CA Montpellier, 2e ch. soc., 26 novembre 2025, n° 22/06405
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 26 NOVEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
F N° RG 22/06405 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PU2W
Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 NOVEMBRE 2022
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 20/00941
APPELANT :
Monsieur [X] [W]
né le 05 Avril 1980 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté sur l'audience par Me Cécile CAILLON, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.A.R.L. MAX BOUSCAREN ET CIE
Prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social, sis
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
Assistée sur l'audience Me Marion POURQUIER, substituant Me Nathalie MONSARRAT LACOURT de la SCP SVA, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Ordonnance de clôture du 01 Septembre 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Magali VENET, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre
Madame Magali VENET, Conseillère
Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
La société Max Bouscaren et Cie qui exploite le camping « [5]» situé à [Localité 7] a engagé Monsieur [X] [W] selon contrats à durée déterminée saisonniers en qualité de gardien :
- du 6 août au 20 août 2000 (14 jours).
- du 1er juillet 2001 au 31 août 2001 (2 mois).
- du 18 mai 2002 au 31 août 2002 (3mois).
- du 4 mars 2003 au 13 septembre 2003 (6 mois).
- du 12 avril 2008 au 13 septembre 2008 (5 mois).
Par la suite, Monsieur [W] a été engagé selon contrats à durée déterminée saisonniers en qualité d'aide cuisine coefficient 105, au sein du snack du camping:
- du 16 avril 2009 au 12 septembre 2009 (4 mois 26 jours).
- du 10 avril 2010 au 11 septembre 2010 (5 mois).
- du 1er avril 2011 au 16 septembre 2011 (5 mois 15 jours).
- du 2 avril 2012 au 15 septembre 2012 (5 mois 13 jours).
- du 15 avril 2013 au 15 septembre 2013 (5 mois).
- du 23 mai 2015 au 30 septembre 2015 (5 mois 7 jours).
- du 1er avril 2016 au 30 septembre 2016 (6 mois).
- du 3 avril 2017 au 30 septembre 2017 (6 mois).
Puis en qualité de second de cuisine coefficient 105
- du 3 avril 2018 au 30 septembre 2018 (6 mois).
Dans le cadre d'une formation Camping Caravaning organisée par pôle emploi, afin d'acquérir une première qualification professionnelle d'agent polyvalent de maintenance, M. [W] a effectué un stage un stage du 17 décembre 2018 au 3 mars 2019, au sein du service technique du Camping « [5] ».
A l'issue de sa formation, Monsieur [W] a été engagé par la société suivant contrat de travail à durée déterminée saisonnier en qualité d'Agent polyvalent de maintenance en hôtellerie de plein air, au coefficient 105 de la convention collective de l'hôtellerie de plein air qui s'applique au contrat.
A compter du 23 juillet 2019, Monsieur [W] a été placé en arrêt de travail pour maladie ordinaire, et ce jusqu'au terme de son contrat de travail en date du 31 octobre 2019.
Le 27 octobre 2020, Monsieur [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier des demandes suivantes :
- Ordonner la requalification de tous les contrats à durée déterminée saisonnier en contrat à durée indéterminée depuis le 1er mars 1998,
- Dire et juger que la rupture du contrat de travail en date du 31 octobre 2019 doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence, condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à lui payer les sommes de :
- 2.237,63 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la visite médicale d'embauche,
- 2.855,85 € à titre de rappel de salaire sur les saisons 2018 et 2019 outre la somme de 285,58 € à titre de congés payés,
- 33.564,45 € à titre de rappel de salaire dus pendant les périodes interstitielles, outre la somme de 3.356,44 € au titre des de congés payés afférents,
- 6.712,89 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 671,28 € de congés payés afférents,
- 12.306,95 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2.237,63 € à titre d'indemnité de requalification,
- 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 13.425,78 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
Par jugement en date du 23 novembre 2022, le Conseil de Prud'hommes de Montpellier a statué ainsi :
' Dit et juge que les prescriptions de droit s'appliquent sur les demandes de M. [W],
Dit et juge que tous les contrats saisonniers de M. [W] respectent les dispositions prévues aux articles L. 1242-2 et L. 1244-1 du code du travail,
Dit et juge que le contrat de travail à durée déterminée du 31 octobre 2019 est conforme.
Déboute M. [X] [W] de l'intégralité de ses demandes , tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, qu'en toutes hypothèses.
Déboute les parties de leur demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Met les dépens de l'instance à la charge de M. [W]'.
Monsieur [W] interjetait appel de ce jugement le 20 décembre 2022.
Dans ses dernières conclusions en date du 10 mars 2023 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M.[W] demande à la cour de :
A titre principal :
Constater que le salaire moyen de Monsieur [X] [W] sur les trois derniers mois complets est de 2.237,63 €.
Juger non prescrites les demandes de Monsieur [W].
Ordonner la requalification de tous les contrats de travail saisonniers de Monsieur [X] [W] en contrat de travail à durée indéterminée depuis le 06 août 2000.
Juger que la rupture du contrat de travail en date du 31 octobre 2019 doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence,
Condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à payer à Monsieur [X] [W] les sommes de :
- 2.237,63 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la visite médicale d'embauche.
- 2.855,85 € à titre de rappel de salaire sur les saisons 2018 et 2019 outre la somme de 285,58€ au titre des congés payés y afférents.
- 33.564,45 € au titre des salaires dus pendant les périodes interstitielles outre la somme de 3.356,44 € au titre des congés payés y afférents.
- 6.712,89 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 671,28 € à titre de congés payés sur préavis.
- 12.306,95 € au titre de l'indemnité légale de licenciement.
- 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- 2.237,63 € à titre d'indemnité de requalification.
- 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.
- 13.425,78 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
A Titre Subsidiaire :
Constater que le salaire moyen de Monsieur [X] [W] sur les trois derniers mois complets est de 2.237,63 €.
Juger non prescrites les demandes de Monsieur [W].
Constater Que la Sarl Max Bouscaren et Cie n'a pas informé Monsieur [X] [W] de son droit au renouvellement de son contrat de travail.
En conséquence,
Condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à payer à Monsieur [X] [W] les sommes de :
- 2.237,63 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la visite médicale d'embauche.
- 2.855,85 € à titre de rappel de salaire sur les saisons 2018 et 2019 outre la somme de 285,58 € au titre des congés payés y afférents.
- 33.564,45 € au titre des salaires dus pendant les périodes interstitielles outre la somme de 3.356,44 € au titre des congés payés afférents.
- 50.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à l'absence de renouvellement de son contrat de travail.
- 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.
- 13.425,78 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
En toutes hypothèses :
Ordonner à la Sarl Max Bouscaren et Cie de délivrer à Monsieur [X] [W] l'ensemble de ses documents de fin de contrats rectifiés.
Condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à payer à Monsieur [X] [W] la somme 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Dans ses dernières conclusions en date du 12 juin 2023 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la société Max Bouscaren et Cie demande à la cour de :
A titre principal,
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Montpellier en date du 23 novembre 2022.
Subsidiairement,
Débouter M. [X] [W] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche à défaut de préjudice subi et établi, ou à tout le moins en limiter le montant.
Dire et juger que M. [X] [W] ne justifie pas s'être tenu à la disposition de l'employeur durant les périodes intercontrat. En conséquence, débouter M. [X] [W] de sa demande de rappel de salaire y afférent.
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 4 284 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis.
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 3 123,75 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 3 213 euros correspondant à 1,5 mois de salaire, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 2123 euros au titre de l'indemnité de requalification.
Débouter M. [X] [W] de sa demande subsidiaire de dommages et intérêts pour non renouvellement du contrat de travail saisonnier à défaut de préjudice établi, ou à tout le moins en limiter le montant.
En tout état de cause,
Fixer le salaire moyen mensuel de Monsieur [X] [W] à 2142 euros bruts.
Fixer l'ancienneté de M. [X] [W] à 5 ans et 10 mois.
Débouter M. [X] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Débouter M. [X] [W] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
Condamner Monsieur [X] [W] à verser à la société Max Bouscaren et Cie la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'ordonnance de clôture est en date du 1er septembre 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur les dommages intérêts au titre de l'absence de visite médicale d'embauche:
En application de l'article R. 4624-10 du code du travail : ' tout travailleur bénéficie d'une visite d'information et de prévention réalisée par l'un des professionnels de santé mentionné au premier alinéa de l'article L.4624-1, dans un délai qui n'excède pas trois mois à compter de la prise effective du poste de travail.'
L'article R 122-2 du code du travail dispose que 'Au moyen de la visite préalable à l'embauche, l'employeur accompli les déclarations et demandes suivantes [...]
5°'la demande de visite d'information et de prévention prévue au deuxième alinéa de l'article L.4624-1 du présent code ou la demande d'examen médical d'aptitude à l'embauche prévu à l'article L.4624-2 du présent code.'
M. [W] sollicite le versement de dommages et intérêts d'un montant de 2237,63 euros au titre de l'absence de visite médicale d'embauche afférente à son contrat à durée déterminée du 4 mars 2019. Il allègue avoir subi un préjudice au motif que son état de santé était fragilisé puisqu'il a été placé en arrêt maladie à compter 23 juillet 2019.
L'employeur fait valoir qu'il a satisfait à son obligation de demande de visite d'information et de prévention lors de sa déclaration préalable à l'embauche du 28 février 2019. Il ajoute que M. [W] ne justifie pas d'un préjudice consécutif à l'absence de visite dès lors que le motif de son arrêt de travail du 23 juillet 2019 n'est pas connu et que le salarié n'a jamais évoqué de lien entre son arrêt de travail et son emploi.
