité des contrats
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development expose que l'article L 330 du code de commerce, dont elle reconnaît qu'il s'applique au contrat qualifié de licence de marque litigieux, n'impose la communication ni d'une étude de marché local ni d'un prévisionnel et rappelle que tout manquement à l'obligation d'information précontractuelle qu'il institue ne fonde la nullité du contrat que s'il cause un vice du consentement prouvé, son existence ne se déduisant pas du non-respect du délai de 20 jours et le dol supposant la démonstration du caractère intentionnel des man'uvres qui le caractérisent. Concédant que tout prévisionnel communiqué par un franchiseur doit comporter des données exactes et sincères, elle indique que l'erreur sur la rentabilité n'est une cause de nullité que si elle procède des informations transmises par le franchiseur et ne repose pas sur des éléments postérieurs et imprévisibles.
Elle soutient dans ce cadre avoir remis à monsieur [N] [I] un DIP le 30 septembre 2010, soit plus de 20 jours avant la signature du contrat de réservation de zone du 30 septembre 2010 et du contrat de licence de marque du 26 octobre 2011 dont les termes confirment cette communication préalable, et note qu'il se contredit en critiquant précisément le contenu d'un document qu'il prétend ne pas avoir obtenu. Observant que le DIP mettait à la charge du candidat, qui disposait de sérieuses compétences professionnelles lui permettant d'apprécier le marché, le réseau et son évolution, l'obligation d'établir un prévisionnel, elle explique avoir transmis à monsieur [N] [I] des prévisionnels types le 18 mars 2007 puis un prévisionnel purement indicatif reposant sur des hypothèses moyennes de fonctionnement tirées des performances des autres établissements du réseau qui avait été établi le 5 mai 2010 et mis à jour le 8 juin 2011 sur la base des données et hypothèses de monsieur [N] [I], circonstances exclusives de sa responsabilité. Elle précise à cet égard qu'elle n'était tenue d'aucune obligation de résultat de réussite économique de la SARL Escale Beauté.
Elle expose que les données prétendues omises, comme les prévisionnels eux-mêmes, n'étaient pas déterminantes du consentement de la SARL Escale Beauté qui nourrissait le projet d'intégrer le réseau Mov'in depuis 2006, soit antérieurement à la remise du DIP, et aurait contracté dans les mêmes conditions si elle les avaient connues. Elle indique que les intimés, qui s'appuient sur les résultats nets globaux de la SARL Escale Beauté grevés par les nombreux litiges qu'elle a initiés et non sur son chiffre d'affaires propre à l'activité sportive objet du contrat, ne démontrent pas que le prévisionnel était irréaliste. Elle ajoute que plusieurs clubs étaient d'ailleurs bénéficiaires sur la période en cause, que les centres à l'enseigne Lady Moving étaient ceux qui résistaient le mieux à la baisse d'activité du secteur et que la SARL Escale Beauté éprouvaient d'importantes difficultés financières antérieures à la conclusion du contrat de licence de marque. Elle précise par ailleurs que la SARL Escale Beauté ne prouve pas l'existence de liquidations judiciaires postérieures au 3 septembre 2010 sciemment non mentionnées dans le DIP et note que l'assignation des licenciés Lady Moving a été signifiée par son conseil le 28 mars 2011, après remise de ce dernier, et n'a pas abouti à sa condamnation. Elle relève que le projet de monsieur [N] [I], qui a collaboré avec elle jusqu'en 2016 en commercialisant des locaux pour son compte et a négocié l'ouverture d'un centre Fitness Park, était mûrement réfléchi, les discussions ayant débuté en 2006, et que l'intervention de son salarié, monsieur [F], est sans lien avec les difficultés rencontrées par la SARL Escale Beauté. Elle soutient enfin que la SARL Escale Beauté ne démontre pas que, à les supposer réels, ses manquements à son obligation précontractuelle d'information aient vicié son consentement.
En réponse, les intimés exposent que le consentement de la SARL Escale Beauté a été, lors de la conclusion des contrats de réservation du 30 septembre 2010 et de franchise du 26 octobre 2011, vicié à raison de l'absence de transmission régulière du DIP, de ses insuffisances et inexactitudes et de l'insincérité volontaire des prévisionnels fournis par le franchiseur. Ils précisent ainsi que le DIP :
- n'a été matériellement communiqué qu'en juin 2015, postérieurement à l'assignation, après avoir été remis et « signé sur un coin de table » le 30 septembre 2010 « avec effet rétroactif au 3 septembre » puis conservé par la SAS Mov'in, carence qui ne lui a pas permis d'apprécier valablement les conséquences de la conclusion du contrat ;
- ne comprend pas les informations légalement requises relatives aux domiciliations bancaires du franchiseur, les comptes annuels des deux derniers exercices 2008 et 2009, la liste des licenciés ayant cessé leur activité, notamment en raison de liquidations, ainsi que le montant des investissements devant être effectués par le franchisé. Ils ajoutent que le document occulte également l'expérience professionnelle du directeur du réseau, monsieur [F], qui a animé un autre réseau désormais liquidé et a été condamné à cette occasion le 7 septembre 2011 ainsi que par la Cour de discipline budgétaire et financière pour des prêts octroyés frauduleusement dans le cadre d'une activité bancaire précédente. Ils indiquent que le DIP est également insincère en ce qu'il ne repose que sur des éléments relatifs à la marque Moving et non spécifiques au concept Lady Moving ;
- contient des informations obsolètes (Kbis, organigramme, bilan, étude antérieure à la création de l'enseigne) qui, si elles avaient été actualisées, auraient fait obstacle à la conclusion du contrat ;
- dissimulent de nombreuses liquidations judiciaires ouvertes à l'encontre de membres du réseau.
Ils expliquent par ailleurs que la SAS Mov'in a fourni différents prévisionnels chiffrés de 2006 à 2011 adaptés au centre de remise en forme de la SARL Escale Beauté, et non standards, qui sont très éloignés de ses résultats effectifs au titre de la seule activité fitness isolée dans l'étude Effigest qu'elle produit (en 2011, 26 298 euros contre 173 268 euros ; en 2012, 99 641 euros contre 376 681 euros ; en 2013, 102 006 euros contre 444 507 euros ; en 2014, 82 929 euros contre 532 110 euros ; en 2015, 65 269 euros contre 538 005 euros). Ils précisent que, sans même tenir compte des données manquantes propres aux sociétés liquidées, les autres centres de remise en forme exploités sous l'enseigne Lady Moving étaient déficitaires entre 2006 et 2009, un collectif de franchisé ayant dénoncé le 30 septembre 2010 l'impossibilité pour 92,5 % d'entre eux de réaliser les chiffres annoncés dans leurs prévisionnels, signe supplémentaire de l'incurie de monsieur [F], homme clé du réseau. Ils soulignent le caractère déterminant du consentement de la SARL Escale Beauté de ces prévisionnels qui n'ont approché la réalité que postérieurement à la signature du contrat de licence de marque, chronologie révélant le caractère dolosif du comportement de la SAS Mov'in dont tous les centres Lady Moving sont désormais fermés.
