CA Versailles, ch civ.. 1-4 copropriete, 25 novembre 2025, n° 23/05815
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 71F
Ch civ. 1-4 copropriété
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 25 NOVEMBRE 2025
N° RG 23/05815 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WBAV
AFFAIRE :
[V] [F] [I]
C/
S.A.R.L. REGARDS
et autre
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juin 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 7]
N° RG : 20/08242
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Camille BROSSEAU-GOTTI,
Me Hervé KEROUREDAN,
Me Anne-Laure DUMEAU
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [V] [F] [I]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Camille BROSSEAU-GOTTI de la SELEURL CAMILLE BROSSEAU-GOTTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 707 et Me Catherine FRANCESCHI de la SELEURL FRANCESCHI AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1525
APPELANT
****************
S.A.R.L. REGARDS
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Hervé KEROUREDAN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 40 et Me Benjamin PORCHER de la SELAS PORCHER ET ASSOCIÉS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G450
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 4], représenté par son syndic en exercice, la SARL REGARDS, sise [Adresse 2]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Anne-Laure DUMEAU de la SELASU ANNE-LAURE DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 et Me Serge SADOUN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0241
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Octobre 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président,
Madame Séverine ROMI, Conseillère,
Madame Marie-Cécile MOULIN-ZYS, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Kalliopi CAPO-CHICHI,
****************
M. [I] est propriétaire des lots n° 2,19, 48 et 49 dans un immeuble soumis au statut de la copropriété sis [Adresse 3] à [Localité 8]. Le lot n° 2 correspond à un appartement en rez-de-chaussée et bénéficie d'un droit de jouissance privatif et exclusif de deux terrasses et de deux jardins. Un litige est survenu au sujet de deux jardinières en maçonnerie basse situées le long de l'allée principale de la copropriété.
Selon ordonnance de référé en date du 22 novembre 2018, le président du Tribunal de grande instance de Nanterre a fait injonction à M. [I] de couvrir ou enlever les canisses se trouvant aux coins de son jardin et à l'entrée de l'immeuble.
Lors de l'assemblée générale de la copropriété en date du 7 septembre 2020, ont été adoptées diverses résolutions à savoir :
- la résolution n° 16 portant sur des travaux d'aménagement de la jardinière droite ;
- la résolution n° 17 portant sur les honoraires du syndic au titre des travaux susvisés ;
- la résolution n° 18 donnant délégation de pouvoir au conseil syndical pour rechercher une offre concurrentielle dans la limite de 3 000 euros TTC au titre des travaux d'aménagement de la jardinière droite.
Ont été rejetées les projets de résolution n° 21 et 22, présentés par M. [I], portant sur l'exécution de travaux de réfection des caniveaux d'évacuation.
Saisi par M. [I] selon exploit daté du 3 novembre 2020, dans le cadre d'une instance l'opposant au syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à Neuilly-sur-Seine, ci-après dénommé 'le syndicat des copropriétaires', et à la SARL Regards, syndic, le Tribunal judiciaire de Nanterre a selon jugement daté du 12 juin 2023 :
- débouté M. [I] de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [I] à payer à la SARL Regards la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [I] aux dépens ;
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé, pour l'essentiel :
- que si M. [I] bénéficiait d'un droit de jouissance privative sur son jardin, tel n'était pas le cas des jardins existant devant et derrière son lot ; que la surface plantée correspondant à l'emprise des deux jardinières constituaient des parties communes ;
- qu'il n'y avait ni nécessité de réaliser les travaux réclamés par le demandeur, ni abus de majorité ;
- que les installations électriques dont M. [I] réclamait la dépose n'affectaient pas le jardin dont il avait la jouissance privative.
Par déclaration en date du 2 août 2023, M. [I] a relevé appel de ce jugement.
En ses conclusions notifiées le 2 septembre 2025, il expose :
- que la partie du terrain commun affectée à la jouissance exclusive de son lot n° 2 comprend une terrasse jouxtant son lot et un jardin, une palissade garnie de végétation étant installée en retrait du périmètre du jardin ;
- que ces végétaux ont été endommagés ;
- que la copropriété persiste à s'approprier une partie de son jardin et a continué à arracher des plantations, y compris après le prononcé du jugement dont appel ; que la palissade en bois a été démolie ; que le caractère privatif de cette palissade et de ces plantations n'a nullement été remis en cause par le jugement ; que le syndicat des copropriétaires a finalement fait poser une nouvelle palissade en bois, en emprise sur le jardin dont il a la jouissance privative ;
- que même si une partie commune à jouissance privative ne constitue pas une partie privative à proprement parler, son droit d'usage est juridiquement protégé et il peut le défendre en justice ;
- que c'est à tort que le tribunal a estimé que le périmètre de son droit de jouissance privatif n'incluait pas la partie du jardin située entre le treillis de bois et la bordure maçonnée de l'allée ;
- qu'aucune deuxième jardinière ne figure sur le plan établi par un géomètre-expert en 1994 ; que ni l'article 2, ni l'article 5 du règlement de copropriété ne permettent de dire que l'emprise de cette prétendue deuxième jardinière constitue une partie commune sans jouissance exclusive ;
- que par ailleurs, le syndicat des copropriétaires a installé dans le jardin dont il a la jouissance privative des spots d'éclairage et des câbles ;
- que la responsabilité de ce dernier est engagée, de même que celle du syndic.
M. [I] demande en conséquence à la Cour de :
- infirmer le jugement ;
- annuler les résolutions n° 16, 17 et 18 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 ;
- condamner le syndicat des copropriétaires à déposer les lampes, spots et câbles électriques installés par lui sur le jardin dont il a la jouissance privative, et ce sous astreinte de 500 euros euros par jour ;
- condamner le syndicat des copropriétaires à déplacer à ses frais la nouvelle clôture qu'il a installée afin de respecter la limite de l'emprise de son droit de jouissance tel que fixé au règlement de copropriété, et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour ;
- débouter le syndicat des copropriétaires de ses prétentions ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 14 459,02 euros en indemnisation de son préjudice matériel ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts en indemnisation de son préjudice moral ;
- le dispenser de toute participation à la dépense commune en vertu de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance, ainsi qu'aux dépens dont recouvrement au profit de Maître Brosseau-Gotti ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux dépens dont recouvrement au profit de Maître Brosseau-Gotti.