Si la déclaration préalable à l'embauche vaut demande de visite d'information et de prévention, il appartient cependant à l'employeur de s'assurer de la réalisation de cette visite.
La visite d'information et de prévention a notamment pour but, selon l'article R.4624-11 du code du travail d'interroger le salarié sur son état de santé et d'identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail.
En l'espèce, M. [W] qui a été placé en arrêt de travail pour maladie quelques mois après son embauche et jusqu'à l'issue de son contrat à durée déterminée en date du 31 octobre 2019, justifie d'un préjudice lié à l'absence de visite de prévention et d'information dès lors qu'une telle visite a notamment pour finalité d'identifier l'existence d'une fragilité de son état de santé nécessitant une orientation auprès du médecin du travail, sachant qu'il a été placé en arrêt maladie quelques mois après son embauche, et ce, peu important les motifs de son arrêt de travail du 23 juillet 2019.
Il convient en conséquence d'indemniser le préjudice subi en lui allouant la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts, le jugement sera réformé en ce sens.
Sur le travail dissimulé :
En application des articles L.8221-3 et L.8221-5 du code du travail, le fait pour l'employeur de se soustraire intentionnellement aux déclarations qui doivent être effectuées aux organismes de sécurité sociale ou à l'administration fiscale, est réputé travail dissimulé, ainsi que le fait de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement des formalités de délivrance d'un bulletin de paie ou de déclaration préalable à l'embauche. De même est réputé travail dissimulé le fait de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
L'article L.8223-1 prévoit en cas de rupture du contrat de travail, l'octroi au salarié en cas de travail dissimulé, d'une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
En l'espèce, M. [W] allègue d'un travail dissimulé au motif que le stage qu'il a effectué selon convention de stage pôle emploi sur la période du 17 décembre 2018 au 3 mars 2019, et au titre duquel il était indemnisé par pôle emploi, n'avait aucun intérêt pour lui en terme de formation qualifiante puisqu'il faisait partie du personnel du camping depuis près de 20 ans, et qu'il a en réalité contribué pendant cette période, comme d'autres salariés, à la maintenance du camping, sans contrat de travail et sans être rémunéré par l'employeur.
La société fait valoir, que M. [W] est à l'initiative de cette formation pendant laquelle il a perçu des indemnités pôle emploi, puisqu'il souhaitait obtenir, par cette formation qualifiante, les compétences nécessaires pour évoluer au poste d'agent polyvalent, et qu'il a lui-même déposé son dossier d'inscription et signé la convention tripartite avec pôle emploi et la société le 5 décembre 2018.
L'employeur précise que le salarié a effectué sa formation au sein du service technique du camping [5], auprès de M. [R], responsable entretien camping, et M. [U], responsable entretien mobil Home chalet, lesquels témoignent dans une attestation rédigée conformément aux mentions de l'article 202 du code de procédure civile que M. [W] ainsi que trois autres collègues semblaient être satisfaits de la formation qu'ils ont suivie.
Il rappelle en outre que dans le cadre de ces CDD M. [W] n'a jamais exercé des fonctions d'agent polyvalent.
Il ressort du courrier adressé par pôle emploi à M. [W] le 17 décembre 2018 avec pour objet 'notification d'inscription à un stage' que ce dernier a déposé un dossier d'inscription en vue de suivre une formation de Camping Caravaning validée dans le cadre de son projet professionnel.
La fiche de prescription de formation adressée par pôle emploi à M. [X] [W] mentionne en ces termes :
'Formation envisagée : ' Camping Caravaning'
Objectif de la formation : 'Adaptation poste de travail AFPR'
Modalité de validation du projet par le prescripteur :
'Acquérir une première qualification professionnelle, une première expérience professionnelle dans ce secteur de métier'
Argumentation : 'formation AFPR sur le métier d'agent polyvalent technique en hôtellerie de plein afin de travailler de façon pérenne au sein du camping [5].'
[...]
Organisme de formation préconisé : Camping [5][...]
Session de formation proposée :
- Agent polyvalent maintenance
- date début de la formation : 17 décembre 2018
- date de fin de formation : 03 mars 2019
[...]
- Mesure entreprise : Action de Formation Préalable au recrutement.'
Il est établi que M. [W] a suivi dans le cadre d'une formation de 'Camping Caravaning' une session de formation d'agent polyvalent de maintenance au sein du camping [5] pour la période du 17 décembre 2018 au 3 mars 2019.
Le salarié ne conteste pas, au vu de la description des missions qu'il indique avoir réalisées lors de ce stage (tailler, couper, ramasser des déchets verts, couper du béton, participer à l'entretien et à la maintenance du camping) avoir effectué pendant cette période une activité correspondant à l'intitulé de sa formation et à celle du planning produit par l'employeur y afférent.
Il ressort en outre des contrats saisonniers produits que M. [W], n'a été engagé par la société en qualité d'agent polyvalent qu'à l'issue de la formation qualifiante concernant cette activité, soit à partir du 4 mars 2019.
Par ailleurs, ses contrats saisonniers n'établissent pas qu'il était logé à l'année sur le site du camping, mais uniquement qu'il a bénéficié de cet avantage logement pendant les périodes estivales correspondant à ses contrats au titre des années 2017, 2018, 2019, de sorte qu'il produit aucun élément probant de nature a établir qu'il exerçait, en contrepartie d'un logement, des missions d'agent polyvalent sur le site du camping hors les périodes pendant lesquelles il travaillait dans le cade de contrats saisonniers.
Il ne résulte pas de ces éléments que la société l'a intentionnellement fait travailler durant cette période, sous couvert d'une prétendue formation qualifiante, sans le rémunérer, de sorte que la demande formée au titre du travail dissimulé sera rejetée.
Sur la classification professionnelle :
Il appartient à l'employeur de déterminer la position du salarié dans la classification professionnelle prévue par la convention collective qui lui est applicable.
S'il s'estime sous classé, le salarié conserve la faculté d'exercer une action contre son employeur pour être placé au niveau auquel son poste correspond.
Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.
Lorsqu'il est saisi d'une contestation sur la catégorie professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, le juge ne peut se fonder sur les seules définitions de poste résultant du contrat de travail ou de la convention collective ; il doit rechercher la nature de l'emploi effectivement occupé par le salarié et se prononcer au vu des fonctions réellement exercées.
Selon l'article 4 de la Convention collective nationale de l'Hôtellerie de plein air du 2 juin 1993, les emplois sont divisés en quatre catégories et chaque emploi comprend une dénomination, une définition de fonctions et une évaluation en terme de coefficients.
Les coefficients indiqués constituent une base ou la fourchette minimale au moment de l'embauche en fonction notamment de l'expérience professionnelle acquise, de la formation initiale ou complémentaire suivie par le salarié.
la grille de classification des emplois est la suivante :
Première catégorie, coefficients hiérarchiques :
- Personnel d'accueil sans tâche administrative : 100 à 105.
- Hommes et femmes toutes mains : personnel affecté, selon la saison, aussi bien à l'entretien des sanitaires qu'à toute tâche d'entretien général de l'établissement : 105 à 115.
- Surveillant de jour : chargé de faire appliquer le règlement intérieur et les notes de service de l'établissement ; ou/et de nuit : applique les consignes de nuit spécifiques de l'établissement, veille à la fermeture des portes et fait des rondes de sécurité : 105 à 115.
Deuxième catégorie[...]
Troisième catégorie :
- Employé(e) administratif(ve) : possède une formation d'employé(e) spécialisé(e) connaît l'organisation de l'établissement ; tient la caisse ; effectue les travaux de transcription et classement ; assure le suivi de la correspondance ; travaille selon les directives du responsable ; effectue les réservations : 120 à 150.
- Personnel d'accueil minimum trilingue : accueil des touristes ; parle et écrit couramment deux langues étrangères (précisées par contrat) ; attribue les emplacements sur le terrain ; remplit les formalités administratives, renseigne les touristes, assure le règlement des séjours, pratique la dactylographie et l'informatique, effectue les réservations :
135 à 170
- Animation : connaît et applique les techniques d'animation en groupe, a une expérience des activités culturelles, sportives, distrayantes, ainsi que la découverte de la région ; a la responsabilité du matériel et de son petit entretien courant 130 à 170.
- Employé(e) qualifié(e) affecté(e) à l'activité bar-restauration et commerces annexes : assure les divers services ; est responsable des mouvements de caisse et de sa comptabilité ; assure l'approvisionnement ; est responsable des stocks (entrées et sorties) : 120 à 150.
- Cuisinier : possède le CAP ou expérience équivalente ; participe à l'ensemble des tâches relatives à la préparation des repas ; peut travailler seul dans un petit établissement 130 à 150.
En l'espèce, M. [W] qui était classé au coefficient 105 sollicite son repositionnement au coefficient 150 correspondant à la fonction suivante : ' cuisinier possède le CAP ou expérience équivalente ; participe à l'ensemble des tâches relatives à la préparation des repas ; peut travailler seul dans un petit établissement coefficient 130 à 150".
Il fait valoir qu'il a été affecté depuis 2011 en cuisine aux tâches relatives à la préparation des repas, et qu'il exerçait les missions suivantes : garnitures et préparations, cuisson des viandes et des poissons, préparation des frigos, gestion des stocks des frigos et de la chambre froide, étiquetage, préparation des plats (encornets, moules...), préparation des pâtes et cuisson des pizzas en l'absence du pizzaïolo.
Il mentionne qu'aucune prescription ne peut lui être opposée quant aux faits qu'il invoque et produit ses bulletins de paie selon lesquels il a occupé le poste de pizzaïolo en août et septembre 2016 puis de second de cuisine à compter de mai 2017.