Les intimés exposent que s'ajoute à ces fautes la dissimulation d'informations essentielles tenant aux mauvais résultats des membres du réseau, aux actions judiciaires engagées par des franchisés dès le 28 mars 2011, aux condamnations de monsieur [F] et à l'absence d'exploitation directe d'un centre Lady Moving par la tête de réseau. Ils prétendent que celle-ci a trompé tous ses partenaires en traitant comme du fitness mixte le fitness féminin, dont elle ignorait tout ainsi qu'en attestent deux anciens cadres dirigeants du groupe à rebours des conclusions contradictoires et invérifiables du rapport [W] qu'elle produit. Ils soutiennent en outre que la confusion qu'entretient la SAS Fitness Park Development entre les zones de réservation et d'exclusivité, le contrat de réservation mentionnant une zone d'exclusivité par référence à la zone de réservation que le contrat de franchise ne reprend pas, caractérise en soi une man'uvre frauduleuse. Ils précisent que, comme madame [C] [L] qui exploitait un institut de beauté, monsieur [N] [I] n'avait aucune expérience dans ce secteur d'activité et que sa collaboration avec l'enseigne se limitait à une entremise immobilière, c'ur d'activité de la SARL IHM. Ils contestent par ailleurs toute difficulté financière de la SARL Escale Beauté antérieure à la signature des contrats litigieux et relèvent que les litiges qu'elle a initiés sont sans lien avec les déficits qu'a exclusivement et directement causés la SAS Mov'in. Ils estiment que, à défaut d'un dol, ces éléments, qu'ils ne pouvaient utilement apprécier qu'après un temps d'exploitation, caractérisent une erreur provoquée fondant à son tour la nullité des contrats.
Réponse de la cour
a) Sur le principe des nullités
En vertu de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er octobre 2016, les contrats litigieux, conclus les 30 septembre 2010 et 26 octobre 2011, demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs conditions de formation.
En application des articles 1101 et 1108 du code civil, le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. Quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention : le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter, un objet certain qui forme la matière de l'engagement et une cause licite dans l'obligation, l'article 1131 disposant que l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.
Et, conformément à l'article 1109 du code civil, il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol. En vertu de l'article 1110 du même code, l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet. De plus, en application de l'article 1116 de ce code, le dol, qui ne se présume pas et doit être prouvé, est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. A ce titre, tout silence conservé intentionnellement par un futur cocontractant sur des informations qu'il connaît mais qui sont inaccessibles à l'autre partie et sont déterminantes de son consentement caractérise un dol, l'erreur en résultant étant toujours excusable (en ce sens, 3ème Civ., 21 février 2001, n° 98-20.817).
Par ailleurs, les parties, qui ne débattent plus de la compétence du tribunal, ne contestent pas que le contrat dit de licence de marque est soumis au régime du contrat de franchise, qualification retenue par les premiers juges pour rejeter l'exception d'incompétence opposée par la SAS Mov'in.
Conformément à l'article L 330-3 du code de commerce toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause, ce DIP ainsi que le projet de contrat étant communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme exigée préalablement à celle-ci. Le contenu de ce DIP est défini à l'article R 330-1 du code de commerce.
La violation du délai prescrit par l'article L 330-3 du code de commerce, à l'instar des insuffisances et des carences éventuelles du DIP, n'emporte pas par elle-même nullité du contrat, le franchisé devant qualifier et caractériser le vice du consentement en découlant (en ce sens, Com. 10 février 1998, n° 95-21.906, et Com., 7 octobre 2014, n° 13-23.119).
- Sur la transmission du DIP
Le DIP produit par la SAS Fitness Park Development (sa pièce 7), qui comprend notamment en annexe les projets de contrats de réservation et de licence de marque envisagés, est daté du 3 septembre 2010 et comporte la signature de monsieur [N] [I] après la mention « document précontractuel et annexe remis à » dans une partie dédiée à l'accusé de réception du DIP et à l'engagement de confidentialité. Rien, dans ce document que ce dernier a personnellement complété sans arguer ni justifier d'une contrainte particulière, ne permet de déceler l'antidatage qu'il évoque dans son courrier du 7 octobre 2010 (sa pièce 29) ou de présumer un défaut de remise effective du DIP et de ses annexes dénoncée bien plus tard dans ses lettres des 12 avril 2012, 5 et 26 novembre 2013, 2 et 13 décembre 2013 et 18 janvier 2014 (ses pièces 22 et 30 à 34) puis dans son assignation du 20 mai 2014 (sa pièce 116). Or, ces missives et cet acte de procédure, qui ne sont que l'expression redondante des affirmations de la SARL Escale Beauté, n'ont aucune force probante et, à supposer le contraire, ne sont pas propres à combattre une mention librement portée par la SARL Escale Beauté sur l'acte puis confirmée lors de la signature du contrat qualifié de licence de marque (pièce 8 de l'appelante, page 5 paraphée par monsieur [N] [I]), et ce d'autant qu'ils sont ambigus puisqu'ils évoquent parfois, non un défaut de remise du DIP, mais une absence de communication du « DIP dûment ratifié » par la SAS Mov'in.
En l'absence de tout élément intrinsèque ou extrinsèque révélant l'inexactitude de la date portée par monsieur [N] [I] lui-même, le DIP a été remis dans le délai prescrit par l'article L 330-3 du code de commerce.
