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Décisions

CA Angers, ch. a - civ., 25 novembre 2025, n° 21/01053

ANGERS

Arrêt

Autre

CA Angers n° 21/01053

25 novembre 2025

COUR D'APPEL

D'ANGERS

CHAMBRE A - CIVILE

IG/CG

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 21/01053 - N° Portalis DBVP-V-B7F-E2EN

jugement du 1er mars 2021

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LAVAL

n° d'inscription au RG de première instance 21/00043

ARRET DU 25 NOVEMBRE 2025

APPELANTE :

S.A.R.L. [...], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Renaud GISSELBRECHT, avocat au barreau de LAVAL

INTIMES :

Monsieur [M] [K]

né le 8 juillet 1967 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [B] [S] épouse [K]

née le 18 avril 1966 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Tous deux représentés par Me Inès RUBINEL de la SELARL LX RENNES-ANGERS, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 214595

S.A.R.L. [...], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès-qualités à son siège social

[Adresse 5]

[Adresse 5]

S.A. MMA IARD, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès-qualités à son siège social

[Adresse 1]

[Adresse 1]

MMA IARD, ASSURANCES MUTUELLES, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès-qualités à son siège social

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Toutes trois représentées par Me André BELLESSORT de la SCP MAYSONNAVE- BELLESSORT, avocat au barreau de LAVAL - N° du dossier 187096

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 9 septembre 2025 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme MULLER, conseillère faisant fonction de présidente et devant Mme GANDAIS, conseillère, qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente

Madame GANDAIS, conseillère

Madame DE LA ROCHE SAINT ANDRE, conseillère

Greffier : Monsieur DA CUNHA

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 25 novembre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente et par Tony DA CUNHA, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant bons de commande du 27 octobre 2012, M. [M] [K] et son épouse, Mme [B] [S] (ci-après les maîtres de l'ouvrage) ont commandé auprès de la SARL [...] la fourniture de matériaux destinés à la construction d'une piscine, avec margelles bleues, moyennant la somme totale de 39.611 euros et ont confié l'installation de cette piscine (comprenant la pose du dallage entourant la piscine) à la SARL [...], moyennant la somme de 17.889 euros.

Les travaux ont été réceptionnés sans réserve suivant procès-verbal du 22 juin 2013.

En 2015, les maîtres de l'ouvrage déplorant que le dallage de la piscine comporte diverses teintes, 'un opérateur de l'ensemble [...] [...]' procédait notamment à des travaux de ponçage et à l'imprégnation des dalles par un produit hydrofuge.

Le 4 septembre 2015, les maîtres de l'ouvrage et la SARL [...] ont établi un protocole d'accord aux termes duquel celle-ci devait se rapprocher du fournisseur des dalles afin de résoudre les différences d'aspect du dallage et restaurer les joints ciment et s'engageait également à rétablir l'étanchéité de l'abri ainsi qu'à remédier à d'autres anomalies (pose de verrous, reprise de joints de finition et remplacement de vis).

Suivant courrier recommandé en date du 7 novembre 2016, les maîtres de l'ouvrage, par l'intermédiaire de leur conseil, indiquaient à la SARL [...] que malgré ses interventions, le dallage entourant la piscine conservait une différence de ton et d'homogénéité. Ils ajoutaient que le dallage était manifestement glissant rendant sa pratique particulièrement dangereuse et donc impropre à sa destination, mettant en demeure la société de communiquer son attestation d'assurance couvrant la période des travaux litigieux.

C'est dans ce contexte qu'ils ont fait assigner les sociétés [...] et [...] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Laval le 20 décembre 2016 aux fins d'obtenir une expertise.

Suivant ordonnance rendue le 12 avril 2017, le juge des référés faisait droit à cette mesure d'expertise, qui était étendue au fournisseur initial du matériau ainsi qu'à son assureur, et désignait M. [G] [Y].

L'expert déposait son rapport définitif le 27 mars 2018.

Par actes d'huissier en date du 24 mai 2018, les maîtres de l'ouvrage ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Laval les sociétés [...] et [...] aux fins d'obtenir leur condamnation, in solidum, ou l'une à défaut de l'autre, à les indemniser des préjudices matériels et immatériels en raison de leur responsabilité décennale sinon contractuelle.

Le 25 juin 2018, les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard (ci-après les assureurs de la SARL [...]) sont intervenues volontairement à l'instance en leur qualité d'assureurs de la SARL [...].

Par jugement en date du 13 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Laval a ordonné la réouverture des débats, a invité la SARL [...] et la SARL [...] à, soit produire des conclusions communes ne se contredisant pas, soit à tirer les conséquences procédurales du fait qu'elles représentent des intérêts distincts, et a renvoyé l'affaire à la mise en état.

Les sociétés [...] et [...] ont alors fait le choix de conseils distincts.