Il précise que le poste de commis de cuisine est le premier palier en cuisine, que ses tâches consistent à rassembler les ingrédients nécessaires à la préparation des plats, préparer à l'avance tout ce qui peut l'être : il épluche et émince les légumes, réalise des plats simples comme des hors d'oeuvre, potages, légumes, desserts.
Il ajoute que le poste de second de cuisine se situe au grade supérieur, et, se référant à la Fiche de poste de second de cuisine 'Lycée' de la Région [Localité 6], que ce dernier est placé sous la responsabilité du chef de cuisine, il élabore, distribue les repas en respectant les règles d'hygiène et de sécurité de la restauration collective, participe à l'entretien des locaux, équipements et matériels de restauration et à la gestion des stocks de denrées. Il peut être amené à remplacer le chef en cas d'absence temporaire.
Il précise que ce poste correspond aux missions qu'il effectuait depuis 2016/2017, soutient qu'il a remplacé temporairement M. [V] chef cuisinier lors de l'absence de ce dernier suite au décès de sa mère, et qu'il remplaçait M. [P], pizzaïolo, en son absence. Il ajoute que ses missions consistaient alors à préparer les pâtes précuites des pizzas l'après midi et cuire plus d'une centaine de pizzas le soir.
L'employeur fait valoir que les fonctions de M. [W] correspondaient au coefficient 105. Il ajoute que le salarié ne disposait pas du CAP de cuisine, ni d'une expérience au poste de cuisinier, et qu'il ne bénéficiait d'aucune autonomie pour travailler seul dans un établissement.
Il mentionne que M. [W] ne peut à l'appui de sa demande, s'appuyer sur des faits survenus en août et septembre 2016, tenant de la prescription triennale des salaires prévue à l'article L. 3245-1 du code du travail, sachant qu'en l'espèce aucune demande ne peut porter sur des faits antérieurs à 3 ans à compter de la rupture, soit antérieur au 30 octobre 2016 dans la mesure où la rupture du contrat est intervenue le 30 octobre 2019.
Il précise que l'équipe du snack est composée par un chef cuisinier (M. [V]) qui gère la cuisine et l'équipe d'aides cuisine, ou second de cuisine et plus précisément, des aides cuisine pour le snack et un aide cuisine pizzaïolo pour la partie pizza.
Il produit une attestation de M. [V] qui mentionne : '[...] je certifie qu'à mes yeux M. [W] [X] n'a pas la capacité d'un second de cuisine mais par contre d'un aide cuisinier, en effet j'ai essayé à plusieurs reprises de le laisser seul devant les fourneaux mais il perdait vite pied dans la 'précipitation' des plats. Je lui ai à plusieurs reprises également dit qu'à son stade la cuisine ne s'invente pas elle s'apprend', ainsi qu'un second témoignage de ce dernier ainsi rédigé : 'lors du décès de ma mère le 12 juin 2015, je me suis absenté de mon poste le lendemain pour le service du soir. Je tiens à préciser, en tant que chef et responsable des cuisines qu'en 2016 (mi-août et début septembre) effectivement M. [W] [X] est venu renforcer l'équipe du snack pour la confection des pizzas sous la responsabilité de [T] et [S]. Son rôle consistait à garnir des fonds de pâte et de les mettre dans le four automatique tout simplement.'
L'employeur justifie en outre qu'au mois d'août 2016, un autre aide cuisinier a été recruté, de sorte que M. [W] n'a jamais travaillé seul.
Si la prescription triennale s'applique au rappel de salaire afférent à la reclassification, en revanche, il ne peut être opposé de prescription quant aux faits invoqués par le salarié à l'appui de sa demande de reclassification.
M. [W], qui se borne à produire à l'appui de sa demande de reclassification, la CCN applicable, ses bulletins de paie et la fiche de poste de poste de second de cuisine 'Lycée' de la Région [Localité 6] ne produit aucun élément propre à établir qu'il assurait réellement et effectivement de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique, alors même que les témoignages produits par l'employeur rapportent la preuve contraire.
Il s'ensuit que c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a rejeté sa demande au titre de la reclassification conventionnelle. La décision sera confirmée sur ce point.
Sur les dommages et intérêts en raison du manquement à l'obligation de sécurité :
L'article L.4121-1 du code du travail dispose : 'L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.'
En l'espèce M. [W] allègue d'une violation de l'obligation de sécurité par l'employeur au motif, que le plan de prévention des risques naturels de [Localité 7] en date du 07/02/2018 fait interdiction aux différents campings de la ville de loger du public pendant la période hivernale alors que le camping [5] a continué d'y loger son personnel été comme hiver exposant ainsi ses salariés à un risque réel d'inondation de nature à porter atteinte à leur santé et leur sécurité.
Il produit en ce sens ses bulletins de paie qui établissent qu'il a bénéficié d'un avantage en nature logement au titre des saisons estivales 2017,2018 et 2019.
L'employeur conteste avoir logé du personnel pendant la saison hivernale au mépris de l'interdiction prévue au plan de prévention, et précise que les salariés n'étaient logés au camping que pendant leurs périodes de travail, soit la saison estivale, tel que cela ressort des bulletins de paie produits par M. [W].
M. [W] qui se borne à produire ses bulletins de paie concernant les périodes estivales des années 2017, 2018 et 2019 n'établit pas réalité d'un manquement de l'employeur caractérisé par un hébergement des salariés sur le site du camping pendant la saison hivernale au mépris de l'interdiction énoncé dans le plan de prévention des risques.
La demande formée à ce titre sera en conséquence rejetée.
Sur la requalification des contrats saisonniers en contrat à durée indéterminée :
En application de l'article L.1245-1 du code du travail, 'est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des articles L1242-1 à L1242-4, L1246-6 à L1242-8, L1243-11al 1, L1243-13, L1244-3 et L1244-4 du code du travail.'
En application de l'article L1242-1 du code du travail, le contrat à durée déterminée, ne peut, quelle qu'en soit la forme et quel que soit son motif, ni avoir pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
En application de l'article L.1242-2 3° du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu pour les emplois à caractère saisonnier dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois, pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou par accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
L'article L.1244-1 du code du travail précise qu'il est possible de conclure des contrats à durée déterminée successifs avec le même salarié notamment lorsque le contrat est conclu dans le cas d'emplois à caractère saisonnier.
En application de l'article L.1245-2 du code du travail, lorsque le juge fait droit à une demande de requalifiaction d'un CDD en CDI, introduite par un salarié, ce dernier peut prétendre à une indemnité au moins égale à un mois de salaire.
En l'espèce, M. [W] sollicite la requalification de sa relation de travail avec la société Bouscaren en contrat à durée indéterminée à compter du premier CDD en date du 16 août 2000 au motif que ses contrats à durée déterminée permettaient en réalité de pallier au manque structurel de main d'oeuvre au camping, et qu'ils correspondaient à toute la période d'activité de l'entreprise, puisqu'ils ont systématiquement couvert au minimum toute la saison, mais également toute la période d'ouverture au public.
S'appuyant sur l'argumentation précédemment développée au titre du logement mis à sa disposition par l'employeur et de la formation d'agent polyvalent qu'il a suivi, il soutient qu'il était à la disposition de l'employeur toute l'année.
L'employeur fait valoir qu'en l'absence de clause de reconduction prévue aux contrats, M. [W] ne peut se prévaloir de l'existence d'une relation globale à durée indéterminée, sachant que l'article 13 de la CNN Hôtellerie plein air prévoit une procédure de réemploi à la demande écrite du salarié, et non une reconduction automatique et de plein droit des CDD saisonniers pour la saison suivante.
Il précise que cette convention a également largement encadré et organisé l'emploi saisonnier puisqu'elle prévoit notamment que :
- Article 3 relatif à l'emploi saisonnier : 'afin de permettre aux salariés saisonniers de programmer leurs périodes d'activité, les parties conviennent de dispositions ci-après qui, sauf clauses contractuelles contraires, ne remettent pas en cause le caractère déterminé dans sa durée du contrat saisonnier'.
- Article 6.1 : 'les campings par essence doivent être considérés comme des établissements saisonniers, quelle que soit la durée d'ouverture. Pour les campings qui ne sont pas ouverts au public toute l'année, la saison correspond à la période d'ouverture au public, précédé de la période de préparation de l'ouverture et suivie de la période des travaux de clôture et d'inventaire, pour les emplois concernés, dans la limite d'une durée maximale totale de 8 mois.'
- Article 5.6 de l'accord du 23 mai 2000 'compte tenu de l'usage dans la profession de faire coïncider les dates des contrats saisonniers avec les dates d'ouvertures des établissements, les contrats ainsi conclus ne peuvent constituer un ensemble à durée indéterminée, mais conservent leur caractère déterminé par la saison'.
L'employeur ajoute que M. [W] n'a pas occupé de poste chaque année puisque aucun CDD n'a été conclu pour l'année 2014 ni sur la période comprise entre 2004 et 2007. Il reprend l'argumentation précédemment développée, et dont la pertinence a été retenue par la cour, concernant l'avantage logement accordé au salarié uniquement pendant les périodes estivales afférentes à ses contrats saisonniers, ainsi que la formation qualifiante suivie par ce dernier entre décembre 2018 et mars 2019.
Aux termes des textes précédemment cités, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Il ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, dans des cas limitativement énumérés.
