Contrat de bail, loyer, renouvellement ...

Baux commerciaux/Fonds de commerce

Aux termes des articles 1728 et 1729 du Code civil, le preneur doit user des lieux loués raisonnablement, sous peine de s’exposer à la résiliation du bail commercial. Aussi, tout abus de jouissance dont il résulterait des troubles anormaux pour le bailleur ou les tiers est-il interdit. En application du principe selon lequel “nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage”, le bailleu …

Nuisances

Aux termes des articles 1728 et 1729 du Code civil, le preneur doit user des lieux loués raisonnablement, sous peine de s’exposer à la résiliation du bail commercial. Aussi, tout abus de jouissance dont il résulterait des troubles anormaux pour le bailleur ou les tiers est-il interdit. En application du principe selon lequel “nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage”, le bailleur, qui peut être responsable in solidum avec son preneur  des nuisances commises par ce dernier, doit mettre tout en œuvre pour faire cesser le trouble . Il appartient aux juges du fond de caractériser l'anormalité de ces troubles en appréciant, dans chaque cas d’espèce, eu égard notamment à la nature des lieux, leur caractère excessif au regard des inconvénients normaux de voisinage , et de fixer le montant de la réparation à laquelle les victimes de ces troubles peuvent prétendre . S’ils sont tenus de les faire cesser, les juges du fond doivent cependant limiter au strict nécessaire les mesures restrictives d'activité qui s'imposent .

Les nuisances sonores constituent un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage lorsqu’elles dépassent un seuil de tolérance admissible par rapport à la gêne normale qu'il convient raisonnablement de souffrir . C’est le cas, par exemple, des nuisances sonores importantes résultant de l'exploitation nocturne d’un restaurant ainsi que du bruit de l'extracteur et du compresseur qui dépasse les valeurs admises , du bruit résultant de travaux professionnels dès lors qu’il est abusif et dépasse les inconvénients normaux de voisinage , de l’usage de musiques avec un volume sonore important , du regroupement d’individus consommant bruyamment, sur la voie publique, l’alcool vendu par le preneur , de l’exploitation d’une discothèque générant des nuisances sonores dans un local, qui n’est pas susceptible de recevoir une telle activité au regard de sa structure , ou plus généralement de la persistance dans l'organisation de soirées . En revanche, il a été jugé que des bruits, réellement perceptibles, en provenance d'une terrasse et s'ajoutant aux bruits de la circulation, s'ils constituent un trouble, ne présentent pas un caractère anormal pour des voisins qui ont acquis, en connaissance de cause, un appartement situé directement au-dessus d'un lieu de restauration . Il en est de même des bruits importants de choc d'ustensiles de cuisine, de gens qui parlent ou encore de fermeture d’un rideau de fer .

Les nuisances olfactives peuvent générer un trouble anormal. C’est le cas des odeurs nauséabondes dues à un défaut d’hygiène et à la conservation d’aliments avariés , ou des odeurs de cuisine qui se répandent de façon anormale dans un appartement voisin en raison du défaut de conformité de l'extracteur de fumée , ou lorsque les filtres d'une hotte sont insuffisants et mal entretenus, et la ventilation faite en sens inverse .

3) Non-respect de la destination des lieux et/ou du règlement de copropriété

L’abus de jouissance peut être caractérisé s’il contrevient à une stipulation du bail, qui impose au preneur, lorsque l’interdiction de nuisances sonores est portée à la clause de destination, qu’il fasse effectuer, à ses frais, tous travaux pour empêcher celles-ci , ou si elle figure au règlement de copropriété , qui autorise l’affectation des locaux à des commerces à la condition que ces derniers ne soient ni bruyants, ni malodorants, ni dangereux , ou qui stipule, sans condition, que l'immeuble est destiné à l'usage mixte d'habitation et de bureaux professionnels ou commerciaux, et que n'importe quel commerce ou artisanat peut être exercé dans les locaux du rez-de-chaussée . Les juges du fond font une interprétation restrictive des clauses du règlement. Aussi, l’affectation d’un local à un usage de restauration n’est-elle pas interdite par le règlement de copropriété lorsque celui-ci le désigne comme affecté à un usage commercial sans aucune autre réserve que celle afférente à la prohibition des nuisances sonores ou olfactives . Lorsque l’activité du preneur est autorisée par le règlement de copropriété, elle doit, dans tous les cas, se conformer aux exigences de celui-ci au regard des nuisances sonores, même si des travaux ont été effectués en ce sens . Il appartient aux juges du fond de rechercher si l'activité permise par le bail est précisément interdite par le règlement et si elle est effectivement génératrice de nuisances . Ainsi, ils ne peuvent refuser d’ordonner la cessation d'activité d'une pizzeria, tout en constatant l'existence de nuisances olfactives émanant d’elle, alors que le règlement de copropriété exclut formellement les établissements générant ce type de nuisances . Si le bailleur doit répondre, vis-à-vis de la copropriété, des troubles générés par l’activité de son preneur, sans pouvoir se retrancher derrière la responsabilité de ce dernier , chacun des copropriétaires est recevable à exercer, en lieu et place de celui-ci, une action oblique en résiliation de bail, à l’encontre du locataire méconnaissant le règlement de copropriété , lorsque la carence du bailleur est de nature à compromettre leurs droits .