Par jugement en date du 1er mars 2021, le tribunal a :

- condamné in solidum la SARL [...], la SARL [...] et ses assureurs à verser aux maîtres de l'ouvrage les sommes suivantes :

* 24.530 euros, outre intérêts à compter du jugement, avec capitalisation des intérêts par année entière, au titre des travaux de reprise du dallage,

* 30.446,01 euros, outre intérêts à compter du jugement, avec capitalisation des intérêts par année entière, au titre du remplacement de l'abri de piscine,

* 2.000 euros au titre du préjudice de jouissance ;

- dit que dans leurs rapports entre elles, la SARL [...] et la SARL [...] sont tenues respectivement à hauteur de 60% et 40% des désordres, et en conséquence, condamné la SARL [...] à garantir les assureurs de la SARL [...] à hauteur de 60% ;

- dit que les assureurs de la SARL [...] sont fondés à opposer à la SARL [...] les franchises contractuelles à hauteur de 20% du sinistre avec un minimum de 1.428 euros et un maximum de 7.142 euros ;

- rappelé que dans le cadre de la responsabilité décennale, la franchise n'est pas opposable au maître de l'ouvrage pour les garanties obligatoires (préjudice matériel) mais qu'elle lui est opposable pour les garanties non obligatoires (préjudice immatériel) ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné in solidum la SARL [...], la SARL [...], les assureurs de la SARL [...] aux dépens ;

- condamné in solidum la SARL [...], la SARL [...], les assureurs de la SARL [...] à verser aux maîtres de l'ouvrage la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL [...] à garantir les assureurs de la SARL [...] à hauteur de 60% au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les assureurs de la SARL [...] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 26 avril 2021, la SARL [...] a relevé appel du jugement comme suit : 'appel général de l'ensemble des dispositions' ; intimant les maîtres de l'ouvrage, la SARL [...] et ses assureurs.

Par conclusions notifiées le 19 août 2021, les assureurs de la SARL [...] ont formé appel incident.

La SARL [...], qui a constitué le même avocat que ses assureurs le 27 septembre 2021, a conclu le même jour avec ces derniers, interjetant à son tour appel incident.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 février 2025 à la suite d'un avis de clôture et fixation en date du 30 septembre 2024. L'audience de plaidoirie, initialement fixée au 4 mars 2025, s'est tenue le 9 septembre 2025 conformément à un avis de défixation notifié aux parties le 21 février 2025.

Les parties ont été invitées à l'audience à faire valoir, sous un mois, leurs observations écrites s'agissant des conséquences à tirer, au regard des dispositions de l'article 550 alinéa 1er du code de procédure civile, du sort de l'appel incident des assureurs de la SARL [...] si la cour venait à constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel principal de la SARL [...].

Suivant courrier reçu au greffe de la cour le 30 septembre 2025, le conseil de la SARL [...] et de ses assureurs a indiqué qu'en application des dispositions de l'arrêt rendu par la cour de cassation le 21 novembre 2024 (pourvoi n°22-18028), dans l'hypothèse d'un appel principal dépourvu d'effet dévolutif, l'appel incident ou l'appel provoqué formé par conclusions dans le délai imparti par le code de procédure civile est recevable, ayant un effet dévolutif lui-même.

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Dans ses dernières conclusions reçues le 19 avril 2023, la SARL [...] demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et statuant à nouveau ;

- déclarer régulier son appel ;

À titre principal :

- lui dire inapplicable le fondement de l'article 1792 du code civil ;

- dire et juger irrecevable l'action introduite par les maîtres de l'ouvrage à son encontre par application des dispositions de l'article 1648 du code civil ;

À titre subsidiaire :

- déclarer infondée l'action introduite par les maîtres de l'ouvrage et les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

À titre infiniment subsidiaire :

- dire et juger que les maîtres de l'ouvrage seront déboutés de leur demande de remplacement de l'abri piscine ;

- dire et juger que l'estimation des maîtres de l'ouvrage quant à la valeur de remplacement du dallage ne saurait excéder la valeur d'un dallage de qualité équivalente, estimée au jour du jugement ;

- voir minorer dans de très sensibles proportions le préjudice de jouissance invoqué par les maîtres de l'ouvrage ;

- débouter les maîtres de l'ouvrage de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires.

En tout état de cause, condamner les maîtres de l'ouvrage à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et statuer ce que de droit quant aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions reçues au greffe de la cour le 23 mai 2023, les maîtres de l'ouvrage demandent à la cour, au visa des articles 562, 900, 954 ainsi que 1792 et suivants du code de procédure civile, 1792 et suivants du code civil, 1134 et 1147 anciens du code civil ainsi que 1641 et suivants du code civil, de :

à titre principal :

- constater et au besoin juger n'être saisie par aucun effet dévolutif ;

- constater en conséquence, et au besoin juger ne pouvoir statuer sur aucun moyen ou prétention, d'appel principal ou incident ;

- constater en conséquence le caractère définitif de la décision de première instance, sauf en tout cas à la confirmer.

subsidiairement :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et condamnations ;

- débouter la société [...] de son appel principal ;

- déclarer la société [...] et ses assureurs irrecevables et en tout cas non fondés en leur appel incident, les en débouter.

en toute hypothèse :

- condamner la société [...], ou toute partie succombant, à leur verser la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

- condamner les mêmes aux entiers dépens d'appel avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.