Dans ses conclusions notifiées le 20 septembre 2025, le syndicat des copropriétaires réplique :
- que selon l'article 2 du règlement de copropriété, les espaces non bâtis au rez-de-chaussée autres que les accès piétons de l'immeuble en terre-plein sont traités en terrasses et jardins privatifs ; que les espaces plantés non affectés en jouissance privative constituent des parties communes ;
- que le plan du rez-de-chaussée dont M. [I] se prévaut, annexé à l'état descriptif de division, ne lui est pas opposable comme ne comportant pas le cachet du professionnel qui l'a établi, ni sa signature ; qu'en tout état de cause, l'état descriptif de division n'a pas de valeur contractuelle, au contraire du règlement de copropriété auquel d'ailleurs ce plan n'était pas annexé ;
- qu'il existe deux plans différents du rez-de-chaussée ;
- que les deux jardinières sont matériellement rattachées au terre-plein central et constituent la limite naturelle des jardins en jouissance privative ; qu'en 26 ans, M. [I] n'a jamais exercé de jouissance sur ces jardinières, alors que c'est toujours lui qui les a entretenues ;
- que par ailleurs, un syndicat des copropriétaires peut décider de travaux sur des parties communes affectées d'un droit de jouissance privatif ; que tel est le cas de la jardinière de droite ; que c'est à bon droit que l'assemblée générale du 7 septembre 2020 a autorisé le syndic à réaliser des travaux ;
- que quel que soit le statut des jardinières basses, M. [I] ne pouvait pas s'opposer à ces travaux d'entretien ;
- que les spots lumineux ont été installés dans l'intérêt collectif des copropriétaires ;
- que la demande de M. [I] à fin de condamnation du syndicat des copropriétaires à déplacer la nouvelle clôture ne figurait pas dans ses premières conclusions, et est comme telle irrecevable.
Le syndicat des copropriétaires demande en conséquence à la Cour de :
- déclarer irrecevable la demande de M. [I] à fin de condamnation du syndicat des copropriétaires à déplacer la nouvelle clôture sous astreinte ;
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
- condamner M. [I] à lui régler la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Dans ses conclusions du 18 juillet 2025, la SARL Regards soutient :
- que l'action en responsabilité intentée à son encontre par M. [I] n'est pas fondée ;
- que ce n'est qu'en raison de la carence de l'intéressé, qui pourtant avait été relancé, qu'il a pris l'initiative de faire intervenir une entreprise ;
- que les branches de son jardin débordent sur les parties communes ;
- que les demandes indemnitaires de M. [I] doivent être rejetées alors que celle à hauteur de 14 459,02 euros est une demande nouvelle.
La SARL Regards demande en conséquence à la Cour de :
- confirmer le jugement ;
- débouter M. [I] de ses demandes nouvelles ;
- le condamner au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- le condamner aux dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 septembre 2025.
MOTIFS
La résolution n° 16 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 avait pour objet, sous le titre 'décision à prendre quant aux travaux d'aménagement jardinière droite', d'effectuer des travaux d'aménagement de celle-ci suivant un budget s'élevant à 2 648,44 euros TTC, de retenir la proposition de l'entreprise Ferreira Anselme, et d'autoriser le syndic à procéder aux appels de fonds correspondant.
La résolution n° 17 portait sur les honoraires du syndic y relatifs.
La résolution n° 18 portait sur la délégation de pouvoir au conseil syndical à l'effet de procéder au choix de l'entreprise pour les travaux d'aménagement jardinière droite.
M. [I] est propriétaire des lots n° 2, 19 et 49, le lot n° 2 correspondant à un appartement sur rez-de-chaussée et premier étage et le droit de jouissance exclusif de deux terrasses et de deux jardins. Il en résulte nécessairement que ces derniers constituent des parties communes, même si leur usage est privatif. L'article 2 du chapitre 1 de la première partie de l'état descriptif de division et règlement de copropriété notarié daté du 15 novembre 1994, intitulé 'description de l'immeuble', dispose que les espaces non bâtis en rez-de-chaussée autres que les accès piétons à l'immeuble et un terre-plein séparant l'accès principal de la rampe 'handicapés' sont traités en terrasses et jardins privatifs. L'article 5 du chapitre 2 de ce document prévoit que constituent des parties communes celles qui sont affectées à l'usage ou l'utilité de tous les copropriétaires (parties communes générales) ou de certains d'entre eux ( parties communes spéciales). Les premières comprennent notamment, ainsi qu'il est mentionné en page 18, les abords des constructions (voie d'accès et de circulation piétons, rampes d'accès aux parkings, accès handicapés, éclairage extérieur).
M. [I] soutient que la partie située entre la bordure maçonnée de l'allée et le treillis en bois, au travers duquel des végétaux ont poussé, que le promoteur avait installé afin de garantir son intimité, font partie de l'assiette de sa jouissance privative, puisque la palissade est installée en retrait de la délimitation du jardin, alors que le syndicat des copropriétaires soutient qu'il s'agit là d'une deuxième jardinière et que les végétaux appartenant à M. [I] et qui traversent le treillis dont il a été fait état plus haut empiétaient sur les parties communes, et même sur la voirie.
Au vu des photographies produites, il s'avère que ce que le syndicat des copropriétaires appelle 'jardinière' est en réalité un espace rempli de terre, situé entre la palissade et l'allée de passage en dur, qui en est séparé par un muret.
L'acte authentique du 15 novembre 1994 susvisé comportait en page 40 un paragraphe intitulé 'plans' selon lequel étaient annexés, après avoir été certifiés sincères et véritables par le requérant (ie la Société pour la réhabilitation, l'aménagement et la construction) les plans du rez-de-chaussée, de tous les étages et ceux du sous-sol. Ces plans avaient été réalisés par le cabinet [W], géomètre-expert DPLG à [Localité 9]. Contrairement à ce qu'avance le syndicat des copropriétaires, ils émanent bien d'un géomètre-expert, conformément aux dispositions de l'article 1 1°) de la loi du 7 mai 1946. Et il importe peu qu'ils ne soient pas signés ou tamponnés vu qu'ils sont annexés à l'acte notarié et certifiés conforme. A l'examen du plan du rez-de-chaussée, il appert qu'une ligne en pointillés rouges délimite les parties privatives de M. [I] ainsi que le jardin à jouissance privative. Une double ligne matérialise le muret dont il a été fait état supra. Ce jardin et ce muret sont ainsi immédiatement jointifs. Sur ce plan est d'ailleurs visible, en prolongement, une jardinière dont la jouissance n'est pas réservée au demandeur. Les attestations produites par le syndicat des copropriétaires, si elles indiquent que la jardinière existait à droite de l'entrée, ne démontrent pas pour autant que ladite 'jardinière'constituait une partie commune dont M. [I] n'a pas la jouissance privative.
