Contrats d'affaires

Le domaine de compétence professionnel de l'acheteur influe également sur la possibilité pour le vendeur d'invoquer une clause d'exclusion de garantie. 

Les juges considèrent que l'acheteur qui exerce dans la même spécialité que son vendeur est présumé avoir décelé les vices de la chose. Par conséquent, les clauses de non-garantie ou limitant la garantie des vices cachés lui sont applicables . La qualification d'"acheteur de même spécialité" a notamment été retenue s'agissant du boulanger qui a acquis son fonds de commerce d'un autre boulanger , d'un garagiste achetant un véhicule à un autre garagiste  ou de parties qui ont déjà été en relation, jouant alternativement le rôle de sous-traitant et d'entrepreneur dans le cadre de marchés publics . Le  fabricant de machines destinées aux exploitants forestiers et le vendeur  spécialisé dans le commerce de ce type de matériels, dont il assure  l'entretien, sont également des professionnels de même spécialité . Une enseigne de distribution multi-activités qui se prétend, sur son site internet, spécialiste de la vente d'électroménager peut également se voir reconnaître de la même spécialité qu'un fabricant de lave-linge et opposer une clause limitative de garantie .

Cette présomption n'est toutefois pas irréfragable, contrairement à celle qui pèse sur le vendeur professionnel, mais peut être renversée. Ainsi, la présomption de connaissance du vice tombe lorsque l'acheteur de même spécialité que son vendeur se trouve face à un vice indécelable  ou lorsqu'il est établi que le vendeur était de mauvaise foi au moment de la vente . Tel est le cas du vendeur qui connaissait le vice et l'a dissimulé à l'acheteur  ou qui a réparé la chose affectée d'un vice au mépris des règles de l'art et des préconisations d'un expert avant de la revendre .

Les juges se montrent moins sévères face à un acheteur qui, certes professionnel, ne connaît pas aussi bien la chose que son vendeur ou qu'un autre acheteur qui serait de la même spécialité que ce dernier . L'acheteur professionnel qui n'exerce pas dans la même spécialité que son vendeur n'est pas réputé connaître les vices de la chose au moment de la vente et le vendeur ne peut invoquer à son encontre une clause limitative de responsabilité dès lors qu'il ne dispose pas des compétences techniques nécessaires pour déceler les vices affectant la chose vendue .

La qualité d'"acheteur de spécialité différente", est attribuée à l'acheteur qui exerce son activité professionnelle dans un domaine autre que celui du vendeur. Il en va ainsi de l'agriculteur qui achète à un pépiniériste  ou à un vendeur d'engins agricoles , de la société civile immobilière qui contracte avec un artisan-maçon ayant réalisé une toiture défectueuse , du fabricant de roulement à billes qui agit contre une société spécialiste de la plasturgie , d'un menuiser qui se retourne contre un électricien , d'une société qui fabrique et vend du béton prêt à l'emploi qu'elle achète à professionnel de la vente de camions  ou d'une société qui produit de l'électricité et agit en garantie contre un fabricant d'éoliennes . De même, le fait, pour un acheteur, dans le cadre de son activité de terrassement et de débouchage, notamment de réseau, d’avoir acheté un véhicule comprenant un équipement d’aspiration incluant équipement et outils pneumatiques, ne fait pas de celui-ci un professionnel de la même spécialité que son vendeur, de sorte qu'il peut, en cas de vice caché établi, se prévaloir de l'article 1641 du Code civil, sans que ce dernier puisse invoquer le bénéfice d'une clause de non-garantie .

Le juge peut également reconnaître une spécialité différente à des parties qui, bien qu'exerçant dans le même domaine, mettent en oeuvre des compétences techniques qui ne sont pas comparables. Aussi, l'activité de loueur de véhicules de chantier de toutes marques, exercée par une société qui confie à ses locataires l'entretien des véhicules n'a-t-elle pas le même objet que le concessionnaire, qui pratique l'achat pour revendre et effectue des travaux de réparation . La solution vaut aussi pour le crédit-bailleur  ou le courtier en automobiles d'occasion  dans ses rapports avec un concessionnaire automobile. De même, un fabricant de régleurs en charge ne peut invoquer une clause de non-garantie à l'encontre d'un fabricant de transformateurs  .

