Contrat de bail, loyer, renouvellement ...

Baux commerciaux

La valeur locative obéit, en principe, à la loi de l’offre et de la demande. En effet, si l’article L. 145-33, alinéa 1, du Code de commerce précise que “ le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative ”, cette disposition ne s’applique qu’à défaut d’accord entre les parties sur le montant du loyer révisé ou renouvelé . Aussi, l’alinéa 2 prévoit-il qu’à défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité, ainsi que les prix couramment pratiqués dans le voisinage. Une première définition de la valeur locative consiste, donc, à envisager celle-ci comme une valeur de marché, librement négociée par les parties dans un contexte économique de libre concurrence. En revanche, à défaut d’accord entre les parties sur son montant, elle sera judiciairement définie en application de critères objectifs légalement fixés .

La détermination du loyer à partir de la valeur locative connaît des limites légales et conventionnelles. Ainsi, elle se heurte à la règle du plafonnement des loyers qui concerne les loyers révisés ou renouvelés. Lors de la révision du loyer, la valeur locative n’est applicable que si la preuve est apportée, conformément à l’article L. 145-38 du Code commerce, “ d'une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative ”. Lors de la fixation du loyer du bail renouvelé, l’article L. 145-34 exclut également l’application de la valeur locative si celle-ci est supérieure au montant du loyer plafonné, à moins d’une modification notable des éléments composant la valeur locative. Dans le cas contraire, le nouveau loyer est fixé à la valeur locative, même si elle est inférieure non seulement au dernier loyer payé, mais éventuellement au loyer d'origine du bail expiré .

Les parties peuvent aussi, dans certains cas, déroger conventionnellement aux dispositions de l’article L. 145-33 du Code de commerce, étant précisé que la fixation conventionnelle du loyer entre les parties emporte renonciation à la procédure de révision judiciaire du loyer . Tel est le cas de la clause recette, qui, en matière de révision  ou de renouvellement , stipule que le loyer est calculé en fonction d'un pourcentage du chiffre d'affaires réalisé par le preneur. Cependant, s’il est impossible de déroger aux dispositions de l’article L. 145-38 relatives à la révision triennale, qui sont d’ordre public , rien n’empêche les parties de convenir, lors de la conclusion du bail ou ultérieurement, des modalités de fixation du loyer du bail renouvelé .

Au-delà du loyer révisé ou renouvelé, la valeur locative s’applique à l’indemnité d’occupation conformément à l’article L. 145-28, alinéa 1, du Code de commerce , qui prévoit qu’elle “ est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation ”, parmi lesquelles figure l’article L. 145-33. Enfin, lorsque le preneur se maintient dans les lieux loués à l’expiration d’un bail dérogatoire, un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux prend effet, dont le loyer doit correspondre, à défaut d’accord entre les parties, à la valeur locative .

Il existe en outre des règles particulières de calcul, notamment pour les locaux monovalents, tels que les hôtels, garages, cinémas, théâtres ou encore cliniques, pour lesquels la détermination du loyer à la valeur locative obéit à des méthodes spécifiques. Ce mode de calcul, fondé sur les recettes de l’exploitation, est qualifié de méthode de la recette théorique ou, pour les hôtels, de méthode hôtelière . S’il résulte de l’article R. 145-10 du Code de commerce que le prix du bail des locaux construits en vue d’une seule utilisation est déterminé selon les usages observés dans la branche d’activité considérée, s’il en existe , à défaut de tout usage observé, le plafonnement du loyer se trouve exclu et seule la valeur locative s’applique .

Dans tous les cas, les juges du fond déterminent la valeur locative selon le mode de calcul qui leur apparaît le meilleur, dans l’exercice de leur pouvoir souverain d’appréciation . Cependant, l’autorité de la chose jugée ne pouvant être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice, les juges du fond ont la faculté de procéder de nouveau à la fixation du loyer lorsque des circonstances particulières ayant une incidence sur la valeur locative sont survenues postérieurement au précédent jugement de fixation du loyer . Sans qu'aucune méthode de calcul ne soit imposée, la fixation judiciaire du loyer à la valeur locative doit conduire à préciser les critères de l'article L. 145-33 du Code de commerce , à savoir les caractéristiques du local considéré (Art. R. 145-3 et R. 145-4 C. com.), la destination des lieux (Art. R. 145-5 C. com.), les obligations respectives des parties (Art. R. 145-8 C. com.), les facteurs locaux de commercialité (Art. R. 145-6 C. com.), ainsi que les prix couramment pratiqués dans le voisinage (Art. R. 145-7 C. com.), étant précisé qu’en cas de révision du loyer, il n’est en aucun cas tenu compte, pour le calcul de cette valeur, “ des investissements du preneur ni des plus ou moins-values résultant de sa gestion pendant la durée du bail en cours ” (art. L. 145-38, al. 4, C. com.).

Cass. 3e civ., 24 octobre 1979, LawLex202300005999JBJ, Bull. civ. III, n° 189 ; D. 1980, IR 106. – V. plus récemment, Paris, 29 septembre 2021, LawLex202200001061JBJ.