Il s'ensuit que les parties communes à jouissance privative dont M. [I] bénéficie s'étendent jusqu'audit muret, et par voie de conséquence que tout ce qui se trouve derrière lui fait partie de l'assiette de cette jouissance.
Cet emplacement, qui appartient indivisément à tous les copropriétaires même si M. [I] en a la jouissance exclusive, doit en principe être entretenu par le syndicat des copropriétaires ; ce dernier fait valoir dans ses écritures qu'il s'en est toujours chargé, mais M. [I] le conteste en affirmant notamment que depuis son acquisition il a toujours fait appel à son propre jardinier pour entretenir les plantations situées de part et d'autre du treillis. Une attestation de Mme [E] indique qu'effectivement, c'était M. [I] qui faisait entretenir ce jardin.
L'article figurant en page 59 (n° 19) du règlement de copropriété n'est pas applicable comme concernant uniquement les parties privatives.
Un autre article du règlement de copropriété (page 84) intitulé 'entretien des jardins privatifs', dont la rédaction maladroite fait penser à des parties privatives mais il s'avère qu'il vise, en réalité, les jardins dont un copropriétaire a seulement la jouissance ce qui infère nécessairement que ledit article vise des parties communes à jouissance privative, stipule que :
Les jardins privatifs et leurs plantations participant à l'harmonie et l'agrément de leur immeuble, le copropriétaire ayant un droit de jouissance d'un jardin aura personnellement la charge de son nettoyage et de son entretien, étant stipulé qu'il ne devra en aucun cas, sans l'accord préalable du syndic, changer la nature des végétaux ou des plantations existant. Ces plantations, participant à l'harmonie de l'immeuble, devront toujours être tenues en bon état, en fonction des saisons. En cas de carence (dûment constatée à l'expiration d'un délai de deux mois, après mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception restée sans effet), le syndic a le droit de faire procéder à tous travaux de nettoyage et d'entretien aux frais du copropriétaire ainsi défaillant. Il est ici précisé que l'arrosage et l'entretien sont à la charge exclusive du copropriétaire en ayant la jouissance privative.
M. [I] a été destinataire de trois lettres recommandées avec avis de réception du syndicat des copropriétaires :
- celle du 7 février 2018 où il lui était rappelé que le seul travail qui avait été entrepris était l'élagage et le remplacement des végétaux, réalisé par l'entreprise Ferreira, ainsi que la mise en place de minéraux dans les jardinières ; il lui était fait reproche d'avoir manqué à son obligation d'entretien ;
- celle du 1er juin 2018 où il lui était reproché de ne pas avoir entretenu le lierre et les autres plantes qui dépassaient sur les parties communes ; il lui était demandé de rabattre à moins de deux mètres de hauteur la haie séparant son espace des parties communes, d'enlever les canisses (cette dernière demande donnera lieu au prononcé de l'ordonnance de référé du 22 novembre 2018 ayant fait injonction à M. [I] de couvrir ou enlever ces canisses se trouvant aux coins de son jardin et à l'entrée de l'immeuble), et de tailler le lierre ;
- celle du 12 juin 2018 où il était question d'autres difficultés.
Force est de constater que M. [I] n'a pas été mis en demeure de s'exécuter, avec octroi d'un délai de deux mois pour ce faire, comme il était prévu au règlement de copropriété, puisque c'est le 25 janvier 2018, soit avant les mises en demeure, que le syndicat des copropriétaires a fait procéder aux travaux. Or, dès lors que les végétaux litigieux n'empiétaient pas sur des parties communes à usage collectif, mais étaient situés sur celles dont l'appelant a la jouissance privative, le syndicat des copropriétaires ne pouvait pas retirer ces végétaux d'autorité et était tenu de mettre préalablement l'appelant en demeure de le faire, et ce, à supposer que ces travaux soient nécessaires.
Il convient en conséquence, par infirmation du jugement, d'annuler la résolution n° 16, et par voie de conséquence les résolutions n° 17 et 18 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020.
M. [I] demande à la Cour de condamner le syndicat des copropriétaires à déposer les lampes, spots et câbles électriques installés par lui sur le jardin dont il a la jouissance privative, et ce sous astreinte. Ces travaux d'éclairage ont été réalisés dans l'intérêt de la copropriété, ainsi que l'a relevé le tribunal, mais il résulte de ce qui précède que ces éléments ont été disposés sur des parties communes dont l'appelant a la jouissance exclusive ; par ailleurs le règlement de copropriété ne prévoyait nullement la possibilité, pour le syndicat des copropriétaires, d'y installer des équipements. Il échet en conséquence, par infirmation du jugement, de faire droit à la demande de M. [I] ainsi qu'il sera dit au dispositif, et d'assortir la condamnation du syndicat des copropriétaires à s'exécuter d'une astreinte.
M. [I] réclame, encore, sa condamnation à déplacer à ses frais la nouvelle clôture qu'il a installée afin de respecter la limite de l'emprise de son droit de jouissance tel que fixé au règlement de copropriété, sous astreinte. Le syndicat des copropriétaires fait plaider que cette demande n'est pas recevable.
Selon l'article 910-4 du code de procédure civile, en sa version alors applicable,
à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
La demande susvisée, qui n'avait pas été formulée dans les premières conclusions d'appelant du 30 octobre 2023, se fonde sur la circonstance qu'au mois de juillet 2025, le syndicat des copropriétaires a fait installer une nouvelle palissade en bois. Elle se fonde dès lors sur la révélation d'un fait postérieur aux premières conclusions d'appel, et est donc recevable.
Il résulte des photographies produites qu'une nouvelle palissade en bois a été installée, en deça de la limite séparative des parties communes dont le demandeur a la jouissance exlusive, à l'intérieur de la prétendue jardinière. Le syndicat des copropriétaires sera donc condamné à la retirer, et ce sous astreinte.
