Contrat de bail, loyer, renouvellement ...

Baux commerciaux/Fonds de commerce

Conformément à l’article L. 145-48, alinéa 1, du Code de commerce, la déspécialisation plénière est soumise à un certain nombre de conditions cumulatives .
L’exercice d’une activité nouvelle et différente doit être examiné en fonction de la conjoncture économique et des nécessités de l’organisation rationnelle de la distribution . Le critère de la conjoncture économique s’apprécie au regard de l’é …

Conditions

Conformément à l’article L. 145-48, alinéa 1, du Code de commerce, la déspécialisation plénière est soumise à un certain nombre de conditions cumulatives .

L’exercice d’une activité nouvelle et différente doit être examiné en fonction de la conjoncture économique et des nécessités de l’organisation rationnelle de la distribution . Le critère de la conjoncture économique s’apprécie au regard de l’état de santé financière de l’activité du preneur. Si le manque de rentabilité de l’activité justifie la déspécialisation, la désaffectation des locaux qui résulte uniquement d’un choix du preneur, ne démontre en rien que l'activité de dancing qui y était exercée n'est plus rentable . La déspécialisation ne peut permettre de changer la nature d’un commerce normalement rentable pour un commerce dont les bénéfices escomptés seront plus substantiels afin de réaliser une opération spéculative .

L’article L. 145-48, alinéa 1, précise que la nouvelle activité envisagée doit répondre aux nécessités de l'organisation rationnelle de la distribution. Ne répond pas à ce critère l'implantation d'une nouvelle agence immobilière lorsque dans le secteur concerné il existe déjà dix agences immobilières dont l'une fait l'objet d'une décision de liquidation judiciaire et une autre d'une procédure de redressement judiciaire .

S’il appartient aux juges du fond d’apprécier souverainement ces critères , il revient au preneur de les démontrer . Ainsi, le preneur doit prouver non seulement que l'activité initialement exploitée n'est plus rentable mais également que la ou les nouvelles activités sont pertinentes compte tenu des nécessités de l'organisation de la distribution dans le quartier . Un preneur ne démontre pas que l'activité de “traiteur” et celle de “glacier, salon de thé et boulangerie-pâtisserie-chocolatier” répondent à ces nécessités, lorsque ce type de commerce existe déjà dans le quartier . La Cour d’appel de Paris a considéré qu’un preneur invoque, à tort, la plus-value que la transformation envisagée pourrait conférer, tant au fonds de commerce qu'à l'immeuble lui-même, dès lors qu’il ne démontre pas que compte tenu des critères de rentabilité et de pertinence, l'activité de “teinturerie-pressing“ qu'il exerçait est inadaptée et que l'activité nouvelle de “prêt à porter-chaussures“ qu'il souhaite exercer s'impose .

La déspécialisation doit être autorisée lorsque l'activité de vente de voilages et tissus d'ameublement, exercée par le preneur, devenue insuffisamment rentable faute de correspondre aux besoins de la clientèle et aux modes d'exploitation en cours, est remplacée par celle de “vente de produits alimentaires, restauration rapide à emporter, point chaud, vente de pain, pâtisseries, viennoiseries, sandwiches de jour exclusivement, sans possibilité de consommation sur place”, plus pertinente au regard des nécessités de l'organisation rationnelle de la distribution , ou lorsque l’adjonction à l'activité de vente et toilettage d'animaux de compagnie, peu rentable dans un marché presque saturé, de celle de vente d'accessoires, cadeaux et petits objets ne remet pas en cause l’organisation rationnelle de la distribution , ou encore lorsqu’il est adjoint à un commerce de cartes géographiques peu rentable, sinon déficitaire, un commerce non alimentaire, répondant à la souplesse requise en période de mutation et d'instabilité de la distribution . De même, les résultats financiers d'un pressing, l'évolution du commerce de nettoyage à sec et sa distribution dans le quartier, ainsi que la spécificité du commerce de restauration envisagé dans un quartier touristique où sont implantés plusieurs hôtels, peuvent justifier la déspécialisation  .

L'article L. 145-48, alinéa 1, du Code de commerce n'autorise la déspécialisation que lorsque les activités envisagées sont compatibles avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble . La même solution vaut pour le cessionnaire du droit au bail qui envisage l’exploitation d’une nouvelle activité dans les lieux loués . Aussi, la déspécialisation ne peut-elle être autorisée lorsque l’activité envisagée est de nature à créer des nuisances sonores  et olfactives  pour le voisinage. Lorsqu’aucune nuisance sonore n'est véritablement à craindre s'agissant d'un commerce, dédié à la vente de produits alimentaires, ainsi qu’à la restauration rapide à emporter, exercé exclusivement de jour, sans consommation sur place, lequel n'est pas davantage de nature à créer des nuisances olfactives disproportionnées, le local n'étant qu'un point de vente sans fabrication sur place et comportant déjà un conduit d'extraction, la nécessité de transformer l'activité exercée apparaît compatible avec la destination de l'immeuble, ses caractères et sa situation . Dans un ensemble immobilier, la nouvelle activité doit par ailleurs être conforme au règlement de copropriété de l’immeuble. Dès lors, un changement de la nature de l'activité commerciale, dans un lot où le règlement de copropriété autorise l'exercice du commerce, n'implique pas, par lui-même, une modification de la destination de l'immeuble et peut s'effectuer librement, sous réserve de ne porter atteinte, ni aux droits des autres copropriétaires ni à des limitations conventionnelles justifiées par la destination de l'immeuble .

Enfin, l’article L. 145-48, alinéa 2, du Code de commerce apporte une atténuation au principe de la déspécialisation spécifique aux ensembles commerciaux. En effet, le texte dispose que “le premier locataire d'un local compris dans un ensemble constituant une unité commerciale définie par un programme de construction ne peut se prévaloir de cette faculté pendant un délai de neuf ans à compter de la date de son entrée en jouissance”.

Cass. 3e civ., 24 janvier 2001, LawLex202200000580JBJ.

Paris, 22 février 1990, LawLex202300008811JBJ.

Toulouse, 24 septembre 2008, LawLex202300008796JBJ.

Cass. 3e civ., 4 mars 1992, LawLex202200000587JBJ, Bull. civ. III, n° 69 ; D. 1992, IR 105.

Cass. 3e civ., 8 juin 1995, LawLex202200000581JBJ, Bull. civ. III, n° 140 ; RD Imm. 1995, 604, obs. DERRUPPE ; JCP G 1995, IV, 1855 ; Gaz. Pal. 1996, 1, 256, note BARBIER ; Defrénois 1995, 1125, obs. VERMELLE.

Cass. 3e civ., 24 juin 1992, LawLex202200000588JBJ, Bull. civ. III, n° 221.

Cass. 3e civ., 23 novembre 2011, LawLex202200000623JBJ, Bull. civ. III, n° 197 ; D. 2011, Actu. 2928, obs. ROUQUET ; Gaz. Pal. 17-18 févr. 2012, 32, note BRAULT ; Loyers et copropr. 2012, comm. 145 ; Administrer 1/2012, 54, note BARBIER : en l’espèce, le preneur disposait de la faculté de céder son droit au bail avec déspécialisation, ouverte au commerçant ayant demandé à faire valoir ses droits à la retraite.

Bordeaux, 5 mars 2008, LawLex202300008878JBJ, AJDI 2008, 583 ; Loyers et copropr. 2008, comm. 160, selon laquelle l’activité de salon de thé envisagée n’est pas compatible avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble dès lors que l'installation d'une terrasse extérieure présente un risque induit de pollution sonore et olfactive.

Paris, 23 septembre 2020, LawLex202300008809JBJ, préc., retenant que les activités de “traiteur” et de “boulangerie-pâtisserie” envisagées sont de nature à créer des nuisances olfactives dans la mesure où elles supposent des activités de cuisson et des locaux adaptés à cet usage.

Toulouse, 24 septembre 2008, LawLex202300008796JBJ, préc.

Cass. 3e civ., 10 décembre 1986, LawLex202200000589JBJ, Bull. civ. III, n° 179 ; D. 1987, jurispr. 146, note GIVERDON.

Versailles, 5 mars 2009, LawLex202200000889JBJ, RJDA déc. 2010, n° 1137, qui ajoute que la conjoncture économique ne justifie pas la déspécialisation dès lors que la réglementation relative aux ouvertures tardives qui rendrait plus difficile l’exercice de l’activité de dancing, s’appliquerait de la même manière à l’activité de bowling envisagée par le preneur.

Paris, 22 février 1990, LawLex202300008811JBJ, préc.

Cass. 3e civ., 4 novembre 1992, LawLex202300008810JBJ.

Cass. 3e civ., 4 novembre 1992, LawLex202300008810JBJ, préc.

Cass. 3e civ., 24 janvier 2001, LawLex202200000580JBJ, préc. – V. aussi Montpellier, 24 novembre 2015, LawLex202200000590JBJ ; Bordeaux, 11 mai 2016, LawLex202200000617JBJ, qui considère que les conditions tenant à la conjoncture économique et aux nécessités de l'organisation rationnelle de la distribution étant cumulatives, il revient au demandeur à la déspécialisation de démontrer qu'elles sont réunies.

Grenoble, 22 janvier 2015, LawLex202300008797JBJ, Loyers et copropr. 2015, comm. 69, obs. CHAVANCE.

Paris, 23 septembre 2020, LawLex202300008809JBJ.

Paris, 22 février 1990, LawLex202300008811JBJ, préc., qui retient qu'il était au contraire certain que l'activité prévue par le bail était parfaitement rentable et que son maintien présentait un intérêt pour la clientèle locale, eu égard à l'importance du prix de cession du fonds de commerce et à l'augmentation très sensible du chiffre d'affaires au cours des trois derniers exercices.

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