Paris, 26 février 1999, LawLex200600001782JBJ, vente entre professionnels du tissu ; Cass. 1re civ., 3 octobre 2000, LawLex200700000837JBJ, Resp. civ. et assur. 2001, n° 27 ; à plus forte raison lorsque l'acheteur est confronté à un vendeur occasionnel. - V. aussi, Cass. 1re civ., 27 novembre 2019, LawLex201900001516JBJ.

Douai, 27 janvier 2005, LawLex200700000849JBJ.

Cass. 1re civ., 8 octobre 1991, LawLex200500005460JBJ, rejetant l'application d'une clause impartissant à l'acquéreur un délai plus court que la prescription légale de l'article 1648 du Code civil pour agir en garantie des vices cachés.

Cass. com., 19 mars 2013, LawLex201300000706JBJ, JCP G, 2013, 705, obs. PILLET ; D. 2013, 1947, obs. HONTEBEYRIE ; RTD com. 2013, 323, obs. BOULOC ; RDC 2013, 967, obs. LE BOURG et QUEZEL-AMBRUNAZ ; RDC 2013, 1360, obs. BORGHETTI ; Cass. civ. 3e, 5 décembre 2006, LawLex200700000894JBJ, RJDA 2007, n° 466 ; Bourges, 15 janvier 2009, LawLex201200001813JBJ.

Cass. 1re civ., 27 janvier 1993, LawLex200500005482JBJ, Contrats Conc. Consom. 1993, n° 131, obs. LEVENEUR, vices affectant des plants de poiriers.

Amiens, 31 janvier 2019, LawLex201900000171JBJ.

Cass. 3e civ., 27 septembre 2000, LawLex200500004356JBJ, D. 2001, 2628, obs. STORCK ; RJDA 2001, n° 139.

Rennes, 8 avril 2010, LawLex201200001831JBJ.

Agen, 7 novembre 2011, LawLex201200000921JBJ.

Poitiers, 27 janvier 2012, LawLex201200001604JBJ

Montpellier, 10 janvier 2012, LawLex201200001893JBJ.

Amiens, 14 mai 2024, LawLex202400003734JBJ.

Cass. com., 23 juin 1992, LawLex200500005476JBJ, Contrats Conc. Consom. 1992, n° 220, obs. LEVENEUR ; 3 février 1998, LawLex200500004305JBJ, D. 1998, 455, obs. REVEL ; JCP G, 1998, I, 187, obs. VINEY ; D. aff. 1998, 329, obs. FADDOUL ; RJDA 1998, n° 700.

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Paris, 6 décembre 2002, LawLex200700000841JBJ.

Cass. 1re civ., 27 novembre 2019, LawLex201900001516JBJ, Contrats, Conc. Consom. 2020, n° 18, obs. LEVENEUR.

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Cass. com., 22 juin 1993, LawLex200500004344JBJ, RJDA 1994, n° 18 ; Cass. 1re civ., 14 janvier 1997, LawLex200300003026JBJ, même si l'acheteur a pris un risque en utilisant un produit innovant ; Paris, 4 février 1997, LawLex200700000844JBJ ; Cass. com., 23 novembre 1999, LawLex200500004308JBJ, RJDA 2000, n° 255 ; Pau, 23 novembre 1999, LawLex200700000848JBJ ; Amiens, 31 janvier 2019, LawLex201900000171JBJ, vice indécelable sans recourir à des investigations que l'usage ne commande pas.

Cass. 3e civ., 7 mars 1990, LawLex200500005451JBJ ; Cass. com., 24 novembre 1992, LawLex200500004341JBJ, RJDA 1993, n° 102.

Cass. com., 7 novembre 2006, LawLex200700000790JBJ, RDI 2007, 330, obs. TRÉBULLE.

Cass. 1re civ., 13 décembre 2005, LawLex200600001647JBJ. - V. aussi Pau, 1re ch., 29 octobre 2019, LawLex201900001313JBJ, vice résultant de l'installation, par le vendeur, d'un appareillage non conforme sur le véhicule vendu.

238. Qualité de l'acheteur.