M. [I] sollicite la réparation de divers préjudices consécutifs aux faits de la cause.
Il résulte de la lecture d'un procès-verbal de constat en date du 29 janvier 2018 que plusieurs tiges et branches qui traversaient le treillis ont été récemment coupées, de même qu'un rosier ; un autre procès-verbal de constat en date du 2 octobre 2024 montre que la clôture en bois est fortement détériorée, des baguettes de bois la composant étant sectionnées, cassées ou enlevées, l'ouvrage ne tenant plus et étant maintenu par des moyens de fortune, tandis que des végétaux sont coupés ou même tronçonnés ; un amas de végétaux disposés en vrac à proximité démontre que tout cela a été fait récemment. De toute évidence c'est le syndicat des copropriétaires, qui avait du reste reconnu dans sa lettre du 7 février 2018 qu'il avait fait intervenir une entreprise pour remplacer les plantations, et qui ensuite a agi en vertu de l'assemblée générale du 7 septembre 2020, qui est à l'origine de cette situation. Un témoin, M. [P] le confirme.
Quant au syndic, la SARL Regards, sa responsabilité ne peut être que délictuelle vu qu'il n'est pas lié à M. [I] par un contrat, ce qui suppose la démonstration d'une faute. Il ne peut lui être reproché d'avoir exécuté la résolution n° 16 susvisée puisqu'il entre dans sa mission de le faire, et que nonobstant sa contestation en justice ladite résolution demeurait exécutoire ; elle le restait d'ailleurs après le prononcé du jugement dont appel qui rejetait sa demande d'annulation. Par contre le syndic, antérieurement à l'assemblée générale susvisée, n'a pas respecté le règlement de copropriété, ainsi qu'il a été indiqué supra. Dans ces conditions, le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards seront condamnés in solidum au paiement des sommes dues, mais dans la contribution à la dette ladite SARL ne sera tenue qu'au tiers des sommes.
M. [I] sollicite l'allocation de la somme de 14 459,02 euros au titre de son préjudice matériel ; le syndic soutient qu'il s'agit là d'une demande nouvelle.
Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. L'article 566 permet toutefois aux parties d'ajouter aux prétentions soumises au premier juge des demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Devant le tribunal, M. [I] n'avait réclamé, aux termes de ses conclusions notifiées le 21 juin 2021, que la somme de 6 479,40 euros s'agissant de son préjudice matériel. Or il a produit une nouvelle pièce, à savoir un devis daté du 3 novembre 2024, postérieur au prononcé du jugement ; en outre il allègue des dégradations qui se sont commises au cours de l'instance d'appel. Il faut donc considérer que l'actualisation de sa demande en paiement se fonde sur la survenance ou la révélation d'un fait au sens du texte susvisé. Ladite demande est dès lors recevable.
M. [I] verse aux débats :
- un devis daté du 23 février 2018, d'un montant de 5 475 euros, relatif à la pose d'un lierre, de rosiers, avec enlèvement des souches et plantation de nouveaux végétaux ;
- une facture de l'entreprise Benji Paysage datée du 3 août 2020, d'un montant de 1 004,40 euros, relative à la fourniture de terreau, et à l'implantation d'arbustes et de fleurs ;
- un devis de la même entreprise daté du 3 novembre 2024, d'un montant de 7 979,62 euros, relatif à la démolition de la clôture existante, la taille et le nettoyage de la zone, l'installation d'un treillis et de poteaux, et la plantation de végétaux.
Le premier devis, établi à une époque où les derniers travaux n'avaient pas encore été réalisés par le syndicat des copropriétaires, ne sera pas retenu comme ne correspondant pas à la situation actuelle et faisant même double emploi avec les deux autres. En revanche la facture et le deuxième devis seront retenus. Les intimés seront ainsi condamnés in solidum au paiement de la somme de 8 984,02 euros.
M. [I] réclame, encore, la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral. Ce conflit dure depuis des années, et l'intéressé n'a eu de cesse d'envoyer des courriers au syndic et de recevoir des réponses inadaptées, sans jamais obtenir satisfaction, alors qu'il résulte de ce qui précède que ses prétentions étaient fondées. Il en est résulté un état d'anxiété important mis en évidence par un certificat médical en date du 6 juin 2018. Par contre il doit être tenu compte de ce que le bien en copropriété en litige ne constitue qu'une résidence secondaire de l'appelant, l'intéressé résidant le plus souvent à [Localité 10].
Le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards seront condamnés in solidum au paiement de la somme de 4 000 euros de ce chef.
Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires et la SARL Regards la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile chacun, ainsi qu'aux dépens.
Le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards, qui succombent, seront condamnés in solidum au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance, de la même somme au titre de ceux d'appel, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
La distraction des dépens, en vertu de l'article 699 du code de procédure civile, ne sera ordonnée au bénéfice de Maître Brosseau-Gotti que pour les dépens d'appel, car l'intéressée ne représentait pas M. [I] devant le Tribunal judiciaire de Nanterre.
En application de l'article 10-1 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, le copropriétaire qui, à l'issue d'une instance judiciaire l'opposant au syndicat, voit sa prétention déclarée fondée par le juge, est dispensé, même en l'absence de demande de sa part, de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires. Il convient en conséquence de dispenser M. [I] de participation à la dépense commune liée à la présente affaire.
PAR CES MOTIFS
- INFIRME le jugement en date du 12 juin 2023 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :
* débouté M. [V] [I] de sa demande en nullité des résolutions n° 21 et 22 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 ;
* débouté M. [V] [I] de sa demande au titre des travaux de réparation des caniveaux d'évacuation des eaux pluviales ;
et statuant à nouveau :
- ANNULE les résolutions n° 16, 17 et 18 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards à payer à M. [V] [I] les sommes suivantes :
* 8 984,02 euros au titre du préjudice matériel ;
* 4 000 euros au titre du préjudice moral ;
- DIT que dans la contribution à la dette, la SARL Regards sera tenue au paiement du tiers de celle-ci ;
- CONDAMNE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] à déposer les lampes, spots et câbles électriques installés par lui dans les parties communes dont M. [V] [I] a la jouissance privative, et ce sous astreinte journalière de 150 euros ;
- DIT que cette astreinte commencera à courir deux mois après la signification du présent arrêt ;
- CONDAMNE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] à déposer la nouvelle clôture qu'il a fait installer dans les parties communes dont M. [V] [I] a la jouissance privative, et ce sous astreinte journalière de 150 euros ;
- DIT que cette astreinte commencera à courir deux mois après la signification du présent arrêt ;
- CONFIRME le jugement pour le surplus ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards à payer à M. [V] [I] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards à payer à M. [V] [I] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards aux dépens de première instance et d'appel ;
- ACCORDE à Maître Brosseau-Gotti le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile du chef des dépens d'appel ;
- DISPENSE M. [V] [I] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure tant de première instance que d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président et par Madame Kalliopi CAPO-CHICHI, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
DE
VERSAILLES
Code nac : 71F
Ch civ. 1-4 copropriété
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 25 NOVEMBRE 2025
N° RG 23/05815 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WBAV
AFFAIRE :
[V] [F] [I]
C/
S.A.R.L. REGARDS
et autre
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Juin 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 7]
N° RG : 20/08242
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Camille BROSSEAU-GOTTI,
Me Hervé KEROUREDAN,
Me Anne-Laure DUMEAU
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [V] [F] [I]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Camille BROSSEAU-GOTTI de la SELEURL CAMILLE BROSSEAU-GOTTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 707 et Me Catherine FRANCESCHI de la SELEURL FRANCESCHI AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1525
APPELANT
****************
S.A.R.L. REGARDS
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Hervé KEROUREDAN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 40 et Me Benjamin PORCHER de la SELAS PORCHER ET ASSOCIÉS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G450
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 4], représenté par son syndic en exercice, la SARL REGARDS, sise [Adresse 2]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Anne-Laure DUMEAU de la SELASU ANNE-LAURE DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 et Me Serge SADOUN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0241
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Octobre 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président,
Madame Séverine ROMI, Conseillère,
Madame Marie-Cécile MOULIN-ZYS, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Kalliopi CAPO-CHICHI,
****************
M. [I] est propriétaire des lots n° 2,19, 48 et 49 dans un immeuble soumis au statut de la copropriété sis [Adresse 3] à [Localité 8]. Le lot n° 2 correspond à un appartement en rez-de-chaussée et bénéficie d'un droit de jouissance privatif et exclusif de deux terrasses et de deux jardins. Un litige est survenu au sujet de deux jardinières en maçonnerie basse situées le long de l'allée principale de la copropriété.
