Contrats d'affaires

La délivrance d'une chose non conforme aux spécifications contractuelles doit être distinguée de l'hypothèse où la chose vendue est affectée d'un vice caché, à savoir lorsque l'objet livré correspond bien aux spécifications contractuelles, mais présente un défaut non apparent qui empêche son usage ou diminue tellement celui-ci que l'acheteur, s'il en avait eu connaissance, ne l'aurait pas acheté o …

Distinction non-conformité et vices cachés.

LE TOURNEAU, Conformités et garanties dans la vente d’objets mobiliers corporels, RTD com. 1980, 231 ; BOULLEZ, La garantie des vices : la part maudite de la jurisprudence : Gaz. Pal. 1984, 1241 ; TOURNAFOND, Les prétendus concours d’actions et le contrat de vente (erreur sur la substance, défaut de conformité, vice caché), D. 1989, 237 ; ATIAS, La distinction du vice caché et de la non-conformité, D. 1993, 265 ; BENABENT, Conformité et vices cachés dans la vente : l'éclaircie, D. 1994, 115 ; CASAUX-LABRUNEE, Vice caché et défaut de conformité : propos non conformistes sur une distinction viciée, D. 1999, 1 ; FAMILY, Erreur, non-conformité, vice caché : état des questions à l’heure de la transposition de la directive du 25 mai 1999, Contrats Conc. Consom. 2002, n° 7 ; ROUVIERE, L'inconstructibilité, entre non-conformité, erreur et vice caché, RDI 2010, 253 ;

La délivrance d'une chose non conforme aux spécifications contractuelles doit être distinguée de l'hypothèse où la chose vendue est affectée d'un vice caché, à savoir lorsque l'objet livré correspond bien aux spécifications contractuelles, mais présente un défaut non apparent qui empêche son usage ou diminue tellement celui-ci que l'acheteur, s'il en avait eu connaissance, ne l'aurait pas acheté ou alors à un moindre prix. Ainsi, la livraison d'une automobile dont le certificat d'immatriculation ne correspond pas aux caractéristiques du véhicule acheté, et dont il apparaît, selon l'expertise judiciaire, qu'il a été reconstruit à partir de trois véhicules distincts, caractérise un manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme aux spécifications convenues entre les parties, et non un vice caché rendant la chose vendue impropre à sa destination .

Pendant un temps, la Haute juridiction a fait une interprétation extensive de la non-conformité d'une marchandise, considérant que celle-ci s'entendait non seulement d'une marchandise correcte mais non conforme aux stipulations du contrat, mais également de celle atteinte d'une anomalie la rendant impropre à l'usage auquel elle était destinée . L'acquéreur d'une chose viciée disposait ainsi d'une option entre l'action en garantie des vices cachés, soumise au délai de l'article 1648, et celle fondée sur le manquement à l'obligation de délivrance conforme relevant de la prescription de droit commun. Puis, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en affirmant que lorsque les défauts rendent la chose impropre à sa destination normale, la garantie des vices cachés constitue l'unique fondement possible de l'action . La jurisprudence s'est également montrée fluctuante quant au rôle du juge en cas de demande mal fondée en droit. Un arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation en date du 21 décembre 2007  a clarifié la situation : le juge peut changer la dénomination ou le fondement juridique des demandes des parties, sans toutefois y être tenu. 

Non-conformité et vice caché sont désormais clairement différenciés . Peuvent constituer des inexécutions de l'obligation de délivrance toutes les promesses formelles du vendeur qui se révèleront insatisfaites au vu des caractéristiques du véhicule commandé tandis que tous les amoindrissements des possibilités d'utilisation ou les mauvais fonctionnements graves relèvent du régime des vices cachés . Ainsi, selon la Cour de cassation, si l’inconstructibilité d'un terrain échangé, revendu, puis donné à bail, est imputable au manquement du vendeur originaire à son  obligation de délivrer une chose conforme à celle promise dans l'acte  d'échange, elle constitue, en revanche, pour le vendeur  intermédiaire, un vice caché qu'il est tenu de garantir . Constituent un vice caché, selon la Haute juridiction, les dysfonctionnements d'une chose neuve . En revanche, un kilométrage erroné ou un numéro de série falsifié d'un véhicule d'occasion ne s'identifie pas à un vice caché : le véhicule n'est, dans ce cas, pas impropre à sa destination normale du fait de ces défauts, mais ne correspond tout simplement pas à ce qui a été convenu entre les parties . Il en est de même pour l'apparition de messages d'alerte aléatoires - “anomalie freinage” - qui n'affecte pas le système de freinage en lui-même . 

Cass. 1re civ., 14 juin 2023, LawLex202300008075JBJ.

Cass. 1re civ., 6 juin 1990, LawLex200500008722JBJ ; Cass. com., 1er décembre 1992, LawLex200500008717JBJ, D. 1993, 240, obs. TOURNAFOND ; Chambéry, 29 octobre 1990, LawLex200500009571JBJ, estimant s'agissant d'une machine automatique à frites, que des désagréments tels que les odeurs engendrées par le fonctionnement de l'appareil et ses nombreux dérèglements, sont des vices cachés, la rendant impropre à l'usage auquel on la destine, et non des défauts de conformité.

