Contrat de bail, loyer, renouvellement ...

Baux commerciaux/Fonds de commerce

Aux termes de l’article 425 du Code civil, peut bénéficier d’une mesure de protection juridique, “ toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté ”. Le Code civil prévoit trois régimes de protection juridique auxqu …

Majeur protégé

Aux termes de l’article 425 du Code civil, peut bénéficier d’une mesure de protection juridique, “ toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté ”. Le Code civil prévoit trois régimes de protection juridique auxquels le majeur incapable peut être soumis : la tutelle, la curatelle et la sauvegarde de justice, auxquels s’ajoutent d’autres mesures de protection de moindre importance comme l’habilitation familiale et le mandat de protection future. La protection du majeur incapable et sa capacité à passer des actes juridiques sont plus ou moins étendus selon le régime applicable.

Selon l’article 440, alinéa 3, du Code civil, une personne qui, pour l’une des causes prévues à l’article 425, doit être représentée de manière continue dans les actes de la vie civile, peut être placée en tutelle. Il s’agit de la mesure de protection la plus forte puisqu’elle “ n’est prononcée que s’il est établi que ni la sauvegarde de justice, ni la curatelle ne peuvent assurer une protection suffisante ” . Un tuteur est alors désigné par le juge  afin de représenter le majeur atteint d’une incapacité totale, notamment dans les actes nécessaires à la gestion de son patrimoine . La conclusion d’un bail commercial étant considérée comme un acte de disposition au sens du décret 2008-1484 du 22 décembre 2008 , le tuteur peut, avec l’autorisation du conseil de famille ou, à défaut, du juge, passer un tel acte au nom de la personne protégée .

Dans le cas d’un bail commercial conclu de manière irrégulière, il est essentiel de distinguer selon que sa conclusion est intervenue avant ou après la publicité du jugement d’ouverture de la tutelle.

Lorsque le bail a été conclu par le majeur protégé moins de deux ans avant la publicité du jugement, les obligations en résultant peuvent être réduites, selon l’article 464, alinéa 1, du Code civil, “ sur la seule preuve que son inaptitude à défendre ses intérêts, par suite de l’altération de ses facultés personnelles, était notoire ou connue du cocontractant ” à la date de conclusion du bail, ce dernier pouvant être annulé “ s’il est justifié d’un préjudice subi par la personne protégée ” . L’alinéa 3 de l’article 464 précise que “ l’action doit être introduite dans les cinq ans de la date du jugement d’ouverture de la mesure ”.

A compter de la publicité du jugement d’ouverture de la tutelle, si la personne protégée a conclu, seule, un bail commercial pour lequel elle aurait dû être représentée par le tuteur, l’article 465, 3° du Code civil énonce que “ l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice ”. L’action en nullité peut être engagée par le tuteur, seul, avec l’accord du juge ou du conseil de famille , pendant la durée de la tutelle . Elle s’éteint à l’issue d’un délai de cinq ans . Si le tuteur conclut, seul, un bail, sans l’autorisation du juge ou du conseil de famille, l’article 465, 4° précise que “ l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice ”, sauf si, durant un délai de cinq ans et tant que la mesure de protection est ouverte, le bail est confirmé par l’une des deux entités susvisées .

Si le bail commercial, consenti par le tuteur durant la période de protection tutélaire et n’ayant fait l’objet d’aucune demande en nullité, est valable, il ne confère au preneur, à l’égard du majeur protégé, selon l’alinéa 3 de l’article 504 du Code civil, “ aucun droit de renouvellement et aucun droit à se maintenir dans les lieux à l’expiration du bail ”. La Cour de cassation estime qu’il ne peut être fait exception à la règle au prétexte que le preneur aurait contracté dans la croyance erronée que le tuteur était propriétaire des lieux donnés à bail . Enfin, lorsque le bail est consenti pour une durée supérieure à neuf ans, par le tuteur, il est inopposable à la personne protégée devenue capable, le bail ne lui étant opposable que pour une durée n’excédant pas neuf années depuis sa conclusion .

Aux termes de l’article 440, alinéa 1, du Code civil, “ la personne qui, sans être hors d’état d’agir elle-même, a besoin, pour l’une des causes prévues à l’article 425, d’être assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile, peut être placée en curatelle ”, un curateur étant désigné par le juge à cet effet . Cette mesure de protection, juridiquement moins contraignante que la tutelle, “ n’est prononcée que s’il est établi que la sauvegarde de justice ne peut assurer une protection suffisante ” .

L’article 467, alinéa 1, du Code civil pose le principe selon lequel “ la personne en curatelle ne peut, sans l’assistance du curateur, faire aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge ou du conseil de famille ”, lequel renvoie à l’article 505, alinéa 1, du même code concernant les actes de disposition . Aussi, la personne protégée, pour consentir un bail commercial, doit-elle se faire assister du curateur.

Lorsque le bail commercial a été consenti de manière irrégulière, il est également nécessaire de déterminer s'il a pris naissance avant ou après la publicité du jugement d’ouverture de la curatelle.

Lorsqu’un bail a été conclu par le majeur protégé moins de deux ans avant la publicité du jugement, la règle applicable est identique à la tutelle .

A compter de la publicité du jugement d’ouverture de la curatelle, si la personne protégée a conclu, seule, un bail pour lequel elle aurait dû être assistée par le curateur, l’article 465, 2° du Code civil énonce que “ l’acte ne peut être annulé que s’il est établi que la personne protégée a subi un préjudice ”, l’action en nullité, qui s’éteint à l’issue d’un délai de cinq ans , pouvant être engagée par le curateur, seul, avec l’accord du juge ou du conseil de famille . Si le curateur conclut, seul, un bail commercial qui aurait dû être consenti par la personne protégée avec son assistance, l’article 465, 4° précise que “ l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice ”, le bail pouvant toutefois être confirmé par le juge ou le conseil de famille .

S’il n’a fait l’objet d’aucune demande en annulation, le bail commercial consenti par le majeur protégé, sans l’assistance du curateur, reste valable, mais le preneur ne dispose d’aucun droit au renouvellement, ni d’aucun droit au maintien dans les lieux loués, la durée maximale étant fixée à neuf ans. Il est toutefois possible, pour la personne protégée, de passer outre le refus d’assistance du curateur lorsqu'elle est requise, en demandant l’autorisation au juge de pouvoir l’accomplir seule .

Le juge peut soumettre, à cette mesure de protection, une personne qui, “ pour l’une des causes prévues à l’article 425, a besoin d’une protection juridique temporaire ou d’être représentée pour l’accomplissement de certains actes déterminés ” . Mesure souple de protection, la sauvegarde de justice permet à la personne protégée de conserver l’exercice de ses droits. Cependant, “ elle ne peut, à peine de nullité, faire un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné ” . Elle peut donc consentir un bail commercial en toute liberté, sauf si la passation d'un tel acte a été confiée à un mandataire spécial.

Aux termes de l’alinéa 2 de l’article 435 du Code civil, le bail consenti par la personne protégée, pendant la durée de la mesure, peut être rescindé pour simple lésion ou réduit en cas d’excès, voire annulé pour insanité d’esprit en vertu de l’article 414-1 du même code. L’alinéa 2 précise que les juges prennent en considération “ l’utilité ou l’inutilité de l’opération, l’importance ou la consistance du patrimoine de la personne protégée et la bonne ou mauvaise foi de ceux avec qui elle a contracté ”. L’action en nullité, en rescision ou en réduction n’appartient qu’à la personne protégée et s’éteint par le délai de cinq ans . Lorsque l’intéressé agit en nullité pour insanité d’esprit, il lui revient de prouver l’existence d’un trouble mental au moment de la signature du bail .

Le mandat de protection future, régi par les article 477 et suivants du Code civil, permet à toute personne majeure “ ne faisant pas l’objet d’une mesure de tutelle ou d’une habilitation familiale, de charger une ou plusieurs personnes, par un même mandat, de la représenter pour le cas où, pour l’une des causes prévues à l’article 425, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts ” . Un tel mandat est conclu par acte notarié ou par acte sous seing privé . Lorsque la forme du mandat est notariée, même s’il est conçu en termes généraux, le mandataire peut consentir un bail commercial . A l’inverse, lorsque le mandat est sous seing privé, il est “ limité, quant à la gestion du patrimoine, aux actes qu’un tuteur peut faire sans autorisation ” , le bail commercial conclu par le mandataire ne conférant aucun droit au renouvellement du bail ni aucun droit au maintien dans les lieux loués.

L’ordonnance 2015-1288 du 15 octobre 2015 a institué l’habilitation familiale qui, aux termes des articles 494-1 et suivants du Code civil, est destinée à protéger une personne qui se trouve dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles, de nature à empêcher l’expression de sa volonté. Ainsi, le juge des tutelles peut habiliter une ou plusieurs personnes, choisies parmi les proches de la personne à protéger, pour la représenter, l’assister, ou passer un ou des actes en son nom, afin d’assurer la sauvegarde de ses intérêts . Selon l’article 494-6, alinéa 1, du Code civil, “ l’habilitation peut porter sur un ou plusieurs des actes que le tuteur a le pouvoir d’accomplir, seul ou avec une autorisation, sur les biens de l’intéressé ”. La personne habilitée peut, ainsi, conclure un bail commercial au nom de la personne protégée dans les mêmes conditions que le tuteur. L’article 494-9 du Code civil précise que “ si la personne à l’égard de qui l’habilitation a été délivrée passe seule un acte dont l’accomplissement a été confié à la personne habilitée, celui-ci est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice ”.

Cass. civ. 1re, 14 mai 1996, LawLex202100002687JBJ, Bull. civ. 1996, I, n° 206 ; D. 1996, IR 157 ; D. 2017, 1190 ; AJ fam. 2017, 406, obs. RAOUL-CORMEIL ; BLATTER, Synthèse législative et jurisprudentielle 1996-1997 : AJPI 1997, 988 ; RTD civ. 2017, 610, obs. HAUSER ; JCP N 1996, II, 1592 ; JCP G 1996, IV, 1466 ; Defrénois 1997, 319, obs. VERMELLE.

Art. 1718 C. civ. et, sur renvoi, art. 595 C. civ.

Pour rappel, la conclusion d’un bail commercial est un acte de disposition. – Décr. 2008-1484 du 22 décembre 2008, art. 1 et ann. 1, col. 2-I.

Décr. 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle, et pris en application des articles 452, 496 et 502 du Code civil, art. 1 et ann. 1, col. 2-I.

Cass. civ. 1re, 31 janvier 1995, LawLex202100002682JBJ, Bull. civ. I, n° 56, 40 ; Bull. civ. I, n° 60 ; Bull. civ. I, n° 61 ; D. 1995, 471, note COURBE ; D. 1996, jurispr. 3, note MASSIP ; RTD civ. 1995, 864, obs. HAUSER ; RTD civ. 1996, 162, obs. MESTRE ; JCP G 1995, I, 3874, TEYSSIE ; JCP G 1995, IV, 789, selon laquelle l’action en nullité d’un acte ne peut être exercée que par le tuteur, pendant la durée de la tutelle, par l’auteur de l’acte, après la mainlevée de la mesure de protection, et par ses héritiers après son décès, les juges écartant de facto cette faculté accordée à l’acquéreur de l’immeuble, objet du bail, ayant appartenu à la personne protégée au jour de l’acte.

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