Selon ordonnance de référé en date du 22 novembre 2018, le président du Tribunal de grande instance de Nanterre a fait injonction à M. [I] de couvrir ou enlever les canisses se trouvant aux coins de son jardin et à l'entrée de l'immeuble.
Lors de l'assemblée générale de la copropriété en date du 7 septembre 2020, ont été adoptées diverses résolutions à savoir :
- la résolution n° 16 portant sur des travaux d'aménagement de la jardinière droite ;
- la résolution n° 17 portant sur les honoraires du syndic au titre des travaux susvisés ;
- la résolution n° 18 donnant délégation de pouvoir au conseil syndical pour rechercher une offre concurrentielle dans la limite de 3 000 euros TTC au titre des travaux d'aménagement de la jardinière droite.
Ont été rejetées les projets de résolution n° 21 et 22, présentés par M. [I], portant sur l'exécution de travaux de réfection des caniveaux d'évacuation.
Saisi par M. [I] selon exploit daté du 3 novembre 2020, dans le cadre d'une instance l'opposant au syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à Neuilly-sur-Seine, ci-après dénommé 'le syndicat des copropriétaires', et à la SARL Regards, syndic, le Tribunal judiciaire de Nanterre a selon jugement daté du 12 juin 2023 :
- débouté M. [I] de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [I] à payer à la SARL Regards la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [I] aux dépens ;
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé, pour l'essentiel :
- que si M. [I] bénéficiait d'un droit de jouissance privative sur son jardin, tel n'était pas le cas des jardins existant devant et derrière son lot ; que la surface plantée correspondant à l'emprise des deux jardinières constituaient des parties communes ;
- qu'il n'y avait ni nécessité de réaliser les travaux réclamés par le demandeur, ni abus de majorité ;
- que les installations électriques dont M. [I] réclamait la dépose n'affectaient pas le jardin dont il avait la jouissance privative.
Par déclaration en date du 2 août 2023, M. [I] a relevé appel de ce jugement.
En ses conclusions notifiées le 2 septembre 2025, il expose :
- que la partie du terrain commun affectée à la jouissance exclusive de son lot n° 2 comprend une terrasse jouxtant son lot et un jardin, une palissade garnie de végétation étant installée en retrait du périmètre du jardin ;
- que ces végétaux ont été endommagés ;
- que la copropriété persiste à s'approprier une partie de son jardin et a continué à arracher des plantations, y compris après le prononcé du jugement dont appel ; que la palissade en bois a été démolie ; que le caractère privatif de cette palissade et de ces plantations n'a nullement été remis en cause par le jugement ; que le syndicat des copropriétaires a finalement fait poser une nouvelle palissade en bois, en emprise sur le jardin dont il a la jouissance privative ;
- que même si une partie commune à jouissance privative ne constitue pas une partie privative à proprement parler, son droit d'usage est juridiquement protégé et il peut le défendre en justice ;
- que c'est à tort que le tribunal a estimé que le périmètre de son droit de jouissance privatif n'incluait pas la partie du jardin située entre le treillis de bois et la bordure maçonnée de l'allée ;
- qu'aucune deuxième jardinière ne figure sur le plan établi par un géomètre-expert en 1994 ; que ni l'article 2, ni l'article 5 du règlement de copropriété ne permettent de dire que l'emprise de cette prétendue deuxième jardinière constitue une partie commune sans jouissance exclusive ;
- que par ailleurs, le syndicat des copropriétaires a installé dans le jardin dont il a la jouissance privative des spots d'éclairage et des câbles ;
- que la responsabilité de ce dernier est engagée, de même que celle du syndic.
M. [I] demande en conséquence à la Cour de :
- infirmer le jugement ;
- annuler les résolutions n° 16, 17 et 18 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 ;
- condamner le syndicat des copropriétaires à déposer les lampes, spots et câbles électriques installés par lui sur le jardin dont il a la jouissance privative, et ce sous astreinte de 500 euros euros par jour ;
- condamner le syndicat des copropriétaires à déplacer à ses frais la nouvelle clôture qu'il a installée afin de respecter la limite de l'emprise de son droit de jouissance tel que fixé au règlement de copropriété, et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour ;
- débouter le syndicat des copropriétaires de ses prétentions ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 14 459,02 euros en indemnisation de son préjudice matériel ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts en indemnisation de son préjudice moral ;
- le dispenser de toute participation à la dépense commune en vertu de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance, ainsi qu'aux dépens dont recouvrement au profit de Maître Brosseau-Gotti ;
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux dépens dont recouvrement au profit de Maître Brosseau-Gotti.
