Contrats d'affaires

Le vendeur à qui l'acheteur oppose une violation de son obligation de délivrance conforme peut, pour se libérer ou réduire sa responsabilité, soit démontrer qu'il a bien, contrairement à ce qu'affirme l'acquéreur, livré une chose conforme aux stipulations contractuelles, soit, lorsque la non-conformité est établie, invoquer la force majeure, la faute ou le fait de la victime, ou faire valoir une c …

Responsabilité du vendeur.

FREMEAUX, La pollution des sols et la responsabilité contractuelle, Gaz. Pal. 1994, 563 ; LONDON et THIRE, Transmissions de sites contaminés : quelles responsabilités ? JCP, E, 1995, 489 ; PICHARD, Acquisition de terrains pollués : quelles garanties ?, LPA 27 juin 1997, 14 ; BOULANGER, L'exploitant minier et le propriétaire du dessus, à propos de la loi n° 99-245 du 30 mars 1999, JCP N 1999, 1555 ; HUGLO, Les évolutions récentes de la responsabilité du fait des sols contaminés par une activité industrielle, Gaz. Pal. 1999, 1450 ; BOULANGER, L'indemnisation par l'État des acquéreurs victimes d'un sinistre minier : JCP, N 2000, 1348 ; HERRNBERGER, Vente d’un immeuble ayant supporté une installation classée : la réglementation de la remise en état facteur d’insécurité pour les parties, JCP, N, 2003, 1275 ; GOSSEMENT, Les conditions de l'action directe en responsabilité civile du vendeur d'un sol pollué par son sous-acquéreur, au terme d'une chaîne de contrats de vente, LPA 18 août 2004, 6 ; DUPIE, Risques naturels et technologiques majeurs : l'état des risques entre en vigueur le 1er juin 2006, JCP, N 2006, 391 ;

Le vendeur à qui l'acheteur oppose une violation de son obligation de délivrance conforme peut, pour se libérer ou réduire sa responsabilité, soit démontrer qu'il a bien, contrairement à ce qu'affirme l'acquéreur, livré une chose conforme aux stipulations contractuelles, soit, lorsque la non-conformité est établie, invoquer la force majeure, la faute ou le fait de la victime, ou faire valoir une clause limitative de responsabilité, le cas échéant.

L'exonération sur le fondement de la force majeure suppose que le vendeur apporte la preuve d'un événement imprévisible au moment de la vente , irrésistible, inévitable et extérieur au débiteur de l'obligation . Ces conditions étant difficile à réunir, la force majeure est rarement retenue par les juges. Ainsi, pour un fabricant industriel, tenu à la vérification de la chaîne de ses propres fournisseurs, la tromperie sur le produit livré ne constitue pas un fait inattendu et imprévu avant production . De même, le vendeur ne peut invoquer les contraintes liées à la crise sanitaire qu’il prétend avoir subie et les nombreux jours fériés du mois de mai, afin de plaider la force majeure exonératoire des engagements qu’il a pris, dès lors que ces éléments étaient prévisibles à la date de conclusion du contrat . Si la force majeure est retenue, l'exonération du vendeur est totale , mais en principe temporaire, de sorte que lorsque l'événement prendre fin, il doit procéder à la délivrance, conformément aux stipulations contractuelles, sauf si la survenance du cas de force majeure a rendu l'exécution de l'obligation impossible comme, par exemple, en cas de perte de la chose. 

En cas de faute de la victime, l'exonération sera totale ou partielle selon que la faute de la victime concourt exclusivement ou partiellement à la réalisation de son dommage . Ainsi, participe à son propre préjudice l'acquéreur qui ne vérifie pas la conformité du bien commandé avec le bien livré et qui effectue la première réclamation plus de deux mois après la livraison . De même, l'acheteur n'est pas fondé à arguer de la non-conformité de la chose livrée par rapport à celle commandée lorsque la mauvaise utilisation de la chose vendue est à l'origine de son dommage , ou qu'il a manqué à son devoir de coopération et de loyauté, et que, par cette négligence grave, il n'a pas mis son cocontractant en mesure d'exécuter son obligation de délivrance . En revanche, le juge ne saurait constater que le vendeur n'a pas exécuté son obligation de délivrance conforme tout en l'exonérant pour moitié de sa responsabilité au vu des circonstances climatiques, de la technique culturale utilisée et de l'utilisation de l'eau, sans préciser en quoi ces éléments seraient personnellement imputables à l'acheteur .