- Sur l'exhaustivité, l'exactitude et l'actualité des données du DIP
Aux termes de l'article R 330-1 du code de commerce dans sa version issue du décret n° 2009-557 du 19 mai 2009 applicable au jour de la remise du DIP, celui-ci contient les informations suivantes :
1° L'adresse du siège de l'entreprise et la nature de ses activités avec l'indication de sa forme juridique et de l'identité du chef d'entreprise s'il s'agit d'une personne physique ou des dirigeants s'il s'agit d'une personne morale ; le cas échéant, le montant du capital ;
2° Les mentions visées aux 1° et 2° de l'article R. 123-237 ou le numéro d'inscription au répertoire des métiers ainsi que la date et le numéro d'enregistrement ou du dépôt de la marque et, dans le cas où la marque qui doit faire l'objet du contrat a été acquise à la suite d'une cession ou d'une licence, la date et le numéro de l'inscription correspondante au registre national des marques avec, pour les contrats de licence, l'indication de la durée pour laquelle la licence a été consentie ;
3° La ou les domiciliations bancaires de l'entreprise. Cette information peut être limitée aux cinq principales domiciliations bancaires ;
4° La date de la création de l'entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d'exploitants, s'il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d'apprécier l'expérience professionnelle acquise par l'exploitant ou par les dirigeants. Ces informations peuvent ne porter que sur les cinq dernières années qui précèdent celle de la remise du document. Elles doivent être complétées par une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché. Doivent être annexés à cette partie du document les comptes annuels des deux derniers exercices ou, pour les sociétés dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les rapports établis au titre des deux derniers exercices en application du III de l'article L 451-1-2 du code monétaire et financier ;
5° Une présentation du réseau d'exploitants qui comporte :
a) La liste des entreprises qui en font partie avec l'indication pour chacune d'elles du mode d'exploitation convenu ;
b) L'adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée ; la date de conclusion ou de renouvellement de ces contrats est précisée. Lorsque le réseau compte plus de cinquante exploitants, ces informations ne sont exigées que pour les cinquante entreprises les plus proches du lieu de l'exploitation envisagée ;
c) Le nombre d'entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l'année précédant celle de la délivrance du document. Le document précise si le contrat est venu à expiration ou s'il a été résilié ou annulé ;
d) S'il y a lieu, la présence, dans la zone d'activité de l'implantation prévue par le contrat proposé, de tout établissement dans lequel sont offerts, avec l'accord exprès de la personne qui propose le contrat, les produits ou services faisant l'objet de celui-ci ;
6° L'indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités.
Le document précise, en outre, la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation.
Contrairement à ce que soutiennent les intimés qui n'expliquent pas en quoi ces mentions seraient erronées ou insuffisantes, le DIP précise les domiciliations bancaires de la SAS Mov'in (§II.7) ainsi que le montant des investissements supportés par le licencié (§III.5 et 6, données complétées par le prévisionnel type fourni en annexe 17).
En outre, si, quoiqu'il vise les comptes annuels 2008/2009, son annexe 6 ne contient que les comptes annuels de l'exercice clos au 31 octobre 2008 (pages 33 et suivantes), la SARL Escale Beauté n'établit pas l'impact de cette omission sur l'intégrité de son consentement alors que les bons résultats de la SAS Mov'in, avant comme après la remise du DIP et la signature des contrats litigieux, n'est pas en débat.
Par ailleurs, la SAS Fitness Park Development ne conteste pas que monsieur [M], présenté comme directeur général opérationnel dans le DIP et les organigrammes qui l'accompagnent (annexes 2 et 3), était décédé en août 2010, avant sa transmission. Elle ne nie pas non plus que monsieur [F], nommé en 2008 comme directeur de l'exploitation des ouvertures et en charge des formations et présenté par le directeur général opérationnel du groupe Moving en 2014 comme la personne sur qui reposait « toute la structure » (pièces 77, 88, 106 et 107 des intimés), jouait un rôle clé dans la gestion de la franchise naissante sous enseigne Lady Moving. Pour autant, outre le fait que ces fonctions opérationnelles ne font pas nécessairement de monsieur [F] un dirigeant ou un exploitant au sens de l'article R 330-1 4° du code de commerce, ce texte ne fait pas obligation à la tête de réseau de communiquer les antécédents judiciaires de ses dirigeants. En outre, les informations dont l'omission est dénoncée par les intimées sont soit antérieures à la période impérative de 5 ans visée par l'article R 330-1 4° du code de commerce (pièces 75 et 76 des intimées pour les liquidations judiciaires des centres sous enseigne Gymnasium et la condamnation par la Cour de discipline budgétaire et financière), soit postérieures à la remise du DIP et à la signature du contrat de réservation (pièce 37 des intimés pour la condamnation dont le caractère définitif n'est pas établi pour des faits de banqueroute, d'abus de biens sociaux et de violation d'une interdiction de gérer). Aussi, l'inexactitude des mentions relatives à monsieur [M] étant sans conséquence sur l'intégrité du consentement de la SARL Escale Beauté et le silence conservé sur l'expérience professionnelle de monsieur [F] n'étant pas illicite, ce moyen est inopérant.
En revanche, la présentation du réseau figurant dans le DIP est incomplète, les intimés démontrant par la production des extraits Kbis de sociétés exerçant leur activité sous l'enseigne Lady Moving (leur pièce 121) que, sur la période définie par l'article R 330-1 5°c du code de commerce, les sociétés Theb'elle, Arthéo et Catmar ont été respectivement objet de liquidations judiciaires prononcées les 4 et 24 mars 2010 et 6 juillet 2010. En outre entre la date de la remise du DIP et celle de la signature du contrat qualifié par les parties de licence de marque, dont l'arrêt du 4 décembre 2024 souligne la nécessaire prise en compte pour l'appréciation du respect de l'obligation d'information précontractuelle découlant de l'article L 330-3 du code de commerce, les sociétés Culture Physique & Bien-Etre, Debeaumont Lady Sport, Easyform, Christie Club, Lady Feist, CDA Ladies, Vital Fitness Compain et Stemaness ont été respectivement liquidées les 25 octobre et 16 novembre 2010, 18 janvier, 1er février, 10 mars, 27 avril, 10 et 11 mai 2011.
A raison de leur nombre, particulièrement important rapporté au nombre total de licenciés, et de leur succession rapide et régulière ainsi que de leur cause exclusivement économique, ces sorties du réseau révélaient la réalité et l'ampleur des difficultés d'exploitation, insurmontables pour de nombreux licenciés, auxquelles la SARL Escale Beauté seraient confrontées en régularisant le contrat qualifié de licence de marque. Inquiétantes et de ce fait propres à dissuader le candidat d'intégrer le réseau, elles étaient déterminantes de son consentement. A cet égard, il importe peu que monsieur [N] [I] et madame [C] [L] fussent des « professionnels aguerris », d'ailleurs dans des secteurs différents de la gestion de centres de remise en forme (immobilier et soins/beauté), ou que la SARL Escale Beauté ait pu mûrir son projet depuis 2006, les informations utiles à sa pleine appréhension de ses conditions de possibilité et de réussite lui étant par hypothèse dissimulées et n'étant vérifiables qu'au prix de recherches que l'obligation d'exhaustivité et de sincérité de la SAS Mov'in les dispensait d'accomplir.
A l'inverse, cette dernière, en sa qualité de tête de réseau, avait connaissance de ces renseignements qui étaient d'autant plus significatifs qu'elle était alertée depuis le 30 septembre 2010 de l'incapacité de la grande majorité de ses licenciés Lady Moving à exercer une activité rentable (pièce 86 des intimés, courrier adressé alors que le conseil assistant les licenciés mécontents, qui ont assigné la SAS Mov'in le 28 mars 2011, n'étaient pas encore celui des intimés). Et, elle ne pouvait ignorer, en ce qu'elles éclairaient spécifiquement l'aptitude du réseau naissant Lady Moving à se développer et à se maintenir que masquait la présentation générale des bons résultats du réseau Moving, qu'elles étaient déterminantes du consentement de leur partenaire.