Cass. 1re civ., 5 mai 1993, LawLex200400003433JBJ, RJDA 1993, n° 886 ; D. 1993, 242, obs. TOURNAFOND ; D. 1993, 506, obs. BÉNABENT ; JCP G, 1993, 3727, obs. VINEY ; Contrats Conc. Consom. 1993, n° 174, obs. LEVENEUR ; 13 juin 2006, LawLex200600002182JBJ ; RJDA 2006, n° 1124. - V. aussi Cass. com., 26 avril 1994, LawLex200500004345JBJ, RJDA 1994, n° 635. Dès lors, l'action récursoire du vendeur à l'encontre de son fournisseur et l'action directe du sous-acquéreur contre le fournisseur, mettant en cause le même défaut de la chose vendue, ne peuvent avoir deux fondements juridiques distincts, à savoir la garantie des vices cachés pour la première et la non-conformité pour la seconde, Cass. civ. 3e, 5 novembre 1997, LawLex200300003411JBJ, RJDA 1998, n° 160. 

Cass. Ass. plén., 21 décembre 2007, LawLex200800000083JBJ, JCP G, 2008, 10006, obs. WEILLER ; Procédures 2008, n° 71, obs. PERROT ; Dr. et proc. 2008, 103, obs. LEFORT ; RDC 2008, 327, obs. BÉNABENT ; RDC 2008, 435, obs. SERINET ; Contrats Conc. Consom. 2008, n° 92, obs. LEVENEUR ; Defrénois 2008, 1457, obs. SAVAUX ; RTD civ. 2008. 317, obs. GAUTIER ; RCA 2008, n° 112, obs. HOCQUET-BERG. Adde : DESHAYES, L'office du juge à la recherche de sens à propos de l'arrêt d'assemblée plénière du 21 décembre 2007, D. 2008, chron. 1102 ; BOLARD, L'office du juge et le rôle des parties : entre arbitraire et laxisme, JCP G, 2008, 156 ; BORÉ, Da mihi factum, dabo tibi jus : une philosophie du procès toujours d'actualité ?, JCP G, 2009, 319 : dans cet arrêt, l'Assemblée plénière a ainsi estimé que “saisie d'une demande fondée sur l'existence d'un vice caché dont la preuve n'était pas rapportée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de rechercher si cette action pouvait être fondée sur un manquement du vendeur à son obligation de délivrance d'un véhicule conforme aux stipulations contractuelles, a légalement justifié sa décision”.

Cass. civ. 1re, 5 juillet 2005, LawLex200600001641JBJ ; Riom, 14 septembre 2005, LawLex200600001708JBJ ; Amiens, 29 mai 1990, LawLex200500010229JBJ.

Amiens, 5 octobre 2017, LawLex201700001654JBJ.

Cass. 3e civ., 30 septembre 2021, LawLex202100005513JBJ, D. actu. 28 octobre 2021, obs. LABELLE ; Constr.-Urb. 2021, 134, obs. SIZAIRE; JCP N 2022, n° 21, 1168, obs. MEKKI ; RDC mars 2022, n° RDC200m0, obs. THIBIER ; LEDC décembre 2021, n° 200n3, 7, obs. ROBIN-SABARD ; JCP G 2021, 1310, n° 7, obs. VIRASSAMY, ajoutant que malgré la stipulation d’une clause de pollution contenue dans l’acte  d’échange, la société qui a échangé une parcelle de terrain sur laquelle elle a exploité une station-service de distribution de carburants, avec  une autre société, qui l’a revendue à une autre, qui, elle-même, l'a  donnée à bail à une entreprise, engage sa responsabilité pour  non-conformité, sur un fondement contractuel d’une part, envers la  sous-acquéreuse, et délictuel d’autre part, envers la locataire, en  livrant une parcelle polluée, alors que l'acquéreuse n’avait pas accepté  un risque connu de pollution résiduelle et que le rapport technique  joint à l'acte d'échange accréditait l'idée d'une dépollution complète  du site.

Cass. 1re civ., 11 juin 2009, LawLex201300000679JBJ. V. cep. Cass. civ. 1re, 3 mai 2006, LawLex200700000112JBJ, RJDA 2006, n° 1123, retenant que la commande d'une chose neuve s'entend d'une chose n'ayant subi aucune dégradation, de sorte que des défauts de fonctionnements et esthétiques découverts sur un véhicule présenté comme neuf à la vente, fondent l'exercice d'une action en justice pour défaut de conformité aux stipulations contractuelles de la commande.

Cass. 1re civ., 15 mars 2005, LawLex200500008871JBJ.

Rennes, 6 décembre 2012, LawLex201400001944JBJ.

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175. Distinction non-conformité et vices cachés.(1)

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