Parmi les faits imputables à l'acquéreur, le vendeur avance souvent l'acceptation sans réserve de la chose. Selon la Cour de cassation, la réception sans réserve de la chose vendue couvre ses défauts apparents de conformité et constitue une cause d'exonération totale . En pratique, le juge vérifie, dans un premier temps, si le défaut de conformité allégué est apparent , en prenant en considération la qualité  ou les compétences de l'acquéreur , et, dans un second temps, s'il y a eu acceptation, tacite ou expresse, sans réserves, de la chose par l'acquéreur. L’acquéreur qui a conçu lui-même une pièce dont il a confié la fabrication au vendeur en limitant dès les pourparlers les modifications acceptables, n'est pas fondé à invoquer le non-respect par ce dernier de son obligation de délivrance conforme, dès lors qu’il a souhaité en vérifier lui-même la résistance par le biais de tests, à l'issue desquels il a validé sans équivoque la commande . En revanche, selon la Haute juridiction, il ne saurait être déduit des seules offres transactionnelles adressées par le vendeur la violation de son obligation de délivrance, dès lors que l'acquéreur n'apporte pas la preuve de la non-conformité à la commande des huisseries, qu'il a reçues sans réserve et fait installer . En revanche, viole son obligation de délivrance conforme, le vendeur, qui, en cas de dysfonctionnements de la chaudière livrée, antérieurs à la levée complète des réserves, n'établit pas qu'ils aient pour origine la mauvaise utilisation de l'acquéreur ou une cause extérieure . 

2) Clauses limitatives de responsabilité

En cas de stipulation d'une clause limitative de responsabilité au profit du vendeur, la validité de cette clause dépend de la qualité des cocontractants. Dans le cas d'un contrat conclu entre un vendeur professionnel et un acheteur profane, ces clauses tombent sous le coup de l'interdiction des clauses abusives posée aux articles L. 212-1 et suivants du Code de la consommation et doivent être considérées non écrites. Dans le cas d'un contrat conclu entre professionnels, même de spécialités différentes , la clause limitative de responsabilité est licite, même si elle ne dispense pas le vendeur de son obligation de délivrance d'une chose conforme à ce que l'acquéreur est en droit d'attendre . La Haute juridiction considère que, pour le vendeur professionnel qui cherche à limiter sa responsabilité à raison des défauts de conformité de la marchandise livrée, les juges du fond n'ont pas à rechercher, pour déclarer la clause opposable au l'acheteur, si ce dernier est un professionnel de même spécialité  . Une telle clause, stipulée entre professionnels, ne pourra être écartée que si elle revêt un caractère léonin    ou en cas de faute lourde   ou d'inexécution dolosive du vendeur . Ainsi, selon la Cour de cassation, malgré la stipulation, dans l'acte d'échange, d’une clause de pollution l'exonérant de tout recours de l'acquéreur en raison de l'état du sol et du sous-sol de l'immeuble vendu pouvant résulter de l'activité de distribution de carburants précédemment exercée, la société qui a échangé la parcelle de terrain litigieuse avec une autre société, qui l’a revendue à une autre, qui, elle-même, l'a donnée à bail à une tierce entreprise, engage sa responsabilité pour non-conformité, dès lors qu'elle a livré une parcelle polluée à l'acquéreuse, alors que celle-ci n’avait pas accepté un risque connu de pollution résiduelle et que le rapport technique joint à l'acte d'échange accréditait l'idée d'une dépollution complète du site . De même, entre professionnels de même spécialité, la clause du bon de commande indiquant “ véhicule vendu au marchand sans garantie ”ne peut faire obstacle à l'exigence de livraison d'un véhicule, promis en “ très bon état ” .

En outre, pour être opposable à l'acquéreur, la clause limitative de responsabilité doit viser spécifiquement l'obligation de délivrance conforme du vendeur, et non, par exemple, les vices cachés  . Par un arrêt remarqué, la Haute juridiction a posé le principe selon lequel en cas de résolution d'un contrat pour inexécution, les clauses limitatives de réparation des conséquences de cette inexécution demeurent applicables .

Dijon, 17 octobre 2017, LawLex201700001709JBJ, estimant que le menuisier qui livre une charpente traitée dès l'origine au moyen d'un produit inadapté à l'usage de cuverie du bâtiment auquel elle est destinée engage sa responsabilité contractuelle, même si l'utilisation des polychlorophénols dans le traitement des bois n'a été interdite que postérieurement aux travaux litigieux, dès lors que, dans le domaine spécifique de la production de vins, leurs effets néfastes étaient, à la date des travaux, connus de longue date, et que leur utilisation était déjà contre-indiquée.

Cass. 1re civ., 26 mai 1994, LawLex200500008757JBJ : le cas fortuit suppose nécessairement un événement extérieur à l'activité du débiteur de l'obligation.

Cass. 1re civ., 10 mars 1993, LawLex200500004981JBJ.  

Cass. com., 23 octobre 2012, LawLex201300000690JBJ. Pour un exemple de défaut non-apparent, V. Caen, 29 octobre 2009, LawLex201300000504JBJ : le défaut d'homologation du matériel vendu.

