Le Droit de la consommation, troisième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : publicité, pratiques commerciales déloyales, conditions de validité du contrat, clauses abusives, conformité des produits, vices cachés, sécurité des produits.

Droit de la consommation

Le dol ne résulte pas de toute manœuvre déloyale ayant pour résultat d'altérer le consentement de l'autre partie, mais suppose que la faute intentionnelle commise par une partie ait provoqué chez son cocontractant une erreur l'ayant déterminé à contracter . A la différence de l'erreur visée à l'article 1133 (ancien art. 1110) du Code civil, l'erreur provoquée par le dol n'a pas à porter sur une qu …

Dol déterminant.

Le dol ne résulte pas de toute manœuvre déloyale ayant pour résultat d'altérer le consentement de l'autre partie, mais suppose que la faute intentionnelle commise par une partie ait provoqué chez son cocontractant une erreur l'ayant déterminé à contracter . A la différence de l'erreur visée à l'article 1133 (ancien art. 1110) du Code civil, l'erreur provoquée par le dol n'a pas à porter sur une qualité essentielle de la prestation pour justifier l'annulation du contrat ; il suffit qu'elle ait été déterminante du consentement de la victime , c'est-à-dire que les manoeuvres pratiquées par l'une des parties soient telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Selon la Cour d'appel de Toulouse, il ne fait pas de doute que l'acquéreur d'un appareil de torréfaction dont l'installation nécessite la perforation des murs n'aurait pas signé sans avoir au préalable demandé un devis des travaux et l'autorisation de son bailleur, s'il avait eu cette information au moment du démarchage . De même, le vendeur d'une pompe à chaleur, tenu d'orienter l'acheteur vers une installation répondant à ses attentes, qui ne réalise pas un diagnostic thermique, prive son client d'éléments d'information essentiels à la formation éclairée de son consentement . En revanche, la société qui n'apporte pas la preuve qu'elle n'aurait pas contracté si elle avait eu connaissance de la nécessité de renouveler le contrat tous les vingts mois pour bénéficier des avantages financiers annoncés, alors qu'elle était libre d'accepter ou de refuser de contracter dans ces conditions, doit être déboutée de son action fondée sur le dol .

Un dol par réticence provoque une erreur déterminante du consentement de la victime lorsque le vendeur dissimule sciemment des éléments, notamment d'ordre économique , qu'il sait essentiels pour l'acquéreur . Ainsi, l'information selon laquelle l'utilisation insuffisante du véhicule litigieux risque de créer une usure prématurée du moteur, voire une rupture de celui-ci, qui, si elle avait été connue de l'acheteur avant la conclusion de la vente, l'aurait dissuader de contracter, doit être considérée comme déterminante du consentement de l'acheteur, de sorte que son omission par le vendeur justifie l'annulation du contrat . Le caractère déterminant de l'erreur est également établi, lorsque les faits dissimulés par le vendeur, s'ils avaient été connus de l'acheteur, l'auraient empêché de contracter , nonobstant l'utilisation faite par ce dernier du véhicule plusieurs années durant après la vente. De même, le fait pour le vendeur de taire la situation exacte de l'immeuble vendu au regard des règles des immeubles de grande hauteur et du montant des charges de sécurité engendrées justifie la nullité de la vente dans la mesure où de tels éléments sont déterminants pour l'acquéreur qui doit être mis à même d'apprécier la rentabilité de son opération immobilière . Le caractère déterminant  de l'erreur relève de l'appréciation souveraine des juges du fond . Selon la Cour d'appel de Toulouse, une plaquette intitulée “ votre guide aérovoltaïque ” qui vante des aides fiscales, des économies d'énergie et des revenus de revente d'électricité, ne suffit pas à faire la preuve que l'installation litigieuse serait destinée à s'autofinancer, ni que cet argument aurait été déterminant du consentement du consommateur de sorte qu’il aurait été vicié par un dol, dès lors que la documentation publicitaire n'a pas valeur contractuelle et qu’au contraire, la rentabilité de l'installation n'était pas entrée dans le champ contractuel puisque les conditions générales de vente précisaient que le tarif de rachat par Edf n'était pas garanti et que le montant du tarif en vigueur au jour du contrat n'était fourni qu'à titre purement indicatif .

On oppose généralement au “dol déterminant” ou “dol principal” justifiant la nullité du contrat, le “dol incident” qui désigne les manoeuvres en l'absence desquelles la victime aurait contracté, mais à d'autres conditions et qui est sanctionné  par l'allocation de dommages et intérêts . En présentant un véhicule dans un bon état général et en dissimulant tant son véritable kilométrage que la défectuosité du turbocompresseur, les vendeurs, ont commis à l'égar de l'acheteur un dol incident en lui faisant acquérir au prix fort un véhicule qu'il n'aurait pas acheté, ou à tout le moins pas à ce prix, s'ils n'avaient pas usé envers lui de manœuvres dolosives . Il semble toutefois que la Cour de cassation revienne sur la sanction du dol incident puisqu'elle a admis à deux reprises la possibilité pour la victime d'un tel dol de demander l'annulation . La réforme du droit des contrats a repris la distinction entre dol principal et dol incident et l'a étendue à l'erreur ainsi qu'à la violence à l'article 1130 . Selon ce texte, le dol incident comme le dol principal constitue un vice du consentement. Dès lors qu'en vertu du nouvel article 1131, “les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat”, le dol incident tout autant que le dol principal devrait être sanctionné par la nullité. 

Enfin, compte tenu de l'apparition dans la pratique des affaires de certaines stipulations contractuelles fixant par avance les éléments déterminants d'opérations de vente - et donc incidemment ceux qui ne le sont pas -, s'est posée la question de leur validité, qui fait l'objet d'une jurisprudence fluctuante. Dans un litige portant sur la licéité d'une clause stipulant que la réservation d'un appartement à construire ne pouvait être déterminée par les éventuelles conséquences fiscales et comptables de l'opération, mais par les qualités intrinsèques de l'immeuble, le réservataire demandait l'annulation pour dol, au motif que le vendeur avait employé une publicité mensongère  qui, bien que portant la mention “document non contractuel”, aurait été déterminante de son consentement dans la mesure où elle conférait à l'opération immobilière litigieuse des avantages fiscaux - en réalité inexistants -. La cour d'appel avait refusé d'admettre la validité de la clause et fait droit à la demande de l'acheteur. Censurant les juges du fond, la troisième Chambre civile de la Cour de cassation  a estimé au contraire que l'acheteur n'était pas fondé à se prétendre victime d'un dol déterminant sur l'attrait fiscal de la vente, dès lors que son acceptation de la clause stipulant que la vente est conclue en fonction des qualités intrinsèques de l'immeuble, excluait que son consentement ait pu être vicié par l'évocation d'éventuels avantages fiscaux. En revanche, en matière de cautionnement bancaire, la première Chambre civile  a refusé d'admettre la licéité d'une clause prévoyant que “la caution ne faisait pas de la solvabilité du débiteur cautionné la condition déterminante de son engagement”, dès lors que la banque l'avait stipulée en connaissance des difficultés financières du débiteur principal. La solution ne surprend pas puisque la clause, incluse de mauvaise foi, portait sur une condition essentielle du contrat de cautionnement - la solvabilité du débiteur principal -, mettant ainsi en cause son économie. 

Parfois, la présence de stipulations contractuelles introduisant un certain déséquilibre dans le contrat traduit l'intention dolosive du stipulant. Ainsi, selon la Cour d'appel d'Angers, la société qui, sans informer son fournisseur des problèmes techniques d'exécution rencontrés avec son précédent prestataire, introduit dans le contrat des clauses sanctionnant sévèrement l'inéxécution du contrat et les retards de livraison, commet une réticence dolosive, justifiant l'annulation du contrat .

Rennes, 8 décembre 1998, LawLex200500010331JBJ.

Cass. com., 28 juin 2005, LawLex200600002444JBJ, retenant que le manquement à une obligation précontractuelle d'information, à le supposer établi, ne peut suffire à caractériser le dol par réticence, si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci.

Cass. civ. 3e, 2 février 2017, LawLex201700000357JBJ : l'acheteur d'une parcelle comportant un cabanon et une véranda, situés en zone inconstructible, qui ne permet, selon le plan local d'urbanisme, que des travaux confortatifs et d'agrandissement de l'existant à usage d'habitation n'est pas fondé à demander l'annulation de la vente à la suite du refus de permis de construire qui lui a été opposé, dès lors que l'acte de vente mentionnait que le bien n'était pas destiné à l'habitation et que les parties n'avaient pas fait de la possibilité de rénovation et/ou d'extension un élément déterminant de la vente.

Toutefois, une cour d'appel ne peut à la fois relever qu'un vendeur professionnel a déclaré avant la vente que l'accident s'était limité à une aile froissée alors qu'il ignorait l'ampleur et les modalités des réparations effectuées, tout en rejetant l'action pour dol de l'acheteur profane, au motif que si ce dernier avait fait de l'ampleur exacte de l'accident et de la réparation un élément déterminant de son consentement, il aurait demandé une copie de la facture de réparation ou pris des dispositions pour savoir ce qui avait été réparé : Cass. civ. 1re, 12 janvier 2012, LawLex201200001421JBJ.

Toulouse, 25 juin 2024, LawLex202400004869JBJ.

V. cep., Cass. civ. 3e, 22 juin 2005, LawLex200600002189JBJ, Contrats Conc. Consom. 2005, 186, obs. LEVENEUR ; RDC 2005, 1025, obs. STOFFEL-MUNCK retenant que la dissimulation par le vendeur de la situation exacte de l'immeuble vendu au regard des règles des immeubles de grande hauteur et du montant des charges de sécurité engendrées, caractérise une réticence dolosive justifiant la nullité de la vente dans la mesure où de tels éléments étaient déterminants pour l'acquéreur qui aurait à tout le moins acquis à un prix inférieur s'il avait connu la situation exacte.

Grenoble, 5 novembre 1991, LawLex200500008599JBJ, retenant que l'acheteur, qui s'il avait connu la situation comptable exacte du fonds de commerce litigieux, l'aurait acquis à un moindre prix, est fondé à réclamer une réduction de prix.

Nîmes, 2 mai 2013, LawLex201400000431JBJ.

Cass. civ. 3e, 22 juin 2005, LawLex200600002189JBJ ; Cass. civ. 1re, 28 mai 2008, LawLex201400000772JBJ.

“L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes”.

 A cet égard, le fait que le vendeur ait commis le délit de publicité trompeuse, ne peut justifier l'annulation du contrat pour dol que si ses manoeuvres ou mensonges ont été déterminants du consentement de l'acheteur, V. Paris, 3 juill. 2001, LawLex200500006517JBJ.

Cass. civ. 3e, 21 mars 2001, LawLex200500006063JBJ. RTD civ. 2001, 904, obs. GAUTIER ; Contrats Conc.  Consom. 2001, n° 101, obs. LEVENEUR.

Toulouse, 8 février 2012, LawLex201200000988JBJ.

Cass. civ. 1re, 13 mai 2003, LawLex201400000770JBJ.

Angers, 11 décembre 2012, LawLex201400000446JBJ.

Bordeaux, 2 novembre 2017, LawLex201700001847JBJ.

Paris, 16 mars 2018, LawLex201800000483JBJ.

Rouen, 14 novembre 2015, LawLex201500001687JBJ, à propos d'un vendeur-installateur de panneaux photovoltaïques qui cache aux acheteurs l'importance du coût de travaux indispensables de raccordement au réseau public d'électricité. 

Paris, 17 janvier 2006, LawLex200600001573JBJ : si la réticence du vendeur qui dissimule sciemment des éléments qu'il sait essentiels à l'acquéreur peut être constitutive d'un dol, encore faut-il qu'il puisse connaître la valeur que ce dernier attache à ces éléments.

 Nancy, 26 novembre 2018, LawLex201800001870JBJ.

Agen, 2 novembre 2010, LawLex201200001523JBJ ; Aix-en-Provence, 23 mars 2012,LawLex201200001428JBJ, ayant retenu que l'acheteur a commis un erreur déterminante de son consentement, dès lors qu'il n'aurait certainement pas acquis le véhicule, s'il avait connu l'origine véritable du changement de la courroie de distribution, qui le prive de la qualité de motorisation recherchée ; Metz, 5 septembre 2013, LawLex201400000416JBJ : en laissant délibérément croire à l'acheteur que le véhicule vendu n'avait subi qu'un choc mineur alors que la réparation des dommages subis avait nécessité des réparations importantes (24 heures de mécanique ; 120 heures de tôlerie ; 24 heures de peinture), le vendeur professionnel, tenu d'une obligation de renseignement et d'information envers l'acquéreur profane, a commis un dol justifiant l'annulation de la vente, dès lors qu'il est certain que si l'acheteur avait connu l'état du véhicule après l'accident, la nature et l'ampleur des réparations effectuées, il ne l'aurait pas acquis.

Cass. civ. 3e, 22 juin 2005, LawLex200600002189JBJ, Contrats Conc. Consom. 2005, 186, obs. LEVENEUR ; RDC 2005, 1025, obs. STOFFEL-MUNCK ; Cass. civ. 1re, 28 mai 2008, LawLex201400000772JBJ, JCP G, 2008, 218, obs. LABARTHE ; RDC 2008, 1118, obs. MAZEAUD.

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375. Dol déterminant.

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