Le Droit de la consommation, troisième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : publicité, pratiques commerciales déloyales, conditions de validité du contrat, clauses abusives, conformité des produits, vices cachés, sécurité des produits.

Droit de la consommation

Les pratiques commerciales trompeuses peuvent parfois relever de plusieurs qualifications. Lorsqu'un seul acte place son auteur en infraction avec plusieurs dispositions répressives qui protègent une même valeur sociale, il y a cumul idéal d'infractions. Dans ce cas, c'est la qualification la plus haute qui l'emporte quant à la détermination de la sanction. Dans les autres hypothèses, il y concour …

Cumul et concours d'infractions

Les pratiques commerciales trompeuses peuvent parfois relever de plusieurs qualifications. Lorsqu'un seul acte place son auteur en infraction avec plusieurs dispositions répressives qui protègent une même valeur sociale, il y a cumul idéal d'infractions. Dans ce cas, c'est la qualification la plus haute qui l'emporte quant à la détermination de la sanction. Dans les autres hypothèses, il y concours réel d'infractions (C. pén., art. 132-2) et chacune des sanctions encourues peut alors être prononcée, avec ses peines complémentaires propres, étant précisé que lorsque plusieurs peines de même nature sont encourues, il ne peut être prononcé qu'une seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal le plus élevé (C. pén., art. 132-3). Le plus souvent, le délit de publicité trompeuse a été retenu cumulativement avec le délit d'escroquerie sanctionné par l'article 313-1 du Code pénal et celui de tromperie prévu par l'article L. 441-1 (ancien art. L. 213-1) du Code de la consommation. Mais des conflits de qualification peuvent également apparaître avec les règles relatives à la publicité des prix, à la publicité des crédits ou encore avec l'infraction d'apposition de fausse appellation d'origine .

L'escroquerie est définie à l'article 313-1 du Code pénal comme “le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge”. La question s'est posée de savoir si une publicité trompeuse ne pouvait pas constituer la manœuvre frauduleuse constitutive du délit d'escroquerie, afin de permettre au juge d'infliger des sanctions plus élevées . La Cour de cassation a apporté une réponse positive dans une affaire où une importante campagne publicitaire mettait en scène une vedette de la télévision afin d'assurer la promotion d'un produit . Les juges condamnent également les agissements consistant à solliciter le versement d'une somme d'argent, alors que le professionnel n'est pas en mesure d'assurer la prestation promise , ou les publicités tapageuses, comme celle de l'agent immobilier qui fait naître chez le consommateur l'espérance d'un revenu locatif garanti couvrant la totalité des remboursements d'un prêt conventionné, en dissimulant les limites de la garantie locative . 

Selon la Cour de cassation, les pratiques commerciales trompeuses et l'escroquerie ne réalisent pas un cumul idéal d'infraction car elles se caractérisent par des éléments constitutifs distincts  et ne protègent pas le même intérêt social. La publicité trompeuse tend en effet à protéger la confiance publique, alors que l'escroquerie vise à garantir le droit de propriété. Il y a plutôt concours réel d'infractions, notamment lorsqu'un professionnel obtient des versements de fonds des parents d'élèves et des aides publiques en proposant des formations préparatoires à divers diplômes que son institut n'est pas en mesure de dispenser , ou lorsqu'il adresse aux consommateurs des bulletins de participation à une loterie leur laissant entendre qu'ils ont gagné un prix de valeur alors que le lot est d'une valeur dérisoire, afin de les inciter à passer commande d'autres produits .

Il existe des similitudes entre le délit de pratique commerciale trompeuse et celui de tromperie défini à l'article L. 441-1 du Code de la consommation. En effet, plusieurs termes de l'énumération de l'article L. 121-2, 2° sont repris dans la définition de la tromperie : nature, qualités substantielles, origine, composition, etc. Cependant, ces délits diffèrent à plus d'un titre. Le délit de tromperie implique, en premier lieu, la preuve de la mauvaise foi de son auteur, alors que cet élément n'est pas exigé en matière de pratique commerciale trompeuse. En second lieu, contrairement au délit de pratique commerciale trompeuse, le délit de tromperie suppose l'existence d'un contrat. Du fait de ces différences, l'un des textes peut s'appliquer sans l'autre : une relaxe pour tromperie ne fait pas obstacle à une condamnation pour publicité trompeuse .

Les deux infractions peuvent être sanctionnées conjointement sans qu'il en résulte un cumul idéal d'infractions, dès lors que les éléments matériels des deux délits sont distincts  et que l'incrimination de tromperie a pour objet de préserver les patrimoines privés, tandis que l'incrimination des pratiques commerciales trompeuses protège la confiance publique . En présence d'un concours réel d'infractions  sanctionnées par les mêmes peines, le juge ne peut prononcer qu'une seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal le plus élevé . En revanche, il pourra appliquer les peines complémentaires plus nombreuses du délit de tromperie.

En matière de crédit immobilier, un cumul d'infractions est possible en cas de manquement aux règles posées aux articles L. 313-1 et suivants du Code de la consommation et à l'article L. 121-2 du même code, même si la pratique n'a pas pour objet un prêt, mais comporte des informations relatives à un prêt . La même solution s'applique en matière de publicité pour les crédits à la consommation, soumis aux dispositions des articles L. 121-2 et L. 312-1 et suivants du Code la consommation .

En matière de publicité des prix, la Cour de cassation estime que tombe sous le coup de l'article L. 121-2 “toute publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, notamment lorsque les éléments sur lesquels elle porte font l'objet d'une législation ou réglementation spécifique” . Tel est manifestement le cas des annonces de réduction de prix.

Enfin, une  double sanction peut être infligée au prévenu lorsque, par des actes  distincts, il a commis les délits de pratique commerciale trompeuse et  de pratique commerciale agressive .

Cass. crim., 17 juin 1998, LawLex200300003616JBJ.

C. pén., art 313-1, al. 2 : "L'escroquerie est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende".

Rennes, 5 septembre 2002, LawLex200300001628JBJ.

Cass. crim., 23 avril 1992, LawLex200300003289JBJ, approuvant Paris, 13 mars 1991, LawLex200300001598JBJ : jugeant que les mentions inexactes portées sur l'emballage de piles, relatives à l'origine et à la composition de celles-ci, peuvent entraîner des poursuites à la fois du chef de publicité trompeuse et de tromperie.

Cass. crim., 1er février 1990, LawLex200300003462JBJ.

TGI Nanterre, 16 septembre 1998, LawLex200300001965JBJ.

V. not. Cass. crim., 28 novembre 1991, LawLex200300003465JBJ ; 12 janvier 1994, LawLex200300003704JBJ, RJDA 1994, n° 601.

Cass. crim., 10 septembre 2019, LawLex201900001047JBJ.

Cass. crim., 30 janvier 1995, LawLex200300003779JBJ approuvant Aix-en-Provence, 9 juillet 1992, LawLex200300001641JBJ. - V. aussi, Lyon, 27 mai 1998, LawLex200400000192JBJ.

Reims, 15 mai 1997, LawLex200300002191JBJ : manœuvres frauduleuses en vue de la remise de sommes d'argent par des clients pour des contrats de cession de fichier ; Cass. crim., 2 juin 1999, LawLex200300003901JBJ, approuvant Poitiers, 12 février 1998, LawLex200300001961JBJ : jugeant que les allégations d'une publicité faisant mensongèrement état d'une garantie d'emploi constituent les manœuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie ; Pour les mêmes faits : Paris, 16 octobre 1998, LawLex200300001966JBJ. - Contra: V. Paris, 29 octobre 1998, LawLex200300001990JBJ, Contrats Conc. Consom. 1999, n° 101, obs. RAYMOND, estimant que le mensonge ne suffit pas à qualifier le délit d'escroquerie, qui exige un élément supplémentaire de mise en scène.

Angers, 7 décembre 1995, LawLex200300001691JBJ, approuvé par Cass. crim., 27 mars 1997, LawLex200300003879JBJ.

Cass. crim., 10 mai 1978, LawLex201400000615JBJ, D. 1978, IR 348, obs. ROUJOU de BOUBÉE.

Cass. crim., 27 mars 1996, LawLex200300003377JBJ, approuvant Paris, 20 décembre 1994, LawLex200300001681JBJ, Contrats Conc. Consom. 1996, n° 196, obs. RAYMOND.

Cass. crim., 14 novembre 2000 ; LawLex200300003849JBJ, LawLex200300003848JBJ, approuvant Aix-en-Provence, 29 avril 1999, LawLex200300002487JBJ, LawLex200400000241JBJ. - V. égal. Douai, 4 février 2003, LawLex200300002306JBJ : des courriers publicitaires offrant à la vente des parfums, présentés comme reproduisant à l'identique les propriétés et les qualités de parfums de grandes marques, alors qu'il s'agissait de produits différents et de qualité médiocre, et accompagnés d'une proposition de participer à une loterie, dont le lot s'est avéré imaginaire.

Cass. crim., 5 mai 1981, LawLex201400000616JBJ.

Cass. crim., 7 mars 2006, LawLex200600001077JBJ, Contrats Conc. Consom. 2006, n° 122, obs. RAYMOND, jugeant qu'il n'y a pas cumul idéal d'infractions entre publicité trompeuse et tromperie par l'affirmation inexacte de l'embouteillage de vins au château, dès lors que les éléments matériels des deux délits sont distincts, le premier étant réalisé par la seule exposition d'étiquettes fausses, le second par la réalisation de la vente.

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