Le contrat de travail peut être conclu pour une durée déterminée dans le cas d'emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
Cependant, la détermination par accord collectif des emplois pour lesquels le recours au contrat saisonnier est prévu ne prive pas le juge, en cas de litige, du droit de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné et de contrôler que le contrat n'a pas pour objet de pourvoir un emploi permanent.
En l'espèce, l'employeur produit un document concernant les dates d'ouverture et fermeture du camping sur la période de 2000 à 2019 dont l'analyse croisée avec celle des contrats à durée déterminée conclus par M.[W] laisse apparaître que les périodes de travail de ce dernier ne correspondaient pas systématiquement à celles de l'ouverture et fermeture du camping, sachant que certains contrats anticipaient ces dates ou se terminaient après, de sorte qu'il est établi que la date d'ouverture et de fermeture du camping ne correspond pas à celle de la période d'activité de l'employeur.
Par ailleurs, la société, qui n'établit pas quelle était chaque année sa période d'activité, ne produit aucun élément propre à démontrer de façon objective que la durée des contrats de travail ne correspondait pas, tel que le soutient le salarié, chaque année, à toute la période d'activité de l'employeur, en sorte que le salarié occupait un emploi correspondant à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
Il s'ensuit que la relation de travail doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée . Cependant, vu la brièveté des premiers contrats, et l'absence de contrat conclu de 2004 à 2007, les CDD, ne peuvent être requalifiés en CDI qu'à compter du 12 avril 2008.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de requalification.
Sur les conséquences de la requalification :
Sur la rupture du contrat de travail :
La requalification de la relation contractuelle à durée déterminée en contrat à durée indéterminée qui confère au salarié le statut de travailleur permanent de l'entreprise a pour effet, outre de lui ouvrir droit à une indemnité de requalification, de replacer ce dernier dans la situation qui aurait été la sienne s'il avait été recruté depuis l'origine dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée.
En l'espèce, la relation de travail a été requalifiée à durée indéterminée à compter du 12 avril 2008 et elle s'est achevée le 31 octobre 2019, soit à la date prévue au dernier contrat à durée déterminée, de sorte que la relation de travail s'est achevée sans qu'une procédure de licenciement ne soit diligentée à l'égard du salarié et qu'il s'ensuit que la rupture irrégulière du contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur le montant du salaire à prendre en considération :
En application de l'article R.1234-4 du code du travail, le salaire de M. [W] à prendre en considération, tenant de l'absence de reclassification, s'élève à 2 142, 49 euros bruts.
Sur le calcul de l'ancienneté :
S'agissant de l'ancienneté, se fondant sur l'article 3 de la convention collective applicable selon laquelle l'ancienneté se calcule en tenant compte de la durée cumulée de chacun des contrats à durée déterminée, l'employeur fait valoir que l'ancienneté à prendre en compte est de 5 ans et 10 mois, après déduction de la période d'arrêt maladie ordinaire du 23 juillet 2019 au 31 octobre 2019.
Cependant, par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche.
Son ancienneté doit donc être calculée depuis le premier jour d'embauche, peu important que la relation de travail n'ait pas été continue.
Par ailleurs, en application de l'article L.1234-11 du code du travail, les périodes d'absence pour maladie non professionnelle ne doivent pas être prises en compte dans la détermination de l'ancienneté.
En l'espèce, M. [W] ayant été initialement engagé le 12 août 2008 et placé en arrêt maladie à compter du 23 juillet 2019, il convient en conséquence de prendre en compte une ancienneté de 10 ans, 11 mois et 20 jours.
Sur l'indemnité de requalification :
En application des dispositions de l'article L.1245-2 du code d travail, lorsqu'il est fait droit à la demande de requalification du contrat de travail en un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité de requalification qui ne saurait être inférieure à un mois de salaire.
Le montant du salaire est calculé selon la moyenne de salaire mensuel dû au titre du contrat dans le dernier état de la relation de travail avant la saisine de la juridiction prud'homale.
En l'espèce, il convient en conséquence d'accorder à M. [W] la somme de 2 142,49 euros bruts à ce titre.
Sur le rappel de salaire au titre des périodes interstitielles :
Il résulte de la combinaison des articles L. 1245-1 du code du travail, et de l'article 1353, du code civil, que le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée à temps complet ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles séparant les contrats que s'il prouve s'être tenu à la disposition de l'employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail.
En l'espèce, M. [W], reprenant l'argumentation précédemment développée au titre du logement mis à sa disposition par l'employeur et de la formation qualifiante suivie de décembre 2018 à mars 2019, et se fondant sur son relevé de carrière, sollicite un rappel de salaire correspondant aux périodes interstitielles entre ses contrats à durée déterminée calculé sur les trois dernières années non prescrites, au motif qu'il était toute l'année à la disposition de l'employeur.
La société, se fondant sur l'argumentation précédemment développée en réponse à celle du salarié au titre de l'avantage logement dont il a bénéficié et de la formation qualifiante suivi dont la pertinence a été retenue par la cour conteste que le salarié se tenait à sa disposition toute l'année.
Les bulletins de paie produits par le salarié établissent uniquement que ce dernier était logé par l'employeur et qu'il bénéficiait ainsi de l'avantage logement pendant les périodes de travail en CDD exécutées au profit de la société.
Il ressort des éléments précédents développés qu'il n'est pas établi que sous couvert d'une formation factice, M. [W] a en réalité travaillé pour l'employeur sans déclaration préalable et sans fiche de paie.
Il s'ensuit que le salarié ne prouve pas s'être tenu à la disposition de l'employeur pendant les périodes interstitielles séparant deux contrats pour effectuer un travail, de sorte que la demande de rappel de salaire à ce titre sera rejetée.
Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents :
En application de la convention collective de l'hôtellerie de plein air en ses dispositions relatives au préavis, le salarié qui, tel que M. [W] au dernier état de la relation contractuelle est classé catégorie 2 en sa qualité d'employé non qualifié affecté à l'activité bar-restauration commerces annexes et qui dispose d'une ancienneté supérieure deux ans a droit à une indemnité de deux mois.
Il convient en conséquence de lui accorder à ce titre la somme de 4 284,98 euros, outre 428,49 euros au titre des congés payés afférents.
Sur l'indemnité légale de licenciement :
En application de l'article L.1234-9 du code du travail :
'Le salarié titulaire d'un contrat de travail à dure indéterminée, licencié alors qu'il comptait huit mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire. '
L'article R.1234-1 du code du travail dispose que l'indemnité de licenciement prévue à l'article L.1234-9 ne peut être inférieure à une somme calculée par année de servie dans l'entreprise et tenant compte des mois de service accomplis au-delà des années pleines. En cas d'année incomplète, l'indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets
l'article R.1234-2 du code du travail dispose que L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :
1° un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à 10 ans
2°Un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de 10 ans.
En l'espèce, M. [W] dont le salaire s'élevait à 2142,49 euros disposait d'une ancienneté de 10ans, 11 mois et 20 jours. Il a droit en conséquence à une indemnité d'un montant de 6 546,48 euros.
Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
En application de l'article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, et que la réintégration du salarié n'est pas possible, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur comprise entre un minimum et un maximum qui varie en fonction du montant du salaire, de l'ancienneté du salarié et de l'effectif de l'entreprise.
En l'espèce, M. [W], âgé de 39 ans, dont le salaire s'élevait à 2 142,49 euros bruts disposait d'une ancienneté de 10 ans, 11 mois, 20 jours et l'employeur ne justifie pas qu'il employait habituellement moins de 11 salariés. L'indemnité est comprise entre 3 et 10 mois de salaire.
Suite à la rupture du contrat de travail, M. [W] a été engagé par la mairie de [Localité 7] à compter du 08 juin 2020 en qualité d'adjoint technique territorial pour un salaire brut de 1667,40 euros.
Au regard de ces éléments, il convient de lui accorder une indemnité d'un montant de 6 500 euros bruts.
Sur les documents de fin de contrat et le remboursement des indemnités chômage :
Il convient d'ordonner la délivrance par la société Max Bouscaren et Compagnie à M. [X] [W] des documents de fin de contrat rectifiés.
En application de l'article 1235-4 du code du travail, Il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société Max Bouscaren aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié dans la limite de six mois d'indemnités versées.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
La société Max Bouscaren et Cie sera condamnée à verser à M. [W] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier le 23 novembre 2022 en ce qu'il a rejeté les demandes du salarié au titre du travail dissimulé, de la classification professionnelle, de l'obligation de sécurité ainsi qu'au titre des périodes interstitielles séparant ses contrats à durée déterminée.
Infirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demandes au titre de l'absence de visite d'information et de prévention, la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, ainsi que les demandes consécutives à la rupture irrégulière du contrat de travail qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Statuant à nouveau des chefs ainsi réformés :
Dit que la relation de travail doit être requalifier en contrat à durée indéterminée à compter du 12 avril 2008.
Dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que le salaire moyen de M. [X] [W] sur les trois derniers mois s'élève à 2142,49 euros.
Condamne la société Max Bouscaren et Cie à verser à M. [X] [W] les sommes suivantes :
- 500 euros a titre de l'absence de visite d'information et de prévention.
- 2142,49 euros au titre de l'indemnité de requalification
- 4284,98 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés
- 428,49 euros au titre des congés payés afférents.
- 6546,48 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement.
- 6500 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ordonne la délivrance par la société Max Bouscaren et Compagnie à M. [X] [W] des documents de fin de contrat rectifiés.
Ordonne le remboursement par la société Max Bouscaren aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié dans la limite de six mois d'indemnités versées.