Aux termes de leurs dernières écritures reçues le 27 septembre 2021, la SARL [...] et ses assureurs demandent à la cour, au visa de l'article 1240 du code civil, de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Laval en ses dispositions leur faisant grief ;

- en conséquence, débouter les maîtres de l'ouvrage de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- si par extraordinaire la cour devait entrer en voie de condamnation à l'encontre de la société [...], dire que toute condamnation à son encontre ne pourra excéder une part de 40% ;

- en conséquence, condamner toute partie succombante à les garantir de toutes sommes mises à leur charge notamment en principal, indemnité d'article 700, dépens, excédant une proportion de 40% tel qu'indiqué ci-avant ;

- débouter les maîtres de l'ouvrage de leur demande au titre du remplacement de l'abri de piscine ;

- débouter les maîtres de l'ouvrage de leur demande au titre d'un préjudice de jouissance, en toutes hypothèses, le limiter à la somme de 2.000 euros ;

- dire en toutes hypothèses que toute condamnation au profit des maîtres de l'ouvrage ne pourra excéder les préconisations de l'expert judiciaire ;

- dire qu'aucune condamnation in solidum ne saurait intervenir entre elle et la société [...] ;

- en toutes hypothèses :

- condamner toute partie succombante à les garantir de toutes sommes mises à leur charge notamment en principal, indemnité article 700, dépens, excédant une proportion de 40 % tel indiqué ci-avant ;

- déclarer opposables les franchises des assureurs de la SARL [...] à hauteur de 20% du montant du sinistre avec un minimum de 1.428 euros et un maximum de 7.142 euros ;

- débouter toutes les parties de leurs demandes, fins et conclusions incidentes contraires aux présentes ;

- condamner toute partie perdante à payer aux assureurs de la SARL [...] une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner toute partie perdante aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant notamment le coût de l'expertise judiciaire.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées.

MOTIFS DE LA DECISION :

I- Sur l'appel principal et l'appel incident

Les maîtres de l'ouvrage font valoir que :

- la déclaration d'appel de la SARL [...] ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués et n'est accompagnée d'aucun acte séparé valant annexe ; l'appelante n'a fait aucune déclaration d'appel rectificative ou nouvelle déclaration d'appel dans le délai de trois mois ;

- la cour n'étant saisie d'aucun litige à titre principal, échappe également à sa saisine l'appel incident des assureurs de la SARL [...] qui est l'accessoire du lien d'instance inexistant ; la cour devra donc constater l'irrégularité de sa saisine, l'absence d'effet dévolutif pour le tout ;

- l'absence de régularisation par une déclaration d'appel de l'appelant principal ou d'appel incident dans le délai laissé à l'appelant principal pour conclure en application des dispositions de l'article 908 du code de procédure civile, aboutit en cas d'irrégularité de la déclaration d'appel principale à une absence totale d'effet dévolutif de sorte que la cour n'est saisie d'aucune demande régulière.

La SARL [...] expose que :

- la rédaction de la déclaration d'appel qu'elle a formée est dépourvue d'ambiguïté quant aux chefs de jugement critiqués et ne fait pas grief aux maîtres de l'ouvrage qui répondent dans leurs écritures à l'ensemble des moyens qu'elle a soulevés ; la SARL [...] a pu former appel incident de la décision de première instance, preuve que la déclaration d'appel ne souffre d'aucune irrégularité ;

- la déclaration d'appel ne se contente pas de mentionner un appel général mais vise bien l'ensemble des dispositions du jugement rendu par le tribunal judiciaire du 1er mars 2021 qui était joint à ladite déclaration en sorte que l'effet dévolutif opère pleinement de ce seul constat ;

- le jugement dont appel ne contient que des chefs de dispositif faisant grief indivisible dès lors qu'il retient sa responsabilité décennale et que les autres chefs de dispositif dépendent directement de la mise en jeu de cette responsabilité ; l'objet du litige est dès lors indivisible.

La SARL [...] et ses assureurs font valoir que :

- la déclaration d'appel de la SARL [...] est dénuée d'ambiguïté, mentionnant un appel à l'égard de l'ensemble des dispositions du jugement ; l'appel incident des assureurs est dès lors parfaitement recevable.

Sur ce, la cour

L'article 901 4° du code de procédure civile, dans sa version applicable à la déclaration formalisée le 26 avril 2021 par la SARL [...], prévoit que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites à l'article 58, et à peine de nullité les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

L'article 562 du même code dans sa version applicable à l'espèce dispose : 'L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible'.

En application de ces textes, dénués d'ambiguïté, l'appelant est expressément tenu d'énoncer dans l'acte d'appel, ou dans un document qui lui est annexé, chacun des chefs du dispositif du jugement qu'il entend voir remettre en discussion devant la cour d'appel.