Dans ses conclusions notifiées le 20 septembre 2025, le syndicat des copropriétaires réplique :
- que selon l'article 2 du règlement de copropriété, les espaces non bâtis au rez-de-chaussée autres que les accès piétons de l'immeuble en terre-plein sont traités en terrasses et jardins privatifs ; que les espaces plantés non affectés en jouissance privative constituent des parties communes ;
- que le plan du rez-de-chaussée dont M. [I] se prévaut, annexé à l'état descriptif de division, ne lui est pas opposable comme ne comportant pas le cachet du professionnel qui l'a établi, ni sa signature ; qu'en tout état de cause, l'état descriptif de division n'a pas de valeur contractuelle, au contraire du règlement de copropriété auquel d'ailleurs ce plan n'était pas annexé ;
- qu'il existe deux plans différents du rez-de-chaussée ;
- que les deux jardinières sont matériellement rattachées au terre-plein central et constituent la limite naturelle des jardins en jouissance privative ; qu'en 26 ans, M. [I] n'a jamais exercé de jouissance sur ces jardinières, alors que c'est toujours lui qui les a entretenues ;
- que par ailleurs, un syndicat des copropriétaires peut décider de travaux sur des parties communes affectées d'un droit de jouissance privatif ; que tel est le cas de la jardinière de droite ; que c'est à bon droit que l'assemblée générale du 7 septembre 2020 a autorisé le syndic à réaliser des travaux ;
- que quel que soit le statut des jardinières basses, M. [I] ne pouvait pas s'opposer à ces travaux d'entretien ;
- que les spots lumineux ont été installés dans l'intérêt collectif des copropriétaires ;
- que la demande de M. [I] à fin de condamnation du syndicat des copropriétaires à déplacer la nouvelle clôture ne figurait pas dans ses premières conclusions, et est comme telle irrecevable.
Le syndicat des copropriétaires demande en conséquence à la Cour de :
- déclarer irrecevable la demande de M. [I] à fin de condamnation du syndicat des copropriétaires à déplacer la nouvelle clôture sous astreinte ;
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
- condamner M. [I] à lui régler la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Dans ses conclusions du 18 juillet 2025, la SARL Regards soutient :
- que l'action en responsabilité intentée à son encontre par M. [I] n'est pas fondée ;
- que ce n'est qu'en raison de la carence de l'intéressé, qui pourtant avait été relancé, qu'il a pris l'initiative de faire intervenir une entreprise ;
- que les branches de son jardin débordent sur les parties communes ;
- que les demandes indemnitaires de M. [I] doivent être rejetées alors que celle à hauteur de 14 459,02 euros est une demande nouvelle.
La SARL Regards demande en conséquence à la Cour de :
- confirmer le jugement ;
- débouter M. [I] de ses demandes nouvelles ;
- le condamner au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- le condamner aux dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 septembre 2025.
MOTIFS
La résolution n° 16 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 avait pour objet, sous le titre 'décision à prendre quant aux travaux d'aménagement jardinière droite', d'effectuer des travaux d'aménagement de celle-ci suivant un budget s'élevant à 2 648,44 euros TTC, de retenir la proposition de l'entreprise Ferreira Anselme, et d'autoriser le syndic à procéder aux appels de fonds correspondant.
La résolution n° 17 portait sur les honoraires du syndic y relatifs.
La résolution n° 18 portait sur la délégation de pouvoir au conseil syndical à l'effet de procéder au choix de l'entreprise pour les travaux d'aménagement jardinière droite.
M. [I] est propriétaire des lots n° 2, 19 et 49, le lot n° 2 correspondant à un appartement sur rez-de-chaussée et premier étage et le droit de jouissance exclusif de deux terrasses et de deux jardins. Il en résulte nécessairement que ces derniers constituent des parties communes, même si leur usage est privatif. L'article 2 du chapitre 1 de la première partie de l'état descriptif de division et règlement de copropriété notarié daté du 15 novembre 1994, intitulé 'description de l'immeuble', dispose que les espaces non bâtis en rez-de-chaussée autres que les accès piétons à l'immeuble et un terre-plein séparant l'accès principal de la rampe 'handicapés' sont traités en terrasses et jardins privatifs. L'article 5 du chapitre 2 de ce document prévoit que constituent des parties communes celles qui sont affectées à l'usage ou l'utilité de tous les copropriétaires (parties communes générales) ou de certains d'entre eux ( parties communes spéciales). Les premières comprennent notamment, ainsi qu'il est mentionné en page 18, les abords des constructions (voie d'accès et de circulation piétons, rampes d'accès aux parkings, accès handicapés, éclairage extérieur).
M. [I] soutient que la partie située entre la bordure maçonnée de l'allée et le treillis en bois, au travers duquel des végétaux ont poussé, que le promoteur avait installé afin de garantir son intimité, font partie de l'assiette de sa jouissance privative, puisque la palissade est installée en retrait de la délimitation du jardin, alors que le syndicat des copropriétaires soutient qu'il s'agit là d'une deuxième jardinière et que les végétaux appartenant à M. [I] et qui traversent le treillis dont il a été fait état plus haut empiétaient sur les parties communes, et même sur la voirie.
Au vu des photographies produites, il s'avère que ce que le syndicat des copropriétaires appelle 'jardinière' est en réalité un espace rempli de terre, situé entre la palissade et l'allée de passage en dur, qui en est séparé par un muret.
L'acte authentique du 15 novembre 1994 susvisé comportait en page 40 un paragraphe intitulé 'plans' selon lequel étaient annexés, après avoir été certifiés sincères et véritables par le requérant (ie la Société pour la réhabilitation, l'aménagement et la construction) les plans du rez-de-chaussée, de tous les étages et ceux du sous-sol. Ces plans avaient été réalisés par le cabinet [W], géomètre-expert DPLG à [Localité 9]. Contrairement à ce qu'avance le syndicat des copropriétaires, ils émanent bien d'un géomètre-expert, conformément aux dispositions de l'article 1 1°) de la loi du 7 mai 1946. Et il importe peu qu'ils ne soient pas signés ou tamponnés vu qu'ils sont annexés à l'acte notarié et certifiés conforme. A l'examen du plan du rez-de-chaussée, il appert qu'une ligne en pointillés rouges délimite les parties privatives de M. [I] ainsi que le jardin à jouissance privative. Une double ligne matérialise le muret dont il a été fait état supra. Ce jardin et ce muret sont ainsi immédiatement jointifs. Sur ce plan est d'ailleurs visible, en prolongement, une jardinière dont la jouissance n'est pas réservée au demandeur. Les attestations produites par le syndicat des copropriétaires, si elles indiquent que la jardinière existait à droite de l'entrée, ne démontrent pas pour autant que ladite 'jardinière'constituait une partie commune dont M. [I] n'a pas la jouissance privative.