Dès lors, en occultant ces données dans le DIP et en les taisant jusqu'à la signature du contrat dit de licence de marque, la SAS Mov'in a commis une réticence dolosive fondant à elle seule l'annulation des contrats de réservation et de licence.
Conformément aux articles L 330-3 et R 330-1 du code de commerce le franchiseur est tenu de communiquer au candidat, non une étude de marché local (en ce sens, Com.,7 mars 2018, n° 16-25.654) mais des précisions sincères et exactes sur l'état et les perspectives de développement du marché concerné. Or, la SAS Mov'in a fourni sur ce plan à la SARL Escale Beauté :
- un sondage de 2008 sur les habitudes des français en matière de « forme et de bien-être » (annexe 8 : budget consacré, motivations, nature des activités pratiquées et combinées) qui complète modestement une étude de 2006 du cabinet Deloitte sur l'industrie des clubs de sport dans le monde et en France (annexe 9) ne livrant aucune information sur le fitness féminin objet du concept Lady Moving ;
- une « analyse du marché potentiel d'un centre Lady Moving » se résumant en l'explicitation d'un unique exemple constitué d'une zone de chalandise de 50 000 personnes qui est adaptée à un centre « Cinq Pôles » (pièce 64 de l'appelante, page 33) mais excède la population de la commune de [Localité 9], accompagné de la reproduction de la page Wikipédia consacrée à la communauté d'agglomération de [Localité 10] (annexes 11 et 12) ;
- un extrait des Pages Jaunes listant les « clubs de forme » au sein de cette dernière (annexe 13).
Ces élément sont très insuffisants pour apprécier l'état du marché national ou local et ne sont spécifiques ni à la clientèle locale ni au concept Lady Moving axé sur le fitness exclusivement féminin et n'éclaire pas les perspectives du marché pourtant présenté en annexe 17 comme « considérable ». Cette carence aggrave le défaut d'information relatif aux sorties du réseau.
- Sur les prévisionnels
Le défaut de rentabilité de l'exploitation encadrée par le contrat litigieux doit être appréhendé sous l'angle de l'erreur portant, non sur la valeur qui est indifférente en elle-même, mais sur la substance de la chose qui vicie le consentement du franchisé au sens de l'article 1110 du code civil. En effet, dans le contrat de franchise, qualification définitivement retenue par le tribunal, l'espérance de gain, que fonde l'intégration à un réseau censé avoir fait économiquement la preuve de sa capacité à dégager des bénéfices selon une méthode éprouvée et qui touche à la substance de l'engagement du franchisé qui espère par hypothèse itérer le succès commercial du franchiseur, est déterminante du consentement du premier (en ce sens, Com., 4 octobre 2011, n° 10-20956 ; Com., 12 juin 2012, n° 11-19.047).
Cependant, la rentabilité future d'une exploitation est affectée d'un aléa et le vice du consentement, même éclairé ou révélé par des éléments postérieurs, ne peut être caractérisé qu'au jour de la formation du contrat. Aussi, le défaut de rentabilité, qui ne traduit pas à lui seul une faille du modèle économique du franchiseur qui n'est pas tenu de garantir la réussite de son franchisé, doit s'entendre, non de l'insuffisance subjective des résultats, mais d'une impropriété objective des méthodes et savoir-faire objet du contrat de franchise à réaliser cette fin appréciée au jour de sa formation (le cas échéant sous l'éclairage d'éléments ultérieurs). L'erreur doit être excusable et de ce fait découler d'une inadéquation entre les éléments d'information fournis par le franchiseur, tels les prévisionnels ou les données sur lesquelles ils ont été conçus par le franchisé, et la réalité de l'exploitation non entravée par des fautes du franchisé (en ce sens, sur le second point : Com., 24 juin 2020, n° 18-15.249 : « L'erreur sur la rentabilité du concept d'une franchise ne peut conduire à la nullité du contrat pour vice du consentement du franchisé si elle ne procède pas de données établies et communiquées par le franchiseur »). Ainsi, si la loi ne lui impose pas de le faire, le franchiseur qui fournit spontanément au franchisé une étude de marché ou des comptes prévisionnels s'oblige à lui communiquer des données sincères et exactes (en ce sens, Com., 18 octobre 2023, n° 22-19.329).
Par courrier du 18 mai 2007, la SAS Mov'in adressait à madame [C] [L] le « document prévisionnel type » qu'elle avait élaboré pour toutes les ouvertures récentes en annonçant des résultats au démarrage en pratique supérieurs à ceux envisagés (pièces 7 et 14-2 des intimés). Ce faisant, elle admettait être l'auteur du tableau joint qui, peu important qu'il soit un document « type », était destiné à éclairer le candidat sur la rentabilité de son activité future et devait de ce seul fait comporter des données sérieuses. Elle lui communiquait d'ailleurs le 22 février 2008, sans reprendre ces précautions langagières, « un nouveau bilan prévisionnel adapté aux caractéristiques de [son] implantation », individualisation, également exprimée le 5 mai 2010, exclusive de la standardisation qu'oppose la SAS Fitness Park Development (pièces 14-3 et 14-6 des intimés). Elle a ainsi fourni dix prévisionnels entre 2006 et 2011 (pièce 14 des intimés). Il importe peu dans ces conditions que ces derniers aient pu être mis à jour sur « la base des données et hypothèses du franchisé » le 8 juin 2011 puisque les informations sur lesquelles s'appuient ces révisions avaient été préalablement déterminées et transmises par la SAS Mov'in (sa pièce 13.6).
Les prévisionnels établis par la SAS Fitness Park Development sont par nature déterminants du consentement des candidats en ce qu'ils éclairent la rentabilité de leur activité future qui est la condition même de leur engagement.
Pour établir l'inexactitude de ces prévisionnels, la SARL Escale Beauté produit un courrier du cabinet d'expertise comptable Effigest du 12 juin 2017 présentant les comptes analytiques propres à l'activité Lady Moving (sa pièce 40), méthodologie privant de pertinence les critiques de la SAS Fitness Park Development fondées sur les bilans et les comptes de résultats de la SARL Escale Beauté qui exerçait parallèlement une activité de SPA (pièce 72 de l'appelante). Outre le fait que l'auteur de cette lettre exerce une profession règlementée et engage sa responsabilité contractuelle et délictuelle à raison notamment des inexactitudes qu'il certifie, cadre juridique qui constitue un gage sérieux de la sincérité de ses assertions, la SAS Fitness Park Development ne critique pas les ventilations opérées pour individualiser l'activité Lady Moving. Or, tant pour les résultats nets, qui sont des indicateurs utiles puisque l'activité Lady Moving est isolée et qu'aucune faute de gestion n'est prouvée, que pour les chiffres d'affaires, les écarts entre ceux effectivement réalisés et ceux annoncés dans le prévisionnel de mai 2010, qui est représentatif de l'ensemble des prévisionnels fournis, dépassent 78 % en moyenne ainsi que l'a relevé le tribunal.