Condamne la société Max Bouscaren à verser à M. [X] [W] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Max Bouscaren aux dépens de la procédure.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 26 NOVEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
F N° RG 22/06405 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PU2W
Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 NOVEMBRE 2022
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 20/00941
APPELANT :
Monsieur [X] [W]
né le 05 Avril 1980 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté sur l'audience par Me Cécile CAILLON, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.A.R.L. MAX BOUSCAREN ET CIE
Prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social, sis
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
Assistée sur l'audience Me Marion POURQUIER, substituant Me Nathalie MONSARRAT LACOURT de la SCP SVA, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Ordonnance de clôture du 01 Septembre 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Magali VENET, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre
Madame Magali VENET, Conseillère
Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
La société Max Bouscaren et Cie qui exploite le camping « [5]» situé à [Localité 7] a engagé Monsieur [X] [W] selon contrats à durée déterminée saisonniers en qualité de gardien :
- du 6 août au 20 août 2000 (14 jours).
- du 1er juillet 2001 au 31 août 2001 (2 mois).
- du 18 mai 2002 au 31 août 2002 (3mois).
- du 4 mars 2003 au 13 septembre 2003 (6 mois).
- du 12 avril 2008 au 13 septembre 2008 (5 mois).
Par la suite, Monsieur [W] a été engagé selon contrats à durée déterminée saisonniers en qualité d'aide cuisine coefficient 105, au sein du snack du camping:
- du 16 avril 2009 au 12 septembre 2009 (4 mois 26 jours).
- du 10 avril 2010 au 11 septembre 2010 (5 mois).
- du 1er avril 2011 au 16 septembre 2011 (5 mois 15 jours).
- du 2 avril 2012 au 15 septembre 2012 (5 mois 13 jours).
- du 15 avril 2013 au 15 septembre 2013 (5 mois).
- du 23 mai 2015 au 30 septembre 2015 (5 mois 7 jours).
- du 1er avril 2016 au 30 septembre 2016 (6 mois).
- du 3 avril 2017 au 30 septembre 2017 (6 mois).
Puis en qualité de second de cuisine coefficient 105
- du 3 avril 2018 au 30 septembre 2018 (6 mois).
Dans le cadre d'une formation Camping Caravaning organisée par pôle emploi, afin d'acquérir une première qualification professionnelle d'agent polyvalent de maintenance, M. [W] a effectué un stage un stage du 17 décembre 2018 au 3 mars 2019, au sein du service technique du Camping « [5] ».
A l'issue de sa formation, Monsieur [W] a été engagé par la société suivant contrat de travail à durée déterminée saisonnier en qualité d'Agent polyvalent de maintenance en hôtellerie de plein air, au coefficient 105 de la convention collective de l'hôtellerie de plein air qui s'applique au contrat.
A compter du 23 juillet 2019, Monsieur [W] a été placé en arrêt de travail pour maladie ordinaire, et ce jusqu'au terme de son contrat de travail en date du 31 octobre 2019.
Le 27 octobre 2020, Monsieur [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier des demandes suivantes :
- Ordonner la requalification de tous les contrats à durée déterminée saisonnier en contrat à durée indéterminée depuis le 1er mars 1998,
- Dire et juger que la rupture du contrat de travail en date du 31 octobre 2019 doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence, condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à lui payer les sommes de :
- 2.237,63 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la visite médicale d'embauche,
- 2.855,85 € à titre de rappel de salaire sur les saisons 2018 et 2019 outre la somme de 285,58 € à titre de congés payés,
- 33.564,45 € à titre de rappel de salaire dus pendant les périodes interstitielles, outre la somme de 3.356,44 € au titre des de congés payés afférents,
- 6.712,89 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 671,28 € de congés payés afférents,
- 12.306,95 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2.237,63 € à titre d'indemnité de requalification,
- 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 13.425,78 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
Par jugement en date du 23 novembre 2022, le Conseil de Prud'hommes de Montpellier a statué ainsi :
' Dit et juge que les prescriptions de droit s'appliquent sur les demandes de M. [W],
Dit et juge que tous les contrats saisonniers de M. [W] respectent les dispositions prévues aux articles L. 1242-2 et L. 1244-1 du code du travail,
Dit et juge que le contrat de travail à durée déterminée du 31 octobre 2019 est conforme.
Déboute M. [X] [W] de l'intégralité de ses demandes , tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, qu'en toutes hypothèses.
Déboute les parties de leur demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Met les dépens de l'instance à la charge de M. [W]'.
Monsieur [W] interjetait appel de ce jugement le 20 décembre 2022.
Dans ses dernières conclusions en date du 10 mars 2023 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M.[W] demande à la cour de :
A titre principal :
Constater que le salaire moyen de Monsieur [X] [W] sur les trois derniers mois complets est de 2.237,63 €.
Juger non prescrites les demandes de Monsieur [W].
Ordonner la requalification de tous les contrats de travail saisonniers de Monsieur [X] [W] en contrat de travail à durée indéterminée depuis le 06 août 2000.
Juger que la rupture du contrat de travail en date du 31 octobre 2019 doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence,
Condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à payer à Monsieur [X] [W] les sommes de :
- 2.237,63 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la visite médicale d'embauche.
- 2.855,85 € à titre de rappel de salaire sur les saisons 2018 et 2019 outre la somme de 285,58€ au titre des congés payés y afférents.
- 33.564,45 € au titre des salaires dus pendant les périodes interstitielles outre la somme de 3.356,44 € au titre des congés payés y afférents.
- 6.712,89 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 671,28 € à titre de congés payés sur préavis.
- 12.306,95 € au titre de l'indemnité légale de licenciement.
- 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- 2.237,63 € à titre d'indemnité de requalification.
- 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.
- 13.425,78 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
A Titre Subsidiaire :
Constater que le salaire moyen de Monsieur [X] [W] sur les trois derniers mois complets est de 2.237,63 €.
Juger non prescrites les demandes de Monsieur [W].
Constater Que la Sarl Max Bouscaren et Cie n'a pas informé Monsieur [X] [W] de son droit au renouvellement de son contrat de travail.
En conséquence,
Condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à payer à Monsieur [X] [W] les sommes de :
- 2.237,63 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la visite médicale d'embauche.
- 2.855,85 € à titre de rappel de salaire sur les saisons 2018 et 2019 outre la somme de 285,58 € au titre des congés payés y afférents.
- 33.564,45 € au titre des salaires dus pendant les périodes interstitielles outre la somme de 3.356,44 € au titre des congés payés afférents.
- 50.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à l'absence de renouvellement de son contrat de travail.
- 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.
- 13.425,78 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
En toutes hypothèses :
Ordonner à la Sarl Max Bouscaren et Cie de délivrer à Monsieur [X] [W] l'ensemble de ses documents de fin de contrats rectifiés.
Condamner la Sarl Max Bouscaren et Cie à payer à Monsieur [X] [W] la somme 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Dans ses dernières conclusions en date du 12 juin 2023 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la société Max Bouscaren et Cie demande à la cour de :
A titre principal,
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Montpellier en date du 23 novembre 2022.
Subsidiairement,
Débouter M. [X] [W] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche à défaut de préjudice subi et établi, ou à tout le moins en limiter le montant.
Dire et juger que M. [X] [W] ne justifie pas s'être tenu à la disposition de l'employeur durant les périodes intercontrat. En conséquence, débouter M. [X] [W] de sa demande de rappel de salaire y afférent.
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 4 284 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis.
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 3 123,75 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 3 213 euros correspondant à 1,5 mois de salaire, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Condamner la société Max Bouscaren et Cie au paiement de la somme de 2123 euros au titre de l'indemnité de requalification.
Débouter M. [X] [W] de sa demande subsidiaire de dommages et intérêts pour non renouvellement du contrat de travail saisonnier à défaut de préjudice établi, ou à tout le moins en limiter le montant.
En tout état de cause,
Fixer le salaire moyen mensuel de Monsieur [X] [W] à 2142 euros bruts.
Fixer l'ancienneté de M. [X] [W] à 5 ans et 10 mois.
Débouter M. [X] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Débouter M. [X] [W] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
Condamner Monsieur [X] [W] à verser à la société Max Bouscaren et Cie la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'ordonnance de clôture est en date du 1er septembre 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur les dommages intérêts au titre de l'absence de visite médicale d'embauche:
En application de l'article R. 4624-10 du code du travail : ' tout travailleur bénéficie d'une visite d'information et de prévention réalisée par l'un des professionnels de santé mentionné au premier alinéa de l'article L.4624-1, dans un délai qui n'excède pas trois mois à compter de la prise effective du poste de travail.'
L'article R 122-2 du code du travail dispose que 'Au moyen de la visite préalable à l'embauche, l'employeur accompli les déclarations et demandes suivantes [...]
5°'la demande de visite d'information et de prévention prévue au deuxième alinéa de l'article L.4624-1 du présent code ou la demande d'examen médical d'aptitude à l'embauche prévu à l'article L.4624-2 du présent code.'
M. [W] sollicite le versement de dommages et intérêts d'un montant de 2237,63 euros au titre de l'absence de visite médicale d'embauche afférente à son contrat à durée déterminée du 4 mars 2019. Il allègue avoir subi un préjudice au motif que son état de santé était fragilisé puisqu'il a été placé en arrêt maladie à compter 23 juillet 2019.
L'employeur fait valoir qu'il a satisfait à son obligation de demande de visite d'information et de prévention lors de sa déclaration préalable à l'embauche du 28 février 2019. Il ajoute que M. [W] ne justifie pas d'un préjudice consécutif à l'absence de visite dès lors que le motif de son arrêt de travail du 23 juillet 2019 n'est pas connu et que le salarié n'a jamais évoqué de lien entre son arrêt de travail et son emploi.