4) Nuisances résultant d’activités exercées conformément aux règles antérieures en vigueur

L’article L. 113-8 du Code de la construction et de l'habitation dispose que “ les dommages causés aux occupants d'un bâtiment par des nuisances dues à des activités agricoles, industrielles, artisanales, commerciales, touristiques, culturelles ou aéronautiques, n'entraînent pas droit à réparation lorsque le permis de construire afférent au bâtiment exposé à ces nuisances a été demandé ou l'acte authentique constatant l'aliénation ou la prise de bail établi postérieurement à l'existence des activités les occasionnant dès lors que ces activités s'exercent en conformité avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur et qu'elles se sont poursuivies dans les mêmes conditions ”. Ces dispositions, qui ne sont pas applicables dans les rapports entre copropriétaires , ne peuvent toutefois pas recevoir application, même si les locaux en cause étaient occupés par un garage au moment de l’acquisition du pavillon voisin, lorsque le preneur a installé le centre de contrôle technique, source des nuisances sonores, en vertu d’un bail conclu postérieurement à cette acquisition .

Orléans, 14 novembre 2011, LawLex202300002639JBJ : en l’espèce, le bailleur a décidé de louer au preneur un local pour une activité de restauration sans s’assurer que cette activité puisse être exercée sans troubler de manière anormale la tranquillité du voisinage. – V. aussi Toulouse, 15 février 2016, LawLex202300002576JBJ, selon laquelle la réparation du trouble anormal du voisinage incombe tant au propriétaire du local commercial dont émane le trouble qu'au locataire dont l'activité de restauration, nécessitant l'usage d'un système d'extraction, est à l'origine du trouble.

Cass. 3e civ., 17 avril 1996, LawLex202300002618JBJ, Bull. civ. III, n° 108 ; D. 1996, 133 ; D. 1997, 271 ; D. 1998, 61 ; AJDI 1997, 208, obs. GALLET ; AJPI 1997, 208 ; RTD civ. 1996, 638, obs. JOURDAIN ; JCP G 1996, 1381 ; JCP 1996, 3872, obs. PERINET-MARQUET ; Resp. civ. et assur. 1996, 251 ; Loyers et copropr. 1996, 299, les mises en demeure adressées par le bailleur, au preneur, pour mettre fin aux nuisances, n’étant pas jugées suffisantes.

Cass. 3e civ., 15 septembre 2009, LawLex202300002615JBJ.

Aix-en-Provence, 13 septembre 2018, LawLex202300002605JBJ.

Paris, 3 février 2007, LawLex202300002641JBJ.

Paris, 4 juin 2014, LawLex202300002642JBJ, concernant un restaurant.

Paris, 22 février 2007, LawLex202300002574JBJ, préc.

Paris, 4 juin 2014, LawLex202300002642JBJ, préc., concernant une pizzeria.

Cass. 3e civ., 11 juin 1997, LawLex202100004558JBJ, préc.

Paris, 13 octobre 2010, LawLex202300002651JBJ, préc.

Paris, 13 octobre 2010, LawLex202300002651JBJ : en l’espèce, le preneur est tenu, par son bail, de veiller à l'absence de nuisances sonores et au respect du règlement de copropriété.

Dijon, 5 septembre 2013, LawLex202300002636JBJ, où il a été jugé que la persistance, depuis de nombreuses années, de nuisances olfactives en lien avec une activité de restauration, peu compatibles avec l’activité d’un copropriétaire voisin, ainsi que leur aggravation par des travaux successifs liés à l’installation d'une ventilation non conforme et dangereuse, constituent un trouble anormal du voisinage.

Aix-en-Provence, 24 mai 2013, LawLex202300002606JBJ.

Cass. 3e civ., 20 juillet 1994, LawLex202300002633JBJ, Bull. civ. III, n° 156 ; D. 1995, 408, note MARNIERE ; RDI 1994, 690, obs. CAPOULADE et GIVERDON ; RTD com. 1995, 156, obs. ALFANDARI ; JCP G 1994, 2360 ; JCP N 1995, 12 ; Defrénois 1995, 36040 ; Rev. loyers 2007, 166 ; Loyers et copropr. 1994, 482 ; Administrer 1995, 39, note GELINET, qui casse l’arrêt d’appel qui ne précise pas en quoi une activité cultuelle est de nature à créer des nuisances et des risques excédant ceux qui pouvaient résulter de la destination de l'immeuble.