Aussi, lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas. Tel est notamment le cas lorsque la déclaration d'appel se borne à mentionner que 'l'appel est total' ou a comme objet un 'appel général' (2e Civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18-22.528).

En l'espèce, la déclaration d'appel régularisée le 26 avril 2021 par la SARL [...] vise au titre de l'objet de l'appel : 'Appel général de l'ensemble des dispositions' sans indiquer si son recours tend à l'annulation ou à la réformation de la décision attaquée, ni mentionner les chefs de dispositif critiqués.

Faute de telles précisions, les exigences tirées des articles 562 et 901 du code de procédure civile précités ne peuvent être considérées comme satisfaites. Il est constant que l'appelante n'a procédé à aucune déclaration d'appel ultérieure. Par suite, la déclaration d'appel de la SARL [...] n'a produit aucun effet dévolutif.

Est de même inopérant le moyen tiré de l'absence de grief résultant d'une telle imprécision, dès lors que les maîtres de l'ouvrage ne sollicitent pas la nullité de la déclaration d'appel, mais tirent les conséquences de l'absence d'effet dévolutif, laquelle opère indépendamment de tout grief.

S'agissant de l'appel incident formé par les assureurs de la SARL [...], suivant conclusions notifiées le 19 août 2021, il convient de rappeler que selon l'article 550 alinéa 1er du code de procédure civile, sous réserve des articles 905-2, 909 et 910, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable ou s'il est caduc.

Il en résulte que lorsque l'appel principal est recevable mais dépourvu d'effet dévolutif, l'appel incident ou l'appel provoqué formé par conclusions dans le délai imparti par l'article 909 du code de procédure civile est recevable et a un effet dévolutif, la cour d'appel étant alors saisie des seuls chefs de dispositif du jugement critiqués par cet appel incident ou provoqué (2e Civ., 21 novembre 2024, pourvoi n° 22-18.028).

Au cas particulier, la déclaration d'appel principal, à défaut d'annulation, a introduit une instance d'appel sur laquelle un appel incident a pu valablement se greffer, avec un effet dévolutif autonome.

L'appel incident formé par les assureurs et la SARL [...], suivant conclusions notifiées les 19 août 2021 et 27 septembre 2021, soit dans le délai de l'article 909 du code de procédure civile, doté d'un effet dévolutif propre, saisit donc la cour dans la limite des seuls chefs de jugement critiqués aux termes des conclusions de l'appelant incident. Celles-ci tendent à :

- l'infirmation des dispositions faisant grief aux assureurs et à son assurée, la société [...] ;

- en conséquence, débouter les maîtres de l'ouvrage de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- Si par extraordinaire la cour devait entrer en voie de condamnation à l'encontre de la société [...], dire que toute condamnation à son encontre ne pourra excéder une part de 40% ;

- En conséquence, condamner toute partie succombante à les garantir ainsi que leur assurée de toutes sommes mises à leur charge notamment en principal, indemnité d'article 700, dépens, excédant une proportion de 40% tel qu'indiqué ci-avant ;

- débouter les maîtres de l'ouvrage de leur demande au titre du remplacement de l'abri de piscine ;

- débouter les maîtres de l'ouvrage de leur demande au titre d'un préjudice de jouissance, en toutes hypothèses, le limiter à la somme de 2.000 euros ;

- dire en toutes hypothèses que toute condamnation au profit des maîtres de l'ouvrage ne pourra excéder les préconisations de l'expert judiciaire ;

- dire qu'aucune condamnation in solidum ne saurait intervenir entre la SARL [...] et la société [...] ;

- En toutes hypothèses :

- condamner toute partie succombante à les garantir ainsi que leur assurée de toutes sommes mises à leur charge notamment en principal, indemnité article 700, dépens, excédant une proportion de 40 % tel indiqué ci-avant ;

- déclarer opposables leurs franchises à hauteur de 20% du montant du sinistre avec un minimum de 1.428 euros et un maximum de 7.142 euros ;

- débouter toutes les parties de leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

- condamner toute partie perdante à leur payer une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner toute partie perdante aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant notamment ie coût de l'expertise judiciaire.

II- Sur la responsabilité décennale la SARL [...]

Le tribunal, après avoir relevé que la qualification d'ouvrage de la piscine et de son dallage n'est pas contestable et admis d'ailleurs implicitement par les sociétés [...] et [...] évoquant un 'procès-verbal de réception de l'ensemble (piscine-dallage)', a retenu la responsabilité décennale de ces deux constructeurs. Il s'est fondé sur le rapport d'expertise judiciaire confirmant la réalité des désordres dénoncés par les maîtres de l'ouvrage, et concluant à l'impropriété à destination du dallage qui représente un 'réel danger'. Il a ajouté qu'aucune cause étrangère n'étant invoquée, la responsabilité de plein droit tant de la SARL [...] que de la SARL [...], en leur qualité de constructeurs, devait être retenue sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

La SARL [...] et ses assureurs font valoir que :