Si la déclaration préalable à l'embauche vaut demande de visite d'information et de prévention, il appartient cependant à l'employeur de s'assurer de la réalisation de cette visite.
La visite d'information et de prévention a notamment pour but, selon l'article R.4624-11 du code du travail d'interroger le salarié sur son état de santé et d'identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail.
En l'espèce, M. [W] qui a été placé en arrêt de travail pour maladie quelques mois après son embauche et jusqu'à l'issue de son contrat à durée déterminée en date du 31 octobre 2019, justifie d'un préjudice lié à l'absence de visite de prévention et d'information dès lors qu'une telle visite a notamment pour finalité d'identifier l'existence d'une fragilité de son état de santé nécessitant une orientation auprès du médecin du travail, sachant qu'il a été placé en arrêt maladie quelques mois après son embauche, et ce, peu important les motifs de son arrêt de travail du 23 juillet 2019.
Il convient en conséquence d'indemniser le préjudice subi en lui allouant la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts, le jugement sera réformé en ce sens.
Sur le travail dissimulé :
En application des articles L.8221-3 et L.8221-5 du code du travail, le fait pour l'employeur de se soustraire intentionnellement aux déclarations qui doivent être effectuées aux organismes de sécurité sociale ou à l'administration fiscale, est réputé travail dissimulé, ainsi que le fait de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement des formalités de délivrance d'un bulletin de paie ou de déclaration préalable à l'embauche. De même est réputé travail dissimulé le fait de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
L'article L.8223-1 prévoit en cas de rupture du contrat de travail, l'octroi au salarié en cas de travail dissimulé, d'une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
En l'espèce, M. [W] allègue d'un travail dissimulé au motif que le stage qu'il a effectué selon convention de stage pôle emploi sur la période du 17 décembre 2018 au 3 mars 2019, et au titre duquel il était indemnisé par pôle emploi, n'avait aucun intérêt pour lui en terme de formation qualifiante puisqu'il faisait partie du personnel du camping depuis près de 20 ans, et qu'il a en réalité contribué pendant cette période, comme d'autres salariés, à la maintenance du camping, sans contrat de travail et sans être rémunéré par l'employeur.
La société fait valoir, que M. [W] est à l'initiative de cette formation pendant laquelle il a perçu des indemnités pôle emploi, puisqu'il souhaitait obtenir, par cette formation qualifiante, les compétences nécessaires pour évoluer au poste d'agent polyvalent, et qu'il a lui-même déposé son dossier d'inscription et signé la convention tripartite avec pôle emploi et la société le 5 décembre 2018.
L'employeur précise que le salarié a effectué sa formation au sein du service technique du camping [5], auprès de M. [R], responsable entretien camping, et M. [U], responsable entretien mobil Home chalet, lesquels témoignent dans une attestation rédigée conformément aux mentions de l'article 202 du code de procédure civile que M. [W] ainsi que trois autres collègues semblaient être satisfaits de la formation qu'ils ont suivie.
Il rappelle en outre que dans le cadre de ces CDD M. [W] n'a jamais exercé des fonctions d'agent polyvalent.
Il ressort du courrier adressé par pôle emploi à M. [W] le 17 décembre 2018 avec pour objet 'notification d'inscription à un stage' que ce dernier a déposé un dossier d'inscription en vue de suivre une formation de Camping Caravaning validée dans le cadre de son projet professionnel.
La fiche de prescription de formation adressée par pôle emploi à M. [X] [W] mentionne en ces termes :
'Formation envisagée : ' Camping Caravaning'
Objectif de la formation : 'Adaptation poste de travail AFPR'
Modalité de validation du projet par le prescripteur :
'Acquérir une première qualification professionnelle, une première expérience professionnelle dans ce secteur de métier'
Argumentation : 'formation AFPR sur le métier d'agent polyvalent technique en hôtellerie de plein afin de travailler de façon pérenne au sein du camping [5].'
[...]
Organisme de formation préconisé : Camping [5][...]
Session de formation proposée :
- Agent polyvalent maintenance
- date début de la formation : 17 décembre 2018
- date de fin de formation : 03 mars 2019
[...]
- Mesure entreprise : Action de Formation Préalable au recrutement.'
Il est établi que M. [W] a suivi dans le cadre d'une formation de 'Camping Caravaning' une session de formation d'agent polyvalent de maintenance au sein du camping [5] pour la période du 17 décembre 2018 au 3 mars 2019.
Le salarié ne conteste pas, au vu de la description des missions qu'il indique avoir réalisées lors de ce stage (tailler, couper, ramasser des déchets verts, couper du béton, participer à l'entretien et à la maintenance du camping) avoir effectué pendant cette période une activité correspondant à l'intitulé de sa formation et à celle du planning produit par l'employeur y afférent.
Il ressort en outre des contrats saisonniers produits que M. [W], n'a été engagé par la société en qualité d'agent polyvalent qu'à l'issue de la formation qualifiante concernant cette activité, soit à partir du 4 mars 2019.
Par ailleurs, ses contrats saisonniers n'établissent pas qu'il était logé à l'année sur le site du camping, mais uniquement qu'il a bénéficié de cet avantage logement pendant les périodes estivales correspondant à ses contrats au titre des années 2017, 2018, 2019, de sorte qu'il produit aucun élément probant de nature a établir qu'il exerçait, en contrepartie d'un logement, des missions d'agent polyvalent sur le site du camping hors les périodes pendant lesquelles il travaillait dans le cade de contrats saisonniers.
Il ne résulte pas de ces éléments que la société l'a intentionnellement fait travailler durant cette période, sous couvert d'une prétendue formation qualifiante, sans le rémunérer, de sorte que la demande formée au titre du travail dissimulé sera rejetée.
Sur la classification professionnelle :
Il appartient à l'employeur de déterminer la position du salarié dans la classification professionnelle prévue par la convention collective qui lui est applicable.
S'il s'estime sous classé, le salarié conserve la faculté d'exercer une action contre son employeur pour être placé au niveau auquel son poste correspond.
Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.
Lorsqu'il est saisi d'une contestation sur la catégorie professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, le juge ne peut se fonder sur les seules définitions de poste résultant du contrat de travail ou de la convention collective ; il doit rechercher la nature de l'emploi effectivement occupé par le salarié et se prononcer au vu des fonctions réellement exercées.
Selon l'article 4 de la Convention collective nationale de l'Hôtellerie de plein air du 2 juin 1993, les emplois sont divisés en quatre catégories et chaque emploi comprend une dénomination, une définition de fonctions et une évaluation en terme de coefficients.
Les coefficients indiqués constituent une base ou la fourchette minimale au moment de l'embauche en fonction notamment de l'expérience professionnelle acquise, de la formation initiale ou complémentaire suivie par le salarié.
la grille de classification des emplois est la suivante :
Première catégorie, coefficients hiérarchiques :
- Personnel d'accueil sans tâche administrative : 100 à 105.
- Hommes et femmes toutes mains : personnel affecté, selon la saison, aussi bien à l'entretien des sanitaires qu'à toute tâche d'entretien général de l'établissement : 105 à 115.
- Surveillant de jour : chargé de faire appliquer le règlement intérieur et les notes de service de l'établissement ; ou/et de nuit : applique les consignes de nuit spécifiques de l'établissement, veille à la fermeture des portes et fait des rondes de sécurité : 105 à 115.
Deuxième catégorie[...]
Troisième catégorie :
- Employé(e) administratif(ve) : possède une formation d'employé(e) spécialisé(e) connaît l'organisation de l'établissement ; tient la caisse ; effectue les travaux de transcription et classement ; assure le suivi de la correspondance ; travaille selon les directives du responsable ; effectue les réservations : 120 à 150.
- Personnel d'accueil minimum trilingue : accueil des touristes ; parle et écrit couramment deux langues étrangères (précisées par contrat) ; attribue les emplacements sur le terrain ; remplit les formalités administratives, renseigne les touristes, assure le règlement des séjours, pratique la dactylographie et l'informatique, effectue les réservations :
135 à 170
- Animation : connaît et applique les techniques d'animation en groupe, a une expérience des activités culturelles, sportives, distrayantes, ainsi que la découverte de la région ; a la responsabilité du matériel et de son petit entretien courant 130 à 170.
- Employé(e) qualifié(e) affecté(e) à l'activité bar-restauration et commerces annexes : assure les divers services ; est responsable des mouvements de caisse et de sa comptabilité ; assure l'approvisionnement ; est responsable des stocks (entrées et sorties) : 120 à 150.
- Cuisinier : possède le CAP ou expérience équivalente ; participe à l'ensemble des tâches relatives à la préparation des repas ; peut travailler seul dans un petit établissement 130 à 150.
En l'espèce, M. [W] qui était classé au coefficient 105 sollicite son repositionnement au coefficient 150 correspondant à la fonction suivante : ' cuisinier possède le CAP ou expérience équivalente ; participe à l'ensemble des tâches relatives à la préparation des repas ; peut travailler seul dans un petit établissement coefficient 130 à 150".
Il fait valoir qu'il a été affecté depuis 2011 en cuisine aux tâches relatives à la préparation des repas, et qu'il exerçait les missions suivantes : garnitures et préparations, cuisson des viandes et des poissons, préparation des frigos, gestion des stocks des frigos et de la chambre froide, étiquetage, préparation des plats (encornets, moules...), préparation des pâtes et cuisson des pizzas en l'absence du pizzaïolo.
Il mentionne qu'aucune prescription ne peut lui être opposée quant aux faits qu'il invoque et produit ses bulletins de paie selon lesquels il a occupé le poste de pizzaïolo en août et septembre 2016 puis de second de cuisine à compter de mai 2017.