Les arguments opposés par la SAS Fitness Park Development, qui ne caractérise aucune faute de gestion imputable à la SARL Escale Beauté expliquant l'ampleur des discordances constatées, ne convainquent pas pour les raisons suivantes :
- le fait que plusieurs centres à l'enseigne Lady Moving aient pu être bénéficiaires sur la période concernée (sa pièce 64) ne dit rien de la sincérité et de l'exactitude des chiffres ayant fondé les prévisions de la SARL Escale Beauté et de la possibilité d'une exploitation rentable sur la zone concédée. Il est en outre sérieusement contrebalancé par le nombre important de sorties du réseau à raison de liquidations judiciaires qui laissait entrevoir, dès la formation des contrats, le risque majeur d'un échec commercial, la SAS Fitness Park Development ne contestant à ce titre pas que tous les centres à l'enseigne Lady Moving sont désormais fermés ;
- les charges liées aux différents contentieux initiés par la SARL Escale Beauté et son gérant peuvent expliquer, en partie au moins, les mauvais résultats mais pas le montant des chiffres d'affaires dégagés dont la faiblesse ne peut non plus découler seule de l'insuffisante visibilité que la SARL Escale Beauté reprochait au propriétaire du centre commercial. Et, les difficultés économiques évoquées par monsieur [N] [I] dans son courrier du 6 décembre 2011 portaient par hypothèse sur d'autres activités que celle propre au centre de remise en forme Lady Moving dont l'exploitation débutait, l'impact effectif et durable des premières sur la seconde n'étant d'ailleurs pas déterminé par la SAS Fitness Park Development ;
- le fait que la SARL IHM ait recherché, pour le compte du groupe Moving, des locaux à exploiter sous ses différentes enseignes n'implique ni une satisfaction à l'endroit de l'activité Lady Moving exercée par la SARL Escale Beauté ni une reconnaissance de la sincérité des prévisionnels transmis ;
- les éventuelles compétences professionnelles des candidats acquises dans des secteurs distincts de celui objet des contrats projetés n'étaient pas de nature à leur permettre de déceler les insuffisances de ces prévisionnels, cette vérification supposant une connaissance fine de l'état du réseau et du marché national et local du fitness féminin que les informations abstraites et lacunaires du DIP ne leur offraient pas.
Aussi, en fournissant des prévisionnels grossièrement inexacts et optimistes, la SAS Mov'in a trompé la SARL Escale Beauté dont le consentement était déjà vicié par les insuffisances du DIP qui occultaient le risque élevé d'échec du projet d'ouverture de son centre sous l'enseigne Lady Moving. Ces manquements combinés, dont le constat rend inutile l'examen des autres griefs opposés par les intimés, caractérisent une réticence dolosive et une erreur provoquée sur la rentabilité de l'opération projetée, soit une erreur sur la substance, et fonde la nullité des contrats de réservation et de licence de marque.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande et les contrats de réservation et de licence de marque seront annulés. Privée d'objet par le prononcé de la nullité des contrats, la demande subsidiaire au titre de la violation de l'exclusivité ne sera pas examinée et le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la SAS Fitness Park Development au paiement des sommes de 164 400 euros et 150 640 euros sur ce fondement.
b) Sur les conséquences des nullités
- Sur les restitutions réciproques
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development expose que les restitutions réclamées ne sont pas dues au motif que :
- le droit d'entrée a pour contrepartie l'exclusivité accordée au licencié et les formations initiales qui lui ont été dispensées, le contrat de réservation initial de 2006 n'ayant en outre pas été annulé ;
- les redevances ont été réglées en contrepartie notamment du droit d'exploitation de la marque, des signes distinctifs de l'enseigne de l'utilisation du savoir-faire et de l'assistance fournie ;
- les frais d'expertise comptable de 2006 engagés lors de l'acquisition du fonds de commerce sont sans lien avec la signature du contrat de 2011 ;
- les sommes perçues au titre du pack « Lady Moving » ont financé l'achat du matériel qui a été livré et dont le licencié a bénéficié, celui-ci constituant un actif amorti, non spécifique à l'enseigne, réalisable lors de la liquidation judiciaire. Elle ajoute que la SARL Escale Beauté ne démontre ni la réalité des frais publicitaires qu'elle allègue ni qu'ils aient été engagés à raison de l'exploitation du centre Lady Moving.
En réponse, les intimés expliquent que l'anéantissement rétroactif des contrats résultant de leur nullité commande la restitution des sommes de 12 500 euros au titre de la réservation du territoire, 21 000 euros au titre des redevances stipulées au contrat, 79 500 euros au titre du pack Lady Moving (Pack et frais de ports), 5 495 euros au titre des frais publicitaires et 500 euros au titre du logiciel du Pack.
Réponse de la cour
Par l'effet de l'anéantissement rétroactif des contrats découlant de leur nullité, les parties sont tenues à des restitutions réciproques qui ne relèvent pas de la répétition de l'indu mais seulement des règles de la nullité (en ce sens, 1ère Civ., 24 septembre 2002, n° 00-21.278). Les restitutions, qui doivent être intégrales pour replacer les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du contrat qui est censé n'avoir jamais existé, s'opèrent par principe en nature, quand elle est possible, et, à défaut, en valeur, et sont ordonnées sans égard pour la faute d'une partie (en ce sens, Com., 28 juin 2023, n° 22-15.676). Ainsi, la restitution d'une prestation de services ne peut avoir lieu qu'en valeur, celle-ci étant appréciée à la date à laquelle elle été fournie (solution désormais posée par l'article 1352-8 du code civil mais acquise dans le droit positif antérieur) sans égard pour les bénéfices effectivement retirés de l'exécution du contrat (en ce sens, 1ère Civ., 10 décembre 2014, n° 13-23.903).
Le contrat de réservation annulé stipule en son article 2 que la SARL Escale Beautés s'oblige à payer à la SAS Mov'in les sommes de :
- 12 500 euros au titre du droit d'entrée territorial exclusif. Conformément à son article 4, cette somme est automatiquement affectée au contrat de licence au titre du droit d'entrée et d'exclusivité territoriale en cas d'ouverture du centre dans le délai prescrit et ce montant est minoré de 5 000 euros en raison d'un paiement antérieur ;
- 4 euros le mètre carré par mois à compter de l'ouverture du centre à titre de redevance de licence de marque ;
- 79 500 euros au titre du « Pack Concept & Equipements ».