V. cep., Versailles, 5 décembre 2002, n° 01/00854, qui considère que la loi ignore l'existence d’une “valeur locative du marché” et d'une “valeur locative judiciaire” qui serait nécessairement plus favorable au preneur et à laquelle celui-ci aurait un droit acquis lors du premier renouvellement et précise qu’il n’existe qu’une valeur locative déterminée en priorité par les parties ou, à défaut en fonction des critères fixés par les textes.

V. not. Cass. 3e civ., 24 octobre 1979, LawLex202200000001JBJ : en l’espèce, les juges du fond ont écarté les règles du plafonnement et souverainement évalué le prix du bail en considération de la méthode dite hôtelière, recoupée avec la méthode dite des surfaces pondérées et avec celle dite de comparaison.

Cass. 3e civ., 8 janvier 1980, LawLex202300007060JBJ, Bull. civ. III, n° 5.

Cass. 3e civ., 3 mai 1978, LawLex202100005775JBJ, Bull. civ. III, n° 179.

Cass. 3e civ., 7 mai 1986, LawLex202300006001JBJ, Bull. civ. III, n° 63 ; JCP N 1987, prat. 127 ; Gaz. Pal. 1986, 2, pan. jurispr. 167. – V. aussi Cass. 3e civ., 18 janvier 2012, LawLex202200000460JBJ, Bull. civ. III, n° 11 ; D. 2012, actu. 278, obs. ROUQUET ; AJDI 2012, 506, note PLANCKEEL ; RTD com. 2012, 298, obs. KENDERIAN ; JCP E 2012, 1096 ; JCP E 2013, 1430, n° 15, obs. MONEGER ; Loyers et copropr. 2012, comm. 75 ; Administrer mars 2012, 27, obs. BARBIER ; Cass. 3e civ., 25 septembre 2002, LawLex202300007061JBJ, Bull. civ. III, n° 5.

Cass. 3e civ., 6 février 2020, LawLex202100005985JBJ, Loyers et copropr. 2020, comm. 50, note MARCET ; Administrer mars 2020, note BARBIER.

Saint-Denis de La Réunion, 2 novembre 2022, LawLex202300006002JBJ.

Chambéry, 19 septembre 2017, LawLex202300006000JBJ, Gaz. Pal. 21 nov. 2017, n° 307h8, 85, CHASTAGNIER.

Cass. 3e civ., 15 février 2018, LawLex202100005701JBJ, D. actu. 26 févr. 2018, obs. ROUQUET ; D. 2018, Pan. 1516, obs. DUMONT-LEFRAND ; AJDI 2018, 708, obs. BLATTER ; RJ com. 2018, 347, obs. KENFACK ; JCP N 2018, act. 255 ; JCP N 2018, act. 420 ; JCP E 2018, act. 137 ; RJDA 2018, n° 402 ; Loyers et copropr. 2018, comm. 95, BRAULT.

Cass. 3e civ., 5 mars 2013, LawLex202200000225JBJ, RJDA 2/14, n° 89 ; Gaz. Pal. 19-20 avr. 2013, 23, note BARBIER ; Rev. Administrer avr. 2013, 52, obs. SAINTURAT.

Cass. 3e civ., 18 juin 2002, LawLex202100004811JBJ, AJDI 2002, 685, obs. BLATTER.

L’article L. 145-15 répute non écrits les aménagements conventionnels ayant pour objet d’y faire échec.

Cass. 3e civ., 10 mars 2004, LawLex202100004756JBJ, Bull. civ. III, n° 52 ; D. 2004, AJ 878, obs. ROUQUET ; D. 2004, 2221, note WERTHE ; AJDI 2004, 951, note BLATTER ; RTD com. 2005, 256, obs. MONEGER ; JCP E 2004, 603, note DEMOUSTIER ; JCP E 2004, 1933 ; JCP E 2005, 863, n° 41, obs. MONEGER ; RJDA 6/04, n° 681 ; Gaz. Pal. 2004, 3225, note BRAULT ; Administrer mai 2014, 19, note BARBIER.

Cass. 3e civ., 30 juin 1999, LawLex202200006995JBJ, D. 1999, AJ 1, obs. ROUQUET ; RD imm. 2000, 257, obs. BARBIER ; RJDA 1999, n° 901 ; LPA 17 août 1999, 9 ; Loyers et copropr. 1999, comm. 292, obs. BRAULT et MUTELET ; Administrer déc. 1999, 31, note BARBIER.

Cass. 3e civ., 14 décembre 2005, LawLex202200002048JBJ, Bull. civ. III, n° 246 ; D. 2006, AJ 230, obs. ROUQUET ; D. 2006, Pan. 929, obs. ROZES ; AJDI 2006, 465, note DUMONT ; JCP N 2006, 1073, note LAFOND ; JCP G 2006, II, 10043 ; JCP E 2006, act. 10 ; JCP E 2006, 1157 ; JCP E 2006, 1802, n° 16, obs. KENFACK ; RJDA 4/06, n° 388 ; Gaz. Pal., 16-17 juin 2006, 18, obs. BRAULT ; Defrénois 2006, art. 38347, 446, n° 7, obs. RUET ; Loyers et copr. 2006, Comm. 35, note BRAULT ; Ann. loyers 2006, 28, obs. DEBEAURAIN ; Administrer févr. 2006, 28, note BARBIER ; Administrer mars 2006, 38, obs. B. BOCCARA et D. LIPMAN-W BOCCARA.

149. Principes