Il précise que le poste de commis de cuisine est le premier palier en cuisine, que ses tâches consistent à rassembler les ingrédients nécessaires à la préparation des plats, préparer à l'avance tout ce qui peut l'être : il épluche et émince les légumes, réalise des plats simples comme des hors d'oeuvre, potages, légumes, desserts.
Il ajoute que le poste de second de cuisine se situe au grade supérieur, et, se référant à la Fiche de poste de second de cuisine 'Lycée' de la Région [Localité 6], que ce dernier est placé sous la responsabilité du chef de cuisine, il élabore, distribue les repas en respectant les règles d'hygiène et de sécurité de la restauration collective, participe à l'entretien des locaux, équipements et matériels de restauration et à la gestion des stocks de denrées. Il peut être amené à remplacer le chef en cas d'absence temporaire.
Il précise que ce poste correspond aux missions qu'il effectuait depuis 2016/2017, soutient qu'il a remplacé temporairement M. [V] chef cuisinier lors de l'absence de ce dernier suite au décès de sa mère, et qu'il remplaçait M. [P], pizzaïolo, en son absence. Il ajoute que ses missions consistaient alors à préparer les pâtes précuites des pizzas l'après midi et cuire plus d'une centaine de pizzas le soir.
L'employeur fait valoir que les fonctions de M. [W] correspondaient au coefficient 105. Il ajoute que le salarié ne disposait pas du CAP de cuisine, ni d'une expérience au poste de cuisinier, et qu'il ne bénéficiait d'aucune autonomie pour travailler seul dans un établissement.
Il mentionne que M. [W] ne peut à l'appui de sa demande, s'appuyer sur des faits survenus en août et septembre 2016, tenant de la prescription triennale des salaires prévue à l'article L. 3245-1 du code du travail, sachant qu'en l'espèce aucune demande ne peut porter sur des faits antérieurs à 3 ans à compter de la rupture, soit antérieur au 30 octobre 2016 dans la mesure où la rupture du contrat est intervenue le 30 octobre 2019.
Il précise que l'équipe du snack est composée par un chef cuisinier (M. [V]) qui gère la cuisine et l'équipe d'aides cuisine, ou second de cuisine et plus précisément, des aides cuisine pour le snack et un aide cuisine pizzaïolo pour la partie pizza.
Il produit une attestation de M. [V] qui mentionne : '[...] je certifie qu'à mes yeux M. [W] [X] n'a pas la capacité d'un second de cuisine mais par contre d'un aide cuisinier, en effet j'ai essayé à plusieurs reprises de le laisser seul devant les fourneaux mais il perdait vite pied dans la 'précipitation' des plats. Je lui ai à plusieurs reprises également dit qu'à son stade la cuisine ne s'invente pas elle s'apprend', ainsi qu'un second témoignage de ce dernier ainsi rédigé : 'lors du décès de ma mère le 12 juin 2015, je me suis absenté de mon poste le lendemain pour le service du soir. Je tiens à préciser, en tant que chef et responsable des cuisines qu'en 2016 (mi-août et début septembre) effectivement M. [W] [X] est venu renforcer l'équipe du snack pour la confection des pizzas sous la responsabilité de [T] et [S]. Son rôle consistait à garnir des fonds de pâte et de les mettre dans le four automatique tout simplement.'
L'employeur justifie en outre qu'au mois d'août 2016, un autre aide cuisinier a été recruté, de sorte que M. [W] n'a jamais travaillé seul.
Si la prescription triennale s'applique au rappel de salaire afférent à la reclassification, en revanche, il ne peut être opposé de prescription quant aux faits invoqués par le salarié à l'appui de sa demande de reclassification.
M. [W], qui se borne à produire à l'appui de sa demande de reclassification, la CCN applicable, ses bulletins de paie et la fiche de poste de poste de second de cuisine 'Lycée' de la Région [Localité 6] ne produit aucun élément propre à établir qu'il assurait réellement et effectivement de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique, alors même que les témoignages produits par l'employeur rapportent la preuve contraire.
Il s'ensuit que c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a rejeté sa demande au titre de la reclassification conventionnelle. La décision sera confirmée sur ce point.
Sur les dommages et intérêts en raison du manquement à l'obligation de sécurité :
L'article L.4121-1 du code du travail dispose : 'L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.'
En l'espèce M. [W] allègue d'une violation de l'obligation de sécurité par l'employeur au motif, que le plan de prévention des risques naturels de [Localité 7] en date du 07/02/2018 fait interdiction aux différents campings de la ville de loger du public pendant la période hivernale alors que le camping [5] a continué d'y loger son personnel été comme hiver exposant ainsi ses salariés à un risque réel d'inondation de nature à porter atteinte à leur santé et leur sécurité.
Il produit en ce sens ses bulletins de paie qui établissent qu'il a bénéficié d'un avantage en nature logement au titre des saisons estivales 2017,2018 et 2019.
L'employeur conteste avoir logé du personnel pendant la saison hivernale au mépris de l'interdiction prévue au plan de prévention, et précise que les salariés n'étaient logés au camping que pendant leurs périodes de travail, soit la saison estivale, tel que cela ressort des bulletins de paie produits par M. [W].
M. [W] qui se borne à produire ses bulletins de paie concernant les périodes estivales des années 2017, 2018 et 2019 n'établit pas réalité d'un manquement de l'employeur caractérisé par un hébergement des salariés sur le site du camping pendant la saison hivernale au mépris de l'interdiction énoncé dans le plan de prévention des risques.
La demande formée à ce titre sera en conséquence rejetée.
Sur la requalification des contrats saisonniers en contrat à durée indéterminée :
En application de l'article L.1245-1 du code du travail, 'est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des articles L1242-1 à L1242-4, L1246-6 à L1242-8, L1243-11al 1, L1243-13, L1244-3 et L1244-4 du code du travail.'
En application de l'article L1242-1 du code du travail, le contrat à durée déterminée, ne peut, quelle qu'en soit la forme et quel que soit son motif, ni avoir pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
En application de l'article L.1242-2 3° du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu pour les emplois à caractère saisonnier dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois, pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou par accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
L'article L.1244-1 du code du travail précise qu'il est possible de conclure des contrats à durée déterminée successifs avec le même salarié notamment lorsque le contrat est conclu dans le cas d'emplois à caractère saisonnier.
En application de l'article L.1245-2 du code du travail, lorsque le juge fait droit à une demande de requalifiaction d'un CDD en CDI, introduite par un salarié, ce dernier peut prétendre à une indemnité au moins égale à un mois de salaire.
En l'espèce, M. [W] sollicite la requalification de sa relation de travail avec la société Bouscaren en contrat à durée indéterminée à compter du premier CDD en date du 16 août 2000 au motif que ses contrats à durée déterminée permettaient en réalité de pallier au manque structurel de main d'oeuvre au camping, et qu'ils correspondaient à toute la période d'activité de l'entreprise, puisqu'ils ont systématiquement couvert au minimum toute la saison, mais également toute la période d'ouverture au public.
S'appuyant sur l'argumentation précédemment développée au titre du logement mis à sa disposition par l'employeur et de la formation d'agent polyvalent qu'il a suivi, il soutient qu'il était à la disposition de l'employeur toute l'année.
L'employeur fait valoir qu'en l'absence de clause de reconduction prévue aux contrats, M. [W] ne peut se prévaloir de l'existence d'une relation globale à durée indéterminée, sachant que l'article 13 de la CNN Hôtellerie plein air prévoit une procédure de réemploi à la demande écrite du salarié, et non une reconduction automatique et de plein droit des CDD saisonniers pour la saison suivante.
Il précise que cette convention a également largement encadré et organisé l'emploi saisonnier puisqu'elle prévoit notamment que :
- Article 3 relatif à l'emploi saisonnier : 'afin de permettre aux salariés saisonniers de programmer leurs périodes d'activité, les parties conviennent de dispositions ci-après qui, sauf clauses contractuelles contraires, ne remettent pas en cause le caractère déterminé dans sa durée du contrat saisonnier'.
- Article 6.1 : 'les campings par essence doivent être considérés comme des établissements saisonniers, quelle que soit la durée d'ouverture. Pour les campings qui ne sont pas ouverts au public toute l'année, la saison correspond à la période d'ouverture au public, précédé de la période de préparation de l'ouverture et suivie de la période des travaux de clôture et d'inventaire, pour les emplois concernés, dans la limite d'une durée maximale totale de 8 mois.'
- Article 5.6 de l'accord du 23 mai 2000 'compte tenu de l'usage dans la profession de faire coïncider les dates des contrats saisonniers avec les dates d'ouvertures des établissements, les contrats ainsi conclus ne peuvent constituer un ensemble à durée indéterminée, mais conservent leur caractère déterminé par la saison'.
L'employeur ajoute que M. [W] n'a pas occupé de poste chaque année puisque aucun CDD n'a été conclu pour l'année 2014 ni sur la période comprise entre 2004 et 2007. Il reprend l'argumentation précédemment développée, et dont la pertinence a été retenue par la cour, concernant l'avantage logement accordé au salarié uniquement pendant les périodes estivales afférentes à ses contrats saisonniers, ainsi que la formation qualifiante suivie par ce dernier entre décembre 2018 et mars 2019.
Aux termes des textes précédemment cités, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Il ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, dans des cas limitativement énumérés.