- ce sont les interventions réalisées postérieurement sur le dallage à la demande des maîtres de l'ouvrage qui sont à l'origine des défauts dénoncés ;

- la société [...] n'aurait vocation à supporter qu'une part au plus égale à 40 % de l'ensemble des réclamations des maîtres de l'ouvrage ; les opérations d'expertise judiciaire établissent que la responsabilité prépondérante des désordres affectant la piscine revient à la société [...] en raison du défaut de conception majeur lié à la fourniture de pierres inadaptées ;

- subsidiairement, elles font valoir que dans la mesure où les maîtres de l'ouvrage ne justifient d'aucune obligation contractuelle solidaire ni de solidarité légale ni d'aucune faute commune aux deux sociétés, aucune condamnation in solidum ne pourra être prononcée entre la société [...] et [...].

Les maîtres de l'ouvrage approuvent le premier juge en ce qu'il a retenu la responsabilité décennale des sociétés [...] et [...], faisant valoir que :

- l'impropriété à destination qui procède d'une part de la nature des pierres posées et d'autre part des travaux effectués sur celles-ci, est caractérisée dans le rapport d'expertise : l'expert judiciaire a rappelé à plusieurs reprises dans ses conclusions le caractère dangereux du dallage de la piscine qui est éminemment glissant et donc rend impossible son utilisation ;

- la société [...] a accepté le support (dallage) et posé l'abri pour finir l'ouvrage de sorte qu'elle est bien constructrice de la piscine et que l'article 1792 du code civil est pleinement applicable, les deux sociétés devant être tenues solidairement ou in solidum ;

- l'intervention des sociétés [...] et [...], qui disposent d'une personnalité juridique distincte, a été réalisée dans le cadre d'une même opération de construction, les deux sociétés étant opérationnellement imbriquées et dirigées par les mêmes personnes ; elles ont agi ensemble dans le cadre d'une même opération contractuelle de construction et sont donc tenues à tout le moins in solidum ;

- subsidiairement, la société [...] engage sa responsabilité pour faute, ayant réalisé la piscine en utilisant des pierres impropres à leur destination finale et en outre ayant procédé à différentes interventions par voie d'abrasion et de pose d'hydrofuge qui ont accru le caractère d'ores et déjà glissant des margelles et dalles de la piscine ; ils ne sont pour leur part aucunement responsables des traitements appliqués sur le dallage ainsi que des conséquences qui auraient pu s'en suivre ; le ponçage et l'hydrofuge ont été réalisés par la société [...] qui a la qualité de professionnelle et qui devait à ce titre les informer et les conseiller sur les risques d'un tel traitement ; ils ont sollicité la reprise des défauts constatés sans jamais être à même de proposer une solution technique, laquelle appartient au seul professionnel qui est tenu d'une obligation de résultat ;

Sur ce, la cour

Selon les dispositions de l'article 1792 du code civil tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage des dommages, même résultant d'un vice du sol qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

En l'espèce, il est acquis aux débats que la SARL [...] a, suivant bon de commande qui a été régularisé avec les maîtres de l'ouvrage le 27 octobre 2012, procédé aux travaux nécessaires à l'installation de la piscine ainsi qu'à la pose du dallage entourant celle-ci, équipement et matériaux qui ont été acquis auprès de la société [...].

La réception de l'ouvrage est intervenue sans réserve le 22 juin 2013.

La SARL [...] et ses assureurs ne contestent ni la qualification d'ouvrage de la piscine et de son dallage, ni celle de constructeur pour la SARL au regard des prestations qu'elle a réalisées.

Aux termes de son rapport, l'expert judiciaire a constaté plusieurs désordres décrits comme suit :

- 'dalles très majoritairement affectées de défauts d'aspects multiples : marques de ponçage, auréoles blanchâtres, traces de rouille (pyrite),

- joints se disloquant et efflorescences blanchâtres (calcite) se formant, phénomène uniquement remarqué à l'intérieur du bassin couvert,

- glissance excessive en milieu humide,

Le dallage formant les plages du bassin de la piscine est impropre à destination et représente un réel danger'.

Il a ajouté que lors de la réception, quelques défauts purement d'aspect devaient être visibles mais qu'ils se sont manifestement aggravés dans le temps et après les opérations de ponçage et d'application d'un produit hydrofuge. Il a encore souligné que le caractère glissant de la plage ne pouvait être appréhendé avant la mise en eau du bassin pour la mise en service de la piscine.

Ces anomalies, révélées au cours de l'expertise judiciaire dans leurs causes et leurs conséquences, notamment sur le plan de la sécurité, caractérisent une impropriété à destination de l'ouvrage et ont justifié que le premier juge retienne la garantie décennale de la SARL [...] qui a réalisé des travaux affectés par les désordres susdécrits.

Le fait que les opérations de ponçage et d'hydrofugeage réalisées par la SARL [...], après la réception de l'ouvrage, aient aggravé les désordres préexistants ne saurait l'exonérer de la responsabilité décennale qu'elle encourt de plein droit à l'égard du maître de l'ouvrage.