Il s'ensuit que les parties communes à jouissance privative dont M. [I] bénéficie s'étendent jusqu'audit muret, et par voie de conséquence que tout ce qui se trouve derrière lui fait partie de l'assiette de cette jouissance.
Cet emplacement, qui appartient indivisément à tous les copropriétaires même si M. [I] en a la jouissance exclusive, doit en principe être entretenu par le syndicat des copropriétaires ; ce dernier fait valoir dans ses écritures qu'il s'en est toujours chargé, mais M. [I] le conteste en affirmant notamment que depuis son acquisition il a toujours fait appel à son propre jardinier pour entretenir les plantations situées de part et d'autre du treillis. Une attestation de Mme [E] indique qu'effectivement, c'était M. [I] qui faisait entretenir ce jardin.
L'article figurant en page 59 (n° 19) du règlement de copropriété n'est pas applicable comme concernant uniquement les parties privatives.
Un autre article du règlement de copropriété (page 84) intitulé 'entretien des jardins privatifs', dont la rédaction maladroite fait penser à des parties privatives mais il s'avère qu'il vise, en réalité, les jardins dont un copropriétaire a seulement la jouissance ce qui infère nécessairement que ledit article vise des parties communes à jouissance privative, stipule que :
Les jardins privatifs et leurs plantations participant à l'harmonie et l'agrément de leur immeuble, le copropriétaire ayant un droit de jouissance d'un jardin aura personnellement la charge de son nettoyage et de son entretien, étant stipulé qu'il ne devra en aucun cas, sans l'accord préalable du syndic, changer la nature des végétaux ou des plantations existant. Ces plantations, participant à l'harmonie de l'immeuble, devront toujours être tenues en bon état, en fonction des saisons. En cas de carence (dûment constatée à l'expiration d'un délai de deux mois, après mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception restée sans effet), le syndic a le droit de faire procéder à tous travaux de nettoyage et d'entretien aux frais du copropriétaire ainsi défaillant. Il est ici précisé que l'arrosage et l'entretien sont à la charge exclusive du copropriétaire en ayant la jouissance privative.
M. [I] a été destinataire de trois lettres recommandées avec avis de réception du syndicat des copropriétaires :
- celle du 7 février 2018 où il lui était rappelé que le seul travail qui avait été entrepris était l'élagage et le remplacement des végétaux, réalisé par l'entreprise Ferreira, ainsi que la mise en place de minéraux dans les jardinières ; il lui était fait reproche d'avoir manqué à son obligation d'entretien ;
- celle du 1er juin 2018 où il lui était reproché de ne pas avoir entretenu le lierre et les autres plantes qui dépassaient sur les parties communes ; il lui était demandé de rabattre à moins de deux mètres de hauteur la haie séparant son espace des parties communes, d'enlever les canisses (cette dernière demande donnera lieu au prononcé de l'ordonnance de référé du 22 novembre 2018 ayant fait injonction à M. [I] de couvrir ou enlever ces canisses se trouvant aux coins de son jardin et à l'entrée de l'immeuble), et de tailler le lierre ;
- celle du 12 juin 2018 où il était question d'autres difficultés.
Force est de constater que M. [I] n'a pas été mis en demeure de s'exécuter, avec octroi d'un délai de deux mois pour ce faire, comme il était prévu au règlement de copropriété, puisque c'est le 25 janvier 2018, soit avant les mises en demeure, que le syndicat des copropriétaires a fait procéder aux travaux. Or, dès lors que les végétaux litigieux n'empiétaient pas sur des parties communes à usage collectif, mais étaient situés sur celles dont l'appelant a la jouissance privative, le syndicat des copropriétaires ne pouvait pas retirer ces végétaux d'autorité et était tenu de mettre préalablement l'appelant en demeure de le faire, et ce, à supposer que ces travaux soient nécessaires.
Il convient en conséquence, par infirmation du jugement, d'annuler la résolution n° 16, et par voie de conséquence les résolutions n° 17 et 18 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020.
M. [I] demande à la Cour de condamner le syndicat des copropriétaires à déposer les lampes, spots et câbles électriques installés par lui sur le jardin dont il a la jouissance privative, et ce sous astreinte. Ces travaux d'éclairage ont été réalisés dans l'intérêt de la copropriété, ainsi que l'a relevé le tribunal, mais il résulte de ce qui précède que ces éléments ont été disposés sur des parties communes dont l'appelant a la jouissance exclusive ; par ailleurs le règlement de copropriété ne prévoyait nullement la possibilité, pour le syndicat des copropriétaires, d'y installer des équipements. Il échet en conséquence, par infirmation du jugement, de faire droit à la demande de M. [I] ainsi qu'il sera dit au dispositif, et d'assortir la condamnation du syndicat des copropriétaires à s'exécuter d'une astreinte.
M. [I] réclame, encore, sa condamnation à déplacer à ses frais la nouvelle clôture qu'il a installée afin de respecter la limite de l'emprise de son droit de jouissance tel que fixé au règlement de copropriété, sous astreinte. Le syndicat des copropriétaires fait plaider que cette demande n'est pas recevable.
Selon l'article 910-4 du code de procédure civile, en sa version alors applicable,
à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
La demande susvisée, qui n'avait pas été formulée dans les premières conclusions d'appelant du 30 octobre 2023, se fonde sur la circonstance qu'au mois de juillet 2025, le syndicat des copropriétaires a fait installer une nouvelle palissade en bois. Elle se fonde dès lors sur la révélation d'un fait postérieur aux premières conclusions d'appel, et est donc recevable.
Il résulte des photographies produites qu'une nouvelle palissade en bois a été installée, en deça de la limite séparative des parties communes dont le demandeur a la jouissance exlusive, à l'intérieur de la prétendue jardinière. Le syndicat des copropriétaires sera donc condamné à la retirer, et ce sous astreinte.
M. [I] sollicite la réparation de divers préjudices consécutifs aux faits de la cause.
Il résulte de la lecture d'un procès-verbal de constat en date du 29 janvier 2018 que plusieurs tiges et branches qui traversaient le treillis ont été récemment coupées, de même qu'un rosier ; un autre procès-verbal de constat en date du 2 octobre 2024 montre que la clôture en bois est fortement détériorée, des baguettes de bois la composant étant sectionnées, cassées ou enlevées, l'ouvrage ne tenant plus et étant maintenu par des moyens de fortune, tandis que des végétaux sont coupés ou même tronçonnés ; un amas de végétaux disposés en vrac à proximité démontre que tout cela a été fait récemment. De toute évidence c'est le syndicat des copropriétaires, qui avait du reste reconnu dans sa lettre du 7 février 2018 qu'il avait fait intervenir une entreprise pour remplacer les plantations, et qui ensuite a agi en vertu de l'assemblée générale du 7 septembre 2020, qui est à l'origine de cette situation. Un témoin, M. [P] le confirme.
