Le Droit de la consommation, troisième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : publicité, pratiques commerciales déloyales, conditions de validité du contrat, clauses abusives, conformité des produits, vices cachés, sécurité des produits.

Droit de la consommation

Les litiges relatifs à l'impropriété de la chose vendue à sa destination posent la question de la juridiction compétente et de la loi applicable lorsqu'ils concernent un vendeur et un acheteur situés dans deux États différents. Les règles varient selon qu'il s'agit de l'action de l'acheteur contre son vendeur immédiat ou de l'action directe du sous-acquéreur contre le fabricant de la chose.

En droit français, l'action en garantie des vices cachés, qu'il s'agisse de l'action de l'acheteur contre son vendeur immédiat ou de l'action directe du sous-acquéreur contre le vendeur originaire, est de nature contractuelle . Par conséquent, l'option de compétence prévue par l'article 46 du Code de procédure civile, qui permet au demandeur de saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l'exécution de la prestation de services, est applicable à ces actions . 

En droit de l'Union, la notion de “matière contractuelle” présente un caractère autonome, qui ne recouvre pas nécessairement les mêmes réalités qu'en droit français. La Cour de justice a ainsi jugé que “l'article 5, point 1, de la convention [de Bruxelles] (devenu l'article 7, point 1 du règlement 1215-2012) doit être interprété en ce sens qu'il ne s'applique pas à un litige opposant le sous-acquéreur d'une chose au fabricant, qui n'est pas le vendeur, en raison des défauts de la chose ou de l'impropriété de celle-ci à l'usage auquel elle est destinée” . Selon le juge de l'Union, l'action ne peut revêtir un caractère contractuel dès lors qu'aucun engagement librement assumé d'une partie envers l'autre n'a été consenti. Lorsqu'il s'agit de déterminer le juge compétent, l'action du sous-acquéreur contre le vendeur originaire est donc, contrairement au droit français, de nature délictuelle. Dans le prolongement de cette solution, la Cour de cassation a estimé que l'action du crédit-preneur contre le vendeur ne présentait pas une nature contractuelle, au sens de l'article 5, point 1, de la Convention de Bruxelles (devenu l'article 7, point 1 du règlement 1215-2012), en l'absence d'engagement librement consenti par le vendeur à l'égard du crédit-preneur . Ainsi, conformément aux règles de procédure régissant la compétence juridictionnelle en droit français, en matière délictuelle, la juridiction compétente est celle du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi.

Ces règles ne s'appliquent qu'en l'absence de choix de la juridiction compétente par les parties. En présence d'une clause attributive de compétence, même rédigée en langue étrangère, l'acheteur est tenu de saisir le juge désigné par la clause lorsque l'ensemble des documents qui constituent le support de la relation contractuelle attirent spécialement son attention sur les conditions générales du vendeur qui la contiennent . 

En principe, toutes les ventes internationales de marchandises sont soumises à la Convention de Vienne du 11 avril 1980, dénommée Convention de vente internationale de marchandises (CVIM), élaborée sous l'égide des Nations unies . L'article 35 de la convention impose au vendeur de livrer des marchandises “dont la quantité, la qualité et le type répondent à ceux qui sont prévus au contrat, et dont l’emballage ou le conditionnement correspond à celui qui est prévu au contrat”. Il précise que les marchandises peuvent être considérées conformes au contrat lorsqu'elles sont propres aux usages auxquels serviraient habituellement des marchandises du même type, ou à tout usage spécial porté expressément ou tacitement à la connaissance du vendeur au moment de la conclusion du contrat, sauf s’il résulte des circonstances que l’acheteur ne s’en est pas remis à la compétence ou à l’appréciation du vendeur ou qu’il n’était pas raisonnable de sa part de le faire . Le texte adopte une conception très large de la notion de “conformité”, qui inclut les vices cachés de la chose, tels que définis à l'article 1641 du Code civil. Sa formulation est très proche de la définition de la non-conformité consacrée ultérieurement par la directive 1999-44 du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation, aujourd'hui abrogée et remplacée par la directive 2019-771 du 20 mai 2019. 

L'article 36 de la convention déclare le vendeur responsable de tout “défaut de conformité” qui existe au moment du transfert des risques à l’acheteur, même si ce défaut n’apparaît qu’ultérieurement. En vertu de l'article 39, l’acheteur est déchu du droit de se prévaloir d’un défaut de conformité s’il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant sa nature, dans un délai raisonnable à partir du moment où il l’a constaté ou aurait dû le constater . Dans tous les cas, l’acheteur est déchu du droit de se prévaloir d’un défaut de conformité, s’il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises, à moins que ce délai ne soit incompatible avec la durée d’une garantie contractuelle.

Les règles de la convention sont supplétives : l'article 6 autorise les parties à en exclure l'application ou à aménager ses dispositions. L'exclusion peut même être tacite. Ainsi, lorsqu'elles invoquent et discutent sans aucune réserve la garantie des vices cachés prévue par les articles 1641 et suivants du Code civil, les parties placent volontairement, en connaissance du caractère international des ventes qu'elles ont conclu, la solution de leur différend sous le régime du droit interne français de la vente et font tacitement usage de la faculté donnée par l'article 6 d'exclure l'application de la convention . Par ailleurs, comme la Convention de Vienne ne s'applique qu'aux litiges contractuels, l'action directe du sous-acquéreur contre le vendeur initial, de nature délictuelle, ne peut être régie par celle-ci, même lorsque le vendeur originaire a prévu qu'il accorderait sa garantie aux utilisateurs du produit .

L'action du sous-acquéreur n'est pas pour autant privée de tout cadre juridique. Elle relève de la Convention de la Haye du 15 juin 1995, qui désigne la loi applicable aux actions portant sur un bien mobilier corporel , ou du règlement 593-2008 du 17 juin 2008 (Rome 1), sur la loi applicable aux obligations contractuelles, qui tient lieu de règle générale de conflit de loi pour la plupart des contrats internationaux qui ne se rattachent pas à une convention particulière. 

Cass. Ass. plén., 7 février 1986, LawLex200600001136JBJ, D. 1986, Jur., 293, obs. BÉNABENT ; JCP G, 1986, II, 20616, obs. MALINVAUD ; RTD civ. 1986, 364, obs. HUET ; RTD civ. 1986, 605, obs. RÉMY ; Cass. com., 24 novembre 1987, LawLex200700000616JBJ ; Cass. civ. 1re, 7 juin 1995, LawLex200500005488JBJ, RTD com. 1996, 105, obs. BOULOC ; LPA 22 novembre 1996, 21, obs. BLASSELLE ; JCP G, 1995, I, 3893, obs. VINEY ; Contrats Conc. Consom. 1995, n° 159, obs. LEVENEUR ; D. 1996, Jur., 395, obs. MAZEAUD ; Pau, 17 juin 2010, LawLex201200001784JBJ ; Rennes, 7 janvier 2011, LawLex201200001877JBJ.

Bordeaux, 12 janvier 2012, LawLex201200001676JBJ.

V. not. Cass. 1re civ., 10 octobre 1995, LawLex200500003845JBJ, RJDA 1996, n° 33. - V. égal., Cass. 1re civ., 13 février 2013, LawLex201300000314JBJ, D. 2013, 2878, obs. WITZ, dans lequel la Cour de cassation reproche aux juges du fond de ne pas avoir recherché si la loi suisse, déclarée applicable au litige en application de la Convention de la Haye, n'était pas contraire à l'ordre public international français en ce qu'elle fixe une prescription d'un an à compter de la livraison.

CJCE, 17 juin 1992, Jakob Handte & Co. GmbH c. Traitements mécano-chimiques des surfaces SA, aff. C-26-91, LawLex200600002389JBJ, JCP G, 1992, II, 21927, obs. LARROUMET ; JCP G, 1993, I, 3664, obs. VINEY, et sur renvoi, Cass. 1re civ., 27 janvier 1993, LawLex201600000259JBJ, Contrats Conc. Consom. 1993, étude, 5, par LEVENEUR. - V. aussi Cass. 1re civ., 27 mars 2007, LawLex201200001442JBJ : l'action opposant le sous-acquéreur d'un matériau défectueux à un fabricant établi l'étranger est de nature délictuelle.

Cass. 1re civ., 17 janvier 2006, LawLex200600001792JBJ, JCP G, 2006, II, 10151, obs. BRUNEAU ; Procédures 2006, n° 211, obs. NOURISSAT.

Cass. 1re civ., 15 mai 2018, LawLex201800000756JBJ.

Pour une application, V. Lyon, 28 septembre 2001, LawLex200600001794JBJ.

Dijon, 13 février 2020, LawLex202000000233JBJ, estimant que des déformations de la chose résultant de la qualité du matériel fourni par  le fabricant constituent un défaut de conformité au sens de la Convention de Vienne.

Bordeaux, 15 mai 2012, LawLex201200001856JBJ, retenant que l'écoulement d'un délai de six mois ou de dix mois ne peut constituer un délai raisonnable au sens de l'article 39.1 de la Convention de Vienne ; Dijon, 13 février 2020, LawLex202000000233JBJ, considérant que le vendeur intermédiaire qui attend près de trois mois pour dénoncer le  défaut au fabricant ne respecte pas l'exigence du délai raisonnable posée par l'article 39 et se trouve déchu de  son droit à réparation.

Cass. 1re civ., 25 octobre 2005, LawLex200600001772JBJ, JCP G, 2006, II 10086, obs. MAHINGA ; RTD com. 2006, 249, obs. DELEBECQUE ; Rev. crit. DIP 2006, 373, obs. BUREAU ; D. 2007, 530, obs. WITZ ; RTD civ. 2006, 268, obs. CORLAY ; RDC 2006, 515, obs. DEUMIER.

Cass. 1re civ., 5 janvier 1999, LawLex200600001775JBJ, D. 1999, 383, obs. WITZ ; JCP E, 1999, 962, obs. LEVENEUR ; RTD civ. 1999, 503, obs. RAYNARD ; RTD com. 1999, 739, obs. BOULOC ; Rev. crit. DIP 1999, 519, obs. HEUZÉ. - V. égal. Montpellier, 19 septembre 2017, LawLex201700001546JBJ, retenant que, de nature délictuelle, l'action en garantie des vices cachés du sous-acquéreur contre le fabricant relève de la loi du lieu où le dommage est survenu.

643. Vente internationale