Par ailleurs et en considération de l'absence d'effet dévolutif de l'appel principal, le jugement ayant retenu la responsabilité décennale de la société [...] qui, en sus de la vente de la piscine et du dallage, est intervenue pour le meulage et l'hydrofugeage des dalles dans le cadre du protocole d'accord du 4 septembre 2015 aux fins de reprise des désordres, est devenu définitif.

Dans la mesure où la SARL [...] a également la qualité de constructeur dans cette même opération de construction et que son intervention avec celle de la société [...] a participé aux dommages, c'est à bon droit que le tribunal a considéré qu'elles étaient responsables de plein droit in solidum des désordres affectant le dallage de la piscine et devaient à ce titre répondre in solidum des condamnations au bénéfice des maîtres de l'ouvrage.

III- Sur les demandes indemnitaires des maîtres de l'ouvrage

Le tribunal, au regard des travaux de reprise du dallage préconisés par l'expert judiciaire, a retenu l'évaluation donnée par ce dernier sur la base d'un devis établi le 7 décembre 2016 par l'entreprise Bucher, après application d'une moins-value à hauteur de 285 euros pour limiter l'épaisseur de la dalle à deux centimètres. S'agissant de l'abri de piscine, le premier juge a accueilli la demande indemnitaire des maîtres de l'ouvrage portant sur le remplacement de cet équipement au vu des courriers de plusieurs sociétés faisant état du risque majeur de rayures irrémédiables lors des opérations de remontage de l'abri existant et dans la mesure où l'expert judiciaire n'a pas obtenu la confirmation de l'absence de risque de rayures. Le tribunal a par ailleurs accordé aux maîtres de l'ouvrage la somme de 2.000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance, relevant qu'ils ont été privés de la jouissance normale de leur piscine qui suppose un accès par le dallage même si les attestations qu'ils produisent, faisant état de chutes, montrent qu'ils n'ont pas été totalement privés de son usage.

La SARL [...] et ses assureurs font valoir que :

- il convient d'homologuer purement et simplement le rapport d'expertise judiciaire excluant le devis de remplacement complet de l'abri tel que sollicité par les maîtres de l'ouvrage ; il n'est pas acceptable de retenir un chiffrage correspondant à la valeur d'un abri neuf au seul prétexte du risque de rayures au remontage dudit abri ; une telle indemnisation aurait dès lors le caractère d'un véritable enrichissement sans cause ;

- les maîtres de l'ouvrage sont infondés à solliciter une indemnité au titre d'un préjudice de jouissance dès lors que la piscine en tant que telle n'est pas affectée de désordres, lesquels portent seulement sur son entourage ; la piscine n'est dès lors pas physiquement inaccessible et en toute hypothèse celle-ci ne constitue qu'un ouvrage d'agrément ne pouvant pas être utilisé toute l'année ;

Les maîtres de l'ouvrage qui sollicitent la confirmation du jugement déféré, font valoir que :

- au titre des travaux réparatoires, l'expert judiciaire a retenu la reconstruction intégrale du dallage ; cette reprise implique le retrait de l'abri de piscine qui ne pourra être reposé puisqu'il n'est pas possible d'assurer avec certitude que son remontage soit possible ; il ne leur appartient pas d'accepter un risque dans le cadre des travaux réparatoires dès lors qu'il s'agit de réparer leur entier préjudice ;

- ils n'ont pas pu utiliser leur piscine de 2016 à 2021, soulignant que le passage sur le dallage est obligatoire pour accéder à la piscine ; l'usage de la piscine n'est pas que saisonnier en raison justement de la présence d'un abri dédié.

Sur ce, la cour

- au titre des travaux de reprise

Aux termes de son rapport, l'expert judiciaire a conclu que 'compte tenu de l'impropriété à destination des dalles, il convenait de les remplacer dans leur totalité (intervention nécessitant le démontage de l'abri puisqu'il a été implanté 'à cheval' sur plusieurs dalles) sauf à démontrer la pertinence et l'efficacité d'un nouveau traitement de surface, ce qui ne serait par ailleurs pas une solution eu égard aux dégradations de surfaces et des joints constatés. Dès lors toute recherche sur la qualité des joints est inutile.'

Ainsi, l'expert a énuméré les travaux de reprise comme suit :

- démolition des existants,

- dressage de la chape,

- natte d'étanchéité,

- fourniture et pose de pierres bleues du Hainaut 60/60/3 et margelles assorties,

- démontage/ remontage de l'abri.

Il a estimé le coût final de l'ensemble de ces interventions à la somme de 25.650 euros HT, soit 22.300 euros HT pour la démolition et reconstruction du dallage (sur la base d'un devis établi le 7 décembre 2016 par l'entreprise Bucher), 3.350 euros HT pour le démontage/remontage de l'abri de piscine 'sous réserve de la confirmation par l'entreprise, notamment sur la question des risques encourus de rayures des panneaux en polycarbonate. Cette question est restée sans réponse aux termes des opérations de la présente expertise.'