Cass. 1re civ., 10 mars 1993, LawLex200500004981JBJ, considérant que l'acheteur d'un véhicule présentant des défauts si apparents qu'ils ne pouvaient passer inaperçus, même pour un profane en matière automobile, n'est pas fondé par la suite à agir contre le vendeur pour manquement de ce dernier à son obligation de délivrance conforme, lorsqu'il apparaît que lesdits défauts rendent le véhicule concerné impropre à l'usage.

Cass. com., 26 novembre 2002, LawLex200500008873JBJ, relevant qu'un professionnel averti et au fait des exigences de la réglementation ne peut ignorer que la livraison d'un véhicule dont les caractéristiques correspondent à l'année modèle 1992 n'est pas conforme au bon de commande portant sur un véhicule de l'année modèle 1994, et contribue ainsi à la réalisation du préjudice subi. -  V. Cass. 1re civ., 20 mai 2010, LawLex201300000508JBJ, pour exemple dans lequel la qualité de professionnel de l'acquéreur a conduit la Cour à considérer que l'acceptation sans réserves valait également pour les défauts non apparents. 

Orléans, 28 mars 2024, LawLex202400002931JBJ.

Cass. 1re civ., 25 février 2016, LawLex201600000490JBJ.

Cass. com., 29 mars 2017, LawLex201700000698JBJ.

Cass. 1re civ., 24 novembre 1993, LawLex200300001216JBJ, JCP G, 1994, 390, obs. LEVENEUR ; Defrénois 1994, 818, obs. MAZEAUD.

Nîmes, 26 janvier 2024, LawLex202400003246JBJ.

Cass. 1re civ., 20 décembre 1988, LawLex202200000830JBJ, JCP 1989, II, 21354, obs. VIRASSAMY ; Defrénois 1989. 1418, obs. VERMELLE.

Paris, 15 janvier 2019, LawLex201900000071JBJ.

Cass. com., 4 novembre 2014, LawLex201400001239JBJ (cassation prononcée au visa de l'article 1603 du Code civil), qui retient que la clause limitative de responsabilité obligeant l'acheteur professionnel à former réclamation contre le vendeur du carburant au moment même de la livraison de celui-ci, doit être réputée non écrite dès lors qu'elle rend impossible toute action en réparation du préjudice résultant de l'utilisation, nécessairement postérieure, d'un carburant de mauvaise qualité.

Paris, 15 septembre 2006, LawLex201300000677JBJ.

Cass. 3e civ., 19 septembre 2019, LawLex201900001158JBJ, retenant que l'absence de raccordement d'un immeuble vendu comme étant relié au réseau public d'assainissement constitue un manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme, de sorte qu'il doit répondre de ce défaut de conformité sans pouvoir opposer aux acquéreurs une clause élusive de responsabilité s'agissant d'une caractéristique essentielle spécifiée par la convention des parties.

Cass. 3e civ., 30 septembre 2021, LawLex202100005513JBJ, D. actu. 28 octobre 2021, obs. LABELLE ; Constr.-Urb. 2021, 134, obs. SIZAIRE ; JCP N 2022, n° 21, 1168, obs. MEKKI ; RDC mars 2022, n° RDC200m0, obs. THIBIER ; LEDC décembre 2021, n° 200n3, 7, obs. ROBIN-SABARD ; JCP G 2021, 1310, n° 7, obs. VIRASSAMY.

Colmar, 5 juin 2024, LawLex202400004447JBJ.

Cass.1re civ., 19 octobre 2004, LawLex200400003422JBJ.

Cass. com., 26 avril 2018, LawLex201800000634JBJ, rendu en dehors du domaine de la vente. 

Bordeaux, 25 septembre 2023, LawLex202400002510JBJ.

Cass. 1re civ., 28 novembre 2012, LawLex201600000177JBJ, énonçant qu'une commune, tenue de fournir une eau propre à la consommation, ne peut s'exonérer de cette obligation contractuelle de résultat, que totalement, par la preuve d'un événement constitutif d'un cas de force majeure, ou, partiellement, par celle de la faute de la victime.

Cass. com., 26 novembre 2002, LawLex200500008873JBJ, retenant qu'un professionnel averti ne peut ignorer que la livraison d'un véhicule dont les caractéristiques correspondent à l'année modèle 1992, n'est pas conforme au bon de commande portant sur un véhicule de l'année modèle 1994 et contribue à la réalisation du préjudice subi.

Nîmes, 13 janvier 2005, LawLex200500009716JBJ.

Toulouse, 29 octobre 2019, LawLex201900001311JBJ : l'acheteur d'une cuisinière à bois, composée de plusieurs éléments dont un four, n'est pas fondé à invoquer un manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme, s'il a utilisé le four litigieux dans des conditions signalées comme inadaptées par sa notice, c'est-à-dire en période estivale, avec le circuit de chauffage fermé.

Cass. 1re civ., 7 mars 2006, LawLex200600001983JBJ.

Cass. com., 5 juin 2012, LawLex201600000179JBJ.

Contrats d'affaires

178. Responsabilité du vendeur.(1)

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