La SARL Escale Beauté ne conteste pas que la réduction de 5 000 euros du montant du droit d'entrée, dont elle a effectivement bénéficié et qu'elle ne prétend pas avoir remboursée à la société SPA Bien-Etre ainsi que le stipulait l'acte de cession de fonds de commerce du 10 juillet 2006 (sa pièce 2, page 4), est causée par le paiement réalisé en exécution du contrat du 12 février 2006 fixant le droit d'entrée à 5 000 euros en son article 2. Cet acte n'étant pas affecté par la nullité, le montant correspondant n'a pas à être restitué. Le contrat postérieur étant nul, la SARL Escale Beauté a droit à la restitution des sommes de 7 500 euros et 21 000 euros au titre du droit d'entrée et des redevances dont le paiement intégral n'est pas en débat.
Pour s'opposer au remboursement de ces sommes à raison d'une compensation intégrale des restitutions réciproques à leur endroit, la SAS Fitness Park Development excipe de la réalité des contreparties servies (exclusivité accordée et formations initiales dispensées au licencié d'une part, et droit d'exploitation de la marque et des signes distinctifs de l'enseigne, utilisation du savoir-faire et bénéfice de son assistance d'autre part). Elle ne fournit cependant aucun élément permettant d'apprécier la consistance précise et la valeur de ces prestations et de son savoir-faire ainsi que celle de ses signes distinctifs, tels son enseigne ou sa marque. A défaut de toute autre donnée, les stipulations non détaillées du contrat annulé étant à cet égard insuffisantes, l'utilité économique de la prestation est le seul élément pertinent pour les valoriser.
Or, ainsi que le démontre la SARL Escale Beauté, l'intégration dans le réseau Lady Moving ne lui a procuré aucun avantage économique, le chiffre d'affaires dégagé ne lui ayant pas permis de générer le moindre bénéfice sur la période d'exécution alors qu'aucune faute de gestion ne lui est imputable et que les charges attachées aux procédures judiciaires ou les difficultés économiques rencontrées en 2011 n'expliquent pas ses déficits systématiques. Cette analyse est confortée par le nombre de licenciés confrontés à des difficultés économiques majeures au jour de la conclusion des contrats et par la disparition actuelle du réseau Lady Moving. Aussi, en pareilles circonstances et au regard de la carence probatoire de la SAS Fitness Park Development, la valeur des contreparties servies sera réputée nulle. Il en est de même du coût d'initialisation de 500 euros du logiciel imposé par la SAS Mov'in dédié à l'exploitation sous enseigne Lady Moving (article 6.5 du contrat de licence).
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la SARL Escale Beauté au titre de la restitution du droit d'entrée et du montant des redevances versées ainsi que du coût du logiciel, et la SAS Fitness Park Development sera condamnée à lui payer la somme totale de 29 000 euros.
En revanche, la SARL Escale Beauté ne conteste pas la livraison des différents éléments matériels constituant le pack Lady Moving. Ces actifs ne sont plus restituables en nature, cette dernière en ayant disposé dans des conditions indéterminées, les termes du jugement de liquidation ne permettant pas de savoir s'ils ont été appréhendés et réalisés dans son cadre (pièce 62 de l'appelante). La facture annexée au contrat de réservation révèle que cet ensemble était constitué de biens qui n'étaient pas spécifiques à une exploitation sous enseigne Lady Moving et pouvaient, dépouillés des signes distinctifs de l'enseigne, être réutilisés par la SARL Escale Beauté ou par un tiers cessionnaire à l'occasion de l'exercice d'une activité de même nature. Or, celle-ci ne précise ni le sort de ce matériel ni le prix qu'elle en a le cas échéant rétiré au sens de l'article 1352-2 alinéa 1 du code civil consacrant le droit positif antérieur. Et, l'article 1352 du code civil prévoyant que la valeur de la chose non restituable en nature s'apprécie au jour de la restitution étant inapplicable au litige, cette évaluation doit être faite au jour de l'acte annulé conformément au droit positif antérieur (en ce sens, Com., 14 juin 2005, n° 03-12.339). A cet égard, le seul élément en débat utile est la facture déterminant objectivement et dans le détail la valeur des matériels compris dans le pack. De ce fait, la valeur du matériel que la SARL Escale Beauté est tenue de restituer à raison de l'annulation du contrat de réservation sera réputée égale à celle payée lors de sa conclusion. La compensation étant intégrale entre les valeurs à restituer, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la SARL Escale Beauté à ce titre.
Enfin, la SARL Escale Beauté n'explicite pas le poste « frais publicitaires » dont elle poursuit la restitution à hauteur de 5 495 euros et ne précise pas à quelle stipulation il se rattache ni en quoi il se distingue des frais de même nature objet d'une demande d'indemnisation complémentaire. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande à ce titre.
- Sur les demandes indemnitaires
Moyens des parties
La SAS Fitness Park Development conteste tout préjudice matériel au motif que la SARL Escale Beauté ne peut souligner le caractère irréaliste des prévisionnels tout en les mobilisant pour calculer son préjudice qui a de surcroît la nature d'une perte de chance, le résultat attendu, par hypothèse incertain, dépendant de la conjoncture économique et des choix de gestion de l'exploitant. Elle ajoute que la SARL Escale Beauté ne peut solliciter la nullité du contrat et réclamer l'allocation de dommages et intérêts correspondant à la non-obtention des résultats commerciaux qu'elle espérait retirer de son exécution. Elle estime que la perte de chance alléguée n'est pas caractérisée à raison de l'antériorité des difficultés économiques de la SARL Escale Beauté et que les dépenses de communication dont elle sollicite le remboursement ne sont pas en lien avec les fautes qu'elle lui impute, lien de causalité qui fait également défaut au titre des demandes relatives à la liquidation judiciaire et à celui des engagements de caution de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L], qui poursuivent la réparation d'un préjudice hypothétique, ainsi qu'à l'endroit des demandes de la SARL IHM. Elle expose qu'elle n'a à financer ni le choix de l'aménagement d'un club mixte auquel elle est étrangère ni les travaux de démolition et de réfection dont la réalité n'est pas prouvée.