Le contrat de travail peut être conclu pour une durée déterminée dans le cas d'emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
Cependant, la détermination par accord collectif des emplois pour lesquels le recours au contrat saisonnier est prévu ne prive pas le juge, en cas de litige, du droit de vérifier concrètement l'existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi concerné et de contrôler que le contrat n'a pas pour objet de pourvoir un emploi permanent.
En l'espèce, l'employeur produit un document concernant les dates d'ouverture et fermeture du camping sur la période de 2000 à 2019 dont l'analyse croisée avec celle des contrats à durée déterminée conclus par M.[W] laisse apparaître que les périodes de travail de ce dernier ne correspondaient pas systématiquement à celles de l'ouverture et fermeture du camping, sachant que certains contrats anticipaient ces dates ou se terminaient après, de sorte qu'il est établi que la date d'ouverture et de fermeture du camping ne correspond pas à celle de la période d'activité de l'employeur.
Par ailleurs, la société, qui n'établit pas quelle était chaque année sa période d'activité, ne produit aucun élément propre à démontrer de façon objective que la durée des contrats de travail ne correspondait pas, tel que le soutient le salarié, chaque année, à toute la période d'activité de l'employeur, en sorte que le salarié occupait un emploi correspondant à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
Il s'ensuit que la relation de travail doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée . Cependant, vu la brièveté des premiers contrats, et l'absence de contrat conclu de 2004 à 2007, les CDD, ne peuvent être requalifiés en CDI qu'à compter du 12 avril 2008.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de requalification.
Sur les conséquences de la requalification :
Sur la rupture du contrat de travail :
La requalification de la relation contractuelle à durée déterminée en contrat à durée indéterminée qui confère au salarié le statut de travailleur permanent de l'entreprise a pour effet, outre de lui ouvrir droit à une indemnité de requalification, de replacer ce dernier dans la situation qui aurait été la sienne s'il avait été recruté depuis l'origine dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée.
En l'espèce, la relation de travail a été requalifiée à durée indéterminée à compter du 12 avril 2008 et elle s'est achevée le 31 octobre 2019, soit à la date prévue au dernier contrat à durée déterminée, de sorte que la relation de travail s'est achevée sans qu'une procédure de licenciement ne soit diligentée à l'égard du salarié et qu'il s'ensuit que la rupture irrégulière du contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur le montant du salaire à prendre en considération :
En application de l'article R.1234-4 du code du travail, le salaire de M. [W] à prendre en considération, tenant de l'absence de reclassification, s'élève à 2 142, 49 euros bruts.
Sur le calcul de l'ancienneté :
S'agissant de l'ancienneté, se fondant sur l'article 3 de la convention collective applicable selon laquelle l'ancienneté se calcule en tenant compte de la durée cumulée de chacun des contrats à durée déterminée, l'employeur fait valoir que l'ancienneté à prendre en compte est de 5 ans et 10 mois, après déduction de la période d'arrêt maladie ordinaire du 23 juillet 2019 au 31 octobre 2019.
Cependant, par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche.
Son ancienneté doit donc être calculée depuis le premier jour d'embauche, peu important que la relation de travail n'ait pas été continue.
Par ailleurs, en application de l'article L.1234-11 du code du travail, les périodes d'absence pour maladie non professionnelle ne doivent pas être prises en compte dans la détermination de l'ancienneté.
En l'espèce, M. [W] ayant été initialement engagé le 12 août 2008 et placé en arrêt maladie à compter du 23 juillet 2019, il convient en conséquence de prendre en compte une ancienneté de 10 ans, 11 mois et 20 jours.
Sur l'indemnité de requalification :
En application des dispositions de l'article L.1245-2 du code d travail, lorsqu'il est fait droit à la demande de requalification du contrat de travail en un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité de requalification qui ne saurait être inférieure à un mois de salaire.
Le montant du salaire est calculé selon la moyenne de salaire mensuel dû au titre du contrat dans le dernier état de la relation de travail avant la saisine de la juridiction prud'homale.
En l'espèce, il convient en conséquence d'accorder à M. [W] la somme de 2 142,49 euros bruts à ce titre.
Sur le rappel de salaire au titre des périodes interstitielles :
Il résulte de la combinaison des articles L. 1245-1 du code du travail, et de l'article 1353, du code civil, que le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée à temps complet ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles séparant les contrats que s'il prouve s'être tenu à la disposition de l'employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail.
En l'espèce, M. [W], reprenant l'argumentation précédemment développée au titre du logement mis à sa disposition par l'employeur et de la formation qualifiante suivie de décembre 2018 à mars 2019, et se fondant sur son relevé de carrière, sollicite un rappel de salaire correspondant aux périodes interstitielles entre ses contrats à durée déterminée calculé sur les trois dernières années non prescrites, au motif qu'il était toute l'année à la disposition de l'employeur.
La société, se fondant sur l'argumentation précédemment développée en réponse à celle du salarié au titre de l'avantage logement dont il a bénéficié et de la formation qualifiante suivi dont la pertinence a été retenue par la cour conteste que le salarié se tenait à sa disposition toute l'année.
Les bulletins de paie produits par le salarié établissent uniquement que ce dernier était logé par l'employeur et qu'il bénéficiait ainsi de l'avantage logement pendant les périodes de travail en CDD exécutées au profit de la société.
Il ressort des éléments précédents développés qu'il n'est pas établi que sous couvert d'une formation factice, M. [W] a en réalité travaillé pour l'employeur sans déclaration préalable et sans fiche de paie.
Il s'ensuit que le salarié ne prouve pas s'être tenu à la disposition de l'employeur pendant les périodes interstitielles séparant deux contrats pour effectuer un travail, de sorte que la demande de rappel de salaire à ce titre sera rejetée.
Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents :
En application de la convention collective de l'hôtellerie de plein air en ses dispositions relatives au préavis, le salarié qui, tel que M. [W] au dernier état de la relation contractuelle est classé catégorie 2 en sa qualité d'employé non qualifié affecté à l'activité bar-restauration commerces annexes et qui dispose d'une ancienneté supérieure deux ans a droit à une indemnité de deux mois.
Il convient en conséquence de lui accorder à ce titre la somme de 4 284,98 euros, outre 428,49 euros au titre des congés payés afférents.
Sur l'indemnité légale de licenciement :
En application de l'article L.1234-9 du code du travail :
'Le salarié titulaire d'un contrat de travail à dure indéterminée, licencié alors qu'il comptait huit mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire. '
L'article R.1234-1 du code du travail dispose que l'indemnité de licenciement prévue à l'article L.1234-9 ne peut être inférieure à une somme calculée par année de servie dans l'entreprise et tenant compte des mois de service accomplis au-delà des années pleines. En cas d'année incomplète, l'indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets
l'article R.1234-2 du code du travail dispose que L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :
1° un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à 10 ans
2°Un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de 10 ans.
En l'espèce, M. [W] dont le salaire s'élevait à 2142,49 euros disposait d'une ancienneté de 10ans, 11 mois et 20 jours. Il a droit en conséquence à une indemnité d'un montant de 6 546,48 euros.
Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
En application de l'article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, et que la réintégration du salarié n'est pas possible, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur comprise entre un minimum et un maximum qui varie en fonction du montant du salaire, de l'ancienneté du salarié et de l'effectif de l'entreprise.
En l'espèce, M. [W], âgé de 39 ans, dont le salaire s'élevait à 2 142,49 euros bruts disposait d'une ancienneté de 10 ans, 11 mois, 20 jours et l'employeur ne justifie pas qu'il employait habituellement moins de 11 salariés. L'indemnité est comprise entre 3 et 10 mois de salaire.
Suite à la rupture du contrat de travail, M. [W] a été engagé par la mairie de [Localité 7] à compter du 08 juin 2020 en qualité d'adjoint technique territorial pour un salaire brut de 1667,40 euros.
Au regard de ces éléments, il convient de lui accorder une indemnité d'un montant de 6 500 euros bruts.
Sur les documents de fin de contrat et le remboursement des indemnités chômage :
Il convient d'ordonner la délivrance par la société Max Bouscaren et Compagnie à M. [X] [W] des documents de fin de contrat rectifiés.
En application de l'article 1235-4 du code du travail, Il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société Max Bouscaren aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié dans la limite de six mois d'indemnités versées.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
La société Max Bouscaren et Cie sera condamnée à verser à M. [W] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier le 23 novembre 2022 en ce qu'il a rejeté les demandes du salarié au titre du travail dissimulé, de la classification professionnelle, de l'obligation de sécurité ainsi qu'au titre des périodes interstitielles séparant ses contrats à durée déterminée.
Infirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demandes au titre de l'absence de visite d'information et de prévention, la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, ainsi que les demandes consécutives à la rupture irrégulière du contrat de travail qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Statuant à nouveau des chefs ainsi réformés :
Dit que la relation de travail doit être requalifier en contrat à durée indéterminée à compter du 12 avril 2008.
Dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que le salaire moyen de M. [X] [W] sur les trois derniers mois s'élève à 2142,49 euros.
Condamne la société Max Bouscaren et Cie à verser à M. [X] [W] les sommes suivantes :
- 500 euros a titre de l'absence de visite d'information et de prévention.
- 2142,49 euros au titre de l'indemnité de requalification
- 4284,98 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés
- 428,49 euros au titre des congés payés afférents.
- 6546,48 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement.
- 6500 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ordonne la délivrance par la société Max Bouscaren et Compagnie à M. [X] [W] des documents de fin de contrat rectifiés.
Ordonne le remboursement par la société Max Bouscaren aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié dans la limite de six mois d'indemnités versées.
Condamne la société Max Bouscaren à verser à M. [X] [W] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Max Bouscaren aux dépens de la procédure.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT