Contrat de bail, loyer, renouvellement ...

Baux commerciaux/Fonds de commerce

Le preneur est tenu de procéder au paiement du prix du loyer et des charges entre les mains du bailleur ou de la personne habilitée à les percevoir pour son compte , les juges du fond devant s’en assurer . Ainsi, ces derniers ne peuvent considérer le paiement fait entre les mains du notaire en charge de la succession comme étant libératoire, sans rechercher si celui-ci a reçu pouvoir de recevoir l …

Incidents de paiement

Le preneur est tenu de procéder au paiement du prix du loyer et des charges entre les mains du bailleur ou de la personne habilitée à les percevoir pour son compte , les juges du fond devant s’en assurer . Ainsi, ces derniers ne peuvent considérer le paiement fait entre les mains du notaire en charge de la succession comme étant libératoire, sans rechercher si celui-ci a reçu pouvoir de recevoir les loyers pour le compte des bailleurs indivisaires .

En cas d’incident de paiement, le bailleur dispose de la faculté d’agir contre le preneur soit pour lui réclamer le règlement des loyers échus , accompagné, le cas échéant, des pénalités stipulées dans le contrat, soit pour demander la résiliation judiciaire du bail aux torts du preneur, ou encore pour solliciter l’acquisition de la clause résolutoire . Il peut également refuser le renouvellement du bail sans indemnité d’éviction lorsqu’est caractérisé un motif grave et légitime du fait des loyers et charges échus non réglés . Le bail peut, en outre, prévoir une clause pénale qui impose au preneur, en cas de manquement à ses obligations contractuelles, telles que le paiement du loyer, le versement d’une certaine somme à titre de dommages et intérêts. A ce titre, l’article 1231-5, alinéa 1, du Code civil précise qu’il ne peut être alloué à la partie défaillante une somme plus forte ni moindre que celle prévue dans la clause. Si les juges du fond peuvent limiter le montant de la clause pénale (art. 1231-5, al. 2, C. civ.), encore faut-il qu’ils caractérisent la disproportion manifeste entre le préjudice réellement subi par le bailleur et le montant de la peine conventionnellement fixé . La clause pénale doit être rédigée de manière claire et précise, et être exempte de toute ambiguïté. Ainsi, lorsqu’une telle clause stipule que “dans le cas où le bailleur exercerait des poursuites ou prendrait des mesures conservatoires à l'encontre du preneur, il aurait droit à une indemnité fixée à forfait de 10 % des sommes pour lesquelles les procédures seraient engagées”, il en résulte qu'en l'absence de poursuite, la pénalité contractuelle ne s'applique pas .

L’article 1231-6 du Code civil, issu de l’ordonnance 2016-131 , et applicable aux loyers échus postérieurement au 1er octobre 2016, précise qu’en cas de retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent, les dommages et intérêts dus consistent “dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure”, sans que le bailleur soit tenu de justifier d’aucune perte. Si, en cas de retard de paiement des loyers, les intérêts ne sont dus qu’à compter de la date du commandement de payer , le désistement de l’instance, introduite par le bailleur sur le fondement du commandement, est sans conséquence sur sa validité et ne vaut pas renonciation à ses effets quant au point de départ des intérêts qu’il fait courir . Par ailleurs, et sous réserve qu’il ne soit fait état d’aucun défaut de paiement de l’échéance mensuelle, le léger retard dans le paiement du loyer ne constitue pas un manquement suffisamment grave du preneur pour justifier la résiliation du bail . En revanche, indépendamment du préjudice lié au retard dans le paiement des loyers, des bailleurs subissent un préjudice, pour lequel le preneur doit être condamné à verser des dommages et intérêts, du fait des tracasseries qui résultent de la nécessité de devoir surveiller chaque mois les versements ou non-versements des loyers, et de faire face à une irrégularité de revenus .

En matière de travaux, si un preneur n’est pas dispensé du paiement des loyers jusqu’à l’exécution de ceux-ci , il peut être convenu entre les parties que le loyer fera l’objet d’abattements temporaires en raison des travaux que le preneur sera appelé à faire dans les lieux loués, étant précisé qu’à défaut d’exécution des travaux, les abattements consentis sont dépourvus de cause et doivent donner lieu à remboursement de la part du preneur . Cependant, la Cour de cassation estime que lorsque l’obligation de réaliser des travaux a été mise à la charge du bailleur et a donné lieu à une astreinte, cette créance d’astreinte présente un lien de connexité avec la créance de loyers, les deux créances pouvant alors se compenser .

Le preneur peut invoquer l’exception d’inexécution qui, initialement d’origine jurisprudentielle , a été consacrée par les articles 1219 et 1220 du Code civil, issus de l’ordonnance 2016-131 . Aux termes du premier de ces textes, “une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave”. L’article 1220 prévoit la suspension de l’exécution, par une partie, de son obligation lorsqu’il est manifeste que “son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle”, cette suspension devant être notifiée dans les meilleurs délais. Si les juges du fond peuvent ordonner la suspension des loyers, c’est à la condition que le preneur se trouve dans l'impossibilité absolue d'exploiter son fonds de commerce dans les lieux loués , dont ils apprécient souverainement l’ampleur au regard de la destination du bail  et dont la preuve pèse sur le preneur . Il en est ainsi lorsque le bailleur manque à ses obligations de délivrance ou d'entretien , en mettant à la disposition du preneur un local qui ne lui permet pas d'exercer son activité professionnelle , en refusant de procéder à la mise en conformité des locaux prescrite par l'autorité administrative , ou encore en réalisant des travaux qui ont rendu, pendant leur exécution, les locaux impropres à l'usage auquel ils sont destinés .

Un preneur est fondé à invoquer l’exception d’inexécution, du fait de l'impossibilité d'user des lieux loués conformément à la destination prévue au bail, lorsque par suite d’une explosion, le fournil a été détruit , lorsque les lieux loués ne sont ni exploités ni exploitables en l'absence de réparation des dégâts, qui font suite à un incendie n’ayant pas totalement détruit les locaux , lorsque le bailleur n'effectue pas les travaux nécessités par l'état de chacun des locaux donnés à bail , lorsque le clos et le couvert ne sont plus assurés  ou lorsque, pendant la période durant laquelle il n'a pas occupé les locaux, même s’il a choisi de les évacuer le temps des travaux de désamiantage de la toiture de l’immeuble loué diligentés par le bailleur sans y être contraint par une décision administrative, l'inspecteur du travail a indiqué, dans un courrier adressé au preneur, que tout risque de propagation de l'amiante n'était pas écarté pour les salariés .

En revanche, un preneur n’est pas fondé à se prévaloir de l’exception d’inexécution lorsqu’une impossibilité totale d'utiliser les locaux loués conformément à leur destination contractuelle n'est pas établie , même si le bailleur a manqué à ses obligations contractuelles du fait de désordres ou de l’inexécution de travaux de réfection nécessaires , lorsqu’en dépit de difficultés liées à des inondations, il a été en mesure d'exploiter, selon la destination des baux, l'ensemble immobilier  ou lorsque l'activité a pu se poursuivre dans les lieux loués en dépit d’infiltrations d'eau de pluie en toiture de nature à troubler la jouissance paisible des lieux et dont les réparations incombent au bailleur . Il en va de même du preneur qui ne démontre pas que les troubles à la sécurité l’ont empêché de jouir paisiblement du local loué et ont impacté les résultats de son activité commerciale .

Enfin, l’article 1343-5 du Code civil, issu de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 , donne la faculté au juge, compte tenu de la situation du preneur et en considération des besoins du bailleur, d’accorder des délais de paiement en reportant ou en échelonnant, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Cass. 3e civ., 5 mars 1997, LawLex202200011559JBJ, Bull. civ. III, n° 46 ; AJDI 1998, 617 ; AJDI 1998, 618, obs. TALON ; JCP N 1997, II, 1189, note DJIGO ; RJDA mai 1997, n° 616 et la note ; Defrénois 1997, 1010, obs. DELEBECQUE ; Loyers et copropr. 1997, 96, concernant un bail d’habitation.

Cass. 3e civ., 2 mars 1977, LawLex202200007011JBJ, Bull. civ. III, n° 105 : en l’espèce, le preneur avait versé les loyers échus entre les mains d’un notaire.

Cass. 3e civ., 9 décembre 2008, LawLex202200011563JBJ.

Orléans, 24 septembre 2020, LawLex202200010648JBJ.

Cass. 3e civ., 12 mai 2015, LawLex202100004537JBJ : en l’espèce, le local loué se situait dans un immeuble ayant fait l’objet d’un arrêté de péril.

Cass. com., 27 septembre 2016, LawLex202100002745JBJ, D. 2016, Actu. 1993 ; D. 2016, 1997 ; RTD civ. 2016, 861, obs. BARBIER ; RTD com. 2017, 183, obs. MARTIN-SERF ; JCP G 2016, 1106 ; JCP E 2016, 1618 ; JCP E 2016, 1661, n° 2, obs. PETEL ; JCP G 2017, 91, spéc. n° 2, obs. PETEL ; RD. banc. fin 2016, n° 250, note PIEDELIEVRE ; Gaz. Pal. 10 janv. 2017, 63, note KENDERIAN ; Act. proc. coll. 2016-17, comm. 234, obs. CAGNOLI ; LEDEN 12/2016, 4, obs. CAMENSULI-FEUILLARD ; BJE 2017, 30, note BENILSI, selon laquelle la créance d’astreinte est née du bail commercial, tout comme la créance de loyers.

Cass. 3e civ., 15 décembre 1993, LawLex202100005917JBJ, Bull. civ. III, n° 168 ; D. 1994, 462, note STORCK ; AJPI 1994, 209 ; RDI 1994, 308, obs. BRIERE DE L'ISLE et DERRUPPE ; JCP N 1994, II, 119 ; Dr. & patr. 1994, 56, note CHAUVEL ; 8 avril 1998, LawLex202100004522JBJ ; 11 janvier 2006, LawLex201000000126JBJ, Bull. civ. III, n° 13 ; D. 2006, AJ 443, obs. CHEVRIER ; RTD com. 2006, 566, obs. SAINTOURENS ; JCP E 2006, 292 ; JCP E 2006, n° 6-7, 1240 ; RJDA 2006, n° 404 ; Administrer 3/2006, 40, obs. BOCCARA et LIPMAN-W. BOCCARA, en matière de location-gérance.

Ord. 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, art. 2.

Lyon, 22 mai 2018, LawLex202200011569JBJ ; Metz, 16 décembre 2021, LawLex202200010822JBJ.

Cass. 3e civ., 17 novembre 2016, LawLex202200010878JBJ, qui casse l’arrêt d’appel qui rejette la demande du preneur en suspension des loyers, sans rechercher si l'absence d'exécution par le bailleur des travaux destinés à mettre un terme aux infiltrations n'a pas eu pour conséquence une impossibilité, pour le locataire, de poursuivre son activité. – V. aussi Cass. 3e civ., 27 février 2020, LawLex202200010892JBJ, D. 2020, 1541, obs. DUMONT ; Rev. prat. rec. 2021, 25, chron. MORGANTINI et RUBELLIN ; Loyers et copropr. 2020, Comm. 49, note CHAVANCE.

Cass. 3e civ., 29 septembre 2010, LawLex202200011558JBJ, Bull. civ. III, n° 174 ; AJDI 2011, 204, obs. ZALEWSKI ; RLDC 2010/76, n° 3991, obs. PAULIN ; Loyers et copropr. 2010, comm. 278.

Paris, 13 septembre 2019, LawLex202200010821JBJ.

Lyon, 22 mai 2018, LawLex202200011569JBJ, préc.

Paris, 13 septembre 2019, LawLex202200010821JBJ, préc.

Cass. 3e civ., 11 janvier 2006, LawLex201000000126JBJ, préc.

Cass. 3e civ., 27 février 2020, LawLex202200010892JBJ, préc.

Cass. 3e civ., 21 novembre 1990, LawLex202100004521JBJ, Bull. civ. III, n° 238 ; RDI 1991, 264, obs. BRIERE DE L'ISLE et DERRUPPE ; JCP N 1991, II, 213 : en l’espèce, ni le magasin de vente au détail, ni l’appartement n’avaient été détruits.

Cass. 2e civ., 9 avril 2009, LawLex202200010864JBJ, Resp. civ. et assur. 2009, 192, obs. GROUTEL ; RGDA 2009, 890, note ASTEGIANO-LA RIZZA : en l’espèce, le bailleur avait empêché, par son fait, la reprise d'activité dans des conditions normales d'exploitation.

Douai, 27 janvier 2022, LawLex202200010816JBJ.

Saint-Denis, 27 septembre 2017, LawLex202200011567JBJ.

Cass. 3e civ., 19 novembre 2015, LawLex202100004538JBJ, Dalloz actualité, 27 nov. 2015, obs. ROUQUET ; RDC 2016/2, 249, obs. SEUBE ; Loyers et copropr. 2016, comm. 2, obs. VIAL-PEDROLETTI.

Cass. 3e civ., 19 février 1997, LawLex202200009889JBJ, Bull. civ. III, n° 35 ; JCP G 1997, IV, 799 ; JCP N 1997, II, 943 ; Loyers et copropr. 1997, n° 176, obs. BRAULT et MUTELET, qui précise que dans le cas d’une sous-location, le propriétaire des lieux loués dispose d’une action directe à l’encontre du sous-locataire dans la limite du “sous-loyer”.

Paris, 13 septembre 2019, LawLex202200010821JBJ, préc. : en l’espèce, les constats d’état des lieux faisaient apparaître une détérioration importante de la peinture de certains murs et, dans une partie des lieux seulement, de la peinture des plafonds, ainsi que des tâches sur la moquette.

Toulouse, 7 décembre 2017, LawLex202200011564JBJ.

Cass. 3e civ., 8 avril 1998, LawLex202100004522JBJ, préc. : en l’espèce, le preneur n'a pas nié exploiter une résidence hôtelière et n'a jamais été en mesure de désigner avec précision tel ou tel lot de la résidence qui n'aurait pu être loué depuis son arrivée.

Cass. 3e civ., 23 mai 2013, LawLex202200010885JBJ, Bull. civ. III, n° 63 ; D. 2013, 1349 ; JCP E 2013, 1368.

Dijon, 30 août 2018, LawLex202200010815JBJ.

Ord. 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, art. 3.

Cass. 3e civ., 5 novembre 2015, LawLex202200010443JBJ, D. 2016, 1613, obs. DUMONT-LEFRAND ; AJDI 2016, 272, obs. HALLARD, qui précise que la clause résolutoire doit être mise en œuvre de bonne foi.

Cass. 3e civ., 16 octobre 2007, LawLex202200008271JBJ, RJDA 2008, n° 11 : en l’espèce, les loyers et les charges échus n’avaient pas été réglés dans le délai spécifié par les commandements notifiés antérieurement.

Cass. 3e civ., 26 mai 2016, LawLex202200011561JBJ.

Cass. 3e civ., 12 juillet 2018, LawLex202200011560JBJ, Loyers et copropr. 2018, comm. 216, BRAULT.

Cass. 2e civ., 14 février 2002, LawLex202200011562JBJ, Bull. civ. II, n° 14 ; Dr. et patr. 5/2002, 92, obs. CHAUVEL.

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