Quant au syndic, la SARL Regards, sa responsabilité ne peut être que délictuelle vu qu'il n'est pas lié à M. [I] par un contrat, ce qui suppose la démonstration d'une faute. Il ne peut lui être reproché d'avoir exécuté la résolution n° 16 susvisée puisqu'il entre dans sa mission de le faire, et que nonobstant sa contestation en justice ladite résolution demeurait exécutoire ; elle le restait d'ailleurs après le prononcé du jugement dont appel qui rejetait sa demande d'annulation. Par contre le syndic, antérieurement à l'assemblée générale susvisée, n'a pas respecté le règlement de copropriété, ainsi qu'il a été indiqué supra. Dans ces conditions, le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards seront condamnés in solidum au paiement des sommes dues, mais dans la contribution à la dette ladite SARL ne sera tenue qu'au tiers des sommes.
M. [I] sollicite l'allocation de la somme de 14 459,02 euros au titre de son préjudice matériel ; le syndic soutient qu'il s'agit là d'une demande nouvelle.
Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. L'article 566 permet toutefois aux parties d'ajouter aux prétentions soumises au premier juge des demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Devant le tribunal, M. [I] n'avait réclamé, aux termes de ses conclusions notifiées le 21 juin 2021, que la somme de 6 479,40 euros s'agissant de son préjudice matériel. Or il a produit une nouvelle pièce, à savoir un devis daté du 3 novembre 2024, postérieur au prononcé du jugement ; en outre il allègue des dégradations qui se sont commises au cours de l'instance d'appel. Il faut donc considérer que l'actualisation de sa demande en paiement se fonde sur la survenance ou la révélation d'un fait au sens du texte susvisé. Ladite demande est dès lors recevable.
M. [I] verse aux débats :
- un devis daté du 23 février 2018, d'un montant de 5 475 euros, relatif à la pose d'un lierre, de rosiers, avec enlèvement des souches et plantation de nouveaux végétaux ;
- une facture de l'entreprise Benji Paysage datée du 3 août 2020, d'un montant de 1 004,40 euros, relative à la fourniture de terreau, et à l'implantation d'arbustes et de fleurs ;
- un devis de la même entreprise daté du 3 novembre 2024, d'un montant de 7 979,62 euros, relatif à la démolition de la clôture existante, la taille et le nettoyage de la zone, l'installation d'un treillis et de poteaux, et la plantation de végétaux.
Le premier devis, établi à une époque où les derniers travaux n'avaient pas encore été réalisés par le syndicat des copropriétaires, ne sera pas retenu comme ne correspondant pas à la situation actuelle et faisant même double emploi avec les deux autres. En revanche la facture et le deuxième devis seront retenus. Les intimés seront ainsi condamnés in solidum au paiement de la somme de 8 984,02 euros.
M. [I] réclame, encore, la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral. Ce conflit dure depuis des années, et l'intéressé n'a eu de cesse d'envoyer des courriers au syndic et de recevoir des réponses inadaptées, sans jamais obtenir satisfaction, alors qu'il résulte de ce qui précède que ses prétentions étaient fondées. Il en est résulté un état d'anxiété important mis en évidence par un certificat médical en date du 6 juin 2018. Par contre il doit être tenu compte de ce que le bien en copropriété en litige ne constitue qu'une résidence secondaire de l'appelant, l'intéressé résidant le plus souvent à [Localité 10].
Le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards seront condamnés in solidum au paiement de la somme de 4 000 euros de ce chef.
Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires et la SARL Regards la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile chacun, ainsi qu'aux dépens.
Le syndicat des copropriétaires et la SARL Regards, qui succombent, seront condamnés in solidum au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance, de la même somme au titre de ceux d'appel, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
La distraction des dépens, en vertu de l'article 699 du code de procédure civile, ne sera ordonnée au bénéfice de Maître Brosseau-Gotti que pour les dépens d'appel, car l'intéressée ne représentait pas M. [I] devant le Tribunal judiciaire de Nanterre.
En application de l'article 10-1 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, le copropriétaire qui, à l'issue d'une instance judiciaire l'opposant au syndicat, voit sa prétention déclarée fondée par le juge, est dispensé, même en l'absence de demande de sa part, de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires. Il convient en conséquence de dispenser M. [I] de participation à la dépense commune liée à la présente affaire.
PAR CES MOTIFS
- INFIRME le jugement en date du 12 juin 2023 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :
* débouté M. [V] [I] de sa demande en nullité des résolutions n° 21 et 22 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 ;
* débouté M. [V] [I] de sa demande au titre des travaux de réparation des caniveaux d'évacuation des eaux pluviales ;
et statuant à nouveau :
- ANNULE les résolutions n° 16, 17 et 18 de l'assemblée générale du 7 septembre 2020 ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards à payer à M. [V] [I] les sommes suivantes :
* 8 984,02 euros au titre du préjudice matériel ;
* 4 000 euros au titre du préjudice moral ;
- DIT que dans la contribution à la dette, la SARL Regards sera tenue au paiement du tiers de celle-ci ;
- CONDAMNE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] à déposer les lampes, spots et câbles électriques installés par lui dans les parties communes dont M. [V] [I] a la jouissance privative, et ce sous astreinte journalière de 150 euros ;
- DIT que cette astreinte commencera à courir deux mois après la signification du présent arrêt ;
- CONDAMNE le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] à déposer la nouvelle clôture qu'il a fait installer dans les parties communes dont M. [V] [I] a la jouissance privative, et ce sous astreinte journalière de 150 euros ;
- DIT que cette astreinte commencera à courir deux mois après la signification du présent arrêt ;
- CONFIRME le jugement pour le surplus ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards à payer à M. [V] [I] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards à payer à M. [V] [I] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel ;
- CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 8] et la SARL Regards aux dépens de première instance et d'appel ;
- ACCORDE à Maître Brosseau-Gotti le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile du chef des dépens d'appel ;
- DISPENSE M. [V] [I] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure tant de première instance que d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président et par Madame Kalliopi CAPO-CHICHI, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT