Contrats d'affaires

En vertu de l'article 1217 du Code civil, “la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement peut […] poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation”. Ainsi, à défaut de paiement à l'échéance du terme, l'article 1221 du Code civil prévoit que “le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature sauf si cette ex …

Exécution forcée en nature.

En vertu de l'article 1217 du Code civil, “la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement peut […] poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation”. Ainsi, à défaut de paiement à l'échéance du terme, l'article 1221 du Code civil prévoit que “le créancier d'une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l'exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s'il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour le créancier”.

Ce texte, issu de la réforme du droit des contrats, codifie le droit à l’exécution forcée en nature d’une obligation, mais le limite en cas d’impossibilité - matérielle, juridique ou morale - d’exécution, comme l'admettait déjà la jurisprudence sous l’empire de l’ancien article 1184 du Code civil, en y ajoutant l'impossibilité économique d'exécution qui résulte d'une disproportion manifeste entre le coût de l'exécution en nature pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour le créancier. Cette nouvelle exception vise à éviter le prononcé de condamnations en exécution forcée onéreuses pour le débiteur, sans que le créancier y trouve vraiment son intérêt, alors qu’une condamnation à des dommages et intérêts aurait pu fournir une compensation adéquate pour un prix beaucoup plus réduit. Le contentieux en matière de construction de maison individuelle constitue une illustration de cette tendance jurisprudentielle que le législateur a tenté de réfréner.

Partant du postulat que la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté peut forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, la Haute juridiction a ainsi considéré que le maître de l’ouvrage qui a conclu un contrat de construction de maison individuelle dont il a réglé la totalité du prix tout en refusant de signer le procès-verbal de réception, était fondé à obtenir la condamnation de l'entrepreneur à démolir puis reconstruire la maison, ou, à défaut, sa condamnation au paiement d'une somme équivalente au coût des opérations de démolition et de reconstruction, en présence d'une non-conformité aux stipulations contractuelles, le fait que cette non-conformité ne rende pas l’immeuble impropre à sa destination et son usage et ne porte pas sur des éléments essentiels et déterminants du contrat étant indifférent . De même, selon la Cour, la société chargée de la conception d'une extension d’un chalet par la création d'un bâtiment annexe relié à l'existant par un auvent, qui a commis une erreur d’implantation des constructions nouvelles qui entraîne l’occultation partielle d’une fenêtre du bâtiment ancien, peut être condamnée à démolir et reconstruire l’ouvrage, dès lors que l’implantation desdites constructions n'était pas conforme aux stipulations contractuelles et que la possibilité de leur mise en conformité, non contestée, a été relevée par l'expert judiciaire .

Cependant, anticipant l'application de l'article 1221 par un arrêt rendu sous l'empire du droit applicable avant la réforme du droit des contrats, la Cour de cassation est revenue sur sa position en retenant que les demandes du maître d’ouvrage tendant à voir ordonner les travaux nécessaires à la rectification de la hauteur des cloisons ainsi que la démolition et la reconstruction du local piscine doivent être rejetées lorsqu’aucun désordre relatif à la hauteur des cloisons n’a été constaté et que les travaux de démolition et de reconstruction auxquels s’oppose le constructeur, ont été jugés disproportionnés au regard des préjudices subis .

L'article 1222 du Code civil complète par ailleurs le dispositif prévu à l'article 1221 en ajoutant que : “Après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai et à un coût raisonnable, faire exécuter lui-même l'obligation ou, sur autorisation préalable du juge, détruire ce qui a été fait en violation de celle-ci. Il peut demander au débiteur le remboursement des sommes engagées à cette fin” .

Cass. 3e civ., 11 mai 2005, LawLex202200003449JBJ ; Defrénois 2006, 83, obs. PERINET-MARQUET ; RDI 2005, 299, obs. MALINVAUD ; RTD civ. 2005, 596, obs. MESTRE et FAGES ; JCP G 2005, II, 10152, obs. BERNHEIM-DESVAUX ; RDC 2006, 323, obs. MAZEAUD ; CCC 2005, n° 187, obs. LEVENEUR ; RDI 2005, 307, obs. TOURNAFOND, pour un niveau de construction présentant une insuffisance de 0,33 mètre par rapport aux stipulations contractuelles.

Cass. 3e civ., 16 juin 2015, LawLex202200006739JBJ ; RDC 2015, 839, obs. GENICON ; RTD civ. 2016, 107, obs. BARBIER ; JCP G 2015, 1261, n° 9, obs. GROSSER, censurant l'arrêt d'appel qui avait rejeté la demande du maître d'ouvrage en exécution forcée du contrat aux motifs que l'extension litigieuse n'était affectée d'aucune malfaçon et n'empiétait sur aucune autre propriété et que la réparation devait être limitée en l'absence de justification du montant exorbitant réclamé au titre d'une opération de démolition/reconstruction, dès lors que l'implantation de la construction nouvelle n’était pas conforme aux stipulations contractuelles et que la possibilité d'une mise en conformité, non contestée, avait été relevée par l’expert judiciaire.

Cass. 3e civ., 13 février 2020, LawLex202200006740JBJ.

Reims, 17 octobre 2023, LawLex202400007393JBJ, relevant qu'une société de réfrigération ne peut, sur le fondement de l’article 1222 du Code civil, obtenir le paiement correspondant à des travaux qu’elle n’a pas mis son co-contractant en demeure de réaliser dès lors que, dans la mise en demeure, elle faisait état de nombreuses fuites, et non des défauts de l’installation et qu’elle ne démontrait pas que la réparation des fuites imposait la réfection complète de l’installation plutôt que le simple remplacement des raccords union préconisé par l’expert extra-judiciaire.

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