La SARL [...] et ses assureurs ne contestent pas le chiffrage retenu par l'expert relativement au remplacement du dallage formant les plages du bassin de la piscine et repris par le tribunal, soit 24.530 euros TTC. Le jugement sera dès lors confirmé sur ce point.

En revanche, est discutée la prise en compte par le premier juge du devis du 20 septembre 2017 produit par les maîtres de l'ouvrage, s'élevant à la somme de 30.446,01 euros TTC et correspondant à la construction d'un abri neuf.

Les maîtres de l'ouvrage versent aux débats comme en première instance, plusieurs courriers des sociétés démarchées en vue du démontage/remontage de l'abri de piscine, les sociétés Rideau, Pelluau et Sunclear, indiquant ne pas effectuer de remontage de l'abri du fait des risques de pièces endommagées et du fait que leur garantie décennale ne pourrait être mobilisée dans la mesure où elles n'ont pas installé ledit abri.

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire que la reprise du dallage dans son intégralité impose un enlèvement de l'abri existant pour réaliser la démolition des dalles existantes et leur remplacement. Les maîtres de l'ouvrage justifient de ce que la repose de l'abri comporte un risque majeur d'endommagement des pièces sans que la SARL [...] et ses assureurs n'apportent d'éléments venant démentir ce constat émanant de spécialistes.

En outre, à la date du présent arrêt, l'abri d'origine va avoir plus de 12 ans, ce qui impose, au regard de son vieillissement rendant encore plus aléatoire une repose sans dommage, son remplacement.

Il s'ensuit que le premier juge doit être approuvé en ce qu'il a retenu le devis du 20 septembre 2017 pour un montant de 30.446,01 euros TTC s'agissant du remplacement de l'abri de piscine.

- au titre du préjudice de jouissance

L'expert judiciaire rappelle dans son rapport que le dallage est dangereux et impropre à destination, ne permettant pas d'utiliser la piscine en pleine jouissance et sans risque, y compris pour les tiers. Il ajoute que compte tenu de la dangerosité de la situation, l'engagement des travaux est impératif avant l'utilisation de la piscine pour la prochaine saison estivale. À ce titre, il est précisé que la durée des travaux, à engager en dehors de la période estivale, est estimée à trois semaines.

Les maîtres de l'ouvrage ont été gênés depuis 2016 dans la pleine jouissance de leur piscine en raison de son accès rendu glissant par le dallage qui l'entoure et partant des risques de chute. De surcroît, la présence d'un abri de piscine recouvrant la totalité de celle-ci doit permettre de l'utiliser pendant une période qui ne se limite pas à la seule saison estivale.

Au regard de cette situation et du temps écoulé depuis 2016, c'est à bon droit que le premier juge a indemnisé le trouble de jouissance subi par les maîtres de l'ouvrage à hauteur de la somme de 2.000 euros.

IV- Sur la garantie des assureurs et les franchises

Le tribunal a relevé que les assureurs de la SARL [...], qui ne contestent pas leur garantie, sont fondés à opposer leurs franchises à hauteur de 20 % du sinistre avec un minimum de 1428 euros et un maximum de 7142 euros à leur assurée, au regard des conditions particulières et générales des contrats souscrits par celle-ci. En revanche, il a rappelé que dans le cadre de la responsabilité décennale, la franchise n'est pas opposable aux maîtres de l'ouvrage pour les garanties obligatoires (préjudice matériel) mais qu'elle leur est opposable pour les garanties non obligatoires (préjudices immatériels).

Les assureurs demandent à la cour de déclarer opposables leurs franchises contractuelles sans toutefois préciser à l'égard de quelle partie elles entendent s'en prévaloir.

Les maîtres de l'ouvrage n'ont formulé aucune observation à ce titre.

Sur ce, la cour

En premier lieu, il convient de relever que les assureurs de la SARL [...] ne discutent pas que, secondairement à la reconnaissance de responsabilité décennale qui serait retenue à l'encontre de leur assurée, ils soient tenus de garantir cette dernière de toutes les condamnations prononcées à son encontre. Il convient en cela de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum la SARL [...] et ses assureurs au paiement des sommes indemnitaires dues aux maîtres de l'ouvrage.

Les assureurs de la société [...] produisent la police d'assurance souscrite par cette dernière ainsi que les conditions particulières qui stipulent une franchise contractuelle de 20% du montant du sinistre avec un minimum de 1.428 euros et un maximum de 7.142 euros.

A l'égard de leur assurée, ainsi que l'a retenu le premier juge, les assureurs peuvent donc opposer la franchise contractuelle ainsi définie au titre de la garantie décennale due pour l'indemnisation des préjudices subis par les maîtres de l'ouvrage. En revanche, comme souligné par le premier juge, cette clause stipulant un plafond de garantie n'est pas opposable au tiers lésé pour les dommages matériels, l'étant en revanche pour les préjudices immatériels comme le trouble de jouissance.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit que les assureurs sont fondés à opposer à la SARL [...] les franchises contractuelles à hauteur de 20% du sinistre avec un minimum de 1.428 euros, et un maximum de 7.142 euros ;

- rappelé que dans le cadre de la responsabilité décennale, la franchise n'est pas opposable au maître de l'ouvrage pour les garanties obligatoires (préjudice matériel) mais qu'elle lui est opposable pour les garanties non obligatoires (préjudice immatériel).