Cass. civ. 3e, 3 juin 1998, LawLex202100004564JBJ, la manière d'assurer l'exploitation du restaurant par une animation musicale ne constituant pas, par nature, une infraction aux dispositions du règlement.

Cass. 3e civ., 14 avril 2010, LawLex202100004589JBJ, D. 2011, 199, obs. ATIAS et CAPOULADE ; AJDI 2010, 478 ; Dr. & patr. avr. 2011, 118, obs. MALLET-BRICOUT ; Loyers et copropr. 2017, dossier 10, DE PUYSEGUR ; Administrer août-sept. 2010, n° 435, 40, obs. BOUYEURE ; Inf. rap. copropr. avr. 2011, 13, obs. RITSCHY : en l’espèce, les horaires de fermeture du restaurant étant très tardifs, pour que l'activité du preneur soit compatible avec les exigences du règlement au regard des nuisances sonores, il devait lui être ordonné de fermer son commerce au plus tard à 22 heures.

Cass. 3e civ., 2 juillet 2013, LawLex202100004593JBJ, Loyers et copropr. 2013, comm. 285, VIGNERON ; Administrer nov. 2013, 57, obs. BOUYEURE.

Cass. 3e civ., 13 novembre 2013, LawLex202300002614JBJ, AJDI 2014, 149 ; Loyers et copropr. 2014, 25, note VIGNERON ; Administrer 2014, 45.

Dijon, 5 septembre 2013, LawLex202300002636JBJ.

Cass. 3e civ., 8 avril 2021, LawLex202300002612JBJ, D. 2021, 2251, obs. JARIEL ; RTD 2021, 642, obs. BARBIER ; RDC 2021, 21, note PELLET ; RDC 2021, 30, note HONTEBEYERIE ; JCP 2021, 580, note STRICKLER ; JCP G 2021, 560, obs. PERINET-MARQUET ; JCP G 2021, 623, note LOISEAU ; JCP E 2021, 307 ; RJDA 2021, 456 ; Gaz Pal 2021, 69, BARBIER ; Gaz Pal 2021, 1615, obs. PARMENTIER ; Rev. prat. rec. 2021, 23, chron GANTSCHNIG ; Rev. prat. rec. 2022, 46, obs. MORGANTINI et RUBELLIN ; Loyers et copropr. 2021, 99, obs. COUTANT-LAPALUS ; Administrer 2021, 44, obs. BOUYEURE : en l’espèce, le bailleur, qui a été informé par le syndic et les autres copropriétaires des nuisances occasionnées, n’a pas engagé de démarches en vue de permettre le respect du règlement de copropriété.

Cass. 3e civ., 12 juillet 2018, LawLex202100004601JBJ, Loyers et copropr. 2018, comm. 207, obs. COUTANT-LAPALUS ; Administrer déc. 2018, 37, obs. BOUYEURE.

Cass. 3e civ., 23 janvier 1991, LawLex202300002635JBJ, Bull. civ. III, n° 31 ; AJDI 1991, 752 ; RDI 1991, 252, obs. CAPOULADE et GIVERDON ; RDI 1991, 453, obs. BERGEL ; JCP N 1991, 269 ; RCA 1991, 141 ; Rev. loyers 1991, 239 ; Administrer 1991, 42.

Paris, 27 septembre 2012, n° 10/24376, LawLex202300003006JBJ.

Cass. 2e civ., 7 février 2008, LawLex202300002608JBJ, RDI 2008, 254, note TREBULLE.

Paris, 16 janvier 2013, LawLex202300002561JBJ, Loyers et copropr. 2013, 152, note VIGNERON ; Administrer 2013, 58, obs. BOUYEURE, où la cour considère que la cessation de l'activité de café-bar-brasserie-restaurant du preneur, impliquant sa fermeture, constitue une sanction excessive disproportionnée aux troubles réellement subis par les copropriétaires même s'ils restent anormaux.

Toulouse, 13 avril 2011, LawLex202200000888JBJ, AJDI 2011, 795 ; Loyers et copropr. 2012, comm. 48, CHAVANCE, qui précise que les nuisances sonores sont appréciées in concreto.

Cass. 3e civ., 11 juin 1997, LawLex202100004558JBJ, RJDA 1997, n° 1172.

Cass. 3e civ., 8 février 1972, LawLex202300002613JBJ : en l’espèce, le bail ne met aucunement à la charge du bailleur les travaux d’isolation phonique.

Metz, 5 mai 2022, LawLex202300002637JBJ, à propos de l’exploitation d’un débit de boisson, d’un restaurant et d’une cafétaria.

Paris, 22 février 2007, LawLex202300002574JBJ, Loyers et copropr. 2007, 180.

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