En réponse, les intimées expliquent que la SARL Escale Beauté a subi un préjudice économique résidant en un gain manqué consistant en l'écart entre les résultats annoncés par la SAS Mov'in et ceux effectivement réalisés (973 976 euros) ainsi qu'en une perte de chance de réaliser un résultat net de 112 715 euros sur l'année 2017. Subsidiairement, la SARL Escale Beauté soutient que son préjudice matériel consiste en la perte de chance de ne pas contracter et d'éviter des pertes en appliquant un taux de perte de chance de 5 % au montant total de ses pertes d'exploitation. Les intimés ajoutent que les fautes délictuelles de la SAS Mov'in ont en outre :
- directement causé les frais de fermeture de la salle de fitness exploitée par la SARL Escale Beauté (5 297 euros) ainsi que l'ouverture de la procédure collective qui a abouti à sa liquidation (30 809,15 euros) et à la perte du bénéfice de ses immobilisations réalisées par le liquidateur (343 310 euros) ;
- rendu inutiles les efforts publicitaires de la SARL Escale Beauté (57 723,37 euros), ses dépenses de matériel hors Pack Lady Moving (31 854,97 euros) et ses frais d'expertise-comptable et d'huissier de justice (1 190 euros) ;
- fondé l'assignation de monsieur [N] [I] et de madame [C] [L] par la banque au titre de leur engagement de caution solidaire le 16 mars 2021, action qui justifie la garantie de la SAS Fitness Park Development de toute condamnation au remboursement anticipé du prêt souscrit pour permettre l'exploitation du centre Lady Moving ;
- causé à la SARL IHM, qui a vainement investi dans la SARL Escale Beauté, un préjudice calculé en appliquant au montant total de ses apports « le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées depuis [ses] premiers apports ['] en compte courant depuis la constatation de pertes » (165 350,47 euros).
Réponse de la cour
Conformément à l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au jour du dol, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
La victime de man'uvres dolosives peut exercer, outre une action en annulation du contrat, une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du dommage qu'elle a subi (en ce sens, de manière constante, Com. 15 janv. 2002, n° 99-18.774, déjà cité), le rejet de la première n'impliquant pas nécessairement celui de la seconde (en ce sens, 1ère Civ., 14 janvier 2021, n° 19-24.881). La victime a droit à réparation intégrale des préjudices directement causés par la faute et dont elle souffre personnellement, l'indemnisation accordée l'étant sans perte ni profit, à la mesure du préjudice prouvé en son principe et sa mesure. Le juge, tenu de réparer intégralement tout préjudice dont il constate le principe (en ce sens, Com., 10 janvier 2018, n° 16-21.500, et 2ème Civ., 28 mars 2013, n° 12-14.655), apprécie souverainement, au jour de sa décision, son montant dont il justifie l'existence par la seule évaluation qu'il en fait sans être tenu d'en préciser les divers éléments (en ce sens, Ass. plén., 26 mars 1999, n° 95-20.640).
Sur le gain manqué et la perte de chance de réaliser un gain
La demande au titre de la chance de réaliser un gain n'est que le prolongement pour l'année 2017 non abordée par les prévisionnels fournis par la SAS Mov'in de celle portant sur le préjudice matériel résidant en la différence entre les résultats nets annoncés et ceux effectivement réalisés. Par ces prétentions, la SARL Escale Beauté sollicite une indemnisation équivalente aux gains que l'exécution du contrat lui aurait procurés. Cette prétention, empreinte de contradiction puisqu'elle repose sur l'hypothèse de l'exécution optimale d'un contrat nul, est infondée : en cas d'annulation du contrat pour dol, seuls peuvent être indemnisés les préjudices résultant de la conclusion du contrat, dont la perte de chance de ne pas contracter et d'éviter ainsi de subir des pertes, ou de contracter à des conditions plus avantageuses, le défaut de perception des gains attendus, comme la perte de chance de les obtenir, n'étant pas réparable (en ce sens, Com., 18 oct. 2011, n° 10-23.524, et Com., 28 juin 2023, n° 22-15.671).
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes de la SARL Escale Beauté.
Sur la perte de chance de ne pas contracter
La perte de chance s'entend de la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable et suppose établie la preuve du sérieux de la chance perdue. Son indemnisation, qui implique un calcul de probabilité de la survenance de l'évènement irrémédiablement impossible, ne peut être égale au montant de la chance réalisée.
Il est établi que, durant l'exécution du contrat, la SARL Escale Beauté a subi des pertes (sa pièce 40 déjà examinée), ses résultats nets étant négatifs sur toute la période avec un total global de 418 847 euros, réduite sans explication à 418 642 en page 63 de ses écritures.
La SARL Escale Beauté, pour établir le dol dont elle a été victime, s'appuie notamment sur le rapport [W] produit par la SAS Fitness Park Development qui souligne une contraction du marché dès 2010 et la faveur des français pour les prestations low-cost au détriment des concepts payants classiques, tels Lady Moving. Elle relève également que l'opérateur de référence en matière de fitness féminin, Curves, a décliné dès 2005 avec une accélération en 2010, et que l'enseigne Ladyfitness, autre inspirateur de la SAS Mov'in pour sa licence Lady Moving implanté en France en 2004 (« La société MOV'IN n'a fait que se placer sur ce créneau en copiant purement et simplement le concept de ces deux enseignes »), a subi des revers précoces, à l'instar du concurrent O'Sport en faillite en 2007 (pages 22 et 54 et suivantes de ses écritures). Le marché était ainsi peu favorable au développement d'une activité de fitness féminin.
Or, la SARL Escale Beauté nourrissait le projet de développer une telle activité, complémentaire de celle exploitée par madame [C] [L] dans les mêmes locaux, dès 2006 ainsi que le révèle l'acquisition du fonds de commerce de la société SPA Bien-Etre, très antérieure à la conclusion des conventions viciées par le dol. Aussi, il est certain qu'elle aurait exercé une activité de même nature que celle objet de ces dernières indépendamment de ses relations avec la SAS Mov'in. Et, elle ne précise quelles modifications elle aurait apportées à son exploitation pour éviter les écueils qu'elle a rencontrés durant l'exécution du contrat dit de licence.
En pareilles circonstances, la chance perdue de ne pas contracter et d'éviter ainsi des pertes est très faible. Le taux de perte de chance sera fixé à 20 %, sans toutefois être minoré à raison des difficultés économiques évoquées dans le courrier de monsieur [N] [I] du 6 décembre 2011 qui ne sont pas rattachables à l'activité de fitness (pièce 65 de l'appelante). Appliqué au montant total des pertes, le préjudice indemnisable de la SARL Escale Beauté atteint 83 728,40 euros.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande indemnitaire et la SAS Fitness Park Development sera condamnée à payer à la SARL Escale Beauté la somme de 83 728,40 euros en réparation du préjudice de perte de chance de ne pas contracter.
Sur les frais
La SARL Escale Beauté ne produit aucun justificatif établissant le coût des « frais liés à la fermeture de la salle », et ne vise d'ailleurs à ce titre, au sens de l'article 954 alinéa 1 du code de procédure civile dans sa version applicable au jour de la déclaration d'appel, aucune pièce. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Par ailleurs, alors qu'elle ne conteste pas qu'elle exerçait deux activités distinctes dans ses locaux, la SARL Escale Beauté ne prouve pas que les difficultés insurmontables qui ont conduit à sa liquidation judiciaire sont causées par les fautes précontractuelles de la SAS Mov'in. Et, son redressement judiciaire, qui suivait une procédure de sauvegarde en 2014, date à laquelle aucun état de cessation des paiements n'était par hypothèse constaté conformément à l'article L 620-1 du code de commerce, a été prononcé le 29 mars 2019, bien après l'assignation devant le tribunal de commerce en juin 2014 et la fermeture de la salle de fitness en mars 2017. Aussi, faute de preuve d'un lien de causalité entre les fautes de la SAS Mov'in et le redressement puis la liquidation judiciaire de la SARL Escale Beauté, le jugement du tribunal sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande indemnitaire.