V- Sur le recours en garantie de la SARL [...] et de ses assureurs

Le tribunal, qui a retenu la responsabilité décennale de la société [...] comme constructeur, a considéré que celle-ci qui, aux termes du protocole d'accord du 4 septembre 2015, a procédé aux opérations de ponçage et d'hydrofugeage qui ont aggravé le caractère glissant des dalles, doit être tenue à hauteur de 60 % des désordres. En conséquence, le tribunal a condamné la société [...] à garantir les assureurs de la SARL [...] dans ses proportions, relevant que cette dernière n'a pas formulé une telle demande en garantie.

La SARL [...] et ses assureurs soutiennent qu'il résulte des opérations d'expertise que la responsabilité prépondérante des désordres affectant la piscine des maîtres de l'ouvrage revient à la société [...], en raison du défaut de conception majeur lié à la fourniture de pierres inadaptées par cette société et par son importateur.

La société [...] qui ne peut plus contester sa responsabilité décennale au regard de l'absence d'effet dévolutif de son appel principal, n'a développé aucun moyen subsidiaire sur le partage de responsabilité retenu par le premier juge.

Sur ce, la cour

La cour constate que la SARL [...] et ses assureurs ne discutent pas subsidiairement la part de responsabilité mise à la charge de cette dernière, soit 40% et en tout cas ne développent aucun moyen tendant à la minorer. Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que dans leurs rapports entre elles, la SARL [...] et la SARL [...] sont tenues respectivement à hauteur de 60% et 40% des désordres.

C'est ensuite à bon droit, au regard de la proportion de responsabilité retenue à l'encontre de chaque constructeur et confirmée ainsi qu'il a été dit ci-avant, que le premier juge a fait droit au recours en garantie des assureurs dans la proportion de 60% à la charge de la SARL [...], tant pour les indemnités mises à leur charge au titre des préjudices subis par les maîtres de l'ouvrage que pour les dépens et frais irrépétibles.

S'agissant du recours en garantie formé à hauteur d'appel par la SARL [...] à l'encontre de la SARL [...], coobligée in solidum, la cour observe que cette demande qui est l'accessoire de ses prétentions soumises au premier juge, celle notamment tendant à limiter sa prise en charge financière à 40% du préjudice global, est recevable en application de l'article 564 du code de procédure civile. Au regard de ce qui précède, il convient dès lors d'accueillir son recours contributif dans la même proportion de responsabilité retenue contre la SARL [...], à savoir 60%, tant pour les indemnités mises à sa charge au titre des préjudices subis par les maîtres de l'ouvrage que pour les dépens et frais irrépétibles de première instance et d'appel.

VI- Sur les frais irrépétibles et les dépens

Au regard de la solution donnée au litige, il convient de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Les dépens d'appel seront mis à la charge, in solidum, des parties qui succombent, à savoir la SARL [...], la SARL [...] et ses assureurs. Il sera fait droit à la demande de distraction des dépens d'appel formée par le conseil des maîtres de l'ouvrage.

Les maîtres de l'ouvrage qui ont exposé des frais dans le cadre de la présente instance d'appel doivent être accueillis en leur demande indemnitaire, la SARL [...] sera ainsi condamnée à leur payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande au même titre.

Les assureurs de la SARL [...] seront déboutés de ce même chef de demande.

La SARL [...] et ses assureurs seront néanmoins garantis par la SARL [...] de la condamnation prononcée à leur encontre au titre des dépens d'appel, dans la limite du partage de responsabilité confirmé ci-avant.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Constate l'absence d'effet dévolutif de l'appel principal formé par la SARL [...],

Déclare recevable l'appel incident formé par les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles, MMA Iard et [...],

Confirme, dans les limites de sa saisine, le jugement du tribunal judiciaire de Laval du 1er mars 2021,

Y ajoutant,

Condamne la SARL [...] à garantir la SARL [...] à hauteur de 60% des indemnités mises à sa charge au titre des préjudices subis par M. [M] [K] et Mme [B] [K] ainsi que des sommes dues au titre des dépens et frais irrépétibles de première instance ;

Condamne la SARL [...] à payer à M. [M] [K] et Mme [B] [K] la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SARL [...], la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la SA MMA Iard de leurs demandes respectives formées en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la SARL [...], la SARL [...], la société MMA Iard Assurances Mutuelles, la SA MMA Iard aux dépens d'appel,

Condamne la SARL [...] à garantir, à hauteur de 60%, la SARL [...], la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la SA MMA Iard de la condamnation prononcée à leur encontre au titre des dépens d'appel,

Accorde au conseil de M. [M] [K] et Mme [B] [K] le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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