Contrat de bail, loyer, renouvellement ...

Baux commerciaux/Fonds de commerce

Les juges du fond retiennent deux qualifications juridiques du pas-de-porte différentes. Le versement d’une telle somme, à l’entrée dans les lieux, peut être assimilé à un supplément de loyer , qui tend à réaliser un prix d’ensemble correspondant aux fluctuations économiques et à rapprocher le loyer total de la valeur locative équitable des locaux ou à une indemnité compensatrice d'avantages comme …

Qualification

Les juges du fond retiennent deux qualifications juridiques du pas-de-porte différentes. Le versement d’une telle somme, à l’entrée dans les lieux, peut être assimilé à un supplément de loyer , qui tend à réaliser un prix d’ensemble correspondant aux fluctuations économiques et à rapprocher le loyer total de la valeur locative équitable des locaux ou à une indemnité compensatrice d'avantages commerciaux sans lien avec le loyer . Cette somme présente alors le caractère d’une contrepartie financière destinée à compenser la dépréciation de l'immeuble résultant de l'octroi au preneur de la propriété commerciale , lequel bénéficie du droit au renouvellement de son bail  et à une indemnité d’éviction.

Il appartient aux juges du fond de rechercher la commune intention des parties pour déterminer la nature juridique du pas-de-porte versé par le preneur . S’ils sont tenus d’apprécier souverainement l’intention des parties, les juges ne doivent pas pour autant la dénaturer . Ainsi, lorsque, dans la promesse de bail comme dans le bail lui-même, les parties ont expressément convenu de qualifier de supplément de loyer la somme remise par le preneur au bailleur à titre de droit d'entrée, cette qualification traduit clairement leur volonté commune, sans laisser place à l'équivoque ni à l'interprétation, et lie le juge . Tel n’est pas le cas lorsque la somme versée lors de la signature du bail a été qualifiée d'"indemnité d'entrée”, et que le bailleur n’apporte pas la preuve de la commune intention des parties de considérer cette somme comme un supplément de loyer, cette qualification ne pouvant résulter de son seul assujettissement à la TVA . En revanche, la somme versée en une seule fois lors de la signature du bail, qui reste acquise à titre définitif et en totalité au bailleur, même en cas de résiliation pour quelle que cause que ce soit, correspond non pas à un complément de loyers mais à une indemnité compensatrice d'avantages commerciaux , même si celle-ci fait l’objet d’un étalement des paiements à des échéances déterminées .

Selon la qualification retenue, les incidences locatives et fiscales diffèrent.

Sur le plan locatif, lorsqu’il est qualifié de supplément de loyer, il est tenu compte du pas-de-porte pour le calcul de la révision triennale et la fixation du loyer du bail renouvelé, mais pas de l’indemnité d’éviction . Il produit des intérêts comme les loyers payés d’avance, s’il excède deux termes, conformément à l’article L. 145-40 du Code de commerce. Lorsque le droit d’entrée est assimilé à une indemnité compensatrice, il devra être pris en considération dans le calcul de l’éventuelle indemnité d’éviction versée au preneur à l’issue du bail .

Sur le plan fiscal, l’Administration considère que le pas-de-porte est analysé comme une recette imposable dès lors qu’il présente le caractère de supplément de loyer, mais ne l’est pas lorsqu’il constitue uniquement “ la contrepartie de la dépréciation de l’immeuble qui procure les revenus fonciers, c’est-à-dire de la diminution de sa valeur vénale ” . Lorsqu’il est qualifié de supplément de loyer, le droit d’entrée est soumis à la TVA au même titre que le loyer . Concernant le preneur, si le montant du pas-de-porte peut être compris parmi les charges déductibles à titre de supplément de loyer, il en va différemment de l’indemnité versée en contrepartie de la dépréciation de l’immeuble qui s’inscrit à l’actif du bilan du preneur .

Cass. com., 14 novembre 1962, LawLex202100005857JBJ, Bull. civ. III n° 452 ; 29 mars 1966, LawLex202100005920JBJ, Bull. civ. III n° 178 : en l’espèce, le pas-de-porte qui figure au bail sous la rubrique “loyer” constituait, en raison de la modicité de ce dernier, un supplément du loyer des trois premières années, le loyer total se rapprochant ainsi de la valeur locative équitable des locaux à l'époque des faits.

Cass. 3e civ., 16 mai 2000, LawLex202100005860JBJ.

Cass. com., 14 novembre 1962, LawLex202100005857JBJ, préc.

Cass. 3e civ., 14 janvier 2015, LawLex202300005648JBJ, AJDI 2015, 517, obs. LIPMAN-W. BOCCARA.

CE, 15 février 2019, LawLex202300005647JBJ, RJF 2019, 424 ; JCP E 2019, act. 154 ; Cahiers de droit de l'entreprise n° 2, mars 2019, act. 11 ; Rev. fisc. patr., 2019, 56 ; Dr fiscal, 2019, act. 78 ; Dr. fiscal 2019, n° 17, comm. 247, concl. CORTOT-BOUCHER ; Loyers et copropr. 2019, n° 12, alerte 82.

Cass. com., 14 avril 1992, LawLex202100005858JBJ, Bull. IV, n° 158 ; D. 1994, somm. 47, obs. ROZES ; RTD com. 1993, 183, obs. MARTIN-SERF ; JCP E 1993, I, 236, n° 12, obs. PETEL ; JCP E 1993, II, 391, note LEVY.

Aix-en-Provence, 23 janvier 2020, LawLex202300005436JBJ.

Cass. 3e civ., 12 octobre 1976, LawLex202100005856JBJ, Bull. civ. III, n° 334 ; 11 octobre 1978, LawLex202100005861JBJ, Bull. civ. III n° 312 ; Gaz. Pal. 1979. Somm. 15.

Cass. 3e civ., 23 janvier 1980, LawLex202100005862JBJ, Bull. civ. III, n° 21, qui casse l’arrêt d’appel qui dénature les termes clairs et précis d'un contrat de bail, lequel dénomme “supplément de loyer” une somme versée par un preneur, en décidant que cette somme constitue un pas-de-porte.

Cass. 3e civ., 2 décembre 1998, LawLex202300005566JBJ, Administrer avr. 1999, 26.

Cass. 3e civ., 23 septembre 2014, LawLex202300005568JBJ.

Cass. 3e civ., 16 mai 2000, LawLex202100005860JBJ, préc.

Cass. com., 14 avril 1992, LawLex202100005858JBJ, préc.

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149. Qualification

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