En outre, il est acquis que la SARL Escale Beauté aurait exercé une activité de fitness féminin indépendamment de ses relations avec la SAS Mov'in. Dans ce cadre, elle aurait nécessairement :
- procédé à un agrandissement de ses locaux. Et, l'acquisition du fonds de commerce, à l'occasion de laquelle a été souscrit le prêt du 4 août 2006, dont la SARL IHM, madame [C] [L] et monsieur [N] [I] se sont portés cautions solidaires (leur pièce 70), a été réalisée avant les premiers contacts démontrés avec la SAS Mov'in et quoi qu'il en soit très antérieurement à la réticence dolosive qui lui est imputable, le contrat de réservation du 16 février 2006 et ses avenants de prolongation étant valables ;
- réalisé des travaux d'aménagement de son bien pour l'adapter à l'exploitation projetée. Or, elle ne prétend pas qu'elle aurait été en mesure de financer ces derniers sans recours à un emprunt, objet des mêmes garanties (sa pièce 69), et n'explique pas en quoi son montant aurait pu être différent en l'absence de relations avec la SAS Mov'in. Enfin, il n'est pas prouvé, au regard de la double activité de la SARL Escale Beauté, que les difficultés de remboursement des deux prêts trouvent leur cause dans les mauvais résultats de la seule activité de fitness féminin ;
- eu recours aux services d'un expert-comptable pour établir des prévisionnels dont la charge lui incombait ;
- engagé des dépenses publicitaires, notamment pour pallier l'insuffisante visibilité qu'elle imputait au gestionnaire du centre commercial (pièce 73 de l'appelante). La cour constate de surcroît que cette demande est motivée par « l'installation de franchisés de la même enseigne ou d'enseignes appartenant également à MOV'IN dans sa zone de chalandise » (page 65 de ses écritures), faute contractuelle insusceptible d'être invoquée puisque le contrat support de l'obligation violée a été annulé ;
- acquis du matériel, dont il n'est pas établi qu'il remplaçait ou complétait celui fourni par la SAS Mov'in à raison de son obsolescence ou de sa mauvaise qualité qui ne sont pas prouvées, et développé des « cours coachés »
Par ailleurs, non seulement les frais d'établissement de procès-verbaux destinés à établir la preuve de la violation par la SAS Mov'in de la zone d'exclusivité relèvent par nature des frais irrépétibles et doivent être intégrés dans la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, mais ces éléments sont inutiles à la solution du litige, le prononcé de la nullité des contrats excluant l'examen de leurs conditions d'exécution. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Enfin, outre le fait que la SARL IHM aurait réalisé des apports pour accompagner la SARL Escale Beauté dans la réalisation de son projet et que leur perte, à la supposer réelle, n'est pas rattachable au seul échec de l'activité Lady Moving, cette dernière exerçant parallèlement une activité complémentaire mais distincte de SPA, elle n'en prouve pas la réalité et le montant, les documents produits à ce titre, établis par elle-même pour son compte, n'étant ni certifiés ni étayés (ses pièces 65 et 85). Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Sur le préjudice moral
La demande de monsieur [N] [I] et madame [C] [L] au titre de leur préjudice n'est pas motivée. Aussi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a rejetée.
4°) Sur la procédure abusive
En vertu des dispositions des articles 1240 et 1241 (anciennement 1382 et 1383) du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
Au sens de ces textes, l'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur équipollente au dol.
Cette demande n'est pas motivée. L'abus ne pouvant découler de la seule succombance de l'appelante, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de madame [C] [L] et de monsieur [N] [I], dont les prétentions au fond sont de surcroît rejetées.
5°) Sur les frais irrépétibles et les dépens
En vertu de l'article 639 du code de procédure civile, la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond, y compris sur ceux afférents à la décision cassée.
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Succombant, la SAS Fitness Park Development, dont la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée, sera condamnée à payer la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Si monsieur [N] [I], madame [C] [L] et la SARL IHM succombent en leurs prétentions, constat qui commande le rejet de leurs prétentions fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, l'équité commande de rejeter la demande de la SAS Fitness Park Development formée au titre des frais irrépétibles à leur endroit.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
Constate la perfection du désistement de la SAS Fitness Park Development de sa demande indemnitaire reconventionnelle au titre du dénigrement ;
Confirme, dans les limites de sa saisine sur renvoi après cassation, le jugement entrepris ses dispositions, sauf en ce qu'il a
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de nullité des contrats des 30 septembre 2010 et 29 octobre 2011 ;
- débouté la SARL Escale Beauté de ses demandes de restitution des sommes versées au titre de la réservation du territoire, des redevances contractuelles et de la fourniture du logiciel d'origine ;
- constaté la violation de l'exclusivité territoriale stipulée dans le contrat de réservation du 30 septembre 2010 et le contrat de licence du 29 octobre 2011 et déclaré la SAS Mov'in seule responsable de cette violation ;
- condamné la SAS Mov'in à verser à la SARL Escale Beauté la somme de 164 400 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamné la SAS Mov'in à payer à la SARL Escale Beauté la somme de 150 640 euros au titre du remboursement des frais de dépose des éléments du concept Lady Moving ;
- rejeté la demande indemnitaire de la SARL Escale Beauté au titre de la perte de chance de ne pas contracter et d'éviter des pertes ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Prononce la nullité du contrat de réservation de zone du 30 septembre 2010 et du contrat qualifié par les parties de licence de marque du 26 octobre 2011 pour réticence dolosive et erreur provoquée sur la substance ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à restituer à la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 29 000 euros au titre de la restitution du droit d'entrée et du montant des redevances versées ainsi que du coût du logiciel ;
Rejette la demande de restitutions réciproques de la SAS Fitness Park Development à ce titre ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à payer à la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 83 728,40 euros en réparation du préjudice de perte de chance de ne pas contracter et d'éviter des pertes ;
Constate que la demande indemnitaire présentée au titre de la violation de l'exclusivité est subsidiaire et est privée par d'objet par le succès de la demande principale en nullité ;
Y ajoutant,
Rejette la demande de la SAS Fitness Park Development, de la SARL IHM, de madame [C] [L] et de monsieur [N] [I] au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à supporter les entiers dépens d'appel qui seront recouvrés directement par Maître Nathalie Lesenechal conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS Fitness Park Development à payer à la SARL Escale Beauté prise en la personne de son liquidateur judiciaire la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT